Cela faisait trois jours qu’elle ne l’avait pas vu et c’était déjà trop long. Elle ne se souvenait plus de la dernière fois où elle avait eu autant envie de le voir. Sans doute, sans peur qu’ils allaient se déchirer un peu plus brisant leur amitié de manière irréparable. Ils s’étaient accrochés l’un à l’autre avec désespoir malgré l’absence, malgré les non-dits et la colère toujours présente entre eux. Et finalement, alors qu’elle pensait que tout espoir était perdu, qu’il était temps de mettre ces sentiments de côté et de les oublier, il l’avait rattrapée. Keith ne l’avait pas laissée partir et il n’avait pas trouvé le moyen de la fuir. Pour la première fois, elle avait l’impression de l’avoir retrouvé, enfin. Cela faisait trois jours depuis cet entraînement au dojo. Trois jours où un sourire idiot apparaissait sur son visage à chaque fois qu’elle pensait à lui. Trois jours où son nom n’était plus la source d’une douleur muette liée à des souvenirs qu’elle ne supportait plus. Non elle ne pensait qu’à ses lèvres qu’elle avait envie d’embrasser, sa peau qu’elle avait envie de toucher et la facilité avec laquelle elle était fondamentalement elle-même avec lui. Lui qui la connaissait par cœur depuis déjà bien longtemps. Il lui avait envoyé un message pour lui dire qu’il finirait vers dix-huit heures. Elle lui avait répondu qu’elle passerait chez lui, c’était son jour de repos. Et la journée avait été longue. Comme une idiote elle s’était surprise à regarder les heures passer malgré toutes les choses qu’elle avait à faire aujourd’hui, le temps ne passait pas assez vite.

Enfin le soleil était descendu et elle avait pris son sac, s’était décidée à emmener Pepsi avec elle, ne voulant pas le laisser seul et se disant qu’il pourrait rencontrer Ruby. Et à dix-huit heures-trente elle était sur le pas de sa porte, loin les affaires de sports, elle s’était habillée pour plaire avec une robe bordeaux simple mais qui accentuait ses formes.

Elle sait où se trouvent les clés, sous le pot de fleur et comme une vieille habitude elle ouvre la porte. Pepsi va immédiatement à la rencontre de Ruby ce qui fait sourire la brune. « Ca va ma belle. » Elle caresse la chienne avec affection avant de regarder dans le salon « C’est moi ! »  Histoire qu’il ne pense pas qu’elle soit un cambrioleur tout de même. Il est dans la cuisine en train de ranger elle ne savait quoi. Et elle se glisse derrière lui ses mains se glissant sur son torse pour se coller contre son dos. « Salut. » Le ton est déjà séducteur.  « J’ai amené Pepsi, je voulais pas le laisser tout seul. Je me suis dit que j’allais pas rentrer tôt. » Voir qu’elle n’allait pas rentré avant le lendemain surtout. Un sourire narquois. Comme un naturel retrouvé. Elle se détache de lui. « J’espère que tu t’es amélioré en cuisine Keith Weddington, parce que j’attends toujours mon repas de reine. » Comme un écho de leur première nuit. Sans que cette fois cela ne soit source de tension.

Trois jours. Trois jours où je regardais mon portable quand je trouvais que cela faisait trop longtemps que je n’avais pas eu de signes de vie de Danika. Trois jours qui m’avaient paru une éternité sans la sentir à mes côtés. Trois jours où même si je tâchais d’occuper mes idées et mes journées, elle me revenait à l’esprit encore et encore. J’avais franchi le pas. Du moins j’avais réussi à ne pas la pousser de l’autre côté de la falaise. Ce versant où elle ne serait pas revenue. J’avais enfin pris mon courage à pleine main. Et j’avais tenté de baragouiner quelque chose que même moi je trouvais flou. Mais l’importance avait été ce baiser. Celui où pour la première fois nos chaînes avaient explosé. Et mon sommeil ne s’en portait que mieux. Tout comme mon sourire quand j’apercevais la photo de Danika s’afficher sur l’écran de mon portable. L’un de ces clichés que j’avais pris au détour d’une de nos dernières longues promenades en moto. J’avais voulu immortaliser ce moment, et mon téléphone en avait toujours la trace. J’étais en train d’attendre mon prochain cours quand elle m’avait demandé le programme de la soirée. Si mes calculs étaient bons, Dani ne bossait pas ce soir. Et j’avais tapé dans le mile. Et à partir du moment où je savais que j’allais enfin la voir, les heures me paraissaient plus courtes et pourtant je trépignais d’impatience, tel un enfant la veille de Noël.

J’étais rentré rapidement, ayant laissé ma moto sur le perron de la maison tandis que j’avais profité de mon arrivée pour sortir Ruby. Le temps était compté et je voulais m’atteler à la préparation du repas, à ma préparation à moi et à mes devoirs de maître exemplaire vis-à-vis de ma chienne. Le tout en très peu de temps à mon avis.  J’avais rapidement dressé la table, pris une douche en quatrième vitesse sans prendre le temps de me coiffer, et je m’étais mis au fourneau, petit tablier autour de la taille, habitude prise à l’aide des cours suivis avec Byron. Je n’avais même pas sursauté quand la porte s’était ouverte, a contrario de Ruby qui était venue faire la fête auprès de Danika. Je riais en l’entendant m’annoncer sa présence, ripostant avec humour. « Mince, tu tombes mal, j’avais rencard ce soir… » ironisais-je en sentant mon corps se détendre de sa présence contre moi. Je finissais de couper les légumes, me rinçant rapidement les mains avant de me tourner contre elle, la prenant dans mes bras, pour venir l’embrasser avec tendresse. « Tu vas où après ? » lui demandais-je en montrant sa robe, un sourire en coin. Le naturel était revenu, et le jeu que nous avions l’un envers l’autre reprenait le dessus comme s’il n’avait jamais disparu. « Parce que je ne te laisse pas sortir comme ça là… Tu restes ici, je te kidnappe… » riais-je en venant l’entraîner vers le canapé malgré le fait qu’elle ait tenté de se détacher de mon étreinte, cherchant à venir la chatouiller. « Rassure-toi, tu vas l’avoir ton repas… Mais… Est-ce que j’y gagnerais quelque chose en échange ? » lui demandais-je en venant m’asseoir contre elle, ma tête posée sur son épaule. « Tu veux boire quelque chose ? » lui demandais-je en la dévorant du regard. Car je n’avais plus besoin de me cacher. Je n’avais plus qu’à l’aimer.

