Depuis qu’Enzo est revenu dans notre vie, à Zoey et à moi, j’essaie de faire des efforts. Ce n’est pas simple de lui refaire confiance comme ça d’un jour à l’autre. Mais Zoey a besoin de son père pour grandir et être une enfant équilibrée. Pourtant, j’ai toujours des restes d’appréhension. Est-ce qu’il ne va pas partir demain, nous laissant à nouveau seules toutes les deux ? Il a l’air de vouloir dire que ce ne sera plus jamais le cas, qu’il regrette la décision qu’il avait prise, et qu’il veut bel et bien être le père de Zoey, assumer son rôle à cent pour cent. Je sens bien que Marina a peur, aussi, c’est d’ailleurs pour cette raison que j’essaie toujours de lui donner congé lorsque je sais qu’Enzo va passer. Je ne voudrais pas quelle soit désagréable avec lui. D’ailleurs, la sonnette de la maison retentit et je me dirige vers la porte d’entrée pour accueillir mon ex. Je lui offre un sourire. « Bonsoir ! » Je m’approche de lui, glisse une main sur son omoplate et fais claquer un baiser sur sa joue. « Tout s’est bien passé ? » Je pose mon regard sur notre file qui dort comme un loir dans sa poussette, ce qui me fait sourire. Elle est vraiment trop à croquer. « Viens, entre ! » Je le laisse entrer, et je prends délicatement Zoey dans mes bras en essayant de ne pas la réveiller. « Je vais la coucher. Sers-nous à boire en attendant, j’arrive ! » C’est une manière plus ou moins détournée de lui faire comprendre que pour la première fois, ce soir, je l’autorise à rester un peu plus longtemps que d’habitude. Jusqu’à aujourd’hui, j’avais toujours dit plus ou moins directement à Enzo que je préférais qu’il ne passe pas trop de temps ici. Zoey a besoin de lui, mais quant à moi, je préférais garder mes distances au maximum. Ce soir, j’estime qu’il est temps que nos ayons une discussion entre adultes. Je viens mettre ma fille dans son lit, dépose un baiser sur sa petite frimousse et referme la porte derrière moi après avoir pris soin d’allumer le babyphone. Lorsque je descends, Enzo est dans le salon, et il nous a servi deux verres de thé glacé. Il me connaît définitivement toujours aussi bien. J’esquisse un sourire et viens le rejoindre, m’asseyant près de lui dans le canapé. « Alors, vous avez fait quoi ? » Je viens prendre mon verre et bois quelques gorgées avant de le garder dans mes mains, tout en laissant trainer mon regard sur mon ex fiancé. Ça me fait bizarre de le voir ici, assis sur le canapé sur lequel nous avons regardé des films, dormi dans les bras l’un de l’autre, et même fait l’amour plus d’une fois. Il faut que j’arrête de penser à ça.
« Oui ça va de mieux en mieux, je crois qu'elle s'habitue vraiment à moi. » Je ne peux m’empêcher de sourire, parce que finalement, ça me fait plaisir de savoir ça. Les premières années de la vie d’un enfant ne sont pas très importantes pour sa mémoire, pourtant, il emmagasine beaucoup d’informations, et c’est souvent à cet âge là que débute la peur de l’abandon qui peut se poursuivre jusqu’à très tard. Je ne veux surtout pas que Zoey soit paralysée par ce genre de peur, je veux le mieux pour elle, et j’espère du plus profond de mon coeur que c’est pareil pour Enzo. Il a l’air de vouloir faire les choses bien, j’espère que ça durera et qu’un jour il ne va pas se réveiller avec l’envie de partir au bout du monde, nous abandonnant encore. Forcément, son départ brutal a créé en moi un traumatisme qui mettra un bout de temps à se résorber. Mais j’ai quand même envie de lui accorder cette chance. Je n’irai pas jusqu’à parler d’être un couple à nouveau, parce que de toute manière je n’en serai pas capable. Et puis maintenant il y a Kelya. Je ne sais pas vraiment où mènera cette histoire naissante mais j’ai envie d’y croire. Je me sens bien avec elle et j’espère que ça m’aidera à reprendre le dessus, sur toutes les choses que la vie a brisé en moi. Je monte rapidement coucher Zoey qui ne tarde pas à se mettre à l’aise dans son lit, les bras au dessus de ta tête et ses petites jambes recroquevillées. Je souris et redescends pour retrouver mon ex dans le salon. Je le questionne alors sur leur petite journée en famille. « Oh heu et bien je l'ai emmené au parc, elle adore vraiment le bac à sable c'est fou ! Je la voyais essayer de communiquer avec les autres petits, c'était adorable. » Je souris à pleine dents. Je ne peux pas m’en empêcher. J’ai emmené quelques fois notre fille au parc, et c’est vrai que pour le coup, elle n’est pas vraiment timide. Elle tient ça de son père. « Tu vas bien toi ? » C’est assez étrange, cette question. Il me la pose souvent, mais presque machinalement. Alors que ce soir, elle semble avoir un réel intérêt. « Oui ! » Je hoche un peu la tête en esquissant un sourire. « Des hauts et des bas, forcément, mais ça va. Beaucoup de nouvelles choses dans ma vie, un nouveau boulot, des nouvelles rencontres. Un nouveau départ en somme. Et puis le fait de pouvoir voir à nouveau, je me sens revivre. » Pour la première fois depuis nos retrouvailles, je me laisse aller à parcourir les traits de son visage. Il y a bien longtemps que je ne l’avais plus fait. Avant, j’adorais le regarder pendant des heures, sans jamais me lasser. « Et toi, ça va ? »
