And when, when the night falls on you, baby, You're feeling all alone, You won't be on your own. I'll stand by you. Won't let nobody hurt you. I'll stand by you.
J’ouvre un yeux et je découvre qu’il fait nuit noir dans la chambre. Caleb n’est plus contre moi, et pourtant je sais qu’il est là tout prêt de moi. Endormi. Un rapide coup d’œil à l’écran de mon portable, et un long soupir sort de ma bouche en découvrant l’heure. Encore une autre nuit au sommeil agité. A cause d’elles. Parce qu’elles ont visiblement décidé d’être agitées en même temps et ce à trois heures du matin. Et si j’aime les sentir la journée, poser ma main sur mon ventre et sentir qu’elles se manifestent, être réveillée en pleine nuit par des coups de pied dans les côtes, c’est beaucoup, beaucoup moins agréables. Et ça c’est sans tenir compte de ma vessie qui est constamment comprimée et qui ajoute un caractère inconfortable à mon sommeil. Ou encore les contractions de Braxton-Hicks, un nom un peu barbare que j’ai retenu de ma première grossesse et si ces contractions ne sont pas douloureuses elles n’en reste pas moins désagréables surtout en pleine nuit. Et je me dis que je ne suis pas encore dans mon troisième trimestre, et ça me désespère encore un peu plus. Je me lève délicatement, enfin avec toute la délicatesse que mon corps énorme me le permet, et je me faufile jusqu’aux toilettes, en évitant de réveiller Caleb. Elles s’agitent toujours autant, visiblement bien réveillées toutes les deux, alors que pour moi c'est clairement l'heure à laquelle j'aurais besoin qu'elles dorment pour que je puisse en faire autant. J’essaye de leur parler, de caresser mon ventre doucement pour qu’elles cessent de s’agiter dans tout les sens et qu’elles laissent à mon ventre et à mes organes un peu de repos. Je marche un peu dans la maison pour les bercer, parce que c’est quand je suis inactive et calme qu’elles bougent le plus. Alors je bouge un peu, à trois heures du matin je fais les cents pas et après une dizaine de minutes à tourner en rond dans la maison, les coups se font moins nombreux, les mouvements moins douloureux et c’est fatiguée mais avec l’espoir de pouvoir dormir que je me dirige vers notre chambre. Mais au moment où je reprends ma place dans le lit, je sens rapidement que c’est peine perdu et qu’elles n’ont visiblement pas l’intention de dormir et si elles ne dorment pas, je ne vais pas pouvoir non plus. Je me frotte les yeux avant de passer une main dans mes cheveux en soufflant alors que l’agitation dans mon ventre reprends de plus belle. Je soupire et je me réinstalle contre Caleb, doucement je me serre au plus prêt de lui mon dos contre son torse. Je sens son souffle dans mon cou, sa respiration sereine et calme d’un homme qui profite d’un sommeil de qualité. Et je l’envie tellement, je voudrais moi aussi pouvoir dormir sereinement une nuit complète sans être réveillée par les filles, ma vessie ou des douleurs nouvelles à cause de la grossesse. Dormir juste dormir voilà ce que je veux, c’est pourtant pas trop demander non ? Je pose une main sur mon ventre dans l’espoir presque fou de réussir à les calmer mais je sens les coups de l’une des filles à quelques centimètres de la main. Je reste ainsi quelques minutes, une main sur mon ventre et l'autre qui caresse l'avant-bras de Caleb, les yeux fermés j'essaye d'être patiente, j'essaye de me concentrer sur la respiration de Caleb, mes doigts qui caressent désormais la paume de sa main dans laquelle je signe quelques mots. J'essaye de me détendre, de retrouver un peu de sérénité et de concentrer mon esprit sur d'autres choses. J'essaye de leur laisser le temps de se calmer, de me calmer aussi. Mais rien n'y fait et je m’agace, je soupire, je me tourne et me retourne dans le lit sauf que je dois dormir sur le côté gauche encore une précaution à prendre à cause de la grossesse. Alors je me réinstalle et j’essaye de dormir, parce que je suis vraiment épuisée mais rien n’y fait. Elles bougent encore et toujours, appuyant contre mes côtes et je suis dépitée parce que je suis dans ce lit, incapable de calmer mes filles alors que lui, il y arrive. Le soir il arrive à les calmer, il arrive à m'aider à m'endormir, il arrive à me calmer quand je me sens un peu dépassée par les émotions, les hormones, ou la fatigue. Mais il dort, et il dort bien en plus. Et plus les minutes passent et plus je sens que la fatigue me rends moins patiente, c’est déjà pas vraiment ma qualité première en temps normal mais la j’ai l’impression que les filles ont décidé de tester mes limites et je me sens dépitée. Dépassée par ma grossesse. Fatiguée et énervée de ne pas pouvoir juste dormir alors que j’en ai besoin. « Caleb, réveilles toi. » Je me redresse un peu au moment où je me décide de le réveiller. Je lui parle et je dépose un léger baiser au coin de ses lèvres pour m'assurer qu'il se réveille. Je me sens un peu mal à l’idée de le sortir de son sommeil, alors j'essaye de ne pas trop le bousculer, mais j’ai vraiment besoin qu’il m’aide à me calmer et surtout à les calmer pour que je puisse dormir aussi. Je soupire non pas de frustration mais bien parce qu'une nouvelle fois, un coup à hauteur des côtes me fait ressentir comme un coup de jus. « Fais quelque chose s’il te plaît. Je veux juste dormir c’est pas trop demandé non ? Dormir à trois heures du matin. » Il ne doit rien comprendre, c’est bien la première fois que je le réveille pour ça, pour m’aider à dormir, pour m’aider à trouver une solution pour que je puisse me reposer mais là je ne tiens plus. Et si j'ai supporté les nausées du début de grossesse, j'ai supporté le changement de mon corps (avec plus ou moins de réussites), si je supporte l'essoufflement presque permanent au moindre effort, je supporte les douleurs au dos, je supporte les jambes lourdes, je ne suis pas sûre de pouvoir supporter les insomnies et les nuits à être éveillée en attendant qu'elles aient fini leur match de boxe. Et si je me sens coupable de réveiller Caleb, j'ai vraiment besoin qu'il soit à mes côtés la maintenant parce que j'aime nos filles, je les aimes vraiment mais là je suis à deux doigts de craquer parce que je suis juste épuisée et frustrée.
La journée a été longue non sans difficulté. Quand je me suis levé Alex dormait encore et quand je suis partie pour l’Interlude elle ne s’était toujours pas réveillée. Elle semblait bien dormir alors j’ai essayé de faire le moins de bruit possible et avant de partir je lui ai laissé un petit mot lui expliquant les nombreux rendez-vous que j’ai eu ce matin et je lui ai assuré que je ne devrais pas rentrer tard ce soir. Et je le pensais vraiment. Je pensais sincèrement pouvoir rentrer vers vingt-trois heures pour pouvoir passer un peu de temps avec elle avant de retourner me coucher pour me préparer à enchaîner avec une nouvelle journée de travail. Le restaurant a certes, beaucoup de réservations ce soir mais je lui avais promis de ne pas rentrer tard. Les rendez-vous s’enchaînent ce matin et je n’ai pas une seconde à moi mais je réussis tout de même à trouver cinq minutes pour appeler Alex et m’assurer que tout va bien pour elle. Qu’elle n’est pas trop fatiguée, qu’elle a bien réussi à dormir et qu’elle ne compte pas trop en faire cet après-midi, parce qu’il faut qu’elle se repose. La grossesse commence à se faire de plus en plus ressentir entre la fatigue, les douleurs au dos, ses hormones toujours complètement en vrac – mais qu’elle maîtrise beaucoup mieux qu’au début –, elle est essoufflée dès qu’elle fait le moindre effort, bref. C’est compliqué. Très compliqué et j’essaie de l’aider un maximum et de faire le plus de chose possible pour la soulager. Je suis même quelque fois à deux doigts de lui faire livrer à manger à la maison. Peut-être que je devrais songer à le faire un jour, parce que je ne veux pas qu’elle mange de la viande trop cuite – c’est mauvais pour les bébés – ou des pâtes dont elle serait capable de rater la cuisson. Tel est le niveau de cuisine d’Alex et si vous pensiez qu’elle s’était améliorée entre temps je peux vous assurer que c’est faux. Bon, les pâtes maintenant elle réussit à gérer. Plus ou moins. C’est déjà ça. Enfin en même temps il n’y a rien de plus simple à faire. Le service de midi se déroule plutôt bien et si j’aurais aimé rentrer une petite heure cet après-midi pour passer un peu de temps avec elle, j’ai encore un rendez-vous avec le comptable et pas mal d’administratif à terminer avant la fin du mois, je passe donc une bonne partie de mon après-midi enfermé dans mon bureau sans oublier un appel d’une dizaine de minutes avec Alex en guise de pause. Je l’écoute parler de tout et de rien comme elle le fait bien souvent et en raccrochant j’espère pouvoir la revoir assez tôt ce soir. Il y a un an, passer une journée entière au restaurant et rentrer à minuit – voire même plus tard – ne me dérangeait pas. Mais aujourd’hui c’est différent parce que ma vie a bien changé. Il y a une femme magnifique et enceinte qui m’attend chez nous alors j’ai toujours hâte de la retrouver.
J’aurais aimé la retrouver tôt ce soir mais le service a été plein d’imprévus et au final, c’est vers minuit que je rentre. Elle va me dire que je travaille trop et j’ai même presque peur qu’elle m’en veuille de rentrer si tard alors que je lui ai promis à de nombreuses reprises de la rejoindre au plus tôt. Mais je vous assure que là, j’ai fait au plus vite. Je l’embrasse, je file rapidement sous la douche et je la rejoins au lit. Fatigué. Très fatigué et je ne tiens pas très longtemps avant de m’endormir. Je la garde contre moi, une main posée sur son ventre alors que je tombe rapidement dans les bras de Morphée. Persuadé que je m’apprête à passer une bonne nuit, réparatrice. C’était sans compter sur Alex qui me réveille en pleine nuit. J’entends sa voix, je l’entends qui m’appelle, j’ouvre difficilement les yeux mais la première chose que je fais c’est soupirer. Et c’est encore pire quand je vois l’heure. Trois heures passées. Je suis rentré il y a à peine trois heures et j’ai même du mal à garder les yeux ouverts. Instinctivement je les ferme à nouveau jusqu’à ce qu’elle me parle une deuxième fois. « Fais quelque chose s’il te plaît. Je veux juste dormir c’est pas trop demandé non ? Dormir à trois heures du matin. » Je te le fais pas dire. Encore une fois je ne dis rien et je soupire, encore à moitié endormi et j’ai beaucoup de mal à me réveiller. Je me tourne pour me retrouver sur le dos, je me frotte les yeux et je ne m’en rends même pas compte mais je soupire pour la troisième fois depuis que je suis réveillé. « Moi aussi j’aimerais bien dormir. » C’est d’ailleurs avec une voix encore à moitié endormie que je lui dis ça, essayant de me remettre les idées en place je me laisse à nouveau quelques secondes de calme et de répit avant de lui dire « Il est trois heures du matin, Alex. » Elle le sait, elle vient de me le dire elle-même. Il est trois heures du matin et pourtant elle vient de me réveiller pour je ne sais quelle raison. Elle a l’air fatiguée et énervée. Énervée parce qu’elle n’arrive pas à dormir ? Donc elle m’a réveillée parce qu’elle n’arrive pas à trouver le sommeil ? Pas sympa. Je râle un peu mais moi, je dormais bien. Et du sommeil après la journée que je viens de passer j’en ai besoin. « Fais-toi une tisane si tu n’arrives pas à dormir. » Certainement pas cool de ma part, je le sais et je m’en rends compte juste après lui avoir dit ça. Je m’allonge de nouveau, cette fois sur le ventre mais je culpabilise très vite alors quelques secondes plus tard après une lutte contre moi-même et contre mon sommeil qui m’appelle, je me redresse le dos contre la tête de lit et j’allume une lampe de chevet. La lumière est violente, ça fait mal aux yeux et je le fais savoir en râlant. Une nouvelle fois, je me frotte les yeux et prends une grande inspiration avant de lui poser une question. « Qu’est-ce qu’il y a ? T’es préoccupée par quelque chose ? » Garder les yeux ouverts est presque devenu douloureux tant j’ai l’impression d’avoir été privé d’un sommeil dont j’ai pourtant cruellement besoin. Et dire qu’il y a cinq minutes je dormais encore à poing fermé. C’est déprimant.
And when, when the night falls on you, baby, You're feeling all alone, You won't be on your own. I'll stand by you. Won't let nobody hurt you. I'll stand by you.
