Je n’ai pas beaucoup dormi la nuit dernière. C’était la dernière nuit pendant l’émission, ce matin, c’est l’heure du départ. Je n’ai pas vraiment envie de partir finalement, j’ai encore un goût d’inachevé et de fin d’aventure qui n’est ni de la faute de Martin ni de la mienne. Je vais sûrement détester les chameaux jusqu’à la fin de mon existence. Je ne sais pas où est Jack, ni où sont tous les autres concurrents mais je ne partirai pas avant d’en avoir vu certains. Je ne sais même pas si je vais rentrer à Brisbane, et si je rentre, qu’est ce que je vais bien pouvoir faire ? Je grogne, j’en ai déjà marre. Je vais reprendre ma vie comme elle était avant en continuant de m’inquiéter pour l’argent. Mais sans faire aucun effort pour en dépenser moins ou en gagner plus.

Martin n’est pas très loin alors je m’avance vers lui pour le rejoindre. “J’ai le droit d’insulter les chameaux ou tu vas me faire un procès si je le fais ?” J’essaie de détendre l’atmosphère mais il peut certainement sentir à quel point je suis encore énervée par toute cette histoire et toute cette épreuve merdique. Je soupire et m’assois à côté de lui. “Tu vas rentrer à Brisbane ?” On ne rentrera pas ensemble, on ne va même certainement jamais se revoir et ça me fait légèrement froncer les sourcils. On a été obligé de se supporter pour les besoin de l’émission, et on s’est supporté toute la journée pendant plusieurs semaines. Et je regretterais presque qu’on ait pas été éliminé ensemble, qu’on ait pas dû gérer ce chameau ensemble. L’aventure n’avait pas le même goût avec un autre coéquipier, et je suis assez triste de ne pas avoir profité de la dernière semaine avec lui. Je commençais à m’habituer à lui dans les parages. Mais c’était une parenthèse, avant de reprendre nos vraies vies chacun de notre côté.


@Martin Murphy

La sentence est tombée : Ivy et moi allons devoir quitter le jeu. Alors même que je sois arrivé premier ce qui n'a rien changé aux règles cruel de la télévision. Certes après cette dernière épreuve, de laquelle de nombreux chameaux se sortent sans doute traumatisé, m'a un peu refroidis, je dois dire que ça me crève quand même un peu le cœur de ne pas pouvoir continuer. Après la première semaine je visais au moins la demi finale ! Et plus les semaines passaient plus je nous voyais déjà, Ivy et moi, vainqueur de cette édition. Et pourtant, nous sommes là, à devoir faire nos aux revoir à l'émission alors que nous étions à ça de la demi finale et donc de l'éventuelle victoire.

Lorsque je me réveil le lendemain, je me rends réellement compte que c'est la fin et ça ne me donne absolument pas envie de me lever. Je laisse échapper un grognement puis me tourne sur le côté, tente de me rendormir, mais abandonne l'idée et décide de me lever. Après m'être habillé, je sors de la chambre et me dirige vers le salon où est dressé un beau buffet bien garni. M'armant de fruits frais et d'un café, je vais m'installer à une table où je suis bien rapidement rejoins par Ivy.

S'installant à côté de moi, elle me demande si elle peut insulter les chameaux ou si je veux lui faire un procès si elle le fait.  «T'inquiète, mes amis militants sont déjà sur le coup » dis-je avec un haussement d'épaules des plus naturels.  «Pas pour toi hein. Mais pour contre la production » hochais-je la tête en prenant une bouché de mon melon, mon regard se posant sur Ivy lorsqu'elle me demande si je rentre directement à Brisbane.

 «J'ai absolument pas du tout envie » dis-je en reposant mon fruit sur l'assiette  «Du moins j'ai aucune envie de rentrer en prenant le chemin le plus direct  » je soupire doucement  «J'avais envie de louer un VAN et sillonner un peu la côté avant de rentre à Brisbane en stop.  » je regarde autour de moi  «De toute manière je refuse de prendre l'avion que nous payera la prod'. C'est contre mes principes et ils ne me feront pas monter dedans » sauf en m'anesthésiant.  « Et toi ? Tu comptes rentrer directement ? Ou tu me suivrais dans un p'tit roadtrip en VAN amménagée ?» demandais-je, espiègle.