Sa tête contre son dos. Ses mains sur son torse contre le tissu de sa chemise. Elle n’aurait même pas envie de bouger. Comme si cela faisait bien trop longtemps qu’elle était loin de lui. Elle se battait contre son instinct depuis qu’ils s’étaient retrouvés. L’instinct de le toucher, l’instinct de se blottir dans ses bras, l’instinct de se laisser l’aimer. Elle avait arrêté de se battre dès le moment où enfin il avait été honnête, avec elle, avec lui-même. Elle n’y avait pas cru mais la façon dont il l’avait embrassée, les mots qu’il avait prononcés, hésitant et sincère, avaient fini par la convaincre. Voilà qu’ils étaient là comme si cela ne faisait pas des mois qu’ils se déchiraient, comme s’ils ne s’étaient pas quittés pendant sept ans comme une trahison à tout ce qu’ils étaient.

Il lui annonce qu’il a un rencard ce soir et elle ne peut s’empêcher de rire moqueuse. « J’espère qu’elle te supportera. » Elle le laisse couper les légumes, se rincer les mains, se retient déjà d’attraper sa nuque et de poser ses lèvres sur les siennes. Mais heureusement il a à peine terminé qu’il la prend dans ses bras et elle se sent fondre quand il l’embrasse, comme si elle n’y croyait toujours pas. Il pointe du doigt sa robe, il a l’air de l’apprécier. Le sourire se fait mutin. « Oh je sais pas j’me disais que j’allais aller voir un beau brun, il est prof en plus. Tu le connais peut-être ? » Elle se laisse entraîner sur le canapé, riant quand il essaye de la chatouiller. Cela faisait longtemps qu’elle ne s’était pas sentie aussi légère. Il n’y avait pas de tristesse, pas de colère. Juste eux. Et des gestes qu’ils avaient toujours eu l’habitude de faire des années auparavant prenaient aujourd’hui tout leur sens, comme sa tête contre son épaule. Il lui demande ce qu’elle aura en échange et d’humeur joueuse elle vient se mettre à califourchon sur lui. Elle vient murmurer dans son oreille. « Je sais pas, peut être. Si t’es sage. » Elle en profite pour venir mordiller l’oreille délicatement, ses cheveux venant lui chatouiller le cou avant d’effleurer ses lèvres, son regard plein de défi. Elle vient passer sa main dans ses cheveux décoiffés encore un peu humide. « Tu t’es battu avec un porc épic ? » Puis elle repense à sa proposition et avec ce même air moqueur qui la caractérisait si bien elle dit « Je veux bien une bière. » Il n’avait plus qu’à la bouger pour aller la chercher. Elle regarde d’un œil distrait les chiens en train de faire connaissance. Les deux avaient l’air de bien s’entendre ce qui la rassura. Elle était plus préoccupée par l’homme qu’elle avait sous les mains en réalité. Elle devait se rappeler qu’elle était là pour dîner d’abord. Et pas pour finir dans son lit dès les cinq premières minutes de son arrivée chez lui. Un peu de contrôle tout de même.

Entendre son rire qui résonnait dans mon salon était une source de joie. Je préférais tellement la voir heureuse et souriante plutôt que morose et impassible. Elle avait ce petit quelque chose qui faisait qu’une aura se dégageait tout naturellement. Je comprenais pourquoi je n’étais pas resté de marbre tout ce temps. Et son corps contre le mien venait me rassurait dans mon choix. Heureusement que j’avais lâché prise. Enfin. Je roulais des yeux en l’entendant rire, se moquant ouvertement de ma remarque comme à son habitude. « Ca devrait aller, elle connait mes plus sombres facettes… » rajoutais-je dans un rictus. « Puis, on va dire qu’elle n’est pas simple à supporter non plus… Mais après tout, c’est peut-être ça qui fait son charme… Je te raconterais peut-être comment ça s’est passé… Si tu me promets de ne pas vouloir lui casser les jambes… » ironisais-je en lui tirant la langue, fier de ma blague. Je reculais mon visage du sien, presque à contre-cœur, pour l’observer attentivement, un sourire fier. Fier parce qu’aucun autre ne pourrait l’avoir. Fier parce que je la trouvais particulièrement belle ce soir. Je fis mine de manquer de m’étouffer, boudant faussement mais ne réussissant pas à rester trop longtemps sérieux. « Un prof ? Depuis quand les profs t’intéressent ? C’est pas les plus amusants tu sais… Mais je crois savoir de qui il s’agit… Tu comptes le faire craquer ? » lui demandais-je de façon ironique, un sourire béat aux bords des lèvres.

La simplicité retrouvait été rassurante. Adieu les combats incessants, les piques violentes et les coups bas. Nous avions arrêté de nous battre l’un contre l’autre. Et je pouvais enfin la prendre dans mes bras sans prendre le risque de me retrouver au sol, et lynché. Je la laissais s’installer, mes mains venant instinctivement se poser contre le creux de ses reins, ne lâchant pas son regard du mien. Son murmure m’arracha un soupir et je sentais ma peau frissonner, ses lèvres jouant avec les miennes pour ma plus grande frustration. « Je le suis toujours. Sage… Sauf si tu me pousses dans mes retranchements… » lui confirmais-je tandis que mes mains remontaient le long de son dos pour venir la plaquer un peu plus contre mon corps. Mes lèvres réclamaient encore les siennes, et l’une de mes mais vint attraper sa joue pour l’attirer à moi, venant clore cette remarque d’un baiser ardent. Je n’avais jamais les mots pour exprimer mes émotions, mais mes gestes parlaient bien plus. Je me reculais enfin de son visage, conscient qu’il allait falloir apprendre à gérer cette envie. « Il était résistant… Je l’ai eu à l’usure… Mais dis-le si ça ne te va pas, et attrape la tondeuse, t’auras qu’à me les couper… » ripostais-je en détournant le regard. Puis je venais secouer mes cheveux à proximité de son visage pour l’éclabousser en guise de dédommagement pour cette remarque. « Voilà ce qu’il te dit le porc-épic… » rajoutais-je comme un enfant vengeur. « Si tu veux une bière, soit tu te lèves, soit tu me laisses y aller… Mais dans cette position, je peux pas faire grand-chose tu sais… » lui fis-je remarquer dans un sourire sarcastique. « Tu veux quoi comme bière ? Parce qu’au cas où tu ne t’en rappelles pas, j’ai une cave à bière remplie… Si je dois choisir pour toi, je serais de retour d’ici trois heures… Et je ne suis pas sûr que tu tiennes réellement trois heures sans moi, Dani… » la défiais-je du regard avant de la faire basculer sur le côté du canapé pour pouvoir me lever tranquillement. « Tu peux attraper dans le frigo, j’ai fais des toasts s’il te plait ! » lui demandais-je en haussant le ton, étant parti dans l’arrière cuisine. Parce que malgré tout, j’avais eu à cœur de bien la recevoir.

