Helena avait interrogé Caelan, lui demandant s’il voulait sortir avec elle. La question première se référait au fameux verre qu’elle avait promis de lui offrir il y a bien longtemps, mais la brunette avait décidé de tourner la question de manière à pouvoir tester la température. Elle ne fut pas déçue du voyage ! L’air semblait soudain lourd et glacial, alors que Caelan faisait preuve d’une franchise blessante.

« Je ne suis pas trop certain de comprendre le sens de ta question, ça sonnait assez officiel. »

Helena déglutit, tentant de masquer sa gêne en se concentrant sur ses pieds qui tapaient dans les cailloux présents sur le chemin. Un silence s’installa, un peu trop long, mais elle ne savait pas comment le rompre. Heureusement, Caelan le brisa en reprenant la parole.

« Je pense avoir déjà répondu à la question du verre, mon opinion n’a pas changé depuis. »

La jeune femme releva la tête en lui adressant un sourire qui ne gagna pas ses yeux, alors qu’une boule lui serrait la gorge.

« C’est noté ! Va pour le verre. »

Elle essaya de faire preuve d’autant d’enthousiasme qu’elle le pouvait pour chasser le malaise qui s’était installé.

« Quand on sera rentrés à l’appart, on regardera nos agendas et on fixera enfin une date. Peut-être qu’après, au moins, tu arrêteras de me chambrer avec ce fameux verre ! A moins que ces taquineries ne soient ma punition à vie pour avoir omis de t’inviter. »

Elle rit, se détendant un petit peu alors que la balade continuait, mais elle n’oubliait pas. Enfin, ça, c’était avant leur rapprochement dans le lac : là, les minutes précédentes s’effacèrent comme par enchantement. Le corps chaud de Caelan contre le sien fit battre son cœur beaucoup trop vite alors qu’elle se hissait sur la pointe des pieds pour l’embrasser. Ils furent interrompus par un garde forestier, mais elle était persuadée qu’avant cela, le jeune homme s’était penché pour l’embrasser. Lui aussi avait restreint la distance qui les séparait. Lui aussi s’était concentré sur ses lèvres, non ? Helena ne savait plus sur quel pied danser.
Le pique-nique débuta à nouveau mal lorsqu’Helena fit remarquer que leurs vêtements mouillés pourraient les empêcher de poursuivre la balade.

« C’est comme tu le sens, si tu préfères qu’on rebrousse chemin, on retournera vers Brisbane. »

Peut-être qu’elle surinterprétait les paroles de son colocataire, mais elle semblait détecter une pointe de déception. Helena détourna le regard, déçue à son tour. Cette balade ne ressemblait absolument pas à ce qu’elle avait espéré. Le but était que Caelan et Helena passent du temps ensemble, en dehors de l’appartement, et apprennent à se connaître. Mais la jeune femme avait l’impression de marcher sur des œufs depuis que la température entre eux avait chuté de plusieurs degrés. Elle refusait que cette journée se termine ainsi. Peu importe ce qu’il adviendrait entre elle et Caelan, ils étaient colocataires, obligés pour l’instant de partager un même appartement. Alors ils devaient bien s’entendre, il n’y avait pas d’autre choix. Il fallait dissiper le malaise qu’il y avait entre eux.
Helena finit son sandwich puis se releva. Elle ôta le T-shirt que Caelan lui avait prêté en lui tournant le dos, le lui balançant en pleine figure, et enfila ses fringues encore humides. C’était froid, mais par cette chaleur, ce n’était pas si désagréable. Et puis, Caelan avait raison, leurs vêtements finiraient par sécher.

« Tu crois toujours que mes petites jambes ne supporteront pas la balade et que tu devras me porter ? »

Helena rit, bien décidée à ce que la bonne humeur les accompagne jusqu’à leur coucher.

« Je relève le défi ! Allez, tu viens Papy ? »

Elle remit son sac sur son dos et recommença à marcher doucement, attendant que Caelan la rattrape. Le parc regorgeait d’endroits magnifiques et la promenade fut magnifique. Enfin, ils atteignirent la voiture de Caelan. La jeune femme souffla en s’installant côté passager.

« Pfiou, je suis contente de ne pas avoir le permis, je ne suis pas certaine que mes jambes seraient capables de nous raccompagner jusqu’à la maison ! Ça ira toi ? »

Les jambes de la jeune femme étaient lourdes, et tout son corps encassait la fatigue de cette longue marche. La brunette ressentait de la satisfaction et de l’épuisement. Elle attrapa le téléphone de Caelan et remit une musique entraînante, mais cela ne suffit pas à la tenir éveiller. Bercée par la voiture, Helena finit par fermer les yeux.

