Encore une journée assis sur son canapé à regarder la télé. Il commence à vraiment désespéré, passant le plus clair de ses journées à ne rien faire. Téléphone en main il observe toutes les petites annonces de boulot. Il postule à toutes les offres possibles, même dans des métiers où il n'a jamais travaillé encore. Il pourrait demander de l'aide à ses parents, il lui trouverait un boulot rapidement avec les relations qu'ils ont, mais il veut y arriver seul. Alors quand il a reçu un appel du Death Before Decaf pour venir dépanner quelques jours, il a sauté sur l'occasion. Son dernier contrat s'étant arrêté une semaine plus tôt, il a besoin de travailler. Même si ça ne lui donnera pas un salaire complet c'est toujours mieux que de ne rien faire. Il n'a encore jamais travaillé là-bas mais il a laissé son cv sur place il y a quelques mois au cas où. Peut-être bien que s'il fait ses preuves, il pourrait être pris sur le long terme. C'est tout ce qu'il souhaite au fond. Il part rapidement se préparer ayant accepté de venir dès le début de l'après-midi après un désistement de dernière minute. 20 minutes plus tard il quitte son appartement après une dernière caresse à Opale. Maxence est plus motivé que jamais et en grande forme, un large sourire aux lèvres quand il arrive au café. Il y a déjà quelques clients alors qu'il va se présenter au patron. Après les explications classiques, il attrape le tablier que le patron lui tend pour l'enfiler. Il le suit jusqu'à la personne dernière le comptoir, qui sera son collègue et mentor pour l'après-midi. On pourrait presque dire que son visage se décompose quand il voit que c'est Wren. Non pas qu'il ne soit pas content de le revoir, mais il ne s'y attendait pas. Ca lui fait remonter pleins de souvenirs d'un coup, rien de positif. Que ce passé qu'il tente d'oublier mais qui finit toujours par le frapper de plein fouet. Le patron repart, le laissant seul avec lui. « Faut croire qu'on va redevenir collègue aujourd'hui. » Qu'il constate en riant légèrement, un rire presque nerveux par cette situation inattendue. Pour un métier bien différent de l'ancien. Deux dealers qui deviennent serveurs. D'un coup, Max se demande s'il a changé lui aussi. Est-ce qu'il vend toujours ? Est-ce qu'il est toujours dans ce monde là ? « Je suis content de te voir après tout ce temps. » Il ne peut pas le nier. Il est toujours heureux de revoir un visage familier depuis son retour à Brisbane. Observant la salle et les clients qui commencent à arriver et à s'asseoir, il plante son regard dans celui de Wren. « Tu veux que je m'occupe de la salle ? » Il est son supérieur aujourd'hui alors il suivra ce qu'il lui demande. Quoiqu'il puisse arriver, il a besoin de ce travail et d'être vu de manière positive par toutes les personnes bossant ici.

Il n'y avait rien de plus routinier que de travailler lors du service de l'après-midi, une perspective qui enchantait souvent peu Wren tant il était un homme de la nuit. Lui, ce qu'il appréciait en particulier, c'était le feu de l'action, une animation générale qui le faisait aller à droite à gauche pour préparer mille commandes à l'heure. Dans ces moments là, Doherty avait une certaine sensation de puissance, de celle qu'il avait fréquemment eu lorsqu'il portait l'uniforme de pompier, une époque malheureusement révolue. Même s'il ne faisait plus partie de ce corps de métier, cela ne voulait pas dire qu'il ne pouvait absolument plus ressentir l'adrénaline d'une journée bien remplie. Au bar, la nuit, il vivait pour cela mais ce n'était pas son tour ce jour-là, lui qui commençait par lever une bonne fournée de verres en préparation des animations festives du soir même. Il n'y avait pas encore le moindre client et Wren avait bien envie de déjà partir en pause clope, il ne le fit pas, probablement parce qu'on lui avait annoncé qu'il allait devoir prendre sous son aile un nouveau pour son premier service. Exactement le genre de choses qui emmerdaient le suédois parce qu'il ne se considérait pas tant comme un mentor, être un collègue était une chose mais apprendre les ficelles d'un métier dont il ne se sentait pas spécialement en était un autre. Il ferait des efforts néanmoins afin de conserver une réputation plus ou moins intacte, même si on était loin de l'image de l'homme bien sous tous rapports dans tous les cas. Doherty avait quand même cette tenue de bad boy à tenir, un poil mystique surtout et ce serait sûrement cette tactique dont il allait user avec le nouveau qui entra dans la pièce, son uniforme déjà sur le dos. Et merde. C'était bel et bien le mot qui traversa le cerveau du suédois parce qu'il l'avait reconnu, forcément, Maxence, un vieil ami avec qui il partageait des ruelles lorsqu'ils dealaient tous pour de gros bonnets. "Est-ce qu'on peut considérer que la notion de collègue existait dans notre ancienne branche?" Question légitime tant la concurrence y était rude. Wren y avait fait son nid néanmoins, durant de longues années avant de tout plaquer pour mieux y revenir. Il était loin du business d'antan, se contentant de petits deals ça et là pour arrondir les fins de mois depuis qu'il avait quitté la caserne, les intentions n'étant pas du tout les mêmes que par le passé. "Yep. Je suis au comptoir, toujours. J'espère que t'apprends vite parce que c'est pas tout à fait comme la vente de sachets, si tu vois ce que je veux dire." Il lui montrait qu'il se rappelait de tout mais il y avait une part de Wren qui était quelque peu inquiet car Maxence traînait dans la même ville qu'Ava, voilà l'information qu'il retenait et c'était fort dangereux. "Je croyais que t'avais quitté le coin... Enfin, la rumeur m'a dit ça." Les écoutait-il d'habitude? Pas le moins du monde mais Wren devait bien tenter de rétablir la communication, espérant que les événements ne partiraient pas en dérapage complet. Tout était encore possible avec ces deux-là et ce passif si étrange entre eux.

