A nouveau, Halsey n’était pas dupe et savait qu’il abordait le sujet des demoiselles d’honneur pour la piquer, la faire réagir, voir comment elle agissait lorsqu’il prétendait être attirée par une autre. Elle le savait, tout simplement parce qu’elle se complaisait dans la même ligne de conduite que lui, jouant avec ses nerfs dès qu’elle en avait l’opportunité afin de voir ses réactions. Elle prenait donc sur elle de ne pas lui donner satisfaction, allant même jusqu’à afficher une moue amusée alors qu’il annonçait vouloir passer le restant de la soirée en compagnie de l’une ou de l’autre jeune femme lui lançant des œillades enflammées que la brune avait repéré depuis un moment déjà. C’est ce moment que choisi Jack pour débarquer, interrompant une danse rapprochée qui était parvenue à mettre à mal l’aplomb de Halsey qui s’était sentie un rien ébranlée par l’étreinte de Clyde qui lui n’avait pu retenir un petit sourire, satisfait de son petit effet. L’homme d’affaire lui annonça donc devoir écourter la fête afin de se rendre à l’étranger, et après une petite séance de culpabilisation, Halsey le regarda disparaître avec un enthousiasme qu’elle peinait à réfréner. Elle n’aurait pas à subir sa nuit de noce en sa compagnie et le fait qu’il déserte les lieux lui laissait donc la possibilité de faire autre chose de sa soirée que de saluer des convives dont elle n’avait cure en conservant un sourire forcé qui allait forcément lui donner des tensions dans la mâchoire le lendemain. Attirant Clyde à la table où ils étaient encore quelques instants plus tôt, elle s’appuya contre celle-ci en attrapant une coupe de champagne, levant les yeux au ciel en l’entendant parler d’une Chloe qu’il comptait apparemment ramener avec lui, sauf que la brune avait une toute autre idée de la façon dont les choses allaient se dérouler en partant de cette salle de mariage. Et Chloe ne faisait pas partie du tableau – d’autant qu’elle n’avait pas été foutue d’accorder correctement ses chaussures à sa robe afin de parfaire l’harmonie à laquelle Halsey tenait tant. “Mes engagements envers Jack ? Tu veux dire, de la même manière que tu vas tenir tes voeux et l’aimer pour toujours ?” C’était très bas de mettre ainsi en lumière ce qui allait se passer d’ici quelques mois, et elle lui rendit son sourire narquois sans se démonter outre mesure. « Ce n’est pas la même chose. » Précisa-t-elle, même s’il avait raison de mettre en doute son éthique à elle concernant ce pauvre Jack. Lorsqu’il réaliserait ce qui s’était préparé dans son dos durant tout ce temps, il risquerait de tomber très haut. Attrapant son poignet afin de vérifier l’heure qu’il était, elle joua la carte de la mariée dévastée par l’abandon de son mari en ce jour si important, lui demandant de la ramener chez elle maintenant – pourquoi rester dans les parages alors qu’il n’y avait rien de plus pour eux ici ? Plus besoin de jouer la comédie plus longtemps, et c’était tant mieux. “Avec ce que tu m’as fait boire j’te ramène pas à l’autre bout de la ville. Je tiens à ma vie.” Quoi ? « Mais t’as bu deux coupes de champagne, comment tu peux craindre pour ta vie ? » Demanda-t-elle en se retenant d’éclater de rire, sachant très bien que le brun n’avait guère la même tolérance à l’alcool qu’elle, puisqu’il n’était pas un grand buveur déjà à la base. “Mais si tu tiens vraiment à ce qu’on tombe la bouteille, y a de la place sur mon canapé.” Évidemment qu’elle y tenait, il était hors de question qu’elle passe la soirée seule et à son sens, ils avaient tous les deux quelque chose à fêter aujourd’hui. Mais son canapé, franchement ? « On rediscutera d’où je dormirai ce soir. » Lança-t-elle avec un brin de malice dans la voix, laissant un sourire franc étirer ses lèvres, dévoilant ses dents blanches alors qu’une part d’elle savait déjà qu’elle n’aurait ni l’envie ni le courage de rentrer chez elle ce soir. “Au moins j’pourrai toujours proposer à Chloe de passer après.” D’accord, là il l’avait mérité. En toute discrétion – toujours – elle lui envoya un coup de coude dans les côtes, levant un sourcil dans sa direction avant de terminer sa coupe d’une traite et de s’emparer de la bouteille. « Allez, viens. » Qu’il ne se fasse pas prier, ils avaient encore toute la soirée devant eux. Décidée à ne pas donner la moindre explication à ses invités – le personnel était là pour ça, et puis c’était la faute de Jack alors elle n’allait certainement pas endosser la moindre responsabilité – elle l’attira derrière le rideau camouflant les activités des serveurs, sachant que cet endroit menait à une sortie de secours qui leur permettrait de s’éclipser sans attirer l’attention. Se faufilant parmi les différents membres du staff engagé pour la soirée – qui n’avaient pas la moindre idée que la soirée était entrain de toucher à une fin précoce – sa main se glissa dans celle du brun afin qu’il la suive de près. Une certaine déformation professionnelle poussait toujours Halsey à vérifier toutes les sorties d’un établissement dans lequel elle allait passer du temps, au cas où. « Dis-moi que t’as trouvé une place tout près… » Souffla-t-elle dans une légère grimace, regrettant d’avoir jeté son dévolu sur des chaussures avec des talons aussi hauts.
“Ce n’est pas la même chose.” Il y avait donc plusieurs degrés d’engagement différents, selon lesquels le mensonge était plus ou moins acceptable - pourvu qu’il y ait de l’argent à la clé, notamment ? Clyde leva les yeux au ciel devant la remarque de la brune qu’il n’avait pas besoin de convaincre qu’elle venait, à travers ce mariage, de se lancer dans une machination qui n’avait rien d’honnête - alors au diable avec les commentaires sur les engagements, les valeurs, et tout ce dont Halsey était elle-même dépourvue. Alors qu’elle ne semblait pas vraiment lui laisser le choix et venait de lui intimer de la ramener chez elle - la pauvre, le départ de son mari l’avait éprouvée - il se ravisa au dernier moment, prétextant un degré d’alcoolémie trop élevé pour faire le taxi à travers la ville, ce qui n’était pas tout à fait faux par ailleurs. “Mais t’as bu deux coupes de champagne, comment tu peux craindre pour ta vie ?” “Ne crois pas que j’ai passé la soirée à t’attendre pour en profiter.” Était-il capable de pousser le running gag jusqu’au bout ? Absolument, ne serait-ce que pour voir la brune pincer un peu plus ses lèvres sous le coup de l'agacement. “Chloe aime beaucoup le champagne, elle aussi.” C’était bas, et surtout très faux, même s’il avait en effet dû se fondre dans la masse et avaler quelques verres au fil de la soirée et des conversations dans lesquelles il s’était retrouvé aspiré sans pouvoir en réchapper. Pourtant, malgré le peu d’attrait qu’il portait à la boisson, il était réellement tenté par l’idée de se retrouver enfin seul avec Halsey et de pouvoir souffler après cette journée qui avait contre toute attente été éprouvante pour lui aussi. “On rediscutera d’où je dormirai ce soir.” Elle lui offrit un sourire et un regard malicieux qu’il fit mine de ne pas relever, même si la pique l'atteignit plus directement qu’elle ne l’avait sans doute voulu - après tout, ce n’était pas la première fois que la brune jouait de ses charmes pour tenter de voir jusqu’où il pouvait craquer, ce qui n’avait jamais fonctionné jusqu’à ce jour. “Je t’appellerai un taxi sinon” qu’il lâcha d’un ton neutre qui ne visait qu’à voir si Halsey sautait sur la remarque pour pousser son petit jeu plus loin, ou s’il n’était qu’en train d’imaginer des sous-entendus que la brune n’avait jamais réellement formulés ainsi.
Sans qu’il n’ait d’autre mot à dire quant aux nouveaux plans de la jeune mariée, il se laissa entraîner tandis qu’elle lui prenait la main. “Allez, viens.” Silencieux comme jamais, il la suivit sans se faire prier, peu étonné que la brune ait comme lui repéré les points de sortie qu’il était toujours judicieux d’avoir en tête - même si le mariage n’était pas supposé tourner au vinaigre le jour j, tout de même. Alors qu’ils sortaient enfin de la grande bâtisse dans lequel le mariage avait eu lieu, elle se tourna vers lui dans une grimace que le brun ne tarda pas à comprendre une fois qu’elle jeta un coup d’oeil à ses pieds. Aïe. “Dis-moi que t’as trouvé une place tout près…” Il grimaça à son tour, à la fois désolé et amusé. “Pas vraiment.” Lui-même aurait aimé s’éviter de devoir retrouver sa voiture au milieu de dizaines d’autres alors que la nuit noire compliquait désormais la tâche, mais il n’avait pas été dans les premiers à arriver - ce qui aurait été presque suspicieux, et qu’il s’était donc bien gardé de faire. “Je ne suis ni de la famille ni des amis proches, je n’allais pas arriver en avance quand même.” Il leva les bras en signe d’une impuissance qui n’était que feinte - il n’avait pas besoin de mettre un mot sur la relation qu’il partageait avec la brune, car elle était bien plus complexe qu’une simple amitié. Il finit par plonger la main dans sa poche de costume pour en ressortir les clés de sa voiture, qu’il bipa pour l'apercevoir au loin - trop loin pour les pieds de la brune, sans doute. Alors, avant même qu’elle n’ait pu s’en plaindre davantage, il se pencha et la saisit sous les genoux pour l’attirer à lui, manquant de s’aveugler avec la masse de tissu qu’il avait relevée en même temps que la brune. “Il paraît que c’est la tradition de porter la mariée comme ça.” Tradition qui ne lui déplaisait pas tant, maintenant qu’il se devait de l’appliquer à la place du vrai marié qui s’était éclipsé avant de pouvoir l’accomplir lui-même. “T’y habitues pas trop.” Qu’il ne lui vienne pas l’idée de compter sur lui pour la porter ainsi dès que ses escarpins lui écorcheraient un peu trop les pieds.
