"Happiness is a butterfly, try to catch it like every night, it escapes from my hands into moonlight. Every day is a lullaby I hum it on the phone like every night, and sing it for my babies on the tour life"
Bien que je me sente tout de même moins stressé et moins angoissé, je sais que je ne vais pas passer une bonne nuit. Parce que je n’en reste pas moins inquiet pour ma fille qui a n’a vingt-huit jours et pour qui nous avons dû aller aux urgences. Je l’ai vu, je l’ai senti que quelque chose n’allait pas. Elle pleurait trop, beaucoup trop, et rien de ce que je n’essayais n’arrivait à l’apaiser. Je suis déjà assez inquiet, j’ai toujours peur que quelque chose n’aille pas bien, qu’elles aient mal quelque part, voire même peur de ne pas être à la hauteur, de faire quelque chose de mal. Et au fond je pense que je ne suis pas prêt de ne plus m’inquiéter pour mes filles parce que ce n’est que le début. Elles vont bientôt avoir un mois, leur vie commence à peine. Alors faire dormir Lena avec nous, dans notre lit de manière exceptionnelle ce soir m’a semblé comme étant une évidence et Alex ne semble pas contre cette idée et tant mieux d’ailleurs. « Tu sais tout à l’heure à l’hôpital j’ai réalisé qu’elles ne devraient même pas encore être nées. Si elles sont si petites et si fragiles c’est un peu de ma faute. » De sa faute ? Pourquoi tout ça serait de sa faute ? Parce qu’elle a accouché avant le terme ? Non, c’est ridicule et elle le sait. Quasiment aucune grossesse multiple n’arrive aux neuf mois, on le savait on s’était préparé à l’idée qu’elles puissent arriver plus vite que prévu. Je secoue la tête doucement avant de lui répondre. « Non, c’est pas de ta faute. Pas du tout. » Si elle réfléchit comme ça on pourrait presque me désigner comme étant le coupable. Puisque le gène des jumeaux vient de moi, on le sait très bien puisque des grossesses multiples dans ma famille, il y en a eues. Donc si elle n’est pas arrivée au terme c’est bien parce qu’elles étaient deux, et donc de ma faute. Sauf que ce raisonnement n’est pas vraiment bon et je suis sûr qu’au fond elle le sait. Enfin du moins, je l’espère. Cette conversation pourra éventuellement continuer demain mais en attendant, moi, je suis fatigué, alors je l’embrasse avant de lui souhaiter une bonne nuit. « Bonne nuit cheri, dors un peu, je m’occuperais du biberon de Lena, de toute façon Lucy va me réveiller autant que l’un de nous se repose un peu. » Je ne vois pas en quoi j’aurais gagné le droit de me reposer cette nuit alors qu’elle serait en train de gérer les filles et il est pour moi hors de question d’accepter ça. Comme toutes les nuits, je m’occuperai de Lena et elle de Lucy. « Non c’est bon je m’occuperai d’elle. » J’en ai besoin, j’en ai envie et surtout, c’est comme ça qu’on fait depuis le début et je ne vois pas pourquoi cela changerait. Effectivement, je sais que Lena risque de se réveiller dans environ une demi-heure alors m’endormir pour quelques minutes n’est pas franchement utile et surtout, pas la meilleure des idées. Je n’essaie pas vraiment de m’endormir, je me concentre sur le rythme de la respiration de Lena alors qu’en même temps je repense à toute cette soirée qui avait pourtant si bien commencée et qui normalement aurait dû se terminer encore mieux. J’avais des idées, des plans en tête pour nous mais pourtant rien se s’est déroulé comme prévu comme prévu. Déjà cette photo et ces images que je ne peux m’empêcher de me faire dans ma tête. Cette conclusion que je me suis faite et qui me semble totalement logique : elle préférait que je sois plus grand, plus musclé, mieux foutu. Un peu comme ces mecs qu’elle a été voir. Sauf que je ne serai jamais comme ça. Certainement même en travaillant la musculation plusieurs heures par jour. Je désespère et je finis surtout par me rendre à l’évidence. « Chéri ? Tu dors ? » J’aurais pu lui répondre que non je ne dors pas mais elle ne m’en laisse pas le temps puisqu’elle reprend immédiatement la parole en s’excusant. J’hausse les épaules, comme si elle pouvait le voir. Je soupire un peu. « J’ai tout ce dont j’ai besoin ici avec toi et les filles. La fille sur la photo, elle n’aurait jamais pu apprécier tout ça, elle aurait paniqué, elle aurait sans doute fuit mais je ne suis plus cette fille. » Et si cette phrase est censée pouvoir me rassurer ce n’est pourtant pas l’effet qu’elle a sur moi. Parce qu’une partie de moi ne la croit pas. Je sais qu’elle m’aime, ça je n’en ai aucun doute. Elle peut me dire qu’elle n’est pas intéressée par ce genre de mec que je ne serai jamais, par ces mecs face auxquels je me suis toujours senti vraiment ridicule. Elle peut continuer à me dire ça mais je ne pourrais jamais la croire sur ce point. Parce que sur cette photo on voit très clairement qu’elle aimait ce qu’elle voyait. Et ce n’est pas un mal, en soi. Elle en a tout à fait le droit. Mais ça me montre juste qu’elle est attirée par tout ce que je ne suis pas : grand, musclé, confiant, beau, attirant, et j’en passe. « Parce que je t’assure que ce que l’on a c’est tout ce qui compte à mes yeux maintenant. Toi et nos filles, vous êtes ce que j’ai de plus précieux et désormais je me battrais toujours pour vous. » Je la laisse terminer sur ce point-là et je ne sais même pas quoi lui répondre. Parce que je le sais tout ça. Je sais qu’elle m’aime, qu’elle aime nos filles et la famille qu’on est en train de construire, mais ça ne change rien au fait que je me sente complètement nul et rabaissé ce soir. Mais j’entends ses excuses, je les apprécie et je les accepte. Ça ne me soulage pas. Ça ne me rassure pas non plus mais au moins, elle s’est excusée et c’était pour moi, très important. Bien que ça ne change en rien tout ce que je ressens. « Ok d’accord, j’accepte tes excuses. Merci. » Et c’est tout ce que je lui réponds. Elle m’a fait un long monologue et je suis incapable de lui répondre autre chose. Je ne peux pas lui mentir en lui disant que je me sens mieux puisque ce n’est absolument pas le cas, mais au moins elle s’est excusée et je garde ça en tête. « Bonne nuit chéri, je t’aime. » Mon regard se pose sur l’heure, bientôt une heure du matin et je serais prêt à tout pour pouvoir avoir une nuit de sommeil. Une vraie longue nuit de sommeil mais avec des petites filles de vingt-huit jours, ce n’est clairement pas possible. Cette fois c’est sur Alex que mon attention se pose. « Bonne nuit, je t’aime aussi. » Une nouvelle fois je me penche vers elle pour l’embrasser, un baiser un peu plus long que celui de tout à l’heure mais il reste assez bref et distant. Je fais des efforts pour lui montrer que j’accepte ses excuses mais on peut facilement se rendre compte que je ne suis clairement pas convaincu par le reste de son discours. Je préfère me concentrer sur mes filles, sur Lucy et Lena et tout l’amour que je leur porte.