Maxence est impatient de retrouver un travail. Il faut dire qu'il ne supporte plus vraiment de rester enfermé chez lui à ne rien faire. Travailler ça le canalise, ça fatigue son corps, ça l'empêche parfois d'avoir de mauvaises pensées. Alors il est parti pour cette journée de travail avec le sourire, heureux. Tablier sur le dos, son sourire s'est légèrement estompé quand il a reconnu Wren. Depuis qu'il est de retour à Brisbane, il sait qu'il peut croiser à tout moment d'anciennes connaissances, mais il ne pensait pas que ça arrive au travail. Le point positif à ses yeux, c'est qu'il avait sûrement changé lui aussi s'il bossait ici. Il n'était peut-être plus de leur ancien monde. De toute façon, il n'a pas d'autres choix que de travailler avec lui cet après-midi. Il aura peut-être la chance de découvrir s'il a réellement changé ou non. Histoire de savoir s'il doit se remettre à le fuir. Même s'il est clean, il n'a pas envie de tenter le diable le brun. « Mmh, je suis pas sûr non. » Quand on est dealers, on a jamais vraiment de collègues. Tout le monde veut vendre sa came, veut se faire ses clients, veut se faire une place sur ce marché. Il faut avouer qu'ils étaient doués à l'époque dans ce domaine et qu'ils ne se sont jamais faits la guerre sur les clients. Wren doute évidemment de sa capacité à être serveur, ce qui fait doucement sourire Maxence. Il peut pas lui en vouloir de croire ça, ils ne se parlent plus depuis bien longtemps maintenant. De ce qu'il se souvient de son caractère, il ne doit pas être ravi à l'idée d'avoir un novice à qui il devrait tout expliquer et apprendre. Heureusement pour lui, ce n'est pas le cas du brun. « Je te rassure, j'ai de l'expérience, surtout en salle. » Qu'il lui répond en attrapant son petit carnet et son stylo, se dirigeant vers les premiers clients installés. Depuis qu'il fait ce métier, il a toujours été plus doué pour servir les clients plutôt que de préparer les commandes. Après tout, il a toujours eu le sens du contact, même si c'était avec un autre type de client avant. Il prend plusieurs commandes, le sourire aux lèvres, le plus professionnel possible. Il se dit que ce sera à Wren de dire au patron ce qu'il a pensé de lui, et ça, ça le rassure pas énormément. De retour au comptoir, il donne les commandes à Wren. « La rumeur dit vrai. Je suis parti quelques années, pour revenir en janvier depuis que.. » Il s'arrête quelques secondes, toujours légèrement stressé par le fait de dire ça. Principalement parce que ces anciennes connaissances ont toujours du mal à le croire. « Depuis que je suis clean. » Il n'a pas l'intention de mentir. Même s'il se doute qu'il risque de se poser des questions et d'imaginer qu'il ment pour une quelconque raison. Ses propres parents ont eu du mal à avoir confiance en lui, alors c'est normal venant de ses propres connaissances. « Et toi.. J'imagine que tu l'es aussi si tu bosses ici ? » Il se risque à poser la question, curieux de savoir. Même si à l'observer, il a l'air dans un état tout à fait normal. Il attrape les boissons prêtes qu'il lui donne pour les installer sur son plateau, prêt à partir servir ses clients.

Wren avait toujours eu l'âme d'un solitaire, incapable de recevoir des ordres de qui que ce fut. C'était une aubaine alors que son patron lui faisait entièrement confiance dans la prise en charge des services. Avoir personne sur son dos, c'était ce à quoi Doherty avait toujours aspiré et s'il n'appréciait pas plus avoir à donner des ordres ou surveiller les faits et gestes des petits nouveaux, il allait devoir assumer ce rôle pour la soirée. En un sens, c'était une bonne chose qu'il connaissait Maxence depuis une petite dizaine d'années, il n'avait pas à prétendre en lui posant tout un tas de questions sur sa vie privée ou son parcours professionnel. Le suédois en savait déjà énormément, peut être beaucoup trop. C'était ainsi lorsqu'on côtoyait les bas fonds de la société: tout était partagé, surtout le pire quand la drogue prenait le pas sur la moindre trace d'humanité qui pouvait persister chez un individu lambda. Wren l'avait vécu de son côté à la fin de l'année passée mais il avait aussi parfaitement conscience que Maxence avait également joué avec ce genre de feux par le passé. Avait-il vraiment envie de lui demander ce qui lui était arrivé avant d'en arriver là? Doherty n'avait pas spécialement envie de remuer le couteau dans la plaie, même si c'était très fréquemment nécessaire pour effacer la moindre trace de sous entendus. Les deux hommes avaient-ils été amis? Tout portait à croire le contraire lorsqu'on savait la croisade que Wren avait mené pour sauver Ava des filets du Mayers mais ils avaient été collègues et apparemment, ils l'étaient à nouveau. Au moins pour la soirée à venir. De ce fait, Wren allait faire un maximum d'efforts pour être courtois, autant dire que ce n'était pas sa plus grande qualité de manière générale mais son partenaire le savait, il l'avait côtoyé dans ses pires instants après tout. "T'as bossé en restauration alors?" En un sens, la vente de drogues de tous types aurait pu correspondre au genre d'expérience recherchée pour tenir une salle de bar mais Wren n'avait pas envie de tout mélanger tout de suite. Il prépara donc les boissons commandées par les quelques clients présents dans la bâtisse, avec une rapidité légendaire car il avait appris à être diablement efficace en tant que barman en l'espace d'une année. Bien vite, Maxence revint vers lui et la conversation s'amorça, aussi étrange que réconfortante quelque part. "Et t'as pas eu d'autres périodes où t'as été clean depuis qu'on s'est quittés? Je veux dire, t'as continué la descente aux enfers pendant cinq ans?" Wren était toujours très franc, une qualité autant qu'un défaut quand on s'y intéressait de fort près. "Moi? J'ai été majoritairement clean ces dix dernières années. A quelques exceptions près. T'es pas indic pour les flics maintenant, j'espère?" C'était courant dans leur ligne de métier de passer de dealer à chouchou de la police, histoire de faire tomber deux ou trois collègues. "En tout cas, j'espère que t'as appris de tes erreurs avec Ava, elle a vraiment été bouleversée, tu sais." Le nordique avait fait ce qu'il avait pu pour la remettre debout, mission peu aisée avec de tels antécédents douloureux en matières de relations amoureuses compliquées.