C’est forcément un peu étrange de me retrouver ici avec lui. Après tout, nous avons vécu tous les deux dans cette maison pendant plus de quatre ans. Ici, nous avons vécu de beaux moments comme des moments difficiles, il ne faut pas se leurrer. Mais j’ai vraiment envie que les choses se tassent, envie de le pardonner. La vie suit son cours, et je n’aime pas avoir de regrets. Je sais qu’Enzo est un homme bien, il surréagit parfois, il a un caractère fort, mais au fond, il reste un enfant perturbé, qui n’a pas eu de pilier dans sa vie. Je ne peux même pas lui en vouloir, et quand je le regarde, là, en face de moi, je n’arrive pas à être en colère contre lui. Il a fallu que je le sois, pour lui dire tout ce que je pensais, et parce que je l’aimais, aussi. Mais aujourd’hui, j’ai décidé de passer l’éponge. Ma confiance revient doucement. De là à ce que nous formions à nouveau un couple, je ne pense pas, non. Mais après tout, on ne connaît pas les deux bouts de sa vie. « Oui oui je crois que ça va. Il s'est passé quelques trucs pas très joyeux, puis j'ai quand même appris que j'ai un cousin et deux cousines du côté de mon père. J'ai découvert ça en essayant de trouver des infos de nouveau sur Cassandra. » J’écarquilles les yeux en apprenant ça. « Sérieux ? Des cousins ? C’est génial ça ! » Je souris et pose ma main sur son genou naturellement, avant de la retirer. « Et Cassandra, du coup… tu as trouvé des trucs ? Des pistes ? » Il cherche sa soeur depuis si longtemps, j’aimerai qu’un jour il me dise qu’il l’a retrouvée. Je sais que ça lui ferait un bien fou d’avoir une famille quasiment complète. Ce qui est sûr, c’est que je suis heureuse pour Zoey. J’ai toujours trouvé ça important d’avoir une grande famille. Qui sait, peut-être qu’un jour elle aura un demi-frère ou une demi-soeur. De mon côté ou de celui d’Enzo. Je ne lâche pas Enzo du regard et plisse un peu les yeux. « C’est quoi les trucs pas très joyeux qui te sont arrivés ? Tu sais, tu peux m’en parler… » Je lui offre un sourire sincère. Il peut avoir confiance en moi.
Nous parlons principalement de lui, de ses découvertes sur sa famille. Ça me fait du bien, ça me fait plaisir, parce que je me rends compte que son retour en Australie n’aura pas servi à rien. Il a retrouvé sa fille, mais il a aussi trouvé de la famille. « Ça fait tout de même bizarre d'avoir de la famille en plus à la trentaine passée. » Je lui souris un peu. « Oui mais c’est génial ! » Finalement je lui demande ce qu’il en est de sa jeune soeur, Cassandra, qu’il cherche depuis plusieurs années. « Et bien, je crois que je l'ai retrouvé aussi oui. Mais je ne suis pas encore sûr à cent pour cent que ce soit elle. » J’ouvre grand la bouche, choquée, dans le bon sens du terme. « C’est pas vrai mais c’est trop bien ! Je suis super contente pour toi ! » Je m’avance vers lui sans réfléchir et viens l’entourer de mes bras pour le serrer doucement contre moi Juste pour traduire mon bonheur pour lui. Mais bien vite je mets un terme à cette étrange étreinte, reprenant ma place initiale. Je me décide à changer un peu de sujet, revenant sur ce qu’il a dit un peu plus tôt. « Oh et bien j'ai eu un petit accident lors d'une de mes missions, un incendie et si je n'étais pas allé prendre l'air sur le balcon avec le gamin, on y serait certainement resté … » Je me pince la lèvre, surprise de cette nouvelle. « Mais ça va ? Tu n’as rien eu ? Et le gamin non plus ? » J’ai toujours eu un peu peur avec son boulot, parce que ce n’est pas non plus le genre de métier sans risque où il reste assis dans un bureau. Un jour, il pourrait bien y rester, et je n’y compte pas. Ma fille a besoin de son père. Je garde mon regard sur lui, espérant qu’il me dise que tout va bien. Ça m’inquiète un peu, ça a dû être une épreuve difficile à vivre, je pense. Je voudrais lui faire comprendre qu’il peut me parler s’il en a envie, il peut me faire confiance. Ça a toujours été, je ne vois pas pourquoi ça changerait. L’inverse n’est pas forcément le cas puisqu’il m’a trahie. Mais au moins, je voudrais qu’il sache qu’il peut se confier à moi sans aucun problème.
