Les secondes s’accumulent, interminables. Égoïstement, j’aurais préféré qu’elle s’en aille. Si tel avait été le cas alors je n’aurais pas eu à garder mes yeux plongés dans les siens pendant autant de temps. Ego bien trop développé, je ne pouvais pas me résoudre à regarder ailleurs puisque ça aurait été synonyme d’abandon de partie. J’aurais préféré ne jamais débuter aucune partie ni ne jouer à aucun jeu, si jamais j’avais un jour eu mon mot à dire dans toute cette histoire, ça aurait été ce que j’aurais clamé.

On entend nos souffles trop saccadés et nos respirations trop rapprochées tout comme on entend nos chaussures grincer sur le sol au moindre mouvement. Les cris ont cessé et ont fait place aux chuchotements au travers du train, le compte à rebours n’est désormais plus que mental alors qu’en plus des secondes ce sont désormais aux minutes de lentement s’accumuler. Le temps n’a jamais paru aussi long maintenant qu’on est suspendus dans une bulle de laquelle il semble impossible de s’échapper, peu importe à quel point on le désire.

Pour une fois, j’aurais préféré qu’elle parte. Elle aurait continué à s’amuser avec sa soeur et son ami et tout aurait été réglé. Quelques rendez vous de plus et elle aurait été heureuse d’un cran de plus et ça aurait été suffisant pour tout le monde, la gamine ne cessant de passer avant moi peu importe à quel point je clame que cette affirmation est aussi fausse que infondée. C’est la vérité, pourtant. Son bonheur ne cesse de toujours passer avant le mien, à la seule exception près de ses moments où les deux peuvent subsister en même temps, une fois Brisbane loin ou la porte fermée et les rideaux tirés. On a le droit d’être heureux quand personne ne peut le savoir mais une fois le feu des projecteurs ramenés sur nos personnes, c’est impossible. Ce n’est pas faute de lui avoir répété, ce n’est pas faute de s’être promis d’en rester là et de se contenter de ce qu’on a.

C’était sans compter sur le fait qu’elle ait besoin d’autre chose, qu’elle ait besoin de plus et qu’elle ait besoin d’un autre, surtout, là où moi je suis incapable de lui offrir ce qu’elle désire. Elle ne demande pas la lune et pourtant j’aurais trouvé plus facile de la lui décrocher que de m’ouvrir à elle, ne serait-ce un minimum. Le train part, les cris recommencent et nous enveloppent. Ils sont presque rassurants, en comparaison. Ils l’étaient en tout cas bien plus que les gestes de la brune, la gamine qui a pourtant des airs et des attitudes d’adultes, elle qui prend les décisions et agit pour nous deux. J’inspire longuement une fois ses lèvres contre les miennes, par habitude, par impression de retomber dans une zone de confort dans laquelle on a que très peu le droit d’accès. Une main se lève naturellement à sa hauteur pour venir se poser contre sa mâchoire et même si je tente au mieux de la calmer et la raisonner, elle s’y pose quand même. Une seconde, deux, trois, cinq. Et je me recule.

Retour à la réalité. Celle qu’on déteste.

Ma main est encore contre son visage mais mes lèvres ont quitté les siennes sans jamais n’en avoir eu envie. Perdu entre deux eaux et deux mondes, je laisse ma respiration saccadée occuper l’espace pendant un temps. “C’est lui que t’aurais embrassé si t’avais été seule avec ?” La main retombe en même temps que les accusations prennent place, mon timbre de voix aussi désolé que l’est mon coeur. Je ne peux pas être avec elle et pourtant la savoir avec un autre me tuerait. Je ne peux que désirer son bonheur et pourtant je refuse qu’elle y ait droit entièrement, pas après avoir partagé tant de ma chair empoisonnée avec elle.

Et s’il se détache, je me détacherai aussi. S’il part et s’il recule ce sera juste une confirmation de plus, ce ne sera qu’un signe supplémentaire. S’il s’éloigne c’est que j’ai tout imaginé, gamine qui ne sait que romancer la réalité. Les garçons comme lui ne regardent pas les filles comme moi, les garçons comme lui ne veulent pas des filles comme moi.

Ses doigts sur ma joue brûlent pour des dizaines de raisons, la principale étant qu’ils y ont autant leur place qu’ils la fuient. J’en demande trop et je l’ignore, j’arrive pas à calibrer quand je ne sais même pas comment faire. Tout va trop vite et tout est trop fort, tout fait si mal et tout est trop compliqué, de mon coeur qui martèle contre mes tempes à ses lèvres que les miennes n’en finissent plus de chercher.

Et il se recule.

“C’est lui que t’aurais embrassé si t’avais été seule avec ?” sa voix est douce, si calme. Ses mots sont violents, si cruels.

« Pourquoi tu demandes ça? Pourquoi tu fais ça? » il le sait, il le sait très bien.

Bien sûr que non, bien sûr que je n’aurais pas embrassé Liam, bien sûr que ce n’est pas comme ça avec lui. Bien sûr qu’il ne veut pas l’entendre aussi, Auden. Qu’il n’en a rien à faire et qu’il espère encore que je prenne le prochain train rien que pour prouver son point, rien que pour démontrer qu’il avait raison de me repousser, que c’était la bonne chose à faire de reculer. « Non je ne l’aurais pas embrassé. » j’inspire, je tente du moins. « Je t’ai embrassé parce que c’est toi que j’aime. » mais ça ne sera jamais suffisant.

Les garçons comme lui n’aiment pas les filles comme moi.