C’était étrange comme en quelques phrases toute leur relation avait changé. Elle n’était plus douloureuse. Il lui était facile d’être là, de retrouver cette complicité qui les avaient toujours liés. Alors qu’à peine quelques jours auparavant ils étaient encore prêts à se déchirer, incapable de se comprendre.
Elle était là pourtant l’évidence. Lui et elle. Elle et lui. Dans ses bras, contre sa peau. Ses lèvres sur les siennes.  Cet humour toujours qui cette fois-ci la fait rire au lieu de la mettre en colère. Ses yeux pétillent. Son visage est un peu moins marqué par le deuil. Elle retrouve un peu d’elle-même. Elle lui donne un léger coup de coude dans les cotes quand il lui tire la langue fière de se moquer de son caractère tout aussi difficile à supporter que le sien. C’était peut-être pour ça qu’ils étaient voués à se provoquer encore et encore. « Oh tu sais ça c’est le côté intellectuel, tout de suite c’est sexy. Je compte définitivement le faire craquer. Je ne mets pas des robes pour n’importe qui. Tu crois que ça va marcher ? » Ses mains viennent descendre le long de son corps épousant ses formes. Elle a un regard séducteur tout en prenant un air interrogateur. Ils étaient sur un territoire inconnu finalement, eux qui n’avaient eu qu’une nuit pour se séduire des années auparavant.  Le jeu n’en était que plus facile quand ils avaient toujours été provocateurs vis-à-vis de l’autre.

Il en faut peu pour qu’elle soit à califourchon sur lui, joueuse.  Elle frissonne en sentant ses mains remonter le long de son dos et comprend vite qu’à ce jeu elle n’est pas sûr de gagner. Elle ne résiste pas quand il pose sa joue contre la sienne. Leurs lèvres se joignent et elle aimerait ne jamais s’arrêter. Danika n’aurait jamais pensé qu’il puisse l’embrasser ainsi, avec autant de tendresse et autant de passion.  Il secoue ses cheveux et elle pousse un petit cri tout sauf digne d’une troisième dan de karaté. « KEITH ! » le ton se veut courroucé, mais elle n’arrive pas à cacher le large sourire qui se dessine sur ses lèvres.  Elle passe de nouveau sa main dans ses cheveux avec une tendresse et un amour évident. « Non j’aime bien comme ça. » Un clin d’œil.  La conversation part sur les boissons. Elle avait presque oublié son amour des bières.  Elle aurait pu lui dire qu’elle avait bien tenu sept ans sans lui, mais elle n’était pas sûre qu’ils aient digéré  l’histoire pour le moment. Puis il n’avait pas tort, elle n’était pas sûre de tenir  trois heures sans lui. Il la renverse sur le canapé pour se lever. « J’avais oublié ta collection. En fait c’est toi qui devrait être barman. Tient on échange, tu vas bosser à ma place demain et je vais donner des cours à la fac ?»  elle crie alors qu’il s’éloigne dans l’arrière cuisine.  Danika se lève, remettant sa robe en place, caresse les deux chiens au passage et va sortir deux bières du frigo pendant que Keith s’occupe des toasts. Elle les ouvre et retourne s’asseoir sur le canapé en attendant qu’il revienne.

Je ne pouvais m’empêcher de rire, comme à l’époque où tout se passait pour le mieux. Aussi surprenant que cela puisse me paraître, c’est que parce que tout allait bien mieux depuis que je l’avais rattrapé. Je préférais l’avoir à mes côtés que de me battre face à elle. Puis nous avions bien vu où cela nous menait à chaque fois qu’on tentait d’affronter l’autre de front. Je faisais mouche à chaque phrase, agrandissant un peu plus son sourire pour mon plus grand plaisir. Je faisais mine d’encaisser le coup de coude sans broncher, me frottant l’endroit percuté tout en grommelant « C’est bon, je sais que tu es plus forte que moi pas la peine de me frapper », entre mes dents, comme un enfant frustré. Je riais à sa remarque levant les yeux au ciel. « Parce qu’il n’était pas sexy avant ce type ? Dans le genre mystérieux et magnétique… De ceux qui attirent et dont on ne peut pas se détacher. Intelligent de surcroit… Non mais je comprends tout à fait, si j’avais été attiré par les hommes, je l’aurais accosté ! » soupirais-je tandis que je détaillais sa robe, venant jouer avec le haut de son décolleté. « Je ne sais pas… Est-ce qu’il est du genre à s’intéresser à ce genre de détail… Est-ce que tu ne lui fais pas déjà assez d’effet sans ça… Mais je confirme, moi j’ai eu le droit à des kimonos pendant de longues années, c’est qu’il est chanceux ce prof… J’irais lui dire deux mots plus tard… » repris-je en me voulant sérieux. J’appréciais ce petit jeu qui s’instaurait de nouveau entre elle et moi.

Pourtant je savais pertinemment qu’à force de jouer, je ne serais peut-être pas celui qui gagnerait à coup sûr. Mais l’esprit de compétition était en deçà de mon désir pour la jeune femme. Et mes mains venaient prendre place sur ce que j’estimais être mien. Ses hanches, ses épaules, son bassin, je traçais le chemin de ses formes pour mon plus grand plaisir. Je savourais ce moment, jusqu’à ce qu’elle ne se mette à crier, m’arrachant un éclat de rire, me laissant tomber en arrière dans le canapé. « Tu m’épuises… C’est de l’eau tu sais ? T’as peur de quoi ? Que ton maquillage coule ? » riais-je à gorge déployée tandis que je venais tapoter le bout de son nez de mon index. « En tout cas, je suis fier de toi, tu sais comment je m’appelle va ! » la taquinais-je avant de venir lui voler un baiser et de la décaler sur le canapé. Je revenais dans la cuisine en soupirant, sortant les assiettes avant de venir déposer minutieusement les verrines que je venais de ramener. « Désolé, je jongle moins bien que toi avec un shaker… Puis je risquerais de faire tomber toutes les clientes de part mon charme… Je ne voudrais pas que tu te retrouves à vouloir leur refaire le portrait si tu vois ce que je veux dire… » ironisais-je tandis que je ne pus m’empêcher de lui voler un autre baiser. « Va t’asseoir, j’arrive… Et si tu veux, j’ai un tas de copie à corriger dans ma sacoche ! Tu verras c’est passionnant ! C’est sur la victimologie. J’adorais ça quand j’enquêtais avec… » Je m’arrêtais net, bien décidé à ne pas prononcer le mot fatidique, conscient que la soirée se passait parfaitement bien jusqu’à lors. Je revenais vers elle, posant la rangée de verrines fraichement préparées, fier de moi. « Tu as une verrine au saumon, un tartare de légumes aux crevettes, et un gaspacho fait maison » lui dis-je en venant embrasser sa tempe pour la remercier de la bière. « Tout ça préparé spécialement pour toi… alors dis à ton professeur que tu seras en retard, je te garde pour moi ce soir… »

« Non mais si tu veux je te file son numéro, t’as l’air plus intéressé que moi » Elle est provocatrice, a retrouvé la facilité du jeu qui avait toujours été instauré entre eux.  Elle s’approche de lui, sa main venant effleurer son torse d’un air innocent. « Parce que tu me trouvais pas sexy en kimono ? Moi j’ai le souvenir d’un mec sur le tatami, qui clairement en avait perdu ses moyens face à tant de beauté. » Elle lui tire la langue puis vient de nouveau effleurer ses lèvres, montant sur la pointe des pieds. Elle vient rappeler l’entraînement qui avait provoqué leur première nuit. Ramenant l’image d’elle au dessus de lui, ses cheveux effleurant son visage.  Ce moment de tension dans une journée d’été qui avait tout changé.