Peut-être que le brun aurait préféré tomber sur un inconnu aujourd'hui. Non pas qu'il déteste Wren, mais il n'est jamais rassuré de retrouver d'anciennes relations. Encore plus sur un lieu de travail où il aimerait pouvoir faire ses preuves. Avec Wren, il risque de prendre en compte son passé même s'il a bien changé. Mais ça, il ne le sait pas. Ca fait bien longtemps qu'ils ne se sont pas parlé, cinq ans que Maxence a tout quitté sans rien dire à personne. Peu importe, il va travailler comme il le fait d'habitude en espérant que ça sera suffisant. Il n'a pas à douter de sa capacité en salle, depuis le temps qu'il a appris à faire ça, il sait qu'il n'aura aucun mal à gérer. D'autant plus que dans les horaires de l'après-midi, il n'y a pas encore foule et ça reste assez calme. Attrapant son petit carnet, il rassure tout de suite Wren. « Oui, ça fait trois ans que je fais ce boulot. » Alors ce n'est pas un débutant, il n'aura pas besoin qu'il lui explique tout et qu'il l'aide. Il quitte le comptoir pour aller chercher les commandes des clients présents, le sourire aux lèvres. Il a appris à toujours être courtois et souriant dans ce métier, peu importe ce qu'il peut se passer dans sa tête. Peu importe s'il est stressé par le fait de se retrouver avec Wren, les clients ne doivent pas le sentir et il le sait. Un allé retour au comptoir pour récupérer les boissons que Wren a préparé et il repart servir tout le monde. Sachant très bien qu'il va avoir le temps de parler avec lui maintenant, se demandant bien ce qu'ils vont pouvoir se dire. Il se rend compte qu'il est curieux sur sa situation et il ne peut pas lui en vouloir. « Non, je suis clean depuis trois ans à vrai dire, j'ai jamais replongé. » Aussi étonnant que ça puisse paraître. Il se doute qu'il va être surpris, ou même qu'il risque de ne pas le croire. Ses anciennes relations ont toujours du mal à le croire malheureusement pour lui. Sa réputation est bien trop importante pour être oublié. Lui, il est clean aussi apparemment, malgré des rechutes. Au fond, ça le rassure d'entendre ça. « Absolument pas, c'est pas mon délire tout ça et je ne veux plus rien avoir avec ce milieu. » Ca ne lui a d'ailleurs jamais traversé l'esprit de devenir indic. Certes il ne veut pas replonger, mais il ne veut pas balancer ses anciennes fréquentations non plus. Il sait comme ça peut être dur. « Tu me demandes ça parce que tu es toujours dans ce milieu ? » Wren est franc, comme toujours, mais lui aussi. A vrai dire, c'est une manière pour lui de savoir s'il doit le fuir ou non. Il a bien trop peur de replonger s'il recommence à traîner avec des personnes qui vendent encore. Il a changé oui, mais les démons ne sont jamais loin. En revanche, il est surpris de l'entendre parler d'Ava. Ils se connaissaient, oui, mais de là à être inquiet pour elle, il ne l'aurait pas cru. « T'as gardé contact avec elle ? » Ca l'intrigue, l'idée qu'ils aient pu devenir amis. Mais s'il a réellement changé, le brun se dit que ce n'est pas une mauvaise chose. « Mais je le sais oui, je l'ai revu et on a pu discuter de tout ça. » La situation s'est apaisée entre eux, même si Maxence est lucide, le chemin va être long.