Je suis vraiment heureuse pour lui. Il m’a tellement parlé de sa petite soeur, j’aimerai la rencontrer. Et puis, savoir qu’il l’a retrouvée ou du moins, qu’il pense l’avoir retrouvée, ça va très sûrement l’aider à se poser, devenir un homme plus calme et mieux dans ses baskets. Son environnement familial a tellement été étrange, que je comprends parfois pourquoi il a réagi comme ça avec notre fille. Elle n’était pas désirée, à la base, elle est arrivée comme un cheveu sur la soupe, et il s’est vu être le père absent qu’était le sien. Même si je ne lui pardonne pas son geste, je ne peux que comprendre. Je viens me serrer contre lui et contre toute attente, cette étreinte me fait me sentir étrange, étrangement bien. Finalement je me recule et lui en demande un peu plus quant à son aventure du boulot. « Non juste une égratignure pour moi et j'ai tout de même emmener le gamin à l'hôpital. Il avait bien trop de drogue passive dans son corps. Vive les parents modèles n'est-ce pas ? Bon ok, je suis pas un modèle non plus mais je n'en arriverais jamais là, je te rassure. » J’esquisse un petit sourire maladroit. Effectivement, il n’est pas un père modèle, du moins, pas pour le moment. Mais je ne sais pas pourquoi, j’essaie de le rassurer. Il en a sûrement besoin. Je préfère le rassurer plutôt que de le voir fuir à nouveau. « Oui enfin, Zoey a un an, les souvenirs à long terme ne se créent qu’à partir de 5 ou 7 ans. Tu as encore le temps de te rattraper ! » Je pince un peu mes lèvres dans un demi sourire, alors qu’il décide de changer carrément de sujet. Effectivement, c’est sûrement une bonne chose à faire. Le sujet paternité est encore à éviter. « Tu m'as dis que tu avais un nouveau boulot alors ? J'espère quand même que t'écris toujours … » Je passe mes mains sur mes cuisses avant de prendre la parole à mon tour. « Oui, enfin c’est pas grand chose, un boulot de serveuse dans un bar sympa. C’est vraiment juste pour renouer avec le monde extérieur, pas pour l’argent. » Il sait aussi bien que moi que je n’en manque pas. Je n’ai aucun souci à faire vivre cette grande maison, et je ne compte pas - pour le moment - lui demander de pension alimentaire pour notre fille. L’argent que j’ai gagné avec mes bouquin me suffira sûrement jusqu’à dans bien longtemps. « Et l’écriture, je m’y remets doucement, depuis l’opération. » Avant de recouvrer la vue, c’était trop compliqué, même quand j’ai eu cette ghost writer. « C’est pas facile, mais je vais sûrement réussir à remettre le pied à l’étrier ! » Enzo m’a toujours poussée, dans le bon sens, pour continuer de faire de ma passion pour l’écriture un métier, et pour ça, je lui en serai toujours reconnaissante.