Clyde n’était pas dupe et savait forcément que le degré d’éthique de la brune était variable et facilement adaptable en fonction des situations et surtout de ce que chacune d’entre elles avaient à lui apporter. Et il le savait tout simplement parce qu’il n’était pas beaucoup mieux qu’elle sur cet aspect-là, raison pour laquelle ils s’entendaient si bien et se retrouvaient désormais à comploter dans le dos d’hommes naïfs tels que Jack & co. Pour l’instant, il était leur premier gros coup mais la brunette savait qu’ils ne s’arrêteraient pas là, peu importe le montant du chèque qu’elle obtiendrait lors du divorce. C’était bien cette partie qui l’excitait le plus, tout comme la perspective d’être enfin délivrée des obligations inhérentes au devoir d’une mariée parfaite en tout point, ce qu’elle était bien évidemment très loin d’être. C’était très mal de penser de cette manière alors que le mariage en lui-même venait à peine d’être acté, mais le marié avait pris la tangente et à présent, la brunette n’attendait plus qu’une chose ; disparaître aux côtés de Clyde et terminer la soirée avec lui, loin de tous ces invités qu’elle connaissait à peine, voire pas du tout, ainsi que des faux-semblants qui avaient ponctué cette journée factice. “Ne crois pas que j’ai passé la soirée à t’attendre pour en profiter.” Le jeune homme acceptait donc de reprendre le volant mais refusait de la ramener jusque chez elle, prétendant avoir trop abusé du champagne en son absence, ce qu’elle ne croyait pas une seule seconde. Pas assez pour être dans l’état dans lequel il prétendait être, tout du moins. “Chloe aime beaucoup le champagne, elle aussi.” La brune leva les yeux au ciel, signe que le comique de répétition n’était pas le genre d’humour auquel elle était sensible et surtout pas lorsqu’il s’engageait sur la pente de séduction d’une autre femme telle que l’une de ses demoiselles d’honneur. « C’est ça oui. » Rétorqua-t-elle en glissant bien malgré elle un regard en direction de ladite Chloe qui continuait à jeter quelques regards dans leur direction, mais qui semblait avoir compris que l’affaire ne serait certainement pas conclue ce soir. Il lui offrit la possibilité du canapé mais Halsey décida de rebondir dessus en laissant planer volontairement le doute sur l’endroit où elle finirait ou non par dormir, armée d’un sourire éclatant et d’un regard amusé. “Je t’appellerai un taxi sinon” Cette issue ne lui plaisait que moyennement et la jeune femme releva les yeux vers lui, une lueur d’hésitation dans le regard qui laissa très vite place à l’air espiègle qu’elle arborait en permanence avec lui. « On verra Wakefield, la nuit ne fait que commencer. » Lança-t-elle avant de lui attraper la main et de l’entraîner dans le méandre des couloirs du bâtiment dans lequel avait lieu la fête qu’elle connaissait désormais par cœur pour avoir mémorisé chaque sortie, par habitude. Une part inconsciente d’elle s’attendait à voir débarquer les flics ou une victime lésée à chaque moment de sa vie et cette possibilité était le fondement même de l’adrénaline à laquelle elle se shootait en continuant à vivre de cette façon, frôlant l’illégalité sans jamais y entrer totalement. S’éclipser était donc devenu une autre spécialité et ils arrivèrent à l’extérieur en un rien de temps, débarquant sur l’arrière et par conséquent, un peu loin du parking qui ne brillait déjà pas par sa proximité. Un détail qui n’avait pas chiffonné un seul instant, du moins jusqu’à ce qu’elle réalise à présent que la distance qui la séparait de la voiture de Clyde allait forcément mettre à mal ses pieds déjà douloureux de par les talons aiguilles qu’elle portait depuis tôt ce matin. Armée de sa plus belle grimace, elle releva le nez vers lui en lui demandant s’il avait trouvé une place tout près, même si elle se doutait déjà de la réponse. “Pas vraiment.” Répliqua-t-il en faisant la moue lui aussi, apparemment compréhensif quant à ce problème pourtant typiquement féminin. “Je ne suis ni de la famille ni des amis proches, je n’allais pas arriver en avance quand même.” Un petit rire s’échappa des lèvres de la brune face à son geste désemparé, pas vraiment étonnée qu’il ait poussé le vice jusqu’à réfléchir à ce genre de menu détail. Rien n’était jamais laissé au hasard avec lui, et c’était en grande partie pour ça qu’elle se sentait pleinement en confiance dans le genre de business qu’ils avaient désormais décidé de mener à deux, joignant leurs forces plutôt que de bosser séparément. « T’aurais quand même pu prétendre faire partie du staff, ils avaient une place de choix. » Indiqua-t-elle d’un geste, le provoquant ouvertement sur sa façon de procéder, juste pour le principe. « C’est ce que moi j’aurais fait. » Ajouta-t-elle en admirant ses ongles, mine de rien, jamais lassée de le titiller sur ce qui était pourtant l’un de ses points fort. Trop d’assurance, ça n’était jamais bon. Clyde finit par attraper les clés du véhicule et les phares allumés au loin indiquèrent que la distance à parcourir était effectivement du genre sportive, et la brunette se prépara à soupirer longuement avant de se sentir soulever dans les airs sans avoir rien compris à ce qui lui arrivait, se rattrapant par réflexe au cou du brun qui l’observait désormais d’un air malicieux. “Il paraît que c’est la tradition de porter la mariée comme ça.” En effet, mais de là à ce qu’il se sente obligé de suivre cette fameuse tradition, il y avait un pas. La brunette éclata de rire en réalisant que la soirée donnant suite à son mariage avec Jack était aux antipodes de ce à quoi elle s’était préparée, même si c’était loin de lui poser problème. « J’ignorais qu’un grand romantique se cachait là-dessous, on en apprend tous les jours. » Lança-t-elle en ajustant sa position qui était loin d’être aussi confortable que ce que l’on pouvait imaginer, s’accrochant davantage à lui tout en relevant ses yeux azurs dans sa direction, une lueur amusée brillant dans ceux-ci. “T’y habitues pas trop.” Trop tard. Un large sourire étira ses lèvres et elle posa la tête sur son épaule, profitant de l’instant pour se reposer après cette journée de dur labeur. « Pourquoi ? On dirait que tu as fait ça toute ta vie. » Ironisa-t-elle avant de reprendre un air un peu plus sérieux tandis qu’il avançait avec une aisance plutôt étonnante en direction de sa voiture. « Si tu trouves que je pèse un peu trop lourd, c’est la faute de la robe, pas la mienne. » Cru-t-elle bon de préciser, juste au cas où. La moindre remarque sur son poids lui coûterait très cher, même si le ton de la conversation était désormais à la plaisanterie puisqu’ils n’avaient plus à donner le change devant quiconque désormais.
La simple présence de la jeune femme à ses côtés suffisait à embrumer parfois son esprit qu’il voulait détaché en toute occasion, mais le regard espiègle avec lequel elle jouait depuis quelques instants aidait encore moins à réfréner les idées du brun. “On verra Wakefield, la nuit ne fait que commencer.” Une plaisanterie parmi tant d’autres, que Clyde releva d’un haussement de sourcils comme si cela ne lui faisait rien de plus que toutes les fois où Halsey prenait un malin plaisir à le taquiner. Sauf que ce jour-là, à la voir pétillante et accrochée au bras d’un autre des heures durant, les mots que prononçaient la brune avaient une toute autre saveur dont son acolyte n’arrivait réellement à discerner les sous-entendus. Une part de lui, grandissant un peu plus chaque jour, ne pouvait s’empêcher de voir dans cette soirée si spéciale une proximité tant attendue et jamais pourtant avouée, ce que sa raison s’efforçait de refouler sous couvert de leur relation purement professionnelle, d’autant plus un jour comme celui-ci. Ce mariage était un leurre, une affaire, la première pierre à l’édifice d’une grosse arnaque, et rien d’autre n’était supposé compter pour aucun d’eux à cet instant - surtout pas les sentiments et les émotions, qui n’avaient en théorie pas leur place dans ce genre de collaboration.
Alors qu’ils s’éclipsaient enfin par l’arrière de l’immense bâtisse sans que personne n’ait la misérable idée de les en empêcher, Clyde dût se rendre à l’évidence - il était garé bien plus loin qu’il ne l’aurait souhaité, maintenant qu’il était accompagnée d’une mariée perchée sur des talons dont la hauteur suffisait à le pâlir. Étrangement, ses regrets s’envolèrent instantanément lorsqu’Halsey crut bon de critiquer ses choix stratégiques - ce qui était une bien piètre stratégie de sa part à elle, si elle souhaitait vraiment qu’il joue le taxi et réponde à ses moindre désirs jusqu’au bout de cette journée interminable. “T’aurais quand même pu prétendre faire partie du staff, ils avaient une place de choix. C’est ce que moi j’aurais fait.” Il roula des yeux faussement excédés, et pourtant peu étonnés qu’elle trouve encore quelque chose à redire. Après tout, elle avait joué à la mariée parfaite toute la journée et n’avait pas eu l’occasion de déverser sa frustration sur quiconque, alors il avait le (dé)plaisir de servir de bouc émissaire sujet aux moindres remarques, maintenant qu’elle n’avait plus à jouer de rôle devant l’ensemble des invités. “Ça tombe bien que tu choisisses pas pour moi, alors” lâcha-t-il avec un sourire amusé qui ne prenait que peu ombrage de la teneur des critiques de la brune. Et sans plus de cérémonie, alors qu’elle ne méritait sans doute que moyennement ce qu’il s’apprêtait à faire, Clyde la souleva dans ses bras avant de prendre la direction de la voiture qu’il avait enfin localisée. “J’ignorais qu’un grand romantique se cachait là-dessous, on en apprend tous les jours.” La remarque n’avait rien de véridique, et cela ne faisait de doute pour aucun d’eux, quand bien même ce geste pouvait en effet porter à confusion - à croire que la brune le poussait à dévier des sentiers battus dans lesquels il se complaisait pourtant habituellement. “Il y a beaucoup de choses que tu ne sais pas sur moi.” Son romantisme n’en faisait pas partie, mais Halsey restait libre d’imaginer toutes les choses auxquelles il pouvait faire référence. Si la répartie du brun était rhétorique, elle n’en restait pas moins vraie - autant qu’ils puissent se connaître, ils restaient pourtant des étrangers l’un pour l’autre sur de nombreux points, y compris la manière dont ils se considéraient mutuellement.