La vie du grand Doherty n'était pas toujours aisé à suivre parce qu'il se perdait entre des phases d'autodestruction puis de récupération. Il avait toujours oscillé entre le bien et le mal sans véritablement réussir à opérer un choix strict et personnel. Wren était sûrement quelque part au milieu, avec ses qualités et ses défauts, les seconds prenant la plupart du temps l'avantage sur les premiers mais c'était quelque chose avec lequel il avait appris à faire la paix. Au moins, le suédois, oui, concédait qu'il n'était pas le meilleur des hommes, probablement parce qu'il avait entraîné tout un tas d'individus dans son sillage de malheur. Il avait vu des camarades commencer la drogue ou l'alcool par sa faute car le grand suédois avait toujours eu une aura forte, elle l'était suffisamment pour que son côté mystique l'emporte sur la raison de ses congénères. Ce fait constituait très probablement une fierté, même si Wren ne pouvait pas totalement l'assumer dans cet univers où tout devait être parfaitement bien rangé. Lui ne l'était pas puisqu'il jouait perpétuellement avec le feu, s'égarant à la frontière de ce qui était possible et de ce qui aurait dû être, une bataille constante dans sa tête qui n'était pas prête de s'arrêter. Retrouver la présence de Maxence dans un tel contexte n'était donc pas une aide pour un Doherty en pleine reconstruction depuis son dernier dérapage avec l'héroïne en janvier dernier. Il se sentait d'autant plus mal en apprenant que le brun avait quitté cet univers depuis trois longues années: dire que de son côté, il avait tenu près de dix ans avant de tout foutre en l'air, son ego en prenait décidément un coup. Cela dit, Wren hocha la tête, devait-il répondre à son interrogation, lui avouer qu'il avait besoin de revendre quelques doses de ci de là, notamment en fin de mois, pour pouvoir couvrir ses dépenses? "Non, je le suis pas. Je suis juste un barman, c'est déjà assez en termes d'adrénaline." Gros mensonge quand on voyait que Wren avait évolué dans le corps des pompiers durant une décennie: c'était dans ce milieu qu'il avait retiré la fameuse dose dont il avait toujours eu besoin et en le quittant, le nordique s'était effondré dans les grandes largeurs. Là encore, Mayers n'avait pas vraiment besoin de l'apprendre, surtout pas alors qu'ils en arrivaient à parler d'Ava, une source de conflit potentielle entre les deux hommes. "On peut dire ça. On se voit encore, de temps en temps, on parle de tout et de rien... J'espère que tu comptes pas la bousiller une nouvelle fois. Elle a eu du mal à se remettre debout après tes conneries." Il fallait qu'il commence par les menaces déguisées parce qu'il avait eu mal au coeur de retrouver une Ava en pleurs après tout ce qui s'était passé avec Maxence et elle n'avait pas besoin de cela. Non, elle avait besoin d'être heureuse avant tout.

Maxence, il essaye de se concentrer sur son boulot. Il est ici pour ça, pour faire ses preuves et il a juste peur de ce que pourrait penser Wren. Malgré tout, il reste courtois et une fois qu’il a servi les clients présents, il répond à ses questions. Il est honnête parce qu’après tout, il n’a absolument rien à cacher. Il ne traîne plus dans ce milieu, il est clean et il n’a plus rien avoir avec tout ça. Maintenant, il a une petite vie basique qui se résume à trouver du travail légal, gagner de l’argent légalement et continuer de reprendre petit à petit sa vie en main. Même s’il a déjà bien évolué là-dessus. Sans savoir cependant si Wren était comme lui, même s’il semblait clean aujourd’hui face à lui. Le brun sait aussi comme ça peut être facile à cacher si on le veut vraiment. Il hoche simplement la tête à ses mots, se disant qu’il devait lui dire la vérité. Quel intérêt il aurait à lui mentir ? Si ce n’est un manque de confiance en lui, et au fond, ça serait plutôt justifié. Mais il n’a pas envie de creuser Maxence, parce que cette réponse lui convient parfaitement et qu’il n’a pas envie d’en savoir plus. S’il apprend qu’il continue toutes ses conneries, il va sans aucun doute se sentir mal à l’aise et avoir envie de partir directement. Alors qu’il doit tenir son service jusqu’au bout, quoiqu’il arrive et peu importe comment va évoluer cette conversation entre eux. Mais quand la conversation finit par dévier sur Ava, ça semble tout de suite plus étrange. Le brun est mélangé entre l’envie de lui dire de s’occuper de sa vie et l’envie de ne surtout pas se montrer impoli avec lui par rapport au boulot. Mais ces paroles l’énerve, parce qu’il n’a pas besoin de lui pour le savoir. « Je te remercie de te préoccuper d’elle, mais je le sais déjà tout ça. » Evidemment qu’il se doute que ça n’a pas été facile pour elle après. Comme ça n’a pas été facile pour lui, mais ça, il sait que tout le monde s’en fout étant donné que tout est sa faute. Et bien que ce soit vrai, il aimerait bien qu’on arrête de toujours tout lui renvoyer en pleine face. Il faut le dire, il n’apprécie pas qu’on se mêle de sa vie de cette manière. « Puis comme je te l’ai dit, j’ai changé. Donc non, je ne compte plus lui faire du mal, juste réparer mes erreurs avec elle. » Il reste calme, se disant qu’il est peut-être juste inquiet pour elle. Mais que ça passera avec des explications, quand il comprendra qu’il n’est plus le même. Toujours obligé de se justifier même après trois ans clean. C’est sûrement la seule chose qui l’emmerde dans ce retour à Brisbane. « J’ai du mal à comprendre ta réaction d’ailleurs, tu avais pas l’air de te soucier d’elle à l’époque. » Il peut s’en empêcher, ça sort tout seul. Parce qu’il aurait pu lui faire la morale à l’époque, mais même si ces souvenirs ne sont pas excellents, il s’en serait souvenu si c’était le cas.