Je l'entends soupirer, ce qui me prouve qu'il est réveillé alors je n'insiste pas, sauf qu'il ne me réponds pas. Du moins pas immédiatement, alors j'essaye de le solliciter, de lui demander de faire quelque chose pour que je puisse dormir. Il bouge, il soupire voilà tout ce qu'il fait, et je patiente, lui laissant un peu de temps pour se réveiller, jusqu'à ce qu'il daigne me répondre. « Moi aussi j’aimerais bien dormir. » Ok d'accord, c'est bien on est deux alors dans ce cas. Et, un petit truc en moi me donne envie de le secouer suite à cette réponse. Il veut dormir et je semble le déranger ce qu'il ne cache pas puisqu'il soupire encore et encore sans réellement daigner s'intéresser à la raison pour laquelle je le réveille en pleine nuit. Non pire, il fait une fixation sur l'heure. « Il est trois heures du matin, Alex. » OUI TROIS HEURES DU MATIN PUTAIN ! Mais c'est pas à moi qu'il doit dire ça mais à ses filles. Et si lui dort ou dormait, j'ai déjà fait les cents pas dans notre maison pour éviter de le réveiller pour le laisser dormir. Mais d'un coup je me sens un peu moins mal à l'idée de l'avoir réveillée parce qu'il semble penser qu'à son sommeil à lui, alors je me sens moins coupable d'avoir osé le réveiller. « Je sais merci, c'est bien pour ça que j'aimerai pouvoir dormir aussi. » Un peu de sarcasme dans la voix, un peu d'énervement aussi parce qu'il ne m'aide clairement pas, bien au contraire, il renforce même cet agacement que je ressens, qui est même à un stade plus élevé que de l'agacement finalement. « Fais-toi une tisane si tu n’arrives pas à dormir. » Une tisane il est sérieux là ? « Tu sais ou tu peux te la foutre ta tisane. » Des mots qui sortent d'eux même et qui trahissent l'étonnement et la colère que je ressens envers lui à ce moment précis. Une tisane mais oui très bonne idée peut être que ça va apaiser les filles … Ironie ... J’en doute très sérieusement, ce dont je ne doute pas en revanche c’est l’effet de sa foutue tisane sur ma vessie et donc sur mon sommeil futur. Si j’arrive à me rendormir un jour. Je soupire face à sa proposition et je le sens qui se rallonge, sur le ventre. Et je me sens peut-être encore un peu plus énervée d’un coup en réalisant qu’il compte vraiment se recoucher et se rendormir surtout. Je soupire à mon tour, après tout lui il s'est pas gêné pour soupirer à plusieurs reprises, et j'accentue mon soupir pour être sur qu'il entende. Une tisane, j'en reviens toujours pas de sa réponse. Pendant quelques secondes, une idée m'est passé en tête, furtivement, j’ai hésité à lui faire croire que j’avais des contractions juste pour qu’il se réveille vraiment et voir s'il me proposerait encore sa super tisane, mais je sais qu’il paniquerai et à juste titre, et ce serait vraiment méchant de ma part de lui faire une telle frayeur. Et j’ai pas non plus envie de nous porter la poisse. Alors je ne dis rien, me contentant de soupirer bruyamment encore une fois tout en essayant de me réinstaller dans le lit mais cette fois assez loin de lui pour ne pas gêner plus son sommeil qui semble plus important que moi. Je suis injuste avec lui, il doit être fatigué je le sais, mais il n’a pas été là de la journée, pas là de la soirée, trop pris par son restaurant et cette nuit alors que ses filles sont littéralement en train de rouer de coups mes côtes et ma vessie entre autre, lui, il dort tranquille et en plus de ça il me fait bien comprendre que je le dérange dans son sommeil. J’ai presque envie de lui mettre un coup dans les côtes voir s’il peut dormir ainsi et si une tisane l'aidera, mais je sais que c’est ma frustration qui me donne cette idée et qu’encore une fois c’est pas une bonne idée, c'est même une très mauvaise. Je le sais et j’ai pas envie d’être méchante avec lui, même si j’ai des idées pour l’être parce qu’il n’y est pour rien, finalement. Même si son manque de soutien à ce moment précis m'agace. Il m’agace. L’agitation des filles m’agace et le fait d’être privée de sommeil m’agace aussi. Et alors que je me réinstalle assez loin de lui, aussi loin que le matelas me le permet en vérité, je le sens qu'il bouge à nouveau, il ne dort pas donc. Il bouge, je sens qu'il change de position et quelques secondes après, la lumière éclaire la chambre. Je cligne des yeux un peu surprise par la luminosité même si finalement, je suis déjà bien réveillée moi, contrairement à lui qui râle. Et si la journée, Caleb râle rarement, le réveiller en plein milieu de sa nuit, c'est soupirs et mauvaise humeur garantie. Je me tourne vers lui sans forcément me rapprocher, je le regarde il est assit contre la tête du lit, prêt à renoncer à son sommeil pour moi. « Qu’est-ce qu’il y a ? T’es préoccupée par quelque chose ? » Il me demande si je suis préoccupée par quelque chose. Enfin il s'intéresse à moi. Il me connaît pourtant, je suis toujours préoccupée par quelque chose mais cette nuit ce n’est pas une de mes craintes futiles ou existentielles -selon le point de vue- qui me tient éveillée. C’est nos filles. Les siennes autant que les miennes. Et pourtant je suis la seule à en subir les conséquences. Enfin jusqu’à ce que je le réveille, parce qu'il veut tout partager de cette grossesse, alors il va aussi partager les mauvais moments. Je me redresse à mon tour, m'aidant de mes mains, incapable de faire un putain d'abdo avec ce ventre. Dépitant. Je me rapproche un peu de lui et je l'imite en m'adossant contre la tête de lit. Et comme réponse, j’attrape sa main que je pose sur mon ventre, là où les coups s’enchaînent avec une intensité nouvelle. « Tu voulais savoir ce qu’il y a ? Ça fait plusieurs minutes que c’est comme ça. » Et de nouveau je ressens des coups derrière les cotes, suivis d’autres coups plus bas. Et je ne sais pas si c’est la fatigue, la journée trop longue et physiquement épuisante, ou leurs positions de ce soir, mais mon corps semble particulièrement sensible à leurs mouvements cette nuit et je grimace alors que je place ma main sur mon ventre à l’endroit où un pied vient de se manifester. « Je veux bien qu’elles bougent mais pas la nuit, pas au point de me réveiller et surtout pas au point de m'empêcher de me rendormir. J’arrive pas à les calmer et plus ça va, plus elles s’agitent. » Elles s’agitent sans doute parce que je m’agite aussi, du moins je m’énerve. Je le sais, je le sens mais je n'arrive pas à rester zen, pas à trois heures du matin. Je n’ai pas le recul pour y penser et me dire qu'il faut juste que je patiente et que je reste calme. Je regarde un peu Caleb, je peux le voir désormais puisqu’il a allumé la lampe de chevet et je vois à quel point il semble épuisé lui aussi. Les yeux qui se ferment par intermittence, les cernes tirés. Il est fatigué - en même temps il travaille trop, bien trop - et ça semble compliqué pour lui de garder les yeux ouverts. Et je m’en veux tellement d’un coup, parce que je réalise à quel point sa journée a dû être longue et à quel point il doit être éreinté. Mais encore une fois, il travaille bien trop et c'est pas de ma faute s'il fait des journées de douze heures. Je pose ma tête contre son épaule, essayant de m’adoucir un peu et d’éviter de rejeter toute ma frustration sur lui. « Je suis désolée de t’avoir réveillé mais j’en peux plus. Vraiment. J'ai été marcher un peu dans la maison, à trois heures du matin, j'ai essayé de les calmer, mais y'a rien qui fonctionne. Essayes- toi s’il te plaît, enfin fais quelque chose ça peut pas être pire de toute façon. » Pire bien sûr que si ça peut l’être, je le sais mais à cet instant précis je ne pense pas au pire. Je ne pense qu’à ces coups qui m’empêchent de dormir et que je suis sans doute en train de ressentir avec une intensité exacerbée à cause de la fatigue, de la colère et de la frustration autant d’éléments qui me font exagérer encore tout mais sur le moment la douleur est réellement là. J'ai besoin qu'il les calme autant qu'il me calme, et qu'il n'essaye pas de me proposer une nouvelle tisane. « Parle-leur, mets tes mains sur mon ventre, chante s'il le faut, j'en sais rien mais je suis crevée, tu y arrives à les calmer, moi j’arrive à rien à part les faire s'agiter encore plus. » Je grimace à nouveau, je soupire à nouveau, et j'espère juste qu'il va m'aider, ou au moins me soutenir parce que je suis pas loin de craquer cette nuit, parce que je constate que je n'arrive pas à calmer mes propres filles, que je n'arrive pas à gérer ma fatigue et mes hormones, que je n'arrive pas à gérer cette contrariété qui ne devrait pas me mettre dans de tels états.
Il est trois heures du matin. Je suis fatigué. Très fatigué. Et après ne pas avoir passé une bonne journée j’espérais pouvoir passer au moins une bonne nuit de sommeil parce que vous n’imaginez pas à quel point j’en ai besoin. Sauf qu’Alex me réveille pour je ne sais quelle raison et s’il y a bien une chose à ne pas faire chez moi c’est me réveiller en pleine nuit. Ça m’énerve. Surtout qu’elle me réveille parce qu’elle dit ne pas réussir à dormir. Donc je dois aussi l’accompagner dans ses insomnies ? Je suis présent pour elle, à l’écoute et investi dans la grossesse du moins j’essaie vraiment de l’être comme je le peux. En faisant mon maximum. Sauf qu’elle ne semble pas en prendre compte. Moi je suis juste fatigué. Et un peu énervé par ce réveil soudain. « Je sais merci, c'est bien pour ça que j'aimerai pouvoir dormir aussi. » Je suis désolé qu’elle ne parvient pas à trouver le sommeil. Je le suis vraiment. Mais je ne vois pas ce que je peux faire pour elle alors oui, honnêtement je ne lui dis pas grand-chose mais la seule proposition que je lui fais ne semble pas lui plaire du tout. « Tu sais ou tu peux te la foutre ta tisane. » Elle est de mauvaise humeur parce qu’elle n’arrive pas à dormir sûrement et c’est ce que je n’arrête pas de me dire pour essayer de ne pas m’énerver à mon tour alors je reste mutique préférant ne pas rentrer dans son jeu. Je me rendors déjà à moitié en me rallongeant et je l’entends soupirer bruyamment tout en bougeant elle aussi du lit. Je sens qu’elle s’éloigne de moi. Beaucoup. Je ne peux même pas la prendre contre moi alors que j’aurais aimé le faire puisqu’elle semble vouloir se tenir à distance de moi, ce qui pourrait presque me blesser parce qu’on a l’habitude de s’endormir l’un contre l’autre mais ça ne semble pas être dans ses plans ce soir. Je n’insiste pas, je ne dis toujours rien mais très vite elle réussit à me faire culpabiliser. Alors je cède. Comme toujours avec elle. Aussi parce que je n’ai pas envie de me disputer avec Alex ce soir je finis à contrecœur par me redresser dans le lit. J’allume la lampe de chevet de mon côté et ça me tue les yeux. Littéralement. Je viens de faire une croix sur mon sommeil pour lui prouver que je suis attentif à elle parce que je suis persuadé qu’elle doit être en train de se dire le contraire. Alors que je fais un pas vers elle, ce n’est pas la même chose de son côté elle reste loin de moi et elle ne se rapproche un peu que lorsque je lui demande les raisons de son insomnie. Commençant par attraper ma main pour la poser sur son ventre je comprends tout de suite mieux la situation. Je sens nos filles bouger. Pas qu’un tout petit peu. On dirait qu’elles sont en pleine répétition de danse. « Tu voulais savoir ce qu’il y a ? Ça fait plusieurs minutes que c’est comme ça. » Je comprends que ça puisse être agaçant même si je ne vois toujours pas ce que je peux faire pour elle et pour l’aider à s’endormir. Je n’ai aucun pouvoir sur sa grossesse et sur les mouvements de nos filles. Quelque fois elles se calment quand je leur parle. Quelque fois. Mais pas tout le temps. J’ai envie de lui dire ça mais je me risque à une nouvelle réponse extrêmement désagréable comme celle de tout à l’heure. Je laisse mes mains sur son ventre et elles s’agitent toujours autant. C’est désagréable pour elle. Je comprends. Enfin je peux le comprendre du moins. « Je suis désolé. » Mais je ne vois pas ce que je peux y faire. C’est ce que j’aurais dû répondre pour être réellement honnête mais je ne le suis pas, parce que ça ne va pas lui plaire et qu’elle risque de s’emballer encore si je lui dis ça. J’ôte ma main de son ventre pour la placer dans mes cheveux – qu’elle doit sûrement trouver trop longs – refermant les yeux quelques secondes, jusqu’à ce qu’elle ne reprenne la parole. « Je veux bien qu’elles bougent mais pas la nuit, pas au point de me réveiller et surtout pas au point de m'empêcher de me rendormir. J’arrive pas à les calmer et plus ça va, plus elles s’agitent. » J’hausse les épaules et c’est toujours la même réponse qui me brûle les lèvres mais que je ne dirais pas. Croisant mes bras contre mon torse je me laisse quelques secondes avant de lui répondre. « Qu’est-ce que je peux faire ? » Pas grand-chose, voire même rien. À part l’accompagner dans son insomnie ce qui me motive assez moyennement mais c’est bien pour ça qu’elle m’a réveillée, non ? Pas cool. Pas cool du tout. Et c’est en posant sa tête sur mon épaule qu’elle me répond. « Je suis désolée de t’avoir réveillé mais j’en peux plus. Vraiment. J'ai été marcher un peu dans la maison, à trois heures du matin, j'ai essayé de les calmer, mais y'a rien qui fonctionne. Essayes- toi s’il te plaît, enfin fais quelque chose ça peut pas être pire de toute façon. » Dès qu’elle me demande d’essayer de les calmer, je tourne la tête vers elle pour la regarder. Oui, quelque fois elles se calme quand je leur parle mais c’est sans aucun doute une pure coïncidence, rien de plus. « Bébé, si toi tu n’y arrives pas ça sera la même chose avec moi. » Elles doivent juste avoir besoin de bouger. Alors oui, le faire en pleine nuit c’est pas super mais je doute fortement que de là où elles sont, elles aient une quelconque notion du temps. « Parle-leur, mets tes mains sur mon ventre, chante s'il le faut, j'en sais rien mais je suis crevée, tu y arrives à les calmer, moi j’arrive à rien à part les faire s'agiter encore plus. » Je ne peux pas lui refuser ça et en soit, je n’ai rien à perdre alors j’accepte. Une nouvelle fois je passe une main dans mes cheveux déjà certainement bien trop décoiffés des trois petites heures de sommeil que j’ai pu avoir. « Ok, je vais essayer mais je te promets rien… » Ce n’est pas parce que j’ai réussi à les calmer une ou deux fois – ou peut-être plus – que je vais être tout aussi chanceux ce soir. Je me baisse alors jusqu’à son ventre, posant dans un premier temps une main dessus et je sens un coup de pied, et puis un autre. « Qu’est-ce qu’il se passe mes princesses ? » Je leur pose une question et je n’attends pas vraiment une réponse de leur part. De toute façon je ne peux pas en avoir. « Vous savez qu’il est trois heures du matin et que votre mère a besoin de dormir un petit peu ? » Encore une question, c’est un peu bête de ma part mais sur le coup je ne m’en rends vraiment pas compte. « Et moi aussi, d’ailleurs. Je suis vraiment fatigué. Mais vous allez l’air en forme vous deux. Je suis sûr que vous allez être des grandes sportives comme votre mère si vous êtes tout aussi hyperactives plus tard. Ou bien des danseuses ? Parce que qu’on dirait que vous êtes en pleine répétition d’une chorégraphie. J’adore vous sentir bouger et je sais que votre mère aussi. Mais à trois heures du matin c’est un peu moins plaisant vous savez. » C’est bizarre parce qu’honnêtement je ne sais pas vraiment quoi dire là, maintenant. Je suis surtout fatigué et j’ai un peu de mal à réfléchir mais je lève les yeux vers Alex comme pour attendre qu’elle me dise si elles bougent toujours autant ou non.
And when, when the night falls on you, baby, You're feeling all alone, You won't be on your own. I'll stand by you. Won't let nobody hurt you. I'll stand by you.