Les provocations fusent facilement, ils reprennent leur jeu comme s’ils ne l’avaient quitté. Et lorsqu’il revient avec les verrines, elle lève les yeux au ciel et lui tire la langue.   " C’est ça parce que je suis la seule à avoir un problème de jalousie maladive. » Elle ne s’était jamais considérée comme quelqu’un de jalouse, parce qu’en réalité elle ne l’avait jamais été avec d’autres hommes que Keith, trop peu attachée, trop peu impliquée dans toutes les relations qu’elle avait eu pour l’être. Elle est heureuse de voir son regard s’illuminer quand il parle de ses copies sur la victimologie.  Il s’arrête avant de prononcer le nom fatidique et elle essaye de ne pas se bloquer. Tout allait bien. Et dès que le nom d’Andréa était prononcé ils avaient le malheur de se déchirer.  Alors elle choisit de ne pas relever. Il est trop tôt pour en parler. Elle choisit de lui sourire. « Il faudra que tu me montres ça. » Sa voix est douce. Un pas en avant. Ils allaient devoir à apprendre à marcher à ce nouveau rythme.  Elle goûte une verrine et elle ne peut s’empêcher de le regarder d’un air ébahi. « Mais bordel ils étaient où tes talents de cuisinier il y a sept ans quand on commandait de la pizza matin midi et soir ? »  Elle exagère évidement, mais l’idée est là.  Quelque chose de nouveau, qu’elle ne savait pas sur lui. Danika ne pouvait s’empêcher de se demander combien de choses avaient changé en sept ans. Elle s’installe confortablement sur le fauteuil, adossée sur le dossier du canapé, tournée vers lui, sa main allant caresser sa nuque et le début de ses cheveux comme si elle était incapable d’arrêter de le toucher. Une vraie gamine. Mais cela n’avait pas l’air de le déranger. Elle boit une gorgée de bière et termine sa verrine au saumon.  Elle ne cache plus ses regards, elle le dévore des yeux, son regard parcourant son visage, ses épaules, son torse. Un petit sourire en coin apparait, séducteur. Elle se souvient avec précision de ce qu’ils avaient fait sur ce canapé. « Désolée j’ai eu un flashback. » Le dîner d’abord. C’était pour ça qu’elle était là. Elle goût le gaspacho. « C’est délicieux. »  Elle boit sa bière, caresse d’un air distrait Pepsi qui est venu lui demander de l’attention près du canapé. « Tu me caches d’autres talents comme ça que t’as découvert ces dernières années ? » Elle hausse les sourcils, soutenant son regard, se retenant de ne pas se rapprocher de nouveau de lui,  comme l’absence de contact était devenue difficile. Comme s’il fallait rattraper sept années d’absence.

« Volontiers, je pense que l’on pourrait bien s’entendre lui et moi, on a l’air de pas trop mal se ressembler non ? » ironisais-je pour répondre à sa provocation. C’était indéniable, mais elle m’avait toujours étonné par ce côté provocateur que j’avais réellement découvert cette nuit d’été. Même le contact de sa main contre mon torse au travers le tissu de ma chemise me donnait des frissons. C’était électrique entre nous, et je ne saurais dire combien de temps encore je pourrais tenir à ce petit jeu. Je roulais des yeux, faisant mine de détourner le visage de ses lèvres, faussement blessé avant de lui répondre, tel un enfant de huit ans. « Tu n’étais pas en kimono…Tu avais fait exprès d’enlever ton haut ce jour-là… Enfin dois-je te rappeler, que la vue de mon torse a failli de faire perdre pied ? » lui demandais-je un léger rictus aux lèvres, lui volant un baiser au passage de ses lèvres contre les miennes. Je déglutissais en me souvenant de cette journée où tout avait chaviré. Et qui nous avait amené à ces années d’absence, de combat pour qu’au final nous en reparlions comme si de rien n’était aujourd’hui, maintenant que l’évidence venait d’être révélée.

Je riais une fois de plus – comme toujours à vrai dire – en apercevant Danika tirer la langue. Et je la fusillais du regard lorsqu’elle me retournait la remarque de façon totalement justifiée. « En même temps, si je ne surveille pas, d’autres auraient tendance à oublier que les yeux peuvent être crevés à trop te regarder… » lui fis-je comprendre avant de m’installer à ses côtés. « Est-ce qu’on en parle du petit manège charmant que tu avais fait au pauvre Peter au sanctuaire ? C’était… Il te déshabillait du regard ! » lui fis-je remarquer comme pour justifier le fait que je restais sur mes gardes et que je ne niais absolument pas les propos qui m’étaient accordés. Même si je n’avais plus l’impression de marcher sur un fil à chaque fois que je la voyais, l’équilibre me semblait fragile et évoquer Andréa ne restait pas la meilleure des idées. Même si un jour où l’autre il faudra y passer. Mais pas ce soir. Pas quand son sourire illuminait ma soirée. J’acquiesçais à sa demande avant de prendre à mon tour une verrine pour l’accompagner. Je faisais probablement parti de ces gens qui n’appréciaient rarement les plats qu’ils avaient eux même préparé. Pourtant je riais face à la tête que m’offrait Dani. « Bien cachés… A cette époque, je travaillais sur d’autres talents… » riais-je avant de me laisser aller à la délicatesse de ses doigts lui offrant un léger sourire. « Ca t’a plu ? » lui demandais-je tandis que je l’apercevais partir dans ses pensées. « Les verrines, pas le flashback… » repris-je en lui offrant un clin d’œil, posant l’une de mes verrines terminées, avant de poser mon regard sur Pepsi à mon tour. « Si ça te plait, c’est l’essentiel… Je l’ai fait avec amour, faudra que je te le présente lui aussi… » ironisais-je avant de venir poser mes lèvres sur le haut de son épaule, puis relevant mon visage vers son oreille, je murmurais sensuellement. « Découvert, non. Mais que tu aurais pu oublier, peut-être… » dis-je à demi-mot avant de me retirer du canapé à contre cœur. « Je t’ai dis que j’avais été arrêté dans la rue pour faire une séance photo… Le principe est bizarre, mais ça rendait plutôt bien au final… » lui dis-je en allant chercher la suite de l’apéritif, puis revenant à ses côtés, je ne pus m’empêcher de la dévorer du regard. « J’ai de quoi faire un sex on the beach… Tu t’y colles ? » lui demandais-je dans un clin d’œil. « Chacun son tour… Ca me laisse le temps de t’admirer… » dis-je en venant tapoter sa cuisse, tout en me mordant la lèvre. C’était tellement plus agréable de ne pas avoir à se cacher.

