Je le regarde, et je l’écoute surtout. C’est important pour moi qu’il soit là, et encore plus qu’il prenne du temps et de l’énergie pour se confier. Je sais qu’il n’aime pas parler de tout ça, et pourtant il ne ment plus ce soir. Je reste à ses côtés, et j’observe la foule de ma place. Il fait encore beau et chaud, j’aime cet endroit et pourtant le moment est bien moins joyeux qu’il aurait pu l’être s’il avait encore décidé de se cacher. « Moi aussi j’aimerais juste… » Il aime me parler et ça me rassure un peu, je ne voulais pas qu’il se sente obligé de me suivre dans cette nouvelle dynamique que je veux installer entre nous depuis des semaines déjà. Dynamique qu’on a réussi à gâcher bien trop facilement, et bien trop rapidement. Je le laisse parler, je le laisse continuer tant qu’il en a besoin. « Arrêter de tout foirer et boire. » Je souris, ravie de voir qu’il peut avoir de bonnes résolutions. “Je suis là pour chaque étape.” Parce que je lui ai déjà dit que je ne comptais pas l’abandonner, ni aujourd’hui ni jamais.

« Pourquoi t’es restée aussi longtemps avec moi alors que je faisais que de la merde Molly alors que je buvais autant ? » La question est compliquée, parce que moi-même je ne connais pas vraiment la réponse. “Parce que je voulais pas te laisser seul. On passait souvent de bons moments, et j’essayais de pas voir, de pas t’en parler, parce que je sais très bien que tu partais à chaque fois que j’abordais le sujet.” Je mords légèrement l’intérieur de ma joue en posant mon dos contre le tronc de l’arbre. Je sais qu’on ne s’est jamais vraiment compris, et pourtant j’ai l’impression que tout commence à changer depuis qu’on a pris cette nouvelle décision. “Je sais que c’était parce que tu te sentais mal, comment je pouvais t’en vouloir pour ça ?”

Ma tête est dans son cou, mes mains posées sur son dos alors que je reste un long moment blotti contre elle, ma respiration se calmant un peu. Je n’aurais jamais été aussi vulnérable devant elle que ces derniers mois. Peut-être parce que cette fois j’essaye de devenir son ami au lieu de venir chercher le réconfort de ses bras pour mieux l’abandonner dès que les sentiments reviennent. Aujourd’hui j’essaye d’exprimer ce mal être à voix haute, de parler de mes envies. J’ai envie d’arrêter de foirer et de boire. Seulement, je ne sais pas si j’en suis capable. « Je suis là pour chaque étape. » Elle ne compte pas m’abandonner et je la serre un peu plus contre moi, ne comprenant pas comme j’ai pu mériter tant de gentillesse de sa part. L’envie a beau être là, l’envie de boire est toute aussi forte, voir plus.

Je lui demande pourquoi elle est restée aussi longtemps avec moi alors je ne faisais que des erreurs, alors que je continuais à boire et à être odieux. “Parce que je voulais pas te laisser seul. On passait souvent de bons moments, et j’essayais de pas voir, de pas t’en parler, parce que je sais très bien que tu partais à chaque fois que j’abordais le sujet.” On s’est détaché l’un de l’autre et je joue de nouveau avec l’herbe alors qu’elle s’appuie contre l’arbre. Elle était trop gentille, elle m’avait toujours fait passer avant son propre bonheur. Jusqu’à ces quelques mois du mois. “Je sais que c’était parce que tu te sentais mal, comment je pouvais t’en vouloir pour ça ?” Je n’aime ni avouer qu’elle a raison, ni l’accepter. Je sors mon paquet de cigarette, allumant une clope pour tenter de calmer mes nerfs. « Parce que j’étais odieux Molly. J’ai peut être foiré pour la première fois à ce point avec Tessa et Mia. Mais avec toi, j’ai foiré dès le départ. Tu méritais pas ça. T’avais et t’as toutes les raisons de m’en vouloir pour ça Molly… » je murmure doucement, tournant la tête pour poser mon regard triste dans le sien.