Pour aussi amusant que ce petit jeu soit, il s’agissait là d’une fin spéciale à une journée qui l’était tout autant, et il n’était pas question qu’Halsey imagine un seul instant que Clyde allait lui servir de chevalier servant au-delà de minuit. “Pourquoi ? On dirait que tu as fait ça toute ta vie.” A vrai dire, aucune femme n’avait encore eu l’honneur de terminer dans ses bras de cette manière, mais Halsey pouvait aisément se passer de cette précision qui ne la rendrait que plus sûre d’elle, et passablement agaçante au passage. “Si tu trouves que je pèse un peu trop lourd, c’est la faute de la robe, pas la mienne.” Cette fois-ci, Clyde ne put retenir un éclat de rire, quand bien même il n’avait aucun mal à avancer sur ce qui n’était finalement qu’une centaine de mètres - autrement dit, cela restait dans ses cordes, et il survivrait. “Tu notera que c’est pas moi qui ait fait la remarque…” Et il n’aurait pas osé, bien trop certain de se prendre un retour de bâton - qu’elle lui avait si aisément tendu, et qui était désormais bien trop tentant pour ne pas saisir. Il ne lui fallut que quelques dizaines de secondes supplémentaires, tout au plus, pour atteindre la voiture et déposer délicatement la jeune femme à terre - presque à regret, étonnamment. Le brun se ressaisit pourtant bien vite, passant une main ferme sur ses vêtements pour les défroisser de leur aventure nocturne, avant de s’installer à l’avant et de laisser tout le soin à Halsey de s’occuper de sa robe et de toute la quantité de tulle absolument inutile qu’elle avait choisi, et dont elle était par conséquent responsable. Malheureusement, l’affaire semblait être moins aisée maintenant qu’il s’agissait de se faufiler dans l’embrasure de la portière. “C'est bon, la princesse passe la porte ?” L’ironie était plus que palpable dans sa remarque, mais il profitait encore des derniers instants pour jouer de cette vision d’Halsey, si particulière, engoncée dans sa robe blanche duveteuse qui reflétait tout sauf la femme qu’il connaissait - ou pensait connaître. “Je découpe la robe, sinon.” Sacrilège, sans doute, mais auquel il se prêterait avec un plaisir dissimulé tout particulier.
S’enfuir de la réception incombait en général aux mariés, mais puisque Halsey ne suivait jamais les règles, elle attirait avec elle son acolyte de toujours, un air mutin sur le visage. Cette cérémonie n’avait de toute façon rien de bien conventionnelle – même si le principal intéressé l’ignorait – et à présent, la brunette élaborait déjà des plans bien plus intéressants pour le reste de la soirée. Était-il judicieux de faire l’impasse sur les civilités en s’évaporant avec lui ? Sans doute pas. Et pourtant, la jeune femme ne pouvait l’empêcher et se réjouissait déjà de la suite qu’elle savait d’hors et déjà être différente de tous leurs autres moments loin des regards. Elle pouvait sentir la tension entre eux et n’ignorait pas les regards qu’il avait posé sur elles durant la journée, surtout lorsqu’elle s’abandonnait à son rôle de future femme dévouée alors qu’elle ne pensait qu’à l’homme qui les avait présentés. En dépit de ce qu’elle ressentait au fond d’elle, Halsey conservait le même air joueur et provocateur qu’elle avait en toute circonstance, ignorant tout de ce qui pouvait bien se passer dans l’esprit de Clyde. Qu’attendait-il d’elle ? Du reste de cette soirée ? Les questions demeuraient sans réponses et la jeune femme palliait l’incertitude par la plaisanterie alors qu’ils se dirigeaient vers le parking des invités sur lequel il avait jugé opportun de se garer par soucis de discrétion, ce qui était digne de son souci du détail mais particulièrement douloureux pour la brunette qui voyait son sourire se transformer en grimace à chaque pas supplémentaire en direction de cette voiture. Masquant ce désagrément par une énième boutade agrémentée d’une moue sarcastique – une fois n’était pas coutume – la brune récolta un “Ça tombe bien que tu choisisses pas pour moi, alors” désinvolte de la part du jeune homme qui l’observait avec un amusement non dissimulé. Elle s’apprêta à répliquer, mais Clyde lui coupa l’herbe sous le pied en la soulevant d’un geste calculé afin de lui éviter de marcher davantage. Il était rare que la jeune femme soit suffisamment surprise pour n’avoir rien à dire, mais ce fût le cas l’espace de quelques secondes, le temps pour elle de rassembler une contenance et de lui concéder un romantisme qu’elle ignorait jusque-là – si tant était qu’une telle chose fasse réellement partie du prisme de sa personnalité. “Il y a beaucoup de choses que tu ne sais pas sur moi.” Oh. Voilà un terrain sur lequel ils s’aventuraient rarement et pourtant, la brune ne pouvait résister à repousser les limites, une fois de plus. « Comme quoi, Wakefield ? » Elle releva les yeux vers lui sans cesser de se tenir à lui, une lueur de défi dans le regard. Lui avouerait-il un secret jusque là connu de lui seul ? Ou inventerait-il une histoire saugrenue pour apaiser sa curiosité ? Elle ne le saurait jamais, mais l’envie d’en apprendre davantage demeurait bel et bien présente. “Tu notera que c’est pas moi qui ait fait la remarque…” Lança-t-il dans un éclat de rire spontané alors qu’Halsey se dédouanait du poids qu’elle devait peser avec cette robe atrocement lourde, fronçant le nez alors qu’il entrait dans son jeu en laissant planer le sous-entendu. « Et encore heureux pour toi. » Conclut-elle en desserrant son étreinte alors qu’il se rapprochait du véhicule et en se laissant déposer au sol telle la princesse qu’elle prétendait être aujourd’hui. “C'est bon, la princesse passe la porte ?” Clyde semblait avoir lu dans ses pensées justement et, relevant un œil vers lui, elle secoua la tête d’un air désabusé. Force était de constater que sa voiture n’était absolument pas faite pour accueillir une robe de créateur comme la sienne – abstraction faite de son goût pour le démesuré – et que l’espère de jupon donnant sa forme à la robe rendait la chose littéralement impossible. « T’avises pas de te foutre de moi. » Marmonna-t-elle en cherchant un moyen de faire passer l’amas de tissu, persuadée qu’à ce stade il lui aurait fallu des connaissances accrues en mathématiques pour résoudre le problème. “Je découpe la robe, sinon.” Un air horrifié apparu sur les traits de Halsey, davantage choquée à l’idée de découper une robe à ce prix – et sur mesure – que par un quelconque attachement à celle-ci ou à ce qu’elle pouvait bien représenter. « Je vais l’enlever maintenant. » Décida-t-elle en se tournant, lui offrant ainsi son dos et ses innombrables boutons à détacher pour lui offrir la liberté et la continuité de cette soirée pleine de promesses, quelles qu’elles soient. Encore une fois, cette tâche incombait normalement au marié et s’effectuait dans l’intimité de la chambre, mais Halsey se fichait bien des traditions liées à un mariage factice et se débarrasser de cette robe sur le parking de la réception ne lui posait pas le moindre problème. « Tu te sens à la hauteur ? » Lui demanda-t-elle en tournant légèrement la tête vers lui, se demandant s’il allait encore une fois la suivre dans la folie ou tout simplement la jeter dans le coffre afin qu’ils disparaissent comme deux voleurs dans la nuit.
Si leurs échanges se teintaient souvent de moqueries et de mystère auquel aucun d’eux ne se dérobait jamais, les regards qu’ils se lançaient ce soir en disaient pour une fois bien plus long que les mots qui franchissaient la barrière de leurs lèvres. “Comme quoi, Wakefield ?” Comme beaucoup de choses, qu’il ne lui avouerait ni tout de suite, ni demain, ni jamais - quand bien même il avait appris qu’il ne fallait jamais dire jamais, et encore plus lorsqu’il s’agissait d’Halsey. La jeune femme était entrée dans sa vie telle une tornade qui avait tout bouscoulé tandis qu’il lui avait laissé le champ libre pour complexifier en un clin d’oeil son existence, tout autant qu’elle la rendait mille fois plus exaltante. “Tu penses vraiment que tu vas réussir à me soutirer des infos aussi facilement ?” Elle pourrait, mais il savait se contenir, tout de même. “Il va falloir être plus convaincante.” Une nouvelle fois, il lui laissait le champ libre quant à l’interprétation de ses mots, qu’il ponctua en haussant les sourcils devant le regard de défi de la brune qui ne le faisait pas le moins du monde ciller. Il avait appris au fil des mois et des années à résister bien trop facilement aux défis multiples et tentateurs qu’elle lui lançait souvent, ayant compris à ses dépends qu’elle ne cherchait derrière tout cela que la victoire et l’idée plaisante d’avoir l’ascendant pour lui. En revanche, lorsque ses yeux en amande plongeaient dans les siens d’une manière plus insidieuse, plus mystérieuse, il se retrouvait bien plus à mal de lui résister.
Lorsqu’ils arrivèrent enfin à la voiture, la brune se retrouva pour la première fois de la journée dans la position la moins enviable d’eux deux : celle de ne pas franchir la porte, ce que Clyde n’aurait osé lier à son poids, sous peine de se faire assassiner sur place à coup sûr. Si la vision était déjà amusante à elle seule, cela permettait également au brun de dévier une conversation dans laquelle il aurait fini par se perdre si elle s’était trop éternisée. “T’avises pas de te foutre de moi.” Pas une parole ne se fit entendre, et pourtant la moue amusée qu’il affichait et l’air délicieusement satisfait sur son visage en disait davantage que toutes les moqueries qu’il aurait pu se laisser aller à tenter. “Je vais l’enlever maintenant.” Ah? “Tu te sens à la hauteur ?” Découper des mètres de tulle ne le dérangeait pas outre mesure, mais extirper lui-même la brune de sa robe de mariée sur un parking en plein milieu de la nuit lui semblait étonnamment peu approprié à la situation. En réalité, il avait imaginé maintes et maintes fois la foi où il lui ôterait ses vêtements, un à un, et l’idée qu’il s’en faisait n’avait jamais pris cette forme là. Il préférait encore que ces images ne restent que le fruit de son imagination, plutôt qu’il ne la voit dans son plus léger appareil sur le siège passager de la voiture, mais les sourcils arqués de la brune attendaient une réponse positive devant laquelle il ne pouvait se défiler. Pas sans avouer l’inavouable. “Crois-le ou pas, mais ça n’est pas la première robe que je défais.” L’ironie transpirait dans chacune des syllabes, et pourtant, cela n’avait rien à voir avec le reste des robes qu’il avait eu le plaisir de défaire une à une. Aucune d’elle n’avait été une robe de mariée, pour commencer, mais il n’avait aussi jamais entrepris de déshabiller une demoiselle dans le seul but de lui faire passer une porte - ironiquement, il était habituellement plus romantique que ça. Clyde ne broncha pourtant pas lorsqu’Halsey lui offrit son dos, et il entreprit de défaire les lacets qui se perdaient sur ses épaules avant de descendre peu à peu, jusqu’à laisser ses doigts glisser dans le creux de son dos - dans le seul but de venir à bout de cette fichue robe, évidemment. Chaque centimètre parcouru électrisait sa peau, mais tout le sérieux qui s’était emparé de ses traits n’était visible de personne, pas même d’elle. “Dis-moi que tu as une jupon dessous, ou n’importe quelle connerie que les mariées portent sous leurs robes ?” Car lui n’avait pas prévu de second costard, et il avait trop de fois laissé son esprit s’aventurer sur les courbes de la brune pour les découvrir ainsi. Pas comme ça. Pas maintenant.