Passé la surprise, Wren dût retrouver son air stoïque qui constituait sa marque de fabrique. Peu de personnes avaient la chance de recevoir un sourire ou une remarque agréable, le grand suédois tenait absolument à tracer une distance entre les autres et lui. Mine de rien, il avait vécu quelques déconvenues en s'attachant aux mauvaises personnes et il avait appris bien malgré lui que les gens disparaissaient toujours à un moment donné, que lui le désire ou non. Ce n'était donc pas toujours de gaieté de coeur qu'il apparaissait comme un véritable roc sans sentiment et surtout sans pitié. Apparemment, c'était la méthode qu'il avait choisi d'utiliser avec Maxence, sûrement parce que les deux hommes ne s'étaient pas quittés en si bons termes que cela, à cause de Doherty principalement. Il s'agissait tout de même du garçon qui avait tout mis en oeuvre pour qu'Ava finisse par quitter Mayers, comme si leurs histoires de couple le concernaient en réalité. Ce n'était pourtant pas le genre du nordique de s'intéresser de près à ce genre de choses mais il avait eu trop de compassion pour la jeune femme, vraisemblablement parce qu'il avait été Maxence lui aussi, avec une de ses ex. C'était comme s'il cherchait à rattraper ses vulgaires erreurs, même s'il n'y avait aucune possibilité de revenir en arrière et reprendre ce qu'on avait dit ou fait. Wren avait toutefois essayé et il ne saurait pas vraiment comment l'expliquer à son ancien ami. Autant ne rien dire, tâcher de rester le plus mystique au possible dans ses réponses. "Tu comptes remettre le couvert avec elle, alors?" Est-ce que toute cette histoire le concernait maintenant? Pas plus que par le passé mais il pressentait l'entourloupe et Wren ne tenait pas à ramasser Sanders à la petite cuillère, il avait déjà pas mal donné en la matière. Il rinça quelques verres sans poser un regard très sincère sur Maxence, sûrement parce qu'il avait abandonné l'honnêteté dès la première réponse, un véritable lâche au fond de l'âme. "Tu te goures. Je l'ai aidée à se détacher de toi." La bombe était lancée mais Wren n'avait pas peur, tout cela s'était déroulé cinq années auparavant, il y avait donc bel et bien prescription, non?

Cette journée ne se passe absolument pas comme il l'avait prévu. Déjà qu'il n'était pas rassuré quand il s'est retrouvé face à Wren pour ce travail, il l'est encore moins avec cette conversation. Autant dire qu'il était venu ici pour travailler et non pour subir un interrogatoire. Encore moins sur sa relation avec Ava. Maxence pourrait presque commencer à prier pour que des clients arrivent pour le sortir de tout ça. Malheureusement pour lui, les services de l'après-midi sont souvent très calmes et il va falloir attendre que l'heure tourne avant que les clients arrivent. Alors il tente de rester calme, de garder le contrôle. Surtout pas s'énerver et tenter de simplement lui montrer qu'il n'est plus le même. Qu'il a réellement changé depuis tout ce temps. Même s'il ne comprend pas ce qu'il se passe. Pourquoi ça l'intéresse autant ? Pourquoi il se mêle de cette histoire ? Max trouve que ça ne le regarde absolument pas. Cette histoire est entre lui et Ava, il n'a pas besoin que d'autres personnes s'en mêlent alors que c'est déjà assez complexe comme ça. Mais à sa question, Maxence ne peut s'empêcher d'afficher une mine surprise. « Sérieusement ? » Il sait bien que tout le monde ici a une mauvaise image de lui, mais au point de croire qu'il ne veut que se faire Ava, faut pas pousser. « Absolument pas non, j'ai pas l'intention de me remettre avec. » Il n'est pas dans cette optique là. Il veut juste se faire pardonner, être certain qu'elle va bien, pourquoi pas réussir à avoir une relation avec elle, mais totalement platonique. Après tout, leur première relation a été assez catastrophique pour tenter de recommencer, non ? Quand Wren annonce avoir voulu aider Ava, le brun est surpris. Mais est-ce qu'il lui en veut ? Pas vraiment. Il se doute bien qu'il n'a pas été le seul à avoir essayé et ça, il ne peut que le comprendre. « Je vois. Comme t'as pas réussi il y a cinq ans, tu veux essayer de te rattraper cette fois ? » Maxence en a oublié le boulot, l'avis positif qu'il voulait essayer d'avoir. Mais personne n'a réussi à aider Ava à l'époque, c'est lui seul qui a réussi à merder assez fort pour qu'elle comprenne enfin et qu'elle parte. Il ne peut s'empêcher de se dire que tout le monde va chercher à être le héros qui la sauve de son emprise cette fois-ci, alors qu'il ne compte même pas la reconquérir.

Il était certainement le plus mal placé pour juger Maxence parce qu'il avait fait pire, de bien des manières. C'était le chemin lambda d'un junkie finalement: d'être borderline, de toujours se soucier des autres une fois que le moment était passé, que l'erreur avait été commise mais Doherty, lui, n'avait jamais montré le moindre signe de remords de son côté. Il avait toujours été parfaitement impassible face à la détresse de son entourage, comme si leur inquiétude ne le marquait pas le moins du monde. Etait-il un sociopathe? Il ne se posait plus vraiment la question car l'ancien pompier avait prouvé ces derniers temps qu'il ressentait, bien au contraire, une multitude d'émotions et qu'il ne savait par ailleurs pas les gérer correctement. A vrai dire, le nordique agissait juste différemment du commun des mortels: il avait d'autres centres d'intérêts, d'autres signaux d'alarmes et une conception de l'amitié des plus étranges, également. Ce n'était pas un souci majeur pour Doherty de ne pas voir une personne qu'il considérait comme un allié essentiel durant plusieurs années, il reprenait tout simplement là où la relation s'était arrêtée. En l'occurrence, celle qu'il partageait avec Mayers était complexe, loin de toute notion de clarté. En effet, les secrets s'étaient accumulés entre eux à partir du moment où Wren avait tâché d'aider Ava à se détacher du brun mais Wren ne désirait pas conserver cette bulle de mensonges au dessus de leurs têtes, pas cinq ans après les faits. Les temps avaient justement changé et les circonstances, apparemment, puisque Maxence était clean, Wren également et que leur monde n'était plus identique à celui dans lequel ils avaient évolué durant leur jeunesse. "Et c'est quoi tes intentions alors?" Il était vraiment curieux car, à la place de Maxence, il n'aurait vraisemblablement pas osé faire amende honorable, de toute manière, Wren en était peu capable. Il fallait toujours qu'il bousille tout, un principe de base qui n'allait pas changer maintenant que son ancien ami revenait à Brisbane. "C'est ça qui t'a fait revenir dans le coin ou il y a autre chose? C'est risqué pour un ex ex addict de revenir sur les lieux du crime, l'oublie pas. Je l'ai fait à un moment et ça a failli me tuer." Le suédois aurait dû partir depuis un long moment mais quelque chose le retenait ici, sans qu'il ne comprenne véritablement pourquoi, un mystère qu'il résoudrait un jour ou l'autre, il en était convaincu. "Non. Je vais rester à l'écart, j'espère juste tu feras pas le con. Pour le reste, c'est ton problème, sauf quand t'es au boulot bien sûr." Ici, il avait le devoir d'être irréprochable et Wren ferait attention au moindre signe de dérapage, sans aucun doute.

