Cela ne sera jamais pareil. Ca n’est pas le restaurant qu’il a créé avec son frère, celui qu’il a développé pendant quinze ans, celui dans lequel il est devenu le cuisinier qu’il est aujourd’hui. C’est différent, l’Octopus est différent, et cela a le goût d’une vie nouvelle à laquelle il devra s’habituer. Et si son cœur est serré par une pointe d’amertume, il ressent malgré tout une certaine fierté en voyant ses cuisiniers à l’œuvre dans la préparation des mets qui seront servis ce soir. Tout doit être parfait et tout le sera.  Il ne peut d’ailleurs s’empêcher de grimacer en voyant le visage abimé de Byron et ce dernier a le droit à une remontrance, il a bien de la chance d’être en cuisine sinon Alec ne l’aurait pas laissé se rendre dans la salle.  Lorsque Stacey s’approche, il voit son appréhension et son visage se fait plus doux, le temps n’est plus au déchirement, le Club doit être soudé. Il ne peut s’empêcher de la rassurer, de calmer ses craintes et de tenter d’apaiser le stress qu’il lit dans son regard. Il n’y a aucune raison que quelque chose se passe mal ce soir.

Quelques mots échangés avec Rae alors qu’elle passe en cuisine, un petit discours aux serveurs qui fait office de dernier briefing et la soirée est lancée.  Tout est prêt à présent et les plateaux dansent entre les mains des serveurs. Tout est minutieusement organisé, chaque met plus raffiné que le précédent. Lorsque la première vague est lancée, il sort de la cuisine, pour observer comment tout se déroule, son regard perçant analysant les serveurs, s’assurant que tout se passe bien. Après s’être rassuré que le service est réussi, il analyse la foule, rendant son sourire à Amos. Leur relation a au moins le mérite d’être plus cordiale, l’ouverture réussie. Ils peuvent tous en être fiers aujourd’hui. Il discute avec quelques clients mais finit par être distrait par l’arrivée d’une jolie blonde. S’il ne laisse rien apparaître, son regard s’attarde un peu trop longuement sur Mia. L’idée qu’elle soit dans la même pièce avec des membres du Club ne l’enchante guère mais il a reconnu que ce n’était pas un article qu’elle pouvait refuser. Leurs regards se croisent et il lui adresse un bref sourire avant de se concentrer de nouveau dans sa conversation jusqu’à ce que Sasha entre dans son champ de vision. A elle aussi il adresse un sourire, le ponctue même d’un clin d’œil, le jeu doit rester le même, le charme aussi, malgré la présence de sa petite amie sur les lieux. Le sourire en l’occurrence s’étiole lorsqu’Ichabod fait son entrée et qu’il commence une discussion avec Mia.

Ce n’est pas seulement le fait qu’il doive cacher sa relation avec Mia qui rend cet échange stressant pour l’américain, ou que sa réelle amitié avec l’ancien chef de Manthas doive elle aussi apparaître inexistante, c’est surtout que sa présence vient d’attirer le regard d’Amos et de Raelyn sur lui et par conséquent sur Mia à ses côtés par pur hasard, attention dont Alec se serait bien passée. Au moins il est sûr que l’attention des principaux concernées est concentrée sur l’ancien chef et non sur la jolie blonde.
Son regard croise celui d’Ichabod, sans que son regard n’exprime quoique ce soit. Leur amitié n’a pas de place ici et n’en aura jamais, ça ils le savent pertinemment tous les deux.  La question se brûle les lèvres cependant, que fait-il là ? Raelyn déplace ses pions sur l’échiquier, Sasha puis Geo se déplacent dans la salle sous le regard d’Alec qui se contente de boire une coupe de champagne comme si de rien n’était. Il aimerait pouvoir échanger quelques mots avec Caulfield qui au moins connait le même calvaire que lui de savoir Mia ici.

Il échappe enfin à la conversation donc il était prisonnier après quelques compliments et quelques sourires et se décide à rejoindre Raelyn. « Alors la soirée te parait réussie ? » Un échange banal,  alors qu’il se force à plutôt se concentrer sur les serveurs, bien qu’inévitablement son regard retombe sur Ichabod et par conséquent, Mia. « Qu’est-ce qu’il fait là à ton avis ? »   S’il n’a jamais caché son respect pour Ichabod Bates même lorsque celui-ci était chef d’un gang adverse, l’amitié qui elle s’est créée ces dernières années a toujours été passée sous silence. Il se passerait bien ce soir de sa présence ici,  les masques sont nombreux aujourd’hui et Alec se doit de les manier à la perfection pour que rien ne soit dévoilé.


@Ichabod Bates @Raelyn Blackwell @Amos Taylor @Mia Mckullan @Sasha Sinclair  @Byron Oberkampf @Geo Caulfield

Je n’ai pas la sensation d’être observée car tout le monde ignore qui je suis. Tout le monde ignore ce lien que je peux avoir avec un des membres du Club et quand j’observe l’environnement dans lequel je me trouve, je me dis que c’est pour le mieux. Certains visages paraissent fermés, d’autres plus méfiants, d’autres plus détendus. Je cherche à repérer ceux qui appartiennent au gang. Je n’ai aucun doute sur l’identité des deux personnes à la tête de celui-ci puisqu’Alec m’en a fait une description détaillée. Pour le reste, je l’ignore. Alors c’est une sorte de partie de Cluedo géant qui s’annonce pour moi ce soir, quand je viens à trouver ma place près d’une table de blackjack. La partie en cours n’attire mon attention que deux secondes. Ma coupe de champagne à la main, je préfère m’attarder sur la foule. Peut-être parce que je cherche à retrouver son minois, à le repérer, lui, comme pour calmer une certaine frustration. Celle de devoir prétendre que je ne le connais pas ou que professionnellement. Parce qu’il y a au moins cette excuse que nous pouvons utiliser lui et moi, puisque j’ai déjà écrit un article sur lui et son ancien restaurant. Je finis par le trouver, avec son air charmeur incomparable, ce même air qui m’a fait vaciller lors de notre première rencontre, celui aussi dont il sait user pour sauver les apparences. Il y a ce sourire échangé entre nous, furtif parce qu’il ne faut évidemment pas qu’on nous remarque. J’ignore pourtant que ce bref échange a déjà été repéré par une fine observatrice, cette brune sur qui mon regard fini par se tourner subitement. Non pas parce que j’ai senti son regard sur moi mais parce que le sourire et le clin d’œil qu’Alec a pu lui adresser m’ont tout de suite alertée. Mon cœur s’est même mis à tambouriner plus fort quand j’ai vu cet échange de regard entre elle et lui. Qui est-elle ? Fait-t-elle partie du Club elle aussi ? Dois-je vraiment m’inquiéter quand pourtant je n’ai aucun doute sur la sincérité des sentiments d’Alec à mon égard ? Mon regard se ferme car je n’apprécie pas pour autant l’attention qu’il lui porte, tout comme je n’apprécie pas l’attention qu’elle lui porte. Si elle, elle compte m’avoir à l’œil ce soir, il est certain qu’il en sera de même pour moi.