Je rejoins rapidement Martin ce matin. Je ne sais pas si on doit repartir ensemble ou si ça sera juste la dernière fois qu’on se verra. J’ai du mal à réaliser que le lendemain on ne repartira pas avec nos sac à dos pour s’engueuler sur les routes du fin fond de l’Australie. J’essaie de garder le sourire même si je rage encore beaucoup trop d’avoir perdu à cause d’un animal. Je pense que je ne l’accepterai jamais vraiment. Mais j’essaie de penser rapidement à autre chose, je soupire et je m’assois à côté de lui pour grignoter quelques uns de ses fruits. Il pourra toujours aller en chercher d’autres s’il a faim. Ses amis militants sont déjà sur le coup, ils vont attaquer la production et je ne suis pas contre l’idée. C’est un début de vengeance ça non ? Je fronce les sourcils. “Vous avez de bons avocats ?” Oh que je suis sûre que ce n’est pas le cas et que la production va les manger tout cru si je n’interviens pas. Mais je le laisse décider, s’il ne veut pas je trouverai un autre angle d’attaque.

Le départ qui s’annonce, dans quelques heures on devrait reprendre chacun notre vie de notre côté. Lui non plus n’a pas l’air de vouloir rentrer à Brisbane. Je l’écoute en hochant la tête, il me donnerait presque le détail de son trajet. Je lève les yeux au ciel quand il parle d’avion. “C’est pas comme si t’allais faire 24h d’avion.” C’est vraiment long 24h, surtout quand on est pas en jet privé. C’est long, et épuisant, et il y a trop de monde dans les vols normaux. Je n’ai jamais été habitué à ça. “Non laisse tomber j’ai pas besoin d’explication sur à quel point les avions sont mauvais pour l'environnement.” Parce qu’il serait bien capable d’en Je fronce les sourcils, un sourire en coin au bord des lèvres quand je croise son regard en tournant la tête. “Est ce que tu me proposerais de rentrer avec toi ? T’es pas ravi d’être débarrassé de moi ?” Je pouffe de rire, j’hésite moi-même. Je déteste les vols low cost. Mais est ce que c’est mieux un van aménagé avec Martin ? Tout à coup l’idée me semble assez amusante. “Y’a quoi dans ton van aménagé ?” Je suis sérieusement en train de l’envisager ? Comme quoi tout est possible. “Si tu m’abandonne au bord de la route je fais de ta vie un enfer jusqu’à ma mort.” Un sourire entendu, il le sait que je pourrais mettre mes menaces à exécution.

J'arque un sourcil, mi surpris mi amusé par la question de Mavy. Surpris car, en genéral, ce n'est pas ce qu'on me demande en premier. Souvent c'est plutôt des commentaires du style « comment tu vas t'y prendre ? » ou « t'es sérieux ? » ou encore « mais t'es complètement con ! » et jamais la question de la justice grâce aux avocats n'est posée. Pourtant c'est une des questions les plus légitimes et des plus logiques à vrai dire. Mais le fait qu'Ivy me demande cela est une nouvelle preuve de son côté réfléchis et de l'intelligence qu'elle cache derrière cette façon d'être.

 « On est plutôt bon, oui» dis-je en haussant les épaules  « On a déjà eu plusieurs victoires significatives ces dernières années ...contre plusieurs échec aussi. » j'observe la jeune femme prend un quartier de pomme  «En sommes, je ne veux pas non plus y aller tête baissée comme j'ai trop souvent l'habitude de le faire, mais j'ai envie d'y aller tranquillement, observé et mettre d'autres activistes et pourquoi pas d'autres association sur le coup. Je ... » je me tais subitement, pris d'une brusque idée.  « Tu voudrais pas venir avec moi ? Faire un tour avant de partir pour aller voir les chameaux ? » afin de faire un premier round de reconnaissance et voir si je ne trouve pas un détail qui relève de l'illégalité et de la maltraitance.

