Itziar avait passé l'après-midi à cuisiner. Ou plutôt elle avait passé l'après-midi à se débattre en cuisine. Vu le chaos et l'état du plan de travail, on pourrait penser qu'elle s'était lancée dans la préparation d'un repas complet avec au moins huit plats. La réalité, elle, en était toute autre. Il n'était même pas question de préparer un repas complet, elle se battait en réalité avec deux plats qu'elle essayait de préparer. Le résultat final ne la satisfaisant toujours pas, elle commençait à douter de son sang espagnol, se demandant si après ce fiasco il serait encore légitime de sa part de se revendiquer fièrement espagnole. Les recettes qu'elle avait entrepris de réaliser étaient pourtant simples. Elle les préparait en général pour elle, lorsque le manque de chez elle commençait à se faire ressentir. Il s'agissait de ses comfort food par excellence et même si elle n'avait jamais été bonne cuisinière, elle se contentait en général de ce qu'elle préparait. Cependant, elle ne cuisinait pas pour elle et elle se mettait donc une pression supplémentaire pour bien faire. Elle cuisinait pour Matthias, pour lui faire découvrir quelques plats typiques de cette partie de lui qu'il découvrait à peine. Alors, elle ne pouvait pas se contenter de bien. Le goût ne pouvait pas seulement être correct, il fallait que ce soit au moins aussi bon que ce qu'avait l'habitude de cuisiner Daniela, son ancienne gouvernante qui préparait 99% des repas qu'elle consommait chez elle. Ce qu'elle avait réussi à faire cet après-midi n'était pas satisfaisant et s'était déjà la troisième tortilla qui finissait dans la poubelle. Pas assez salé, pas assez de pommes de terres, trop d'oignons, le goût n'y était pas et elle ne voulait pas décevoir Matthias. Elle cassait donc ses derniers œufs, priant tous les dieux que ce dernier essai soit le bon. Elle n'avait plus le choix de toute façon puisqu'elle n'avait pas non plus le temps d'aller au supermarché pour en acheter d'autres. C'était tout ou rien et comme ses patatas bravas ne la satisfaisaient pas plus, elle espérait vraiment que ce soit tout.

Puis, comme Itziar restait Itziar, elle avait fini par arriver chez Matthias. En retard, mais elle avait un peu sauvé la mise. Sa tortilla n'était pas la meilleure et ses patatas manquaient clairement de piquant, mais c'était acceptable. Ca, elle pouvait le faire goûter à son demi-frère qu'elle voyait pour la deuxième fois. Elle était encore en train de digérer cette information et avait encore un peu de mal à s'y faire. Ce n'était pas anodin, mais elle avait tout du moins dépassé le stade de la surprise et était contente de pouvoir passer du temps avec lui ce soir. Elle avait pensé à chercher des photos de leur père à différentes époques comme elle lui avait dit lors de leur rencontre. Elle n'en avait pas trouvé autant qu'elle pensait, mais elle en avait quand même une bonne petite collection qu'elle pourra lui montrer ce soir. C'était donc les bras chargés qu'elle était arrivée chez l'australien entre les plats qu'elle avait préparés dans une main et son casque de scooter dans l'autre. Elle se regarde une dernière fois dans le rétroviseur de son scooter avant d'aller sonner à la porte. "Désolée, la ponctualité c'est pas mon fort." Déclare-t-elle en guise d'introduction à peine a-t-il ouvert la porte "Mais j'ai emmené quelques trucs à manger donc je suis pardonnée hein ?" elle plaisante, mais elle lui tend tout de même le sac pour prouver qu'elle est bien venue avec quelque chose pour lui.

Je n’aurais jamais imaginé que ma première rencontre avec Itziar, ma demi-sœur, puisse se passer aussi bien et pourtant cela a été le cas. J’ai appris à la connaître un peu et elle avait voulu en savoir un peu sur moi aussi. Si je m’étais presque attendu à me faire fermer la porte au nez, rien de cela n’est arrivé. Je suis plutôt content que les choses se soient aussi bien passés, même si nous avions encore bien des tonnes de choses à apprendre l’un de l’autre, nous n’avons fait que gratter la surface pour le moment. C’est donc pour cela que je l’ai invité à venir chez moi, que l’on puisse apprendre à se connaître un peu mieux. Pourtant, un côté de moi est nerveux de la voir débarquer chez moi, de la revoir à nouveau. J’ai presque l’impression que jusqu’à maintenant les choses se sont trop bien passés pour que ca soit vrai. Je n’ai jamais eu de chance lorsqu’il s’agit de la famille, pas avec ma grand-mère et ma tante qui sont décédées, et encore moins avec ma mère ingrate. J’ai encore du mal à me faire à l’idée qu’elle m’a menti sur mon père. Je n’ai pas vraiment été surpris bien sûr, mais j’ai du mal à me faire à l’idée qu’il ne soit même pas au courant de mon existence. Je ne sais d’ailleurs toujours pas si un jour je devrais lui dire que j’existe, peut-être qu’il est mieux à ne pas me connaître.

Je suis tiré de mes pensées lorsque la sonnette de la porte d’entrée retentit, faisant se relever immédiatement ma chienne allongée à côté de moi et me faisant sursauter. Je vais rapidement ouvrir la porte et adresse un sourire à la blonde qui se tient devant moi. "Désolée, la ponctualité c'est pas mon fort." Je ne peux m’empêcher de rire un peu, surtout en voyant qu’elle est chargée comme un âne. "T’en fait pas pour ca va." Je ne suis pas non plus le plus ponctuel des mecs en règle général. "Mais j'ai emmené quelques trucs à manger donc je suis pardonnée hein ?" Je ris à nouveau un peu. "Toute pardonnée. Viens entre. Laisse-moi t’aider." Je viens prendre quelques trucs qu’elle porte dans les bras, et cela sent divinement bon. "Nanka pousse toi." Que je dis à ma chienne qui, bien sûr, se trouve rapidement dans nos pieds pour accueillir Itziar comme si c’était sa meilleure amie. "Je sais pas ce que tu préparé, mais ca sent divinement bon en tout cas." Je lui dis en déposant ce que j’ai dans les bras sur l’îlot de ma cuisine.

Personne qui connaît Itziar n'est étonné quand elle n'arrive pas à l'heure à un évènement. Bien au contraire, certains se plaisent même à lui indiquer une heure presque aléatoire pour s'assurer qu'elle sera là quand la fête commencera. C'était un défaut qu'elle avait. Elle en était consciente, mais elle n'arrivait pas à y faire quoi que ce soit. Ce n'était pas faute d'essayer pourtant. Elle commençait à se préparer plus tôt que prévu, elle limitait les choses qu'elle avait à faire avant de partir, mettait des alarmes et pourtant, rien n'y faisait. Il n'y avait que pour son travail et ses cours à l'université qu'elle arrivait à être à l'heure et encore, il lui arrivait d'être en retard pour ses cours de temps en temps. Le jeune espagnole faisait de son mieux, mais n'avait pas encore trouvé ce qui pourrait fonctionner pour elle. Matthias se rendrait compte bien rapidement que ce n'était pas l'histoire d'une seule fois. C'était tout le temps, pour quasiment tout et c'était une de ces choses qui pouvaient la rendre agaçante. Pour l'heure, il le prenait bien. Il ne la connaissait pas encore vraiment, le but étant de tisser des liens, il ne pouvait être que conciliant surtout quand elle lui offrait ses plus beaux yeux de chien battu et un sac rempli de spécialités espagnoles préparées avec amour. "On verra si tu réagis toujours pareil dans quelque temps quand j'aurai été en retard à plus de 99% des trucs qu'on organise ensemble." Lui répond-elle en riant. Parce qu'elle savait que ce n'était pas quelque chose de très appréciable. Elle-même n'avait que peu de patience pour les gens qui n'étaient pas à l'heure. Personnification même de l'hôpital qui se fout de la charité. Elle était sympa comme fille, mais elle n'était jamais à l'heure. Il y avait toujours un mais, de toute façon et c'était ça le sien. "Toute pardonnée ? Carrément ? Attends peut-être de manger ce que j'ai préparé avant de décider." Elle rit en entrant dans la maison de Matthias. Elle ne sait pas si lui est un bon cuisinier, ils n'en ont pas parlé la dernière fois. Ni elle, ni lui n'ayant évoqué ce centre d'intérêt. Peut-être était-il comme elle, préférant déguster plutôt que s'atteler à la préparation. Dans ce cas, il sera sans doute un peu plus clément face à ses talents quasiment inexistants.