Il s'est réveillé pour moi, enfin à cause de moi. Mais il a choisit de se relever et de s'intéresser aux raisons qui me poussent à l'avoir réveillé. Sans vraiment lui expliquer, je place sa main sur mon ventre pour qu'il comprenne de lui même, chose qu'il semble faire puisqu'il s'excuse. Même s'il n'a pas vraiment à s'excuser, à part s'il s'excuse pour sa super idée de tisane, le fait qu'il soit réveillé et qu'il ne se moque pas totalement de ce que je ressens, ça a tendance à me calmer, légèrement. Je n'ai plus à m'agiter dans le lit en soupirant frustrée de sa réaction. Il est réveillé et il va pouvoir m'aider à supporter ça, je vais pouvoir partager les émotions négatives que je ressens et ne pas ruminer toute seule dans mon coin. Il retire sa main de mon ventre, je suis du regard sa main qui se loge dans ses cheveux, alors soit il est énervé, soit stressé, soit désespéré, soit il réfléchit, je ne sais pas mais je ne comprends pas pourquoi il a retiré sa main pour la passer dans ses cheveux, alors que tout ce que je veux c'est qu'il réussisse à les calmer. Normalement c'est lui qui cherche à poser ses mains sur mon ventre à chaque occasion, pourquoi là il le fait pas ? La fatigue me fait beaucoup trop réfléchir sur des conneries, alors au lieu de lui reprendre la main pour la reposer sur mon ventre, quand il me demande ce qu'il peut faire, je lui explique ce que j'attends de lui. Ce qui en soit est simple et tiens en quelques mots : calmer les filles. Et peut-être me calmer moi aussi par la même occasion mais pour ça, je dois le faire toute seule, du moins essayer. Et c'est sans doute dans cette optique, celle de trouver le réconfort auprès de lui, que je pose ma tête sur son épaule. J'ai essayé de les calmer, j'ai essayé de les bercer en bougeant, j'ai essayé vraiment mais je me suis confrontée à des échecs sur échecs et mon dernier espoir c'est lui. En vrai, je sais qu'il faudrait juste que j'attende, que je m'allonge et que j'attende mais ne rien faire ne fait qu'augmenter ma frustration et l'agitation des filles. « Bébé, si toi tu n’y arrives pas ça sera la même chose avec moi. » Alors quand il me dit, avant même d'avoir essayé, que le résultat sera le même avec lui, je soupire à nouveau, parce que ce n'est clairement pas la réponse que j'attends. « Ne me demande pas de me recoucher et d'attendre sans rien faire parce que ça va pas être possible. » Il n'y a pas d’agressivité ou de méchanceté dans ma remarque, juste de la frustration et de la fatigue. « Les filles, ça suffit maintenant. » Toujours de la frustration et peut-être un peu d'agitation et de colère cette fois alors que je m'adresse à elles. C'est la première fois que je suis à deux doigts de m'énerver contre les filles alors qu'elles sont encore dans mon ventre. Et je regarde Caleb, dépitée alors que je lui demande de faire quelque chose pour les calmer. Leur parler, caresser mon ventre, chanter, n'importe quoi mais au moins qu'il essaye quelque chose pour les calmer, et à défaut de réussir pour me soutenir et me changer les idées. « Ok, je vais essayer mais je te promets rien… » C'est tout ce que je veux comme réaction, qu'il me dise qu'il va essayer et aussi qu'il soit un peu avec moi, c'est égoïste sans doute. Vouloir qu'il soit réveillé et qu'il m'aide à passer ce moment désagréable, c'est égoïste oui totalement et je m'en rends compte mais j'ai vraiment besoin de lui là. « C'est vraiment tout ce que je te demande, d'essayer quelque chose parce que moi je désespère. » Je pense qu'il a remarqué tout ça, mais je me rassure quelques secondes quand je le vois bouger et se mettre à hauteur de mon ventre. Je me rassure en me disant qu'il va faire quelque chose. Qu'il va me soutenir et m'aider. Sa main se pose sur mon ventre et ce geste est suivis d'un coup de la part d'une des filles, et bien ça se présente mal, mais je ne dis rien. Je ferme les yeux quelques secondes alors qu'il commence à leur parler. Je ferme les yeux et je me concentre sur ma respiration avant d'ouvrir les yeux et de le regarder parler à nos filles. « Qu’est-ce qu’il se passe mes princesses ? Vous savez qu’il est trois heures du matin et que votre mère a besoin de dormir un petit peu ? » Assisse, le dos contre la tête de lit, je le regarde parler à mon ventre et la tendresse qui se dégage de cette vision arrive à me faire sourire, un peu, malgré la fatigue, malgré la frustration que je ressens, il réussit à me faire sourire. Je me sens moins seule, parce qu'il est là et que malgré sa propre fatigue, il s’exécute pour me rendre la vie -le moment- moins difficile. Il est fatigué lui aussi, je le vois à son visage, à son attitude mais il prends le temps, il essaye de calmer les filles et je le laisse faire. De toute façon, j'ai déjà essayé et ce fut un échec cuisant alors je me repose sur lui, encore une fois. Espérant vraiment qu'il trouvera une solution miracle pour que nous puissions nous rendormir tout les deux. « Et moi aussi, d’ailleurs. Je suis vraiment fatigué. Mais vous allez l’air en forme vous deux. Je suis sûr que vous allez être des grandes sportives comme votre mère si vous êtes tout aussi hyperactives plus tard. Ou bien des danseuses ? Parce que qu’on dirait que vous êtes en pleine répétition d’une chorégraphie. J’adore vous sentir bouger et je sais que votre mère aussi. Mais à trois heures du matin c’est un peu moins plaisant vous savez. » Et c'est pas moi qui vais le contredire. Oui j'aime les sentir bouger, j'aime ça la journée, j'aime ça le soir avant de m'endormir, ces moments de partage mais pas à trois heures du matin, pas au point que ça en soit au mieux désagréable, au pire douloureux. J'attends quelques minutes, silencieuse, le laissant converser avec nos filles -avec mon ventre- alors que sa main sur mon ventre est censée calmer les filles. Du moins dans le monde idéal, dans mon rêve ce serait comme ça. Sauf que je suis bien réveillée et qu'elles ne semblent pas vouloir que je replonge au pays des rêves de sitôt. « Je remarque que tu es bien plus bavard quand tu parles à mon ventre. » Un trait d'humour de ma part, du moins un essai d'humour alors que je sens toujours les filles bouger et continuer leurs étirements en rythme et qu'une légère grimace témoigne de ce que je ressens. Comment de si petites choses peuvent me faire aussi mal ? Et je me demande si c'est parce qu'elles sont deux que je les ressens avec autant de force, mais je n'ai pas de souvenir d'avoir eu autant de douleurs si tôt avec Nathan. Faut dire qu'il s'est caché longtemps, et qu'il a continué à se faire discret, sans doute qu'il avait senti qu'il n'était pas désiré, et je m'en veux en peu de repenser à ça, de repenser à lui. Je ferme les yeux quelques secondes et à nouveau je soupire. Je soupire parce qu'elles bougent encore malgré la tentative de Caleb, et je soupire surtout pour essayer d'évacuer les émotions que je ressens. Cette nuit va avoir raison de moi si je continue à être aussi négative, si je laisse la frustration prendre le dessus, et je ne le veux pas même si c'est tentant de me lever et de m’énerver pour évacuer mes émotions négatives. Mais je reste là dans le lit au côté de Caleb à le regarder avec un petit air dépité en constatant l'échec de sa tentative. Je secoue la tête de gauche à droite comme pour répondre à une question qu'il n'a pourtant pas prononcée mais je la devine à sa façon de me regarder. Une main qui caresse sa nuque, j'essaye de me concentrer sur nous. Sur ce qu'il fait pour moi malgré le fait qu'il n'ait qu'une envie celle de dormir, sur ce sommeil qu'il sacrifie pour me soutenir. « J'apprécie l'effort bébé mais c'est un échec aussi pour toi. J'aurais bien aimé que tu réussisses mais ça me rassure de voir que tu n'as pas plus de pouvoir sur nos filles. A moins que tu n’aies pas dis ton dernier mot ? » J'essaye de lui sourire, de lui montrer que je suis capable de plaisanter, que je ne lui en veux pas de ne pas avoir réussi, mais je ne suis même pas sur qu'il puisse vraiment saisir tout ça, ni même qu'il ait vraiment envie de rire, alors qu'il est aussi fatigué, voir plus fatigué que moi. Moi j'ai pas spécialement envie de rire mais j'essaye d'être positive, j'essaye vraiment sinon je vais finir par me lever et enfiler mes baskets pour aller courir en pleine nuit, peut-être qu'elles se calmeraient ceci dit. Mais pas sur que la méthode soit approuvée par Caleb ou par mon médecin. Une main sur mon ventre, l'autre qui joue avec les boucles de ses cheveux, plus épaisses et plus longues qu'à l'accoutumée, je sens que la nuit va être longue, ou courte si on parle en terme de sommeil. Et à ce moment je réalise une chose qui ne me rassure pas. « Tu sais que c'est que le début là. Et, j'suis pas sûre d'être prête à devoir renoncer à mes nuits complètes pour les mois à venir, on va faire comment avec deux bébés qui ne font pas leurs nuits ? » Vu comment je gère le manque de sommeil et comment lui il est quand son sommeil est perturbé, les mois à venir s'annoncent compliqués, et je crois que c'est un premier aperçu de ce qu'il nous attends, entre les pleurs, les biberons, les couches, et le tout multiplié par deux en pleine nuit. « Tu devras vraiment travailler moins quand elles seront là, sinon tu vas pas tenir. » J'essaye que cette phrase ne sonne pas comme un reproche, parce que s'en est pas un, je m'inquiète pour lui aussi, mais ce serait mentir de dire qu'il n'y a pas une petite touche de reproche quand même. Il est parti je dormais, il est rentré j'étais couchée. Une journée entière passée au restaurant, et je ne veux pas lui reprocher ça, mais j'ai besoin qu'il sache que lorsque les filles seront avec nous, il ne pourra pas partir douze heures comme ça. Autant pour lui, pour moi que pour notre famille. « Si ça se trouve elles bougent autant parce qu'elles se sentent délaissées aujourd'hui, en manque de câlins de leur père. » Je le regarde en souriant, loin de moi l'idée de vouloir le faire culpabiliser, c'est surtout un moyen de plaisanter sur son absence, sur l'agitation inhabituelle des filles, sur cette situation qui nous pousse à être ensemble, réveillés à trois heures du matin alors qu'on préférait tout les deux dormir. Histoire d'évacuer les tensions, j'essaye de détendre l’atmosphère à défaut de réussir à me détendre moi. Et un nouveau coup ma rappelle à l'ordre, je bouge un peu, je cherche une position plus confortable que la position assisse, et je soupire, encore. Et dire que je suis déjà énorme et que je n'ai fais qu'à peine plus de la moitié et qu'il reste le pire à venir. Une nouvelle pensée pas très optimiste, heureusement que j'ai dis que je ne laisserais pas la frustration prendre le dessus. « Merci de me tenir compagnie, je sais que tu es fatigué alors merci de ne pas t'être rendormi. » En même temps il a pas vraiment eu le choix, enfin il aurait pu se rendormir, je l'aurais sans doute laissée faire mais il ne l'a pas fait et il est là réveillé dans ce lit avec moi, à m'écouter parler de mes états d’âme tout en espérant sans doute autant que moi que les filles arrêtent de s'agiter.
Je crois que c’est la première fois que je vois Alex aussi énervée et aussi agacée sur quelque chose qui touche à la grossesse. Si on oublie les nausées et sa prise de poids importante. Je sens qu’elles bougent effectivement. Beaucoup. Bien plus qu’habituellement. Je peux comprendre que ce soit énervant pour elle mais ça ne veut pas dire que j’accepte sans problème qu’elle me réveille en pleine nuit pour ça. Alors que j’ai passé une longue journée au travail. Assez compliquée. Peut-être que c’est aussi un peu une façon pour elle de me monter qu’elle n’apprécie pas que je sois rentré si tard alors que durant la journée je lui avais à plusieurs reprises dit que je rentrerai tôt. « Les filles, ça suffit maintenant. » Cette fois c’est à Lucy et Lena qu’elle s’adresse et sa voix est clairement remplie d’agacement voire même de colère. C’est la première fois que je l’entends leur parler ainsi et ça me fait bizarre, tout comme ça ne me plait pas beaucoup. Mais je ne peux rien dire parce que je ne peux pas comprendre ce qu’elle vit en ce moment, je ne comprends pas l’état d’esprit dans lequel elle se trouve maintenant alors je la laisse faire sans aucun commentaire supplémentaire. Alors je lui dis que je vais essayer de leur parler pour les calmer. Bien que je ne sois pas plus doué qu’elle là-dessus, je ne vois pas pourquoi elle pense que je peux y arriver. « C'est vraiment tout ce que je te demande, d'essayer quelque chose parce que moi je désespère. » Je le vois bien, qu’elle désespère. Je le vois et je le sens. Elle en a marre. Alors comme promis, je me baisse au niveau de son ventre. Mon premier réflexe est de poser une main dessus, ce qui en fait réagir une puisque je sens son pied entrer en contact avec ma main. Ce qui, forcément me fait un peu sourire. Parce que c’est encore relativement nouveau pour moi tout ça. Et puis je leur parle et honnêtement, je ne sais pas quoi dire. Il est trois heures du matin et normalement je suis censé dormir à cette heure-là et je suis encore bien trop dans le flou pour dire des choses censées et intéressantes. Elles bougent toujours je les sens et donc je me rends compte que ma tentative se conclue en en véritable échec. Mais je lui avais dit de toute façon ; je suis nul. « Je remarque que tu es bien plus bavard quand tu parles à mon ventre. » J’hausse doucement les épaules et relevant le regard vers elle et je la vois grimacer juste au même moment. Donc on en est là ? Les coups lui font maintenant mal et moi je ne suis pas capable de calmer mes filles ? Je commence presque à m’en vouloir et même si je suis extrêmement fatigué je ne dois pas abandonner avant qu’elles ne se calment au moins un minimum. Elle grimace, elle soupire et moi je reste impuissant face à tout ça. Comme à tout ce qui touche à la grossesse. « Désolé. » Je m’excuse parce qu’elle comptait sur moi et que je ne suis pas capable de calmer nos filles. « J'apprécie l'effort bébé mais c'est un échec aussi pour toi. J'aurais bien aimé que tu réussisses mais ça me rassure de voir que tu n'as pas plus de pouvoir sur nos filles. A moins que tu n’aies pas dis ton dernier mot ? » Je secoue la tête de droite à gauche lui faisant comprendre que je n’ai pas encore terminé. « Je vais encore essayer, même si je ne suis apparemment pas très efficace. » Dire que je ne le suis pas du tout serait même bien plus vrai. Pourtant j’aurais pu lui dire que j’abandonnais pour retourner dormir. Parce que la fatigue est toujours bien présente et il n’y a qu’à regarder mes énormes cernes et mes petits yeux pour s’en rendre compte. « Tu sais que c'est que le début là. Et, j'suis pas sûre d'être prête à devoir renoncer à mes nuits complètes pour les mois à venir, on va faire comment avec deux bébés qui ne font pas leurs nuits ? » Je ferme les yeux en l’entendant me dire ça. Parce que si j’y avais bien sûr déjà pensé plusieurs fois, ce qu’on est en train de vivre ce soir c’est un peu comme un avant-goût de ce qui nous attend dans quelques semaines. Je soupire légèrement montrant mon désespoir. « Je préfère ne pas y penser… » Pour une fois, c’est moi qui choisis le déni comme mécanisme de défense. « Tu devras vraiment travailler moins quand elles seront là, sinon tu vas pas tenir. » Moi je devrais compter le nombre de fois – sûrement incalculable – où elle m’a fait une remarque de ce genre. Je sais très bien qu’elle doit m’en vouloir un peu de travailler autant mais ce qu’elle ne semble pas prendre en compte c’est que j’ai considérablement réduis mes heures de travail depuis l’annonce de sa grossesse. Aujourd’hui, c’était exceptionnel. « Je travaille déjà beaucoup moins, Alex… » Je soupire légèrement, parce que ce n’est pas la première fois qu’elle me fait une remarque de ce genre et même si je sais que ce n’est pas méchant de sa part, ça m’agace un peu. « Si ça se trouve elles bougent autant parce qu'elles se sentent délaissées aujourd'hui, en manque de câlins de leur père. » Et là, elle joue clairement avec mes sentiments et j’ai réellement l’impression qu’elle cherche à me faire culpabiliser – malgré son petit sourire. – Et ça marche. « Je suis vraiment désolé pour aujourd’hui. J’ai passé une sale journée au boulot, et je sais que tu vas me dire que je dois apprendre à déléguer, sauf qu’en tant que patron il y a des choses que je suis obligé de gérer moi-même. » Et je veux qu’elle le comprenne et qu’elle l’accepte. « Mais je suis vraiment désolé. » J’aurais préféré être à la maison avec elles, ce soir. Mais je n’ai pas pu tenir ma promesse de rentrer le plus tôt possible. Peut-être que si les filles sont si agitées ce soir c’est en partie de ma faute au final. Pace qu’Alex a été énervée de ne pas me voir rentrer et elles l’ont ressenti. « Merci de me tenir compagnie, je sais que tu es fatigué alors merci de ne pas t'être rendormi. » Une nouvelle fois, j’hausse les épaules. Je sais qu’elle m’en aurait voulu si j’étais parti me rendormir et je ne cherche pas à me disputer avec elle. Et avant de parler de nouveau aux filles, je me racle la gorge. « Vous avez l’air aussi têtues que votre mère. » C’est en lâchant un petit rire – sûrement le premier depuis que je suis réveillé – que je leur dis ça. « Donc je vais essayer de vous raconter une histoire, soyez indulgentes s’il vous plait je suis pas très doué pour ce genre de chose. Donc... » Je me pince les lèvres, me laissant quelques secondes de réflexions. « C’est l’histoire d’une jeune femme, elle s’appelle Alexandra. La veille de son vingtième anniversaire elle rencontre un garçon. Pas très doué avec les filles. Mais vous savez, dès que son regard a croisé celui d’Alexandra il est tombé amoureux d’elle. Il a passé la journée entière à penser à elle et je ne sais toujours pas comment il a trouvé le courage pour l’appeler et lui proposer un rendez-vous le soir-même. Et elle a accepté. Il n’a d’ailleurs jamais compris pourquoi et comment elle avait fait pour accepter un rendez-vous avec lui. Parce que vous savez, Alexandra c’était la plus belle femme qu’il n’avait jamais rencontrée et qu’elle accepte un rendez-vous galant avec lui c’était inespéré et surtout complètement fou. C’est sûrement a soirée la plus stressante qu’il n’a jamais passée de sa vie. Encore à l’heure d’aujourd’hui d’ailleurs. Il s’apprêtait à passer une soirée avec la fille qui le faisait complètement craquer mais souvenez-vous : il était vraiment, vraiment pas doué avec les filles. Et pourtant… cette soirée-là ils sont tombés amoureux tous les deux. C’était vraiment mignon. Aujourd’hui ce garçon est toujours fou amoureux d’Alexandra et ils vont bientôt avoir des enfants tous les deux. Ils ont trouvé leur bonheur. » C’est assez rare que je parle autant, je dis tout ça d’une traite sans vraiment relever la tête vers Alex une fois. Je leur raconte notre histoire, pas très original, mais assez symbolique en même temps. Peut-être que cette histoire va les apaiser un peu.
And when, when the night falls on you, baby, You're feeling all alone, You won't be on your own. I'll stand by you. Won't let nobody hurt you. I'll stand by you.