Il a enfin été prêt à me parler. J’en suis ravie, et je le laisse parler en essayant de l’interrompre le moins possible. Il va mal, et je veux être là pour lui en restant à ses côtés, en le prenant dans mes bras lorsqu’il en a besoin. Et, à cet instant, il a l’air d’en avoir terriblement besoin. Je le serre contre moi, il passe ses bras dans mon dos et on reste comme ça un moment. Je ne sais pas s’il pleure, mais je sais qu’il pourrait le faire s’il en ressentait le besoin. Je ne le jugerai pas, je ne l’ai jamais fait malgré tout ce qu’il s’est passé entre nous alors je ne commencerais pas aujourd’hui.

Je ne sais pas combien de minutes s’écoulent, je ne regarde même plus les bateaux qui se tiennent pourtant en face de nous. Rien n’est plus important que lui et la manière dont il se sent. J’essaie de sourire, de le rassurer, et j’espère que je ne fais pas tout ça pour rien. J’espère qu’il ne regrettera pas de s’être confié de cette manière quand moi, c’était la seule chose que j’attendais vraiment depuis des années. On aurait peut-être dû prendre la décision de devenir des amis il y a des années, ça nous aurait évité de souffrir. Ca m’aurait évité de souffrir sans réelle raison valable. . « Parce que j’étais odieux Molly. J’ai peut être foiré pour la première fois à ce point avec Tessa et Mia. Mais avec toi, j’ai foiré dès le départ. Tu méritais pas ça. T’avais et t’as toutes les raisons de m’en vouloir pour ça Molly… » Bien sûr qu’il se demande pourquoi j’ai tout accepté, je me le demande encore aujourd’hui. Je n’ai pas de réponse claire, à part que j’étais capable de tout oublier par amour. “T’as été le premier garçon à me séduire et à vouloir de moi.” Il sait que mes années lycée ont été compliquées, même si je ne lui ai pas tout raconté. “T’étais différent de tout ce que j’avais connu, tu repousse toujours les limites, tu cherches à t’amuser, et je crois que j’ai besoin d’une personne comme ça autour de moi. Si t’avais pas été là, je pense que je serais pas retournée dans une soirée, j’aurais pas découvert les cocktails… tu m’as apporté beaucoup de choses.”

Les larmes ne coulent pas malgré que mes yeux en soient humides. Lorsque je me détache d’elle son étreinte a aidé un peu du moins.


“T’as été le premier garçon à me séduire et à vouloir de moi.” Je la regarde, conscient d’être allé vers elle à ce moment là parce qu’elle me plaisait, parce qu’elle était mignonne mais plus que tout elle était innocente et naïve et il y avait une sorte de défi dans cette rencontre. Bien sûr après cela avait été différent. Mais au début tout avait été un jeu pour moi dans lequel je m’étais retrouvé piégé. Je ne comprends pas malgré tout comment elle a pu rester avec moi.

“T’étais différent de tout ce que j’avais connu, tu repousse toujours les limites, tu cherches à t’amuser, et je crois que j’ai besoin d’une personne comme ça autour de moi. Si t’avais pas été là, je pense que je serais pas retournée dans une soirée, j’aurais pas découvert les cocktails… tu m’as apporté beaucoup de choses.”

Elle continue de voir le positif malgré tout le négatif mais moi aujourd’hui je vois le verre à moitié vide plutôt qu’à moitié plein et lorsque je me dis que je lui ai fait découvrir les soirées et les cocktails, j’ai du mal à voir quelque chose de positif. Parce que c’est à cause de l’alcool que j’ai tout détruit ces derniers jours.