Il lui prend le sac de nourriture qu'elle a dans les bras et elle est immédiatement accueillie par Nanka qu'elle avait vu en photo la dernière fois. La chienne est encore plus adorable en vrai. Elle vient lui faire la fête comme si elle la connaissait déjà et attendait son retour depuis longtemps. Ça la fait rire d'ailleurs. "T'inquiètes pas, ça ne me gène pas." Lance-t-elle avant de s'accroupir pour se mettre au niveau de la chienne et la caresser derrière les oreilles. "Je pense qu'elle doit sentir Byron aussi, c'est le chien de ma coloc', un berger australien. Il est adorable." Elle adorait l'avoir au loft et pour elle c'était quasiment un membre à part entière de la colocation qu'elle formait avec Louisa et Anastasia. "Et ton chat ? Il est plutôt du genre à se cacher c'est ça ?" demande-t-elle en se redressant, le husky toujours dans les pattes "Tu crois qu'elle va me laisser repartir ?" demande-t-elle en plaisantant. Un berger australien et un husky en plus d'elle et ses deux colocataires, ça faisait peut-être un peu beaucoup pour loft d'Auden, aussi spacieux soit il. "Alors, c'est une tortilla de patatas et des patatas bravas. Très simple comme plats, mais c'est vraiment typique, en plus d'être vraiment au maximum de mes capacités culinaires." Lui répond-elle, l'ayant suivi dans la cuisine. "Ça ne vaut pas les préparations de quelqu'un qui sait cuisiner, mais c'est pas trop mal. T'avais déjà goûté avant ?" Elle ne sait pas trop ce qu'il connaît de la culture espagnole en son ensemble, peut-être aurait-elle dû lui demander la dernière fois, histoire d'être sûre de lui présenter des choses qu'il ne connaissait pas déjà.

"On verra si tu réagis toujours pareil dans quelque temps quand j'aurai été en retard à plus de 99% des trucs qu'on organise ensemble." Je ne peux m’empêcher de rire un peu en entendant ma demi-sœur me dire cela, mais il faut bien avouer que je ne suis pas non plus la personne la plus ponctuel qui soit. Je pense toujours avoir le temps de faire trente six mille choses avant de devoir partir et au final, je me retrouve à être en retard à mon rendez-vous. Heureusement, avec les années et mon métier cela c’est un peu arrangé et ca arrive moins souvent, mais lorsque je sors avec des amis, il arrive bien souvent que j’ai dix à quinze minutes de retards et cela ne surprend plus grand monde. "C’est peut être une bonne chose que je sois pas la personne le plus ponctuel non plus alors." Je lui réponds alors qu’elle me tend ce qu’elle a amené pour se faire pardonner. M’acheter avec de la bouffe faites maison, ca marche toujours ce genre de chose. "Toute pardonnée ? Carrément ? Attends peut-être de manger ce que j'ai préparé avant de décider." Je ris un peu. "Crois moi, ca ne peut pas être pire que moi. Ne me mets jamais aux fourneaux." Que je lui réponds en venant la débarrasser un peu.

Bien sûr, nous sommes à peine rentrés dans le salon que Nanka débarque et vient faire la fête à Itziar. Si jamais j’étais un mauvais hôte, je suis sûr que je peux compter sur ma chienne pour arranger les choses à ma place. "T'inquiètes pas, ça ne me gène pas." Je lui souris et vais déposer tout ce qu’elle a apporte dans la cuisine. J’ai le nez au-dessus et je dois bien avouer que cela sent divinement bon et que ca me donne tout de suite faim. "Je pense qu'elle doit sentir Byron aussi, c'est le chien de ma coloc', un berger australien. Il est adorable. "Et ton chat ? Il est plutôt du genre à se cacher c'est ça ?" "Oui, Arlo est plutôt timide comparé à cette boule de fluff." Je lui réponds en montrant Nanka du doigt. Elle me jette d’ailleurs un regard rapide, mais reporte bien vite son attention vers Itziar qui n’a pas l’air déranger le moindre du monde. "Tu crois qu'elle va me laisser repartir ?" "Ca c’est pas sur parce qu’elle a l’air de bien t’aimer." Je lui réponds avec un léger rire.

"Alors, c'est une tortilla de patatas et des patatas bravas. Très simple comme plats, mais c'est vraiment typique, en plus d'être vraiment au maximum de mes capacités culinaires." J’hoche la tête sortant les plats du sachet qu’elle a amené. "Ça ne vaut pas les préparations de quelqu'un qui sait cuisiner, mais c'est pas trop mal. T'avais déjà goûté avant ?" Je secoue la tête. "Non, jamais. Mais en tout cas j’ai hâte de gouter parce que ca sent super bon." Je lui avoue de sortir des assiettes et des couverts. "Par contre, ce que je sais faire et que j’ai fait au vue des gouts du repas de ce soir, c’est de la sangria. Alors j’espère que t’aimes ca." Je lui annonce en sortant deux verres. Je vais attraper le pichet dans le frigo et remplis les verres. "J’espère que c’est la vraie recette espagnole au moins, tu me diras." Je lui donne le verre avec un sourire sur les lèvres.

Il lui dit qu'il n'est pas la personne la plus ponctuelle non plus et ça la fait sourire. "Tu crois que c'est génétique ou un truc comme ça ?" lui demande-t-elle en plaisantant. Ca lui parait gros, mais bon, elle n'était plus à une découverte étonnante près, alors, elle se dit que tout est possible. Elle ne s'était jamais posée la question à ce sujet. Elle n'avait jamais été très ponctuelle. Ses parents non plus d'ailleurs, mais elle avait toujours mis ça sur le compte de plusieurs choses. Pour sa mère, c'était parce qu'elle prenait toujours beaucoup de temps pour se préparer, passait son temps dans la salle de bain à se coiffer, se maquiller, puis retoucher tout ce qu'elle venait de faire si elle ne changeait pas de tenues trois fois de suite parce qu'elle n'était pas entièrement satisfaite. Pour son père, c'était parce qu'il était toujours en train de travailler. Finalement, même lorsqu'il rentrait le soir, sa journée de travail ne s'arrêtait jamais vraiment. Il y avait toujours des mails, toujours des appels et autres textos auxquels il devait répondre alors qu'ils étaient prêts à monter dans la voiture pour quitter la maison. Avec de tels exemples, il n'était donc pas compliqué d'imaginer qu'Itziar ait suivi la même voie. Sa norme était celle-ci, elle ne connaissait rien d'autre et c'était la vingtaine bien entamée qu'elle essayait de se refaire. Peut-être que le problème était ailleurs finalement. Peut-être qu'il y avait une explication scientifique et qu'elle n'y pouvait rien. Ca pourrait être sa nouvelle excuse toute choisie, une excuse aussi pour ne pas faire d'effort. Si Matthias non plus n'était pas à l'heure, alors, c'était forcément lié, non ? Ce n'était pas vraiment convaincant comme explication. Il fallait bien le reconnaître, mais depuis le temps qu'elle avait pris cette mauvaise habitude d'être en retard tout le temps, elle avait aussi pris l'habitude d'amener des offrandes, pour faire oublier son retard. Elle avait déjà prévu d'emmener des spécialités espagnoles à Matthias, mais ça lui servait aussi d'offrande, c'était deux en un. "Toi non plus tu sais pas cuisiner ? Attends là ça commence à nous faire vraiment beaucoup de points communs, mais rassure moi, tu comptais pas seulement sur mes plats pour nous nourrir ce soir hein ?" Parce que non seulement, ça ne ferait pas lourd, mais en plus, il y avait toujours ce risque que ce ne soit pas très bon. Il était prévenu cela dit.