En parlant de départ, vient la question de mon amie qui me demande si je compte rentrer directement, ce à quoi je répond par la négation. Déjà ils ne me feront pas monter dans un avion, ça c'est claire et pis en plus je ne suis pas arrivé ici de l'autre côté du pays proche de la côte Est pour repartir directement. J'ai dit à Swann qui serait partie pendant au moins 7 semaines, donc je peux bien me permettre encore une petite exploration, non ?

Lorsque Ivy me répond que 'ce n'est pas comme si j'allais faire 24h d'avion' j'ouvre la bouche, près à me lancer dans un speech sur le pourquoi du comment dans tous les cas l'avion pollue plus que de raisons, mais elle m'interrompt rapidement et décide de changer de sujet, me demandant plutôt ce qu'il y a dans mon van aménagé et si je ne suis pas plutôt heureux d'être enfin débarrasser d'elle.

 «Tu sais, ça fait quoi...4 semaines que je te supporte 24h/24, j'ai pas envie de faire une coupure brusque et arrêter tout ça du jour au lendemain » je secoue la tête  « Donc oui, je suis sérieux : est-ce que tu veux venir avec moi ?» c'est avec un sourire en coin que je l'observe  « Tu veux venir avec moi ?» que je réitère ma demande  « Et dans le VAN de mon ami il y a tout le confort qu'on puisse imaginer. Un lit/tente sur le toit, un coin cuisine pour faire à manger, une douche solaire, des banquettes, des trucs de rangements. Je le connais bien ce Van, je l'ai déjà utiliser pour explorer la partie nord de L'Australie donc bon» je relève mon regard sur Ivy en croquant dans un quartier d'orange  «Par contre ça reste assez sommaire et c'est pas du luxe comme t'y es habitué toi » précisais-je. Autant être sincère avant le départ, pas qu'elle se fasse de fausses idées.

Je suis encore enragée à cause de notre défaite. Je me demande comment c’est possible que Martin ne m’en veuille pas. Je viens tâter le terrain, c’est peut-être la dernière fois qu’on se voit. Alors je continue de lui voler ses fruits et de me nourrir avec tout ce qu’il a mis dans son assiette. Et on parle avocat, allez savoir comment. Je suis capable de faire n’importe quoi pour faire regretter à la production de m’avoir éliminé. “Je voudrais les brûler ces chameaux.” Oh et je sais qu’on ne va pas être d’accord sur ce point de nouveau. “On a perdu à cause d’eux.” Je souffle fort, je me renfrogne sur ma chaise en ramenant mes genoux contre ma poitrine. “On peut pas faire un tour loin des chameaux ?” Sans trop marcher non plus, mais il sait déjà que je déteste marcher trop longtemps.

“Ooooh je vais te manquer ?” Je hausse un sourcil avant de pouffer de rire, qui aurait cru qu’on finirait par bien s’entendre de temps en temps. “Je viens avec toi.” Et il pourra m’entendre râler, au maximum de mes capacités, pendant encore une longue semaine en dehors de la compétition. “J’appelle pas ça du confort.” Je fronce le nez, ça me ferait presque hésiter à partir. Mais j’ai passé 4 semaines à dormir n’importe où, je ne suis pas à une semaine près. “C’est toi qui me propose de partir avec toi. T’as plutôt intérêt à me supporter et à pas être trop chiant.” Je hoche la tête, vole le dernier fruit qui reste dans son assiette avant de me lever. “Allez dépêche.” Et je m’avance pour aller récupérer mes affaires. Mes nombreuses affaires. Oh je l’entends déjà râler d’ici parce que j’ai bien trop de choses à mettre dans ce van.

***

“Arrête de conduire comme un taré.” Je vais finir par être malade, il conduit bien trop vite Martin et je souffle. “J’ai faim.” Autrement dit, il va devoir s’arrêter pour qu’on aille manger quelque chose de bon.  