Mon regard se détourne et je ne sais pas vraiment quoi répondre. « Tu es la personne la plus positive que je connaisse Molly. » dis-je avec un sourire qui tente difficilement de revenir. « On aurait dû essayer d’être ami bien avant ça. » je murmure sans la regarder. Ca aurait sûrement été bien mieux entre nous sans toutes ces complications. J’observe les bateaux qu’on voit encore non loin. « Il y en a un que tu préfères ? »

Je m’éloigne un peu de lui, je pose mon dos contre l’arbre et je regarde au loin pendant de longues secondes. J’essaie de le rassurer, et mieux encore, de le faire sourire. Mais je ne pense pas que je pourrai y arriver cette fois. Il a besoin de temps, il a besoin que je lui laisse un peu d’espace et, surtout, il a besoin de se sentir aimé et en sécurité. Je soupire, je regarde les bateaux et mon attention est de nouveau happée par le jeune homme qui se tient à côté de moi. J’espère qu’il continuera de me faire confiance de cette manière, et que ce moment n’est que le premier d’une longue série. Mon regard se pose sur son profil, et je ne sais pas vraiment ce qu’il veut. « Tu es la personne la plus positive que je connaisse Molly. » Je souris, je ne sais pas si c’est réellement positif. “Je pense que je pourrai jamais changer.” Je hausse les épaules, comme si c’était une tragédie.

« On aurait dû essayer d’être ami bien avant ça. » Ca aussi, je ne sais pas encore vraiment ce que ça veut dire. “Tu regrettes ?” Il m’a posé la question il y a quelques jours de ça, et moi je lui demande s’il regrette d’avoir eu ce semblant d’histoire avec moi. Moi je ne le regrette pas, je l’ai aimé et il gardera réellement un bout de moi jusqu’à la fin de sa vie. « Il y en a un que tu préfères ? » Il change de sujet et je regarde moi aussi les bateaux. “Je crois qu’il y en a un qui navigue pour la cause animale, donc je dirais que c’est celui là.” Je souris, je ris un peu aussi. Je sais que je suis prévisible, et qu’il aurait pu le deviner à l’instant même où il a posé les yeux sur les bateaux en face de nous.

« Je pense que je pourrai jamais changer. » Molly prononce les mots comme si c’était la pire chose au monde, comme s’il aurait fallu qu’elle change et qu’elle en était incapable. Mon regard parcoure sa peau et mon ton se fait doux. « Change pas Molly. Change pour personne. C’est une belle qualité. C’est aux autres de changer. » A moi de changer, j’aurais pu dire mais je ne le dis pas.

On se parle plus honnêtement qu’on ne s’est parlé en dix ans et je ne peux m’empêcher de lui dire qu’on aurait dû essayer d’être amis depuis longtemps. « Tu regrettes ? » Est-ce que je regrette d’avoir été elle au lieu d’avoir essayé d’être son ami ? J’hésite avant de répondre, le silence s’installant un peu. « Je regrette de t’avoir fait souffrir et je regrette d’avoir agi comme un con. » J’hausse les épaules. Je ne regrette pas le reste. Je regrette les mauvais moments, je regrette ma connerie et la façon dont je l’ai traitée. Mais jamais je ne pourrais regretter le reste. « Je regrette de pas pouvoir être l’homme que tu mérites. » Parce que j’aurais voulu pourvoir être celui qu’elle aurait pu épouser et avoir des enfants. J’aurais voulu savoir rester et arrêter d’être lâche et égoïste. J’aurais voulu savoir l’aimer comme elle l méritait.

Cela ne changerait rien aujourd’hui. Parce que c’était trop tard et que je n’étais pas capable de changer. Mon regard se pose sur les bateaux décorés et je lui demande s’il y en a un qu’elle préfère. “Je crois qu’il y en a un qui navigue pour la cause animale, donc je dirais que c’est celui là.” J’aurais dû m’en douter et ça me fait sourire. « Pourquoi ça m’étonne pas ? » J’observe les bateaux et leur décoration et j’en pointe un. « Moi j’aime bien celui coloré de toutes les couleurs là, c’est un bateau joyeux ça se voit. » C’est un peu ridicule comme réponse mais j’en fiche, m’adossant à l’arbre à côté d’elle, mon épaule collée à la sienne.

