Je vais rejoindre Molly pour la fête nationale toute à l’heure, mais je suis arrivé bien tôt sur le lieu de rendez-vous.  J’avais l’impression de ne pas avoir dormi de la nuit, bien trop agité. Ces six derniers jours avaient été un enchaînement sans fin. Je ne me souvenais à vrai dire pas des trois premiers, les ayant effacés de ma mémoire à coup de verre d’alcool.

J’étais donc arrivé le long de la rive où étaient installés les traditionnels bateaux décorés qui allaient participer à la course un peu plus tard. Il commençait déjà à y avoir des familles et les différents compétiteurs commençaient eux aussi à arriver. J’étais bien trop en avance, le visage hagard, les cernes se mêlant à un léger œil au beurre noir qui commençait seulement à s’estomper, Jax n’ayant pas apprécié la révélation de sa possible filiation au principal intéressé.  J’avais piqué un peu de maquillage à Dylane pour tenter de cacher la marque, ne voulant pas que ça se voit trop.  Heureusement le coquard était léger.

Je me promène le long de la rive, cherchant un endroit agréable pour m’asseoir et peut être dessiner un peu en attendant et c’est là que je le vois. Il s’est assis le long de la berge et il est seul.  Cela pourrait être une personne comme une autre. Si ce n’était pas une personne que j’avais croisé à de multiples reprises pendant le mois sans jamais vraiment lui parler. Louisa m’avait montré des photos de son frère, après tout je la connaissais depuis des années à force de faire la fête avec elle, mais je ne l’avais jamais rencontré jusqu’à ce mois de janvier.

Je me revois lui renverser à moitié mon verre dessus dans un bar en lui fonçant dedans, le reconnaître et échanger quelques mots avant qu’on ne prenne chacun notre chemin. Puis je lui ai foncé dedans l’autre jour en sortant d’un magasin en ville.  Et voilà aujourd’hui je le retrouve sur cette rive. Un rire silencieux secoue mes épaules et je m’approche lentement pour ne pas le faire sursauter, m’asseyant à ses côtés. « C’est pas possible, je vais finir par croire que c’est le destin. » Mon sourire est moqueur.  Je penche la tête vers lui pour m’assurer qu’il me reconnait, posant mon carnet de croquis à côté de moi. « Salut Nathan. Tu remarqueras que cette fois je ne t’ai pas foncé dedans, on progresse. »

@Nathan Atkins  

L'on pourrait croire qu'il en aurait assez des bateaux Nathan, passant la majeure partie de sa vie à en naviguer ou à travailler à leur bord. Au contraire, c'est une véritable passion qu'il s'était découvert là, et bien que les rafiots de loisir sortis pour le jour de la fête nationale étaient loin des navires dont Nathan avait l'habitude, il était plus qu'heureux de pouvoir s'installer quelques temps pour les observer et graver leur image sur un morceau de papier. Il fut néanmoins dérangé par une présence qu'il sentait arriver derrière lui, et détourna les yeux pour voir qui se trouvait là. « C’est pas possible, je vais finir par croire que c’est le destin. » Pas physionomiste pour un sou, Nate eu un air surpris et se retrouva béat devant celui qui venait de s'asseoir à ses côtés. Il eu le réflexe de fermer son cahier, n'appréciant que très peu de montrer ses œuvres à des inconnus, d'autant plus que sa confiance en lui sur ses talents d'artiste avaient été rudement mis à l'épreuve depuis plusieurs années déjà.

« Salut Nathan. Tu remarqueras que cette fois je ne t’ai pas foncé dedans, on progresse. » Il reconnu alors Pete, l'ami de Louisa qui avait la fâcheuse tendance de lui renverser son verre dessus ou de tout bonnement lui foncer dedans. Il ne le connaissait pas plus que ça, mais un sourire illumina son visage lorsqu'il comprit qu'il était loin d'être en présence d'un total inconnu. Je suis presque déçu qu'on ait pas le droit à un choc frontal aujourd'hui. Lançait-il l'air rieur, son humour ridicule ayant encore fait surface avant qu'il n'ait eu le temps de réfléchir aux sous entendus que ses paroles pourraient renvoyer. Les yeux du brun se posèrent sur la carnet de croquis que Pete venait de poser à côté de lui. J'imagine que tu viens faire la même chose que moi ? Demandait-il en désignant son propre carnet. Il ignorait que Pete dessinait lui aussi, sans doute avaient-ils plus à échanger que leurs habituels bousculades et incidents.