Elle se débarrasse bien vite de son sac, le laisse à Matthias. Elle fait presque comme chez elle. Accueillie en grandes pompes par Nanka, le Husky comme si elle avait toujours fait partie de la famille. Certains seraient peut-être un peu décontenancés par tant d'affection, mais pas Itziar. Itziar, elle aime les animaux, elle aurait plutôt été du genre à bouder si la chienne l'avait fuie. Elle se serait demandée ce qu'elle avait fait de mal ou quelle odeur aurait bien pu la déranger. Elle était comme un poisson dans l'eau et n'a pas non plus oublié que Matthias avait aussi un adorable chat qui pour le moment semblait se cacher. "C'est propre aux chats je crois ça, ils se font plus prier que les chiens." Répond-elle en souriant, laissant Nanka lui renifler la main avant de la gratter derrière les oreilles. "On va avoir un problème alors, soit je vais devoir emménager chez toi, soit je vais devoir la kidnapper. Je te laisse choisir ce que tu préfères." Ajoute-t-elle en souriant avant de regarder leachienne "T'en penses quoi toi ?" lance-t-elle, comme si elle allait avoir une autre réponse qu'un coup de langue sur la main. Elle se redresse ensuite, non sans déposer une énième caresse sur la tête de Nanka puis elle explique à son demi-frère ce qu'elle a préparé, précisant quand même, une fois de plus, qu'il ne faut pas s'attendre à du grand art. Ca n'a pas été préparé par un grand chef, mais bien par elle seule, Itziar, la fille qui n'avait jamais fait cuire ne serait-ce qu'un seul plat de pâtes avant l'âge de vingt-trois ans. Ça en disait long, mais il avait l'air plutôt optimiste et ça, c'était l'essentiel. "J'espère que ça te plaira et si c'est le cas, on pourra envisager de s'essayer à d'autres plats, voir ce que ça peut donner." Répond-elle en haussant les épaules. Il fallait bien qu'il découvre les spécialités et il fallait aussi qu'il partage le fardeau qu'était celui de les cuisiner avant de pouvoir les déguster. "De la sangria ... Ah ..." commence-t-elle, prenant soudain un air sérieux, presque désolé, comme si elle ne savait pas comment elle pouvait lui annoncer la nouvelle "... Bien sûr que j'aime ça. J'ai aussi la fâcheuse tendance d'en boire beaucoup trop, donc, t'es prévenu." Continue-t-elle en riant cette fois-ci avant qu'il ne vienne déposer deux verres sur la table et sorte le pichet de sangria du réfrigérateur pour les servir. "Du moment que t'as pas oublié de mettre du vin, je pense que t'es bon sur la recette. Après, chacun à sa petite variante, donc je dirais qu'il n'y a pas une seule recette universelle." Elle hoche les épaules, elle ne connaissait même pas la recette de toute façon. "On trinque ?" propose-t-elle en levant son verre "A ton premier repas espagnol ?" C'était simple, mais fallait-il réellement une raison pour trinquer ?

J’ai encore un peu du mal à croire au fait que je puisse avoir une sœur, même si l’idée est très plaisante et qu’apprendre à connaître Itziar est vraiment quelque chose de plaisant. Plus j’en apprends sur elle, plus j’apprends à la découvrir et plus je me dis qu’il n’y a aucune raison que nous ne nous entendions pas. Elle a l’air plutôt simple, sans prise de tête, du genre à toujours avoir le sourire et c’est vraiment agréable. "Tu crois que c'est génétique ou un truc comme ça ?" "Aucune idée." Je ne pense pas que le fait d’être ponctuel puisse être génétique, mais on ne sait jamais après tout. Nous avons pas mal de point commun avec la blonde et chaque fois que nous nous en découvrons un nouveau, je me demande si cela nous vient de notre père. En découvrant ma demi-sœur, je ne cesse également de me répéter qu’il semble impossible que notre père soit aussi horrible que ma mère me l’a toujours dit. Je me dis que j’aurais dû chercher à en savoir plus plus tôt, pour apprendre le connaître, mais on ne peut pas revenir en arrière. Au moins j’apprendre aujourd’hui à connaître ce côté-là de ma famille. Je récupère alors les plats qu’Itziar a apporter, des spécialités espagnol, et lui annonce que ca sent vraiment bon. Si elle semble plus douée en cuisine que moi ; j’ai tendance à tout faire cramer ; il semblerait que ce ne soit cependant pas son fort. "Toi non plus tu sais pas cuisiner ? Attends là ça commence à nous faire vraiment beaucoup de points communs, mais rassure moi, tu comptais pas seulement sur mes plats pour nous nourrir ce soir hein ?" Je ris un peu en relevant la tête vers elle. "Promis je le fais pas exprès mais… Crois moi, il ne faut pas me mettre au fourneaux." En même temps, j’ai grandit avec une mère qui m’a nourrir exclusivement de pates, de riz ou d’omelettes. Je grimace un peu et regarde à nouveau ma demi-sœur. "Eh bien si, je comptais quand même sur toi pour nous nourrir."*

"C'est propre aux chats je crois ça, ils se font plus prier que les chiens." Me répond la blonde alors que je lui dis qu’Arlo, mon chat, est bien plus timide que ma chienne qui ne cesse de réclamer des câlins. Je déposer tous les plats dans la cuisine. "On va avoir un problème alors, soit je vais devoir emménager chez toi, soit je vais devoir la kidnapper. Je te laisse choisir ce que tu préfères. T'en penses quoi toi ?" Je ris un peu en déballant les plats et sortant des assiettes et des verres. "Malheureusement pour toi, je crois que la deuxième option est impossible. Mais j’ai toujours de la place ici si besoin." Je lui réponds en lui offrant un sourire. La maison que j’ai achetée il y a quatre ans est plutôt grande et j’ai bien assez de chambres pour qu’Itziar vienne squatter si il y en a besoin. Cela ne me dérangerait d’ailleurs pas du tout. Je la laisse me parler de ce qu’elle a cuisiner, ne pouvant m’empêcher de venir sentir les plats avant de lui annoncer que la seule chose que j’ai faites, c’est de préparer de la sangria. "De la sangria... Ah... Bien sûr que j'aime ça. J'ai aussi la fâcheuse tendance d'en boire beaucoup trop, donc, t'es prévenu." Je ris à nouveau un peu. "T’en fais pas, comme je t’ai dit, si jamais j’ai largement de quoi pour dormir ici." Il se peut qu’on picole quand même un peu beaucoup ce soir avec ce que j’ai fait. Je nous sers d’ailleurs deux verres. "Du moment que t'as pas oublié de mettre du vin, je pense que t'es bon sur la recette. Après, chacun à sa petite variante, donc je dirais qu'il n'y a pas une seule recette universelle." "Promis, le vin est dedans." Je lui offre un sourire et lui tend son verre plein avant de prendre la mien. "On trinque ? A ton premier repas espagnol ?" Je viens faire tinter mon verre avec le sien. "Ca me parait bien. A mon premier repas espagnol alors." Je souris et viens boire une gorgée de mon verre. "Sers toi hein, fais comme chez toi."

Elle apprend qu'il n'est pas bon en cuisine. Lui non plus. Voilà ce qu'elle se dit et pour le coup, elle sait que ça n'a probablement rien de génétique. Il a été élevé par sa grand-mère comme il lui avait expliqué la première fois qu'ils s'étaient vus, il avait donc eu quelqu'un pour lui préparer de bons petits plats. Elle, elle avait grandi avec une gouvernante à demeure qui s'occupait de tout dans la maison. Sa mère ne cuisinait pas et n'avait jugé bon de lui apprendre à ne serait-ce que cuire des pâtes. Itziar avait rarement mis les pieds dans la cuisine chez elle, à Madrid, si ce n'était pour aller ouvrir le réfrigérateur pour se servir ou pour s'asseoir sur l'un des tabourets de l'îlot central, attendant patiemment qu'on lui prépare le plat de son choix. Ca ne l'avait jamais choquée, pour elle ça avait toujours été normal, puis elle avait fini par se rendre compte que ça lui avait desservi, énormément, lorsqu'elle était arrivée à Brisbane et avait dû tout apprendre toute seule, aussi vite que possible. Elle n'était pas devenue un cordon bleu, loin de là et elle n'appréciait pas particulièrement cuisiner, mais elle pouvait au moins faire en sorte de ne pas mourir de faim, ce qui était un bon début. "Maintenant tu me rends curieuse, j'veux te voir derrière les fourneaux pour voir ce qui se passera et surtout pour voir si t'es pire que moi." Déclare-t-elle en souriant, avant de se rendre compte que cela voulait aussi dire qu'il n'avait peut-être rien prévu pour le repas et avait tout misé sur ce que la jeune espagnole allait préparer. La réponse fut sans appel et elle regretta presque de ne pas avoir tenté de faire plus, voire même de préparer de biens meilleurs plats. Elle n'était pas du genre pessimiste, au contraire, mais elle était plus que réaliste quand il s'agissait de ses compétences culinaires. D'autant plus quand elle avait passé l'après-midi en cuisine et qu'elle avait eu l'occasion de goûter ce qu'elle lui apportait ce soir. "Ah ... Tu vas vite comprendre que c'était une erreur de ta part. Même si c'est mangeable je crois qu'il faudra peut-être commander une pizza ou quelque chose comme ça." lui répond-elle en riant. Si le jeune homme n'avait pas encore compris qu'elle avait été élevée comme une petite princesse, il n'allait cependant pas mettre bien longtemps avant de mesurer l'ampleur des dégâts qu'elle s'efforce non sans mal de réparer, les uns après les autres.