La réponse de Jill le fit sourire, il est vrai qu’avec son sale caractère ça pouvait être compliqué de supporter Auden. Ce qui rassura Liam c’est que Jill marcha totalement avec lui pour rejeter la responsabilité de l’échec de ce début de soirée sur le grincheux de service. « Oh tu sais parfois…. Ouais non oublie, j’ai rien dit. C'est Auden. » Liam ironisa parce qu’il pouvait quand même bien s’entendre – parfois – en dehors de ses crises de jalousies, il ne voulait pas non plus l’enfoncer plus bas que terre. Il ne fallait pas avoir fait de grandes études pour remarquer la différence de dynamique entre Liam et Jill, mais pourtant elle marcha dans son jeu, lui qui essaya tant bien que mal d’installer celle qu’il avait l’habitude d’amorcer quand il était en présence de Ginny et ce même si le caractère de sa sœur était totalement différent. « Normalement oui, j’ai prévu de rester une petite semaine et demie avant de reprendre la route vers ma thèse. » Liam était venu avant tout pour s’instruire, voir Ginny, mais aussi pour prendre une petite pause dans sa course effrénée vers l’accomplissement de ses études, son doctorat. « Très bonne question, c’est vrai qu’en plus j’ai rencontré Auden avant Ginny, mais je ne sais pas, ça a tout de suite mieux accroché avec elle. On ne le voit peut-être pas au premier coup d’œil et encore moins si on se fie à ses bégaiements, mais elle est vraiment passionnée, curieuse et toujours prête à apprendre même quand ça ne concerne pas forcément son domaine de prédilection. C’est probablement ce que j’admire le plus chez elle. » Il passa les détails sur le fait qu’il voyait aussi beaucoup de points communs entre lui et sa sœur cadette alors que leur caractère et pourtant tout aussi différent qu’il pouvait l’être aussi du côté de Jill. Liam accompagna ses mots d’un léger mouvement de la tête et commençait à se demander pourquoi toutes ces questions alors que Jill était plutôt adepte du silence au lieu de le combler avec des discussions inutiles. Liam commençait même à se dire qu’il y avait une autre jeune femme totalement différente sous cette apparence de monstre qu’elle voulait se donner.

Le jeune étudiant devait avoir le pire karma au monde alors qu’une marionnette heurta son front de plein fouet après que le petit train se fut enfin mis en marche. Il se tint la tête le temps de quelques secondes, avant de la secouer de nouveau. Il fût plus surpris qu’autre chose, heureusement que le point fort de cette attraction n’est pas la vitesse sinon il se serait retrouvé avec autre chose qu’un simple bleu bien ressorti accompagné par une bosse qui allait bien avec. « Ça devrait pouvoir le faire, mais si jamais je recroise sa route, elle terminera arrachée par mégarde. Si j’avais su, au moins ça m’aurait évité cette malencontreuse rencontre. » Lui avoua-t-il. Liam n’était jamais vraiment le premier pour passer outre les règles, mais il n’était plus vraiment à ça prêt à ce moment-là. Une fois à la sortie, le jeune homme prit une grande inspiration avant de se toucher le front, oui la bosse était bien toujours présente. « Au début c’était pas trop mal, mais la fin fut plutôt gâchée alors on va dire qu’on n’a pas vraiment pu en profiter. Et toi ? Ce cri qu’on a entendu avec Ginny, c’était le tien ? » Il a eu quelques sursauts, mais rien qui ne l’avait vraiment effrayé et en soit il s’attendait à quelque chose d’un peu plus horrifique. En dehors de la présence des figures iconiques des films d’horreurs et un décor qui laissait à désirer à certain endroit, il n’y avait pas grand-chose d’autre à en tirer. « J’espère qu’ils ne vont pas en avoir pour deux heures, connaissant Auden et son talent d’acteur on pourrait presque revenir demain qu’ils seraient toujours en train de parler à l’intérieur. » Liam hésita surtout à continuer à faire le tour de la fête foraine en compagnie de Jill ou alors attendre encore cinq petites minutes, s’il était venu à Londres c’était avant tout pour son amie alors continuer la soirée sans elle, il n’était pas trop fan de l’idée même s’il n’allait pas laisser Jill planter là.


   

Elle ne relance pas le sujet sur Auden, elle le trouve chiant, Liam aussi, au moins ils sont d’accord sur un point. Il reste à Londres et Jill hoche la tête. Il trouvera sûrement pleins d’excuses pour passer du temps avec la gamine, elle ne le reverra pas c’est presque sûr. Il n’a pas l’air de beaucoup l’aimer, et ça ne le dérange pas. Il a même l’air de s’ennuyer Liam. Il aurait peut-être dû suivre Auden lui aussi. Et il fait l’éloge de Ginny. Comme si elle avait vraiment besoin qu’une nouvelle personne la trouve absolument parfaite. Elle lève les yeux au ciel en regardant juste devant elle. “T’aurais dû essayer de la rattraper.” Et ne pas se rapprocher de Jill pour l’entraîner dans ce train complètement nul. Elle ne prend pas les restes de sa soeur, elle lui laissera les deux types qui seraient apparemment presque capable de se battre pour elle. Parce que la pauvre petite Ginny est incapable de s’affirmer ou de choisir, elle est faible Ginny, et ça, il n’y a que Jill qui s’en rend compte.