Cela faisait la troisième fois que je tombais sur Nathan en bien peu de temps. C’était assez pour que je sois curieux, que je me décide enfin à lui parler ce matin, alors que j’avais du temps à tuer et pas vraiment envie d’être seul à ressasser ces derniers jours.  Il n’a pas l’air de me reconnaître tout de suite.  Son air est surpris un peu béat et mon sourire se fait plus large. Il a refermé son carnet bien précipitamment et ça m’intrigue.  Que cache-t-il donc dans ce petit carnet ? Un talent d’artiste ou de simples gribouillis ? Ca me dérange j’ai envie de sa voir.  

Nathan semble enfin me reconnaître et son sourire se fait tout de suite plus lumineux. « Je suis presque déçu qu'on ait pas le droit à un choc frontal aujourd'hui. » Je ris, arrachant un peu d’herbe au sol pour les faire glisser entre mes doigts. Pas qu’un énième choc frontal me dérangerait, Nathan était décidément mignon, il y avait quelque chose de simple et de lumineux qui se dégager de lui, c’était apaisant. Je lui lance un regard malicieux avant de dire : « Tu sais ça peut toujours s’arranger, je peux te pousser à l’eau si tu veux ! » Je le vois poser son regard sur mon carnet . « J'imagine que tu viens faire la même chose que moi ? » Il pointe du doigt son carnet et j’attrape le mien alors avec un sourire.  « Peut-être bien. Plutôt dessinateur ou plutôt écrivain ? » Je lui demande avec un sourire me demandant ce qui se cache dans son carnet. Je n’ai ouvert le mien encore, l’objet étant à présent posé sur mes genoux. J’observe les bateaux amarrés le long de la rive. « Ils sont vraiment beaux cette année. » je commente, me décidant finalement à ouvrir le mien, remplis de dessins en tous genres. D’esquisses de bâtiments, comme de personnes, un passetemps qui avait alimenté ma passion pour mon métier, moi qui adorait l’art sur toutes ses formes.




@Nathan Atkins  

« Tu sais ça peut toujours s’arranger, je peux te pousser à l’eau si tu veux ! » L'air toujours rieur, il hocha néanmoins la tête de gauche à droite. Ça ira ! Il fait chaud mais j'ai pas emmener de vêtements de rechange. Comme si c'était le seul problème qu'il voyait à se faire jeter dans le fleuve au milieu des bateaux. L'australien s'intéressait désormais au carnet que Pete avait avec lui. « Peut-être bien. Plutôt dessinateur ou plutôt écrivain ? » Il n'avait pas songé à cette deuxième option, ayant toujours pensé qu'aujourd'hui les écrivains ne s'attelaient à leur art que sur ordinateur - ce qui faisait d'ailleurs, selon lui, perdre toute l'âme de cet art petit à petit. Le dessin était la seule chose que Nate pouvait imaginer, ne comprenant pas réellement quel genre de personnes pouvait aimer écrire. Pour lui, il avait toujours été compliqué de le faire, et il était bien heureux que les correcteurs en ligne aient été démocratisés ces dernières années. Je dessine. J'essaie. Qu'il répondait sans plus de précisions, observant le carnet de Pete s'ouvrir devant ses yeux alors que ce dernier observait les bateaux.

« Ils sont vraiment beaux cette année. » Des souvenirs de ces bateaux, Nathan en avait beaucoup. Plus jeune, c'est avec Shiloh et Louisa qu'il arpentait ces berges le jour de la fête nationale, observant les décorations de toute part. Il était bien plus solitaire aujourd'hui, de l'eau avait coulé sous les ponts et rien n'était plus pareil désormais. Le brun chassa ses pensées de son esprit, préférant jeter un œil aux esquisses du Mulligan. Lui osait montrer ses dessins, et pour ça Nate éprouvait un soupçon de jalousie parfaitement dissimulé. C'est vrai, ils s'améliorent d'année en année. Il hochait la tête de haut en bas pour appuyer ses propos. Mais tu avais vraiment prévu de venir t'asseoir juste là, ou tu devais rejoindre quelqu'un peut être ? Loin de lui l'idée de vouloir faire fuir Pete maintenant qu'il avait trouvé une compagnie agréable pour poursuivre la matinée, mais il ne pouvait croire qu'ils avaient eu exactement la même idée ce matin de s'installer là, seuls.