Il était facile de lui parler, facile de rire et de le provoquer. Elle réalisait seulement maintenant à quel point cette facilité lui avait manqué. Elle rit à la mention de Peter. « En même temps c’était facile, le pauvre il en a perdu tous ses moyens. » Le sourire carnassier, le regard presque fier. Mais pourtant quiconque connaissait Danika savait qu’elle avait beau jouer, séductrice, aimant charmer, ce n’était rien comparé à sa relation avec Keith. Cela se voyait dans la façon qu’elle avait de le regarder, dans le fait que malgré son plus grand jugement elle avait été incapable de l’oublier, accrochée à leur relation comme à un dernier espoir. Parce que les sentiments qui la prenaient quand elle le regardait, elle ne les avait jamais ressentis pour personne d’autre.

Danika goûte les verrines et ne peut s’empêcher d’être surprise face aux talents de cuisinier. Elle se souvenait de Keith commandant des pizzas, abandonné aux livraisons plus qu’aux petits fours faits maison. « Ca m’a plu. » Elle a un sourire mutin, sa main venant jouer avec les cheveux sur le haut de sa nuque. Elle ne dit pas lequel. Les verrines ou le flashback. Elle pense les deux. Il pose ses lèvres sur son épaule et cela lui arrache un frisson. Son regard s’attarde sur ses lèvres, sur son visage, elle ne fait pourtant aucun mouvement pour l’embrasser se contentant de murmurer. « Tu sais j’ai pas une bonne mémoire, je pense que tu vas devoir me le rappeler. » Bien sûr elle se souvenait du moindre détail de cette nuit-là, elle avait été gravée au fer rouge dans son esprit. Il se lève et elle se force à ne pas le rattraper, à ne pas l’attirer contre elle, comme si elle était en manque de lui, comme si les années avaient été trop longues et qu’il y avait trop de choses à rattraper. « Ah oui ? C'était un projet d'art ? C'était quoi » Réplique-t-elle curieuse en l’entendant mentionner une séance photo. Ses talents de barman sont demandés et elle ne peut s’empêcher de sourire. « T’as de la chance que t’as des beaux yeux hein, me faire travailler un jour de congés non mais oh. » Elle plaisante bien sûr et en se levant ne peut s’empêcher d’aller effleurer ses lèvres. Danika trouve facilement le shaker, les ingrédients qu’il a sortis. Elle ne peut s’empêcher de laisser son regard dériver sur la pièce ou quelques mois auparavant ils s’étaient retrouvés et déchirés. Elle se revoit jeter les photos à la poubelle. Son regard instinctivement les cherche, comme avec l’espoir qu’il les ait récupérés. Mais elle voit la pile dans un coin du plan de travail, avec d’autres documents et le soulagement la prend. Elle se dirige vers la pile, les effleurant de sa main, soufflant doucement. « Je suis contente que tu les ais récupéré. » Elle ne s’excuse pas, mais elle espère qu’il le lit dans son regard. Elle retourne à ses cocktails, versant le mélange, le secouant avec son shaker. Deux beaux verres sont servis. Elle lui tend en souriant. Comme un toast à un nouveau début. Leur début.

Pourquoi en me remémorant cette journée au sanctuaire, je ne réussissais pas à desserrer cette mâchoire ? Cette journée avait été rythmée par des hauts et des bas, comme au beau milieu de ce sanctuaire quand elle avait décrété qu’il était temps d’instaurer des règles. Règles qui avaient été rompues face à ce bar, son corps appelant le mien. J’aurais voulu sourire en l’entendant évoquer le peu de retenue dont avait disposé ce pauvre serveur. Et pourtant, je ne réussissais pas. Parce qu’elle semblait si fière d’elle de faire cet effet là à n’importe quel homme qui n’était pas aveugle. Je m’adossais face au comptoir, croisant les bras contre mon torse, tentant de faire disparaitre à mon tour ce sourire présent naturellement. « Moi ce que je ne comprends pas, c’est que ce jour là tu avais en face de toi l’homme le plus drôle, celui qui te connait par cœur, au corps le mieux taillé et pour lequel tu connaissais ses talents indéniables dans certaines circonstances. Son endurance, sa délicatesse et la fougue de ses mains n’étaient plus à prouver. Et ce n’est pas fini. Parce qu’en plus d’exceller dans cet art, il reste celui qui te supporte, qui te comprend sans que tu n’aies besoin de parler. Ses silences valent de l’or, et aucun de ses mots n’auront été donné sans réflexion. Parce que son empathie n’a pas de limite et tout l’amour qu’il dégage mérite de trouver preneuse. Tu ne peux pas lui enlever son sourire et son charisme quand tu le vois dans la rue. La preuve les gens l’arrêtent pour le prendre en photo. Et malgré tout, il reste humble, loyal et empathique. Il est celui qui viendra te chercher au beau milieu de la nuit quand tu appelleras en détresse à la sortie d’un bar. Celui qui t’écoutera te confier sans se plaindre, conscient d’être cette épaule solide qui sert parfois de plateforme. Il reste bienveillant et en plus il adore les enfants et ces derniers le lui rendent bien. Il a ce côté mystérieux mais il pourrait très bien être le gendre idéal. Car quand il se donne, il se donne tout entier, oubliant parfois que son bonheur vaut autant que ceux des gens qu’il aime. Mais il est comme ça, il a le cœur sur la main, la tête sur les épaules et ces pour toutes ces raisons qu’il est l’homme idéal. Rien ne paraîtra ennuyeux face à cet humour débordant, parfois noir mais toujours subtil. Et même s’il adore se faire passer pour un peu plus idiot qu’il ne l’est réellement, c’est parce qu’il préfère voir un sourire s’étirer sur le visage de ses interlocuteurs plutôt que de se mettre en avant. Quoi qu’il arrive, tu pourrais tout lui dire, et il ne te jugerait pas… Sauf si tu choisis Peter… » finis-je en reprenant enfin mon souffle, conscient d’avoir monopolisé la parole sans raison préalable.