Ca l’amuse quand il se prend une poupée en plein visage. Il va avoir une bosse et un bleu, ça risque de gâcher un peu son visage, mais au moins Jill aura rit une fois pendant toute la durée de ce train fantôme. “T’aurais certainement sauvé la vie de pas mal de personnes en arrachant ce truc.” Ou alors il n’y a que lui qui pouvait le prendre dans son visage parce qu’il est trop grand ? Aucune idée. Elle sort enfin du train, et elle attend quelques minutes. Il doit vouloir attendre la sainte Ginny qui est encore cachée dans un coin sombre avec Auden. Elle prend que les parties qui l’intéressent, et il s’enfonce Liam. Sa soirée est apparemment bien moins intéressante depuis qu’il a laissé la dernière McGrath descendre de son épaule. “Il en faut bien plus pour me faire crier de terreur. Et déjà elle cherche autour d’elle où est ce qu’elle pourrait partir. “Ouais donc je suis presque sûre qu’ils reviendront pas.” Et ce sera juste une nouvelle raison pour laquelle elle détestera Auden et un peu plus sa soeur. Et elle commence à s’éloigner pour trouver autre chose à faire, il doit bien y avoir de vraies attractions dans cette fête foraine. “Attends la là elle finira pas venir te récupérer.” Mais Jill en a assez de l’entendre parler de Ginny, c’était une mauvaise idée cette soirée.

« Pourquoi tu demandes ça? Pourquoi tu fais ça? » Et toi Ginny ? Pourquoi tu fais ça ? Au jeu des questions qui resteront à jamais sans réponse, je sais que je peux gagner la partie et la guerre avec. J’aurais voulu qu’on arrive à rendre les choses faciles et simples, j’aurais sincèrement préféré que ce seul scénario prône sur tous les autres et pourtant l’échec est aussi cuisant qu’il est ô combien douloureux. Je demande parce que j’ai besoin d’en avoir la confirmation avant d’enfin te laisser vivre, c’est la réponse que je ne peux pas formuler car trop douloureuse. Je préférerais la garder dans une cage dorée que de la savoir ailleurs, aussi égoïste cela puisse-t-il être, je n’ai jamais caché cette part de moi.

« Non je ne l’aurais pas embrassé. » Parce qu’elle aurait attendu d’être dehors, parce qu’elle aurait eu le droit de l’embrasser au milieu de la foule, lui. Les néons jaunes auraient illuminé son visage et ça aurait été suffisant pour qu’elle soit heureuse, parce qu’avec lui elle en aurait le droit et c’était stupide que de penser qu’elle se contenterait du peu que j’arrive à lui donner. Je lui ai promis des bribes de rêves et demandé beaucoup de patience sans même savoir si un jour tout finira pas payer ; ce n’est pas une surprise qu’elle préfère trouver son bonheur ailleurs. « Je t’ai embrassé parce que c’est toi que j’aime. » Ca, par contre, ça a tout d’une surprise, justement. Plutôt que de me concentrer sur ses mots je m’interroge de savoir si elle ne les a peut être pas prononcés trop forts, s’ils n’ont pas résonné, s’il n’y a pas de possibilités qu’on se soit fait démasquer. Je l’aime aussi, mais ce n’est pas suffisant. On se l’est déjà dit, mais ce n’est toujours pas suffisant.

Je voudrais pouvoir l’embrasser parce que c’est elle que j’aime mais cela s’ajoute à la trop longue liste des choses qui nous sont interdites. “Pas ici Ginny.” Ma voix n’a plus rien de froide, désormais bien plus résignée et triste qu’autre chose. Je l’ai laissée s’éloigner et m’en veux aussitôt, ma main tente donc de retrouver sa place contre sa joue tant que personne ne peut encore nous voir, là où nous même avons du mal à s’entrevoir. “Tu sais qu’on n’a pas le droit.” Auden Williams qui respecte des règles jamais inscrites nulle part ; c’est ma façon à moi de prouver que je l’aime, cette même façon qui ne semble finalement que clamer le contraire. Je l’aime assez pour rester caché et ne pas avoir le droit de vivre, je l’aime justement trop pour la voir avec un autre.

Mon pouce se pose sur son menton, il glisse près de ses lèvres de gamine et même ça je ne devrais pas le faire. A défaut d’être libre de mes actions ou de mes paroles, je lui tends cette même main pour qu’elle l’attrape. Ce serait mon drapeau blanc à moi, la faute aux films que je me suis créé trop vite et trop fort sans qu’il n’y ait de raison à ça ; je ne sais pas ce que c’est que d’aimer quelqu’un alors j’apprends. “Viens, ils vont se demander où on est.” On a pas le droit, pas ici, elle le sait autant que moi. On doit continuer à jouer la comédie peu importe à quel point on déteste désormais ce jeu.

C'est terminé pour aujourd'hui. La fenêtre qui était allouée n'est plus, le compte à rebours s'est arrêté quand mes lèvres se sont détachées des siennes parce qu'il s'est éloigné. C'est tout ce que je peux avoir, c'est tout ce qu'il peut donner, et je n'ai pas menti quand j'ai dit que je ne forcerais rien de plus. L'entente reste la même, ici ou ailleurs, le deal reste le deal et quand son “Pas ici Ginny.” est confirmé d'un “Tu sais qu’on n’a pas le droit.” ma tête hoche de la positive en sachant très bien que peu importe ce que je pourrai dire ou même faire, la suite est calée, écrite, approuvée et signée des deux côtés.

Jamais je ne voudrais changer Auden parce qu'il ne serait plus Auden, et qu'à mes yeux, ça, ce serait le véritable drame. Il faut juste que j'apprenne à vivre avec ses démons à lui à défaut de savoir gérer les miens. Il faut juste que j'apprenne à m'adapter à son rythme, à y trouver mon compte, à compter les regards envoyés à la dérobé et les soupirs d'agacement comme autant de petites confirmations que tout va. C'est ainsi qu'on en a décidé tous les deux, et c'est injuste que je force quoi que ce soit quand l'entente a été prise ensemble, quand la décision a été prise en duo. Il veut qu'on se cache et je veux qu'on m'oublie, il veut qu'on mette de la distance et je veux m'accrocher à ce que je connais. La seule chose qui fait du sens dans le chaos, à une liberté que j'arrive seulement à trouver quand il est ironiquement à mes côtés. Le reste sera pour un autre jour de toute façon. Aujourd'hui, c'est terminé.