Je suis cependant vite extirpée de mes pensées par cet homme qui vient à m’adresser la parole et sur qui mon regard fini par se poser « Ne le prenez pas mal mais vous avez l’air perdue ». Un sourire amusé apparait instantanément sur mes lèvres, légèrement moqueur suite aux dires de cet inconnu « Pourquoi ça ? Je ne réponds pas aux stéréotypes des personnes fréquentant un casino ? ». Je viens alors à me tourner vers cet homme que je me mets à analyser et ne remarque pas ainsi que l’attention d’Alec a pu instinctivement se poser sur nous, tout comme de nombreuses autres personnes dans la salle. Parce que j’ignore l’identité de celui qui m’adresse la parole, ne remarquant que sa particularité qui me permet à mon tour de le juger sur la personne qu’il est ou qu’il a pu être « Joueuse ? ». Là encore, la malice peut se lire sur mon visage « Plutôt oui.» je marque une pause, reportant mon regard sur la table de jeu près de nous « Mais ce n’était pas dans mes plans de ce soir. Et vous ? ». Je porte ma coupe de champagne à mes lèvres alors que mon regard se reporte sur la foule. Très rapidement cependant, notre conversation est interrompue. L’échange entre l’homme et Amos Taylor est très bref mais attire ma curiosité, même si je semble ne pas y prêter attention. L’homme à la tête du casino ne s’attarde pas, ne me laissant pas la possibilité de me présenter en tant que journaliste et ainsi de pouvoir lui poser quelques questions au sujet de l’inauguration.

Spoiler:

Geo n’est pas un bavard, Geo me réponds d’un hochement de tête et cela tombe bien puisque je ne lui demande pas de me faire la conversation, mais bien d’être efficace et je sais qu’il l’est. Il ne lâchera pas Ichabod des yeux et Sasha l’abordera si elle estime que c’est nécessaire. Pour l’instant, l’ancien Manthas est en pleine conversation avec une blonde qui m’est inconnue et à laquelle je n’accorde que peu d’attention.

Non, cette dernière, je la destine à la brune que je repère du coin de l'œil. J’ignore ce qu’Olivia fait là mais j’ai du mal à croire qu’il ne s’agit que d’un hasard. J’ai du mal à croire qu’elle ne nous honore de sa présence que pour soutenir mon complice, et j’aurais grincé des dents même en temps normal, même si ma relation de couple n’était pas dans l’état dans lequel elle est ce soir. Amos la rejoint et je ne m’intéresse pas tout de suite à l’homme qui complète leur trio, puisque toute mon attention est focalisée sur la dynamique entre mon amant et la policière. Je me demande si, comme moi, il se demande ce qu’elle fait là. Je me demande si, comme moi, il craint qu’elle soit venue fourrer son nez dans nos affaires, celles qui ne le regardent pas, ou s’il a une telle foi aveugle en elle. Elle pu la fausseté à mon sens, la brune. Et elle m’accapare tant que je ne réalise pas que je referme mes doigts un peu trop fort sur ma flûte de champagne, pas plus qu’Alec s’est approché de moi. « Alors la soirée te paraît réussie ? » Je tourne la tête dans sa direction et j’esquisse un sourire. Nos relations sont ce qu’elles sont, mais je ne peux nier qu’il contribue à la réussite de l’inauguration : sa cuisine semble faire un tabac et ayant moi même picoré quelques petits fours, je suis obligée d’admettre qu’ils sont délicieux. « Elle l’est. » Je hèle un serveur pour qu’il s’approche et j’attrape un canapé au saumon entre mes doigts. « Et félicitations. Les hors-d'œuvre semblent plaire. » Si je n’ai rien pardonné, je prends sur moi pour être autre chose qu’un modèle de froideur. J’ai conscience que notre relation professionnelle ne peut marcher si je ne lui sers que de l’ignorance, et j’y travaille, pas au nom de notre amitié, mais pour le bien de notre collaboration et du Club. « Qu’est-ce qu’il fait là à ton avis ? » Je suis son regard et je réalise que, comme moi quelques minutes avant, c’est le nouveau pion d’Aberline - ou du moins c’est ce que les gens racontent - qu’il fixe depuis quelques secondes déjà. « On dit qu’il bosse pour Aberline. » Maya l’abeille s’entoure mal, mais dans le cas présent, Bates est l’exception qui confirme la règle. « Peut-être qu’elle l’envoie. Mais si c’est le cas, il est déjà sous surveillance. » Je pointe Geo du menton mais je ne pipe mot au sujet de Sasha : si je veux qu’elle reste un petit oiseau efficace, il faut que nous restions discrètes. « Du reste, je doute qu’il trouve son compte avec elle. Peut-être qu’il est là pour ça. » Peut-être souhaite-t-il prendre la température et voir ce que le marché a à offrir. Je préfère largement cette option là et je tourne mon regard vers Alec. « Qu’est ce que tu en penses ? » Du coin de l'œil, je garde toujours le petit groupe formé par Amos, Olivia et le troisième homme en visuel. Je n’aime pas la savoir là, et cela ne fait aucun doute : ma possessivité me poussera à récupérer ma place auprès de mon compagnon dès qu’elle aura débarrassé le plancher.