Elle le regarde déballer les plats qu'elle a préparés, il sort des assiettes et des verres aussi. La discussion est légère, elle n'a pas l'impression de parler avec un parfait inconnu ce qui la surprend. Elle a toujours été sociable, mais elle peut toujours remarquer une différence dans sa manière d'interagir avec les gens qu'elle ne connaît pas. Avec Matthias, il n'y a pas de ça et ça lui plait. C'était comme si, inconsciemment, ils se connaissaient, d'une manière ou d'une autre, parce qu'ils partagent le même sang. Elle plaisante, propose de kidnapper son chien, ou à défaut, de squatter chez lui pour satisfaire le husky. "Tu sais que c'est dangereux de me proposer ce genre de truc parce qu'une fois que c'est dit, je peux débarquer à tout moment avec toutes mes affaires et complètement envahir l'espace. En vrai, t'aurais mieux fait de dire que je pouvais kidnapper Nanka." Lance-t-elle en souriant. Elle ne s'installerait probablement pas dans un futur proche, parce qu'elle était bien au loft, elle s'y sentait chez elle et puis, le loyer était dérisoire, elle n'avait pas à se plaindre là-dessus. Si elle vivait dans un taudis qu'elle payerait bien trop cher, elle aurait sans doute demandé s'il pensait vraiment ce qu'il disait, mais pour l'heure, il n'était pas question de ça. "Non t'inquiètes, je vais quand même pas t'envahir dès la deuxième fois qu'on se voit ... j'attendrai la prochaine. Si j'bois trop, tu peux toujours me mettre dans un taxi, j'ai l'habitude." Lui répond-elle. Elle ne comptait plus le nombre de fois où elle s'était rendue à une soirée avec son scooter et était repartie en taxi, parce que bien trop alcoolisée pour reprendre le volant. Elle n'était pas à une fois près et finissait toujours par retrouver son scooter bien garé le lendemain matin. "Si le vin est dedans, dans ce cas, ¡Salud! comme on dit chez moi." Lance-t-elle, avant de boire une gorgée de son verre, trinquant au premier repas espagnol de Matthias. "Non non, vas-y, à toi l'honneur. Je sais déjà quel goût ça a." Déclare-t-elle avant de commencer à couper la tortilla en petits cubes, en posant un dans l'assiette en face du jeune homme. "Ca, c'est très simple, c'est une omelette à l'espagnole pour te la faire courte. Des œufs, beaucoup de patates et beaucoup d'oignons." Elle boit une nouvelle gorgée de sa sangria, regardant Matthias avec attention, attendant son avis. "Ta sangria est parfaite, j'pense qu'on va vite la finir." Quand il s'agissait de boisson, elle n'était pas bien difficile Itziar. Elle devient un peu plus sérieuse la seconde d'après, pas vraiment sûre de comment aborder sa question, ni même si c'était le bon moment. "Sinon, je voulais te demander ..." commence-t-elle, se servant à son tour un morceau de tortilla "J'avais envie de parler de toi à ma mère, mais je sais pas trop comment tu te sentirais face à ça, surtout que notre père n'est pas au courant enfin, je sais pas, c'est peut-être pas terrible de lui en parler avant lui, mais je lui parle tout le temps à ma mère et j'ai peur de faire une gaffe à un moment." Et puis surtout, elle avait envie de lui parler de ça, parce qu'elles étaient proches et qu'elles se disaient tout. Itziar avait en quelque sorte l'impression de lui mentir et elle n'aimait pas ça.

Cuisiner ce n’est pas mon fort, pas du tout même. Si j’ai grandi avec ma grand-mère qui adorait passer des heures et des heures en cuisine pour me préparer les meilleurs plats du monde, je n’ai jamais été comme cela. Cela ne me dérange pas d’essayer, mais il y a toujours quelque chose qui ne va pas, soit c’est trop salé, trop sucré, ou alors c’est trop cuit, ou bien les gâteaux ne montent pas comme il le faut. Il faut aussi bien avouer que depuis que j’ai commencé dans la vie active, je n’ai jamais non plus trop eu le temps d’apprendre à cuisiner et que de commander des plats est devenu plus simple. Je suis donc plutôt devenu un pro des livraisons qu’un pro de la cuisine. Je suis pourtant bien content qu’Itziar ai débarqué avec un repas espagnol à me faire découvrir. "Maintenant tu me rends curieuse, j'veux te voir derrière les fourneaux pour voir ce qui se passera et surtout pour voir si t'es pire que moi." Je laisse échapper un rire en regardant ma demi-sœur. Il faut croire qu’elle a envie de tenter l’expérience de mourir empoisonné. Heureusement que je suis plus doué pour faire des mélanges de boissons et de cocktails. "Tu sais, si t’as des envies de mourir, je pense qu’il y a des méthodes moi douloureuses que de finir empoisonner parce que ton demi-frère à tenter de te faire à manger." Cela me fait encore bizarre de prononcer le mot demi-frère. Je me suis rapidement habitué à l’idée de savoir ou vit mon père, mais l’idée d’avoir une demi-sœur me parait encore bizarre et presque improbable. "Ah ... Tu vas vite comprendre que c'était une erreur de ta part. Même si c'est mangeable je crois qu'il faudra peut-être commander une pizza ou quelque chose comme ça." "On verra ca quand on aura mangé ce que tu as amené déjà. Puis je suis sûr que c’est super bon."

Nanka trainant avec nous dans la cuisine, nous en venons forcément à parler de ma boule de poil. Si visiblement Itziar n’a aucun problème avec les animaux, elle a même plutôt l’air du genre à beaucoup les aimer, ce qu’elle me fait d’ailleurs comprendre en m’annonçant qu’elle allait kidnapper ma chienne ou d’emménager chez moi. "Tu sais que c'est dangereux de me proposer ce genre de truc parce qu'une fois que c'est dit, je peux débarquer à tout moment avec toutes mes affaires et complètement envahir l'espace. En vrai, t'aurais mieux fait de dire que je pouvais kidnapper Nanka." Je ris un peu. "Ma porte est toujours ouverte et puis ca me dérangerais vraiment pas que tu viennes squatter." Je n’ai jamais été difficile à vivre et du moment que personne ne touche à mon studio de montage, le reste de la maison n’est pas un problème. Je me dis même que l’idée de vivre avec Itziar pourrait être intéressante. "Non t'inquiètes, je vais quand même pas t'envahir dès la deuxième fois qu'on se voit ... j'attendrai la prochaine. Si j'bois trop, tu peux toujours me mettre dans un taxi, j'ai l'habitude." Je ris à nouveau un peu. "Je préfère garder un œil sur les gens qui picolent trop quand ils sont chez moi." Je lui fais un clin d’œil avant de lui redire une nouvelle fois. "Mais vraiment, ma porte est toujours ouverte si tu as besoin de quoi que ce soit." Je lui offre un sourire alors que je sors de quoi manger mais surtout de quoi boire et que je nous sers deux verres de sangria. "Si le vin est dedans, dans ce cas, ¡Salud! comme on dit chez moi." "Salud !" Je prends une gorgée de la boisson alors que la blonde coupe la tortilla. "Non non, vas-y, à toi l'honneur. Je sais déjà quel goût ça a." Je ne me fais pas prier et viens prendre un bout du plat qu’elle a cuisine et le met dans ma bouche. Ce n’est vraiment pas mauvais. "Ca, c'est très simple, c'est une omelette à l'Espagnole pour te la faire courte. Des œufs, beaucoup de patates et beaucoup d'oignons. Ta sangria est parfaite, j'pense qu'on va vite la finir." "Et ta tortilla est super bonne. Ca va très bien ensemble. Merci." Je lui adresse un sourire et reprends un bout de l’omelette.