“Viens, ils vont se demander où on est.” rien ne fait sens quand ses doigts trouvent les miens et qu'il les serre une seconde. Ça aussi, on a pas le droit, ça aussi, on peut pas ici. Ma main remonte la sienne, mes lèvres embrassent des cicatrices que je ne vois même plus quand bien même je sais exactement où elles se trouvent. Et la seconde suivante, ce sont mes doigts à moi qui font le trajet inverse, quittant les siens, inspirant au passage le temps de reprendre l'air de gamine que j'avais enfilé comme le plus hypocrite des masques pour le monde entier, le plus nécessaire pour Auden et moi.

« J'te déteste et c'était vraiment pas cool de me dire qu'il y avait un stand de barbe à papa là parce qu'il n'y en avait clairement pas et tu mens Auden t'es horrible! » j'ai improvisé une course et j'ai inventé une excuse, une des dizaines de milliers qui s'alignent dans sa tête comme dans la mienne pour justifier des moments isolés comme ceux-là. On a couru à travers les couloirs de la maison hantée et on s'est insultés (lui il a insulté les tueurs déguisés et moi les meubles qui m'ont fait mille ecchymoses en cinq minutes top chrono) et on a fini par aboutir à bout de souffle dehors, devant Liam et Jill. Tout va bien quand je ramène mes cheveux en une queue-de-cheval qui n'en a que le nom, tout va bien quand je fronce du nez et lui tire la langue en conclusion.

Mes yeux brillent un peu plus une fois qu'ils se sont habitués à la lumière du soleil, ils trouvent automatiquement ceux rageurs de ma soeur, ceux espiègles de Liam. « C'était cool le train? Pourquoi t'es blessé? » le front de Liam suggère qu'il a reçu un coup, coup que j'attribuerais à ma soeur sans même réfléchir. « Oh, du tir à la hache! » la seconde d'après, mes pas initient le groupe vers une autre attraction, au fur et à mesure que ma respiration retrouve un rythme normal. Sur mes lèvres reste le fantôme d'un baiser qui a des airs d'appartenir à une autre vie.

« Je ne suis pas non plus son petit toutou. C’est simplement qu’ici c’est la personne que je connais vraiment bien, Auden ça compte pas, j’ai l’impression qu’il avait envie de me tuer avec son vieux regard perçant. » Il ne fallait pas non plus qu’elle se méprenne, Liam n’était pas là pour suivre Ginny à la trace, c’est qu’il n’était pas non plus du genre à se laisser caresser la tête le brun. « Et comme ça au moins ça m’a permis d’en savoir un peu plus sur la famille McGrath. » En soit il n’a rien appris d’extraordinaire, mais il a pu se faire son propre avis sur Jill qu’il ne connaissait que des mots de sa cadette, ce qui participa au fait d’être un peu mal à l’aise au début, pour lui Jill était avant tout pas très fiable, colérique et pouvait ressentir l’envie de te tuer d’une seconde à l’autre.

« Effectivement, mais je me dis que je ne devrais pas être le seul qui devrait se taper la honte de recevoir cette marionnette dans la tête alors que la photo de fin se déclenche en même temps. » Liam montra dans la direction du stand où les photos arrivent petit à petit et on pouvait très bien remarquer la collision entre cette sorcière sur son balais et le front de Liam qui est maintenant baptisé par une jolie bosse et un bleu qui ne devrait pas tarder à se montrer. Il préféra en rire après avoir passé son petit coup de gueule, il est comme ça Liam, il n’arrive jamais à rester énerver vraiment longtemps. La réponse de la jeune femme n’étonna pas vraiment le brun, ce n’est pas comme si c’était son genre de laisse paraître de la peur à travers ses émotions. « Il ne va plus nous rester le choix que de continuer à deux. » Il ne fallait aucunement voir un rencart proposé par le jeune homme, même si ça pouvait bien sûr laisser porter à confusion, c’était simplement par politesse, elle qui avait fait l’effort de venir alors qu’elle savait probablement qu’elle s’y ferait bien chier. Liam leva le doigt comme en signe de protestation alors que la voix de Ginny résonna à peine Jill avait-elle terminé de parler. « Ah ! Euh oui… Enfin… Oh c’est rien, je me suis juste…. » Qu’est-ce qu’il avait bien pu se passer à l’intérieur entre eux deux ? C’est la question que se posait Liam alors qu’il se sentait comme un con, toujours le doigt levé. C'est qu'elle était forte pour faire dévier une conversation la Ginny. « Bon alors Auden, t’a terminé de faire la gueule ? Oh ça va je déconne, tu vas pouvoir me mettre la misère et t’en vanter après si jamais tu m’éclates. » Liam voulait avant tout détendre l’atmosphère et son défi lancé envers le jeune homme fut accompagné d’un léger coup de coude dans le bras et d‘un clin d’œil. La seconde d’après, Liam se retrouva au stand de lancer de hache attendant patiemment que le reste du groupe arrive à son tour. « C’est pas un peu dangereux ça quand même ? » Se posa-t-il comme question alors qu’il n’y avait pas vraiment de mesure de sécurité spécifique de prises. Il toucha l’une des haches et elles n’étaient finalement pas très tranchant, juste assez pour se loger d’un mini centimètre dans le bois.