« Change pas Molly. Change pour personne. C’est une belle qualité. C’est aux autres de changer. » Ces mots me rassurent, parce que j’ai toujours pensé qu’il n’aimait pas cette partie de moi. J’ai toujours cru qu’il aurait aimé que je change, que je sois différente. Je souris et hoche la tête, je crois que je n’ai pas d’autre choix que de rester exactement comme je suis depuis toujours. On reste assis, et je n’arrête pas de le regarder. Il m’inquiète, mais je ne veux pas l’obliger à m’en dire plus. Il s’est plus ouvert en une soirée que pendant une bonne dizaine d’années.

« Je regrette de t’avoir fait souffrir et je regrette d’avoir agi comme un con. » Il ne regrette donc pas notre histoire, et ça aussi ça me rassure. On a vécu de belles choses, même si je me rends compte avec le temps que ce n’était pas sain. Il m’a appris beaucoup de choses, et je ne pense pas vouloir tirer un trait sur tous les souvenirs qui nous entourent. Je ne garderai que le meilleur du nous qui a existé, et je suis persuadée qu’on continuera à se créer de bons moments pour créer une belle amitié. . « Je regrette de pas pouvoir être l’homme que tu mérites. » J’aimerais lui dire qu’il pourrait l’être mais ce n’est pas le moment, ça ne l’est plus. Je ne fais que pincer les lèvres, et continue de l’écouter.

On parle bateaux, et c’est mieux comme ça. Je regarde vers l’eau et il fait de même. « Pourquoi ça m’étonne pas ? » Je ris. “J’y peux rien.” Je hausse les épaules comme si de rien n’était. « Moi j’aime bien celui coloré de toutes les couleurs là, c’est un bateau joyeux ça se voit. » Je souris et je ne peux m’empêcher d’attraper sa main. Je serre une nouvelle fois ses doigts en regardant l’océan. Ma main qui lui dit qu’il va aller mieux, que tout finira par s’arranger.

Je lui ai déjà reproché de pardonner trop facilement. Aujourd’hui je me dis finalement que sa positivité est une qualité à préserver, quelque chose qu’elle n devrait pas essayer de changer. Non c’est aux autres de changer, aux autres de s’adapter. A moi de grandir. Elle mérite mieux.

Je lui explique que je regrette tous les mauvais côtés. Je regrette de l’avoir blessée, de ne pas avoir tenu mes promesses, d’avoir sans doute était le pire petit ami qu’il pouvait exister, incapable de réellement me poser. Je n’ai jamais su rester et il n’y a qu’avec elle que je suis revenu à défaut de ne pas savoir rester. Aujourd’hui pour elle je me dis que j’aurais aimé être différent, vouloir la même chose qu’elle, ne pas être terrifié par cet attachement.

On regarde les bateaux et son préféré est celui qui défend la cause animale. Ca me fait sourire. « J’y peux rien. » Non elle n’y peut rien, parce que les animaux seront toujours au centre de son cœur. Je pointe mon doigt vers un des bateaux, celui qui est le plus coloré au loin. Ca sera celui là mon préféré. Sa main se glisse dans la mienne sans rien dire et pendant un court instant je reste silencieux, serrant ses doigts entre les miens. Durant cet instant j’ai l’impression de pouvoir un peu mieux respirer, que mon cœur est moins lourd dans ma poitrine, que ça ira mieux, que j’irais mieux. « On suit les bateaux ? » Je lui demande avec un sourire. Et aussi simplement que ça, on longe la rivière, parlant de tout et de rien et plus les heures passent, mieux je me sens, parce qu’avec elle tout me semble un petit peu beau. Ma main ne lâche pas la sienne et bien qu’on ne soit plus que des amis, j’ai l’impression qu’elle aura toujours cette place importante dans mon cœur.