"Sinon, je voulais te demander ..." Je relève la tête vers elle alors qu’elle semble prendre un air sérieux tout d’un coup. "J'avais envie de parler de toi à ma mère, mais je sais pas trop comment tu te sentirais face à ça, surtout que notre père n'est pas au courant enfin, je sais pas, c'est peut-être pas terrible de lui en parler avant lui, mais je lui parle tout le temps à ma mère et j'ai peur de faire une gaffe à un moment." Je dois avouer que jamais ca ne me serrais venu à l’idée de parler de tout cela à ma mère, sûrement parce que je ne suis absolument pas proche d’elle et du coup l’idée ne m’est pas venu à l’esprit qu’Itziar puisse être proche de la sienne. "Oh euh…" Je la regarde. "Ca ne me derange pas, que tu lui dises. Mais ca ne risque pas de… Créer des soucis dans ta famille." C’est la dernière chose que je veux faire.

Ca lui fait chaud au cœur d'entendre Matthias lui dire qu'elle peut squatter chez lui quand elle veut. Ils ont beau être liés, il ne la connait pas vraiment et inversement. Quelques mois en arrière, elle ignorait tout de lui, à commencer par son existence. Elle n'attendait donc pas qu'ils lient un lien indestructible en un temps record. C'était impossible. Ils n'allaient peut-être pas nouer une relation fraternelle en quelques semaines, ça ne se forçait pas ce genre de choses, mais ils faisaient connaissance. A leur rythme. Elle n'attendait rien de lui, c'était seulement un plus dans sa vie, une pièce rapportée qu'elle prenait comme elle venait. Parce que c'était la seule chose à faire. Ils ne pouvaient pas rattraper vingt-six années sans avoir eu vent de l'existence l'un de l'autre. Ils ne pouvaient pas se créer de souvenirs d'enfance qui n'existaient pas. Ils pouvaient simplement se créer leurs propres souvenirs, à partir de maintenant. C'était déjà pas mal et elle était contente de pouvoir partager ça avec lui. Elle avait grandi comme fille unique, ne se rappelant pas vraiment d'une époque où elle aurait aimé avoir quelqu'un d'autre avec elle, mais finalement à vingt-six ans, elle était contente de se trouver un demi-frère, plus âgé. La perspective que quelqu'un puisse veiller sur elle, ici en Australie où même si elle s'était fait sa place, elle ressentait parfois un peu le mal du pays. Elle n'était plus seule, sans aucune famille. Elle avait Matthias et elle ne comptait pas le lâcher de si tôt. "C'est gentil de proposer en tout cas, sache que c'est pas tombé dans l'oreille d'une sourde." lui répond-elle en souriant. Elle n'était pas spécialement du genre à s'imposer, mais quand on l'y invitait, elle avait tendance à ne pas trop se gêner. Il le découvrirait sans doute bien assez tôt de toute façon. "Est-ce que tu leur tiens les cheveux quand ils ont la tête au-dessus de la cuvette des toilettes aussi ? Parce que je ne suis jamais à l'abri d'un verre de trop." Qu'elle déclare ensuite en plaisantant, même si, il y avait tout de même une part de vrai là-dedans. Elle ne finissait pas dans des états déplorables à chaque fois qu'elle commençait à boire, mais ça lui arrivait. Au moins une fois de temps en temps. Parce qu'elle était humaine et que parfois, elle faisait des erreurs, buvant le verre de trop ou le mélange de trop. Elle était du genre à refaire les mêmes erreurs en boucle. C'était son problème. D'ailleurs, pour bien démontrer ses propos et lui offrir un aperçu de sa descente, elle lance le toast avant de porter le verre de Sangria à ses lèvres. Elle invite ensuite Matthias à goûter la tortilla attendant son verdict presque nerveusement. Il trouve ça bon et ça la fait sourire. Elle sait qu'il y a mieux, mais elle sait aussi que ce qu'elle lui sert là reflète assez bien l'idée du plat. Ça lui fait plaisir qu'il complimente sa cuisine aussi, il faut bien l'avouer, même si elle sait qu'elle est loin d'être une référence en la matière. "On peut trouver bien mieux, mais sur le coup, j'avais que ma propre personne pour préparer ça. Faudra que je me renseigne, il y a peut-être un restaurant espagnol dans le coin. Sinon, faudra que tu planifies un voyage, tout simplement." Lui lance-t-elle en souriant. A un moment donné, elle se disait que ça aurait sûrement un sens pour lui de visiter l'Espagne, histoire d'en apprendre un peu plus sur là d'où il vient. Pas dans l'immédiat, sans doute, mais dans un futur plus ou moins proche.

Elle lui parle de sa mère ensuite. Elle devient plus sérieuse, parce que même si elle a tendance à plaisanter plus qu'autre chose, elle sait faire la part des choses. Elle sait quand la situation ne se prête pas à la plaisanterie. Elle lui parle de sa mère parce qu'elle a du mal à lui parler de sa vie sans parler de lui ces derniers temps et qu'elle a l'impression de mentir à celle qui l'a mise au monde. Chose qu'elle n'a pas l'habitude de faire. Elle partage tout avec sa mère. Autant les bonnes que les mauvaises choses. Il n'y a pas de secret, pas de tabous. Elle a toujours pu parler de tout avec Pilar et même si elle a fui l'Espagne pour s'expatrier à des milliers de kilomètres d'elle, ça n'a rien changé à leur relation. Elles s'appellent quasiment tous les jours et sont constamment en train de s'échanger des sms. La seule différence étant qu'elles ne se voient qu'à travers un écran. Itziar aimerait donc lui parler de Matthias, elle se dit que ça la concerne aussi dans un sens puisque cela concerne son mari. Cependant, elle veut l'avis de Matthias, parce que c'est lui le principal intéressé, que ça le concerne directement et qu'elle ne veut pas le mettre dans l'embarras d'une quelconque façon. Elle hausse les épaules à la réponse du jeune homme. Elle ne sait pas justement. "Ben ... C'est pour ça. Je la connais ma mère." Les chiens ne faisaient pas des chats et si Itziar en faisait des caisses pour pas grand-chose ça ne sortait pas de nulle part. "Après, quand t'y penses, ça ne lui change pas grand-chose. J'veux dire, mon père ne l'a pas trompée. Il l'a rencontrée en 1990, il la connaissait même pas quand t'es né." Elle découvrirait juste que son mari avait un fils dont il ignorait l'existence. Ca semblait si simple, mais en même temps si compliqué. "Ce qui m'inquiète c'est que j'ai peur que ça crée des problèmes avec papa, parce que lui il est pas au courant et que je sais pas si c'est correct de l'informer elle, avant lui." Dit elle ensuite, faisant appel à la sagesse et la maturité de Matthias pour l'aider à y voir plus clair.

"C'est gentil de proposer en tout cas, sache que c'est pas tombé dans l'oreille d'une sourde." Je lui adresse un sourire. Je n’ai jamais été chiant pour ca, bien au contraire, j’aime accueillir des gens, j’aime pouvoir dépanner quand il y en a besoin et même si cela fait des années que j’ai pris l’habitude de vivre seul et que j’aime avoir ma solitude de temps en temps, je suis toujours là pour prêter un coup de main. "D’ailleurs, si jamais t’as besoin de quoi que ce soit d’autre, t’as mon numéro il faut surtout pas que tu hésites, peu importe l’heure." J’ajoute pour lui faire comprendre que quand quelqu’un rentre dans ma vie, en général je ne les laisse pas tomber. "Est-ce que tu leur tiens les cheveux quand ils ont la tête au-dessus de la cuvette des toilettes aussi ? Parce que je ne suis jamais à l'abri d'un verre de trop." Sa remarque me fait rire légèrement. "Disons que ca dépend de la personne et ca dépend si elle m’a retapisser le salon avant ou non." Je ne suis pas quelqu’un qui boit beaucoup alors il est vrai que quand je sors ou que j’invite du monde je suis souvent celui qui finir par mettre les gens dans un taxi ou par les ramener chez eux et qui s’assure qu’ils vont bien.

Je goûte enfin le plat qu’à ramener ma petite sœur en lui offrant un sourire. Ce n’est vraiment pas mauvais et ca se marie vraiment bien avec la sangria que je nous ai servie quelques minutes plus tôt. Je prends le temps de savourer ce que j’ai mis dans ma bouche avant de lui sourire et de la complimenter sur son plat. Je n’aurais pas fait mieux, ca j’en suis sur et certain. "On peut trouver bien mieux, mais sur le coup, j'avais que ma propre personne pour préparer ça. Faudra que je me renseigne, il y a peut-être un restaurant espagnol dans le coin. Sinon, faudra que tu planifies un voyage, tout simplement." J’hoche la tête. "On regardera sur Internet si il y a un restau espagnol dans le coin. Mais vraiment, c’est super bon."