Il était plutôt confiant le Liam, il se disait que ça ne pouvait pas être plus compliqué qu’un dressage au ranch ou que d’un lancer de lasso, pour lui ça devait être le même principe et il commença les hostilités en se préparant à lancer le premier projectile. « Attention les yeux, vous allez voir ce que ça donne d’être un enfant élevé dans un ranch. » La hache partit aussitôt ses mots furent-ils terminés



   

”Peut-être que c’est exactement ce qu’il va faire si on se retrouve au stand de tir !” Elle hoche la tête, peut-être qu’il y a moyen de le faire paniquer Liam. Auden pourrait très bien lui tirer un millier de fois dessus avec des billes en plastique juste pour son bon plaisir. “Oh tu m’utilises donc pour avoir des informations sur ma famille.” Il y avait donc bien une vraie raison. Il veut juste en savoir plus sur Ginny, il aurait voulu qu’elle parle sur des sujets que la mini McGrath refuse d’aborder. Il a essayé d’en savoir plus sur leur déménagement, mais aucun des McGrath n’a envie de parler de ça. “Tu devrais prendre cette photo juste pour te souvenir de cette magnifique bosse qui orne ton visage.” Elle se voit de plus en plus, et, demain, elle sera certainement bien plus bleue que rouge. Elle pouffe de rire, mais elle a quand même envie de s’éloigner. Elle voudrait aller tenter d’autres attractions, des choses un peu plus intéressantes. Elle aurait pu le faire si elle n’avait pas discuté de Ginny (pour changer) avec Liam. Elle croise les bras quand il dit que leur dernière solution va être de devoir continuer le trajet à deux. Elle souffle, elle ne se savait pas de si mauvaise compagnie. “Oh tu sais t’es vraiment pas obligé.” Elle sait se débrouiller seule Jill, et elle n’a besoin de personne pour l’accompagner où que ce soit.

Elle s’apprêtait à s’éloigner quand Auden et Ginny ont refait leur apparition. Elle grogne mais elle reste, observant le visage fermé de sa soeur. Mais elle ne s’intéresse pas à ce qu’il a bien pu se passer, elle ne s’intéresse pas à sa petite soeur. “Non c’est pas moi qui l’ai frappé.” Elle croise le regard de Ginny, elle sentait le sous entendu dans sa question. Elle aurait pu le faire, mais la poupée volante s’en est chargée à sa place. “La preuve est sur la photo.” Et elle pointe du doigt les images qui se trouvent juste derrière Auden et Ginny.

Ils se dirigent vers le stand de tir, peut-être que Liam veut vraiment mourir. “T’as peur ?” Elle hausse un sourcil avant de se poser contre la parois du stand. Mais il décide de commencer, elle l’observe, peut-être qu’il va juste se ridiculiser devant tout le monde. Elle penche la tête sur le côté en attendant que son tour arrive, elle ne savait pas qu’il était possible de tirer avec des haches dans ce genre de stands de fête foraine. “Je suis une fille de la ville, j’ai jamais tiré à la hache.” Et pourtant elle prend place et attrape une arme pour tenter de la lancer. Peut-être qu’elle sera chanceuse.

Dééééééés:

 

Mon poing se resserre lorsque ses mains glissent en toutes connaissances de cause. Je suis le premier à lui dire de garder ses distances et le premier aussi à lui quémander le moindre soupçon d’attention dès lors que cela semble possible et acceptable. Pourtant, je suis encore et toujours le premier à ne pas pouvoir accepter qu’elle se recule à son tour, même lorsque c’est sûrement pour le bien de tous et surtout pour le mien. Les ongles s’enfoncent dans ma chair et je ravale ma salive avec difficulté dans la pénombre. Le spectacle est terminé pour ce soir mais une main égoïste se pose une dernière fois contre sa hanche durant quelques secondes à peine, le temps pour moi d’expirer douloureusement contre sa nuque.

« J'te déteste et c'était vraiment pas cool de me dire qu'il y avait un stand de barbe à papa là parce qu'il n'y en avait clairement pas et tu mens Auden t'es horrible! » “Bla bla bla tu utilises ta salive pour rien McGrath.” Le soleil nous éclaire de nouveau, ma main glisse contre son visage et étire chacun de ses traits et mon sourire est aussi immense que faux. Retour à la vie réelle. Mes pas s’ancrent dans les siens, mes chaussures tentent de marcher sur les siennes, mes pieds s’immiscent devant les siens pour la faire tomber là où, malencontreusement, j’aurai toujours une main devant pour éviter qu’elle ne se retrouve face contre sol.

« C'était cool le train? Pourquoi t'es blessé? » Oh vraiment, on l’a laissé seul avec Jillian pendant plusieurs dizaines de minutes et elle ose demander pourquoi il est blessé ? « Oh, du tir à la hache! » Oh, une mauvaise idée.

« Ah ! Euh oui… Enfin… Oh c’est rien, je me suis juste…. » Il fait un AVC ? On devrait l’aider ? Je suis supposée lever le petit doigt en plus d’un sourcil ? A défaut de paniquer, je croise plutôt les bras en attendant qu’il reprenne ses esprits. « Bon alors Auden, t’a terminé de faire la gueule ? Oh ça va je déconne, tu vas pouvoir me mettre la misère et t’en vanter après si jamais tu m’éclates. » “La ferme Liam.” Venant de moi cela ressemble bien plus à de chaudes salutations plutôt qu’autre chose et depuis le temps je sais bien que Liam l’aura compris, même si ça ne l’empêche pas pour autant de mettre les deux pieds dans le plat à chaque fois. Je n’ai pas le droit de montrer à quel point je ne fais que commencer à justement faire la gueule et à défaut de pouvoir être moi même à ce niveau là, je peux au moins m’amuser à la hache avec lui. Cela s’annonce bien plus trépidant, finalement. On sait jamais, avec un peu de chance je pourrai laisser une hache s’échapper en direction de l’autre McGrath. Par mégarde, bien sûr. En fond, la caravane passe et le chien aboie. Je n’écoute pas ce que dit Jillian.