Depuis le début de leur rencontre, une règle tacite les empêchait de livrer quoique ce soit de personnel sur eux-mêmes, un peu comme si la méfiance restait de mise en dépit de la complicité qui s’installait peu à peu entre eux. Halsey avait parfois été tentée de lui raconter l’une ou l’autre anecdote de sa vie mais s’était vite ravisée, peu désireuse de tomber dans une proximité qui aurait pu nuire à leurs activités. La curiosité restait de mise cependant et l’impassibilité que lui offrait Clyde jour après jour titillait de plus en plus son envie d’en savoir davantage à son sujet, même si elle évitait les questions trop directes, y préférant les plaisanteries comme en cet instant. La brune avait parfois l’impression de traiter avec son double au masculin, ce qui la poussait à se demander ce que lui avait pu vivre pour choisir une existence comme la leur, ponctuée de mensonges et de faux-semblants en tout genre. Car il s’agissait là d’un choix qui poussait à une inévitable solitude, en dépit de la présence de l’autre en toute circonstance. “Tu penses vraiment que tu vas réussir à me soutirer des infos aussi facilement ?” « Tu ne peux pas m’en vouloir d’essayer. » Répliqua-t-elle dans un sourire en relevant légèrement le nez vers lui. “Il va falloir être plus convaincante.” Pour changer, tiens. La brunette leva les yeux au ciel et fit mine de réfléchir, comme si le sous-entendu n’avait pas eu l’effet escompté dans son esprit. Il était pourtant difficile d’ignorer la tension qui régnait entre eux depuis qu’elle avait dit oui sous le regard inquisiteur du brun, mais la jeune femme s’efforçait de donner le change, comme toujours. « Dommage, je me demande parfois ce qui se cache là-dessous. » Lança-t-elle en pointant son index manucuré vers son visage, ayant retrouvé l’espace d’un instant le sérieux qui incombait à ces paroles pour le moins véridiques – une fois n’était pas coutume. L’échange de regards ne dura que quelques secondes supplémentaires, le temps pour eux d’arriver à la voiture et de faire face à un nouveau défi de taille ; la faire entrer dans l’habitacle avec sa robe au volume tout simplement démesuré. Halsey sentait une nouvelle fois le regard de Clyde peser sur elle, mais quelque chose lui disait que cette fois-ci, il s’agissait surtout d’amusement face à la situation. Dépitée et peu désireuse de s’humilier en se perdant au milieu des couches de tissu, la brunette arriva finalement à une conclusion qui s’imposait d’elle-même ; se débarrasser de la robe avant de rentrer dans la voiture. Logique, pas vrai ? Attendant du jeune homme qu’il s’avance pour l’aider à s’en défaire, elle l’observa de biais, une moue amusée sur le visage. Rien ne se passait jamais normalement avec eux, il devait être habitué depuis le temps. “Crois-le ou pas, mais ça n’est pas la première robe que je défais.” Un rire s’échappa de ses lèvres tandis qu’elle soulevait ses cheveux afin de lui dégager le passage, secouant brièvement la tête tout en laissant ses yeux se perdre sur le sol, cherchant à se concentrer sur autre chose que sur la sensation des mains du brun contre sa peau. « Bien, alors ça ne devrait pas te prendre trop de temps. » Le ton était similaire au sien et ne laissait pas deviner un seul instant l’émoi que provoquait Clyde à chaque fois qu’il la frôlait par inadvertance – ou pas. “Dis-moi que tu as une jupon dessous, ou n’importe quelle connerie que les mariées portent sous leurs robes ?” Sa question vint rompre le silence qui s’était installé entre eux et le sérieux laissa de nouveau place à la dérision, poussant Halsey à se fendre d’un nouveau sourire amusé qu’elle se garda bien de lui montrer. « Tu verras. » Loin d’elle l’idée de se promener en sous-vêtements dans un parking ou même sur la banquette arrière et évidemment qu’un jupon était présent pour camoufler – à peine – ce qu’elle portait là-dessous. Laissant au brun le privilège de le découvrir par lui-même, elle se retourna finalement pour se débarrasser de l’amas de tissu et soupira de soulagement en se sentant enfin respirer. « Une vraie torture. Je ferai un choix moins audacieux la prochaine fois. » Le sarcasme était de mise, comme d’habitude. L’idée de faire plusieurs coups de ce genre était sur la table, mais ils s’étaient mis d’accord pour en décider une fois que le divorce de celui-ci serait prononcé. L’investissement en temps était conséquent et ils ignoraient encore ce qu’ils pourraient retirer de ce cher Jack une fois qu’il aurait été piégé. Sans plus de cérémonie, Halsey fourra la robe sur la banquette arrière et se laissa tomber sur le siège passager, jetant un coup d’œil au brun au passage sans se départir de son air mutin. « Tu as vraiment cru que je finirais à moitié nue sur ce parking, sérieusement? » L’idée était déjà drôle, mais la réaction qu’avait eue Clyde l’était d’autant plus.
“Tu ne peux pas m’en vouloir d’essayer.” En effet, il ne pouvait le retenir contre elle, mais il s’amusait encore qu’elle tente une fois de plus de lui faire avouer ce qu’il ne lâcherait que lorsqu’il l’aurait décidé. Qu’elle soit dans ses bras, en robe de mariée ou quoi que ce soit d’autre ne changeait rien au fait que leurs vies privées l’étaient restées jusqu’ici, face à un engagement qui n’était que professionnel. Parfois, il se plaisait à imaginer laisser tomber une partie de sa carapace, se montrer un peu plus vulnérable face à elle, mais le principe qui l’avait toujours guidé depuis son enfance lui revenait en pleine figure - la seule personne sur laquelle il pouvait vraiment compter et qui ne décevrait pas, c’était lui-même. Quand bien même il doutait que certaines informations personnelles puissent avoir la moindre importance ou la moindre valeur pour qu’Halsey les retourne contre lui, la brune se faisait si discrète sur ses propres origines qu’il ne pouvait qu’apprécier la distance qu’ils avaient tous les deux maintenus depuis qu’ils se connaissaient. Le statu quo était clair, et même s’ils s’amusaient régulièrement à titiller ce qu’ils estimaient comme une corde sensible chez l’un ou chez l’autre, aucun ne lâchait jamais suffisamment de terrain pour qu’ils s’estiment réellement proches. Professionnellement, ils étaient - émotionnellement, peu, et physiquement, pas. La base d’une collaboration réussie était de garder ces sphères séparées, de ne jamais leur donner l’occasion de s’immiscer dans leur business, et ils avaient jusque-là parfaitement tenu leur deal de départ. En théorie. “Dommage, je me demande parfois ce qui se cache là-dessous.” Il lui aurait bien retourné la remarque, mais ses yeux qui se baladaient sur la jeune femme l’empêchèrent de prononcer le moindre mot - car en effet, il se demandait bien ce qui se cachait là-dessous, mais il ne faisait très certainement pas bon de l’avouer à voix haute. Une fois de plus, un rire s’échappa de ses lèvres devant la moue faussement déçue de la brune, dont la tentative s’était soldée par un échec, mais n’en demeurait pas moins admirable. “Je ne suis pas sûr que tu veuilles vraiment le savoir” finit-il par lâcher dans un soupir alors qu’il la déposait à côté de la voiture. Et s’il avait fallu choisir les paroles les plus vraies qu’il avait prononcées aujourd’hui, il n’y avait aucun doute qu’il s’agissait de celles-ci.
Finalement, il s’avérait que son souhait allait peut-être se réaliser plus tôt que prévu, alors que la brune se retournait vers lui en le sommant, presque à la manière d’un ordre, de l’aider à se débarrasser de sa robe. En théorie, toujours, il ne s’agissait que d’une robe comme tant d’autres qu’ils avaient tenu entre les doigts par le passé, rien qu’il ne connaissait ou ne maîtrisait pas. “Bien, alors ça ne devrait pas te prendre trop de temps.” Sans attendre, ses doigts se mirent à glisser le long des lacets interminables qu’il défaisait un à un pour venir à bout de cette robe qui ressemblait en fin de compte davantage à une prison qu’autre chose, à en juger par le niveau de compression qu’il sentait s’échapper peu à peu sous ses mains. “Tu verras.” Une demi-seconde, il tiqua, s’arrêtant momentanément au milieu du dos de la demoiselle, n’ayant en réalité aucune envie de la retrouver en petite tenue devant lui, comme ça. Puis le doute se dissipa aussi rapidement qu’il était apparu - Halsey savait se montrer provocante, mais à en juger par sa réaction, elle n’avait sans doute pas réellement prévu de devoir réellement enlever sa robe pour monter dans la voiture, ni même qu’il s’agisse de celle de Clyde. En d’autres termes, et quand bien même elle se plaisait à faire flotter une sorte de mystère autour de ce jupon énigmatique, il n’y en avait aucun, ce qu’il découvrit assez rapidement en laissant tomber les derniers lacets tandis que la brune se délestait enfin de tout cet amas duveteux. “Une vraie torture. Je ferai un choix moins audacieux la prochaine fois.” Alors qu’Halsey lui faisait enfin face, Clyde releva un sourcil inquisiteur face à cette remarque. Il n’avait pas encore eu le temps d’oublier le sourire qu’avait porté la mariée en façade toute la journée face à son mari, l’homme de sa vie, et bla-bla-bla, qu’elle parlait déjà de le faire subir ça une nouvelle fois ? “Parle pas trop vite.” Une moue mesquine finit par prendre place sur ses traits, tandis qu’il réalisait que si la brune faisait la maligne, ce serait sans doute bien moins le cas d’ici quelques temps. “On en reparle dans un mois, tu veux.” La phrase avait sonné comme un défi, face à la jeune femme dont la dernière vision qu’il avait d’elle était celle d’une femme mariée. La brune était trop indépendante, trop individualiste, trop fermée - et ce qu’elle s’apprêtait à vivre ressemblerait potentiellement à de la torture, à la différence près qu’elle s’y était lancée volontairement. Enfin, alors que les complications créées par la robe touchaient à leur fin, ils prirent place dans la voiture tandis que Clyde démarrait sans attendre - parce qu’il était tard, mais aussi qu’il ne voulait pas s’éterniser une minute supplémentaire dans un lieu qu’il avait rêvé de déserter depuis plusieurs heures déjà. “Tu as vraiment cru que je finirais à moitié nue sur ce parking, sérieusement ?” Clyde s’efforçait de ne pas trop fixer Halsey, dont le jupon - bien existant, finalement - était d’une finesse qui laissait se dévoiler la moitié des courbes sur lesquelles il glissait. Finalement, il lui jeta un regard en coin, s’arrangeant avec le fait qu’il conduisait et que cela justifiait donc qu’il ne la regarde pas comme il mourrait pourtant de la fixer. “Joker ?” Un deuxième regard de côté et un sourire vinrent ponctuer le tout. “J’y ai cru une seconde, d’accord. Mais simplement parce que ce serait pas la première idée de merde que t’aurais eu.” Et voilà, en une fraction de seconde, la culpabilité avait été transférée à la brune, comme par magie.