Il ne comprend pas ce qui se passe Maxence. Il s'attendait à être jugé sur la drogue, sur son côté clean. Qu'il ne pourrait pas croire qu'il soit clean, qu'il doute, ça il l'aurait compris sans soucis. C'est le même problème avec tout le monde depuis qu'il est rentré. En revanche, parler d'Ava avec Wren, ça ne lui a même pas traversé l'esprit. A l'époque, Maxence était bien trop préoccupée par la drogue pour faire attention au reste. Il faut croire qu'il a loupé l'information d'un rapprochement amical entre son ex et Wren. Mais il ne peut pas lui en vouloir d'avoir tenté de l'éloigner de lui, tout le monde a fait la même chose. Et maintenant, en se mettant à la place des autres, il le comprend totalement. Il ferait sûrement pareil. Sauf qu'il a changé, radicalement. Il n'est plus le même, plus aussi con, ni égoïste. Au fond, maintenant qu'il est clean, il est réellement lui-même. Ses démons se sont envolés pour laisser place au Maxence qu'il aurait toujours dû être. Mais aujourd'hui, dans ce bar, alors qu'il pensait venir faire une journée de travail comme il le fait habituellement, il se retrouve au milieu d'un interrogatoire. C'est l'impression qu'il a vue la réaction de Wren à chaque chose qu'il dit. « Me faire pardonner. Pouvoir lui donner les explications qu'il faut pour qu'elle passe totalement à autre chose. » Parce qu'elle doit se poser des questions, elle doit se demander pourquoi il était comme ça avec elle s'il l'aimait. Mais est-ce qu'il a les réponses à toutes ces questions ? Sûrement pas. Même lui il ne sait pas pourquoi il a été comme ça. La drogue détruit les gens et l'entourage, c'est tout, c'est comme ça. Parfois, il n'y a pas plus d'explications. « Pourquoi t'es encore là alors ? » Lui aussi, il est curieux. Si cette ville est si toxique que ça pour les gens comme eux, pourquoi il n'est pas parti depuis le temps ? « Mais je ne suis pas revenue pour Ava. Je suis revenue pour me rapprocher de ma famille à la base. » Et aussi pour se tester, mais ça, il se cachera bien de lui dire. Réussir à rester clean à Brisbane, après tout ce qui s'est passé dans cette ville, c'est un défi. Une façon à lui de se prouver qu'il a réellement changé et qu'il peut tenir sur la longueur. Jusqu'ici, il s'en sort plutôt bien. Il faut juste espérer que ça continue de durer comme ça.« T'en fais pas pour ça, j'ai toujours été irréprochable au boulot. » Il n'a jamais eu aucun soucis, il a toujours eu d'excellents retours et des bonnes recommandations. Attrapant son carnet, il repart vers des nouveaux clients. Cette discussion n'était pas des plus agréables pour le brun, s'il est honnête avec lui-même, il a déjà hâte que la journée se termine pour vite rentrer chez lui et oublier tout ça.