Je lui propose de le pousser à l’eau, après tout on pouvait presque dire que j’avais instauré une tradition avec lui. Lui foncer dessus, lui renverser mon verre dessus. Le pousser dans l’eau ne serait pas si différent. « Ça ira ! Il fait chaud mais j'ai pas emmener de vêtements de rechange. »  Je ris et je ne peux m’empêcher de lancer un petit commentaire malicieux.  « Oh tu sais si c’est ça le seul unique problème, on devrait pouvoir supporter ta nudité il y a paaaaas de souci. » Je lui fais un clin d’œil.
On a tous les deux un carnet et je suis un peu étonné, ne connaissant rien de Nathan à part le fait qu’il soit dans la Navy, je ne l’imaginais pas spécialement avoir une âme d’artiste. Il y a deux options possibles et je n’ai pas eu le temps de voir laquelle c’était avant que son carnet ne se referme à la vue d’inconnus.
Je dessine. »  A ça mon sourire se fait plus grand. Mon propre carnet s’ouvre. « Un militaire artiste du coup ? Tu dessines depuis longtemps ? » Je lui demande doucement, mon carnet s’ouvrant, le sien restant fermé.  Mon regard va se poser sur les bateaux, qui sont particulièrement bien décorés cette année.

« C'est vrai, ils s'améliorent d'année en année.  Mais tu avais vraiment prévu de venir t'asseoir juste là, ou tu devais rejoindre quelqu'un peut être ? » Dois-je aller quelque part ? Pas avant un moment. Est-ce que j’avais prévu de m’asseoir juste là avec lui ? Non plus, mais sa compagnie me semble mieux que la solitude, elle m’aide à ne pas penser. « Je te suis tu ne le savais pas ? » Moi et mon humour de merde on repassera, mon sourire moqueur s’efface un peu pour laisser place à un air un peu plus sérieux et sincère. « Non je rejoins une amie toute à l’heure pour la fête nationale, mais j’ai mal dormi et je me suis dit qu’une balade le long de la berge me ferait du bien.  Quelques croquis avec et maintenant toi en bonus ! » Je lui fais un clin d’œil, jouant avec mon crayon entre mes doigts. « Et toi ? Tu es venu pour les bateaux ? »


@Nathan Atkins  

L'idée de finir à l'eau aurait pu sembler agréable dans un autre contexte. Mais se retrouver à moitié nu à cause de ses vêtements trempés n'était pas quelque chose qui plaisait particulièrement à Nathan, détestant attirer l'attention - et n'étant pas tout à fait conscient de ses atouts physiques. « Oh tu sais si c’est ça le seul unique problème, on devrait pouvoir supporter ta nudité il y a paaaaas de souci. » Il eut droit à un clin d'œil et rit aux côtés de Pete, fier de sa blague. En était-ce une d'ailleurs ? Incapable d'en tirer une quelconque conclusion, il ne répondit rien et se contenta de rester immobile, un sourire calé sur ses lèvres. « Un militaire artiste du coup ? Tu dessines depuis longtemps ? » Pete en connaissait visiblement davantage sur Nathan que lui n'en savait sur le Mulligan. Louisa s'était sans doute montrée bien bavarde avec son ami. Il l'imaginait parfaitement raconter ses exploits lors de ses classes, fière de dire que son petit frère ait en quelque sorte suivi ses pas à elle dans la navy. Depuis toujours, en fait. Et toi ? Depuis toujours et pourtant c'était une passion qu'il gardait souvent secrète, déçu de n'avoir pu rien en faire contrairement à Shiloh.

« Je te suis tu ne le savais pas ? » Pete semblait avoir un humour aussi ridicule que Nate, ce qui le fit rire bêtement. Tu me suis et tu sais ce que je fais dans la vie.. J'devrais avoir peur ? Qu'il demandait, taquin, passant sa main dans ses cheveux pour les remettre à leur place. « Non je rejoins une amie toute à l’heure pour la fête nationale, mais j’ai mal dormi et je me suis dit qu’une balade le long de la berge me ferait du bien. Quelques croquis avec et maintenant toi en bonus ! » Il lui semblait bien que personne ne pouvait aimer errer en ville comme lui le faisait, tant son entourage tout entier passait son temps à lui dire que son amour pour la solitude était parfois presque inquiétant. Un bonus, carrément. Il se serait presque senti flatté s'il n'avait pas déjà noté dans un coin de sa tête de ne rien croire de Pete, le mettant dans la case de ceux qu'il fallait prendre au second degré. « Et toi ? Tu es venu pour les bateaux ? » Il jouait avec son crayon, sans doute s'attendait il à ce qu'ils dessinent tous les deux l'un à côté de l'autre, en bons passionnés qu'ils étaient - ce pour quoi Nate n'était que très peu à l'aise, car ça aurait voulu dire montrer ses œuvres au passage. Pas spécialement, des bateaux j'en vois assez. Navy oblige. C'est juste que j'aime parfois rester seul au bord de l'eau, ça calme. Il tourna la tête vers Pete. Non pas que ta présence soit désagréable, au contraire. Qu'il lançait en lui offrant son plus beau sourire.