« Quand on sera rentrés à l’appart, on regardera nos agendas et on fixera enfin une date. Peut-être qu’après, au moins, tu arrêteras de me chambrer avec ce fameux verre ! A moins que ces taquineries ne soient ma punition à vie pour avoir omis de t’inviter. » Caelan se caressa le menton en réfléchissant pendant qu’un petit sourire amusé apparut aux coins de ses lèvres. « T’as encore un agenda version papier? » Il fouilla rapidement dans les poches de ses shorts pour sortir son téléphone qu’il brandit devant le visage de sa colocataire. « Mon agenda est ici. C’est pratique un téléphone! » C’était facile d’y inscrire ses rendez-vous mais il y avait toujours des détails à rajouter, comme les soirs où il était responsable d’Aidan et Julie, ce qu’il ne savait pas nécessairement une semaine d’avance. L’ambiance changea du tout au tout lorsque Caelan décida de poussa sa colocataire dans l’eau. Une bataille amicale éclata par la suite jusqu’à ce qu’il décide de démontrer son affection à Helena. Mais le garde forestier du parc interrompit ce moment de tendresse en les surprenant. Les deux jeunes gens sortirent de l’eau et décidèrent d’en profiter pour manger pendant que leurs vêtements séchaient un peu. Suite à la proposition d’Helena, ils décidèrent de se préparer à prendre le chemin du retour. La jeune femme se releva et se tourna de dos à lui afin de retirer le chandail qu’il lui avait prêté, avant de lui lancer en plein visage, ce qui le prit par surprise. « C’est comme ça que tu me remercies? » dit-il sur un ton moqueur alors qu’il enfila son chandail, légèrement confus. Helena ne voulait pas qu’il la voit pendant qu’elle se changeait, mais elle avait bien dû se retourner légèrement face à lui afin de lui lancer son chandail en plein visage. Il avait donc eu le temps d’apercevoir ses courbes féminines avant d’être aveuglé par le bout de tissu qui lui avait servi de projectile. Il attrapa ses bas et ses souliers qu’il enfila sans plus attendre. Il approcha ensuite son téléphone de son visage pour vérifier s’il fonctionnait toujours. Il décida de l’éteindre pour qu’il n’y ait pas de court-circuit au contact de l’eau et il souffla dessus un peu avant de le remettre dans son sac.

« Tu crois toujours que mes petites jambes ne supporteront pas la balade et que tu devras me porter ? Je relève le défi ! Allez, tu viens Papy ?» Caelan lui sourit en haussant les épaules. « C’est toi qui le sais. En tout cas, j’espère être autant en forme quand je serai vraiment un papy. » Il comptait faire ce qu’il pouvait afin de rester en forme et pouvoir profiter de la vie le plus longtemps qu’il le pourrait. Il attrapa son sac à dos d’une main et commença à marcher pour la rattraper pendant qu’il le mettait sur son dos. Helena parut soulagée qu’ils arrivent enfin au véhicule. « Pfiou, je suis contente de ne pas avoir le permis, je ne suis pas certaine que mes jambes seraient capables de nous raccompagner jusqu’à la maison ! Ça ira toi ? » Caelan prit place du côté conducteur et lança son sac à dos sur la banquette arrière. « Tu feras quoi si je te dis non? Ce n’est pas comme s’il y avait une solution de rechange. » dit-il d’un air moqueur. Il démarra la voiture avant de la regarder une dernière fois avant d’avancer. « Fatigué mais ça devrait aller. Je suis habitué de faire de longues journées physiques, t’inquiète pas. » Planter des arbres pouvait paraître banale comme boulot, mais c’était très physique.

Tous les deux fatiguées, le trajet se fit majoritairement dans le silence surtout lorsque la jeune femme s’endormit. Caelan baissa un peu le son de la musique pour ne pas la déranger et continua sa route jusqu’à ce qu’une autre voiture sorte de nulle part pour le couper. Afin d’éviter une collision, il freina brusquement en plaçant son bras devant Helena afin qu’elle ne puisse pas être projetée vers l’avant. Il klaxonna l’autre véhicule et se mit à gueuler contre le chauffeur même s’il savait qu’il ne l’entendait pas. Il grogna ensuite et tourna la tête vers Helena. « Ça va? Désolé, y’a ce taré qui ne regarde pas où il va. » dit-il en pointant la voiture devant eux. La main droite sur le volant, il passa sa main gauche dans ses cheveux et soupira pour se calmer. Heureusement, ils étaient à deux minutes de leur appartement lors de cet incident. Caelan stationna la voiture à sa place habituelle, prit son sac, puis sortit de la voiture. Il prit deux secondes pour s’étirer un peu en gémissant. À peine entré dans l’appartement, Caelan laissa son sac à dos contre le mur et retira ses chaussures. « Qu’est-ce que t’avais le goût de faire ce soir? » demanda-t-il en se dirigeant vers la cuisine pour se servir un verre d’eau.

@Helena Horowitz

Caelan n’en loupait décidément pas une pour se moquer de sa colocataire.

« T’as encore un agenda version papier ? Mon agenda est ici. C’est pratique un téléphone ! »

Helena leva les yeux au ciel en souriant.

« Certes, mais c’est un téléphone, pour téléphoner ! Non, sérieusement, je trouve ça tellement plus … je sais pas … convivial, un agenda papier. On peut y noter tellement de choses. Bref, on regardera à l’appart’ ! »

Elle lui tira la langue, enfantine, et continua à avancer.

