« Je t’avais dit que cette journée avait un truc bizarre dans l’air. » Birdie passe une main dans son cou, le visage qui grimace parce que c’est douloureux et qu’elle sent encore l’impression des doigts sur sa peau de l’autre trou du cul. L’air a retrouvé le chemin de ses poumons, elle respire de nouveau normalement même si elle ne se rappelle pas comment. Il y a eu un emmêlement de cris, de ronchonnements, de grognements, de coups. Qui a fini par taper qui, et comment, et pourquoi et surtout, la manière dont ils s’en sont sortis, elle l’ignore, Birdie. Elle ne se pose pas trop de questions non plus, Birdie. Elle est juste contente de ne pas avoir fini avec la peau percée et surtout, ils ont accompli leur mission : sauver Zoey, qui marchait avec eux en lui rentrant dans l’épaule – ou alors est–ce que c’est Cadburry ?

« J’aurai aimé que ce soit un truc positif. T’es sûr que c’est ça ? T’as toujours cette impression ou y a encore un truc bizarre à venir ? Je préfère que tu me préviennes, Jordy. Dis–moi tout de suite si je vais finir la journée morte et enterrée. » demande–t–elle en lui prenant le bras, l’air suppliant. Birdie en rajoute sûrement un peu trop mais tant pis. « Hey. » Elle le stop avant de le forcer à tourner la tête vers elle. Son nez se fronce, la contrariété la prenant en voyant le sang. « Tu saignes. Attends. » Birdie fouille dans ses poches et trouve un mouchoir qui a sûrement connu des jours meilleurs mais qui fera l’affaire en attendant. « Manquerait plus que tu crèves parce que tu saignes trop du pif. Pas après avoir si vaillamment combattu. » La Cadburn a un léger sourire avant que Zoey les rappelle à l’ordre. « Bon, c’est mignon tout ça mais je vous signale qu’on devrait aller voir l’assemblée avant que lui n’y arrive. Sinon, ça va nous retomber sur la gueule sévère, cette connerie. » Birdie grimace avant de reprendre la route. « Qu’est–ce qu’ils vont nous faire, de toute façon ? Une parole contre trois, ou quatre ? il est où le ducon qui s’est pointé ? » Celui qui a été menacé d’un flingue ? Perdu dans les oubliettes il faut croire. « Au pire, on sera de corvée nettoyage pendant une semaine et voilà. »

« Le seul truc bizarre que je sens, là, c’est comme ma tête me lance. » Forcément, il pisse le sang. Et il s’est prit un coup d’une tête qui fait deux fois la sienne. Ce qui aurait été bizarre, c’est que sa tête ne le lance pas. Birdie s’inquiète, naturellement, parce qu’elle ne veut pas qu’il tourne de l’œil, qu’il s’évanouisse ou quoique ce soit. Et il saigne mais personne, pas même lui–même, n’avait l’air de s’en rendre compte. Alors Birdie joue les apprentis infirmières débutantes, elle regarde Jordan sourire parce qu’elle a sorti une énième connerie – ça en vaut toujours la peine dans ces conditions – et y a Zoey qui l’ouvre parce qu’ils sont sûrement trop niais, trop lents pour eux – désolé d’avoir essayé de te sauver le cul, ma vieille. Tout ça pour une chanson. Foutue chanson. « Y’en a pas beaucoup qui ont les couilles de l’ouvrir. » Il a détalé comme la première des puces et visiblement, c’est un signe suffisant pour montrer qu’il ne participera pas au début. « Le contraire serait surprenant. » Bizarrement, y a plus de monde pour se battre contre les zombies que les humains puants qui rôdent le secteur. Comme quoi, les priorités peuvent être étranges parfois.