Il était toujours discret, Wren, ne faisant attention en apparence qu'à ses propres soucis, pas ceux des autres. Ce n'était pourtant pas tout à fait ce qui s'était déroulé avec l'affaire Maxence et Ava. Le grand brun ne comprenait pas vraiment lui-même ce qui lui était passé par la tête à ce moment-là mais il avait désiré préserver la jeune femme d'une fin potentiellement tragique. Il avait senti sa vulnérabilité, cette peur qu'elle avait dès qu'elle regardait Mayers partir pour une énième soirée de défonce et son passé l'obligeait à vouloir rattraper le coup comme il le pouvait. Wren avait été ce type-là justement, celui qui allait se mettre des aiguilles dans les veines et qui laissait tomber tout le reste, surtout ses proches. Il avait énormément blessé dans le temps, sa famille surtout, qui avait dû se faire à l'idée qu'il n'était pas l'homme parfait, celui qui les sauverait de leur triste situation. Wren était vulnérable comme peu de personnes pouvaient se targuer de l'autre mais la différence était claire, il ne le montrait jamais à personne. C'était probablement pour cette raison qu'il n'avait pas fait son coq vis à vis de Maxence au moment où il essayait d'aider Ava à se détacher de lui. Au contraire, il était le suédois discret qui répondait à ses appels à l'aide mais qui ne faisait pas grand chose pour que le monde voit qu'il pouvait être cordial et même généreux avec d'autres personnes que lui-même. Ce passé était pourtant enterré depuis un long moment: désormais, ils étaient tous des étrangers les uns pour les autres car la drogue était sortie de leur vie, que c'était ce qui les avait liés à chaque rencontre. Qu'avaient-ils tous en commun maintenant? Ce travail, en tout cas, pour Maxence et Wren, c'était la réalité. Le barman ne désirait pas paraître comme un inspecteur de police mais bien malgré lui, c'était le rôle qu'il assumait, trop curieux d'apprendre où son ancien camarade en était. "Crois moi, tout le monde passe à autre chose quand on laisse un junkie derrière. C'est parfait comme ça." Il parlait pour lui en tout cas, en vue du nombre de personnes qui l'avaient quitté en réalisant qu'il n'était qu'un cocaïnomane notoire, un homme à qui on ne pouvait pas faire confiance et ce, même s'il n'avait touché à rien depuis de longues années. L'image persistait et Maxence devait le savoir autant que lui. "Pour la même raison que toi. Ma famille. Même si je me demande encore pourquoi je continue d'être à côté d'eux sans être avec eux. Un instinct masochiste, sûrement." Wren ne les voyait plus beaucoup, ni son frère ni sa soeur et encore moins sa mère, quelque chose se brisait au fur et à mesure. Est-ce que c'était lui qui changeait ou le monde autour qui les éloignait? Le Doherty ne pouvait pas le deviner mais il pouvait essayer de faire avec, peu importe la douleur que ce fait engendrait. "Tant mieux. Je veux pas dire de mauvaises choses au patron. Il a tendance à donner des secondes chances à des paumés comme nous et ça dessert toujours un jour ou l'autre ce genre de mecs sympas." Il fauterait, Wren, ou peut être que ce serait Maxence mais on ne devenait pas irréprochable du jour au lendemain. C'était en tout cas le genre de pensées qui persistaient dans l'esprit de l'ancien pompier en préparant les nouvelles consommations des clients.

Quand il y pense, il se demande ce que Wren disait à Ava à l'époque. Mais surtout, il se dit qu'il ne devait pas être le seul à la pousser vers la sortie. Pourquoi elle ne l'a pas fait plus tôt ? Pourquoi elle a attendue qu'il fasse la chose de trop ? Il comprend pas le brun. L'amour fait faire des choses stupides, il le sait bien, mais pas à ce point-là. Parce qu'il se rappelle de l'homme qu'il était, de ce connard avec qui elle a vécue pendant trois ans. Et il ne peut pas s'empêcher de se demander comment elle a fait pour supporter tout ça pendant des années. Mais ça ne sert à rien de se torturer l'esprit avec ça maintenant, les choses sont faites et il ne pourra pas revenir en arrière. Par contre, il peut continuer d'être jugé pour ses actes du passé, comme le fait Wren actuellement. Même si au fond, il a sûrement raison. Peut-être qu'elle n'a pas besoin qu'il revienne dans sa vie et qu'elle est déjà passée à autre chose. Qu'il ne lui fera que plus de mal que de bien en faisant cela. Malheureusement, il ne peut pas s'en empêcher. Etre dans la même ville qu'elle et ne pas lui adresser la parole, ni la voir, ça paraît impossible pour le brun. « Sûrement, je veux juste en être sûr, puis je la laisserais faire sa vie tranquille. » Il ne veut surtout pas interférer dans sa vie. Qu'elle soit de nouveau mal, qu'il fasse de nouvelles conneries. Parce qu'il le sait, il n'est bon qu'à ça. Même s'il est clean maintenant, ça n'empêche qu'il sait mieux faire le mal que le bien avec les gens qui l'entourent. Et la dernière personne à qui il voudrait faire du mal, c'est bien Ava. Il est intrigué des paroles de Wren, se demandant pourquoi il reste ici. Malheureusement la famille pousse toujours à revenir ou bien rester dans son cas. Même s'il a l'air d'avoir des relations aussi chaotiques que lui avec eux. « Si t'en as conscience, tu peux essayer de changer les choses. » C'est plus facile à dire qu'à faire, il le sait bien. A l'heure actuelle, il parle seulement à sa mère le brun. Son père reste distant et méfiant envers lui, alors que son petit-frère refuse de le voir et de lui parler. Alors est-ce qu'il peut vraiment donner des conseils là-dessus ? Pas vraiment. Carnet en main, il va récupérer la commande de nouveaux clients avant de les ramener à Wren. Il est surpris par ses mots, mais en même temps il comprend. Cette image de droguer reste, entache une réputation pour des années. Mais Maxence, il sait qu'il a changé. Qu'il ne retombera pas dans ses démons. Il en est persuadé au fond de lui. Peut-être qu'il est dans le déni. « Je comprends ton point de vue. Mais tout le monde change dans la vie. Notre passé ne nous définit pas et on peut tous devenir meilleurs. Tu ne crois pas ? » Il a l'air bien pessimiste. Il doit penser que Maxence est trop naïf, que lui aussi il finira par faire une connerie et briser toutes les personnes autour de lui. Pourtant, Max reste positif et continue d'y croire.