« Depuis toujours, en fait. Et toi ? » A ca je le regarde d’un air surpris, m’y attendant peu. Peut-être parce que Louisa ne m’en avait jamais parlé, mais ce n’était pas comme si elle était allée s’extasier en long et en travers sur la vie de son petit frère, ou si elle l’avait fait, cela faisait partie des souvenirs que j’avais mis à la trappe au cours des soirées. « Depuis toujours aussi…Je suis architecte et scénographe. » Je lui dis le regard pétillant. « Mais j’aime bien dessiner pour le plaisir. »

« Tu me suis et tu sais ce que je fais dans la vie…J’devrais avoir peur ? » Il se passe la main dans les cheveux, un sourire taquin aux lèvres et mon regard est attiré vers ses boucles brunes. C’était qu’il était quand même vachement mignon le petit frère de Louisa. « Oh tu crois pas si bien dire. » Je lui offre un sourire malicieux. « Tu devrais peut-être fuir même ! Les psychopathes ça court les rues aujourd'hui» Je ris avant de lui expliquer plus sérieusement ce que j’avais prévu pour cette fête nationale.

[color=steelblue]« Un bonus, carrément. » Je me contente de sourire lui demandant s’il est venu pour les bateaux. « Pas spécialement, des bateaux j'en vois assez. C'est juste que j'aime parfois rester seul au bord de l'eau, ça calme. » Je ne comprendrais sûrement jamais moi qui fuit la solitude comme la peste qui préfère m’entourer d’une foule et de faux semblants pour ne pas être pris dans un océan trop noir, pour ne pas penser plus de quelques minutes à ma vie actuelle et à tout ce que je ressens. Il n’y avait finalement que pour dessiner que la solitude ne me dérangeait pas, mon esprit ailleurs, occupé à rêver de monts et merveilles. « Non pas que ta présence soit désagréable, au contraire. » Nathan me sourit et je lui renvoie un sourire à mon tour. « Ouf ! » Mon regard se pose sur les bateaux de nouveau. « Ca t’es venu comment l’armée ? T’es dans la Navy c’est ça ? » J’ai dû mal à l’imaginer en militaire. Après tout il avait plutôt une tête de doux artiste.

S'il s'attendait à rester silencieux jusqu'à sa soirée prévue avec quelques amis, il était plutôt heureux finalement que Pete soit venu briser son silence solitaire. « Depuis toujours aussi…Je suis architecte et scénographe. » Lui au moins semblait avoir réussi dans son domaine de prédilection. Nate resta souriant mais se pinçait doucement les lèvres, un élan de remord sur son propre chemin l'embarquant dès qu'il entendait que quelqu'un réussissait là où lui avait échoué - il faudrait qu'il arrête de ressasser, d'ailleurs. « Mais j’aime bien dessiner pour le plaisir. » Et à cela il ne pouvait que sourire, et être plus que d'accord.

Ils se charriaient comme s'ils étaient des amis de longue date, ce qui faisait rire Nate qui affichait une mine plus que réjouie. « Oh tu crois pas si bien dire. » Les sourcils haussés, il fut surpris une seconde.  « Tu devrais peut-être fuir même ! Les psychopathes ça court les rues aujourd'hui. »  Ça y est, je suis terrifié. Il n'était plus de ceux qui avaient peur de genre de choses en réalité, et si l'armée lui avait apporté quelque chose, c'était bien un peu d'assurance. Alors Nathan lui répondait simplement qu'il aimait parfois rester là -ou ailleurs - seul. Que cette fois cependant, il n'était pas contre un peu de compagnie. « Ouf ! »   Il eut un air rassuré - comme s'il avait vraiment eu à s'inquiéter de gêner. Mais ils n'étaient que des humoristes l'un avec l'autre, pris dans une sorte de jeu.

Les deux avaient le regard perdu sur les bateaux décorés, certains colorés d'autres moins. On aurait dit deux vieux assis sur un banc rêvant à leur souvenirs ensembles - ou c'était l'imagination de Nathan qui le faisait penser à ça. « Ca t’es venu comment l’armée ? T’es dans la Navy c’est ça ? » Il opina du chef, acquiesçant. La Navy, c'est ça. J'ai raté mes études, c'était loin d'être un rêve l'armée. C'est Louisa qui m'a initié en fait. Il ne pouvait être plus honnête que ça, se mordant la lèvre, regrettant déjà d'avoir abordé le sujet de ses échecs. Mais ils faisaient parti de lui, et mentir n'était pas dans ses habitudes. Moi qui pensait qu'elle t'avait déjà raconté toute ma vie, je suis bien content de voir que tout mes secrets ne t'ont pas été dévoilés. Il prit un air faussement mystérieux, n'ayant pas grand chose à cacher au monde en réalité ; restant fixé sur les yeux bleus de Pete. Il remarqua d'ailleurs n'avoir jamais vu des yeux si clairs, mais s'empêcha d'en faire la réflexion au risque de vraiment passer pour un psychopathe. C'est bizarre qu'on ne se soit pas parlés avant, finalement. Qu'il constatait.