Le lancer de Liam fait bien plus de bruits que de points, je garde les bras croisés en m’adossant contre un des poteaux non loin de l’attraction. Ginny, elle, est postée en face, à plusieurs mètres de raison. Lorsque vient le tour de sa soeur je lève déjà les yeux au ciel mais mon sang ne fait finalement qu’un tour lorsque le manche de ladite hache rebondit contre le rondin de bois pour venir égratigner l’avant bras de Liam. Finalement, c’est le gérant de l’attraction qui est le seul choqué de cette scène. Après tout, à mettre une hache entre les mains de Jllian, l’issue était prévisible. Je suis presque étonné qu’elle n’ait pas atterri directement sur sa tête, à vrai dire, mais ne manque pas pour autant de laisser mon regard le plus noir dériver sur le visage de la soeur McGrath. “Tu gâches toujours tout, t’es pas croyable.” Les mots lui sont destinés tant à elle qu’à sa soeur, finalement, quand elle se fait le parfait bouc émissaire pour toute cette famille. “On va demander une trousse de premiers secours à l’accueil, Liam.” J’imagine qu’ils doivent bien avoir ce genre de conneries pour les gamins trop pressés qui s’étalent sur le sol ; c’est un peu la même chose, là, non ? Autant lui que moi avons besoin de prendre l’air pour des raisons différentes - et oui, d’accord, pour soigner sa plaie aussi.

Je m’approche du Taylor pour lui montrer le chemin à suivre et ajoute un sourire rassurant, parce que même si j’ai parfois envie de le tuer, ce sera toujours moins pire que mes pulsions de meurtres liées à Jillian. “T’as de la chance, cinq minutes de plus et elle n’aurait même pas fait semblant de viser ailleurs.” Je murmure à son oreille, sourire amusé en coin.

« C’est pas un peu dangereux ça quand même ? »
« Mais non pas du tout. »

Quand bien même il tente de se défiler, déjà j'ai sélectionné la hache avec laquelle il fera un carnage, le garçon de la campagne qui a sûrement manipulé des instruments du genre depuis le berceau. Il m'a jamais montré son ranch Liam, je l'ai juste vu en photo et ce serait mentir de dire que je n'ai pas toujours eu envie d'aller y faire un tour. De voir ses chevaux, de grimper tout en haut de leur écurie. C'est idiot quand on y pense, mais tout ce qui me sort de ma zone de confort a des airs salvateurs ces jours-ci. Tout ce qui me sort de la petite vie trop parfaite qu'on m'a choisie.

Mon « Ouhlaaa! » accompagne son lancer qui ne tombe pas en plein dans la cible mais assez proche pour suffire à ce que j'applaudisse l'effort. Jill n'a pas l'air du tout impressionnée, Auden est fidèle à lui-même en restant en retrait à juger la Terre entière. J'essaie d'attraper son regard par-dessus mon épaule mais ses prunelles fuient constamment ; une autre piqûre de rappel que ça, juste ça, ça ne lui sera jamais suffisant. “Je suis une fille de la ville, j’ai jamais tiré à la hache.” ma soeur me rappelle à l'ordre, j'éclate de rire de la voir tenter de soulever l'outil, franchement heureuse qu'elle se prête au jeu. Entre elle et Aude, j'étais persuadée qu'ils allaient juste finir tous les deux par partir chacun de leur côté sans donner plus d'explications depuis bien longtemps.

La hache ricoche et mes exclamations étonnées se teintent bien vite d'une panique totalement assumée. Je détourne la tête bien sûr des cibles, rivant mes prunelles sur la peau marquée de Liam. “Tu gâches toujours tout, t’es pas croyable.” aouch. Ses mots volent vers ma soeur mais je le vois, le mince coup d'oeil qu'il perd sur mon profil. Alors c'est vrai, alors c'est véritablement moi qui gâche tout. C'est moi qui en demande trop et c'est moi qui n'est pas à la hauteur. C'est moi qui force et c'est moi qui a tout, absolument tout bousillé, aujourd'hui comme hier, et surtout comme demain. “On va demander une trousse de premiers secours à l’accueil, Liam.” et les voilà qui partent tous les deux, sans demander leur reste.

C'est devenu difficile de respirer, quand je redresse les yeux pour voir l'air que fait Jill. Un « Liam, attends! » finira par poindre au bout de mes lèvres quand ma main a empoigné celle de mon aînée, l'encourageant à me suivre alors qu'il m'est inconcevable de continuer de profiter de la fête foraine si je sais que Liam est occupé ailleurs à attendre qu'on le soigne. « Dis quelque chose. » je chuchote, à l'oreille de ma soeur, elle qui n'a pas encore formulé d'excuses, elle que je laisse une seconde une seule avec les garçons, filer pour revenir aussi vite. Ma main et son présent sucré se lève à l'intention du Taylor, un sourire de gamine est revenu se loger sur mes lèvres maintenant que je me sens le moindrement utile. « Tiens, comme ça aujourd'hui ce sera pas la journée où tu as été attaqué par une poupée et par une hache, mais celle où tu as reçu la plus grosse pomme d'amour de l'humanité. » si j'ai encore tout gâché avec Auden, n'en reste qu'il n'est pas trop tard pour ne rien gâcher avec Liam.