Ici, les œillades ont bien plus d’importance que les mots. Tout n’est qu’apparence et bien semblant. Autrement dit, tout est faux. Chacun se rend au Casino pour une raison particulière et si je ne doute pas un seul instant qu’il existe pas mal de joueurs invétérés en manque de roues de la fortune et autres jeux de poker, je sais aussi qu’ils ne forment pas la totalité de la clientèle présente ce soir. Bien au contraire, j’oserais même dire. Ma curiosité s’arrête d’abord sur une blonde dont j’ignore totalement l’identité, chose qui ne risque pas de changer à la suite de notre conversation. Mes questions sont vagues, me laissant ainsi tout le loisir d’observer l’antre de la bête et ses membres qui la composent. Si mes prunelles captent brièvement celles d’Alec, elles ne s’y attardent pas pour autant. Il en est de même pour Raelyn avec qui il semble discuter. Bien que cela ne dise rien qui vaille, je ne peux que rester en retrait de la scène et me concentrer sur autre chose. Aujourd’hui je ne suis qu’un observateur, un homme parmi tant d’autres venu profiter de l’occasion pour boire du champagne et picorer des mets - rien qui ne me ressemble, en somme.

« Pourquoi ça ? Je ne réponds pas aux stéréotypes des personnes fréquentant un casino ? » - “Exactement.” Je ne cherche pas à mentir sur le fond de mes pensées: elle ne ressemble en rien aux autres invités. La majorité cherchent à se faire voir, le reste ne veulent que se fondre dans la masse. Elle, elle est ici pour observer. Comme moi. Nos desseins sont pourtant bien différents puisque je doute pouvoir l’associer à un gang de la ville ni même à aucune organisation criminelle. Ceci dit je pourrais me tromper, raison pour laquelle je reste sur mes gardes malgré mon sourire d’apparence. Joueuse? « Plutôt oui. Mais ce n’était pas dans mes plans de ce soir. Et vous ? » Mes yeux ne restent pas dans les siens bien longtemps. Il y a trop à voir ici, trop à observer, trop à retenir. Je ne suis pas un espion, loin de là, mais j’aime savoir dans quoi je m’aventure. “Je ne suis pas du genre à faire des plans.” La question était ailleurs, j’en ai bien conscience, mais je préfère la détourner pour qu’elle se calque sur mes envies. Je ne veux pas mentir à l’inconnue, alors je préfère lui donner une vérité dont elle se moque sans doute pertinemment.

La nouvelle question sans importance que je m’apprêtais à lui retourner est coupée court par l’intervention d’un homme dont l’allure me semble connue, sans pour autant que je ne puisse précisément placer un nom ou même des souvenirs associés. « On s’est déjà rencontré, n’est-ce pas ? » Ma réponse n’apporterait rien. Sa question est rhétorique. Je me contente d’enrouler mes doigts autour de la coupe de champagne qu’il nous présente avec politesse. Si je peux encore associer la blonde à une certaine insouciance, c’est l’expérience qui se lit sur les traits de l’homme face à nous. Il est tout sauf un innocent, un civil. « Mes amitiés, à vous et à elle aussi.. » Qu’est ce que je disais. Mon visage reste impassible et je n’en pense guère plus. Mon association à Aberline n’est pas un secret et en venant ici, je savais par avance ce à quoi je m’exposais. Je n’imaginais pas qu’on viendrait m’en parler en face et une part de moi respecte cette audace. “J’aimerais pouvoir en dire de même.” Encore une fois, ma réponse manque de précision. Je n’en ai aucune à lui apporter et si pour ma part je n’aurais aucun mal à transmettre mes amitiés à qui que ce soit, je doute qu’il en soit de même pour la jeune femme à la tête de La Ruche. Puisque je ne viens pas à sa demande, pourtant, sa parole ne sera pas transmise au travers de la mienne. De toute façon, à peine arrivé et le voilà déjà reparti.

Ma curiosité se retourne donc une fois de plus vers la blonde. “Qui était-ce?” Je n’ai pas la science infuse et n’ai aucun mal à l’avouer, surtout pas alors qu’elle pourrait peut-être m’aider.

« Exactement ». Mon regard se pose sur l’homme. Mon sourire est amusé parce qu’il a l’audace et le mérite d’être honnête. Comment lui reprocher d’avoir un tel commentaire à mon égard quand il a parfaitement raison ? Je ne suis pas faite pour ce genre d’endroits. Même en ignorant ce qui se trame derrière tout ça. Le luxe, les apparences, l’argent qui coule à flots… Je n’ai jamais eu d’attraits pour ce monde, et je n’en aurais jamais. La curiosité me pousse à être là ce soir, mon boulot surtout puisque je dois écrire un article sur le Casino. Et, je dois l’avouer aussi, la présence d’Alec m’a finalement convaincu d’accepter, peut-être dans le souhait de découvrir ce monde dans lequel il évolue même si je tente au mieux d’oublier ce choix qu’il a fait, même si je tente au mieux d’en rester éloigné. Je ne suis pas là pour me montrer, je suis là avant tout dans ma peau de journaliste et pourtant, je n’ai abordé encore personne pour me présenter comme tel. Peut-être par crainte quand on sait ce qui se trame derrière. L’homme avec qui je parle et dont j’ignore l’identité doit peut-être ignorer l’arrière du décor. Ou au contraire le connait. Je n’en sais rien et en réalité, à ce moment même, je ne me pose pas la question. « Vous ne me semblez pas du genre à le fréquenter non plus… ce monde. Mais je suppose qu’on a chacun nos motivations ce soir », je lance alors en reportant mon regard sur la foule. Je me sens un peu plus observée, surtout quand je vois Alec avec celle qui a repris les rênes de l’empire. Ils semblent regarder furtivement en notre direction et forcément, je me demande pourquoi. Est-ce qu’il serait en train de révéler mon identité à Raelyn alors que c’est tout ce qu’il ne voulait pas faire ? Est-ce que c’est l’homme à mes côtés qui attire leur attention ? Je le saurai plus tard, lorsque je le retrouverai et que je ne manquerai pas, je le sais, de lui poser plusieurs questions « Je ne suis pas du genre à faire des plans », me répond l’homme lorsque je lui demande à son tour, s’il est joueur. « Je suppose que c’est aussi bien de ne pas en avoir. Peut-être finirez-vous par vous laisser tenter ce soir par une partie de blackjack », j’ajoute alors que je fais un léger signe de tête en direction de la table qui est juste à nos côtés.