Et comme par magie, une fois de plus, la nuit avala les quelques kilomètres qui les séparait de l’appartement du brun, devant lequel il se gara avant de se retourner vers Halsey. “Toujours intéressée par le canapé ? Si tu changes d’avis je te mets dans un taxi tout de suite.” Il n’en avait pas envie, mais la décision ne lui revenait pas. “Et t’inquiète pas pour la robe, elle bougera pas.” Au cas-où cela lui importe.
La brune savait pertinemment que ses questions resteraient sans réponses, ou alors qu’il lui livrerait des demi-vérités agrémentées de fausses pistes, juste pour être bien sûr qu’elle ne pourrait jamais avoir quoique ce soit de tangible contre lui. Elle le savait, parce qu’elle-même pensait de cette façon en dépit de la complicité qui régnait entre eux depuis qu’ils se connaissaient. Il ne fallait juste pas être aveugle pour comprendre qu’ils étaient fait du même bois et que par conséquent, ils ne pensaient qu’à eux et à leurs propres intérêts. Se montrer vulnérable n’était pas une option et céder le moindre pouce de terrain serait un aveu de faiblesse, et s’ils ne se l’étaient jamais avoués, quelque chose lui disait qu’ils vivaient selon ces mêmes règles à l’égard de n’importe qui. Halsey n’avait confiance qu’en elle-même et si pour l’instant Clyde s’était montré à la hauteur, sans doute n’était-il qu’une question de temps avant qu’il ne faillisse et ne la déçoive. Ne valait-il donc mieux pas conserver cette distance qui leur réussissait si bien, celle qui les empêchait de franchir une limite qu’ils viendraient à regretter ? D’autant que flirter avec celle-ci rendait le jeu plus amusant aux yeux de la brune qui appréciait tout particulièrement jouer de ses charmes avec lui pour le déstabiliser. Cela fonctionnait parfois mais le plus souvent, le brun se montrait hermétique et presque dépité par ces tentatives de déconcentration alors qu’ils discutaient de l’une ou l’autre stratégie. Pour l’heure, ils n’étaient parvenus qu’à amasser de l’argent grâce à de petits coups sans adrénaline, mais ce mariage… C’était autre chose. Quelque chose de grisant qui les propulserait dans les hautes sphères de l’arnaque si ils parvenaient à leurs fins. Une moue légèrement boudeuse étirait les lèvres de la jeune femme qui, si elle n’était guère étonnée de sa réponse, se retrouvait malgré tout déçue de cette nouvelle impasse dans laquelle il la guidait d’un sourire amusé. “Je ne suis pas sûr que tu veuilles vraiment le savoir.” Halsey recouvra son sérieux en même temps que ses pieds retrouvaient le contact avec le sol et elle releva le nez vers lui, préférant le silence à la plaisanterie qui perlait déjà dans son esprit. Le pensait-il vraiment ? Il semblait pourtant avoir une haute estime de lui-même – sans devenir un crétin fini pour la cause – et la brune s’étonnait une nouvelle fois, persuadée au fond d’elle que ces paroles étaient teintées de vérité.
La gravité de l’instant fût balayée par une situation pour le moins cocasse qui était loin de plaire à la jeune femme qui s’arrangeait toujours pour paraître digne à chaque instant. Autant dire qu’entourée d’un amas de tissu qui devenait sérieusement étouffant en plus d’être imposant, elle n’en menait pas large et que rentrer dans cette voiture était tout simplement mission impossible. Il ne lui fallu pas plus de quelques secondes pour demander au brun de l’aider à se défaire de la robe directement sur le parking, le poussant à s’interroger sur ce qu’elle portait en-dessous. A la base, sa nuit de noce était supposée se dérouler en compagnie de son mari et Halsey avait donc investi dans la lingerie qui s’imposait pour l’occasion, bien décidée à ferrer le poisson et à le rendre littéralement aveugle quant à ses futurs agissements. Mais cette délicate attention était savamment camouflée par un jupon, ce qui rendait difficile de discerner ce qui se cachait exactement là-dessous et ne manquerait pas de rassurer le brun qui s’était interrompu et hésitait à poursuivre le délaçage. Recouvrant un semblant de contenance après avoir savouré bien malgré elle le contact de sa peau contre celle de Clyde, elle se débarrassa de ce qu’il restait en précisant que son choix serait différent la prochaine fois. “Parle pas trop vite.” La brune haussa un sourcil en se redressant, sa robe dans la main, s’interrogeant sur ce qu’il voulait dire. “On en reparle dans un mois, tu veux.” Insinuait-il qu’elle ne parviendrait pas à tenir son rôle d’épouse exemplaire ? « Tu penses que je n’y arriverai pas ? » La même lueur de défi brillait dans ses yeux à elle, mais jamais il n’oserait remettre en doute ses compétences. Il tenait à la vie, non ? Un sourire amusé radoucit ses paroles et elle se laissa tomber sur le siège dans un léger soupir, fermant les yeux l’espace de quelques secondes afin de se rejouer les quelques moments phares qui avaient ponctué cette journée. Pas à la manière d’une mariée encore sous le coup de l’émotion, mais bien comme la fraude qu’elle était et qui vérifiait mentalement que chaque personne présente avait bien avalé son petit numéro de charme. Elle ouvrit ensuite le vide-poche et s’empara du paquet de cigarettes de Clyde, en alluma une et tira une longue bouffée avant de lui demander s’il pensait vraiment qu’elle se serait retrouvée à moitié-nue quelques minutes auparavant, une lueur amusée dansant dans ses yeux. “Joker ?” Jamais. “J’y ai cru une seconde, d’accord. Mais simplement parce que ce serait pas la première idée de merde que t’aurais eu.” Halsey secoua la tête en levant les yeux au ciel, ouvrant quelque peu la fenêtre pour évacuer la fumée qu’elle expirait avec un plaisir absolument pas dissimulé. « Tu t’en sors bien. » S’il pensait qu’elle n’avait pas senti sa tension alors qu’il l’aidait à se déshabiller, il se trompait. Gardant cette pensée en tête, la brunette laissa son regard se perdre sur le paysage défilant, savourant sa cigarette en laissant le silence s’installer entre eux.
“Toujours intéressée par le canapé ? Si tu changes d’avis je te mets dans un taxi tout de suite. Et t’inquiète pas pour la robe, elle bougera pas.” Arrêté devant son appartement, Clyde s’était désormais tourné vers elle, lui offrant une porte de sortie dérobée que la jeune femme hésitait à emprunter. Mordillant sa lèvre inférieure, elle plongea son regard dans le sien en cherchant à sonder ces pensées qu’elle savait impénétrable, cherchant la moindre expression qui la pousserait à prendre la bonne décision alors qu’elle mourrait d’envie de suivre la mauvaise. Monter dans ce taxi était la meilleure chose à faire ; conserver le statu quo, laisser s’essouffler la tension qui régnait entre eux pour repartir sur les bases professionnelles qu’ils connaissaient si bien. Mais le brun ne montrait rien, se contentant de l’observer lui aussi sans prononcer le moindre mot supplémentaire, la poussant dans ses retranchements alors qu’il devait se douter que c’était la dernière chose à faire. « Prendre un taxi dans cette tenue ? Et puis quoi encore. » Elle ouvrit la portière et se dirigea vers l’immeuble d’un pas décidé, son cœur battant la chamade sans qu’elle ne puisse s’expliquer pourquoi, sentant la présence de Clyde non loin d’elle. « Et puis j’ai besoin d’un remontant, le champagne c’était pas suffisant. » Nul doute qu’elle continuerait de boire encore pas mal à chaque fois qu’elle serait en présence de son cher et tendre, technique validée pour se laisser aller et perdre les inhibitions qui la pousseraient à le rejeter en temps normal.