J’avais trouvé en métier en lien avec ma passion, moi qui avait toujours la tête dans les airs, qui adorait la ville depuis que j’étais gamin, qui prenait plaisir à laisser mon crayons dessiner des paysages, des maisons mais aussi des scènes de films ou séries, imaginant la façon dont j’allais agencer les décors.

« Ca y est, je suis terrifié. » Je ris en rajoutant une couche. « Mince est ce que j’ai dévoilé mes plans machiavéliques trop tôt ! Zut j’aurais dû attendre qu’on se connaisse un peu plus ! » Mon regard est malicieux. On parle comme si on se connaissait, c’est facile. Il est apaisant Nathan. Il est souriant et pétillant et ça me fait du bien. Il est une bulle d’air frais après cette semaine où j’ai l’impression d’avoir détruit toutes mes relations avec les gens les plus proches de moi.  Ca ne le dérange pas que je sois là, à empiéter sur sa solitude et cela me rassure car je ne veux pas penser à tout ce qui m’attend.

On regarde les bateaux un instant sans rien dire, comme un moment un peu suspendu et le silence ne me pèse pas, mais je finis par le briser, curieux à propos de son métier.  Il opine de la tête quand je lui demande s’il est bien dans la marine.  « La Navy, c'est ça. J'ai raté mes études, c'était loin d'être un rêve l'armée. C'est Louisa qui m'a initié en fait. »  Je penche un peu la tête sur le côté curieux. Il avait donc simplement suivi les pas de sa sœur à défaut d’autres solutions ? Ou était-ce devenu une véritable vocation avec le temps. « Tu le regrettes ? » Je demande doucement, sans jugement. Peut-être est-ce trop personnel comme question, peut-être qu’il n’y répondra pas. Qu’importe.

« Moi qui pensait qu'elle t'avait déjà raconté toute ma vie, je suis bien content de voir que tout mes secrets ne t'ont pas été dévoilés. » A ça je souris plus largement, mon regard malicieux, jouant toujours avec mon crayon, les mains incapables de rester en place. « Pourquoi t’en as beaucoup des secrets ? » Je suis curieux de la personne qu’il est, mais heureux que Louisa ne m’ait pas vraiment parlé de lui. Ca rend cette rencontre imprévue plus simple étrangement.


« C'est bizarre qu'on ne se soit pas parlés avant, finalement. » A ça j’hoche la tête, parce que je traînais surtout avec Louisa pour les soirées.  « C’est vrai. Finalement c’est pas plus mal que je t’ai renversé mon verre dessus hein ? »  

« Mince est ce que j’ai dévoilé mes plans machiavéliques trop tôt ! Zut j’aurais dû attendre qu’on se connaisse un peu plus ! » Nathan riait encore ; il riait toujours de sa dernière remarque et ne s'était pas arrêté depuis en réalité. Tout du moins jusqu'à ce que leur discussion ne devienne un peu plus sérieuse que de simples renvois de blagues. « Tu le regrettes ? » Il s'intéressait à ses choix de vie, et Nate pouvait comprendre que Pete ait eu envie de poser la question tant on avait pu entendre quelques secondes plus tôt une certaine nostalgie dans sa voix. Je l'ai regretté. Mais plus aujourd'hui. Il ne pouvait se montrer plus honnête. En réalité, ça faisait du bien à Nate de pouvoir parler à cœur ouvert pour une fois, comme s'il était libéré des conventions et des obligations qu'il pensait avoir envers sa famille et ses proches. Bien que Pete connaissait Louisa, il sentait que la conversation n'arriverait pas à ses oreilles - l'espérait, en tout cas. L'armée avait été la dernière chance qu'il se laissait pour pour faire quelque chose de sa vie, et bien qu'il avait eu du mal à abandonner l'idée de faire sa carrière dans l'art, il s'était pris au jeu ; s'était découvert là un certain talent.