« J’ai vraiment envie de me barrer d’ici… Je vais me flinguer tout seul si ça continue comme ça. » Birdie jette un regard en biais à Jordan et glisse sa main dans la sienne pour la serrer aussi fort qu’elle le peut. « Personne va flinguer personne dans la limite du raisonnable, ok ? On a eu un débrief ce matin expliquant encore pourquoi chaque munition est importante. » En vrai, il y a d’autres façons de mourir mais Birdie se la joue rassurante. Malgré la trace des doigts sur son cou. « Zoey, va devant. J’vais l’emmener à l’infirmerie. » Elle ne lui dit pas qu’elle compte la rejoindre parce que ce n’est pas le cas. Birdie entraine Jordan dans le couloir opposé avec une marche rapide – pas en direction de l’infirmerie mais de leurs lieux de vie. « Tu le pensais, quand tu disais vouloir te barrer ? » Parce que si Jordan le pense, alors elle le pense avec lui.

C’est rapide mais efficace. Il ne bronche pas, elle n’adresse la parole à personne sur le trajet. Il y a sûrement déjà les grandes voix qui sont au courant et elle espère, elle se retrouve presque à prier intérieurement, Birdie, pour que Zoey réussisse un miracle. Au moins celui de contrôler les envies de vengeance des imbéciles, qui ont été les premiers à attaquer alors que ce n’était pas mérité. Cadburry a le pas rapide et silencieux, furtif à souhait, entrainé par les nombreuses années d’entrainement. Elle déteste toujours porter des chaussures mais c’est une nécessité en plus d’une obligation. La flotte dégueulasse, les trucs qui trainent par terre, les insectes, les vers, les bouts de verre, les débris, elle s’est déjà entaillée les pieds plus d’une fois. Ils arrivent à destination, la sécurité des quartiers, en auto–isolement parce que ce qu’elle lui demande, c’est bien trop sérieux pour se risquer que d’autres entendent. « Si on fait un raid à la pharmacie pour que j’arrête de pisser le sang je pourrais même me barrer maintenant. » La blonde hoche la tête à son tour. « Ok. » Elle regarde à droite puis à gauche, plus par réflexe, un instinct qu’on leur a conseillé. Ok pour la pharmacie, ok pour se barrer. Ok pour le faire maintenant, dans un coup d’éclat, un coup d’état, foudroyant et flamboyant. « J’espère que Zoey va pas tout prendre. » Car s’il ne reste plus qu’elle, elle va prendre pour trois. Elle peut payer cher, Zoey, mais franchement, Birdie n’a ni l’envie ni le temps de s’y appesantir. Zoey aurait jamais pris part à l’aventure. Elle peut affronter l’intérieur du bunker autant qu’elle le veut mais l’extérieur la terrifie véritablement.

Birdie, c’est l’intérieur qui commence à la terrifier. La prendre aux tripes et lui faire patience. Comme voir Jordan avec la gueule en sang parce qu’il a juste voulu la défendre, parce qu’ils ont juste voulu passer une chanson, comme avant. Comment vivre dans un endroit où on ne peut pas apprécier les choses simples ? « La plus grande voiture pourrait faire l’affaire... » Il est fatigué, Jordan, ça se voit et ça s’entend. « Dommage que mon van jaune soit plus là. Il aurait été parfait. Enfin, sauf contre les zombies. Il nous aurait pas protégé du tout. » Elle a un léger sourire, Birdie, pour essayer de faire redescendre sa propre pression mais aussi celle de Jordan. Ses doigts s’accrochent aux siens avec insistance et elle n’aime pas le voir comme ça. Il est comme le foutu petit frère qu’elle n’a jamais eu, elle qui a toujours été la dernière de la fratrie, et elle n’aime pas le savoir comme ça. « Allez, on traine pas, direction la pharma d’abord. En espérant qu’y ait personne. Si on a de la chance, on pourrait même piquer de la bouffe. »

Win : ils arrivent à la pharmacie. Il n’y a personne, ils prennent ce qu’il faut pour soigner Jordan (et plus encore car on n’est jamais trop prudent) avant d’aller chercher de la nourriture et se diriger vers l’espace automobile.
So close : ils arrivent à la pharmacie mais un infirmier est présent. Il est suspicieux sur le sang de Jordan et encore plus quand ils leur demandent bien plus que ce qu’il faut pour un saignement de nez. Il finit par leur demander d’attendre et disparait. Pour faire quoi ?
Close : ils n’atteignent jamais la pharmacie. Stopper par les surveillants qui leur demandent de les suivre. Ce qui n’est pas bon signe du tout.