Et je soupire, je souffle, lorsque pour la 50e fois en 30 minutes Ivy me donne des ordres et des conseils. Fait pas ci, fait pas ça, conduit comme ça mais pas pas comme ça, plus vite, plus doucement, fait gaffe aux nids de poules. Ça fait 4 jours que nous sommes sur les routes et je commence à regretter le fait de lui avoir proposer ce roadtrip. Alors oui, nous voyons des choses magnifiques et des paysages incroyables de la côté ouest et j'apprécie particulièrement mes nuits dans van rétro, mais je pense que j'apprécierais le tout encore plus si j'étais seul. Et pas avec Ivy. Elle peut être adorable, vraiment adorable et nous avons passer plusieurs bons moment ensemble -surtout pendant la nuit- mais aujourd'hui elle est particulièrement chiante.

Ça a commencé ce matin lorsqu'elle a encore du manger la même chose que hier. Pourtant je lui avais dit qu'on devait faire des courses ! Je lui ai dis qu'on n'avait plus que de lait de riz et des flocons d'avoines et qu'il nous manquait même des fruits. Mais non, elle n'a pas voulu s'arrêter parce que 'le quartier était pas cool'. Mais qu'elle aille se faire foutre putain ! Qu'elle cesse de se plaindre !

Alors lorsqu'elle me dit qu'elle a faim, je vois là une opportunité en or et j'hoche la tête  «Ok » dis-je en bifurquant à droite en entrant dans le village  « ça te va ici ?» que je demande à me garant devant un restaurant. Ivy ne se le fait pas dire deux fois fois et descends du van. J'attends qu'elle ait fermé la porte derrière elle, pour activer la fermeture centralisé et ouvrir la fenêtre  «Tu diras bonjours aux araignées et aux serpents de ma part » et c'est, avec un joli fuck adresser à la jeune femme que je redémarre, la laissant là sur le trottoir dans un nuage de poussière. En lançant un coup l'oeil dans mon rétroviseur, je me prend à ricaner doucement. Ça lui apprendra à me faire chier comme ça, putain.

Ca fait quelques jours qu’on est sur la route, et faire le trajet en voiture a quand même quelques bons côtés. J’ai pu voir quelques paysages, et on a fait des arrêts qui étaient intéressants. Mais je suis toujours moi, et on est bien loin des voyages que j’ai l’habitude de faire. Il le sait Martin, et lui aussi il râle parce que je suis chiante. On est chiant tous les deux, je veux bien l’accepter. Et je lui avais dit que je ne changerai pas sur le temps d’un voyage, mais il me l’a proposé, 2 fois. Alors pourquoi il continue de râler comme ça ? Il m’épuise, j’aurais dû rentrer en avion j’aurais été bien plus tranquille. On en a encore pour combien de jours ? Je n’en ai aucune idée, et il ne sait peut-être pas lui non plus.

Je lui dis que j’ai faim, et que rien ne va ce matin. Je suis d’humeur ronchon et il a plutôt intérêt à ne pas être chiant s’il ne veut pas qu’on se hurle dessus tout le long du trajet. J’aurais dû me méfier quand j’ai vu qu’il ne râlait pas, et qu’il a trouvé un restaurant quelques secondes après que j’ai dit avoir faim. En temps normal il ne m’écoute pas, mais on va mettre ma crédulité sur le compte de la fatigue. On ne peut pas dire que je dorme beaucoup. Je sors rapidement, l’appel de l’estomac. J’allais me retourner pour lui parler, pensant qu’il allait sortir de cette voiture en même temps que moi. “Quoi ?” Pourquoi il parle de serpents et d’araignées ? Je me tourne et le vois par la fenêtre. Il me fait un doigt d’honneur et part avec le van. Sérieusement ? “CONNARD !” Je hurle et il s’en va vraiment. Il m’abandonne juste là, au bord de la route alors que je ne sais pas où je suis. Je n’ai pas mes affaires, rien. Il va le regretter, il vaut mieux pour lui que je ne le revois pas de sitôt. Et, en même temps, je me demande comment je vais pouvoir rentrer. Alors je commence à aller vers le restaurant, en regardant derrière au cas où il revienne ? Il va vraiment me laisser là ?