Je prends une gorgée de sangria alors qu’Itziar commence à me parler de sa mère. À en parler je comprends bien qu’elles sont proches, vraiment proches et même si c’est quelque chose que je ne connais pas, que je ne comprends pas forcément, je l’admire. J’aurais adoré avoir une mère avec qui partager tant de choses et Itziar semble vraiment avoir envie de parler de moi à sa génitrice. "Ben ... C'est pour ça. Je la connais ma mère. Après, quand t'y penses, ça ne lui change pas grand-chose. J'veux dire, mon père ne l'a pas trompée. Il l'a rencontrée en 1990, il la connaissait même pas quand t'es né." J’hoche la tête avec un léger sourire. Elle n’a pas tord, cela n’allait rien détruire, pas de mariage, pas de relation, ca allait peut être simplement chambouler un peu leur vie, mais je ne leur demanderais rien. "Ce qui m'inquiète c'est que j'ai peur que ça crée des problèmes avec papa, parce que lui il est pas au courant et que je sais pas si c'est correct de l'informer elle, avant lui." J’hoche une nouvelle fois la tête. "Peut être qu’on devrait lui dire." Depuis qu’Itziar est entrer dans ma vie l’idée d’aller en Espagne pour rendre visite à mon père m’est passé par la tête. Après tout, de ce qu’elle m’a dit, il n’est pas quelqu’un de mauvais, il a simplement fait des erreurs. "Si… Si je nous prends des billets pour l’Espagne, est ce que tu viendrais avec moi ? Je veux dire… Pour que je le rencontre, que je lui parle, et du coup tu pourrais en parler à ta mère en personne ?" Peut être que c’est mieux de faire cela en face-à-face que par téléphone après tout. "Je veux dire, j’y pense, mais je suis pas sur de pouvoir vraiment lui faire tout seul tu vois ?" Je lui adresse un léger sourire. "J’aimerais bien que tu sois là."

Il est bienveillant Matthias et elle s'en voudrait presque de lui avoir ri au nez quand il s'est présenté chez elle la première fois. Elle se dit que lui ne lui en veut pas. Qu'il n'a même pas besoin qu'elle lui explique que l'annonce lui paraissait complètement absurde et qu'il avait débarqué chez elle en changeant complètement sa vie. Il y avait de quoi rire. Le rire était une réaction comme une autre. Certain pleuraient face à un drame, d'autres riaient, c'était bien connu. Elle était probablement de ceux qui riaient. Pour tout et n'importe quoi. Dans toutes les situations. Même celles qui ne s'y prêtaient pas vraiment. En particulier quand un inconnu débarque chez vous prétendant partager votre sang. Elle sait qu'il ne lui en a pas tenu rigueur et sa bienveillance envers elle ne fait que confirmer cela. Elle ne peut s'empêcher de penser qu'il ne lui doit absolument rien et pourtant se comporte comme s'ils avaient grandi ensemble tous les deux. Ça la touche. Elle se dit que c'est sans doute parce qu'il n'a pas eu une enfance facile et que son cadre familial était un peu particulier. "J'hésiterai pas. Merci, Matty." Qu'elle lui lance, laissant échapper ce surnom qui sort tout seul, sans même qu'elle n'y réfléchisse. En parfaite petite sœur. Elle n'a pas encore endossé son rôle d'emmerdeuse, celle qui se mêle de vos affaires pour un oui ou pour un non et veut être au courant de tout. Celle qui se moque de votre âge et prend plaisir à souligner vos défauts, mais ça viendra sûrement avec le temps. Quand ils seront un peu plus familiers. Quand elle aura un peu plus appris à le connaître et aura remarqué comment l'énerver juste comme il faut. Pour l'heure, ils en sont à la rigolade, à l'hypothèse qu'elle reste chez lui après avoir un peu trop bu pour qu'il soit sûr qu'elle passe bien la nuit en sécurité. Elle, elle en rajoute un peu, elle cherche à voir jusqu'où peut bien aller sa gentillesse. Elle semble sans limite. "Je vise toujours juste donc t'as pas à t'inquiéter pour tes murs, ton sol ou même ton canapé." plaisante-t-elle. Puis elle passe aux choses sérieuses, ou du moins, semi sérieuses avec sa tortilla. Ca semble plaire à Matthias et même si elle n'est pas très objective, elle est contente que ça lui plaise. "Si tu trouves ça bon, c'est l'essentiel ! Tiens, goûte les patatas bravas aussi. Je savais pas si tu mangeais très épicé ou pas, mais j'ai quand même fait la vraie recette. J'espère que ça piquera pas trop pour toi." Elle, elle était habituée, mais elle savait que ce n'était pas le cas de tout le monde.

Elle n'est pas très à l'aise avec l'idée qu'il paye pour elle. Pour un repas, un verre ou une sortie, ça ne la gênerait pas particulièrement, parce que c'est toujours le genre de choses qu'elle pourrait lui payer un retour. Pour un billet d'avion, c'est différent. Elle sait combien coûte un aller-retour pour Madrid, elle regarde de temps en temps, parce qu'elle aimerait bien rentrer une fois son diplôme en poche. Un peu comme un cadeau qu'elle se ferait à elle-même pour avoir vaincu cette guerre qu'est l'université. "Hmm Je .. Je sais pas trop." Qu'elle commence par dire, pas certaine de la façon dont elle doit formuler sa phrase. "Ça me gêne que tu payes pour moi. J'ai quelques économies. Je peux les utiliser pour ça. J'avais déjà prévu de rentrer voir ma mère une fois que j'aurai obtenu mon diplôme donc j'ai déjà mis de l'argent de côté pour ça." Le problème n'est pas de faire le voyage avec lui, mais bien que ce soit lui qui le finance. Pour le reste, c'était une perspective qui l'emballait. "Mais j'aimerai beaucoup. Bon, faudrait aussi que je me renseigne sur la logistique et comment obtenir une visite. Parce qu'il ne sort pas avant 2022 normalement. Il faudrait qu'on aille le voir en prison." Chose qu'elle n'avait pas fait une seule fois. D'ailleurs, depuis qu'il avait été emprisonné et qu'elle avait quitté l'Espagne, ses contacts avec son père étaient quasi inexistants et se limitaient à quelques lettres ou coups de téléphones épars. "J'ai aucune idée de comment ça fonctionne ni même si t'aurai le droit de rentrer, quoi que j'imagine." Elle ne sait pas, elle n'est pas familière avec ces choses-là, sa mère est sûrement bien plus au courant. "En tout cas, si on fait ça, tu pourras rencontrer ma mère aussi. Ca me ferait plaisir." Peut-être faudra-t-il qu'elle lui parle de Matthias avant de l'introduire, mais c'était quelque chose de faisable. Rien n'était fait cela dit et s'ils partaient, ils ne partiraient pas demain. Ca leur laissait le temps de bien faire les choses.

"J'hésiterai pas. Merci, Matty." Le surnom me fait sourire. "Je vise toujours juste donc t'as pas à t'inquiéter pour tes murs, ton sol ou même ton canapé." J’hoche la tête avec un sourire.

Assis face à face, je laisse la blonde me présenter les plats qu’elle a apporté et viens tout d’abord goûter la tortilla qu’elle a préparé. Ca n’a pas l’air bien compliqué à faire, mais je suis sûr que j’aurais été capable de le rater si j’avais essayé d’en faire. Alors à la place, je savoure un repas qui n’a pas cramer ou qui n’a pas cuit trop longtemps ou pas assez longtemps. "Si tu trouves ça bon, c'est l'essentiel ! Tiens, goûte les patatas bravas aussi. Je savais pas si tu mangeais très épicé ou pas, mais j'ai quand même fait la vraie recette. J'espère que ça piquera pas trop pour toi." Je prends une bouchée et lève les deux pouces vers Itziar. "J’adore ce qui est épicé, donc je ne crois pas que tu puisses faire quelque chose de trop épicé à mon gout." Je lui réponds avec un sourire. "En tout cas, c’est super bon aussi. Merci d’avoir pris le temps de cuisiner un peu." En soi, je pourrais surement apprendre à cuisiner correctement, mais je dois bien avouer que je ne suis pas sûr d’en avoir la patience. Je commence souvent à faire à manger lorsque j’ai faim et donc cela se résume souvent en quelque chose de rapide à faire.