« J'ai confiance en toi, tu vas y arriver » Il est adorable. Je souris un peu et baisse les yeux quelques secondes. « Tu m'as manqué Max … Enfin, ton côté positif et rassurant m'avait manqué. Toi aussi mais je veux dire que … » Je redresse alors mon regard dans le sien, mon coeur tambourinant un peu plus fort dans ma poitrine. Et puis d’un seul coup, l’électricité qui venait de s’installer semble s’évaporer au moment où il se lève du canapé. « Je ne vais pas t'embêter plus longtemps, tu as sûrement des tonnes de choses à faire … » Je me lève alors presque aussi rapidement que lui et attrape son poignet avant qu’il ne fasse demi-tour. « Non ! Reste un peu… s’il te plait… » Mon regard accroche le sien, et un mince silence s’installe. Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai besoin de le sentir près de moi ce soir. J’ai besoin d’une présence, de sa présence. « J’ai retrouvé un truc qui pourrait t’intéresser… » Il se rassoit et je fais le tour du canapé pour rejoindre la cuisine où je vais chercher deux verres à pied, et une bouteille de vin. Mais pas n’importe laquelle. C’est la dernière du carton qu’on avait choisi pour notre mariage. Une des seules choses qu’on avait choisi réellement d’ailleurs. Je reviens dans le salon et lui tends la bouteille. Je comprends dans son regard qu’il a bien reconnu la bouteille, et je lui souris. « Je veux bien boire un verre avec toi, pour fêter ton retour ! » Je penche un peu la tête sur le côté, et souris. Je n’ai pas l’habitude de boire, et d’ailleurs, je tiens très mal à l’alcool. Mais ce soir, je m’en contre fiche, je n’ai pas envie de réfléchir. Près de deux heures plus tard, après avoir bu presque trois verres de vin, j’éclate de rire volontiers à une blague d’Enzo. La situation est complètement détendue, j’ai l’impression de l’avoir retrouvé. Comme si on ne s’était jamais séparés. Je ne pense plus à rien, je ne réfléchit pas, je profite juste du moment présent, et ça fait du bien. Nous nous repassons avec le sourire quelques moments drôles quand on était encore ensemble, et ça fait du bien, malgré tout. « Oh ! Et tu te souviens la chanson sur laquelle on a dansé en boîte à notre 3ème rendez vous… Mais siiii, ça faisait un truc comme… » Je commence à chanter la chanson, mais j’avoue que à après trois verres de vin, ça commence à être compliqué, en plus, je suis morte de rire. « Attends, je vais la retrouver. » Je prends mon téléphone et cherche la fameuse chanson, que je ne tarde pas à retrouver. « C’est ça, tu te souviens ? » Je pense qu’il dit oui pour me faire plaisir, mais peu importe. Je l’attrape par la main et le tire vers moi pour qu’il se lève lui aussi, et nous commençons à danser sur la fameuse musique. Je me colle contre lui et entoure sa nuque de mes bras, alors que la pression et les rires s’estompent, c’est une toute autre atmosphère qui s’empare de ce salon où nous avons vécu tous les deux. Mon coeur s’emballe.
« Je vais rester encore un peu alors. » C’est exactement ce que j’attendais de lui, et d’autant plus en lui montrant cette fameuse bouteille de vin qui signifiait autant pour nous. Les heures passent et nous devenons plus proches, ou devrais-je dire, redevenons plus proches. C’est comme s’il n’était jamais parti. Notre complicité semble renaitre doucement, grâce à l’alcool je suppose. Mais j’ai envie de me laisser aller, ne pas réfléchir, ne pas penser. Juste profiter de cette soirée avec lui, en mémoire du bon vieux temps. Et puis, nous en venons à reparler du passé, de cette fois où nous avons dansé sur une musique bien précise. Il semble avoir du mal à s’en souvenir, mais je l’aide du mieux que je peux. J’y mets tout mon coeur. Je l’invite même à danser. Je sais qu’il n’a jamais été un très bon danseur, mais pour être tout à fait honnête, je m’en fiche complètement. Ce que j’ai envie maintenant, c’est de le sentir tout contre moi. Sentir ses bras se refermer contre mon corps. Mon visage dans son cou, je respire son odeur rassurante. « Je m'en souviens » Je souris en entendant son murmure. « Je m'en souviens parce que c'est le moment où j'ai su que tu serais la femme de ma vie. » Mon coeur fait un bond dans ma poitrine. J’ai l’impression qu’il ne m’a jamais dit ces mots là, et qu’il attend que nous ne soyons plus ensemble pour les prononcer. D’un côté, je trouve qu’il a du culot. Mais d’un autre côté, je ne peux réprimer les sentiments qui se bousculent en moi à cet instant précis. J’ai peur de faire une bêtises, mais j’ai d’autant plus peur de regretter de n’avoir fait cette bêtise. C’est sûrement en ça que l’alcool aide, finalement. Il aide à surpasser sa peur. Je m’écarte un peu de lui pour le regarder alors que nous dansons encore, et mon regard se perd sur ses lèvres. A cet instant précis, je ne réfléchis plus, mon cerveau semble comme déconnecté, c’st à la fois étrange et très agréable. Et puis, sans crier gare, je m’approche de lui et scelle nos lèvres d’un baiser, pour l’instant tendre, doux, et nostalgique. Juste nos lèvres fermées, plaquées les unes contre les autres. Mon coeur s’emballe, j’ai envie de plus. Merde alors. Je m’écarte de lui, prenant peur de ce que je ressens à nouveau pour lui. « Je suis désolée je… j’aurai pas dû, pardon… » Je le regarde et finalement, je laisse parler mon envie profonde et fonds à nouveau sur lui. Cette fois, je l’embrasse de manière plus langoureuse, plus fougueuse. J’espère simplement qu’il ne me repoussera pas. Je ne sais pas s’il en a envie autant que moi, mais si c’est le cas, j’espère que notre fille dormira profondément pour la prochaine heure qui suivra.
Dernière édition par Maxyn Hollister le Sam 12 Sep 2015 - 22:44, édité 1 fois