Je le laisse converser ou du moins, échanger un mot ou deux avec le propriétaire du Casino. Lorsque celui-ci s’éloigne, l’homme m’interroge sur son identité « Qui était-ce ? ». Sa question ne me parait pas absurde et c’est peut-être aussi cela qui me confirme qu’il n’a aucun lien avec l’envers du décor. « Amos Taylor » je commence alors « le propriétaire du Casino ». Je termine ma coupe de champagne que je dépose sur un plateau à proximité « Il va falloir que j’aille le rencontrer d’ici la fin de la soirée pour lui poser quelques questions » je dis alors que je regarde l’homme rejoindre un autre groupe de personnes. « Peut-être que je pourrais commencer par vous, vous pourriez me faire part de vos impressions sur les lieux ». Et peut-être que c’est aussi l’unique chose que je pourrais mettre dans celui-ci avec les miennes, quand j’ai la sensation qu’aborder Raelyn ou Amos va s’avérer compliqué ce soir, les deux souvent bien occupés à converser avec d’autres. Me risquer à aborder Raelyn maintenant alors qu’elle est avec Alec me semble inenvisageable, surtout quand il est certain que, bien que nous saurons faire mine de ne pas nous connaitre, nos regards nous trahiront indéniablement sur ce qui nous lie.

« Amos. Son patron.» se présente @Amos Taylor en serrant la main que je lui ai tendue. « On a beaucoup travaillé pour obtenir ce résultat. » Je hausse les sourcils en laissant mon regard parcourir une nouvelle fois la décoration des lieux. « J’imagine. » Je ne me souviens même pas c’est quand la dernière fois que j’ai pris le temps de rafraîchir la couleur des murs de mon appartement, je n’ai aucune difficulté à imaginer tout le travail qu’ils ont dû faire pour obtenir un tel résultat. Le jeu en vaut la chandelle. « D’ailleurs, vous m’excuserez, mais madame m’attend et c’est une impatiente. » J’acquiesce d’un mouvement de tête avant de lui sourire poliment. « Bonne soirée. » « A plus tard » Je l’observe attentivement tandis qu’il s’éloigne. Il a l’air sympathique, mais les quelques mots à peine que nous avons échangés ne me permettent pas de me faire une opinion de sa personne. Je sais au moins qui il est si jamais il cause problème à Stacey. « Qu’est-ce qui t’amène ici ? » La voix de ma sœur me sort de mes pensées et je pose mon regard sur elle en lui souriant, haussant une épaule. « Tu me poses vraiment cette question? D’après toi? » Un serveur passe avec un plateau rempli de coupes et j’en saisi une lorsque nos regards se croisent et qu’il ralentit à ma hauteur. Je le remercie d’un signe de la tête et je porte la coupe à mes lèvres en fixant Stacey. « Je suis venu t’encourager. » réponds-je plus sérieusement. Sa question me donne l’impression que ma présence ici n’est peut-être pas autant appréciée que je l’aurais pensé. « Je n’aurais pas dû? Je ne vais pas rester longtemps de toute façon, je n’aime pas particulièrement ce genre d’endroits. » Je n’ai pas envie d’y gaspiller mon argent, il y a bien assez de Kurt qui ne sait pas gérer le sien. « C’est Mila qui t’envoie ? Je suis persuadée qu’elle t’a appelé pour essayer de te convaincre de l’amener avec toi, je me trompe ? » Je lève les yeux au ciel en riant, hochant ensuite la tête en plongeant mon regard dans le sien. « Elle m’a en effet appelé, mais j’ai refusé. Je comptais déjà venir faire mon tour avant son appel. Je ne suis pas ici pour faire ses yeux ou ses oreilles. » Si elle s’attend à avoir un compte rendu de la soirée, elle sera bien déçue. De toute façon, ce n’est pas comme si il allait y avoir beaucoup d’anecdotes croustillantes à raconter. « Je vais bien si c’est ce que tu te demandes » L’esquisse d’un sourire prendre place au coin de mes lèvres tandis que je prends une nouvelle gorgée de ma coupe. « Moi aussi, merci de me le demander. » réponds-je sur un ton moqueur. Je m’approche de Stacey et je pose une nouvelle fois ma main dans son dos, préférant ne pas l’étreindre devant ses clients. « Je ne vais pas te déranger plus longtemps, je sais que tu dois travailler. On s’appelle plus tard? » Je lui souris affectueusement puis je m’éloigne lentement pour faire le tour de l’établissement. En me promenant, je reconnais Mia un peu plus loin et, machinalement, mon regard parcourt les environs à la recherche de Danika. Je me rends rapidement à l’évidence qu’elle ne doit pas l’avoir accompagnée et, même si je suis légèrement déçu, je sais que c’est mieux que nous ne nous croisions pas ce soir. Je dépose ma coupe vide sur le cabaret d’un serveur et je quitte les lieux pour retourner chez moi.

Spoiler:

Après un échange bref avec Amos, puis entre Amos et Lawrence, je me retrouve seule avec mon frère, du moins, si on fait abstraction de la présence de joueurs anodins à ma table. Je ne peux m’empêcher de lui demander ce qu’il fait ici et je me rends compte que cette question résonne aussi comme un reproche « Tu me poses vraiment cette question ? D’après toi ? » Je repense alors aux paroles d’Amos, celles où il m’invitait à me détendre et à sourire. Ces mêmes conseils, je les applique alors, mon sourire toutefois sincère et non forcé à l’égard de mon frère, pour lui montrer que j’apprécie le geste « Je suis venu t’encourager ». J’acquiesce alors doucement « Merci Lawrence, ça me fait plaisir de te voir ». Ce n’était pas un mensonge, voir une tête familière la rassure surtout celle de son frère ainé. Mais il y a aussi cette crainte de le voir mêlé à ce monde, celui dissimulait derrière les apparences pimpantes du lieu. « Je n’aurai pas dû ? Je ne vais pas rester longtemps de toute façon, je n’aime pas particulièrement ce genre d’endroits ». Et cela la rassure d’autant plus, se disant que son frère ne serait sûrement jamais amené à revenir en ces lieux, où alors que très rarement « Si tu as bien fait. Ça me fait du bien de voir ta tête de grognon ». Ce dernier mot est prononcé dans un murmure pour ne pas que l’on puisse m’entendre, alors que mon sourire est amusé, redistribuant quelques jetons à certains joueurs. Je lui demande ensuite si c’est Mila qui l’a envoyé et surtout, la connaissant, je me doute qu’elle a dû insister pour qu’il la prenne avec elle « Elle m’a en effet appelé, mais j’ai refusé. Je comptais déjà venir faire mon tour avant son appel. Je ne suis pas ici pour faire ses yeux ou ses oreilles ». Je pouffe légèrement, me doutant bien que Lawrence, en quittant les lieux, n’allait pas s’empresser d’aller appeler Mila pour lui raconter. Au contraire, si elle voulait un compte rendu, elle allait devoir beaucoup insister auprès de Lawrence pour obtenir quelque chose. Encore fallait-il qu’il y ait quelque chose à raconter. Je rassure Law en tout cas, en lui disant que je vais bien, sans prendre la peine de lui retourner la question « Moi aussi, merci de me le demander ». Mon regard vient à se poser sur lui, ma mine désolée apparaissant sur mon visage, m’excusant implicitement de ne pas avoir pris la peine de le faire « Je ne vais pas te déranger plus longtemps, je sais que tu dois travailler. On s’appelle plus tard ? ». Je lui souris, ne pouvais faire autre chose que cela quand pourtant une étreinte de sa part m’aurait bien aidé. « Je t’appelle dès que j’ai fini mon service. Merci Law ». Je le regarde s’éloigner quelques secondes, reportant rapidement mon attention sur les joueurs plutôt satisfait de leur partie.