Clyde appréciait le fait qu’Halsey ne le force jamais à en dévoiler plus qu’il ne le désirait. Si elle aimait le titiller et se moquer de lui, plus ou moins sympathiquement selon les moments, il savait que leurs vies privées ne seraient jamais source de désaccord entre eux - car justement, elles étaient privées en tous points, et chacun paraissait se contenter de les maintenir ainsi. Quelques bribes d’informations que l’un et l’autre avaient laissé filtrer sur leur passé laissaient à penser qu’ils avaient eu une enfance similaire - ou du moins, qu’ils n’avaient pas été gâtés par la vie et avaient appris à s’occuper d’eux-mêmes seuls, ce qui les avait mené à un individualisme exacerbé. Quand bien même Clyde se plaisait à imaginer un lieu et un temps où il n’aurait pas à surveiller ses arrières constamment et à penser au prochain coup pour amasser toujours plus de zéros sur son compte en banque, ces réflexes étaient plus forts que lui - peu importe à quel point il pourrait connaître une stabilité financière, il avait encore trop en mémoire les journées difficiles et le frigo vide lorsqu’il était ado. Il avait appris à compter sur lui-même très tôt, financièrement et émotionnellement, et cela restait ancré en lui, même de nombreuses années après. Jusqu’à rencontrer Halsey, il avait collaboré avec quelques personnes à droite et à gauche pour monter ses petites arnaques sans trop d’envergure, mais ne s’était jamais lancé dans un tel plan qui nécessitait des mois et des mois de préparation. S’il ne pouvait encore se targuer d’être riche, peut-être était-ce enfin la porte vers ce qu’il espérait depuis longtemps - même si la somme qu’il espérait toucher un jour ne serait sûrement pas un remède à ce besoin constant de faire ses preuves, à lui-même et seulement lui. Comme si un chèque pouvait régler ce traumatisme sur lequel il ne mettait pourtant pas les mots. Pour autant, il n’était plus seul sur ce coup-là, et Halsey avait un rôle essentiel à jouer dans l’étape qui se profilait - face à laquelle il prenait soin de lui rappeler régulièrement que ce n’était pas qu’un jeu, et que rien n’était gagné d’avance. “Tu penses que je n’y arriverai pas?” Le regard de Clyde se perdit sur la route, suffisamment longtemps pour qu’il fasse presque mine de réfléchir, quand bien même la réponse à cette question était pourtant limpide. “Bien sûr que si, et tu le sais.” Pour aussi amusant que cela soit de jouer sur les nerfs de la jeune femme, elle venait de passer une journée bien plus complexe que la sienne, et il était nécessaire de lui rappeler qu’il avait confiance en elle et admirait ses capacités de persuasion redoutables - raison pour laquelle il était encore à ses côtés, deux ans après l’avoir rencontrée, ce qui semblait déjà comme une éternité. “Mais te connaissant, tu vas avoir envie d’étrangler Jack au bout de deux semaines.” La connaître était un bien grand mot, néanmoins, il connaissait son désintérêt et même son dégoût pour les sentiments coulants dont son mari semblait être le spécialiste. Elle devrait prendre sur elle bien plus qu’elle ne l’imaginait sans doute, pour faire croire à un amour sans failles avant de venir le briser en mille morceaux dans les cris et les larmes. “Et puis après la journée qu’on vient de passer, t’as vraiment envie de revivre ça bientôt?” La question était rhétorique, et pourtant, le fait qu’il s'inclut dans cette affirmation laissait transparaître que cela n’avait pas été de tout repos pour lui non plus. S’il n’avait eu qu’à sourire aux divers invités qui venaient le saluer, il n’avait quasiment pas lâché Halsey du regard de la journée - et contre toute attente, la voir feindre un amour dégoulinant lui avait parfois davantage déplu que cela ne l’avait amusé. Le mélange d’émotions qu’il avait ressenti durant cette journée était quelque peu indescriptible, mais une chose était certaine - il était soulagé qu’elle touche enfin à sa fin, ou presque.
Après s’être enfin garé sur le parking de son appartement, il avait avisé du regard la robe de mariée qui envahissait sa banquette arrière et y resterait clairement pour la nuit - saine et sauve, comme Halsey si elle décidait de s’éclipser définitivement en taxi. Il ne savait pas réellement à quelle réponse s’attendre de la part de la brune, mais une part non négligeable de lui espérait qu’elle monte - la bouteille de champagne en main, car il s’agissait malgré tout d’une célébration. “Prendre un taxi dans cette tenue? Et puis quoi encore.” Clyde leva les yeux au ciel, car si la jeune femme pouvait s’offusquer qu’il ait un instant cru qu’elle était en sous-vêtements sous sa robe, lui l’était qu’elle pense qu’il soit capable de la laisser partir ainsi. “Sois pas ridicule, je t’aurais…” Le son de sa voix s’évanouit soudainement tandis que la jeune femme sortait de la voiture sans attendre, se dirigeant vers l’immeuble comme si la décision coulait de source. “... prêté ma veste.” Les derniers mots sortirent de sa bouche tel un soupir, tandis qu’il ne se faisait pas prier et emboitait le pas à la brune avant d’ouvrir la porte de l’immeuble et de se diriger vers l’ascenseur. “Et puis j’ai besoin d’un remontant, le champagne c’était pas suffisant.” Si elle pensait trouver un bar rempli en arrivant chez Clyde, elle se trompait - il buvait peu, elle le savait, et cela rendait ses attentes d’autant plus étonnantes. Cependant, il n’avait pas à cœur de la contredire et resta étonnamment muet pendant quelques instants, comme si cette journée justifiait quelques entorses à ses habitudes, alors que l’ascenseur les déposait enfin à son étage. Après tout, il avait quelques bouteilles qui traînaient - car il ne fallait pas sous-évaluer l’effet de persuasion de l’alcool, ce qui était toujours utile lorsqu’il voulait attirer certaines personnes à sa cause. “Moi qui croyait que ma compagnie te suffisait” ironisa-t-il en ouvrant la porte de son appartement, dont l’état était loin d’être parfait, mais qui suffirait pour accueillir deux personnes qui ne prévoyaient rien d’autre que de boire plus que de raison, même si la nuit était déjà bien entamée. Clyde déposa ses clés sur le meuble de l’entrée puis se délesta de sa veste de costume, avant de se diriger vers une armoire dont il sortit quelques fonds de bouteille qui suffiraient sans doute à satisfaire la brune. “De quoi t’as envie? Tout est dégueulasse donc je te laisse choisir.” Car lui n’avait pas envie d’alcool, mais c’était une autre histoire.
Toutes les conversations n’étaient pas bonnes à avoir, et celles qui touchaient à leur passé en faisaient partie. Halsey sentait que la compréhension qui régnait entre eux était en partie liée à un vécu commun, mais dans quelles perspectives avaient-ils eu les mêmes expériences désagréables, elle l’ignorait. Sa seule certitude résidait dans les objectifs qu’ils partageaient, et cela lui suffisait. Pour l’instant. La curiosité ne faiblissait pas, mais puisqu’elle-même ne désirait pas se confier davantage, elle ne pouvait que respecter le silence amusé que lui offrait Clyde en retour à ses questions. Cela faisait déjà deux ans qu’ils complotaient ensemble, et nul doute que cela continuerait encore un long moment, du moins commençait-elle à l’espérer. Tout dépendrait de l’issue de ce coup, le plus gros jusqu’ici, et la jeune femme espérait que la confiance du brun en ses capacités ne s’étiolait pas. Elle n’avait plus rien à prouver, mais l’idée qu’il doute d’elle était une source constante d’irritation. “Bien sûr que si, et tu le sais.” Un air satisfait remplaça la moue dubitative qu’elle affichait en l’observant et elle se laissa retomber contre le siège, un sourire au bord des lèvres. “Mais te connaissant, tu vas avoir envie d’étrangler Jack au bout de deux semaines.” Halsey tourna la tête vers lui en plissant les lèvres à l’idée de ce qui l’attendait une fois que le répit offert par son mari prendrait fin. Il était séduisant, certes, mais ne rassemblait aucun des qualités que la brunette aurait normalement cherché un homme – si tant était qu’elle en cherche un jour. « Si ça arrive, tu seras là pour m’en empêcher. Un peu de soutien ne fera pas de mal, je compte sur toi. » Lança-t-elle en bousculant légèrement son épaule, lui rappelant par la même occasion qu’ils étaient plongés là-dedans à deux et qu’il était hors de question qu’il l’abandonne, même si à son sens c’était elle qui se coltinait tout le travail à présent. “Et puis après la journée qu’on vient de passer, t’as vraiment envie de revivre ça bientôt?” Qu’ils venaient de passer ? La brunette haussa un sourcil dans sa direction, ne manquant pas de relever le lapsus qui indiquait que sa journée à lui n’avait pas été des plus faciles à gérer, contre toute attente. « Comment ça ? Je pensais que tu avais élargi ton répertoire avec les numéros de mes demoiselles d’honneur pour passer le temps, ce n’est pas le cas ? » Ironisa-t-elle en reportant elle aussi son attention sur la route un instant avant de reprendre, avec un peu plus de sérieux. « Avant de penser au prochain mariage, il faudrait déjà que j’arrive à me sortir de celui-ci de toute manière. » Et ça n’allait pas être simple. L’idée était de piéger Jack, de lui faire rompre les règles de leur contrat prénuptial afin qu’elle empoche le pactole qui lui revenait. Autant dire qu’il était un peu trop amoureux pour la tromper comme elle l’espérait et qu’il allait falloir réfléchir à un plan B. Mais ils auraient tout le temps du monde pour élaborer une nouvelle stratégie ; ce soir, la brune voulait profiter du peu de répit que lui accordait le voyage d’affaire impromptu de son mari. S’extirpant de la voiture, elle refusa de prendre un taxi en usant de sa tenue légère comme d’un prétexte masquant son envie de passer du temps avec lui. “Sois pas ridicule, je t’aurais…” Il aurait pu faire ce qu’il voulait, ça n’aurait rien changé. Sans attendre, elle se dirigea vers l’immeuble avant de se tourner vers lui, un sourire enjôleur au coin des lèvres, entrant dans l’ascenseur comme si elle avait l’habitude des lieux. La vérité, c’était qu’ils se voyaient le plus possible en dehors de chez eux et qu’elle n’était venue ici qu’à de rares occasions et certainement pas en pleine nuit. Arrivés à l’étage, le brun recouvra la parole en même temps que ses clés, jetant un regard plein d’ironie vers la brune. “Moi qui croyait que ma compagnie te suffisait” « Ne sois pas ridicule. » Rétorqua-t-elle, reprenant ses paroles avec toute la provocation dont elle était capable avant de le suivre à l’intérieur, laissant son attention se perdre sur les quelques détails de la vie de Clyde. Sans surprise, il était difficile de se faire une idée tant l’espace était dénué d’objets personnels, à son image donc. Pensive, Halsey laissa traîner ses doigts sur les meubles avant de rejoindre le brun qui était déjà occupé à sortir quelques bouteilles pour la satisfaire. Le choix ne rivalisait pas avec ce qu’ils auraient pu trouver dans un bar, mais pour quelqu’un qui ne buvait pratiquement jamais, il s’en sortait plutôt bien. “De quoi t’as envie? Tout est dégueulasse donc je te laisse choisir.” Un rire s’échappa de ses lèvres alors qu’elle attrapait une bouteille de vodka qui suffirait à la contenter, en espérant qu’il ait des glaçons pour faire passer le tout. « Il y a encore la bouteille de champagne que tu as volée si tu préfères. » Ajouta-t-elle innocemment en battant des cils avant de partir en direction de la cuisine à la recherche de glaçons et de verres. « Je fais comme chez moi, hein. » Précisa-t-elle – comme si cela était nécessaire – tout en profitant de l’occasion pour observer avec curiosité l’intérieur qu’elle avait si peu eu l’occasion de visiter auparavant. En quelques secondes, elle rassembla ce qu’il fallait et retrouva Clyde pour trinquer, une lueur amusée dansant dans ses prunelles. « Tu veux qu’on porte un toast à quoi ? Au mariage ou au futur divorce ? » Le sarcasme dans sa voix était presque devenu naturel à ce stade. Autant dire que tout ce qui entourait cette entreprise avait de quoi désabuser n’importe quelle personne capable d’éprouver des remords, mais ça n’était pas son cas.