Ravi de découvrir que Pete ne connaissait pas encore tout de sa vie contrairement à ce qu'il avait pu lui laisser croire au départ, Nate fit une remarque sur d'éventuels secrets qu'il pourrait avoir. Une remarque qu'il pensait simplement amusante, qui pourtant fut prise au mot par le Mulligan. « Pourquoi t’en as beaucoup des secrets ? » Il ne s'était que rarement posé la question, plutôt transparent en général. Mais il en avait bien sûr, comme tout le monde. Beaucoup ? Je sais pas. J'en ai, c'est sûr. Mais tu connais quelqu'un qui n'en a aucun ?

Et puis le brun expliqua être surpris qu'ils n'aient jamais eu le temps d'échanger ainsi ; il omit le fait qu'il était bien content qu'ils aient passé le pas. Mais Pete ne s'en priva pas. « C’est vrai. Finalement c’est pas plus mal que je t’ai renversé mon verre dessus hein ? » Un sourire vint se greffer à nouveau sur le visage du marin. Ouais, faut croire. Même si je suis presque sûr que ça aurait été tout aussi sympa sans tâches sur mes vêtements et sans bleus sur mes bras. Au moins, aujourd'hui, ils pouvaient se féliciter de ne noter aucun dégâts physiques ou matériels. Mais toi alors, qu'est-ce qui occupes tes journées ? Nate se lassait vite de devoir parler de lui ; il se montrait curieux, en profitait pour se plonger dans les yeux bleus de Pete.

« Je l'ai regretté. Mais plus aujourd'hui. » J’observe son visage,  son ton est sincère. Avait-il eu d’autres rêves ? Peut-être lié à ces dessins dans ce carnet qu’il gardait fermé ?  Ce carnet qu’il ne souhaite pas oser dévoiler aux autres ?  Je n’ai jamais véritablement compris cette passion pour l’armée, hochant la tête quand Louisa m’en parler sans réellement pouvoir envisager l’attrait pour cette carrière. J’avais étrangement encore plus de mal à imaginer son frère dans cette carrière, mais je ne le connaissais pas. Au fond je savais bien peu de lui. « Qu’est ce qui te plait dans l’armée ? » je pose la question d’un air curieux, essayant de le cerner un peu plus.

Il a raison je ne connais pas grand-chose de lui, tout comme lui ne connait sans doute rien de moi.  D’un ton amusé je ne peux me demander s’il en a beaucoup des secrets lui dont l’air me semble doux et innocent. «  Beaucoup ? Je sais pas. J'en ai, c'est sûr. Mais tu connais quelqu'un qui n'en a aucun ? » A ça je ris. « Oh non personne ! »  Même moi j’en avais des centaines des secrets.

Je ne pensais pas rencontrer quelqu’un ce matin sur ma route et finalement je suis bien content de l’avoir trouvé lui, dont je ne connais rien, qui ne peut me juger sur tout ce qui s’est passé ces dernières semaines, qui ne sait pas à quel point j’ai tout raté. « Ouais, faut croire. Même si je suis presque sûr que ça aurait été tout aussi sympa sans tâches sur mes vêtements et sans bleus sur mes bras. »  Je prends un air faussement innocent « Mais je suis sûr que tu ne te serais même pas rappelé de moi sans ça !  Déjà j’ai bien cru que tu ne m’avais pas reconnu ! » Je souris, mutin, avant de me décider à allumer une cigarette, tendant mon paquet vers Nathan. « Ca te dérange pas ? Tu en veux une ? » je lui propose en espérant que l’odeur de la cigarette ne l’indispose pas plus que ça. « Mais toi alors, qu'est-ce qui occupe tes journées ? » En ce moment ? L’alcool. Je pourrais lui répondre si j’étais honnête, mais bien sûr je ne le fais pas. Mon regard se détourne un peu du sien, cherchant les bateaux. « Je suis assez investi dans mon boulot, j’ai commencé à bosser sur les décors du nouveau spectacle de la Northlight, c’est une troupe de théâtre je ne sais pas si tu connais ? » Je pars de mon boulot pour éviter de parler du reste. Je ne sais pas si j’aurais dû parler de mes loisirs quand mes loisirs en ce moment se résument à boire et j’aimerais ne pas commencer à mentir.