Spoiler:

Le défilé incessant de visages lui donnait le tournis. Amos avait fini par repérer son empressement dans la foule, mais à sa place Chad n'aurait lui non plus pas joué des coudes pour le rejoindre. Une multitude de poignées de main et de politesses les séparaient encore de ce moment qu'il redoutait autant qu'il idéalisait. On aurait pu croire que le lieu était mal choisi pour présenter Casey au reste de sa fratrie, pourtant Chad était convaincu du contraire. Il savait égoïstement qu'Amos serait retenu, sans doute aussi un peu submergé par une attention à laquelle il se dérobait d'ordinaire, et pas forcément plus à l'aise dans l'exercice que Chad l'était lui-même. En fait, les circonstances n'auraient pas pu être mieux choisies. Il gratifia son frère d'un sourire compatissant lorsqu'il fut happé une nouvelle fois dans sa marche fébrile. La plupart des gens présents lui étaient totalement inconnus, et Chad ne put s'empêcher de penser que son ignorance était à l'image de la relation qu'il avait si longtemps entretenue avec son frère. Il ne connaissait pas les détails de sa vie, comme c'était réciproque. A vrai dire, il n'avait pas eu besoin de ce rassemblement pour s'en convaincre. Lorsqu'une voix féminine s'éleva près de lui, son premier réflexe avait été de ne pas détourner le regard. Chad n'avait pas prévu de s'entretenir avec quelqu'un d'autre que Casey, ses frères et leurs cavalières respectives ce soir, aussi avait-il d'abord cru à une erreur. Si la voix était familière, c'étaient surtout les mots qui avaient une résonance particulière. Les gens qui connaissaient son affiliation à Amos dans ce casino se comptaient sur les doigts d'une main. Naturellement il baissa le regard, et son expression se détendit aussitôt. Olivia lui rappelait par la force des choses ses meilleurs souvenirs d'adolescence. Ils s'étaient croisés pour la dernière fois dans un contexte plus funestes, pour l'enterrement de sa nièce, et leurs visages respectifs autant que leurs échanges avaient été de circonstance : tristes et abattus. La voir si pétillante avait quelque chose de réconfortant. « Ça se voit qu'on se croise pas souvent ma chère, sinon tu te souviendrais que je suis particulièrement doué au poker. » avait-il rétorqué sur le même ton taquin. C'était la vérité. La passion d'Amos pour les jeux d'argent n'était pas fortuite, mais un héritage qu'ils avaient tous partagé et duquel les fréquentations de Chad l'avaient détourné. « D'ailleurs, si je le laisse me plumer c'est simplement par charité. » avait-il ajouté en se tournant dans sa direction. Ce petit retour en arrière avait failli lui faire oublier l'essentiel. « Au fait Olivia voici Casey, mon cher cavalier. Casey je te présente Olivia. On se connaît depuis... toujours ? » Il exagérait à peine tant les souvenirs de Kilcoy lui semblaient aussi lointains qu'éternels. Distrait, Chad n'avait pas remarqué que son frère était venu à bout de cette course d'obstacles, tandis qu'il faisait signe à Liam de les rejoindre à son tour, aussi déboussolé que lui dans cet océan inexploré.

« Vous ne me semblez pas du genre à le fréquenter non plus… ce monde. Mais je suppose qu’on a chacun nos motivations ce soir. » La jeune femme suppose bien et je n’ai rien à rajouter à son analyse, surtout alors que mon but est de ne pas me faire remarquer. Pas plus que cela ne semble déjà être le cas, tout du moins. Quand bien même tout le Club doit désormais savoir qu’un intrus se trouve dans leur précieux Casino. Qu’ils se rassurent, l’information ne m’est parvenue que par lien de sympathie et je n’ai aucune envie de la laisser traîner ailleurs qu’à ma seule connaissance. Je suis déjà l’annuaire de Lou, je ne cherche pas à devenir son gps en plus de cela. Elle connaîtra le lieu bien assez tôt, si ce n’est pas déjà le cas. Après tout, l’ouverture d’un Casino fait toujours grand bruit, peu importe la taille de la ville. « Je suppose que c’est aussi bien de ne pas en avoir. Peut-être finirez-vous par vous laisser tenter ce soir par une partie de blackjack. » Il y a fort à parier que ce ne sera pas le cas mais puisque mon rôle ici consiste à faire semblant, je marmonne quelques mots à la jeune femme, lui racontant qu’elle a sans doute raison. Après tout, je sais au moins jouer au blackjack, c’est sûrement un bon début. Mes réserves d’ancien chef de gang me permettraient bien des folies au Casino, qui plus est. Vraiment dommage que ce ne soit absolument pas mon genre ni même mon envie de la soirée.