Si la brune pensait que le plus dur était passé, elle se fourvoyait, car supporter son mari suffisamment longtemps pour qu’il croit dur comme fer à son engagement serait sans doute le plus délicat. Connaissant Halsey, elle allait vite se lasser de lui - si ce n’était pas déjà le cas - et même l’amusement provoqué par cette situation finirait pas l’agacer lorsqu’elle se sentirait bloquée avec lui, tout en sachant qu’elle ne pouvait pourtant pas s’en défaire si facilement. Car sinon, le plan entier tombait à l’eau, et il était hors de question d’abandonner après tant de chemin parcouru, et alors que le pactole à la clé se rapprochait peu à peu. “Si ça arrive, tu seras là pour m’en empêcher. Un peu de soutien ne fera pas de mal, je compte sur toi.” Un peu de soutien ? A ses yeux, Clyde avait joué un rôle déterminant dans l’initiation de cette relation, et c’était uniquement car il savait bien qu’Halsey le reconnaissait qu’il s’empêcha de relever la remarque sous cet angle là. “C’est pas le genre de type que j’ai envie de défendre, mais je ferais de mon mieux.” Non pas pour le bien de Jack, mais pour le succès de leur entreprise, qui lui tenait à cœur tout autant qu’à elle, puisqu’il s’agissait même de sa propre idée. En attendant, focaliser son attention sur Jack pourrait au moins lui permettre de ne pas songer au prochain mariage, qui semblait pourtant déjà être sur les lèvres de sa comparse - ce dont il se passerait bien, étant donné ce qu’il avait eu à supporter aujourd’hui. “Comment ça? Je pensais que tu avais élargi ton répertoire avec les numéros de mes demoiselles d’honneur pour passer le temps, ce n’est pas le cas?” Un sourire énigmatique vint étirer ses lèvres, comme pour camoufler l’idée qui se cachait réellement derrière la journée qu’il venait de passer, de son côté. “Hm hm.” Il hocha la tête comme pour accuser le coup de la véracité de la remarque de la brune, quand bien même il n’en avait pas grand chose à faire de ces filles, et elle le savait sans doute aussi bien que lui. Car Clyde n’en avait jamais eu grand chose à faire d’aucune fille, et cela aurait été étonnant que ce soit soudainement le cas - alors, après tout, amasser des numéros ne suffisait pas à rendre la journée suffisamment intéressante pour passer au-delà des images d’Halsey qu’il avait dû observer. “Je me suis occupé comme je pouvais.” Loin de lui l’idée de réellement dévoiler ce qu’il entendait précédemment - au contraire, il préférait donner raison à la brune, tout en laissant filtrer l’idée que cette journée était pourtant loin d’avoir été passionnante. Certes, elle constituait l’aboutissement de la première étape de leur plan, et pour cela il s’en réjouissait - mais elle représentait également la réalisation de certaines pensées qu’il pouvait avoir à propos de la brune, et qu’il ne pouvait pourtant pas prononcer, pas même à lui-même. Alors, comme à son habitude, il noyait le poisson de toutes les discussions qu’il n’avait jamais eu et n’aurait jamais sous quelques mots vagues qui avaient le mérite de clore le sujet, la plupart du temps. “Avant de penser au prochain mariage, il faudrait déjà que j’arrive à me sortir de celui-ci de toute manière.” “On va y arriver.” Encore une fois, le on était de mise, car il ne comptait certainement pas l’abandonner en plein milieu de cette opération. Ou jamais.
Après un trajet qui était passé aussi rapidement qu’il avait paru infiniment long avec la brune en tenue légère à ses côtés, il avait fini par pousser la porte de chez lui. La brune avait prononcé le souhait de faire passer cette journée sous plus d’alcool qu’elle n’avait réellement pu ingurgiter jusque là - et ce qu’Halsey voulait aujourd’hui, il ne pouvait que lui accorder, après tous les efforts consentis par la jeune femme. “Ne sois pas ridicule.” Oh qu’il détestait lorsque la brune reprenait ses propres mots à son compte, oh qu’il avait envie d’en rajouter une couche simplement pour le plaisir de la contredire, oh qu’elle le rendait fou de toutes les manières possibles et inimaginables - les pires comme les meilleures. Et pourtant, il avait passé la porte de son appartement avec la brune sur ses talons, comme une entorse exceptionnelle à leur relation professionnelle qui ne franchissait que peu le seuil de leur sphère privée, et donc de leurs appartements respectifs. Pourtant, la brune n’avait que peu hésité à se saisir de la vodka qu’il lui tendait, sachant pertinemment qu’il ne la suivrait que peu, tant l’alcool représentait pour lui davantage d’aversion que de plaisir. “Il y a encore la bouteille de champagne que tu as volée si tu préfères.” Clyde laissa échapper un rire franc tandis qu’il rangeait les autres bouteilles, reléguées au fond du placard jusqu’à leur prochaine sortie. “Si j’avais su que je volerais un jour de l’alcool à cause de toi. T’es la pire des influences, Blackwell.”
“Je fais comme chez moi, hein.” Le brun hocha la tête tout en souriant, tandis qu’il captait les regards de la brune autour d’elle, comme si elle cherchait à obtenir des informations sur lui qu’il ne dévoilerait pas de son plein gré. Il ne pouvait qu’apprécier sa curiosité - car lui faisait de même - mais elle était malheureusement mal tombée, tant cet appartement manquait de touche personnelle. Tandis qu’elle revenait avec deux verres et des glaçons, il s’en servit un pour le principe, car ce jour le méritait tout de même - et cela l’aiderait peut-être à oublier à quel point la vision d’Halsey en petite tenue au milieu de son salon était perturbante. “Tu veux qu’on porte un toast à quoi? Au mariage ou au futur divorce?” Au divorce, tant qu’à faire? “Les deux font partie du plan, alors…” Aux deux, donc. Il leva alors son verre en un toast bien plus réaliste que celui auquel ils avaient eu droit durant le mariage, même si leur raison de se réjouir ne constituait pas une fin heureuse, du moins pour les mariés, ou plutôt pour le marié. La vodka lui brûla un instant la gorge, tandis qu’il se laissait enfin aller à la remarque qui lui brûlait les lèvres, elle, depuis qu’ils avaient quitté le mariage - même si la situation s’y prêtait bien mieux maintenant qu’ils étaient chez lui. “Tu veux quelque chose pour te couvrir?” Non pas que la vision de son jupon qui ressemblait plus ou moins à une nuisette le dérange, mais cela le perturbait, même s’il tentait de ne rien en laisser paraître.
Halsey savait que ce plan reposait désormais sur les talents d’actrice dont elle ne cessait de se vanter, mais s’il était facile de convaincre un homme durant quelques soirées passées avec lui, ça serait une autre paire de manches en vivant littéralement avec. Le plus drôle résidait dans le fait qu’elle avait toujours vécu seule et que cette situation l’avait toujours comblée, et qu’il avait fallu un mariage frauduleux pour qu’elle soit obligée de déménager – en partie du moins, elle était parvenue à convaincre Jack de l’intérêt de garder son appartement. A présent, elle comptait sur l’emploi du temps chargé de son mari pour le voir le moins possible, même s’il n’était pas impossible qu’il dégage du temps pour sa nouvelle épouse – en grand romantique qu’il était. Clyde semblait craindre qu’elle ne se lasse rapidement et que leur plan en pâtisse, mais elle ferait tout pour que cela aboutisse, d’une façon ou d’une autre. “C’est pas le genre de type que j’ai envie de défendre, mais je ferais de mon mieux.” La brune se fendit d’un sourire, amusée qu’il se montre aussi peu disposé face à l’homme qu’il lui avait présenté en tant qu’ami. « Et lui qui chante tes louanges depuis le jour de notre rencontre… » Elle fit mine de s’offusquer du manque de sympathie de Clyde pour son mari, entrant partiellement dans le rôle qui lui incombait désormais, avant de reprendre son air amusé. La jeune femme aurait tout le temps d’embrasser l’image de la femme dévouée une fois que Jack serait de retour en ville, mais ce soir, il était bien loin dans son esprit. De son côté, le brun prétendait avoir vécu cette journée comme un enfer d’ennui, ce qu’elle ne manqua pas de contrer en lui rappelant que le temps passé en compagnie de ses demoiselles d’honneur n’avait pas eu l’air de le déranger tant que ça. “Hm hm.” A court d’arguments, hein ? “Je me suis occupé comme je pouvais.” Bien entendu. Elle se contenta de hocher la tête d’un air entendu, comme si elle avalait la moindre de ses salades depuis le temps. A la place, elle préféra parler de l’issue de ce contrat, du divorce qu’il fallait qu’elle fasse prononcer en faisant peser l’entièreté de la responsabilité sur lui, ce qui ne serait sans doute pas une mince affaire, comme elle ne manqua pas de préciser en tournant la tête vers Clyde, s’attardant quelques secondes sur son profil alors qu’il était concentré sur sa conduite. “On va y arriver.” Le fait qu’il s'inclue lui-même la rassurait, parce que cela signifiait qu’il ne s’appuyait pas que sur elle et qu’il serait là. Non pas qu’elle en doute, mais c’était leur premier projet de grande envergure et autant dire qu’il n’était pas commun, loin de là même. « Je sais. » Conclut-elle en reprenant sa position, sourire aux lèvres.