Faisaient-ils encore partie du même univers? Wren ne connaissait pas cette réponse parce qu'il avait cru quitter les sphères de la drogue lui aussi mais le passé finissait toujours par revenir le hanter à un moment ou un autre. Cela dit, le suédois avait tenu dix ans de son côté avant que les dérapages ne deviennent plus rattrapables, dix années où il avait tenu le cap, où il avait cru pouvoir tourner la page de son adolescence désastreuse. Bien évidemment, le jeune nordique n'avait fait que se bercer d'illusions: on ne guérissait jamais réellement de tels traumatismes car il se rappelait du moindre détail de cette nuit-là, des flammes qui mangeaient les murs de l'appartement, des efforts qu'il avait faits pour entraîner les jumeaux avec lui, entendant les hurlements de sa mère derrière lui. Pourtant, Wren n'avait rien pu faire pour retourner en arrière, pour la ramener avec lui, pour effacer l'image de ce père qui devait être hilare en bas du bâtiment, avec cet espoir fou qu'ils périraient tous de ses mains. Le grand Doherty avait baigné dans ce type d'atmosphère et il n'avait jamais réussi totalement à en sortir. A chaque fois qu'il pensait quitter les flammes, elle revenait lui remémorer qu'il n'était rien d'autre qu'un jouet pour elles, qu'il ne pouvait pas lutter contre cette douce évidence et c'était exactement le même rapport qu'il avait avec la drogue parce que celle-ci avait été le substitut parfait. Le feu ou la dope, il devait forcément y avoir une addiction quelque part et une particulièrement violente qui le rendait plus ou moins fou. Il n'était donc plus optimiste depuis longtemps sur son sort: il finirait forcément par retourner dans un cercle vicieux, sans arriver à savoir lequel ce serait. Maxence tomberait peut être de son côté, même s'il avait l'air clairement sûr de son fait: il avait quitté Ava, autant que la drogue, et ne retomberait ni dans les filets de la première ni dans la folie de la seconde. "On verra. Autant pour toi et Ava que pour moi et ma famille. Je crois que faut pas se fier à ce qu'on désirerait... C'est pas ce qui finit par arriver." C'était en tout cas ce que Wren gardait bien en tête depuis que le monde avait arrêté de tourner rond pour lui, le fameux jour où il s'était décidé à replanter une aiguille au fond de son bras, la pire erreur de sa vie mais putain, ce qu'elle lui avait fait du bien sur le moment. "Pas vraiment. Il y a un an, je t'aurais dit, carrément... Mais depuis, je me suis fait larguer par ma copine et j'ai décidé de me foutre une aiguille dans le bras pour passer la douleur et ça a pas marché sur la durée. J'ai gerbé trois jours sur le canapé de mon meilleur ami pour me sortir de cette merde et je suis convaincu que le moindre mauvais jour peut me faire y retourner d'un jour ou l'autre. Pas toi?" Dix ans, c'était ce temps où il n'avait ressenti aucun lien avec la drogue, aucun besoin non plus et maintenant, il rôdait juste autour sans jamais flancher, allez savoir si Maxence vivrait ce même rapport avec l'objet dans un avenir plus ou moins proche. Il suffisait de peu, parfois.

Il a envie de redevenir aussi lâche qu'avant Maxence. Fuir cette conversation, rentrer chez lui, ne plus jamais accepter de boulot dans cet endroit. Maintenant il le saura, Wren travaille ici. Bien qu'au début ça ne le gênait pas vraiment, plus la conversation avance, moins il est serein. Sûrement car il se sent encore une nouvelle fois jugé sur ces choix. Le choix de revenir ici, de retourner dans la vie d'Ava. La confiance qu'on pourrait accorder à Max est très faible car le passé n'est jamais loin. Et Wren essaye de lui faire comprendre, tout du moins, il a l'impression qu'il est persuadé qu'il finira par replonger. Comme lui. Après tout, il a quand même tenu dix ans avant de replonger dans ses démons. Est-ce qu'il aura le même sort que lui ? Il a dépassé la barre des trois ans, il en est fier, il n'a pas envie que ça s'arrête. Replonger, ce serait donné satisfaction à bien trop de mondes. Toutes ces personnes qui ne croient pas en lui et qui continue de le regarder comme le drogué égoïste qu'il a été. C'est une source de motivation pour ne pas replonger pour Maxence et il compte bien se raccrocher à ça autant que possible. Peu importe ce que pourra lui dire Wren qui est bien trop pessimiste au goût de Maxence. « Il faut toujours y croire même quand les choses semblent fichus. » Qu'il répond simplement en haussant les épaules. Il a envie de croire que ça ira avec Ava. Et même que Wren réussira à s'en sortir avec sa famille. Peut-être qu'il est devenu trop naïf ou positif avec les années et qu'il se voile la face plus qu'autre chose. Il attrape les verres qu'il a préparés pour les placer sur son plateau, tout en l'écoutant. Et même s'il ne montre rien, ça le touche bien plus qu'il le voudrait. Parce qu'il a peur de ça le brun. Peur qu'une rupture, un jour plus mauvais que les autres puissent le faire replonger. Même s'il est soutenu, même s'il a ses amis. Parce que cette solution de facilité reste toujours la meilleure dans sa tête, même après des années. Il ne dit rien, partant d'abord servir les clients avant de revenir vers lui quelques minutes après. « Je suis désolé de savoir ça. » Qu'il a été au plus mal, qu'il s'est fait larguer, qu'il a replongé. Il comprend au fond et il ne risque pas de juger. « Je vais pas te dire que j'y ai pas déjà pensé. Ni que certains mauvais jours, je n'ai pas eu envie de boire un verre ou prendre quelque chose. Mais je crois que j'ai trop souffert de tout ça et fait souffrir pour réellement replonger un jour. » Il pense plus aux autres qu'à lui d'ailleurs. Parce qu'il a seulement souffert quand son monde s'est écroulé et qu'il a été enfermé dans un centre. Alors que ses proches eux ils ont souffert des années.