Liam avait pu noter que la tension était retombée, Jill lui était quant à elle toujours aussi compliqué à cerner, tant un moment elle lui reproche de ne penser que par Ginny, tant de l’autre elle aimerait juste qu’il la laisse tranquille. Il ne savait plus vraiment quoi dire ou faire en compagnie seule de la jeune femme. « Elle est très bien là où elle est cette photo, j’espère même qu’elle va vite disparaître derrière les autres qui arrivent. » Finit-il par lui avouer. Il n’a pas cru bon de souligner le fait qu’elle s’était elle-même renseigner sur lui et sur la raison de sa présence à Londres alors qu’il voulait simplement avoir de plus amples informations sur la raison de la fuite de la famille McGrath. Il n’insista pas, il avait assez de bosse comme ça pour égayer sa journée. Auden et Ginny ne tardèrent finalement pas à les rejoindre et Liam était à deux doigts de soupirer de soulagement lui qui pensait qu’il commençait enfin à avoir une discussion normale avec la sœur aînée avant qu’elle ne le remette rapidement à sa place. « En voilà une façon de parler à un vieil ami. » Liam connaissait très bien Auden et il savait qu’il réagirait de cette façon en le provocant un peu, c’était leur petit truc de se faire continuellement chier jusqu’à ce que l’un d’eux lâche l’affaire et décider de simplement ignorer l’autre.

Liam lança les hostilités, lui qui pensait pouvoir le mieux se démerder à ce genre de défi. Pourtant il n’était pas aussi fier qu’il n’aurait cru pouvoir l’être, il avait sûrement perdu la main au fil du temps à laisser le ranch derrière lui. Perdre la main, en voilà une belle expression alors que Jill a failli la mettre en pratique, son lancer rebondit et vint blesser Liam à l’avant-bras, c’était décidément une autre mauvaise idée et il l’avait pourtant dit que ça pouvait être dangereux. Il se demanda même comment un stand comme celui-ci peut-il bien être encore debout, personne n’avait fait remonter l’info jusqu’à la mairie ? Liam se sentit surtout plus con que mal d’avoir participé au jeu et posa son autre main sur l’entaille. « Fait chier. » Adieu les amabilités, bonjour les injures. La blessure n’était certes que légère – et encore heureux – mais le sang s’amusait tout de même à sortir de la plaie. Liam ne fit pas vraiment attention aux commentaires d’Auden et se contenta seulement de le suivre avant que Ginny ne les arrête. Le présent de la jeune femme était simple, mais c’est justement cette simplicité que l’étudiant a toujours bien aimé chez la jeune femme. « Merci pour le geste, avec cinq points on peut avoir un petit pikachu non ? Il est pour toi, cadeau de la maison, je me souviens que tu raffoles de ça non ? » Il lui fit un clin d’œil et Liam indiqua la peluche au propriétaire du stand qui était visiblement paniqué de savoir si ça allait bien pouvoir se retourner contre lui et détacha la mascotte d’un célèbre jeu pour la donner à Ginny. Il n’en voulait pas à sa sœur, il y avait de forte chance qu’elle l’ait fait exprès, mais c’était mieux pour lui de se dire que ça ne l’était pas et que c’était simplement un coup de malchance, un autre de plus. « Regardez-moi ça, je me disais bien qu’il y avait une petite ressemblance, tes joues sont aussi roses que celles de la peluche. » Rit-il alors qu’il se mit enfin à suivre Auden.

« C’était pas volontaire hein ? » Liam l’espérait bien. Ça faisait bien longtemps qu’ils ne s’étaient pas retrouvés seul tous les deux, sans que Ginny ne soit dans les parages et Liam voulait en profiter pour s’excuser. « Je suis désolé si je t’ai mis de mauvais poil au début, je ne savais pas qu’il y avait quelque chose entre toi et Ginny. » Il fallait être aveugle pour ne pas le voir et Liam espérait avec ces mots qu’ils ne se cachent plus. Il ne voulait également pas qu’Auden y voit une quelconque concurrence avec l’étudiant en histoire. Liam appréciait beaucoup Ginny – et c’est toujours le cas – mais il ne voulait pas tout gâcher pour s’essayer à une relation, il voulait garder cette innocence entre eux deux, cette légèreté quand ils se retrouvent ensemble. « Vous n’avez pas à vous cacher en ma présence et je sais être muet comme une tombe. » Un clin d’œil après et ils se retrouvèrent devant un autre stand. « Excusez-moi, auriez-vous une trousse de secours s’il vous plait ? » Liam espéra surtout ne pas avoir besoin de points de sutures, ça l’aurait plus que fait chier de partir pour l’hôpital.

Elle a voulu essayer de lancer cette hache pour montrer qu’elle savait se servir de n’importe quelle arme. Mais elle lui glisse des mains, elle rebondit et abime le bras de Liam. “Oh.” C’est tout ce qu’elle trouve à dire. Tout va bien, ça n’a pas l’air très grave. Il y a un peu de sang qui coule mais Liam a surtout l’air de faire du drame pour un rien. Elle lève les yeux au ciel quand celui qui tient le stand se met à leur hurler de partir. Tout est de sa faute, c’est son stand et ses haches qui sont défectueuses. Elle allait rester pour réessayer, Auden et Liam commencent à s’éloigner et elle se dit que ce n’est pas une grande perte. Peut-être que ça sera l’occasion d’écourter ce double rencard qui n’est double que pour Ginny.