La blonde me parler alors de sa mère, et sans vraiment réfléchir trop longtemps, je lui propose alors de partir à Madrid, qu’elle vienne avec moi pour aller voir notre père. "Hmm Je .. Je sais pas trop. Ça me gêne que tu payes pour moi. J'ai quelques économies. Je peux les utiliser pour ça. J'avais déjà prévu de rentrer voir ma mère une fois que j'aurai obtenu mon diplôme donc j'ai déjà mis de l'argent de côté pour ça." Je lui adresse un sourire. "Ca me dérange vraiment pas, ou même juste de ta payer une partie tu sais. Je gagne plutôt bien ma vie et ca me ferait vraiment plaisir." Je ne veux pas la rendre mal à l’aise bien sur, ou la forcer à quoi que ce soit, mais depuis quelques années l’argent n’est plus un problème et je prends toujours plaisir à offrir des choses à mes proches. "Mais j'aimerai beaucoup. Bon, faudrait aussi que je me renseigne sur la logistique et comment obtenir une visite. Parce qu'il ne sort pas avant 2022 normalement. Il faudrait qu'on aille le voir en prison." Je me suis toujours dit qu’on peut rendre visite assez facilement à quelqu’un en prison, mais à vrai dire, je n’en sais rien. "J'ai aucune idée de comment ça fonctionne ni même si t'aurai le droit de rentrer, quoi que j'imagine." "On peut se renseigner avant de se lancer dans quoi que ce soit peut être ? Puis je dois avouer que l’idée de le rencontrer va sûrement me stresser." L’idée de me retrouver face à mon père, qui ne connait pas mon existence. "En tout cas, si on fait ça, tu pourras rencontrer ma mère aussi. Ca me ferait plaisir." J’hoche la tête. "Oui, bien sur, ca serait avec plaisir." Je lui adresse un sourire et hésite quelques secondes avant de reprendre la parole. "Je sais que j’ai un peu débarquer dans ta vie comme un cheveu sur la soupe, et… Enfin si jamais tu veux pas, ou que je vais trop loin, il faut pas que tu hésites à me le dire hein."

Le visage de la blonde s'illumine quand Matthias lui dit qu'il aime manger épicé. "On va bien s'entendre alors." qu'elle déclare en souriant. Comme si c'était le dernier élément dont elle avait besoin pour prendre une décision. La vérité c'est qu'elle ne se faisait pas vraiment de soucis sur leur entente future. Elle avait tout de suite senti sa bienveillance quand elle l'avait rencontré la première fois et même s'il l'avait surprise avec son annonce, et encore, le mot était faible, il l'avait fait dans la plus grande des délicatesses. Il ne voulait pas chambouler sa vie. Il ne lui demandait rien. Il voulait simplement la connaître. Elle ne pouvait pas lui refuser ça. Pas en apprenant son existence et la manière dont ils étaient liés. Ce n'était pas n'importe qui et si à l'heure actuelle, il se rapprochait plus d'un inconnu, c'était bel et bien son demi-frère et pour elle, c'était important. D'autant plus important quand elle remarquait tous les points communs qu'ils semblaient partager. Il était inimaginable pour elle de ne pas chercher à en savoir plus. Il méritait de la connaître, de connaître d'où il venait et elle n'avait aucun problème à partager tout ça avec lui. A commencer par la cuisine espagnole. Ou tout du moins, un tout petit aperçu de ce que la cuisine ibérique avait à offrir. Il n'avait pas de chance, il n'avait pas hérité de la sœur la plus talentueuse dans ce domaine, mais elle était déterminée et pas du genre à lâcher l'affaire. Elle faisait de son mieux, faute de pouvoir lui proposer un repas digne de ce nom. "J'suis contente que ça te plaise. Tout le plaisir était pour moi." Qu'elle déclare avant d'ajouter "Faudra quand même qu'on jette un œil aux restaurants espagnols dans le coin, histoire que tu puisses te faire une vraie idée. On va dire que ça c'est qu'une mise en bouche." Elle pointe du doigt les plats sur la table. C'était un avant, une infime avant goût de ce que la cuisine espagnole avait réellement à offrir.

Ou peut-être qu'elle l'emmènerait carrément dans un restaurant en plein cœur de Madrid. Pas un de ceux destinés aux touristes qui servent des plats de moindre qualité à des prix complètement excessifs. Non, un vrai restaurant typiquement espagnol qui ne paye pas forcément de mine, mais qui n'a pas ses preuves à faire en matière d'authenticité. C'était une possibilité qui lui semblait envisageable compte tenu de la suite de leur discussion. Il était question d'un voyage en Espagne, pour que Matthias rencontre son père, leur père. Une idée lancée comme ça qui a le potentiel de se concrétiser à un moment ou un autre. Les détails sont bien entendus à peaufiner. A commencer par le financement de son billet d'avion à elle. Elle ne veut pas que Matthias paye pour elle. Ça la mettrait extrêmement mal à l'aise et elle aurait presque l'impression de profiter de sa gentillesse. Elle avait de l'argent de côté, elle ne voyait pas vraiment d'inconvénient à le dépenser comme ça puisque c'était finalement dans ses projets pour le futur. Quand il insiste cependant, elle hoche la tête de gauche à droite. Elle est catégorique. "T'as vraiment pas besoin de payer pour moi. Ca me ferait trop bizarre." Lui répond-elle. Elle ne saurait pas expliquer ce sentiment. Bizarre n'est pas forcément le mot approprié, mais c'est celui qui s'en rapproche le plus. Qui englobe le concept en lui-même. C'est un mélange de gêne, de honte et d'un sentiment d'en demander trop qu'elle n'a pas envie de porter. Qu'il en ait largement les moyens ou pas. Le billet d'avion était donc un élément à déterminer, la façon dont ils allaient pouvoir rendre visite à leur père en prison en était un autre. Peut-être même le plus compliqué de tous. Elle savait que c'était à elle de se renseigner. Il ne parlait pas espagnol, Matthias, il n'avait donc aucun moyen de se renseigner auprès des autorités compétentes. Elle, elle pourrait sans doute demander à sa mère, omettant les réelles raisons qui la poussaient à rendre visite à Antonio. "Je vais me renseigner. Je sais que ma mère va le voir régulièrement. Je pourrai lui demander pour moi, pour commencer et partir de là. Il y a probablement une histoire de liste et de gens autorisés à entrer. T'as le droit d'y réfléchir." Lui dit-elle avant d'ajouter. "On est pas obligés de partir demain ou la semaine prochaine. C'est pas parce que c'est compliqué pour moi de rien dire à ma mère qu'on doit rusher tout. Le plus important c'est que toi tu te sentes prêt." Car finalement, pour elle il était simplement question de rentrer un peu chez elle, elle n'avait rien à découvrir et elle n'avait pas non plus à se confronter à la réaction de leur père. C'était à Matthias de décider quand il serait prêt, quand il pensait que c'était le bon moment. C'était son ressenti qui comptait le plus. Elle, elle voulait bien entendu qu'il rencontre sa mère, mais elle pouvait attendre, elle pouvait garder le secret encore longtemps si besoin. Elle ne voulait pas le forcer et voulait se montrer aussi bienveillante que lui. "Il y a aucun problème." Déclare-t-elle, tendant sa main pour lui serrer tendrement le bras. "Tu me forces à rien du tout et même si j'avoue que j'étais un peu sceptique quand t'as débarqué, je ne me vois pas continuer ma vie comme si de rien était. Ca me parait logique d'apprendre à te connaître." Elle savait que si elle ne le faisait pas elle ne pourrait pas s'arrêter de penser aux liens qu'ils auraient pu tisser.