« Elle peut venir avec nous. » « Elle préférera crever à s’user à la tâche ici que de venir dehors. C’est même pas la peine d’essayer. » Sinon, Birdie ne se serait pas isolée avec Jordan si elle pensait que Zoey aurait pu être de la partie. C’est dommage parce que Zoey reste un bon élément, ne serait–ce que pour remettre le moral d’aplomb. Mais c’est bien trop risqué de se foutre une personne comme elle dans les pattes et Birdie n’a pas assez en confiance en elle – ni en quasiment personne, à vrai dire – pour qu’elle n’aille pas cafter la seconde d’après la conversation qu’ils sont en train d’avoir. Elle le dirige donc vers la pharmacie mais ils sont interrompus dans leur course parce qu’on les interroge. Pourquoi il a la gueule en sang ? Il est tombé. Nah, Birdie se tait et elle laisse Jordan gérer. « Nan, on a des trucs prévus. » Genre s’évader d’ici, déguerpir le plancher, partir loin d’ici, d’eux, de cet endroit. « J’ai des trucs prévus. Elle est juste un support moral. » Il tourne la tête vers elle et elle sourit, la première fois depuis le début de la journée. Voire même de plusieurs jours cumulés.

Finalement, Jordan décide de rebrousser chemin parce que les gens suspicieux, mieux vaut les éviter. Birdie est d’accord et elle le suit sans broncher, pour une fois qu’il ouvre la marche. Il fait un pas qu’elle en fait deux et elle entend les battements de son cœur qui vrombissent jusqu’à ses oreilles parce que le truc bizarre évoqué par Jordan, elle commence à le ressentir aussi. « I have a bad feeling about this. » Cadburry se retrouve à citer Star Wars et elle a mal au cœur parce que ça lui fait penser à Will, et à son frère, et qu’ils ne sont pas là, et qu’il y a trop de couloirs, de passages, elle manque de tomber plusieurs fois mais sa deuxième main vient sur celle qu’elle tient déjà de Jordan.

Mais finalement les gars sont là, devant eux, sans savoir comment ils sont arrivés, et chacun en chope un. « Lâche–moi, espèce d’abruti de mes couilles que j’ai pas ! » Birdie essaie de se débattre mais c’est une peine perdue ; il fait deux fois sa corpulence et il doit être sourd car il ne rétorque rien. Ou alors il s’en contrefout, comme tout le monde dans ce bunker de merde. On les jette dans un espace restreint, avec une porte à barreaux pour unique entrée et sortie, une toute petite fenêtre faisant la taille de sa main en hauteur. Birdie tape rageusement contre un caillou au sol. « Putain de merde ! » Ils sont la poisse au cul. Et Jordan pisse toujours du nez. Elle tape contre la porte, avec toujours aussi d’énervement tout en hurlant de les laisser sortir.

Win : Birdie refuse de rester plus de temps que nécessaire ici. Elle fouille dans ses poches avant de se rappeler d’un pin qu’elle porte – décoration qu’elle a gardée d’avant le COVID. Elle le sort, elle utilise la lame pour torturer la serrure jusqu’à ce qu’un clic se fasse entendre, tournant un visage victorieux vers Jordan.
So close : Plusieurs heures passent. La notion est floue mais pas la fraicheur qui les scinde. Birdie est contre Jordan et Zoey apparait à travers les barreaux pour leur annoncer que le comité a rendu leur verdict. Qu’ils seront bien de corvée ménage pendant un mois et qu’ils auraient mieux fait de la rejoindre plutôt que de jouer les imbéciles. Elle réussit à les faire sortir.
Fail : Plusieurs jours passent. Ils ont froid, on ne leur rapporte qu’un repas sur deux et ils n’ont pas de nouvelles. La sentence tarde à arriver.