Et me voilà parti. C'est avec un soulagement sans nom que je pousse l'accélérateur du van et que celui-ci laisse derrière lui une Ivy rageuse et râleuse. Je me sens tellement libre tout à coup et tellement parfaitement bien. En vrai, je profite à fond de mon après midi. Je visite les choses à mon rythme, m'arrête quand je veux, mange ce que je veux et marche aussi longtemps que je veux. C'est ça, ce genre de liberté là que j'aime et dont j'avais cruellement besoin. Pendant bien trois quatre heures j'en ai oublié Ivy.

Celle-ci, toutefois, me reviens en mémoire lorsque je retrouve son portable dans ses affaires. Ce portable dont elle ne se sépare jamais, auquel elle est constamment scotché et qui m'emmerde sérieusement. J'avais déjà, à plus d'une reprise, envie de l'envoyer valser par la fenêtre mais ça n'aurait vraiment pas été une bonne idée. Et lorsque je le vois là, cet objet, je soupire doucement, hésite, puis reprend le volant pour aller au super marché et acheter de quoi faire un bon repas ce soir.

Il doit être 19h par là – soit 7h après l'avoir abandonné que le bord de la route- que je retourne au lieu du crime, espérant sincèrement la revoir. Et ça n'y manque pas ! Elle est là, exactement où je l'avais laissé comme si elle n'avait pas bouger de l'après midi. Et la voilà qui m'aperçoit et qui se lève pour se diriger vers moi. Les poings serrer, le regard mauvais, je sais déjà qu'elle va s'en prendre verbalement mais sans doute aussi physiquement à moi.

Et ça n'y manque pas. Se stoppant face à moi elle envoie son poing dans ma direction. Tranquillement, je fais un pas en arrière et attrape son poignet au vol  « Calme toi jeune fille» dis-je en secouant doucement la tête  «C'est pas une manière de dire bonjour à ton sauveur » que je reprend avec un sourire satisfait.

Il m’a vraiment laissé dehors, je n’ai pas de téléphone, et rien du tout pour rentrer à Brisbane toute seule. Je suis restée quelques minutes, je pensais vraiment qu’il allait revenir rapidement mais il faut croire que non. Il m’a laissé là et je lui en veux beaucoup. Il l’a cherché, il m’a proposé de venir alors qu’il le connait mon caractère. S’il ne se sentait pas capable de gérer ça il n’avait qu’à faire son trajet tout seul. Je suis assez déçue, mais surtout très énervée. Et plus le temps passe, plus je suis furieuse. Je ne sais pas ce qu’il va faire, mais s’il ne revient pas, il peut faire une croix sur tout ce qu’il s’est passé, ou sur sa vie s’il fait l’erreur de s’approcher de moi.

Je rentre dans le restaurant et je m’arrange pour que quelqu’un me paie à manger, ça n’aura pas été un problème. Mais je me rends compte qu’il est vraiment possible qu’il ait décidé de finir le trajet tout seul. Et je réfléchis à comment je vais rentrer. Un avion ? Un hélicoptère ? Une voiture ? Je n’en ai aucune idée mais je vais finir par retourner chez moi, avec ou sans Martin. Mais si je dois rentrer par mes propres moyens, je ne veux plus jamais voir le visage de mon ancien binôme.

Je me retrouve au bord de la route, est ce que je vais finir par faire du stop ? Je ne sais même pas où dormir et je ne peux appeler personne vu que mon téléphone est enfermé dans le van. Je tourne la tête, Martin revient, sans le van. Et la rage monte rapidement. Je le hais, je me lève en mode furie et me précipite sur lui. Je serre les poings et je commence à envoyer mon poing fermé vers son visage. Mais il arrête ma première main, et j’envoie la deuxième qu’il arrête aussi et je me retrouve coincé. “Je te déteste.” Je ne sais même pas combien de temps il m’a fait attendre ici. “Mon sauveur ? T’as rien d’un sauveur. J’espère que t’as bien profité de ton après-midi ? Parce que j’étais pas vraiment chiante jusque là.”

Elle tente une attaque que je pare puis une seconde que je contrôle également et elle se trouve là, bloquée, face à moi, tenant ses poignets assez fermement pour pas qu'elle ne tente d'autres choses. Et bien sûr qu'elle gueule, bien sûr qu'elle exprime son mécontentement telle la princesse qu'elle est. Je l'observe, hoche la tête et la laisse me dire qu'elle me déteste et qu'elle n'était même pas chiante jusque là.