Il a essayé, il a prit le temps pour tenter de calmer les filles, mais surtout il s'est plié à ma demande, celle de faire quelque chose. Même si ça ne fonctionne pas, il a essayé et je ne lui en veux pas de ne pas avoir réussi. Je lui en aurais voulu de ne pas essayer par contre, mais là je ne peux pas lui en tenir rigueur. Elles bougent, elles ont décidé d'être particulièrement agitées en même temps cette nuit, et je dois accepter ce fait même si mon état de fatigue et mon état émotionnel ne m'aide pas à relativiser les choses. Je suis clairement fatiguée, énervée, dépitée, frustrée enfin j'en ai marre quoi. Et, plus les minutes passent et plus je me sens irritable et agacée mais je ne veux pas m'en prendre à Caleb, plus que je ne l'ai déjà fait. J'essaye de relativiser, j'essaye vraiment. J'essaye même un peu d'humour en faisant remarquer à Caleb qu'il parle bien plus à mon ventre qu'il peut le faire en temps normal, mais ça ne prends pas. Ni sur lui, ni sur moi et pas non plus sur les filles qui me rappellent leur présence, comme si je pouvais les oublier. Je grimace, je soupire. « Désolé. » Caleb s'excuse, mais ce n'est pas sa faute. Je lui fais un léger sourire. « C'est pas ta faute. » Je le pense sincèrement pour le coup, et si parfois j'aime lui rappeler que si je suis enceinte c'est sa faute, pas cette nuit. Parce que si je reste éveillée à cause des filles, lui aussi est réveillé et me tient compagnie alors il est finalement lui aussi contrarié par les inconvénients de la grossesse, même s'il ne les sent pas bouger dans tout les sens, il est privé de son sommeil et il n'en est pas obligé. Il aurait pu se rendormir, il aurait pu me dire qu'il avait eu une longue journée et me dire qu'il ne pouvait rien faire pour moi et que je devais attendre. Il aurait pu, mais c'est Caleb et il n'est pas comme ça. Il me confirme d'ailleurs qu'il va encore essayer de les calmer. « On est deux à ne pas l'être et je devrais réussir à les calmer moi, mais je n'y arrive pas. » Je soupire non pas parce qu'elles bougent encore, mais parce que je réalise que je ne suis juste pas douée avec elles, déjà. Je n'y arrive pas, déjà. Et je me repose sur Caleb, déjà. Elles ne sont même pas encore là, que je suis déjà en train d'échouer. Et voilà les émotions négatives qui reviennent, voilà les doutes qui font leurs apparitions, et je refuse de laisser la nuit, la fatigue et la frustration gagner. J'ai eu trop de nuits hantées par mes doutes et ce sentiment d'être une incapable, je ne veux pas que ça recommence. Alors je pense à autre chose, je pense à ces futures nuits quand elles seront là, quand on devra se réveiller Caleb et moi. Je pense à ça pour ne pas penser à autre chose. Sauf que ce sujet c'est visiblement Caleb qui ne veut pas y penser puisqu'il me le dit en soupirant. Et il a peut-être raison, on a le temps d'y penser plus tard, une nuit après l'autre, on fera face et c'est cette nuit qui compte pour le moment. Sauf que même s'il ne veut clairement pas y penser, quand je vois sur état de fatigue, je me dis qu'il devra bien y penser à un moment et adapter son temps de travail en conséquence parce qu'il ne tiendra pas. Et c'est avec un énième soupir qu'il me réponds. « Je travaille déjà beaucoup moins, Alex… » Me dire ça après une telle journée, c'est pas vraiment crédible, même si je sais que c'est une journée exceptionnelle. Mais il travaille peut-être beaucoup moins certes, mais c'était aussi parce qu'avant il passait littéralement tout son temps au travail, enfin j’étais pas là avant, mais je m’en doute et puis il me l’a déjà dit. Alors oui il travaille moins mais il travaille encore trop, mais je n'insiste pas, pas cette fois en tout cas. Du moins pas directement, parce que je remets sur le tapis son absence d'aujourd'hui. Sa journée entière passée au restaurant et si je le fais surtout pour plaisanter lui semble le prendre sérieusement. « Je suis vraiment désolé pour aujourd’hui. J’ai passé une sale journée au boulot, et je sais que tu vas me dire que je dois apprendre à déléguer, sauf qu’en tant que patron il y a des choses que je suis obligé de gérer moi-même. » et ma remarque ne semble pas lui plaire. Il a raison et c’est parce qu’il est si investi dans son travail qu’il a réussi à faire de l’Interlude ce qu’il est aujourd’hui. Un restaurant réputé et qui fonctionne très bien. Et je le sais que Caleb ne fait rien à moitié, qu’il se met la pression pour réussir, il est entier et si c’est une qualité qui me plaît parce qu’il l’est aussi avec moi, dans son métier ça me plaît un peu moins. Parce qu’il s’épuise. Parce qu’il se fait subir des journées interminables et qu’il en oublie de prendre soin de lui. Et moi je le prive de sommeil en plus. « Mais je suis vraiment désolé. » Je sais qu’il l’est. Et je sais qu’en lui disant ça je l’ai fais se sentir mal d’où sa justification et ses excuses. Mais ce n’était pas mon but. Pas vraiment en tout cas. « Je sais, c’est juste que je m’inquiète pour toi. » J’en viens même à me demander s’il a mangé ce soir entre la fin du service et le moment où il est venu me rejoindre au lit. Mais je ne lui demande pas. Je le remercie plutôt d’être avec moi, réveillé au milieu de la nuit, et avant même que je n’ajoute quelque chose, il s’adresse à nos filles. « Vous avez l’air aussi têtues que votre mère. » Je l’entends rire doucement, le premier rire de le nuit, mais ça ne m’empêche pas de lui mettre un petit coup dans l’épaule en réaction à sa phrase accompagné d’un « hey c’est pas cool ça » faussement vexé. En soit il a raison, je suis têtue alors je ne peux rien dire. Et j’espère vraiment qu’elles ne le seront pas autant que moi, vraiment ! Je regarde Caleb et il semble réfléchir, il vient de dire aux filles qu’il allait leur raconter une histoire, alors je suis intriguée et je le regarde amusée. Allongée sur le lit, je l’écoute et au moment où il commence son histoire je comprends bien vite qu’il puisse son inspiration de notre histoire. Enfaîte c’est même NOTRE HISTOIRE qu’il est en train de raconter à nos filles. L’histoire de notre rencontre. Et je souris. Fermant les yeux pour me concentrer sur le son de sa voix et sur les mots qu’il prononce. C’est très rare qu’il parle autant, et je ne vais pas le couper dans son élan. J’écoute les mots qu’il choisit pour parler de moi, pour parler de lui et de ses sentiments pour moi. Et je sens que ses mots ont un impact, pas vraiment sur les filles mais sur moi. Je me détends un peu, je souris beaucoup quand il dit à nos filles que cette Alexandra était là plus belle femme qu’il n’avait jamais rencontré. C’est du Caleb tout craché. Et sa déclaration ne me laisse pas de marbre vraiment. Je suis émue par ses mots, par ce qu’il dit à nos filles en plein milieu de la nuit. Je l’écoute, à la fois émue et surprise par cette prise de parole de Caleb. Je l’écoute et je me calme, je m’apaise au rythme de ses mots et du son de sa voix. Et quand il se tait je le regarde quelques secondes, l’émotion visible sur mon visage. « Et Alexandra est toujours aussi follement amoureuse de ce garçon peut être pas très doué avec les filles à l’époque, un peu maladroit mais tellement craquant. Vous l’auriez vu avec son air vraiment désolé et son regard plein de sincérité. Encore plus touchant qu'une portée de chiots tout mignon. Et je vous parle pas de ses cheveux ! Ses bouclettes sur lesquelles Alexandra a fait une vraie fixation, et ce sourire si communicatif, même si c’est sur lui tout entier qu’elle a craqué. » Je me redresse pour regarder Caleb au moment où je reprends derrière lui la suite de l’histoire. Je souris mais je suis aussi émue par tout ce qu'il vient de dire. Je pose ma main sur celle de Caleb avant de continuer son histoire. Vu du côté de la fameuse Alexandra. Vu de mon côté. « Vous savez les filles, Alexandra était pas très douée à l’époque. » Pas qu’elle le soit maintenant ceci dit. Et ça fait très bizarre de parler de soit en employant son propre prénom, mais je poursuis. J’oublie pendant quelques minutes ce qui me maintient éveillée depuis un petit moment désormais. J'oublie ma frustration et mon agacement des dernières minutes. J’oublie les filles enfaîte pour me concentrer sur le regard fatigué de Caleb et sur cette déclaration qu'il vient de me faire, même s'il l'a faite en parlant à nos filles. « Je ne savais pas ce que ça faisait d'aimer quelqu’un, je ne savais même pas qu’on pouvait ressentir quelque chose d’aussi fort. Je ne croyais pas en tout ça. Et tu as débarqué, tu as ébranlé toutes mes certitudes et toutes mes protections. Je ne savais pas à ce moment que je t’aimais, que j’étais tombée amoureuse d’un homme aussi parfait mais je savais que tu avais bouleversé les choses en moi. » Je me replonge dans mes souvenirs, dans les souvenirs de cette soirée la première en sa compagnie. Je souris en me rappelant de certains moments dans le bar, puis sur cette plage si particulière à mes yeux désormais. Sur ma main qui se glisse dans ses cheveux pour la première fois, sur mes doigts qui s’entremêlent aux siens, sur mes lèvres qui effleurent les siennes et sur ce premier baiser. « Ce soir là quand je t’ai vu, tu m’as souris et je crois que tu n’as toujours pas compris à quel point ce simple geste, un simple sourire de ta part peut me faire complètement craquer. C’était le cas ce soir là dans ce bar, et c’est toujours le cas. Ta présence me faisait du bien, je crois que je n'aurais pas pu l'expliquer à l'époque, mais j'étais rassurée et bien avec toi. Le fait que tu me plaisais mais que tu semblais incapable de le voir. L’ignorance non feinte de ce pouvoir de séduction que tu avais sur moi. » Je me rapproche encore un peu de lui pour lui murmurer quelques mots, comme si je voulais qu’il soit le seul à les entendre. « Tu sais que sur cette plage j’avais vraiment envie de toi. Tu ne peux pas savoir à quel point j’avais envie de ton corps. Ça ne m’étais jamais arrivé avant, pas le premier soir mais je te jure que j’ai dû lutter chéri. » Pas très longtemps puisque dès le lendemain nous étions ensembles dans un même lit. Mais c’est pas vraiment le sujet. Je dépose un baiser sur les lèvres de l’homme dont je parle depuis quelques minutes et que j’ai la chance d’avoir dans mon lit. Et je m’adresse aux filles cette fois. Le regard emplie d’émotion. « Je vous souhaite de connaître ça un jour les filles. De rencontrer celui qui vous fera tout remettre en question et qui saura vous faire vous sentir bien juste par sa présence. Celui qui fera de vous quelqu’un de meilleur. Celui qui vous regardera comme votre père me regarde, je vous le souhaite tellement, de trouver celui qui vous complète. Moi je l’ai trouvé. » Et si je peux être très émotive et ne pas cacher mes larmes ou ma colère, c’est un peu plus rare que je sois aussi loquace pour parler de l’affection et de l’amour que je ressens. J’ai pas été élevée ainsi, je n’ai pas eu pour habitude de voir des gens s’aimer sincèrement et se le dire. Le romantisme, l’amour, la sincérité, les émotions c’est des choses que j’ai apprise avec Caleb finalement. Il m’a apprise à aimer, à m’aimer aussi un peu et à l’aimer lui. J’ai mis du temps, j’ai échoué aussi mais depuis que je suis sortie de cure je sais enfin pourquoi je fais tout ça. Pourquoi j’avance chaque jours, pourquoi j’ai envie d’être heureuse désormais. Pour nous, pour lui, pour moi, pour elles. J’ai de vraies raisons de me battre et de relever la tête toujours. Et je l’ai lui. Ma force. « Tu as pas réussi à calmer les filles mais tu as calmé la mère c’est déjà pas mal. » Je suis toujours fatiguée vraiment mais la colère que je ressentais n’est plus vraiment la, au même titre que la frustration. Je suis plus calme, apaisée et même si les mouvements restent encore désagréables, le moment que je passe avec Caleb me permet de relativiser et de penser à autre chose.
Je me sens nul, elle m’a demandé une chose. Une seule chose, et je ne suis même pas capable d’y arriver. Les filles ne sont même pas encore nées mais pourtant je suis déjà incapable de les calmer alors forcément, je me demande à quoi ça va ressembler quand elles seront avec nous. Si je ne sais pas les apaiser quand elles vont pleurer. Ça me fait peur et je m’en veux beaucoup même si elle me dit que ce n’est pas de ma faute, j’ai beaucoup de mal à être d’accord avec elle pour le coup. Si je suis nul, c’est certainement de ma faute on peut même sûrement affirmer que ça l’est. « On est deux à ne pas l'être et je devrais réussir à les calmer moi, mais je n'y arrive pas. » J’hausse les épaules en guise de réponse. Non pas forcément. Parce que contrairement à moi elle passe ses journées à essayer de les calmer, alors si elle n’y arrive pas de temps en temps c’est assez normal. Alors que moi, j’essaie juste de temps en temps et ça se termine en échec ce qui est bien la preuve de ma nullité extrême quand même, non ? Et comme pour ne rien arranger à ma mauvaise humeur depuis mon réveil brutal, elle me reproche deux fois d’affilées mes horaires de travail. J’ai beau lui avoir déjà dit environ une dizaine de fois que j’ai réduit de manière conséquente mes heures de travail elle ne semble pas me croire. Ou bien ce n’est pas suffisant pour elle. Sauf qu’il faut tout de même ne pas oublier que l’Interlude, c’est moi qui l’ai créée. De A à Z. Je suis le patron du restaurant alors forcément, oui c’est du travail. Beaucoup de travail, et je dois bien avouer que je commence vraiment à en avoir marre de toutes ses réflexions à ce sujet. Elle essaie de me faire culpabiliser et ça fonctionne très bien parce que je m’excuse plusieurs fois. Je m’en veux parce que je comprends bien que je ne suis pas assez présent pour elle et qu’elle semble se sentir seule. Encore une preuve qu’elle m’apporte qui ne fait que renforcer ce sentiment et cette pensée que j’ai : je suis nul. Pas capable d’apaiser ses filles et pas assez présent pour sa femme enceinte de bientôt six mois. « Je sais, c’est juste que je m’inquiète pour toi. » Je fronce les sourcils tout en relevant les yeux vers elle ne comprenant vraiment pas pourquoi elle me dit ça. « Je vois vraiment pas pourquoi tu t’inquiètes pour moi, je vais très bien. » Mais n’ayant vraiment pas envie de m’éterniser sur ce sujet qui ne me plait pas du tout je préfère me concentrer à nouveau sur la tâche qu’elle m’a confiée : calmer nos filles. Bien que je ne sois apparemment pas doué du tout pour ça, j’essaie. Je leur parle, je pose ma main sur son ventre mais rien. J’essaie de leur parler à nouveau et comme je leur ai promis, je leur raconte une histoire. Ma rencontre avec Alex. C’est la première chose qui m’est passée par l’esprit alors je leur raconte tout. Ou presque. Passant sous silence le petit accrochage qui ne me semble pas très important à mentionner sur le coup. Je les sens qui bougent toujours, voire même presque plus. Je perds presque patience gardant même la tête baissée jusqu’à ce que j’entende Alex reprendre la parole. Je relève le regard vers elle tout en l’écoutant parler. Elle reprend un peu l’histoire mais de son point de vue à elle réussissant même à m’arracher un rire et à me décrocher un sourire, surtout quand elle parle de mes cheveux – bien trop souvent au centre de la conversation à mes yeux. – « Je ne savais pas ce que ça faisait d'aimer quelqu’un, je ne savais même pas qu’on pouvait ressentir quelque chose d’aussi fort. Je ne croyais pas en tout ça. Et tu as débarqué, tu as ébranlé toutes mes certitudes et toutes mes protections. Je ne savais pas à ce moment que je t’aimais, que j’étais tombée amoureuse d’un homme aussi parfait mais je savais que tu avais bouleversé les choses en moi. » Je me redresse tout en l’écoutant se livrer un peu à moi, à nous, à nos filles. Je ne la quitte pas des yeux alors qu’elle reprend une seconde fois la parole. « Ce soir là quand je t’ai vu, tu m’as souris et je crois que tu n’as toujours pas compris à quel point ce simple geste, un simple sourire de ta part peut me faire complètement craquer. C’était le cas ce soir là dans ce bar, et c’est toujours le cas. » Je commence à me sentir un peu mal-à-l’aise mais pourtant j’aime tout ce qu’elle me dit. Mais ça me gêne. Beaucoup. C’est d’ailleurs un sourire gêné qui se dessine sur son visage, baissant les yeux quelques secondes jusqu’à ce qu’elle se rapproche de moi pour me murmurer quelques mots à l’oreille. « Tu sais que sur cette plage j’avais vraiment envie de toi. Tu ne peux pas savoir à quel point j’avais envie de ton corps. Ça ne m’étais jamais arrivé avant, pas le premier soir mais je te jure que j’ai dû lutter chéri. » Cette fois je rigole, vraiment, sincèrement alors qu’elle dépose un rapide baiser sur mes lèvres, je la regarde et ne tarde pas pour lui répondre. « Tu ne peux pas imaginer à quel point j’en avais envie aussi. Peut-être qu’on aurait dû. Peut-être que ça aurait été moins catastrophique que ça ne l'a été le lendemain. » J’hausse les épaules d’un air amusé. Parce que si maintenant j’arrive à rire de la catastrophe qu’a été notre première fois, ça n’a clairement pas toujours été le cas. Quand elle reprend la parole c’est pour s’adresser de nouveau aux filles et ce qu’elle leur dit me fait encore une fois sourire. Elle leur dit qu’elle espère qu’elles trouveront l’amour comme nous on s’est trouvés. Et je trouve ça beau. Touchant, et le regard que je lui lance parle pour moi. Certainement les yeux brillants, je pose une main sur sa joue en la caressant doucement à l’aide de mon pouce, répétant ce doux geste pendant de nombreuses secondes. « Je t’aime Alexandra. » Mes yeux perdus dans les siens depuis déjà un long moment, ma main glisse sur sa nuque pour la ramener vers moi et je l’embrasse. Doucement, tendrement, ma langue cherche à entrer en contact avec la sienne alors que mon autre main se pose sur sa cuisse pour la caresser du bout des doigts. C’est un baiser tendre, mais même temps rempli de passion, ce qui, je trouve, caractérise plutôt bien notre relation. « Tu as pas réussi à calmer les filles mais tu as calmé la mère c’est déjà pas mal. » Et en seulement une seule phrase elle parvient à me faire de nouveau perdre tout espoir et toute patience. Je soupire. Assez fort et je ferme les yeux, certainement un signe de mon désespoir. J’y ai cru. Je pensais vraiment qu’elles allaient se calmer mais au final, non. « Je suis vraiment nul. » Et encore, je pèse mes mots. Je me laisse tomber sur le matelas, dépité. Et je le suis vraiment. Mais en même temps je m’en veux tellement. Ne pas réussir à calmer ses propres filles alors que j’essaie tout ce que je peux depuis maintenant un quart d’heure voire même plus. Une dernière idée me passe par la tête mais cette fois je sais que si elles continuent à bouger je n’aurai plus rien à proposer à Alex. « Je vais essayer un dernier truc. » Je me lève du lit, non sans difficulté et je pars chercher un peu plus loin dans la pièce ma guitare que j’ai un peu laissée à l’abandon ces derniers temps. C’est avec l’instrument que je reviens m’installer sur le lit, m’asseyant juste à côté de son ventre pour qu’elles puissent entendre au mieux. « Bon par contre, ça fait vraiment un moment que j’y ai pas touché alors désolé d’avance si j’ai un peu perdu la main. » Je gratte une première fois sur quelques cordes et une fois parfaitement accordée je commence une mélodie et pas n’importe laquelle. C’est une que je jouais souvent pour Alex, à l’époque même si je ne suis pas réellement sûr qu’elle s’en souvienne, moi je n’ai rien oublié. Mais dans tous les cas ; tout ce que je veux, c’est qu’elle me dise que nos filles ont arrêtées de bouger dans tous les sens. Parce que c’est mon dernier essai.