L’arrivée soudaine d’un homme ne fait que confirmer l’idée que je me faisais d’une étroite surveillance. Pour être honnête, je ne m’attendais pas à être abordé de front, encore moins à ce que la référence à la reine des abeilles se fasse aussi naturelle et peu discrète. A peine l’homme nous a-t-il tourné le dos que je demande à mon amie d’un soir si elle en sait plus à son sujet. « Qui était-ce ? » - « Amos Taylor » Je connais ce nom mais loin, bien loin de tout lien possible avec le Club. Et pourtant. J’ai entendu bon nombre d’anecdotes à son sujet par le biais de Rhea, du temps de la RAN - du temps où je parlais encore à Rhea. L’annonce de son nom ne soulève finalement plus de questions qu’elle n’en répond et mon regard ne se dérobe pas de sa silhouette jusqu’au moment où je finis par le perdre dans la foule, trop dense. « le propriétaire du Casino » Vraiment? "Vous m'avez l'air bien informée." Une réponse de plus, dix questions qui arrivent par la même occasion. Savoir Rhea liée à de telles personnes ne m’inspire rien de bon, même s’ils ne se sont sans doute pas adressé la parole depuis des années. La mère de ma fille se porte bien mieux loin du monde de l’illégalité, il n’est pas le sien. « Il va falloir que j’aille le rencontrer d’ici la fin de la soirée pour lui poser quelques questions » Je l’imaginais plutôt comme une femme de l’ombre, pas comme une d’action. Elle cache bien son jeu et c’est tout à son honneur alors que je reste sans doute trop muet encore. “Vous êtes curieuse à ce point?” Journaliste? Reporter? Joueuse invétérée? Actionnaire? Elle pourrait être bien des choses, si ce n’est même tout ce qu’elle désire. Ma question n’a rien d’un reproche et bien au contraire, je me fais simplement curieux à mon tour. « Peut-être que je pourrais commencer par vous, vous pourriez me faire part de vos impressions sur les lieux » La question venue de nulle part a au moins le mérite de m’arracher un sourire alors que je porte à mon tour la coupe à mes lèvres pour en boire les dernières gorgées. Si mon interrogatoire se résume à donner mon avis sur les lieux, je m’en sors plutôt bien pour un homme infiltré en territoire ennemi. Je dois simplement éviter de me retrouver seul dans une pièce mal éclairée du Casino, voilà tout. “Oh vous savez je ne suis qu’un simple mécanicien. Tout ce luxe me semble tout droit sorti d’un film ou d’un livre, peu importe. Les deux à la fois sans doute. Ça fait rêver, vous ne trouvez pas?” Oh non, absolument pas. Chaque objet est recouvert de sang et il en est de même pour les invités, quels qu’ils soient.

« Elle l’est. » L’esquisse de son sourire le rassure, nourrit l’espoir que ce restaura pourra contribuer d’une manière ou d’une autre à réparer leur amitié. La part de lui bien plus réaliste se doute que ce ne sont que pour les apparences, que si elle trouve la soirée réussie cela s’arrête là, le partenariat est purement professionnel. Il sourit en retour, l’observe attraper un canapé au saumon entre ses doigts. [color:0f07=#indianred]« Et félicitations. Les hors-d'œuvre semblent plaire. » Le compliment lui fait plaisir et il lui adresse un sourire sincère, la cuisine lui avait manqué bien plus qu’il ne l’aurait pensé. « Merci. » Il boit une gorgée de champagne avant de laisser son regard s’égarer dans la salle et trouver Ichabod et à ses côtés, la journaliste.

Il s’est promis de ne pas faire attention à elle et pourtant dans ce lieu, son regard a dû mal à la quitter. Il ne se force à ne pas s’attarder, à se concentrer sur ses serveurs, sur tout autre détail plutôt que sur Mia. Puis il se force à se concentrer sur l’ancien chef de gang plutôt que sur elle et questionne sa présence.

« On dit qu’il bosse pour Aberline. »  Rumeur qu’il commence à un peu trop entendre ces derniers temps. Ca a le mérite d’assombrir son regard. Ichabod ne lui a pas tout dit et il le sait pertinemment. « Peut-être qu’elle l’envoie. Mais si c’est le cas, il est déjà sous surveillance. » Son regard trouve Geo et si le visage du vieux loup de montre rien, Alec commence à assez bien le connaître pour savoir qu’il est tout aussi mal à l’aise que lui par la présence de Mia.  Le regard d’Alec trouve ensuite Sasha. Sasha dont Raelyn n’a pas parlé, Sasha qui pourtant surveille elle aussi la scène il n’en doute pas,  Sasha qui a l’air aussi d’un peu trop s’intéresser à la jolie blonde aux côtés d’Ichabod. La soirée vient à peine de commencer et il est déjà fatigué de ce jeu de faux semblants et d’apparence . « Du reste, je doute qu’il trouve son compte avec elle. Peut-être qu’il est là pour ça. Qu’est ce que tu en penses ? » Alec sirote son champagne, n’ayant aucune intention de parler de sa précédente conversation avec Ichabod à qui que ce soit. Il attrape un petit four au passage, adressant un sourire encourageant au serveur. Une apparence de normalité. «  Je ne pense pas que notre marché l’intéresse. »  Le Club resterait le Club. Mais que trouvait Ichabod à la Ruche c’était une autre histoire. « Pourquoi il bosse pour Aberline, ça c’est une autre histoire. » Une qu’il ne comprend pas. « Pourquoi maintenant après tout ce temps ? » En est une autre.



Il boit une nouvelle gorgée, le regard attiré par l’air paniqué d’un serveur sortant de cuisine le cherchant du regard. Les sourcils d'Alec se froncent, quelque chose ne doit pas aller en cuisine. « Je reviens. »  Il est plus simple pour lui de s’éclipser, de retourner à sa cuisine où il n’a pas la constante impression de porter un masque. Il est mieux loin de tout ça, à l’arrière.