Je n’avais pas lâché son regard du mien. La preuve de la quintessence de ce bonheur retrouvé. L’ apex de ce combat qui nous emmenait à cette soirée de retrouvailles. Nonobstant, je ne pouvais m’empêcher de revoir ces scènes s’entremêlaient entre la soirée passée ici, celle de notre dérapage chez elle. Tous mes souvenirs s’emmêlaient et seulement la voix de Dani me sortit de la chrysalide de mes pensées. Le début du repas lui plaisait, et je lui souriais en guise de remerciement, n’osant pas lui dire ce qui me plaisait à sa place. Mes gestes parlaient plus que mes mots, et je sentais ses frissons m’encourager à poursuivre sur cette douce pente de désir. « Sacrebleu… Ce serait dommage de devoir recommencer, j’adore enseigner, on risquerait de ne pas cesser de s’exercer… » murmurais-je au creux de son oreille avant de me lever. C’était fou comme la distance était compliquée à gérer tant l’intégralité de son corps m’appelait. Je riais à sa question, hésitant à lui répondre sérieusement. « T’es pas loin, j’ai évité le pire des projets ! Parce qu’imiter Pouchkine en louvetier d’une bande de quokka, au beau milieu d’un remake de la scène d’Armageddon au volant de son tractopelle… Il valait mieux pour les yeux de tous que je sois simplement photographié… » avouais-je dans un clin d’œil. J’adorais la taquiner, me moquer et jouer, et plus le temps passait, plus je me demandais comment j’avais pu m’en empêcher tout ce temps. Tout comme ce baiser que je venais lui voler alors qu’elle tentait de jouer avec mes nerfs. « C’est parce que les meilleurs Sex on the beach de Brisbane sont fait par l’une des serveuses les plus charmantes de la ville… Tu la connais ? Je crois hein ! T’approche pas trop d’elle, elle risquerait de te coller au tapis si tu lui dis que t’es amoureuse de mes yeux ! » riais-je avant de m’étendre sur le canapé, l’observant jouer avec les photos que je n’avais pas eu à cœur de jeter. « Je ne pouvais pas jeter le dernier cadeau de ton père… Puis on était beau dessus… Tu n’as jamais su en reprendre d’aussi belle » dis-je pour détendre l’atmosphère en lui tirant la langue.

Je me redressais en voyant les verres s’approcher, me frottant les mains tandis que je lui souriais en guise de remerciement. « Je vous dois combien ? En revanche, je n’ai pas de monnaie, j'ai peut-être un peu d'étain mais je ne suis pas sûr que cela coûte grand chose, je fais parti de ceux qui ne paient que par carte bleue ! Je peux payer autrement par contre… » dis-je en venant jouer du bouton de ma chemise, un verre à la main tout en la dévorant du regard. Car après tout, ni l’un ni l’autre ne semblait être résistant à l’autre. L’occasion de ne pas perdre, et dans tous les cas, je ne serais probablement pas perdant.

WARNING : CA PIQUE LES YEUX

« Humble, loyal et empathique » Elle aura haussé un sourcil, la voix plus distante.  Le premier aura été en opposition complète avec le discours qu’il sera venu de prononcer.  Loyal, quand elle aura eu encore le souvenir de son absence pendant sept ans, de ses abandons répétitifs jusqu’à ce qu’enfin il aura arrêté de fuir. Et empathique quand il aura joué encore et encore avec ses sentiments. Elle se sera forcée à rire pourtant, mais il n’y aura eu rien de drôle, quand au fond d’elle, il y aura toujours eu la peur qu’il aura changé d’avis, qu’il l’aura abandonnée encore, que cela ne sera qu’un jeu de plus. Une simple pause dans la fuite qui se sera écourtée bien vite. Elle se sera forcée à ne pas relever le reste pourtant, à ne rien dire, à choisir de laisser un sourire sur son visage. Sourire un peu moins pétillant, un peu plus terne. Parce qu’au fond d’elle, elle  aura su pertinemment qu’elle aura été encore sur ses gardes et que son discours n’aura fait que lui rappeler.  Qu’en réalité elle ne l’aura plus considéré comme quelqu’un de loyal depuis sept ans maintenant et que l’image  aura été dur à changer elle l’aura su. « Peut être que j’aurai dû choisir Peter en fait ? » Elle aura provoqué, avec un sourire carnassier, aura posé un doigt sur son torse, joueuse, mécanisme de défense ou elle aura prétendu que le moment de froid ne sera pas arrivé, Il sera oublié, comme si elle aura décidé de passer à autre chose.

Pourtant, sur ce canapé, les doutes auraient disparu vite parce qu’ils se seront provoqué et ils auraient rient  et qu’elle aura été heureuse. Parce qu’enfin elle se sera revue avec Keith sur ce même canapé dans ce jeu qui aujourd’hui aura pris un tour bien plus séducteur. Les cocktails seront évoqués et elle aura souri « Une des serveuses les plus charmantes de la ville ? J’aurai dû la connaître, elle aura eu l’air merveilleuse. Tu auras eu drôlement de la chance qu’elle te fasse des cocktails personnalisés dit donc. » Son sourire aura été moqueur alors qu’elle aura aligné les ingrédients autour d’elle avant de remarquer les photos qu’elle aura pourtant jeté dans sa poubelle.  Keith aura eu  raison, ils avaient été jeunes et beaux sur ces photos. Innocents presque. Elle n’aura pas été  sûre que les deux personnes sur le canapé auraient été tout à fait les mêmes. Pourtant il y aura toujours eu ce même lien qui les aura uni

« C’est vrai. » Parce qu’il n’aura pas été dans sa vie. Parce qu’elle l’aura laissé fuir. Parce qu’elle aura fui de la même manière.  Il aura été temps de laisser le passé derrière eux. Elle se sera approchée avec les verres et lui aura tendu.  Elle n’aura pu s’empêcher de lui sourire alors. « Il  aura fallu qu’on en prenne de nouvelles. » Un clin d’œil. Un nouveau départ. Elle sera venue  s’assoir à côté de lui, aura posé un instant son verre sur la table. Danika aura approché son visage du sien, sa main sera venue effleurer son torse. « Oh j’aurai pas su si tu auras eu les moyens, mes cocktails auraient été hors de prix. » Ses lèvres se seront égarées sur les siennes, provocatrices et tendres.

au cas où la version normale:

A croire que le sens de l’humour de Danika avait disparu durant ma longue tirade. J’avais aperçu son sourcil se hausser et sa voix se faisant plus lointaine en répétant chacun de mes mots. Je soupirais, me rendant compte qu’en réalité, l’aisance et la facilité que nous avions jusqu’à lors était d’une fragilité sans nom. Elle riait quand son regard sous entendait le contraire. C’était d’une contradiction incroyable que je savais discerner. J’allais devoir me rattraper, faire mes preuves et accepter les moments de doutes que pouvait rencontrer Danika. C’était ça, la difficulté de cette nouvelle relation. C’était là, où j’allais devoir prendre sur moi. Et avant même que je ne puisse m’excuser de cet aparté mal placé, elle venait d’enchainer, me ramenant à cette jalousie sans failles que je pouvais ressentir. Je grognais légèrement, roulant des yeux, et j’observais son doigt posé sur mon torse, me mordant la lèvre inférieure. « Je ne suis pas sûr que tu y aurais gagné au change… Crois moi… Ce n’est pas un homme qui te dit oui à tout qu’il te faut. » répondis-je de façon aussi provocante pour lui faire comprendre que le jeu ne prenait pas sur moi, qu’elle aurait – comme à son habitude – de la répartie face à elle.