And when, when the night falls on you, baby, You're feeling all alone, You won't be on your own. I'll stand by you. Won't let nobody hurt you. I'll stand by you.
Après une journée sans le voir, nous sommes réveillés tout les deux à cause des filles. Enfin moi je suis réveillée à cause des filles, et lui à cause de moi. Mais même si je sens bien qu'il est fatigué, je ne le laisse pas dormir, je lui fais plutôt remarquer qu'à mes yeux il travaille trop. Et pas seulement à mes yeux, mais il n'y a que lui qui ne semble pas penser qu'il travaille trop. Mais personne ne s'oblige à faire de telles journées. Entre les fournisseurs, le service du midi, les autres rendez-vous l'après-midi et le service du soir, il a littéralement passé sa journée au restaurant et alors que je lui fais remarquer la chose, il ne semble pas vraiment accepter mes remarques. Du moins pas sans soupirer à plusieurs reprises. Et le pire c'est qu'il dit qu'il ne voit pas pourquoi je m'inquiète pour lui ? *Peut-être que je m’inquiète parce que tu travailles trop et que je ne suis même pas sur que tu ais réellement pris le temps de manger ce soir.* Voilà ce que j’aurais aimé lui répondre. Ce que j’aurais du lui répondre mais je ne dis rien. Parce que je sens qu’il est frustré par cette discussion ou par le fait qu’il soit encore fatigué, ou peut être que c’est parce que les filles s’agitent encore malgré sa tentative. Mais ses sourcils froncés me dissuadent d'en rajouter une couche, même si quoiqu'il dise je continue de penser qu'il passe vraiment trop de temps au restaurant et qu'il va devoir apprendre à déléguer s'il veut tenir. Mais pour l'heure, il est là avec moi, et après une première tentative ratée, il retente et raconte une histoire aux filles, l'histoire de notre rencontre. Je lui souris, je me détends après une telle déclaration de sa part, et je reprends après lui. Je vois qu'il est un peu dépité en sentant les filles bouger à nouveau, et j'essaye à mon tour de le détendre un peu comme lui il l'a fait en parlant de notre rencontre. Et si c'est assez récurant que je montre mes émotions négatives, c'est bien moins commun que je lui avoue mes sentiments ainsi. J'arrive à lui faire décrocher un sourire, et même un rire alors que je lui parle avec une sincérité de ce que je ressens pour lui. Je ressens assez vite son malaise et j'aime son sourire gêné. J'aime son sourire de toute manière, mais le sentir gêné devant mes compliments ça m'amuse même si ça me dérange aussi. Il devrait avoir l'habitude des compliments, il ne devrait plus être gêné après tant de temps, mais non il l'est encore et ça prouve qu'il n'est pas si habitué que ça et que je devrais lui faire plus de compliments. Il les mérite en plus. Mais plutôt que m'attarder sur les compliments, je lui avoue peut-être pour la première fois à quel point il m'attirait ce soir là. A quel point j'avais envie de lui ce soir là, après ses lèvres, sa peau, j'avais envie de lui totalement et ça le fait rire que je lui avoue tout ça. « Tu ne peux pas imaginer à quel point j’en avais envie aussi. Peut-être qu’on aurait dû. Peut-être que ça aurait été moins catastrophique que ça ne l'a été le lendemain. » Je rigole surprise par sa réponse et le fait qu'il évoque cette fameuse soirée. Je suis aussi un peu flattée qu'il m'avoue tout ça, même si au fond je n'en suis pas surprise parce qu'entre nous c'était quelque chose d'électrique, de fou. Une relation presque insensée pour deux personnes qui se connaissaient si peu. Mais je me concentre surtout sur sa deuxième partie de phrase. Et si pendant longtemps ça a été un sujet à bannir, désormais on peut en rigoler. Parce que depuis nous en avons fait du chemin et s'il y a bien un domaine sur lequel nous sommes en alchimie parfaite c'est bien sur ça. Et puis je peux me permettre de le taquiner puisqu'il sait bien depuis le temps qu'il sait comment me combler, chose qu'il n'avait clairement pas pu faire ce soir là. « Si ça se trouve tu aurais été encore plus rapide. » Je le regarde amusée. Je le taquine volontairement et je ne m'arrête pas là. « Quoique ce n'est peut-être pas humainement possible de faire pire. » Ça fait du bien de rire un peu, même en pleine nuit, même malgré la fatigue, pouvoir se souvenir de ces moments à nous, de ce moment qui malgré le raté reste quand même notre premier moment d'intimité. « Mais depuis tu t'es bien rattrapé pour mon grand plaisir. » Je caresse doucement son avant-bras. Avant de m'adresser de nouveau aux filles, et de leur souhaiter de trouver ce que j'ai trouvé avec leur père. Parce que cet homme est tout simplement parfait avec moi, parfait avec nous. Je sais la chance que j'ai de l'avoir et mes mots ne semblent pas le laisser indifférent puisqu'il se montre tendre encore avec moi. Sa main sur mon visage, son pouce qui caresse ma joue, je plonge dans son regard, j'aime tellement la façon dont il me regarde à ce moment précis. « Je t’aime Alexandra. » Oh moi aussi je l'aime mais avant même de pouvoir lui répondre il m'embrasse, et je lui rends ce baiser intensifiant le contact de mes lèvres sur les siennes alors que sa main me fait frisonner quand ses doigts glissent sur ma cuisse. Ok je ne suis définitivement plus énervée, plus frustrée, je suis juste bien avec lui. Peut-être désormais un peu excitée malgré la fatigue. Mais je sens les filles bouger et une fois le baiser terminée, je lui annonce que malgré le bien-être que moi je ressens, les filles ne semblent pas encore totalement prêtes à dormir. Je l'entends soupirer bruyamment et je comprends qu'il est frustré d'apprendre que les filles ne se sont pas calmées. Pourtant il a essayé vraiment et je ne lui en veux pas, il a réussi à me calmer moi, enfin à m'exciter un peu aussi mais je ne suis plus ni énervée, ni frustrée. Il se laisse tomber sur le lit tout en se dénigrant. « Je suis vraiment nul. » Je me penche vers lui avant de froncer les sourcils d'un air sérieux. « Arrête d'être aussi dur avec toi même. » Les mots sont peut-être un peu sec, et le ton trop autoritaire, mais il est toujours si dur avec lui même et ça m'énerve. Vraiment parce qu'il est tellement exigeant avec lui même, il en attends toujours trop de lui et je n'aime pas qu'il soit ainsi avec lui même, surtout qu'il n'est pas responsable. Je n'y arrive pas non plus et pourtant moi je devrais, elles sont en moi, mais je n'y arrive pas. Il ne me blâme pas, mais il se blâme lui. « Tu dois vraiment arrêter de te dévaloriser comme ça. Tu es réveillé au milieu de la nuit, à me soutenir et ça très peu de gens le ferait. Arrête d'être si exigeant. » Je pose ma tête contre lui, déposant un baiser sur sa joue. « Et au faite, moi aussi, je t'aime Caleb Anderson. » Il ne m'avait pas vraiment laissé le temps de lui répondre, et je crois que c'est le bon moment pour lui dire tout ça. Pour lui prouver que même si lui il se sent nul, moi je l'aime. Je m'installe contre lui, mes doigts s’entremêlant aux siens et je lui murmure ces quelques mots. « je t'aime, je t'aime, je t'aime. » Parce que je vois qu'il semble tellement frustré, qu'il semble même dépité alors qu'au fond il a fait son possible et c'est déjà énorme à mes yeux. « Tu as fais ce que tu pouvais, elles sont juste agitées cette nuit, je vais faire avec. » Il bouge un peu et je le regarde surprise en le voyant se lever après avoir annoncé qu'il voulait tenter un dernier truc. Il ne lâche pas Caleb, et je suis du regard ses mouvements, un peu surprise et légèrement déçue de le voir quitter le lit. Je le vois attraper sa guitare et d'un coup je ne regrette plus du tout le fait qu'il se soit levé et qu'il ait quitté le lit. Ça fait tellement longtemps que je ne l'ai pas vu jouer, comme il l'annonce, ça fait longtemps qu'il n'y a pas touché, et j'ai presque envie de lui dire que s'il travaillait moins, il aurait plus de temps pour jouer, mais je le laisse s'installer en silence. Je me contente de sourire alors que je le vois s'asseoir sur le lit et commencer à accorder sa guitare. J'ai toujours aimé le regarder jouer, regarder son petit air concentré qui me fait craquer. Pendant qu'il accorde sa guitare, je me redresse, réinstallant mes oreillers pour être à l'aise et pouvoir profiter de ce moment qu'il nous offre, aux filles et à moi. Et des les premières notes, je reconnais cette chanson qu'il joue, je reconnais les premiers accords et je me replonge dans notre histoire, dix ans plus tôt. Nous deux, dans son petit appartement, lui sa guitare en main et moi collée contre son dos à fredonner les paroles de cette chanson qu'il jouait pour moi, pour nous. Je me souviens de ce moment ou il n'y avait que nous. De notre passé et je pense ensuite à notre présent. Je pense à ce que nous avions, à ce que nous avons aussi. A ce que nous avons traversé ensemble et séparément. A notre histoire, à notre futur proche avec Lucy et Lena. Je pense à nous, à notre couple. La maison c'est fait, les bébés c'est en cour et je pense aux autres projets de notre vie. A d'autres projets pour nous. Et je sais ce que je veux, mais je me contente de l'écouter jouer, et de profiter de ce moment si agréable qu'il m'offre à trois heures et quelques. Je le regarde jouer, et je fredonne les paroles du refrain pour l'accompagner comme je le faisais quelques années auparavant. « If i lay here, if i just lay here. Would you lie with me and juste forget the world ? » Je fredonne quelques phrases sans jamais arrêter de le regarder. Et alors qu'il arrive sur la fin de la chanson, je réalise que les mouvements en moi se sont calmées. Je place une main sur mon ventre comme pour m'assurer qu'elles ne sont pas entrain de me faire une fausse joie et je ne les sens pas s'agiter. Je ne bouge pas, je reste allongée calme, comme si je craignais de les réveiller si je venais à bouger. Je reste à ma place et je murmure l'information à Caleb tout en souriant, mi-soulagée et reconnaissante. « Elles se sont calmées, tu as réussi super papa. » Et à ce moment, je réalise tout ce qu'il a fait pour moi, pour les filles à trois heures du matin, juste pour que le moment soit moins compliqué pour moi. Et même si je le savais, même si je n'avais aucun doute, ce moment me le confirme encore un peu plus. Caleb sera un papa et un mari formidable. Il termine la chanson et j'hésite pendant quelques secondes, j'ai envie de lui dire. J'en ai réellement envie et pourtant au moment ou j'ouvre la bouche aucun mot ne sort. Ils restent là, incapable de franchir la barrière de mes lèvres. Et ces mots 'épouse moi' restent dans mon esprit sans que je ne puisse les prononcer. Par peur, par doute, ou juste parce que je n'assume pas totalement d'avoir envie de ça. Quoiqu'il en soit, je n'y arrive pas et je ne sais même pas pourquoi je ne peux pas les dire à haute voix. Je ne les prononce pas malgré l'envie que j'ai. Et au lieu de ça, je le regarde, amoureusement sans doute, parce que je l'aime vraiment. Parce que même si je n'arrive pas à lui dire, je sais que je l'aime tellement que je veux passer le reste de ma vie avec lui. Et c'est quelque chose d'assez fou pour moi. Les derniers accords se font entendre dans la chambre et je le regarde un sourire aux lèvres. « J'ai toujours aimé te regarder jouer, je te trouve vraiment sexy quand tu joues. » Sexy, désirable, attirant, autant de mot pour désigner ce que je ressens quand je le vois jouer. J'aime ça, sans doute le charme des musiciens qui ressort quand il a sa guitare en main.« Ça m'avait vraiment manqué de te voir avec ta guitare.» D'un geste je lui demande de venir s'allonger et alors que je viens me blottir contre lui, comme tout les soirs finalement, je repense à tout ce qu'il a du faire pour réussir à calmer les filles. « Tu sais que maintenant tu vas devoir sortir la guitare à chaque fois qu'elles bougent trop ? » Je ne suis pas sérieuse, enfin pas totalement parce que si jamais ça, ça marche, je vais sérieusement lui demander de garder la guitare à portée de main et ce n'est pas moi qui vais m'en plaindre. Peut-être lui par contre. Je bouge un peu pour m'installer contre lui, en profitant de la proximité pour l'embrasser doucement. Je crois qu'on a tout les deux besoins de dormir, et que lui a mérité de pouvoir enfin se reposer après une telle journée et un tel début de nuit. Allongée sur son épaule, je caresse son torse d'une main pendant quelques minutes, cherchant à profiter de sa présence à mes côtés. Et comme plus tôt dans la nuit, quand il dormait encore, j'écris quelques mots du bout de mes doigts sur son torse nu que je caresse depuis quelques minutes. Je les écris à défaut de réussir à les dires à haute voix. Et pourtant, ces mots sont dans mon esprit désormais, encore et encore, depuis un moment sans que je n'ose vraiment les assumer. Et j'y pense encore à ce moment précis, la contre lui, je ne pense même qu'à ça. Alors, sans savoir s'il s'est déjà rendormi, s'il va m'entendre, les yeux fermés, je m'apprête à lui murmurer quelques mots à l'oreille, un murmure à peine audible mais que je partage avec lui. Enfin. « Épouse moi ».