Enfin, ils arrivèrent à l’appartement du brun et Halsey ne put cacher son soulagement en enlevant les talons qui la torturaient depuis qu’elle avait dit oui, comme s’ils étaient l’étau qui se resserrait sur elle maintenant que le plan était définitivement en action. Son choix se porta sur la vodka et voyant l’air dépité de Clyde, elle lui proposa d’entamer la bouteille subtilisée lors de la fête avant qu’ils ne s’enfuient comme les deux voleurs qu’ils étaient. “Si j’avais su que je volerais un jour de l’alcool à cause de toi. T’es la pire des influences, Blackwell.” Laissa-t-il échapper dans un rire qui fit écho au sien, ravie qu’il sorte de sa zone de confort à cause d’elle. « Et tu adores ça, Wakefield. » Elle fronça le nez dans sa direction avant de disparaître dans la cuisine afin de trouver ce qui leur manquait pour porter ce toast, le vrai, l’officiel. Celui qui aurait fait pâlir les invités s’ils savaient ce qui se cachait réellement derrière cette mascarade dont ils n’étaient que les pantins. La brunette le laissa remplir leurs verres, amusée qu’il s’en serve un pour la symbolique, et l’interrogea sur ce qui convenait le mieux de toaster ; le mariage ou sa finalité ? “Les deux font partie du plan, alors…” Le tintement des verres brisa le silence tandis que leurs regards se captaient par delà la gorgée qu’ils buvaient presque religieusement, ramenant la tension sous-jacente qui régnait entre eux, électrique. “Tu veux quelque chose pour te couvrir?” Une lueur de provocation s’alluma dans le regard de Halsey tandis qu’elle avisait le tissu qui la recouvrait à peine, n’étant pas prévu pour se porter sans rien d’autre par-dessus. « Et si à la place, on rétablissait une certaine… égalité ? » Sans cesser de se noyer dans ses yeux, elle s’approcha de lui et commença à déboutonner sa chemise avec une lenteur calculée, jusqu’à dévoiler sa peau et poser une main contre celle-ci, juste pour sentir le rythme de son cœur s’affoler. Juste pour se rassurer sur véracité du moment qu’elle désirait dénué de tout faux semblant. « Comme ça. » Murmura-t-elle ensuite en faisant tomber sa chemise au sol et en se reculant ensuite, plongeant ses lèvres dans son verre en l’observant sans ciller, avalant une gorgée de ce qu’elle considérait à ce stade comme une dose de courage pour commettre l’irréparable, ce qui les propulserait dans une sphère qu’ils s’étaient toujours interdite.
“Et lui qui chante tes louanges depuis le jour de notre rencontre…” Et c’était justement tout le génie de leur plan : que Clyde ait choisi quelqu’un qu’il estimait connaître plutôt bien comme pigeon parfait, ce qui rendait la rencontre impromptue avec Halsey d’autant plus réaliste. Si Clyde était présent pour rappeler à toutes les étapes à Jack à quel point Halsey était la femme qui lui correspondait, ils n’auraient pas vite fait de le coincer en train de la tromper, certes, mais ils pourraient ainsi lever les doutes que le pauvre homme pourrait avoir quant aux sentiments de sa femme. Sur le papier, tout était parfait, et Clyde prenait son rôle d’ami très à cœur, même si le simple fait qu’il ait choisi Jack comme victime en disait long sur le peu d’importance qu’il lui accordait réellement. Business is business, après tout, et ce n’était certainement pas Halsey qui allait s’en plaindre, quand bien même elle faisait mine de s’offusquer. Ils allaient finir par le plumer, et Halsey pouvait compter sur lui pour être présent jusqu’à la signature du divorce final - car ils s’étaient lancés en duo, et ils le resteraient jusqu’au bout de l’opération.
Si le doute n’était désormais plus permis quant à la réussite exemplaire de la première partie de leur plan, cela ne signifiait pas pour autant que leur nuit était terminée. En réalité, la célébration de ce mariage ne faisait que commencer, au point d’avoir mené Clyde à voler du champagne pour la cause - ce ne lui ressemblait aucunement, et devait être à attribuer à l’influence absolument néfaste de la brune en matière de mauvaises idées. “Et tu adores ça, Wakefield.” Clyde haussa les épaules en lâchant une moue désabusée, qui signifiait en réalité un grand oui en dépit de ses fausses plaintes que lui-même ne pensait pas une seule seconde. Certes, il avait volé le champagne dans le seul but de satisfaire et d’amuser la brune alors qu’il n’en boirait certainement que peu, mais il n’aurait échangé leur dynamique pour rien au monde. Elle révélait le pire en lui, mais également le meilleur - car d’aussi loin qu’il s’en souvienne, il n’avait jamais fait confiance à personne professionnellement comme à elle, au point de monter des coups pareils qui nécessitaient tant de préparation. Et pourtant, la limite si claire qu’ils s’étaient mutuellement fixés entre le professionnel et le personnel s’effritait alors qu’ils se retrouvaient désormais sur le canapé de Clyde, à trinquer ironiquement à l’arnaque de l’année, leurs regards incapables de se détacher l’un de l’autre. Clyde ne compta pas les gorgées qui y passèrent avant qu’il ait enfin le courage de reposer son verre, laisser ses yeux quitter ceux de la brune pour venir se poser sur le tissu qui laissait deviner les courbes de la brune qu’il s’était déjà trouvé maintes et maintes fois à imaginer.
Lui proposer de se couvrir n’était que la moindre des politesses, mais également une manière détournée de venir calmer les battements de son cœur qui accélérait peu à peu alors que la distance entre eux se réduisait irrémédiablement. “Et si à la place, on rétablissait une certaine… égalité?” Pardon? Le brun haussa un sourcil surpris, sincèrement pris de court par la réponse de la brune dont il n’arrivait réellement à saisir la signification, jusqu’à ce qu’elle finisse par approcher ses mains de son col et que le message devienne on ne peut plus clair. Interdit, ses prunelles se retrouvèrent aspirées par celles de la brune tandis qu’il se figeait, n’ayant pas à coeur de la repousser, tandis qu’il faisait tout pour ne pas se saisir des mains d’Halsey qui couraient sur son torse alors qu’elle déboutonnait peu à peu sa chemise qui vint glisser sur le sol. “Comme ça.” Et avant que Clyde n’ait réellement pu décider de la réaction la plus appropriée à ce qui ressemblait à la plus tentante des pires idées, elle s’écarta de lui sans plus de cérémonie - elle était douée pour mener son monde en bateau, Halsey, il n’y avait pas à dire. Le brun se redressa à son tour pour reprendre un peu de contenance, alors que sa peau frissonnait encore du contact de celle de la jeune femme. Encore et toujours silencieux, il vint s’emparer de son verre à son tour, suivant la cadence de la brune qui semblait donner le tempo de la soirée - sans qu’il n’ait réellement envie de s’y opposer, pour une fois. “Si on parle d’égalité… sous ce jupon, il y en a un autre?” Bien sûr que non, et il en était à peu près certain, cette fois. Qu’elle ne se risque pas à un second ‘tu verras’, car il ne répondrait pas de ses actes bien plus longtemps.
Halsey se rappelait sans peine du moment où l’idée avait germé dans leur esprit, cet instant où le plan avait pris forme sans même qu’ils n’aient à se concerter et que les étapes s’étaient rapidement dessinées, jusqu’à se concrétiser et les amener à ce jour où elle était parvenue à se faire passer la bague au doigt. Tout avait été très simple en réalité, et c’était à se demander si on pouvait mettre ce succès sur le compte de la persuasion de Clyde, de la naïveté de Jack, ou encore du pouvoir de séduction de la brune. Probablement un savant mélange des trois. La rencontre avec Jack avait été orchestrée avec brio pour la faire passer pour un évènement hasardeux et le fait que le jeune homme soit une connaissance de Halsey n’avait été qu’un concours de circonstances ayant amené Jack à la considérer comme la femme de sa vie, la seule, l’unique. Il n’y avait plus qu’à espérer que le processus inverse, celui qui la mènerait face aux avocats, se passerait avec autant de facilité. Le doute n’était plus permis maintenant qu’elle était officiellement mariée ; il était hors de question qu’elle se soit sacrifiée autant de temps pour ne rien récolter en retour, et ils allaient forcément trouver un moyen de le faire cracher. Ils auraient probablement tout le loisir d’en discuter, à l’abri des regards, lors d’une des absences pour affaires de Jack, elle n’en doutait pas. Pour l’heure, son attention était concentrée sur tout sauf sur ce futur divorce, bien trop occupée à laisser traîner son regard sur le moindre détail de l’intérieur de Clyde. Il s’agissait à présent de trinquer, de célébrer le début et la suite de leur plus gros coup, et elle ne manqua pas de lui faire avouer qu’il adorait l’influence qu’elle avait sur lui depuis leur rencontre. Si ça n’était qu’une bouteille de champagne volée… Il fit semblant d’être dépité, mais elle savait qu’il la faisait marcher. L’alchimie entre eux était présente depuis le premier jour et ne faisait que s’exacerber au fil du temps, mais peut-être qu’ils auraient dû y faire un peu plus attention car ce soir-là, ils allaient se brûler les doigts. Au diable toutes ces paroles destinées à se convaincre qu’il n’était rien de plus qu’une aide, qu’un pion savamment posé sur l’échiquier d’une partie qu’elle estimait jouer seule, elle se trompait lourdement. Les regards échangés, eux, voulaient tout dire, tout comme le silence qui s’installa ensuite, lourd de sens lui aussi. Cela faisait bien longtemps que la dynamique avait changé entre eux, ils venaient simplement de s’en rendre compte. Le cœur de la brune battait de plus en plus vite sous l’œillade brûlante que le brun posait sur elle, devinant sans doute chaque détail se cachant sous le fin tissu qu’elle portait avec un naturel déconcertant. Il lui proposa de se couvrir, mais Halsey ne l’entendit pas de cette oreille, prenant les devants en rétablissant ce qu’elle considérait comme une égalité à part entière, faisant ainsi tomber la chemise de Clyde sur le sol. Peut-être s’attendait-il ensuite à ce qu’elle passe à l’attaque, mais il allait vite se rendre compte que la brunette aimait prendre son temps et savourer l’instant. Faire monter la tension à son paroxysme jusqu’à ce qu’elle devienne tout simplement intenable, jusqu’à ce qu’ils n’aient d’autre choix que de se jeter l’un sur l’autre pour assouvir un désir sous-jacent depuis de nombreux mois. “Si on parle d’égalité… sous ce jupon, il y en a un autre?” Il trompait son trouble en plongeant ses lèvres dans ce verre qu’il avait pourtant répudié quelques minutes auparavant, tirant ainsi un sourire amusé de la jeune femme qui jouait sur un terrain qu’elle maîtrisait plutôt bien. Mais si elle semblait sûre d’elle en apparence, ce qui se passait à l’intérieur de son esprit était une toute autre histoire. « J’en sais rien Wakefield, et si tu venais vérifier par toi-même ? » Le provoqua-t-elle sans même cligner des yeux, lançant ainsi une invitation formelle à descendre en enfer avec elle, s’il le voulait. Passer le cap était une décision importante, qu’ils devraient prendre à deux en connaissance de cause. Franchir la ligne qu’ils avaient dessinées avec tant d’application risquait de fortement changer la donne, et elle ne voulait pas qu’il se joue d’elle en lui rappelant qu’elle était l’instigatrice de leur dérapage contrôlé.