« Qu’est ce qui te plait dans l’armée ? » La question était vaste, la réponse le serait aussi. Il aimait l'armée pour de nombreuses raisons. Le dépassement de soi, la loyauté, se sentir utile pour la société. Ses yeux plongés dans le bleu de ceux de Peter, il était pour ainsi dire fier d'annoncer ainsi les valeurs auxquels il tenait désormais. Il en omit bien d'autres, mais ne voulait pas endormir son interlocuteur avec de tels discours, préférant repartir avec humour. Et puis, c'est sympa pour draguer aussi, de dire qu'on est dans l'armée. Être un fantasme, c'pas mal. Loin de le penser, il riait de sa situation sans se rendre compte pour autant que pour d'autres c'était totalement la vérité. D'autant plus que draguer était loin d'être dans ses compétences. Oui, Nathan était devenu attirant depuis son entrée à l'armée, entre les entraînements et sa légère prise de confiance liée à ses réussites. Il ne s'en rendait simplement pas tout à fait compte.

Alors que Nate demandait à Pete d'une manière voilée si lui aussi il avait des secrets, il s'empressa de répondre. « Oh non personne ! »   A cela, il ne pouvait qu'acquiescer, certain qu'il n'existait aucune personne en ce monde qui n'ait pas de jardin secret. Et alors qu'ils riaient sur leurs rencontres laissant bien souvent des traces sur leurs corps, Pete lança une remarque légèrement piquante. « Mais je suis sûr que tu ne te serais même pas rappelé de moi sans ça !  Déjà j’ai bien cru que tu ne m’avais pas reconnu ! » Et Nathan ne pouvait nier. Je ne vois pas ce que tu veux dire. Il riait, ironique. J'admet ne pas être très physionomiste. Pete sortait un paquet de cigarettes. « Ca te dérange pas ? Tu en veux une ? » Il secoua doucement la tête. Non merci, mais ça me dérange pas. Son regard se ballait sur les bateaux et leurs décors, de la même façon que celui de son interlocuteur de jour, semblant perdu dans ses pensées alors que le brun lui demandait de quoi étaient faites ses journées. « Je suis assez investi dans mon boulot, j’ai commencé à bosser sur les décors du nouveau spectacle de la Northlight, c’est une troupe de théâtre je ne sais pas si tu connais ? » Il eut un rictus et une pensée pour Clément qui venait bizarrement tout juste de reprendre contact avec lui. Je connais, oui. Tu as de la chance de travailler dans un domaine artistique, je suis sûr que t'es doué. Qu'il lançait en désignant son carnet de dessins.

Je lui demande ce qui lui plait dans l’armée ou en l’occurrence ici la Navy, réellement curieux vis-à-vis de ces métiers que je comprends peu. « Le dépassement de soi, la loyauté, se sentir utile pour la société. » Nathan a un regard fier qui me fait sourire. Sans doute étais-je un peu trop égoïste pour ce genre de métier qui impliquait de trop donner de sa personne, préférant de loin vivre le plaisir de l’art sous toutes ses formes. « Et puis, c'est sympa pour draguer aussi, de dire qu'on est dans l'armée. Être un fantasme, c'pas mal. » A ça cette fois je ris ouvertement, je n’en doutais pas une seule seconde. Même moi je devais reconnaître qu’il y avait peut-être une petite partie de moi qui était attiré par lui à cause de ça, on ne va pas mentir, ça le rendait encore plus attirant qu’il ne l’était déjà. « Tu m’étonnes, je suis sûr que tu dois avoirs plein de nana et de mec qui te courent après pour ça. »

On parle de notre rencontre, du fias qu’il aurait quand même sûrement préféré ne pas se prendre un verre dessus, mais qu’en même temps je suis persuadé qu’il ne se serait pas souvenu de moi dans ce cas là. « Je ne vois pas ce que tu veux dire. » Mon regard est malicieux. « J'admets ne pas être très physionomiste » Ca je m’en étais douté. Je lui donne léger coup d’épaule avec un sourire. « C’est pas un peu problématique pour savoir qui est son ennemi sur un champ de bataille ? » Je ne connais absolument rien à ce qu’il fait exactement mais je me doute que je ne raconte que des idioties. Je sors mon paquet de cigarette, lui en proposant une. « Non merci, mais ça me dérange pas. » J’allume donc une cigarette, tout en lui parlant de mon nouveau projet avec la Northlight. Nathan affiche un rictus qui me fait dire qu’il connait la troupe. « Je connais, oui. Tu as de la chance de travailler dans un domaine artistique, je suis sûr que t'es doué. » Son regard se pose sur mon carnet, et je pointe du doigt le sien. « Et toi, il y a quoi comme talent qui se cache derrière cette belle gueule ? » dis-je avec un sourire, curieux de savoir ce qu’il dessinait.