Heureusement qu’on peut vraiment en rire maintenant. Ce soir-là a été une véritable catastrophe. Ma fierté en a pris un gros coup et si aujourd’hui j’y repense en riant, ce n’était clairement pas le cas il y a dix ans de ça. Ce n’était pas drôle. Pas drôle du tout. J’avais l’impression de m’être fait humilier, l’impression d’avoir gâché la seule chance – pourtant déjà improbable – que j’avais avec elle. « Si ça se trouve tu aurais été encore plus rapide. Quoique ce n'est peut-être pas humainement possible de faire pire. » Je suis donc aussi son pire coup ? C’est une information qu’elle me confirme à demi-mots, moyennement agréable mais je la comprends. J’ai été terriblement nul. C’est donc en me pinçant les lèvres que je la regarde, amusé. « Bien sûr que si, faire pire c’est possible. Ma première fois a été encore plus rapide. » Je lui avoue tout en riant un peu. C’est un sujet que l’on n’a jamais vraiment abordé, d’ailleurs. Pourtant on est d’abord resté un an et demi ensemble, et maintenant on s’est retrouvés depuis plusieurs mois. Mais en même temps il n’y a pas grand-chose à savoir pour moi, j’étais vraiment pas très doué comme elle a pu le constater. Les débuts de ma vie sexuelle ont réellement été laborieux. « Mais depuis tu t'es bien rattrapé pour mon grand plaisir. » En même temps, si elle me disait l’inverse je le prendrais très mal. Vraiment très mal. J’ai bien sûr plus d’expérience qu’il y a dix ans, plus d’assurance, en partie grâce à elle, d’ailleurs. Je lui souris, tout simplement sans rien ajouter de plus alors que la conversation prend un tout autre tournant. Un peu plus posé, plus romantique et après un baiser tendre et extrêmement agréable, elle m’annonce que tous ces efforts n’ont servis à rien puisque les filles ne se sont pas calmées. Même pas un tout petit peu. Et je dois bien avouer que je commence à en avoir marre. Il est plus de trois heures du matin maintenant, je suis exténué, en gros manque de sommeil et mes filles ne semblent pas vouloir nous laisser nos dernières semaines de sommeil en paix. « Arrête d'être aussi dur avec toi même. Tu dois vraiment arrêter de te dévaloriser comme ça. Tu es réveillé au milieu de la nuit, à me soutenir et ça très peu de gens le ferait. Arrête d'être si exigeant. » Je sens au ton de sa voix qu’elle est sérieuse, elle ne rigole pas du tout. Elle veut que j’arrête d’être apparemment si exigeant avec moi-même. Mais je ne pensais même pas l’être. J’hausse simplement mes épaules sans oser lui dire que si je suis réveillé c’est de sa faute et pas parce que j’ai choisi de rester éveillé pour lui tenir compagnie. Même si en soi, si je le voulais vraiment j’aurais pu me rendormir tout à l’heure et la laisser se débrouiller toute seule puisqu’en plus, mon aide n’est vraiment pas précieuse. « Je ne me dévalorise pas, c’est juste la vérité. » Si je n’étais pas nul j’aurais réussi à les calmer, c’est tout. C’est simple à comprendre. « Et au faite, moi aussi, je t'aime Caleb Anderson. » Je tourne le visage vers elle pour la regarder et je souris. Je souris parce qu’elle est adorable, parce que moi aussi je l’aime et aussi parce que la grossesse la rend visiblement vraiment niaise mis ça ne me dérange pas du tout. Au contraire. J’aime ça. « je t'aime, je t'aime, je t'aime. » Je sers sa main dans la mienne et avance mon visage vers le sien pour coller mon front au sien, toujours un petit sourire aux lèvres. « Je t’aime aussi. Tu n’imagines même pas à quel point. » Je lui ai déjà dit il y a tout juste une minute. Je l’aime et je lui fais savoir alors même si je dois lui dire plusieurs fois par jour pour qu’elle tache de toujours s’en souvenir je le ferai. « Tu as fais ce que tu pouvais, elles sont juste agitées cette nuit, je vais faire avec. » J’ai fait ce que je pouvais oui et non. J’ai bien une autre idée. Une dernière idée. Alors je me lève, je quitte le lit même si j’y suis bien. J’y retourne une poignée de secondes plus tard, une guitare à la main. Ça fait longtemps, que je n’y ai pas joué. Vraiment longtemps. C’est ce que je lui dis, parce que je veux être sûr qu’elle ne soit pas trop exigeante. Et pour ça, ce n’est pas n’importe quelle chanson que je joue mais une des préférées d’Alex, une des musiques que je lui jouais souvent avant. Je l’entends fredonner l’air, et puis quelques paroles de la chanson et grâce à ce moment j’ai l’impression que faire un grand retour en arrière. Moi installé sur le lit à gratter un peu ma guitare, concentré sur l’instrument et Alex à côté qui me regarde et qui chante un peu en même temps. Ça ne dure pas longtemps, mais ces quelques minutes suffisent apparemment. « Elles se sont calmées, tu as réussi super papa. » C’est après avoir joué les dernières notes que je relève le regard vers elle, étonné. J’ai même presque du mal à la croire quand elle me dit que Lucy et Lena ne bougent plus. Après avoir posé la guitare aux pieds du lit je pose rapidement une main sur mon ventre pour en avoir le cœur net. Etre sûr que c’est réellement vrai, et effectivement elles ne bougent plus. « J’espère qu’elles nous font pas une feinte et qu’elles vont pas se remettre à bouger dans cinq minutes. » Je lui dis ça presque d’une voix basse, comme si le fait de parler normalement allait les réveiller, ce qui est assez bête quand on y réfléchit. « J'ai toujours aimé te regarder jouer, je te trouve vraiment sexy quand tu joues. » Après avoir humidifier rapidement mes lèvres, je lâche un petit rire lui montrant encore une fois que ce compliment me met un peu mal-à-l’aise. « Je suis pas sexy. » Une main passée dans mes boucles, je la laisse posée sur ma nuque un instant. « Ça m'avait vraiment manqué de te voir avec ta guitare.» Je la vois qui me fait signer de m’allonger alors sans un mot de plus je m’exécute, m’allongeant sur le dos et quand elle se blottie contre mon torse, je la ramène un plus vers moi d’un geste tellement naturel que je ne m’en rends même pas vraiment compte. « Tu veux que je joue plus souvent plus vous ? » Pour elle, pour Lucy et pour Lena. Si apparemment ça les calme. Même si je suis persuadé que c’était surtout un coup de chance et que leur absence d’agitation n’est pas vraiment en lien avec ma présence ou le son de la guitare. « Tu sais que maintenant tu vas devoir sortir la guitare à chaque fois qu'elles bougent trop ? » Je suis à deux doigts de lui répondre mais au final je préfère choisir l’autre option ; le sommeil. Je me sens déjà partir, mes yeux commencent à se fermer et je ne lutte pas du tout. Je suis fatigué et je vais enfin pouvoir dormir, en espérant surtout qu’elle ne me réveille pas une deuxième fois. Alors que je commence à m’endormir je sens ses doigts sur mon torse sans réellement m’y attarder. Mais une toute autre chose attire mon attention : « Epouse moi. » Presque immédiatement j’ouvre à nouveau les yeux. Ces mots étaient murmurés, comme s’ils n’étaient pas assumés. Mais un murmure contre mon oreille. Mes yeux sont de nouveau ouverts, je me redresse un peu perturbé par ce que je viens d’entendre. « Quoi ? » Un peu nul comme réaction, je l’avoue et je n’arrange clairement pas les choses puisque je ne m’arrête pas là. Peut-être que j’aurais dû. « Est-ce que tu viens de … ? » Je ne termine même pas ma phrase mais je la regarde toujours, en quête d’explications. Pourtant c’était très clair mais apparemment pas assez pour moi – en même temps je tiens à rappeler qu’il est trois heures du matin passé – « Pourquoi ? Enfin…tu…tu veux te marier ? Maintenant ? » Je ne savais même pas qu’elle pensait au mariage et encore moins qu’elle comptait me demander ça. Mais pourtant je ne lui réponds pas. Pas de réponse positive ni de réponse négative, je suis tout simplement étonné et perturbé. Surtout perturbé. Je me suis déjà fiancé une fois, et elle a fini par mourir. Je porte la poisse. Je ne veux pas revivre ça. je n’en aurais pas la force.
And when, when the night falls on you, baby, You're feeling all alone, You won't be on your own. I'll stand by you. Won't let nobody hurt you. I'll stand by you.
Est-ce qu'un jour j'aurais pensé me retrouver au milieu de la nuit, réveillée par les mouvements de mes jumelles, en train de plaisanter avec Caleb sur notre première fois. Enfin plaisanter, me moquer de lui serait plus vrai. Mais c'est lui qui a abordé le sujet, je ne fais que profiter de ses allusions sur le côté un peu catastrophique de notre première fois pour le taquiner un peu. J'aime ça, le provoquer, le mettre mal à l'aise aussi parfois, juste pour le voir sourire en baissant les yeux, ou rire légèrement en se passant une main dans les cheveux. J'aime le taquiner, et je ne passe pas à côté de cette occasion qu'il me donne à nouveau alors qu'il évoque sa première fois. « Plus rapide mais tu as finis avant même d’avoir commencé enfaîte ? Ça compte comme une première fois ça tu sais ? » Je le taquine encore, un sourire aux lèvres, parce que c’est quand même lui qui me donne matière à pouvoir le charrier. « Tu avais quand même des points positifs, je ne peux pas t’enlever que tu avais un potentiel intéressant pour les prelis. Avant toi personne ne s’était montré aussi tendre avec moi. » Et je ne lui dis même pas ça pour lui faire plaisir, je suis sincère quand je lui dis ça. Parce que si depuis notre rencontre, j’ai enchaîné les relations, avant lui ce n’était pas le cas, loin de là. J’étais même plutôt assez inexpérimentée finalement, réussissant à le cacher un peu mieux que lui visiblement. Mais tout ça c’est loin maintenant. Les premières expériences, les découvertes, ça semble presque appartenir à une autre vie. Une vie qu'il évoque en racontant l'histoire de notre rencontre à nos filles. Il est touchant Caleb, romantique, doux, tellement attentionné et si ce moment de tendresse n'a pas suffit à calmer les filles, ça a eu de l'effet sur moi. Il est trois heures passées depuis longtemps, mais je suis beaucoup moins énervée, grâce à lui et à sa présence à mes côtés. Je reconnais ses qualités, ce que lui semble avoir bien du mal à faire. Il se dévalorise, il se dit vraiment nul et j'ai beau tenté de lui faire la moral sur le fait qu'il se dévalorise encore et qu'il en fait déjà beaucoup, il ne semble pas me croire. Il leur a parlé, il a caressé mon ventre avec tendresse pour les calmer, il leur a raconté une histoire, il a été là avec moi alors que j'étais sur le point de craquer, et à mes yeux il en a déjà fait beaucoup. Il a même réussi à faire en sorte que les mouvements ne soient plus vraiment douloureux, juste gênants pour dormir mais dans ses bras, alors qu'il me redit qu'il m'aime, je pense que je peux faire avec parce qu'il est là auprès de moi. Ma main qui serre la sienne, mon visage à quelques centimètres du sien, je suis bien, fatiguée oui mais bien. Sauf qu'il se lève et je le regarde revenir avec sa guitare. Il a fallu que les filles nous empêche de dormir pour qu'il ressorte sa guitare, et je crois que rien que pour ça, il faudra que je les remercie plus tard. A condition qu'elles ne me fassent pas vivre ce même bordel toutes les nuits jusqu'à la naissance quand même. Détendue, je me laisse porter par les notes et par les souvenirs. Par la vision de Caleb avec sa guitare, par ce moment inattendu mais tellement agréable et peu à peu je réalise que les filles ne s'agitent plus dans tout les sens. Il a réussi, ou elles en ont juste eu marre, mais en tout cas elles ne bougent plus et je me sens soulagée, apaisée et calme. J'en informe Caleb, bien que je n'aurais pas été contre d'autres chansons, mais peut-être qu'on va attendre que le soleil soit levé pour ça. Je souris quand je le vois poser une main sur mon ventre pour s'en assurer. « J’espère qu’elles nous font pas une feinte et qu’elles vont pas se remettre à bouger dans cinq minutes. » Je l'espère aussi, vraiment, parce que je suis épuisée et que ses cernes à lui sont assez évocatrices de la fatigue qu'il doit ressentir, mais je préfère ne rien ajouter pour ne pas nous porter la poisse. Et maintenant qu'elles semblent avoir fini de jouer avec mes organes et qu'elles semblent calmes, sûrement endormies, je me concentre sur Caleb. Sur ce moment qu'il vient de m'offrir, et je lui fais même un compliment qu'il s'empresse de renier. « Je suis pas sexy. » Je lâche un petit rire de dépit. « Tu es pas croyable bébé. Toujours à me contredire quand je te fais un compliment. Déjà que j’en fais pas beaucoup contente toi de les accepter sans toujours les remettre en question. » Ça m’agace parce qu’il est sexy, parce que même s’il ne se pense pas sexy, moi je le trouve vraiment attirant et sexy. Oui je me répète mais c’est ainsi que je le ressens, et quand je le regarde jouer j’aimerais qu’il puisse voir au delà de l’image qu’il a de lui pour voir comment moi je le regarde. Et quand il joue, je suis totalement sous son charme. Pas uniquement quand il joue d’ailleurs. Et ça m'avait vraiment manqué de le voir jouer, ce que je lui dis au moment ou il s'allonge à mes côtés et ou il m'enlace. « Oui, comme je te l'ai dis, j'aime te regarder jouer. » Il me propose de jouer pour nous plus souvent et c'est pas quelque chose que je peux refuser. Surtout que comme je lui dis, si ça calme les filles, il va devoir la sortir à chaque fois. C'est dis avec un ton d'humour mais maintenant que je sais qu'il est encore capable de jouer de la guitare, je vais lui demander un peu plus souvent, c'est une certitude. Finalement cette nuit n'aurait pas été que négative, et c'est contre lui mes doigts qui caressent son torse et le rythme de sa respiration qui me berce que je vais finir ma nuit. Auprès de lui, parce qu'il n'y a qu'ici que je peux dormir désormais, qu'ici que je me sens bien. Et alors qu'il semble s'endormir, sans vraiment réaliser l'ampleur des mots que j'apprête à lui murmurer, je lui fais part à l'oreille de mon désir de l'épouser. Sans vraiment avoir calculer les choses. Il se redresse et son « quoi » me reste en tête. Il me reste en tête parce que ce n'est pas la façon dont je voulais qu'il réagisse. Qu'il soit étonné c'est une chose, mais là il semble pas étonné positivement, il semble soucieux, perturbé, inquiet, enfin j'en sais rien mais rien qui me laisse penser qu'il est emballé par cette idée. J’ai l’impression d’avoir dis une vraie connerie d’un coup. Un truc vraiment débile. Peut-être que ça l’est ? Peut être que l’idée de se marier avec moi lui semble vraiment débile. Ce n’est clairement pas la réponse, ni même la réaction que j’avais en tête. Et j’ai déjà eu beaucoup de mal à lui dire alors je me sens vraiment conne. C’est clairement pas quelque chose de simple à dire pour moi et sa réaction me fait me sentir si bête, idiote. Et pourtant j’aurais dû me douter qu’il ne veut pas, sa réaction quand sa mère a évoqué l’idée aurait dû me convaincre qu’il ne veut pas se marier avec moi. Sauf que Caleb a toujours voulu ça. C’est d’ailleurs en partie pour ça que je suis partie. Parce que moi je ne voulais pas de tout ça. Je ne voulais pas m'engager de façon aussi officielle, je ne pouvais pas me lier à quelqu'un ainsi. Sauf que j'en ai envie maintenant et lui, il ne semble pas trouver l’idée de se marier AVEC MOI très emballante. Il semble même la trouver carrément perturbante. « Est-ce que tu viens de … ? » La tête sur l’oreiller, j’évite son regard préférant me concentrer sur mes doigts qui jouent nerveusement avec les draps, je ne sais même plus comment je dois lui répondre. Je suis perturbée par sa réaction et par la discussion qui va découler de cette demande de ma part. « Oui enfin non. Enfin laisse tomber. » Je soupire un peu sans oser le regarder. Oui laisse tomber Caleb c’est mieux, parce que je n’ai pas envie d’entendre pourquoi l’idée de se marier avec moi semble si dérangeante. Pourquoi il ne veut pas avec moi alors qu’il a déjà voulu ça. Je regrette mes mots, je les regrette tellement à ce moment, pas que je n'en ai plus envie, mais je crains que ce sujet soit encore un sujet à discorde entre nous et je n'ai pas l'envie. Vraiment pas envie. Mais il ne laisse pas tomber, il me demande pourquoi, il me demande si je veux me marier. Je pensais que mon 'épouse moi' avait été assez significatif vu sa réaction. Mais il me demande quand même si je veux me marier. Alors je prends sur moi et je lui réponds. « Non pas maintenant. Mais oui c’est une chose à laquelle je pense. » Je lui avoue que je pense à ça pour nous. Mais visiblement je suis la seule à y penser. Et comme je vois son doute, son inquiétude quand à cette idée que j’ai évoqué, je m’en explique. Parce qu’il a demandé pourquoi alors j’essaye de lui donner mes raisons. Des raisons auxquelles j’ai déjà pensé depuis plusieurs jours même si franchement je me sens déjà assez mal comme ça et l’idée de devoir lui expliquer ce que je ressens ne me fait pas me sentir mieux. « Pourquoi ? Je sais pas peut être parce que je t’aime, que je veux vivre avec toi. Parce que je pensais que c’était ce que tu voulais pour nous et que moi j’en avais envie. Et puis après la maison, les filles, je me disais que c’était la suite logique. » J’en dis plus que je pensais pouvoir le faire mais finalement je n’arrive pas à cacher ma déception. Je n’arrive pas à cacher que ce que je prends pour un refus me touche mais j’essaye vraiment de ne pas être trop sèche dans ma réponse. J’essaye de ne pas lui montrer ma déception quand à sa réaction. Et pourtant je le suis vraiment. Déçue, vexée et touchée par la façon dont il a accueilli ma proposition. « Mais je me suis visiblement trompée, tu veux pas, laisse tomber c’était bête. Et puis on a tout les deux besoins de dormir. » Dormir pour oublier ce moment gênant. Je m'allonge sur le côté, lui tournant le dos comme pour lui montrer que je veux dormir. Et je me questionne comme souvent. Pourquoi je lui ai dis ça moi aussi ? Pourquoi je n’ai pas laissé le sommeil me gagner en espérant retrouver l’esprit plus clair au réveil ? Oublier cette pensée qui n’est pas partagé. Il veut bien de moi pour être là mère de ses enfants, pour vivre avec lui mais pas pour être sa femme. Et je ne comprends pas ça. Ça n’a pas de sens et pourtant les trucs qui n’ont pas de sens normalement ça me connaît, c’est moi sauf que là c’est lui qui fait preuve de non-sens. « Pourquoi ça te semble si fou ? Je croyais que tu avais toujours voulu tout ça. La maison, le mariage, la famille ? Alors pourquoi j’ai l’impression que cette idée te choque ? » J’ai besoin de comprendre. Besoin de savoir pourquoi il a réagit ainsi, rejetant l’idée en me montrant qu’elle lui semblait perturbante. Je sais que je lui ai dis qu'on devrait dormir, mais j'ai besoin de comprendre sa réaction, j'ai besoin de comprendre pourquoi cette idée ne l'a pas enchanté et pourquoi j'ai l'impression d'être rejetée alors que j'ai fais un grand pas vers lui, lui prouvant mon engagement dans notre relation.