Un cocktail évoqué, un regard charmeur et j’étais en train de l’observer travailler, presque admiratif. Pourtant je savais pertinemment qu’elle perdait son temps dans ce bar. Mais après tout qui étais-je pour le lui rappeler tous les jours. Je ne voulais pas me prendre de nouveau la tête, et je laissais le sujet de côté. Je voulais savourer ces retrouvailles et ce jeu qui s’était instauré avec facilité en écho à notre dernière soirée passée ici même. « Tu es sûre de la connaître ? Parce que si c’était le cas, tu ne dirais pas d’elle qu’elle est merveilleuse. Tu dirais que c’est la meilleure… » repris-je en attrapant mon verre entre mes doigts, détaillant l’extérieur du verre. « C’est pas une chance, c’est qu’elle m’apprécie je pense… Mais ne t’inquiètes pas, je sais toujours la remercier comme il se doit… » ironisais-je, ma langue venant glisser contre mes lèvres avant de les pincer légèrement. « Pour les photos, il va falloir que tu demandes à ma copine… Je ne suis pas sûre qu’elle veuille partager cette beauté fatale que je suis… » ironisais-je tandis que ma main venait se glisser derrière le dos de Danika, soupirant en l’entendant évoquer le coût de ses cocktails. Surpris par le baiser que je voulais lui rendre avec fougue, mon verre s’échappa légèrement sur la tenue de Danika, m’obligeant à me reculer, pour observer les dégâts et reposer le verre. « Oops… » soupirais-je face à la tâche que je venais de créer. « Dommage, j’aimais beaucoup cette robe… Je te paierais le pressing… Mais en attendant, tu ne vas pas la garder là… » lui demandais-je en pointant du doigt la trace laissée. « Je dois avoir un vieux tee-shirt à te prêter… » lui dis-je en me levant, désolé, me dirigeant vers la chambre. Je soupirais face à l’état de mon armoire, et commençait à entreprendre de fouiller. « Tu peux venir essayer ? » lui demandais-je en haussant la voix. « Histoire de voir ce qui peut t’aller… » expliquais-je en sortant une pile de tee-shirt, le cœur battant la chamade. Parce que sans m’en rendre compte et sans le vouloir, nous nous retrouvions de nouveau tous les deux dans cette pièce qui fût le théâtre de notre première nuit commune. Et les souvenirs ne pouvaient que remonter à la surface. Surtout quand elle entra dans mon champ de vision.

Le mot copine raisonne doucement dans ses oreilles, étirant son sourire, faisant rosir ses joues. Elle est heureuse, réalisant en cet instant précis qu’elle attendait ce moment depuis plus de sept ans. Qu’en réalité une part d’elle ne l’attendait plus depuis longtemps. Pourtant, sa main dans son dos, ses lèvres contre les siennes, la chaleur de son corps contre le sien, tout sonnait comme une évidence, comme une suite logique.

« Non clairement elle a pas l’air du genre à partager. » dit elle ses doigts venant agripper le col de sa chemise, joueuse. Leur baiser est fougueux, peut être un peu trop, si bien que le verre de Keith chavire légèrement, une partie de la boisson atterrissant sur sa robe. « Ah bah bravo. » Le ton est léger, l’air faussement offusqué quand en réalité son regard est amusé. Elle n’avait jamais été du genre à faire très attention à son apparence et elle avait passé le plus clair de son temps avec lui en tenue du sport, si bien qu’elle n’était pas à une robe tachée près. C’était au moins l’avantage de le connaître depuis si longtemps, elle était à l’aise auprès de lui. Il n’y avait pas d’apparences, pas de personnes faussement parfaites qu’ils essayaient de montrer comme beaucoup le faisaient les premiers mois de relations.  Cela n’aurait jamais eu de sens quand ils se connaissaient. Elle lève les yeux au ciel en l’entendant parler de pressing et qu’elle ne peut pas rester comme ça. « Non mais Keith tu sais la machine à laver ça suffira hein. » Mais il ne semble pas l’écouter et il est déjà parti en direction de sa chambre pour lui trouver un t-shirt. Vu sa taille, un t-shirt ferait en effet l’office d’une robe très courte, mais il se donnait beaucoup de mal pour pas grand-chose. Bien qu’elle doit reconnaître que le tissu trempé et collant sur sa peau n’était pas des plus agréables. Elle décide donc de poser son verre et de le rejoindre et se rend compte en passant la porte que l’atmosphère n’est plus du tout la même.

Son regard se pose sur lui qui tient une pile de t-shirt dans ses bras. Son regard s’attarde un peu trop longtemps, avant de se poser sur le lit où ils avaient partagé cette nuit d’été il y a des années de ça. Elle déglutit. L’image de leurs corps nus l’un contre l’autre est encore gravée dans sa mémoire. Ses joues deviennent un peu plus roses. Elle prend pourtant un ton moqueur, comme pour cacher le cœur qui tambourine dans sa poitrine. « En fait tu m’as renversé ton verre dessus pour avoir un strip tease personnel ? Fallait le dire que t’avais pas envie de cuisiner en fait. »  Elle lui adresse un clin d’œil, mais l’humour n’est pas capable de trancher la tension présente entre eux, électrique. Mais Danika est joueuse et à le voir la regarder ainsi elle n’a plus envie d’insister pour lui dire qu’elle pouvait très bien porter la robe tachée. Non elle fait le choix de s’approcher un peu, tout en restant à distance pour qu’il puisse la regarder. Elle passe la robe au-dessus de sa tête, dévoilant de la lingerie noire simple mais élégante. Sa peau frisonne face à l’absence de tissus mais elle n’a pas froid. Elle ne s’approche toujours pas de lui. Se contente de tendre la main vers la pile de t-shirt, un sourire provocateur aux lèvres. « Alors ce t-shirt, tu crois que je choisis lequel ? » Le cœur tambourine, les sentiments qu’elle ressent pour lui prennent toute la place, le reste est loin.