C'est un doux sourire qui vient s'afficher sur mon visage alors que j'incline légèrement la tête sur le côté, observant ses yeux qui lancent des éclairs et la maintient encore quelques instants par les poignets avant de la relâcher quand je sais qu'elle ne fera plus rien contre moi. Prenant une profonde inspiration je regarde au dessus de mon épaule  «Vient, suis moi » dis-je en me détournant. Sentant qu'elle ne semble pas convaincue par l'idée de se joindre à moi, je me retourne à nouveau  « Qu'est-ce que tu veux faire là, toute seule, hum ? J'ai toutes tes affaires dans le VAN, ton portable, tes sous, tes papiers, tout. Donc t'as tout intérêt à me suivre en vrai»

Et dans un soupire des plus lourds, Ivy se met en route et, nonchalamment, marche derrière moi. J'accélère un peu le pas puis bifurque vers la gauche, traverse un grillage et me dirige vers un petit étang face auquel est garé le Van. La porte coulissante est ouverte, bordé d'une guirlande éclairé face à laquelle j'ai dressé une table, sur laquelle brille une bougie, et deux chaises.  « Je me disais que tu devais avoir faim donc ...voilà, vient» et je la pousse légèrement pour qu'elle continue la route jusqu'au van  «Tient installe toi » indiquais-je en désignant une chaise sur laquelle se trouve un plaid  «Tu prends du vin ? Ou tu reste à l'eau ? » demandais-je en entrant dans le van, près à décapsuler une bouteille.

J’ai envie de le tuer et lui il a l’air serein. Et ça, ça a le don de m’énerver encore plus. Ca me donne envie de le frapper, et je l’aurais fait s’il n’avait pas arrêté mes deux attaques. Je rage et j’essaie de me dégager mais il tient fermement mes poignets. Il me regarde peut-être quelques minutes, et je ne lâche pas ses yeux. Je soupire, je grogne, mais je laisse mes bras le long de mon corps quand il m’a lâché. Et il me demande de le suivre. “Sérieusement ?” Il arrive, il parle d’être mon sauveur et me demande de le suivre ? Il m’a laissé 7 heures dehors, toute seule, et il débarque comme une fleur sans aucune excuse. Je ne bouge pas, les deux pieds ancrés dans le sol. Je ne vais pas le suivre comme ça, il m’énerve. Mais il a de bons arguments, il a toutes mes affaires, tout ce qui est important. Et surtout, il a mon téléphone et je ne peux pas vivre sans. “Je peux toujours récupérer mes affaires et partir pour trouver quelqu’un qui me laisse pas une journée seule.” Oh oui je l’ai mauvaise et il va en entendre parler pendant un bout de temps.

Je finis par avancer, je n’ai pas vraiment le choix mais je reste à une distance raisonnable de lui, en râlant dans mon coin. Je marche, je ne sais même pas pour combien de temps je vais devoir marcher mais si c’est trop long je vais finir par m’asseoir dans un coin et le laisser lui tout seul. J’observe l’endroit, c’est beau, mais je fronce les sourcils. Qu’est ce qu’il fait ? “Ca pourrait être un bon début d’excuse.” Parce que j’espère qu’il fait ça dans ce but. Il me pousse vers le van et je commence à voir la table et tout ce qu’il a préparé. Il est vraiment bizarre ce mec, j’ai du mal à le suivre. Je croise les bras sur ma poitrine en me tournant vers lui. “Donc tu m’abandonnes pendant toute une journée, et tu prépares un date au bord d’un étang ? T’es pas possible à suivre.” Je secoue la tête, mais je suis un peu (à peine) plus calme qu’il y a quelques minutes. “Il faut au moins du vin pour digérer cette journée.” Et je le regarde entrer dans le van pour sortir une bouteille. “T’en as encore beaucoup des surprise comme ça ?” Je continue de froncer les sourcils. Je me méfie, peut-être que je vais me prendre un verre de vin à la figure on ne sait jamais.