J’étais en train de me rendormir. Enfin. À trois heures trente du matin après une demie heure à essayer de calmer Lucy et Lena. Et maintenant qu’elles ne bougent plus je ne perds pas de temps pour me réinstaller dans le but de dormir. Alex est contre moi, les yeux sont fermés et je sens ses doigts contre mon torse et aussi un murmure à mon oreille. Je réagis. Mal. Mais je réagis quand même. J’aurais dû dire autre chose. Réfléchir avant de parler. Parce que la première chose que je lui dis c’est « quoi ». Oui je sais, c’est moche, ça craint. Et je vois bien qu’elle le prend mal. En même temps, ça se comprend tout à fait. Si je lui avais demandé de m’épouser et qu’elle avait eu ma réaction je l’aurais très mal pris. Elle se ferme, elle est vexée je le vois à son visage et à sa manière d’agir. Elle ne me regarde pas, elle évite mon regard alors que moi je cherche à capter son attention. Choqué de sa proposition, j’insiste je lui pose encore des questions mais je me rends pourtant compte qu’elle n’a pas envie d’en parler plus. « Oui enfin non. Enfin laisse tomber. » Toujours en évitant mon regard elle soupire et moi aussi je ne la regarde plus. Le dos contre mon oreiller je fixe le vide en face de moi. Alex vient de me dire qu’elle voulait se marier. Est-ce qu’on peut dire qu’elle vient de me faire une demande ? Je n’en sais absolument rien, mais je reste mutique. Pourtant je le veux. Je veux me marier avec elle moi aussi. Mais en même temps je ne veux pas. Je sais, ça n’a plus aucun sens. Mais tout ça va trop vite pour moi. Elle me dit qu’elle est prête et qu’elle veut se marier mais je ne réagis pas. Qu’est-ce qui ne va pas chez moi ? La réponse est simple sans tellement l’être ; Victoria. Son souvenir. Cet engagement non achevé, sa mort, ma culpabilité. « Non pas maintenant. Mais oui c’est une chose à laquelle je pense. » J’ai envie de parler mais aucun mot ne sors de ma bouche. Je suis choqué, je ne m’y attendais pas et je me rends compte qu’on est jamais sur la même longueur d’onde : il y a dix ans je voulais me marier, vite, elle non. Aujourd’hui c’est l’inverse. « Pourquoi ? Je sais pas peut être parce que je t’aime, que je veux vivre avec toi. Parce que je pensais que c’était ce que tu voulais pour nous et que moi j’en avais envie. Et puis après la maison, les filles, je me disais que c’était la suite logique. » Elle a raison. C’est logique. Ça coule de source. Alors pourquoi je bloque ? Pourquoi je n’arrive pas à être heureux quand elle me dit vouloir devenir ma femme ? Parce que j’ai peur, tout simplement. J’ai une boule au ventre. Je suis effrayé. Parce qu’il y a un peu plus de trois ans j’étais fiancé à une autre femme qui est morte avant le jour du mariage. Et si l’histoire se répétait ? Et si je perdais aussi Alex ? Je ne préfère même pas y penser. Parce que je sais que je ne pourrais pas y survivre. Pas deux fois. Je ne veux pas perdre une deuxième fois la femme que j’aime. « Mais je me suis visiblement trompée, tu veux pas, laisse tomber c’était bête. Et puis on a tout les deux besoins de dormir. » Non je ne peux pas laisser tomber. Je ne veux pas laisser tomber. Mais je n’arrive pas non plus à parler. Je m’en veux. Parce qu’elle vient de faire un grand pas vers moi, une avancée inattendue mais pas désagréable pour autant. Et alors que je trouve enfin le courage de tourner les yeux vers elle, je la vois, allongée, dos à moi. Elle ne fait jamais ça. Sauf quand on se dispute avant d’aller dormir, sauf quand elle est en colère contre moi et pour le coup, ça doit être la deuxième option. Je me sens bête. Con. Je baisse les yeux tout en déglutissant, je joue nerveusement avec mes doigts, je me ronge les ongles, et encore une fois ; j’ai envie de parler mais je n’y arrive pas. Je ne sais pas comment lui expliquer ce que je ressens parce que c’est insensé, ce n’est pas rationnel. « Pourquoi ça te semble si fou ? Je croyais que tu avais toujours voulu tout ça. La maison, le mariage, la famille ? Alors pourquoi j’ai l’impression que cette idée te choque ? » Je sens de la tristesse dans sa voix. Beaucoup de tristesse. Et ça me fait mal, parce que je me dis que c’est à cause de moi qu’elle ne se sent pas bien. Je suis censé prendre soin d’elle et c’est comme ça que je le fais ? Comment est-ce qu’elle peut dire que je suis si parfait quand j’ai l’impression de toujours lui faire mal comme ça ? Mes yeux sont toujours baissés, à fixer les draps et je joue toujours nerveusement avec mes doigts. « C’est toujours ce que je veux. » Je parviens enfin à parler mais je n’arrive pas à dire plus d’une phrase. Je n’ai pas relevé les yeux et je n’ai pas bougé du tout. J’essaie de trouver les mots mais c’est compliqué. « J’ai toujours envie de tout ça. La maison, le mariage, les enfants. Mais je ne peux pas. Pas maintenant. » C’est bizarre, elle ne va pas comprendre et quand on entend mes explications c’est plutôt normal. Justement, je ne lui présente pas de réelles explications mais j’ai beaucoup de mal à lui expliquer ce que je ressens. C’est compliqué. « C’est complètement ridicule, tu pourrais pas comprendre. » Mais je devrais quand même essayer de lui expliquer pour qu’elle comprenne un changement aussi radical de ma part. je lâche un léger soupir avant de venir frotter mes yeux réalisant que je ne suis pas prêt à dormir. « Elle est morte quand on était…» Fiancés. « Je ne veux pas vivre ça une deuxième fois. J’en serais pas capable. » Sa mort m’a détruit et maintenant que je m’en suis enfin remis, j’ai juste peur que ça recommence. Oui, ça n’a pas de sens je sais. Mais c’est pourtant ce qu’il se passe dans ma tête. « J’ai peur que l’histoire se répète. Ça n’a rien avoir avec toi. C’est moi le problème. » Je ne peux pas être plus clair, et sachant que dans ma tête c’est le bazar complet je pense que je m’en sors pas trop mal, non ?
And when, when the night falls on you, baby, You're feeling all alone, You won't be on your own. I'll stand by you. Won't let nobody hurt you. I'll stand by you.
« C’est toujours ce que je veux. » Je soupire lourdement parce que s’il le veut toujours en tout cas c'est pas bien visible à première vue. Ou alors il le veut mais pas avec moi. « Tu le caches bien alors. » Je lâche cette réflexion sans cacher le sarcasme, presque plus pour moi que pour lui, sans le regarder, parce que ça n'a aucun putain de sens ce qu'il me dit. Et, je ne comprends rien, entre la fatigue, les hormones et les émotions que je ressens à ce moment précis, je ne sais plus comment réagir. Ni même comment agir finalement. Je ne comprends rien. Je suis perdue, blessée, vexée, triste, déçue. Et ce n’est pas la suite de sa tentative d’explication qui m’aide à y voir plus clair. Il en a toujours envie. Mais il ne peut pas. Pas maintenant. C’est censé vouloir dire quoi tout ça ? Ça dit quoi de nous ? De ma proposition ? La maison et les enfants il a pu, il a voulu maintenant et je sais que ça le rends heureux, mais le mariage ça devient impossible ? Je le comprends pas et ça m'énerve. Je gesticule d’agacement et je soupire à nouveau, parce que ça n’a rien de censé ce qu’il me dit et je crois que je préférais qu’il soit honnête avec moi et qu’il me dise clairement qu’il ne veut pas se marier avec moi sans chercher des explications foireuses. Sans me faire le couplet du je veux mais je ne peux pas sans me donner de raisons. Il ne veut pas il a le droit mais qu’il soit honnête avec moi. Je crois que je mérite qu’il m’explique sa réaction non ? « C’est complètement ridicule, tu pourrais pas comprendre. » Mais tout est déjà ridicule de toute façon. Et je ne comprends rien alors ça ne peut pas être pire non ? Je lâche un nouveau soupir, les yeux fermés j’essaye de contrôler ma respiration et mes émotions pour ne pas laisser la colère me submerger. « Parce que tu crois que je comprends quelque chose là ? » C’est visiblement raté. Après la déception c’est bien la colère que je ressens. Parce que j’ai l’impression qu’il se moque de moi et ça m’agace peut être encore plus que sa réaction première. Je ne comprends rien absolument rien et ça ne fait que renforcer le sentiment que c’est moi le problème. Que c’est parce que c’est moi qu’il ne peut pas se marier. Il soupire, et c'est à ce moment que je perçois pour la première fois qu'il ne semble lui aussi pas bien. Je le connais Caleb, même si je suis souvent incapable de remarquer quand il va pas bien, trop centrée sur moi même, et encore ce soir. Je laisse ma colère et ma déception prendre le contrôle sans même essayer de m’intéresser à lui. Sauf que j'entends à sa respiration, à son soupir qu'il y a quelque chose de plus derrière son refus. Toujours dos à lui, en attente d'une explication je me tais et je l'écoute, sans savoir ce qu'il va pouvoir me dire. « Elle est morte quand on était…» Je ferme les yeux en entendant les mots de Caleb. Je ferme les yeux et je n’ose plus bouger alors que Caleb me donne un début d’explication. Pas celle à laquelle je m’attendais. Mais je comprends. Du moins je n’ai pas beaucoup d’effort à faire pour comprendre qu’il me parle de Victoria, ses premiers mots suffissent à faire le lien avec son ex décédée. « Je ne veux pas vivre ça une deuxième fois. J’en serais pas capable. » J’analyse, je cherche à comprendre, à faire tout les liens possibles, il est plus de trois heures et demi, je suis épuisée et j’ai les émotions en vrac, mais je cherche vraiment à le comprendre. A comprendre pourquoi il évoque la mort de son ex -ex-fiancée- et je crois que je perçois le lien. Du moins j’ai comme la sensation qu’il associe le mariage et l’accident et donc la mort. Sauf qu’en effet ça n’a pas de sens. Du moins pas à mes yeux. Avant de lui répondre, je fais l’effort de me tourner vers lui. Et je finis par le regarder. Il est là, dans le lit et la première chose qui me frappe c’est qu'il me semble si vulnérable. Et je commence vraiment à détester Victoria. Enfin je la déteste malgré elle. Mais ce que je déteste vraiment c’est ce que je peux voir sur le visage de Caleb à chaque fois que l’on évoque cette femme et l’accident. Cette perte qu’il semble toujours porter en lui comme une blessure qui ne cicatrise jamais et qui reste douloureuse. Désormais c’est même le mariage qui semble devenir un sujet douloureux pour lui. Et je m’en veux. Je m’en veux d’avoir insisté. Je m’en veux de l’avoir poussé. Je m’en veux d’avoir réagi comme une gamine capricieuse à qui on venait de dire non. J’avais mes raisons mais lui aussi il a les siennes. Et je m’en veux de ne pas y avoir pensé avant par moi même. Mais en même temps je ne pouvais pas penser que dans la tête de Caleb, le mariage était lié à la mort. Non parce que c’est pas logique. Elle n’a pas eu d’accident parce qu’elle était la fiancée de Caleb. Elle n’est pas morte parce qu’elle allait se marier avec lui. « C’est pas parce qu’on prévoit de se marier qu’il va m’arriver un truc tu le sais non ? » J’ai presque envie de lui dire que ce n’est pas parce qu’il refuse de m’épouser qu’il ne va rien m’arriver non plus, mais je doute que ce soit la meilleure chose à lui dire à ce moment précis. Il a perdu sa fiancée, elle est morte et il a juste peur que ça recommence et je crois que ça je peux faire l’effort de le comprendre même si ça me semble encore pas très clair. Sa peine est très clair en tout cas et je la ressens vraiment. « Pourquoi tu m’as jamais parlé de ça ? » Questionne conne Alex. Question surtout à laquelle je peux facilement deviner la réponse, mais s’il m’avait parlé de ça peut être que j’aurais évité cette proposition qui a fini par nous mettre mal tout les deux. Et j’ai l’impression de ne jamais le comprendre, de ne jamais savoir ce qu’il veut ou ce dont il a besoin. Je ne comprends pas les besoins de mon mec et alors que je pensais lui faire plaisir, je le fais souffrir. Le mariage ça devait être une idée positive pour lui, pour nous et pas être lié à la mort de son ex. Pour mon propre bien-être j'ai tendance à oublier cette partie de sa vie, oublier qu'il a déjà été fiancé, qu'il a été heureux et qu'il avait des projets avec une autre, et ce soir cette réalité revient de façon si directe. Je constate qu'il est loin d'avoir tourné la page définitivement et j'aimerais avoir la capacité de le rendre assez heureux pour qu'il puisse oublier ses douleurs passées. Mais visiblement c'est pas le cas. Et comme les mots me manque dans cette situation, je fais un geste vers lui. Ma main se pose sur la sienne. Je suis toujours déçue de sa réaction à ma proposition, mais je comprends, enfin pas totalement mais il y a une explication à son refus. Parce que j'en suis sûre maintenant c'est un refus même s'il ne l'a pas signifié directement comme telle. « Je suis désolée d'avoir proposé ça, je savais pas. » Je ne le suis pas réellement, mais je ravale ma fierté et je m'excuse, parce que je m'en veux quand même d'avoir ravivé des souvenirs visiblement douloureux. « Et Caleb, ça a à voir avec moi quoique tu en dises, c'est peut-être pas moi le problème, mais c'est notre problème. Je ne sais pas si je peux t'aider avec ton passé, tu n'en parles pas vraiment, mais si ça affecte notre présent, alors ça me concerne. » Si le souvenir de Victoria ou de l'accident revient pour influencer ses décisions pour nous, ça me concerne que ça me plaise ou non. Que j'en ai envie ou non. Alors oui comme il le dit, je ne suis pas en cause, pour une fois. Ce n'est pas moi le problème, c'est son passé, son vécu, mais c'est quand même notre vie que ça affecte et même si j'entends ses mots, et si je suis touchée par ce qu'il me révèle de ses peurs, ça ne rends pas le moment plus agréable. Ça devait être un moment fort, et ça l'est mais pas du tout comme je l'avais imaginé. Je bouge un peu pour me rapprocher de lui, je me redresse et ma main sur son menton, je l'oblige à me regarder. « Je ne peux pas te promettre de ne pas mourir, même si je le voulais je ne pourrais pas te faire une telle promesse, mais je suis certaine que ce n'est pas parce que tu refuses de te marier avec moi que je vais vivre éternellement. » C'est pas extrêmement positif tout ça mais c'est la stricte vérité. « Mariage ou pas, je veux juste être avec toi, aussi longtemps que je le peux. » Et mariage ou non, je ne veux pas avoir à penser à la seule chose qui pourrait nous séparer. Je ne veux pas penser à la mort, parce que la cicatrice sur son torse continue à me rappeler qu'il aurait pu mourir et je n'ai pas envie d'y penser pas du tout.