"On va bien s'entendre alors." Je l’apprécie vraiment Itziar. Plus j’en apprends sur elle et plus j’ai l’impression d’avoir de points communs avec elle, de trouver des terrains d’entente et même si nous n’avons pas les mêmes opinions, de pouvoir échanger librement avec elle. Elle a l’air simple à vivre et discuter avec elle est quelque chose que j’apprécie. Je lui adresse un léger sourire, au fond bien content que les choses se passent bien entre nous et que malgré tout ce que je peux lui dire sur moi, ou ma partie de la famille, elle n’a pas l’air de vouloir prendre ses jambes à son cou. Je n’ai jamais voulu chambouler sa vie et le fait qu’elle me questionne sur moi, qu’elle veuille en savoir un peu plus me rassurer. Au moins je ne culpabilise pas comme si je lui avais tout changer. "J'suis contente que ça te plaise. Tout le plaisir était pour moi. Faudra quand même qu'on jette un œil aux restaurants espagnols dans le coin, histoire que tu puisses te faire une vraie idée. On va dire que ça c'est qu'une mise en bouche." J’hoche la tête. "Ca sera avec plaisir ouais. J’ai déjà hâte de faire ca." Je lui avoue. Après tout, l’idée de faire une soirée dans un restaurant espagnole est plutôt plaisante.

Et puis, pourquoi pas faire cela en Espagne, dans un milieu encore mieux. L’idée d’aller rencontrer notre père, d’apprendre à le connaître malgré le fait qu’il soit en prison me vient à l’esprit. Itziar ne cesse de me dresser une image de lui qui n’a pas l’air aussi horrible que tout ce que ma mère a toujours laissé sous-entendre. Et puis, peut être que je pourrais aussi rencontrer sa mère à Itzi, peut être que les choses pourraient être simple pour une fois, du moins je l’espère. Je n’ai pas envie de me retrouver propulser dans d’autres drama familiale, mais la famille de ma demi-sœur n’a pas l’air comme cela. Bien sûr, je suis un peu nerveux à l’idée de rencontrer mon père, de devoir lui apprendre mon existence, et même de rencontrer la mère d’Itziar. "T'as vraiment pas besoin de payer pour moi. Ca me ferait trop bizarre." "On verra en temps voulu." Je lui adresse un sourire rassurant. Je ne veux pas la mettre mal à l’aise ma sœur, je ne suis pas là pour ca. "Je vais me renseigner. Je sais que ma mère va le voir régulièrement. Je pourrai lui demander pour moi, pour commencer et partir de là. Il y a probablement une histoire de liste et de gens autorisés à entrer. T'as le droit d'y réfléchir. On est pas obligés de partir demain ou la semaine prochaine. C'est pas parce que c'est compliqué pour moi de rien dire à ma mère qu'on doit rusher tout. Le plus important c'est que toi tu te sentes prêt." J’hoche la tête. "Tu as le droit de parler de moi à ta mère avant si tu veux tu sais. Je ne veux pas que ca te pèse de devoir garder des trucs pour toi." Je lui adresse un sourire. "Je vais encore y réfléchir un peu, mais je crois que j’ai besoin de le rencontrer. J’ai besoin de vraiment me faire une idée tu vois ?" Bien sur ce n’est pas pressé, il ne va pas bouger de la prison avant un petit moment, mais je ne veux pas non plus trop que cela traîne. Je prends quand même soin de dire à Itziar que je ne veux pas la forcer à rien. Je ne veux pas dépasser les limites avec elle. "Il y a aucun problème. Tu me forces à rien du tout et même si j'avoue que j'étais un peu sceptique quand t'as débarqué, je ne me vois pas continuer ma vie comme si de rien était. Ca me parait logique d'apprendre à te connaître." "T’es vraiment géniale, tu le sais ca ? Non parce que vraiment. Je m’attendais à beaucoup de choses mais je dois avouer que tu réagis beaucoup mieux que tout ce que j’ai pu imaginer." Je lui offre un nouveau sourire. "J’suis vraiment contente que tu fasses parti de ma vie tu sais."

Il n'y avait pas le feu. De toute façon, elle n'avait pas le luxe de pouvoir quitter Brisbane du jour au lendemain sur un coup de tête. Il fallait que ça coïncide avec les vacances scolaires pour qu'elle ne loupe pas de cours. Elle était si près du but qu'elle ne voulait surtout pas gâcher tous les efforts qu'elle avait fournis ces trois dernières années pour obtenir son diplôme. Même si c'était pour retourner chez elle. L'Espagne n'allait pas disparaître et attendrait bien sagement que le moment soit le bon. Il fallait aussi qu'elle s'arrange avec son travail et prévienne autant son patron que ses collègues. Les plannings étaient faits à l'avance et elle ne pouvait donc pas déserter le navire du jour au lendemain comme ça lui chantait. Enfin, dans les faits, elle pourrait, mais non seulement ça ne serait pas cool envers ses collègues qui devraient s'arranger rapidement, ça lui causerait des problèmes auxquels elle n'avait pas particulièrement envie de se confronter. Elle avait besoin de job et tout comme pour ses études, elle n'allait pas le compromettre pour un voyage. Surtout qu'ils ont toute une logistique à gérer avant de se lancer réellement. Ca n'a pas d'intérêt de débarquer à Madrid sans être sûr de ce qu'ils y feront et surtout ça n'a aucun intérêt pour Matthias de débarquer en Espagne sans avoir la certitude qu'il pourra rencontrer son père en prison. C'était un pari un peu trop risqué et il valait donc mieux prendre le temps de se renseigner correctement pour pouvoir s'organiser. Ce qui lui laissait aussi le temps de voir venir pour son travail et ses études. Pour l'heure, elle se contenterait d'éviter le sujet avec sa mère. Elle tenterait de ne pas faire de gaffe et tout devrait bien se passer. "Je tiens pas particulièrement à lui en parler avant que tu rencontres papa. Je la connais, je sais qu'elle a tendance à en faire des tonnes et c'est selon moi pas idéal qu'il l'apprenne d'elle." Répond-elle en haussant les épaules. Sa mère était une drama queen dans l'âme et avait ce don pour faire prendre des proportions énormes à des choses insignifiantes. Itziar ne voulait donc pas qu'Antonio apprenne de la bouche de Pilar qu'il avait un fils. Elle ruinerait la chose sans l'ombre d'un doute. C'était ce qu'elle pensait. Peut-être qu'elle se trompait, mais elle ne préférait pas prendre le risque. Ce ne serait pas la première fois qu'elle omettrait de parler de quelque chose à sa mère. Elle l'avait fait pendant des années, quand elle était plus jeune et qu'elle passait ses samedis soirs en boîte de nuit. Jamais elle n'avait mentionné l'alcool qu'elle ingérait à profusion, ni même les flirts qu'elle enchaînait comme certains changent de chemises. Alors, elle pouvait omettre Matthias de toute discussion pendant quelque temps encore, pouvait détourner les informations sans mentionner qui il était réellement. C'était faisable. Il suffisait juste qu'elle fasse attention. "Prends le temps qu'il te faut. J'imagine que ça doit pas être facile et que t'y trouve sûrement autant d'arguments pour que d'arguments contre." C'était quitte ou double. Il était impossible de deviner comment allait réagir Antonio. La jeune espagnole aurait tendance à penser qu'il le prendrait bien. Certes il serait surpris, même plus. Le mot était sans doute faible, mais il le prendrait bien tout de même. Elle pouvait se tromper cela dit et il était impossible d'imaginer comment il réagirait face à une telle annonce. Peut-être qu'il serait un peu sceptique. Comme elle l'avait été quand Matthias avait débarqué chez elle cette fameuse fois. Peut-être qu'il crierait à la supercherie ou à une mauvaise blague, comme elle aurait pu le penser elle aussi. C'était aussi improbable que c'était réel. Elle l'avait digéré plutôt vite. Parce qu'elle était comme ça, qu'elle voyait le bon dans tout et que finalement c'était une opportunité d'agrandir sa famille. Elle n'avait pas l'impression qu'il l'avait forcée à quoi que ce soit et elle trouvait important de lui préciser, comme si ses actions n'étaient pas assez parlantes. "Oui on me l'a déjà dit une fois ou deux." Qu'elle lui répond en plaisantant. "C'est pas comme si t'avais fait éclater un lourd secret de famille ou quoi que ce soit alors, oui c'est surprenant et c'était la dernière chose à laquelle je m'attendais, mais pour moi c'est que du positif. C'est pas tout le monde qui se découvre un frère à vingt-six ans." Déclare-t-elle ensuite en haussant les épaules. "Je suis contente que tu sois dans ma vie aussi. On a le même sang, maintenant que je sais que t'existe, ce serait pas envisageable de faire comme si t'existais pas." C'était aussi simple que cela pour Itziar et même si elle avait encore beaucoup à apprendre de Matthias, elle avait hâte qu'ils puissent se découvrir et tisser des liens.