« Tu m’étonnes, je suis sûr que tu dois avoirs plein de nana et de mec qui te courent après pour ça. » Il était bien loin du compte, mais le marin se contenta de sourire. Au contraire, il avait plutôt tendance à se complaire dans sa vie tranquille, ne comprenant jamais rien aux relations humaines, finissant toujours par tomber amoureux trop vite et se faire jeter si vite par derrière. Un cycle éternel qu'il n'avait brisé que quelques fois. Il avait eu des rencontres, et des relations, oui, mais rien de sérieux, rien de passionnant. Des hommes, en revanche, il n'en avait connu qu'un. Il n'avait que frôlé ses lèvres et s'en retrouvait aujourd'hui puni d'une haine dont il ne pouvait se débarrasser. Qu'importe, Pete n'avait aucun besoin d'en savoir autant. Et alors qu'ils riaient sur le fait que Nate avait du mal à reconnaître les gens, Pete lui lançait une pique. « C’est pas un peu problématique pour savoir qui est son ennemi sur un champ de bataille ? » ll secoue doucement la tête. Tu sais, je suis navigateur, pas en première ligne. Moins impressionnant d'un coup, hein ? S'il aimait l'humour, l'autodérision était son fort. Au moins, cela expliquait pourquoi Nate s'éloignait tant des stéréotypes du soldat qu'on pouvait voir partout.

Et alors qu'ils parlaient désormais d'art à nouveau, Pete s'intéressait au brun, se montrant curieux à propos de son carnet à lui. « Et toi, il y a quoi comme talent qui se cache derrière cette belle gueule ? » Son doigt pointé dessus, Nathan sentait bien que l'instant où il devrait l'ouvrir. Je sais pas si on peut appeler ça un talent. Une passion, tout au plus. J'retiens surtout que j'ai une belle gueule. Qu'il lançait, en ayant préféré repartir sur une salve de remarques amusées plutôt que de rester sur cette discussion qu'il avait du mal à assumer. Il n'en pensait pas moins d'ailleurs à propos du Mulligan. Mais il voyait bien que l'intérêt de ce dernier restait sur ses dessins, maintenant que lui avait montré les siens. Si tu rigoles, j'te jettes à l'eau. Je suis peut-être que navigateur mais j'ai la force qu'il faut pour t'y envoyer. Il se montrait faussement menaçant, mais son sourire trahissait sa gêne. Il vint ouvrir son carnet pour en faire tourner les pages, laissant apparaître nombre de portraits d'inconnus ou de visages familiers, quelques scènes volées dans la rue aussi.

« Tu sais, je suis navigateur, pas en première ligne. Moins impressionnant d'un coup, hein ? » Je prends un air faussement offusqué. [color=#006600] « Ah mais carrément, choqué et déçu ! Non je vais partir du coup… » Je fais fine de me lever pendant une demie seconde avant de me rasseoir plus confortablement en riant. « Je me doute ! Du coup tu fais quoi exactement tu conduis les bateaux c’est ça ? » Je pointe du doigt les bateaux décorés. « Ca veut dire que potentiellement on pourrait en piquer un et aller faire un tour à deux ? » Je ris, bien sûr qu’on ne va pas voler les bateaux pour la fête nationale mais l’idée reste intéressante.

Notre conversation se tourne de nouveau vers l’art de nouveau, par ces carnets qu’on tient tous les deux dans nos doigts. Le sien est resté fermé et ma curiosité me démange. « Je sais pas si on peut appeler ça un talent. » Je retiens qu’il semble ne pas avoir trop confiance dans ses talents pour le dessin, pourtant il y a l’air attaché à ce carnet. « J'retiens surtout que j'ai une belle gueule. » Mon sourire s’élargit, peut-être un peu plus charmeur, mon regard bleu s’ancrant dans le sien bien plus foncé. Je le vois il n’a pas l’air à l’aise à l’idée de dévoiler ce jardin secret. « Si tu rigoles, j'te jettes à l'eau. Je suis peut-être que navigateur mais j'ai la force qu'il faut pour t'y envoyer. » Le ton menaçant et le sourire un peu gêné, pas de doute ajoutent à un son charme et je rigole, levant les bras en l’air comme s’il pointait un pistolet imaginaire sur ma tête. « Promis je ne rirais pas ! Et si tu me jettes à l’eau, j’te préviens j’te tire avec moi ! » Mon regard est malicieux mais devient plus sérieux quand enfin Nathan ouvre le carnet, les pages, des portraits d’inconnus ou de visages, des scènes dans la rue de tous les jours. Je les regarde longuement sans rien dire, étudiant les formes, posant ma main sur la papier même un instant pour qu’il ne tourne pas trop vite la page et que j’ai le temps d’observer un peu plus un dessin en particulier. Mon regard remonte vers le sien. « T’es doué. J’aime beaucoup celui-là. Du talent tu en as. » Je lui dis doucement.