Alex est froide, voire même glaciale. Elle m’en veut et il n’y a qu’à voir sa position dans le lit pour s’en rendre compte. Allongée dos à moi et j’ai même l’impression qu'elle s’est installée dans le lit de façon à être le plus loin possible de moi. Elle n’arrête pas de soupirer. Elle soupire un nombre incalculable de fois ce qui me fait davantage culpabiliser. Je me sens mal. Parce qu’en plus je sais que les raisons que j’aie sont incompréhensibles et stupides. Elle ne va pas le comprendre c’est sûr, mais pourtant elle m’en demande de trop. Je suis assis sur le lit, le regard baissé maltraitant mes doigts, preuve ultime de mon anxiété actuelle. Même quand je lui dis que les raisons de ma réaction sont ridicules elle ne cherche pas à en savoir plus, elle ne se pose pas de question et tout ce qu’elle fait c’est continuer à se montrer désagréable. Mais je la comprends et ce n’est pas à elle que j’en veux mais simplement à moi. « Parce que tu crois que je comprends quelque chose là ? » Toujours, elle me fait culpabiliser plus. Je me pince les lèvres et tout en gardant le regard baissé je continue à jouer avec mes doigts, à ronger mes ongles. « désolé… » Un murmure à peine audible, je ne suis même pas sûr qu’elle l’entendra. J’ai juste envie de quitter ce lit tant je me sens mal à l’aise et à en croire sa position qui n’a toujours pas bougée, elle ne serait sûrement pas contre l’idée que je m’en aille. Je prends sur moi et j’essaie de lui expliquer les raisons de mon refus mais c’est comme parler à un mur. Elle ne réagit pas, elle ne bouge pas et un tel manque de réactivité de sa part me déçoit énormément. Sa réaction – ou plutôt son absence de réaction – ne fait que me conforter dans l’idée que cette peur que j’aie est complètement ridicule et insensée. Je reste immobile dans le lit parce que je n’ai plus rien à dire. Si elle ne réagit pas je ne peux rien dire de plus. Je la sens bouger dans le lit mais ce n’est pas pour autant que je me tourne vers elle, préférant largement fixer le mur en face de moi. « C’est pas parce qu’on prévoit de se marier qu’il va m’arriver un truc tu le sais non ? » C’est un léger rire nerveux qui sort d’entre mes lèvres alors que je viens frotter une nouvelle fois mes yeux. « Je te l’avais dit que c’était ridicule. Laisse tomber, tu peux pas comprendre. » Et c’est vrai. Elle ne peut pas comprendre. Et tant mieux pour elle parce que je ne souhaite ça à personne. Avoir peur de voir Alex mourir comme j’ai vu Victoria mourir. Simplement parce que j’ai perdu ma première fiancée. C’est bête je le sais mais pourtant ça me terrifie vraiment. J’en ai la boule au ventre quand j’y pense. Quand je me dis qu’elle pourrait mourir un jour, avant moi. Et que dans ce cas je devrais revivre ça une deuxième fois. Un enterrement, un deuil. J’ai déjà cru que je ne m’en sortirais pas la première fois alors je sais que si je devais revivre ça, je n’aurais pas la force nécessaire pour ne pas rester au fond du trou. Mais tant qu’on ne l’a pas vécu une fois, on ne peut pas le comprendre. « Pourquoi tu m’as jamais parlé de ça ? » Je ne comprends pas vraiment cette question. Enfin si, en soi je la comprends mais je ne vois pas son intérêt. J’hausse les épaules tout en reniflant doucement et je finis enfin par la regarder. « Je pensais même pas que tu voulais te marier, Alex. » Parce que ça n’a jamais été son truc, elle ne m’avait jamais parlé d’envies de mariage un jour. « Et puis comme tu l’as dit, c’est complètement con comme peur alors je vois pas pourquoi je t’en aurais parlé. » Même si elle n’a pas vraiment dit que ma peur était bête, mais ça semblait quand même un peu sous-entendu. Ou peut-être que je dis ça parce que moi je le sais, que penser comme ça n’a aucun sens. « Je suis désolée d'avoir proposé ça, je savais pas. » J’hausse les épaules. Elle s’excuse. Elle n’a pas vraiment à le faire mais elle s’excuse quand même. Comme elle l’a dit elle-même, elle ne savait rien de tout ça alors pour une fois c’est à moi de m’excuser. Elle fait un pas vers moi en posant sa main sur la mienne. J’aimerais pouvoir me dire que notre conversation est terminée et que je vais pouvoir retourner me coucher mais je sais bien que ce n’est pas le cas, elle continue. « Et Caleb, ça a à voir avec moi quoique tu en dises, c'est peut-être pas moi le problème, mais c'est notre problème. Je ne sais pas si je peux t'aider avec ton passé, tu n'en parles pas vraiment, mais si ça affecte notre présent, alors ça me concerne. » Elle a raison, j’aurais dû lui en parler mais je trouve ce sujet assez délicat et assez spécial à aborder et je ne vois pas vraiment comment j’aurais pu faire. Mais oui, elle est concernée alors j’aurais dû lui en parler avant. « Désolé, j’aurais dû t’en parler avant. Excuse-moi. » Je prends sa main dans la mienne tout en reportant mon attention sur elle la regardant quelques secondes. « Mais s’il te plaît, retiens bien que ça n’a rien à avoir avec toi. Je t’aime, je veux passer le reste de ma vie avec toi, et je veux que tu sois ma femme. C’est juste un peu compliqué. Je pensais jamais te dire ça un jour, mais tu vas beaucoup trop vite pour moi. » Je lui avoue avant de lâcher un petit rire. Léger, mais un rire quand même. Il faut simplement que je travaille sur ça avec mon psychologue. Sur cette peur de l’abandon, cette peur de perdre de nouveau une femme que j’aime. J’ai encore beaucoup de travail à faire sur moi-même, malheureusement. « Je ne peux pas te promettre de ne pas mourir, même si je le voulais je ne pourrais pas te faire une telle promesse, mais je suis certaine que ce n'est pas parce que tu refuses de te marier avec moi que je vais vivre éternellement. » Dès qu’elle termine sa phrase, je lui réponds presque instantanément. « Je ne refuse pas de me marier avec toi. » Je lui assure. Simplement, pas maintenant, pas tout de suite, il faut qu’elle me laisse du temps. « Mariage ou pas, je veux juste être avec toi, aussi longtemps que je le peux. » Un mariage il y en aura un. C’est sûr. Je n’en doute même pas. Parce que je l’aime et que je n’imagine pas le reste de ma vie sans elle. Je plonge mon regard dans le sien, caressant le dos de sa main avec son pouce. « Je t’interdis de mourir avant moi. » Ce n’est pas une conversation très joyeuse et je lui dis ça comme si elle pouvait un quelconque contrôle sur sa mort, ce qui est encore une fois ridicule. Mais c’est simplement parce que je sais que je ne pourrais pas survivre une deuxième fois à la mort de la femme de ma vie. « Je t’aime, n’oublie jamais ça. » Ces quelques mots sont murmurés à son oreille alors que je viens déposer un léger baiser sur ses lèvres et puis ensuite sur sa joue. En espérant simplement qu’elle ne m’en veuille plus.
And when, when the night falls on you, baby, You're feeling all alone, You won't be on your own. I'll stand by you. Won't let nobody hurt you. I'll stand by you.
Je me tourne vers lui, alors qu'il vient de me donner des explications à sa réaction. Je me tourne vers lui mais il ne me regarde pas, préférant fixer le mur. Je le regarde et j'essaye de réfléchir, de comprendre comment je dois agir avec lui, avec cette histoire. Mais, il a raison je ne peux pas comprendre. Parce qu'il ne me parle pas de ça. Parce qu'il garde pour lui ses craintes. Alors non je ne peux pas le comprendre, je n'ai jamais été fiancée, je n'ai jamais vu l'homme que j'aime mourir. Et pourtant, j'aimerais le comprendre, j'aimerais vraiment savoir pourquoi il nous refuse ça. Et que ce soit ridicule ou non, que je puisse comprendre ou non, je ne vais pas laisser tomber. Pas alors que son passé est la cause de son refus présent. Il trouve ça ridicule mais ça ne l'est pas réellement s'il le ressent au point de refuser de m'épouser par crainte de me perdre. Le mariage est censé lier les gens pas les séparer. Et puis franchement au niveau pensées et craintes ridicules, je pense qu'au moins sur ça je peux le comprendre et même rivaliser avec lui. « Que ce soit ridicule ou pas ça n'a pas d'importance ça. Ce qui est important c'est ce que tu ressens, et peut-être que je ne peux pas te comprendre mais je pourrais si tu m'aides à le faire. » Je sais qu'il a reprit une thérapie mais on parle peu de tout ça. De ce qu'il ressent vis à vis de Victoria, de l'accident, et de toute cette partie de sa vie et pourtant c'est le sujet aujourd'hui, et je regrette qu'il ne m'ait jamais parlé de cette crainte qu'il a. De ce lien qu'il fait entre le mariage et l'accident. De cette peur qu'il a de me perdre. Il ne me parle pas de ça, et de bien d'autres choses sûrement qu'il me cache pour se protéger ou pour me protéger, j'en sais rien puisque justement il ne m'en parle pas. Et je lui demande pourquoi il ne m'en a jamais parlé. Il me regarde enfin, mais il ne réponds pas du tout à ma question. « Je pensais même pas que tu voulais te marier, Alex. » C'est vrai, moi aussi je ne lui ai pas parlé de tout ça. Et si j'avais su ce que ça engendrait comme réaction de sa part, je pense qu'il n'aurait jamais su que je pensais au mariage. Mais on en est plus là. Il sait que j'y pense et je sais de mon côté qu'il ne veut pas, voilà ou on en est, encore pas sur la même longueur d'onde. « Maintenant tu le sais, sauf que c'était pas censé se passer comme ça. » Pas du tout même. Je suis déçue et je ne peux le cacher. Parce que ce devait être positif pour nous, et ça ne l'est pas, pas du tout même. Ce devait être un beau moment, avec des sourires, de l'émotion. Ça devait le rendre heureux, nous rendre heureux ensemble. Mais c'est l'inverse qu'il se produit. Il souffre et moi je ne sais pas comment réagir face à tout ça. Mais il est trop tard pour revenir en arrière. Trop tard pour oublier que je lui ai demandé de m'épouser et qu'il n'a pas accepté. Parce que c'est exactement ce qu'il vient de se passer. Je passe une main dans mes cheveux alors qu'il reprends la parole. « Et puis comme tu l’as dit, c’est complètement con comme peur alors je vois pas pourquoi je t’en aurais parlé. » Au delà de ne jamais lui avoir dis que c'est complètement con, je sais que les peurs ne sont pas toujours rationnelles mais pourtant cette peur est réelle pour lui et je me dois d'en tenir compte et lui aussi. « Parce que ça t'affecte tout ça. Que ce soit con ou pas, je m'en fous c'est pas le problème. Tu ne me dis jamais quand tu es triste ou quand tu vas pas bien ou quand quelque chose te tracasse. » Il ne m'en a pas parlé à moi, de toute façon, il a tendance à ne pas me dire les choses négatives. Avant c'était parce que j'étais pas en mesure de faire face, parce que je buvais et que j'étais instable. Et maintenant sans doute qu'il veut juste me protéger, m'éviter de m'inquiéter alors que je suis enceinte. Enfin j'en sais rien parce qu'il ne me parle pas d'elle, de ses blessures, de ses peurs, mais je ne sais même pas s'il en a déjà parlé à quelqu'un. Et ça l'affecte, je le vois, mais ça nous affecte aussi tout les deux. Je m'excuse parce que malgré ce que je ressens, je peux voir qu'il est vraiment pas bien. Je peux voir que cette situation n'est absolument pas agréable pour lui. Et je ne veux pas que ce soit ma faute s'il se sent mal. Et pourtant, c'est ma demande qui a entraîné tout ça. Cette demande que je lui ai murmuré à l'oreille, parce que j'en avais réellement envie. « Désolé, j’aurais dû t’en parler avant. Excuse-moi. » On aurait du parler de tout ça avant oui. Du mariage, de ses premières fiançailles, de notre couple et des projets mais on l'a pas fait. On le fait maintenant, au milieu de la nuit. Je gère mes émotions comme je peux, et lui en fait de même mais après lui avoir tourné le dos, après avoir soupiré à de nombreuses reprises pour lui manifester ce que je ressentais suite à sa réaction, après m'être éloigné de lui, je veux me rapprocher de lui. Parce qu'il a besoin de moi, et que moi j'ai besoin de lui aussi. Il prends ma main et je serre sa main dans la mienne, renouant le lien avec lui, ressentant sa présence à mes côtés et je le regarde. Longuement alors qu'il tente sans doute de me rassurer, encore en me disant que ça n'a rien à voir avec moi et qu'il m'aime. Il veut passer le reste de sa vie avec moi, ce sont ses mots. Il veut que je sois sa femme, ses mots encore et pourtant il a refusé de m'épouser. Il a refusé cette proposition et si j'ai une explication à son refus, j'ai du mal à savoir comment je dois réagir à ses mots. Je baisse les yeux au moment ou il me dit que je vais beaucoup trop vite pour lui. C'est assez incroyable comme révélation tant ça a toujours été lui qui allait trop vite pour moi. Pour tout. Du premier 'je t'aime' devant lequel j'étais restée presque stoïque, aux projets sérieux face auxquels j'avais fuis. Il a toujours voulu tout ça alors que moi je n'étais pas prête, alors que j'avais peur de l'engagement. « C'est bien la première fois que c'est moi qui vais trop vite, mais moi aussi je t'aime, quoiqu'il se passe je t'aime et je te laisserais le temps dont tu as besoin. » Je l'aime réellement et savoir que le problème ne vient pas de moi me rassure quand même largement. Aujourd'hui, c'est lui qui refuse de s'engager, parce qu'il a peur de me perdre et même s'il nie refuser de se marier avec moi, il n'a en tout cas pas accepté et pour le moment il n'est pas prêt pour ça. Et je peux l'accepter. Je peux vraiment le faire, parce que je l'aime et qu'un mariage ou non ne changera pas les choses, c'est ce que je lui dis. Du moins pas pour moi, et s'il n'est pas prêt à m'épouser, je suis prête à attendre. Maintenant que je sais pourquoi il ne veut pas m'épouser, je peux vraiment attendre. Mais une chose est sûre, je ne suis pas prête d'aborder à nouveau le sujet, ça c'est une certitude. Il ne refuse peut-être pas à ses yeux, mais pour moi, ça reste un refus quoiqu'il en dise, quelques soient ses explications. Mais l'essentiel n'est plus là, du moins je me persuade que ce n'est pas grave, que ce n'est qu'un contre-temps dans notre histoire. Le plus important c'est ce que nous avons maintenant, et il est là avec moi et j'ai la chance de l'avoir à mes côtés. Il me regarde vraiment, peut-être la première fois depuis que je lui ai demandé de m'épouser et j'en fais de même. J'ai besoin de son regard, de lui pour me rassurer, pour me concentrer sur le moment présent. Je veux être avec lui, je le veux à mes côtés et lui aussi, et finalement le reste ne devrait pas compter. Je ne croyais même pas au mariage il y a encore quelques semaines, alors je crois que je peux réellement faire abstraction de cette réaction inattendue et décevante. Oublier cette idée de mariage, sans pour autant omettre les problèmes que ce sujet à fait remonter à la surface. Sa crainte de me perdre, une crainte qu'il réitère d'ailleurs en m'interdisant de mourir avant lui. Et si je ne peux pas comprendre ce qu'il ressent vraiment parce que je ne sais pas ce que ça fait de devoir faire le deuil de la personne qu'on aime, ses mots me rappelle la crainte énorme que j'avais ressenti quand j'avais réalisé qu'il aurait pu mourir dans cet accident. Je sais ce que ça fait de vivre sans lui, et il est hors de question que je commence à penser à l'idée qu'il puisse mourir avant moi. Pas au milieu de la nuit. Pas alors que la fatigue nous assaille tout les deux. Alors je pose mes mains sur son visage, doucement, caressant du bout des doigts ses joues. « Je ne vais pas mourir et toi non plus. » Je suis enfin heureuse dans ma vie, comblée et il est hors de question que je commence à craindre le pire, sans raisons, que je panique à nouveau en envisageant le pire des scénarios. « Je suis sérieuse. Je te l'ai déjà dis y'a quelques temps, mais tu as pas le droit de mourir, jamais. Il y a les filles maintenant, tu ne me laisses pas. » Il m'énerve presque à parler de la mort comme ça, il m'énerve parce que je ne peux m'empêcher de craindre qu'il puisse lui arriver un truc, même si je fais tout pour ne pas y penser. Et quand je lui ai demandé de m'épouser, je ne pensais pas me retrouver face à lui à parler du fait que ni l'un ni l'autre ne pouvait accepter la mort de l'autre. Je m'approche encore un peu de lui, alors qu'il me glisse quelques mots à l'oreille et qu'il m'embrasse. Je pose ma tête contre son torse, les yeux fermés, je me blottie contre lui, chose que j'aurais du faire il y a de ça plusieurs minutes. « Je t'aime tellement si tu savais à quel point. Et je veux que tu sache que je suis prête à tout pour toi. » Me marier avec lui était censé être une des choses incroyables que j'étais prête à faire pour lui, mais finalement ce sera attendre qu'il le soit et je vais attendre. Le soutenir, l'écouter et être là pour lui. Parce que marier ou pas, je compte bien partager sa vie encore longtemps. Jusqu'à ce que la mort nous sépare comme le dit le slogan, comme il le craint aussi.