Je soupire doucement et secoue la tête, amusé par la force que met Ivy dans sa frappe. Elle tente une autre attaque mais n’y arrive pas et la voilà bloquée, à fulminer et rager contre  moi tandis que moi je m’amuse un peu de la situation. En soit il n’y absolument rien d’amusant à abandonner une jeune femme au bord de la route, d’autant plus qu’aucun de nous ne connaît l’endroit et que nous sommes relativement éloigné de la ville la plus proche. La pauvre a dû se sentir tellement démunie en vrai. Même si je sais qu’elle se serait débrouillé, elle ne sait pas si qui elle aurait pu tomber et ça aurait pu mal se terminer. Mais tout est bien qui finit bien, non?

Ivy ne semble pas l’entendre de la même oreille mais finit toutefois par me suivre alors que je la conduis vers l’endroit où j’ai garé le van. Fac au lac sur lequel se reflète le couché de soleil, porte coulissante ouverte et table dressé, le tout bordé de petites guirlandes pour donner un petit côté romantique et cozy à la chose, je laisse Ivy s’installer sur une de chaise dont le dossier est recouvert d’un plaid car je sais à quel point elle est frileuse. ”Surprise“ m’exclamais-je en laissant échapper un rire amusé alors qu’elle me dit avoir du mal à me suivre.

Je remet ensuite le petit four en route pour faire chauffer le plat puis revient avec une bouteille de vin italien et deux verres ”J’ai plus d’un tour dans mon sac, oui“ avouais-je en m’installant après nous avoir servi ”Et fallait au moins ça pour m’excuser“ haussais-je les épaules en posant mon regard sur Ivy ”Désolé de t’avoir abandonner au bord de la route“ dis-je avec sincérité ”Mais t’étais juste tellement chiante putain … depuis hier soir j’en peu plus. J’avais besoin de quelques heures seul et je sais que si je te l’avais dit t’aurais crier au scandal et ...enfin bref ça n’excuse pas le fait que je sois parti j’hausse les épaules et lève le verre ”Mais il s’est rien passé et c’est l’essentiel“

J’ai vraiment envie de lui hurler dessus, le frapper m’aurait défoulé mais il a arrêté mes deux mains dans leur élan. Je rage, et il doit le voir dans mes yeux. Lui a l’air calme, fier de ses conneries, ou plutôt, sûr de lui. Comment il peut être aussi sûr de lui alors que la seule chose que j’ai envie de faire à cet instant c’est le laisser là à son tour et me barrer loin avec mon téléphone et mes affaires pour ne plus le voir. On marche, encore. Il ne pouvait pas venir me récupérer directement avec le van ? Et je bug une seconde, je ne comprends pas trop ce qu’il se passe. Le van est garé à côté d’un étang, une table est dressée, il a même placé une guirlande. On dirait vraiment un rencard, c’est un rendez-vous ? Il m’abandonne toute une journée pour organiser un rendez-vous alors que j’ai envie de le noyer dans l’étang ? Je m’assois et le regarde faire. Je me blottis contre le plaid, dans quelques minutes il sera sur mes épaules parce que j’aurais froid, comme tous les soirs. Je souris rapidement avant de secouer la tête et l’observer avec sa bouteille de vin.

Je fronce les sourcils. “T’as prévu des trucs comme ça toute la soirée ?” J’espère, il faut qu’il m’occupe l’esprit pour que je ne pense plus à ce qu’il a fait aujourd’hui. Et puis, en 7 heures, il a eu le temps d’organiser des dizaines de trucs non ? “Tu penses que tu vas t’en sortir juste avec ça ?” Mon sourcils se hausse, je suis un tout petit peu plus calme. Il continue de s’excuser, et c’était presque bien, jusqu’à ce qu’il me dise qu’il m’a laissé au bord de la route pour me laisser là pendant une journée. “Ecoute Martin… je t’ai prévenu, et tu me connais. C’est toi qui m’as demandé de venir, 2 fois. Si tu refais ça une seule fois, on ne se revoit plus jamais.” Je le fixe, je n’ai pas lâché son regard pour qu’il comprenne à quel point cette idée ne m’a pas plu. “Oui ça va il s’est rien passé de grave, je t’ai pas encore noyé.” Je fais tinter mon verre contre le sien, j’avais raison, on avait bien besoin de vin. Mais s’il continue comme ça, je pourrais être un peu moins chiante pour la soirée.