Elle se concentre mais sa soeur l’attrape pas le bras avant qu’elle n’ait le temps de faire quoi que ce soit. “Eeeeh !” Elle s’éloigne à la vitesse de sa soeur, pourquoi elle cherche tout le temps à contenter tout le monde la mini McGrath ? Elle est vraiment usante. “Qu’est ce que tu veux que je dise ?” Qu’est ce qu’elle cherche à faire ? Elle essaie vraiment de faire en sorte que Liam apprécie Jill ? C’est déjà trop tard. Il ne l’appréciait pas avant même de la rencontrer et la seule chose pour laquelle il est ici c’est Ginny. Elle n’aurait jamais dû emmener Jill. Elle aurait dû gérer son trouple toute seule et Jill n’aurait pas perdu sa soirée à rester coincée dans une fête foraine qui est tout sauf amusante. Elle a sa tête d’enfant Ginny quand elle tend une pomme d’amour à Liam, elle essaie de rattraper toutes les fautes du monde entier et Jill ne fait que la regarder en secouant la tête. Elle les suit encore, alors que c’est inutile et qu’ils ont l’air de tous passer une mauvaise soirée. Liam et Ginny aurait dû profiter de se retrouver tous les deux ici, ils avaient l’air de s’amuser quand personne était dans les parages. “Pourquoi t’as invité tout le monde Gin ? C’est n’importe quoi.”

Ginny finit par se joindre à notre duo sans que cela n’étonne personne et j’observe d’un air dédaigneux la pomme d’amour qu’elle tend à Liam et toutes les déclarations dégoulinantes d’on-ne-sait-trop-quoi allant avec. J’espère qu’il est au moins heureux de posséder la plus grosse pomme d’amour de l’histoire de l’humanité puisqu’à en juger par les yeux brillants de la plus jeune, cela semblait compter énormément pour elle. De mon côté, je ne fais que taper du pied et m’impatienter du temps perdu alors qu’on était en si bonne route pour trouver une trousse de secours. Je me raccroche au moins à l’humour du Taylor qui osait me demander l’assurance que Jillian ne l’avait pas fait exprès. J’ai échappé un rire aussi franc que désolé : oh, si seulement il savait dans quoi il venait de s’embarquer en côtoyant de si près la plus grande des deux sœurs. La hache n’est qu’un avant goût de tous les dégâts qu’elle ne cesse de causer sur son passage. « Merci pour le geste, avec cinq points on peut avoir un petit pikachu non ? Il est pour toi, cadeau de la maison, je me souviens que tu raffoles de ça non ? » Je me retiens de toutes les façons possible, laissant une langue rageuse parcourir mes dents et un poing qui l’est tout autant afficher peu à peu des veines saillantes de plus en plus visibles. Une bordel de pomme d’amour et un putain de pikachu, j'imagine que les deux font la paire maintenant. Grand bien leur fasse. « Regardez-moi ça, je me disais bien qu’il y avait une petite ressemblance, tes joues sont aussi roses que celles de la peluche. » C’est qu’il est drôle en plus de tout ça. Le parfait petit homme à marier.

Pourtant il est doué, le con, quand il s’agit de me faire changer d’avis en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. Je m’accroche à ses mots comme à une bouée de sauvetage, même si en premier lieu ma réaction fut toute autre. « Je suis désolé si je t’ai mis de mauvais poil au début, je ne savais pas qu’il y avait quelque chose entre toi et Ginny. » J’ai d’abord pensé à toutes les manières que j’avais de le tuer ou, au minimum, de lui faire à jamais garder le silence et croyez moi c’était vraiment pas beau à voir. Ayant décidé d’être raisonnable pour ce soir au moins, je me suis contenté de le rattraper sur le chemin après avoir vérifié que Ginny et sa soeur étaient trop loin de nous pour avoir entendu ces mots dangereux. “Faut pas que ça se sache. C’est important, Liam.” Si cela venait à éclater ce ne serait qu’un lot de problèmes que cette révélation entraînerait avec elle et c’est tout ce qu’on cherche à éviter. Ses mots me rassurent pourtant, au sens le plus égoïste du terme. Cela signifie simplement que je suis territorial et jaloux là où je n’aurais jamais dû l’être - et il est hors de question que je fasse part de cette introspection et remise en question à qui que ce soit. « Vous n’avez pas à vous cacher en ma présence et je sais être muet comme une tombe. » Mes poings se desserrent complètement et mon souffle reprend un rythme normal. Ce n’est que Ginny et moi depuis la première heure, j’avais sans doute bien trop peur qu’il viennent fragiliser cet équilibre déjà instable. Il est l’une des rares personnes que j’apprécie en ce monde mais la situation est bien trop complexe pour que ce soit suffisant, malheureusement. “Merci.” J’articule à peine mais cela signifie énormément pour moi et pour nous, alors je me contente ultimement de plonger mes mains dans mes poches et d’attendre qu’on change officiellement de sujet.

« Excusez-moi, auriez-vous une trousse de secours s’il vous plait ? » Je n’ai jamais été aussi heureux qu’on me tende une trousse de secours de ma vie et je remercie le festivalier d’un battement de paupières (deux fois en quelques minutes, le ciel va vraiment finir par nous tomber sur la tête) avant de me diriger dans un endroit plus calme du parc, entre des attractions hors d’état de marche et des caravanes. Les filles étant toujours derrière nous c’est à Ginny que je tends enfin la trousse éclairée des néons jaunes du lampadaire public. Le faible sourire au coin des lèvres devient la plus pitoyable des excuses à son encontre mais elle sait à qui elle a à faire, aujourd’hui. “C’est toi la pro.” C’est elle qui me soigne depuis bien longtemps déjà, Liam peut avoir confiance en ses doigts de fée dès lors qu’il s’agit de soigner des plaies. Je me retiens d’ajouter tout second commentaire à propos de la seconde McGrath et reste fier de cet effort incommensurable.