[…]

Une fois la balade terminée, Helena était exténuée en arrivant à la voiture. Elle avoua à Caelan qu’elle serait incapable, si elle avait le permis, de rouler jusqu’à la maison.

« Tu feras quoi si je dis non ? Ce n’est pas comme s’il y avait une solution de rechange. »

Helena secoua la tête en riant.

« Et pourtant. Je te proposerai une sieste. Ou bien, si tu as besoin d’aide pour rester éveillé, on pourrait mettre la musique à fond. Je chanterai même un peu, si tu veux ! Ou bien on pourrait faire un jeu, comme repérer les voitures immatriculées ici ou là … »

Comme d’habitude, la jeune femme regorgeait d’idées. Son enthousiasme était tel, en toutes circonstances, qu’elle avait toujours des propositions et des solutions à suggérer. Mais Caelan lui assura que ça irait.

« Fatigué mais ça devrait aller. Je suis habitué à faire de longues journées physiques, t’inquiète pas. »

Alors Helena ne s’inquiéta pas, plaçant toute sa confiance en Caelan, et à un moment, arrêta de lutter contre le sommeil qui tentait de l’attirer dans ses bras. Elle s’endormit, vaguement consciente d’être dans une voiture qui passait des musiques qu’elle appréciait.
Elle fut réveillée brutalement par un coup de frein de Caelan, ce dernier utilisant son bras pour la retenir en arrière sur son siège et éviter qu’elle ne soit projetée vers l’avant. La peur tendit son corps tout entier alors que son cerveau analysait la situation.

« Ca va ? Désolé, y’a ce taré qui ne regarde pas où il va. »

Ok. Tout allait bien. Elle tenta de se détendre pendant que Caelan reprenait la route.

« Ca va, et toi ? »

Elle regarda les alentours et constata avec soulagement qu’ils étaient presque arrivés. Le jeune homme se gara devant leur immeuble, alors qu’Helena ressentait une part de culpabilité.

« Mince, je suis désolée. J’ai dormi longtemps ? T’es sûr que ça va ? »

Arrivés à l’appartement, Helena poussa un soupire de soulagement en ôtant ses chaussures. Elle suivit Caelan dans la cuisine et se hissa sur le plan de travail sur lequel elle s’assit. Elle piqua le verre d’eau des mains de son coloc en lui lançant un regard taquin et en avala plusieurs gorgées avant de lui rendre.

« Preums dans la douche ! »

Caelan l’interrogea sur le programme du soir.

« Qu’est-ce que tu avais le goût de faire ce soir ? »

Helena haussa les épaules en réfléchissant. Elle n’y avait pas trop pensé, elle voulait juste passer du temps avec son colocataire, apprendre à le connaître. Ils faisaient tout à l’envers dans leur relation, vivant ensemble et passant la nuit ensemble sans même se connaître. S’ils voulaient que cette colocation fonctionne, ils devaient en apprendre plus sur l’autre. Elle sauta du plan de travail en prenant la direction de la salle-de-bains.

« Télé ? Jeux ? Je dois avoir un ou deux petits jeux. J’ai pas super envie de sortir, je suis fatiguée. Tu peux commander un truc à manger s’il-te-plaît ? Je crève de faim ! »

Helena prit une douche rapide. Elle ressortit de la salle-de-bains en long T-shirt, son pyjama habituel, bleu foncé cette fois-ci, et rejoignit le salon. Son attention fut attirée par un bruit de l’autre côté de la porte d’entrée. La jeune femme se figea immédiatement, écoutant attentivement ce qu’il se passait. Les battements de son cœur s’accélérèrent alors qu’elle repensa à son cambriolage qui avait eu lieu un mois et demi plus tôt. Elle avala difficilement et se rapprocha silencieusement de la porte. Il y avait toujours des bruits qui semblaient venir de derrière la porte. Helena prit son courage à deux mains et ouvrit la porte brusquement. Elle fit sursauter le livreur de pizzas, et sursauta en retour en criant, alors que son cœur tentait de calmer la course folle dans laquelle il s’était lancé.

« Mince, je suis désolée. »

Le livreur sortit une facture de son sac, l’air triomphant.

« C’est moi. J’étais plus sûr du numéro de l’appartement, je cherchais désespérément la facture. Tenez. »

Il lui tendit la facture et les pizzas, prit le paiement et s’en alla.
Le reste de la soirée se déroula sans encombre. Après avoir souhaité bonne nuit à Caelan, la jeune femme rejoignit sa chambre. Malgré la fatigue, le sommeil ne semblait pas décidé à l’accueillir. Elle ralluma la lumière et se mit à lire un roman, mais elle avait sans cesse l’impression d’entendre des bruits étranges. Elle finit par s’endormir mais se réveilla en sursaut. N’y tenant plus, elle prit son oreiller, son bouquin et sa couette, et alla s’installer dans le canapé du salon. Sa nuit sera courte et agitée.