@Raelyn Blackwell

« Vous m’avez l’air bien informée ». Je le suis peut-être trop et bien plus qu’il ne peut le penser. Je ne compte pas lui révéler tout ce que je sais et donc tout ce qu’il ignore très certainement. L’envers du décor, la réelle identité des propriétaires des lieux, ce qui se cache derrière les apparences pimpantes du Casino. A son affirmation, mon sourcil s’arque, un sourire s’esquissant sur mes lèvres « J’ai tout intérêt à l’être si je veux être un minimum crédible ». Ce n’est évidemment pas ce que je lui reproche en retour. Si je me permets une telle remarque, c’est parce que, ce soir, je revêts ma casquette de journaliste et non la casquette d’une éventuelle joueuse compulsive ou celle de petite-amie du chef cuisinier. Cela aurait pu être le cas si tout était plus simple. S’il n’y avait pas eu d’histoires de gang, si notre histoire ne devait pas être secrète aux yeux de tous. Car, dans ce cas, je serai certainement à ses côtés à l’instant T plutôt qu’aux côtés de cet homme dont j’ignore encore l’identité. Sans vouloir offenser ce dernier, dont la compagnie n’est pas dérangeante pour autant. « Vous êtes curieuse à ce point ? ». J’hausse les épaules « Certains diront que je le suis beaucoup trop, mais que voulez-vous, je ne serai pas journaliste autrement ». Je lui dévoile les véritables raisons de ma présence ce soir, et cela ne me dérange aucunement. D’ailleurs, je lui demande de me faire part de son opinion sur les lieux, un avis que je pourrais utiliser dans mon article « Oh vous savez je ne suis qu’un simple mécanicien. Tout ce luxe me semble tout droit sorti d’un film ou d’un livre, peu importe. Les deux à la fois sans doute. Ça fait rêver, vous ne trouvez pas ? ». Je ne suis pas convaincue et cela peut se voir avec l’expression que j’arbore sur mon visage « Pas vraiment… » je laisse échapper avant de tourner mon regard sur lui, la mine sérieuse « Est-ce que vous pensez réellement que ces personnes sont heureuses parce qu’elles ont tout ce luxe justement ? ». Elle n’est pas anodine ma question quand je pointe en réalité du doigt (sans le faire physiquement) ce qui se trame derrière tout ça. Quand je fais allusion à cette utilisation faite du Casino pour gagner en pouvoir mais aussi en argent. Et que je remets aussi en question leur choix, celui de cette vie dans l’illégalité. Cette vie qu’Alec a choisi. Et la réponse je la connais. Mon regard se pose à nouveau sur lui, indéniablement, et une certaine tristesse peut se lire dans mes yeux. Parce que je sais qu’il ne l’est pas… qu’il s’est interdit bien trop longtemps d’être heureux et que, malgré le nous, il y aura toujours une part d’ombre au tableau. Je l’observe s’éclipser vers les cuisines, et reporte alors mon attention totalement sur l’homme à mes côtés « Mia McKullan » je laisse échapper alors en tendant ma main vers celle qu’il reste à mon interlocuteur « journaliste au Brisbane Times et auteur en devenir. Peut-être pourrais-je m’inspirer de ce monde luxueux pour un prochain roman ? ». Un sourire amusé apparait alors sur mes lèvres, alors que j’attends qu’il se présente à son tour, pour que je connaisse en retour son identité même si nous ne serons peut-être jamais amener à nous revoir.

Lorsque je vante brièvement le fait que la jeune femme semble bien informée de la hiérarchie du Casino, je ne manque pas d’analyser sa réaction en parallèle. « J’ai tout intérêt à l’être si je veux être un minimum crédible. » Elle est fière mais ne s’en vante pas, ce qui lui vaudrait sûrement un bon point si j’étais réellement en train de compter quoi que ce soit. Sa phrase reste mystérieuse, laissant planer un doute dans mon esprit pour savoir pourquoi elle a tout intérêt à être bien informée. Puisqu’elle n’est de toute évidence pas liée aux affaires du Club, pourtant, je me garde bien de poser la moindre question supplémentaire. Si elle veut tant parler alors elle finira inévitablement par le faire, je ne me fais pas de soucis à ce propos.

Je préfère au contraire l’interroger à ma manière, vantant le prestige et le luxe déjà acquis d’un Casino pourtant à peine ouvert. Après tout je ne mens pas dans mes propos, je dis bien que “ça fait rêver”, pas que ça me fait rêver. J’aurais pu vivre dans un tel faste durant quelques temps avec l’argent du gang, mais je ne suis pas stupide au point de croire que cela aurait perduré. Vous voyez bien, il ne reste plus rien des milliards d’Escobar, et je ne suis jamais arrivé à même sa cheville. « Pas vraiment… Est-ce que vous pensez réellement que ces personnes sont heureuses parce qu’elles ont tout ce luxe justement ? » Sa réponse est intéressante, elle lui vaut un regard de ma part alors que je détourne le clair de mes yeux de la salle. “Je pense qu’il faut ce qu’il faut.” Les apparences sont importantes dans bien des milieux, mais celui des gangs est sans doute le seul dans lequel la vie de chacun est continuellement en jeu. Montrez la moindre faiblesse et vous chutez aussitôt. Être heureux n’est pas le but généralement recherché et on apprend souvent bien rapidement à ne plus s’en accommoder. Survivre et gagner un nom est ce qui finit toujours par l’emporter, quoi qu’on en dise. “Elles feront le bonheur de bien d’autres gens. Le Casino attirera du monde, ils ont fait une bonne manœuvre.” Je ne m’y connais pas assez pour savoir comment ils s’en serviront exactement pour blanchir l’argent mais leurs intentions sont limpides. Si je suis encore incapable de reconnaître les membres du Club en dehors d’Alec, Raelyn et maintenant Amos, je sais au moins qu’ils grouillent ici tels des fourmis. Mes paroles restent éternellement à double sens puisque j’estime qu’elle ne mérite pas d’être mise dans la confidence, parce qu’elle ne mérite pas que sa vie soit mise en danger et son innocence bafouée.

Les yeux de la jeune femme suivent à la trace Alec sans que je sois capable d’en comprendre la véritable raison, me contentant naïvement de penser qu’elle s’intéresse à la mâchoire carrée de l’américain qu’elle ne connaît ni d’Eve ni d’Adam - comment le pourrait-elle ? « Mia McKullan » Ma main se serre aussitôt autour de la sienne, politesse oblige. J’esquisse même un sourire qui pourrait être crédible si on lui donnait le bénéfice du doute. « journaliste au Brisbane Times et auteur en devenir. Peut-être pourrais-je m’inspirer de ce monde luxueux pour un prochain roman ? » Ichabod Bates, humble mécanicien. Je regrette presque de déjà m’être présenté, j’aurais beaucoup aimé jouer sur le contraste entre nous deux. Ce n’aurait été qu’un caprice enfantin, de toute façon, alors je chasse rapidement ces pensées de mon esprit. “N’oubliez surtout pas la déchirante histoire d’amour, vos lecteurs vont adorer.” Et si je parlais par expérience personnelle, je ne me doutais pas qu’elle était elle aussi très bien informée d’une telle possibilité. Je n’ai jamais été un grand lecteur mais en cet instant je me promets d’acheter son livre, si un jour je retrouve son nom sur une bibliothèque. “A la Gatsby de 2021. Si le livre ne se vend pas alors je n’y comprends rien.” C’est drôle, parce que dans Gatsby le Magnifique aussi il est question de drogue. Comme quoi, ce sujet est bien plus omniprésent qu’on veut bien accepter de le croire. “Je vais peut être vous laisser vous inspirer, alors. Pour ma part j’ai vu ce que je voulais.” Je ne suis pas réellement venu ici pour m’essayer aux machines et je ne compte pas rester assez longtemps pour un tête à tête avec qui que ce soit. J’amasse simplement des informations, en ma qualité d’observateur et humble mécanicien qui n’y connait rien au monde. “Bonne soirée mademoiselle McKullan.” Cette fois-ci le sourire est toujours aussi mince mais bel et bien sincère.