« En même temps, je ne la partagerais pas non plus, je peux la comprendre… Mais c’est dommage pour toi alors, si tu n’as pas son accord… Tu ne peux pas jouer avec ça… » dis-je en venant retirer ses mains de ma chemise, gardant ses poignets entre mes doigts tandis que je lui rendais le baiser, en oubliant presque que je tenais un verre plein. Je lâchais un soupir désolé, reposant le verre avant de lui adresser un regard empli d’excuses. « Je suis désolé… Je suis maladroit… » lui dis-je simplement. « Mais du coup, je n’ai presque plus rien à boire… » lui fis-je remarquer en attrapant son verre pour venir en boire une longue gorgée dans un clin d’œil avant de quitter le salon, en direction de ma chambre. « Oui, ça suffira aussi que quelqu’un le fasse pour moi ! » lui fis-je remarquer dans un rire en commençant à fouiller. J’amenais mes costumes et mes chemises au pressing parce que j’avais une flemme énorme de devoir les repasser pour aller donner des cours, je pouvais bien emmener une robe. J’aurais probablement le droit à une quelconque remarque de l’employée de ce pressing qui posait parfois bien trop de questions. « Je ne sais pas la faire tourner… » mentis-je en ironisant tout en me retournant dans sa direction, un léger sourire aux lèvres. « Mais bien sûr, tout était prémédité… » dis-je en roulant des yeux. « Je ne pensais pas avoir besoin de te renverser un verre pour que tu m’offres ce joli spectacle… » dis-je en susurrant, sifflant légèrement tandis qu’elle se déshabille. Je me mordais la lèvre inférieure, ne détournant pas mon regard du sien et un large sourire se dessina sur mes lèvres. Etait-elle en train de vouloir me tester ou avait-elle envie de jouer ? Je ne savais pas, mais je répondrais à cette provocation.

Je m’approchais d’elle, le regard posé dans le sien, elle qui se contentait de tendre les mains, je venais y déposer les t-shirts sans même regarder, préférant me blottir à elle, profitant de mes mains libres pour venir entourer sa taille. Mes lèvres vinrent glisser le long de son cou, puis remontèrent vers son lobe, profitant de l’instant pour lui murmurer, mon corps au plus proche du sien. « Je te laisse faire ce choix, j’ai des choses sur le feu à surveiller… » dis-je avant de disparaître sans me retourner de la chambre, fier de moi de ne pas avoir cédé. Je m’approchais du four, l’ouvrant avant de venir retirer ce qu’il contenait, le déposant sur le plan de travail. Je sortais deux assiettes, sifflotant en installant le plat tandis que je relevais le regard vers le couloir, un léger sourire aux lèvres. « J’ai peut-être un kimono qui traine si tu préfères… Ca nous rappellera quand tu venais ici te réfugier avant tes compétitions… Je ne sais pas ce que tu venais chercher ici, mais c’était assez sympathique… » avouais-je dans un demi sourire. « Tu peux venir ici, le repas est servi… » lui dis-je en la dévorant du regard, jetant le torchon sur mon épaule au passage, observant Pepsi et Ruby qui étaient en train de jouer dans le jardin. « On peut se mettre dehors si tu préfères… Mais j’ai peur que tu aies froid… » lui dis-je en venant l’entourer de mes bras, déposant un long baiser. «Sinon… J’ai peut-être un plaid et une veste… Pour la petite femme fragile que tu es… Je ne voudrais pas que tu tombes malade… » Je finissais ma phrase en venant tapoter le bout de son nez. « Je t’ai pas dit… Mais je compte aller me faire tatouer… » avouais-je en me reculant. « Un jour je te rattraperais toi et tes cinquante huit tatouages… » exagérais-je en m’installant sur la chaise de bar. « J’espère que dans tout ton lot, il y en a un qui parle de moi ! Sinon il va falloir rectifier cela... J'accepte de me faire faire le portrait sur ta fesse droite...» dis-je sur le ton de l’humour, lui offrant un clin d’œil au passage. Voilà la recette de la simplicité.

Leur amitié avait toujours été liée à beaucoup de provocations autant de l’un que de l’autre. Il était donc logique qu’aujourd’hui le jeu soit poussé plus loin, que la séduction se mêle à la provocation, qu’elle se retrouve dans cette chambre à enlever cette robe devant lui sans aucune pudeur, son regard noisette plein de défis qu’elle ne cachait plus depuis longtemps. Keith comme toujours semble se prêter au jeu et il se demande s’il va craquer. Il dépose la pile de t-shirt dans ses mains, rapprochant son corps du sien. Ses mains sur sa taille la font frissonner tout autant que les baisers qu’il dépose dans son cou et elle a presque envie de craquer à son tour en entourant sa nuque de ses mains. Mais elle le laisse faire et lorsqu’il quitte la chambre elle est bien décidée à ne pas craquer et à ne pas le rattraper en lui précisant que le diner pouvait attendre. Il avait résisté, c’était à son tour de le faire. Alors elle enfile le t-shirt le plus large qu’elle peut trouver et qui au vu de sa petite taille se transforme en robe courte décidemment bien moins élégante que la jolie robe qu’elle portait. Mais tant pis, elle n’avait jamais été du genre à se préoccuper de son apparence et elle était tout autant capable de la séduire accoutrée de cette manière. Elle range les autres t-shirts et le retrouver dans la cuisine en train d’installer le plat et de mettre la table. « Oh je sais pas ce que je venais chercher, après tout tu étais tellement insupportable. C’était sûrement pour me donner des envies de meurtre histoire d’être à fond dans mes combats. » Elle lui tire la langue, sautillant vers lui et venant effleurer son dos avant de jeter un œil sur le plat. « Ca a l’air bon en tous cas. » Elle lui jette un regard courroucé lorsqu’il évoque la possibilité qu’elle ait trop froid pour manger dehors. « FRAGILE ? » Elle lui pince le téton avec un sourire vengeur, jouant l’indifférente au long baiser dans lequel elle s’était sentie fondre. «  C’est toi qui est un papy je te rappelle, tes vieux os ne vont pas subir le choc de l’hivers australien ! Allez on va manger dehors du coup ! » Elle sort un gilet de son sac qu’elle enfile tout de même « Pas de remarques Weddington sinon je t’en mets une ! » Elle rit, tellement heureuse de se retrouver, de le retrouver lui, de laisser enfin le deuil et la peine de côté. Elle attrape les assiettes peu importe qu’il soit déjà assis il n’avait qu’à pas la provoquer. « Toujours dans l’exagération » Danika lève les yeux au ciel « Et une femme sait garder ses secrets, peut être bien qu’il y en a un qui parle de toi, peut-être pas. » Elle prend un air innocent, en s’installant dehors. « Tu l’as pas vu la dernière fois sur ma fesse droite, si ça se trouve il est déjà là,  un grand LOVE KEKE non t’as rien remarqué ? » Elle retourne chercher les derniers choses qu’il manque pour que la table soit complète notamment le vin, en profitant pour venir déposer un baiser dans son cou et enfin elle s’assoit. « Tu vas te faire tatouer quoi ? » demande-t-elle curieuse avant de regarder le plat d’un air gourmand. « Tu nous a cuisiné quoi Monsieur le chef ? »