Mon calme est légendaire. J’ai appris, à mes dépends, que pour gérer une Ivy rageuse et énervée, il ne faut surtout pas utiliser la violence car celle-ci ne fait que décupler cette même rage. le risque que ça dégénère ensuite est bien trop grand et personne ne peut alors la contrôler. Du coup je suis là, à la maintenir fermement mais pas trop, juste assez pour qu’elle comprenne qu’elle doive se calmer avant que je ne lui indique de me suivre jusqu’au lac face auquel j’ai garé le van et devant lequel j’ai dressé une table. Un parfait endroit pour un date romantique mais surtout la meilleure façon pour demander pardon à Ivy.

”Tu n’es pas au bout de tes surprises” dis-je, malicieux,  avant prendre une profonde inspiration et commencer à m’excuser. Bien que je ne regrette absolument pas ce qui s’est passé et que je le referais sans doute à nouveau, je me dois de lui faire comprendre que je suis plus que confus de la manière dont ça c’est fait. Et sa réponse est une menace qui, je sais, est belle et bien réelle: si je refais ça encore une fois, nous ne nous reverrons plus jamais. ”y a pas de risque que ça arrive à nouveau, t’inquiète pas” assurais-je avant qu’elle ne me rappelle que j’ai proposé ce road trip en toute connaissance de cause ”mais toi aussi tu sais comment moi je fonctionne” répondais-je du tac au tac ”et ce n’est pas comme si je ne t’avais pas prévenu du confort sommaire et que la bouffe ne sera pas digne d’un trois ou quatres etoiles hein” j’hausse les épaules, refusant de porter le blâme à moi tout seul ”j’ai été sincère avec toi dès le début et tu aurais très bien pu dire non aussi tu sais, ”

Je ne peux pas dire que l’endroit n’est pas à mon goût, bien au contraire. C’est beau, c’est le genre de date original qui sont toujours intéressants. Mais ce n’est pas aussi facile de m’avoir, et je sais qu’il est au courant, Je vais la garder en travers de la gorge cette journée, même si la fin me semble bien mieux que le reste. Je le laisse tout faire, je ne compte pas l’aider une seule seconde. Il l’a dit, il a des choses à se faire pardonner. Des tas. Je reste un peu hostile, même s’il s’excuse à plusieurs reprises. Une nouvelle fois il me dit que je ne suis pas au bout de mes surprises. Je fronce les sourcils, soudain curieuse de tout ce qu’il a bien pu prévoir pour cette soirée. Je lui laisse de l’espace, et je ne crie pas, c’est un bon début.

Il me dit que ça ne se reproduira pas, et je penche légèrement la tête, cherchant à savoir s’il est vraiment sincère. “J’espère bien…” Parce que ce n’est pas non plus dans mes projets de ne plus jamais le voir. Mais je mettrai mes menaces à exécution s’il me trahit une nouvelle fois. Il a pas tort, je me recule sur ma chaise et croise les bras sur ma poitrine. “Tu marque un point.” Parce que s’il sait que je suis chiante moi je sais qu’il peut réagir de manière extrême assez rapidement. C’est pour ça que c’est aussi explosif, on ne peut pas dire qu’on a des caractères compatibles. Et pourtant on est là au bord de cet étang alors que l’aventure est finie pour nous depuis quelques jours déjà. “Je continuerai à espérer qu’on puisse manger quelque chose de mieux que des légumes en boîte ou tes graines bizarres.” Parce que j’ai pu voir ce qu’il mange dans la vie de tous les jours, et c’est vraiment affreux. Grâce à lui je sais au moins que je ne serais jamais vegan. J’aime bien trop la nourriture de tous les coins du monde pour ça. “Je sais.” J’aurais pu dire non mais je n’en avais pas vraiment envie. “T’aurais voulu que je dise non ?” Sans moi, il aurait pu passer toutes ses journées tout seul à faire tout ce qu’il voulait.