« Je pense qu’il faut ce qu’il faut (…) Elles feront le bonheur de bien d’autres gens. Le Casino attirera du monde, ils ont fait une bonne manœuvre ». Il ne répond directement à ma question, mais il semble cependant partager mon avis. Mais ce qui m’interpelle le plus dans sa réponse est le fait qu’il parle d’une bonne manœuvre faite par les détenteurs du Casino. Une affirmation qui ne me laisse pas indifférente et qui me fait tourner le regard sur lui, cet air un peu suspicieux le guettant. Est-il plus au courant que ce qu’il ne le prétend ? Le cas de figure marche dans les deux cas, que ce soit un simple Casino ou que ce soit un gang criminel qui se cache derrière des apparences légales. Le coup de maitre est ingénieux, et lorsque je pose mon regard une nouvelle fois sur ce qui nous entoure, je ne peux qu’admettre qu’ils ont réussi.

Je me présente à mon interlocuteur d’un soir, il en fait de même en venant serrer ma main dans la sienne. Son nom ne m’échappera pas et ne manquera pas de rester dans un coin de ma mémoire. « N’oubliez surtout pas la déchirante histoire d’amour, vos lecteurs vont adorer ». A ça, je pouffe légèrement en acquiesçant « C’est indéniable, et j’ai la parfaite ressource pour », dis-je non sans sous-entendue qu’il ne comprendra évidemment pas. Parce que ce monde qui n’est qu’apparence cache bien des choses, comme cette relation que j’entretiens avec Alec. Personne ce soir ne sera au courant et cela devra rester secret le plus longtemps possible. Et même si l’inconnu qui semble totalement détaché de ce monde pourrait être un excellent confident à ce propos, à qui j’aurai pu lui dire être intime avec le chef cuisto, je ne préfère pas m’étaler davantage à ce sujet, préférant rester vague.   « A la Gatsby de 2021. Si le livre ne se vend pas alors je n’y comprends rien ». Je tenais peut-être là l’idée de mon prochain roman, grâce à l’homme qui se tenait à mes côtés. Il est fort à parier que ce genre d’histoires plairait certainement à mes futurs lecteurs. Mais il n’en était peut-être pas de même pour les principaux concernés, qui n’apprécieront pas que leur monde soit mis en avant. Alec le premier. « Je vais peut-être vous laisser vous inspirer, alors. Pour ma part j’ai vu ce que je voulais ». Par ces mots, j’ai l’impression qu’il était lui aussi là dans un but précis, lui qui pourtant a su prétendre n’être qu’un simple mécanicien. L’homme est quelque peu intriguant, la conversation plaisante et si nos chemins venaient à se recroiser, il est certain que je m’attarderai certainement plus sur sa personne. « Bonne soirée mademoiselle McKullan » « Bonne soirée à vous aussi, Monsieur Bates ». Je lui rends son sourire et le regarde s’éloigner. Pour ma part, je décide de me mettre un peu en mouvement, faisant le tour de la salle afin d’alimenter cet article que je dois écrire pour l’édition de demain. Je ne m’attarderai pas cependant à la soirée, une fois que toutes les informations grapillés par ci par là sont suffisantes, préférant m’éclipser de cet endroit dans lequel je me sens, malgré tout, pas à l’aise.

Spoiler:

Il était présent ici ce soir uniquement parce-que Amos lui avait proposé de passer. D’ordinaire, Ezra ne se serait jamais pointé seul et de son plein gré dans un casino, tout simplement parce-que ce n’était pas le type d’environnement qu’il aimait côtoyer - et tout à fait également parce-qu’il n’avait pas l’argent sur son compte en banque pour se permettre ce type d’extra à la fin du mois. Mais Amos avait travaillé dur pour en arriver à ouvrir sa propre boite, dépensé énormément d’énergie pour réaliser son rêve, et Ezra ne pouvait que respecter ça; mieux, il comprenait parfaitement où son ami voulait en venir lorsqu’il lui racontait le calvaire par lequel il venait de passer pour en arriver là. Alors le Beauregard s’était dit qu’il n’avait rien à perdre, si ce n’était quelques dollars, à venir passer un bout de sa soirée au casino. Il s’aventurerait peut-être sur une ou deux machines à sous, histoire de tester les choses mises en place, prendrait une coupe de champagne et ne rentrerait pas tard chez lui. D’ici quelques jours, Noah allait venir emménager chez lui pour six semaines et il se devait de préparer l’arrivée de son garçon du mieux possible. Ca n’allait pas être comme toutes ces autres fois où il était simplement venu passer une nuit ou un weekend; cette fois ci, son fils allait vivre avec lui, jours et nuits, et…

Wait a minute. Ezra faillit venir recracher tout le champagne que contenait sa bouche sur le serveur qui passait à ses côtés lorsque ses iris vinrent accrocher une silhouette qu’il connaissait plus que bien. Il vint écarquiller quelque peu les yeux, étonné déjà de croiser quelqu’un qu’il connaissait ici - autre que Amos -, mais en plus de voir qu’il s’agissait là d’Ichabod. Qui, ne pouvant s’empêcher de le noter, était encore en train de parler à une jolie blonde. Ce fut donc avec son plus beau sourire idiot qu’Ezra commença à marcher en direction de son employé, son sauveur, dans n’import quel sens, avant de s’arrêter à sa hauteur au moment où la jeune femme disparaissait de leur champ de vision. « Celle-ci est plus vieille que celle de l’autre jour. Tu t’améliores. » Au moins ici, au milieu de cette foule, Ichabod pourrait toujours lui lancer son fameux regard noir, Ezra ne craignait pas grand chose. « Mais elle est blonde aussi. T’as vraiment un type de femme, Icha. » Enfin, il pensait ne rien craindre à jouer à l’abruti trop sur de lui. Il omettait simplement de se rappeler qu’il s’agissait toujours d’Ichabod à ses côtés désormais.

Spoiler: