« Salut beau gosse ! » elle est désespérante, Victoria ; même pas elle attend que son homme passe le seuil qu’elle est déjà en train de lui lécher les amydales comme si sa vie en dépendait. Peut-être que tu exagères et peut-être que tu détournes les yeux pour ne pas voir cet étendu de bons sentiments dégoulinant d’un amour niais qui te fait presque horreur. Ça te rappelle que ton propre homme à toi est quelque part dans le monde, partout sauf près de toi et que même si ce n’est pas censé être réel, ça a un goût de réalité malgré tout. Malgré toi, surtout. Seulement, ce n’est pas ça qui t’arrête de fréquenter d’autres corps. Et ce n’est pas non plus ça qui t’empêche de grimacer en les voyant s’observer avec des coeurs dans les yeux ; tu ne connais pas ça, avec Dan. T’es jalouse mais tu ne dis rien ; après tout, sans Caleb, il n’y aurait pas eu de Victoria à Brisbane et cela aurait été une perte incroyable à ton existence toute entière. « Salut ma chérie. » ma chérie, que c’est simplet. Arrête d’être aussi négative, petit oiseau, et souris quand ils apparaissent dans la pièce.

« Bonsoir Birdie. Tu vas bien ? » “Salut Caleb. Pour l’instant, tout roule. On n’a pas encore touché à l’alcool et Victoria a réussi à me faire apprendre trois mots en français : limace, hibou et eau. Je sais pas ce que je vais faire de tout ça.” alors tu souris malgré tout, parce que Caleb est chou avec sa petite mèche bouclée sur son front malgré la fatigue et que t’as aucune raison de lui en vouloir - à part que lui peut se réveiller avec le joli visage de Victoria le matin et toi non. Le visage de Dan n’est jamais dans ton lit - ni même dans le sien - et à bien des égards, tu préfèrerais que ce soit celui de Victoria. Elle est si rayonnante, la française, il n’y a qu’à la voir dans une pièce ; elle attire tous les regards. Même ceux de l’oiseau. « Je vous ai rapporté une part de tarte au citron meringuée chacune. » oh quelle adorable créature. Tu tapes dans tes mains en même temps que Victoria trépigne à côté - c’est son dessert préféré, bien sûr. « Je vais prendre une douche, je reviens. »

« T’as déjà goûté à ses desserts ? Ils sont tellement bon. » “Dis avec l’objectivité la plus impartiale du monde, j’en suis sûre.” que tu t’amuses à émettre en te levant pour regarder les desserts que la blonde sort doucement. « Surtout ses tartes au citron meringuée, c’est un véritable orgasme culinaire. » “C’est déjà un orgasme rien qu’à les voir. Caleb pétrit si bien que ça ?” que demande la maligne en relevant les yeux vers Victoria, ce qui fait rire cette dernière avec un grand éclat qui te fait sourire encore plus fort. “T’imagines même pas à quel point.” qu’elle répond avec un clin d’oeil avant de filer dans la cuisine où tu la suis pour prendre la meilleure des assiettes, parce que t’es chiante comme ça. « Dis-moi ma belle tu veux boire quoi avec ça ? Du soft ? Ou de l’alcool ? J’ai un peu de tout. Je te laisse choisir et je te suis sur ton choix. » “Toi, tu veux boire mais tu fais genre “tu me laisses le choix” pour te dédouaner de toute responsabilité, hein.” tu mimes même les guillemets alors que tu t’approches du frigo. “Du champagne! Même si on a rien à célébrer, on peut l’ouvrir, pas vrai ?” t’as déjà la bouteille dans les mains, tu n’attends même pas une réponse négative - tu fais comme chez toi ? totalement.

« Il va comment, Dan ? » la moue devient soucieuse et tu fuis le regard de Victoria en plissant le front. “T’as des coupes ? On peut boire à la bouteille sinon.” je vais en avoir besoin si on parle de Dan. tu passes un doigt contre ton oreille avant d’hausser les épaules. “Pour ce que je sais, il va bien. Tu l’as pas vu, dernièrement ? Il est genre à Hawaï ou une de ces îles avec une belle bimbo colombienne.” t’es pas jalouse en disant ça - juste furieuse. Et jalouse. Ce qui te fait incroyablement chier car ce n’était pas le but de la manoeuvre. Certes, vous avez passé du temps à être amis tout en vous faisant du rentre dedans aussi innocent qu’enfantin, car ça a toujours été votre ligne de conduite, mais depuis cet hiver, tout a changé. Et tu n’aimes pas ce changement, il te rend de mauvais poil quand t’y penses. “Heureusement que j’ai ma belle blonde française pour me remonter le moral.” que tu rajoutes, le visage plus souriant en donnant un coup de hanche à Victoria pour la faire rire - et aussi pour la décaler sur le côté car elle prend de la place, avec sa porte de frigo. “Caleb se fait beau pour nous ? Je suis touchée.” s’il a les cheveux humides, je ne réponds de rien. Que tu dis, la main sur le coeur et la moue adéquate avant de prendre les assiettes pour les ramener dans le salon.

« Clairement trois mots indispensables quand on part en France. » alors tu te plaindras auprès de ta prof de français que les mots qu’elle vient de t’apprendre te font passer pour une idiote devant son fiancé et que c’est vraiment injuste et bas de sa part. En parlant de sa dulcinée, voilà que t’es en tête à tête de nouveau avec elle, avec pour compagnie des tartes au citron suivie d’une bouteille que vous allez rapidement chercher - encore faut-il savoir quoi. « Crois-moi que s’il faisait mal la tarte au citron meringuée, je lui dirais. C’est trop précieux pour que je le laisse bousiller cette merveille. » tu lâches un léger rire en pouvant la croire sur parole ; elle a un visage d’ange, Victoria, et elle a l’humour à portée de lèvres mais quand elle a quelque chose à dire, elle le fait. Ce qui a provoqué parfois quelques soucis et de disputes entre vous - notamment quand elle te dispute comme la mère qu’elle n’est pas quand tu as trop fait la fête et que t’es dans un état lamentable - mais là, il n’y a pas de contrariété à avoir quand c’est à propos de tartes aux citrons meringuées et de son amoureux. « Moi ? Noooon, pas du tout. Tu sais que ça ne me ressemble pas enfin. » tu arque un sourcil. “A d'autres, blondie.” mais il se trouve que tu prends quand même la responsabilité de choisir. Et ça sera du champagne. Et si jamais Caleb demande, ça sera le choix de Victoria. Tu te déroberas volontiers et ça sera la sentence de ton amie pour t’utiliser en retour comme bouclier. « Sinon Caleb va me tuer. Et change pas de sujet. » tu prends la bouteille en soupirant légèrement. « Tu mérites mieux que ce pauvre mec, si tu veux mon avis. » “Vic…” le problème est que vous n’êtes techniquement pas vraiment ensemble. Ce n’est qu’une couverture pour faire plaisir à maman et papa Buckley mais la couverture est vite piétinée quand on voit que Dan ne met aucune discrétion à se pavaner avec des femmes qu’il trouve à tour de bras. “On est pas exclusif de toute façon. Il peut faire ce qu’il veut.” tu grattes distraitement rien du tout sur le comptoir. “J’aimerai juste qu’il soit plus discret. Ou alors il fait ça pour me provoquer.” ce qui ne te surprendrait pas non plus. Tu passes une main sur ton visage. Vous avez bien fait capoter votre amitié, en tout cas. « On peut toujours demander à Caleb s’il a pas un pote à te présenter ? Il sera forcément plus cool que ton Dan. » tu glousses légèrement derrière ta main avant de la ôter et de faire un clin d'œil à ton amie. “Je cherche pas à me caser, darling. Moi aussi, je veux m’amuser.” et dieu seul sait que tu sais t’amuser quand il s’agit de partager les draps, aussi bien que les fêtes. « Qu’est-ce que tu ferais sans moi... » “C’est une question qui me hante à chaque heure et chaque minute de mon existence.” tu mets ta main à l’envers sur ton front, en grande dramaturge d’un lycée de quartier. « Il a pas l’habitude d’avoir deux blondes canons avec lui. » tu ris légèrement en posant la bouteille sur la table et rejoignant Victoria par terre. “Tu m’étonnes. Il devrait pourtant.” après tout, ce n’est pas comme si c’est la première fois que Victoria t’invite chez eux. Cette dernière qui est déjà en train de briser une des tartes et de soupirer de contentement à la première bouchée. « Tu vois ? Je te l’avais dit, elles sont incroyables. » une coupe dans la main et la française semble être dans un véritable paradis sur terre. Tu ris légèrement en la suivant dans ces gestes.

« Du champagne ? On fête quoi ? » “Ton dur labeur!” que tu t’exclames en même temps que Victoria. « On fête les desserts que tu nous as ramenés. Et aussi cette soirée, parce que pourquoi pas. Hein, Birdie ? » tu souris avec complicité à ton amie avant de le déporter sur Caleb. “Elle est peut-être enceinte, qui sait.” tu te prends un coup de coude dans les côtes et tu t’esclaffe de plus belle alors que la blonde rejoint son prince charmant (meh) pour lui apporter sa coupe (genre). « On t’a même servies une coupe, on est pas trop adorables ? » tu bats des paupières avant de secouer la tête, tes yeux sur la tarte pour ta cuillère et enfin la bouchée qui arrive dans ta bouche et damn, toi aussi t’as un soupir d’aise qui déferle entre tes lèvres parce que “t’es foutrement doué.” puis l’œil malin se pose sur le couple en même temps que tes doigts autour de la coupe et c’est quand tu l’amène à tes lippes que tu demandes innocentement. “Est-ce que tu pétris aussi bien Victoria ? Je serai presque envieuse.” et tu étouffes ton gloussement en trempant tes lèvres dans le liquide. Tu rigoles mais à peine ; quelqu’un doué de ses mains pour la pâtisserie, ça doit aussi l’être au lit, non ?

« Tu devrais te venger et toi aussi t’afficher dans les bras de quelques beaux gosses, juste pour voir sa réaction. Bizarrement je suis sûre qu’il aurait un tout autre discours. » tu grimaces légèrement parce “c’est déjà ce que je fais et ça n’arrange pas vraiment la situation” parce que Dan est borné, Dan est fier, Dan est un foutu paon qui préfère se jouer de toi et se pavaner à des bras de magnifiques femmes plutôt que de t’assurer que tu as pris de la valeur à ses yeux comme la réciproque est vraie. Ca n’a été qu’une connerie pure et simple. “Heureusement que je ne me prive pas pour ses beaux yeux, je me sentirai encore plus conne sinon.” parce que cette relation ne rime plus à rien ; elle était marrante dans l’idée, elle était bonne sur le moment, Dan était débarrassé des interrogations de ses parents et toi, tu pouvais te vanter de sortir avec une tête connue (ce n’est pas le pilote qui t’en blâmera). « Tu devrais essayer au moins une fois. Rien ne vaut le sentiment d’aimer et d’être aimée en retour. Le regard d’un homme amoureux ça vaut tout l’or du monde. Et puis quand on est amoureux le sexe c’est comme le feu d’artifice du quatorze Juillet à chaque fois. » tu glousse légèrement. “Une femme me déplairait pas non plus. Enfin je m’en fiche, je recherche pas ce genre de trucs. Même si je t’envie pour le feu d’artifice.” tu ne peux qu’imaginer à quoi ressemble un feu d’artifice pour un tel évènement mais il doit sûrement se rapprocher du vôtre pour l’Australie ; oui, tu as des relations sexuelles à droite et à gauche, des gens inconnus ou des amis mais ce n’est trépidant que sur le moment, qu’au moment de l’extase et t’es à peu près certaine que ce n’est pas le même feu d’artifice dont parle Victoria. T’en sais rien puisque tu n’as rien à comparer dans ce sens - certains diront que c’est triste mais de ton point de vue, tu ne peux pas manquer ce que tu ne connais pas.

« Merci... Enfin, j’ai juste lu la recette. » tu bats la main dans les airs. “Arrête de jouer les modestes, Caleb, et sois fier de toi de temps en temps. Si toutes les personnes suivant une recette devenaient chef, alors il n’y aurait que ça sur terre.” c’est un luxe d’avoir un cuisinier dans ton entourage, ça peut être tellement pratique ; surtout un qui cuisine français et qui est étoilé. Tu sais toujours t’entourer de gens prestigieux sans même le vouloir ni le chercher, c’est assez dingue. « Pourquoi est-ce que j’ai l’impression qu’il y a un double sens à ta question ? » tes yeux passent de Caleb à Victoria qui elle semble t’avoir compris vu son expression amusé placardé sur ses traits. « N’importe quoi, elle pose juste une question sur la pâtisserie, petit pervers. Ça se voit pas comme ça mais il a vraiment l’esprit mal placé tu sais. » “Je vois ça. Le genre agneau de l’extérieur, bête à l’intérieur.” tu réenchéris parce que s’amuser de Caleb qui bougonne et lève les yeux au ciel, c’est terriblement enfantin et complètement vous. « C’est pas vrai… » “Y’a aucun mal à ça, jolie meringue australienne.” que tu dis en lui faisant un clin d'œil. « C’est parce qu’il fait son timide et aussi parce qu’il est bien trop sobre pour se laisser aller devant toi. » tu glousse légèrement en levant ton verre avant de le porter à tes lèvres. “Va falloir arranger ça, alors.” t’es presque minaude à ce moment-là, l’idée d’enivrer le copain de ton amie n’étant pas une si mauvaise idée. Fourbe mais drôle. De toute façon, tu ne lui veux aucun mal, à Caleb. C’est le chéri de Victoria et sans lui, cette dernière n’aurait jamais mis un pied en Australie et tu ne l’aurais jamais rencontrée. T’es carrément reconnaissante envers le joli brun timide et bien trop modeste pour son propre bien.

« On peut changer de sujet ? Par exemple vous parliez de quoi avant que j’arrive ? » tu te masses la clavicule comme si t’avais un truc qui te gênait et, même si ce n’est pas le cas, tu grimaces quand même. Mais tu réponds avant que Victoria n’ait le temps de le faire car tu n’es pas certaine de comment elle va annoncer les choses. “Que je m’en fiche de connaître le feu d’artifice du quatorze juillet quand je m’envoie en l’air.” tu as l’air satisfaite en regardant la blonde, en mode ‘cheh’, comme une gosse que t’es. “Paraît que quand on est amoureux, le sexe est incroyable. Tu confirmes, Caribou ?” oui, il a pourtant aucun lien avec le Canada et alors ? Ca sonne mignon et avec ses boucles humides dans ses cheveux bruns, tu trouves que ça lui va bien. Tu souris en prenant une nouvelle gorgée, la voix et l’expression toute innocente en regardant le couple devant toi.

« Tu vaux bien plus que ça. » je le sais mais je me préfère ne pas m’y reposer trop longtemps ; je ne traite pas Dan de la meilleure des manières aussi, il faut bien l’avouer. Ce qui n’était qu’un jeu devient une véritable guerre entre nous deux, alors que nous avions réussi dans notre amitié à être toujours sur la même longueur d’onde. C’était plus simple de se foutre d’autrui ensemble ; mais là, il se trouve que la conjonction souhaite que nous soyons l’un envers l’autre, avec des attentes que je n’aurai pas soupçonné et des illusions qui se perdent malgré moi. Ce n’était pas dans mes projets de tomber amoureuse d’un de mes meilleurs amis mais il se trouve que je n’ai aucun contrôle là-dessus - je n’en ai même pas complètement conscience, prévoir y voir là juste une compétition stupide entre deux êtres qui cherchent à se faire du mal perpétuellement. J’ai mes torts mais je suis dans mon bon droit car après tout, si Dan prend son plaisir à l’autre bout de la terre, pourquoi je ne pourrai pas faire de même ? « Une femme, un homme, peu importe. Tu le connaîtras un jour ce feu d’artifice, tu verras. Et tu m’en diras des nouvelles. » j’attrape son clin d'œil dans ma vision et je ris légèrement de l’audace de mon amie ; elle paraît si sage, si innocente, la française mais elle est loin de l’être. Forcément, sinon, je ne pourrai pas m’entendre avec elle.

« Je suis là je vous rappelle. »
“Tu entends ça, Vic ? J’ai l’impression qu’un courant d’air nous parle…” que je m’amuse à rétorquer en faisant une expression inquiète, les yeux fixés sur Victoria pour continuer de faire croire que ce n’est que je n’entends ni ne vois Caleb alors que mon amie est collée à lui avec toute la niaiserie dont elle est capable. J’avoue que je prends plaisir à m’amuser aux dépens de Caleb, le joli brun donnant l’impression d’être souvent mal à l’aise et prude à mes prunelles, je n’en fais qu’une bouchée quand il s’agit de l’embêter et de le titiller. En toute amitié, car si je le détesterai, je n’y ferai même pas attention. Ou je serai une vraie garce. Mais le fait que je ris de lui est un signe d’affection de ma part - et ce n’est pas rien, voyez-vous.

« Et après on ose dire que les mecs parlent toujours de sexe ? » je hausse les épaules en me servant dans mon verre. « Je crois que vous êtes pires que nous. » avant de hausser les sourcils avec un léger sourire de coin. “Le sexe est le langage universel. Tout le monde le comprend et y’a même pas besoin de parler. C’est fantastique.” comme concept et comme action, aussi. Enfin, à partir du moment où le consentement est là, ce qui est naturellement sous-entendu. Je ne préfère pas revenir sur ce chapitre et ces pensées alors je me focalise sur Victoria qui rit à nos propos. Je n’ai de toute façon aucun mal à assumer mon amour pour le langage du corps - parce que celui-là, il ne trompe pas. Il est plus simple d’offrir son corps que le reste et je suis extrêmement douée pour ça.

« Moi je suis un ange chéri, j’ai l’esprit pur tu le sais bien. »
« L’esprit pur oui bien sûr… »

Je m’esclaffe grandement en entendant Victoria assurée qu’elle est un ange. “Juste d’apparence, alors. Je serai curieuse de te voir sous les draps. Tous les deux, à vrai dire. Je suis sûre que je serai surprise.” dire que je n’y ai jamais pensé serait mentir. Dire que je n’y ai jamais songé serait mentir. Victoria est jolie, Victoria est attrayante et Victoria est plaisante. Mais Victoria est fidèle et amoureuse ; même si je concède que j’ai bien dû lui faire du rentre dedans au moment de notre rencontre, elle m’a prouvé plus d’une fois qu’elle était loyale à son homme et que son cœur est déjà comblé. Il suffit de voir les yeux emmourachés de Caleb pour comprendre pourquoi. Quelque chose que je n’ai jamais vu ni vécu avec Dan.

« Oh que oui. »
« Alors ça, ça venait du cœur. »
“Je suis absolument estomaquée par ton audace, boucle brun.” j’avoue que je ne m’attendais pas à une réponse aussi honnête et franche, et encore moins aussi spontanée et sans une once de gêne visible quelque part. Peut-être que le champagne est plus fort que je l’aurai pensé, ce qui n’est pas pour me plaindre car ça serait quand même plus amusant si Caleb joue le jeu. « C’est pas pareil, quand on est amoureux, il y a forcément les sentiments qui sont décuplés et t’as encore plus envie de donner du plaisir à l’autre. Alors que quand il y a pas de sentiment c’est vraiment différent. » je baisse les yeux vers mon verre, la mine songeuse alors que les paroles de Caleb atteignent mon cerveau comme je n’aurai pas pensé en premier lieu. Je suis généreuse avec les autres et en général, ils me le rendent bien. Mais je dois manquer quelque chose. Ce petit truc ; avec Dan, c’est passionnel mais ça ressemble aussi à une compétition. Je réalise que j’ai beau enchaîné les coups d’un soir et par moment mon compagnon qui n’en est pas vraiment un, je n’ai pas l’air de comprendre ce dont Caleb et Victoria parlent. Ce qui me fait penser que je ne l’ai jamais connu. « En vrai j’ai jamais couché sans avoir de sentiment alors... » je passe ma main derrière mon oreille alors que Victoria nous ressert généreusement en liquide. “Et je pense que j’ai jamais couché avec de réels sentiments… Car si j’avais connu ça, je le saurais, n’est-ce pas ?” j’ai l’air d’une enfant qui demande conseils et avis à ses parents (un peu awkward comme situation, ça, mais moins devant mon couple d’amis) mais la sincérité de ma question ne peut pas leur échapper. “Avec Dan, c’est plus de savoir qui va faire flancher l’autre en premier… Et le reste, ce ne sont que des coups d’un soir. Rien de très palpitant.” certains disent que j’aurai des tendances nymphomanes car je suis insasiable mais je profite seulement de ce que la vie m’offre. Et ce n’est pas de ma faute s’il y a des corps qui m’attirent sur ma route.

« À notre mariage qui aura bientôt lieu, et à notre amitié, parce que oui ma belle tu vas devoir me supporter jusqu’à la maison de retraite. J’espère que tu es prête pour ça. » je me lève sur mes genoux en riant pour trinquer mon verre contre les leurs. “J’espère ne jamais être enfermée dans une maison pareille. J’exige qu’on me tue avant que je perde la boule. Même si je pense l’avoir jamais trouvé en premier lieu!” que je m’esclaffe en pouffant de rire tout en levant mon verre à mes lèvres. “Il vous reste beaucoup à faire pour le mariage ?” je n’y connais rien et je ne les envie clairement pas. Mais je suis curieuse malgré tout.

« Oh oui, c’est fantastique. » elle parle dans sa langue dont tu ne comprends pas grand chose, à part le “fantastique” qui a la même raisonnance dans les deux langues. Victoria est sûrement en train de se foutre de toi, son air est assez rieur mais ça, c’est son côté naturel ressortant à chaque fois. Elle n’est pas du genre à se prendre la tête pour rien, contrairement à toi qui bute sur beaucoup de détails insignifiants, ce qui complique énormément ton rapport avec Dan qui est loin d’être protocolaire, cohérent et idéal. « Un jour, peut-être. » tu glousses légèrement même si tu es aussi surprise de voir que ton amie n’est pas fermée à l’idée. Celle qui consisterait à les voir ou même à profiter, même si tu as un doute que ça puisse fonctionner avec un couple d’amoureux niais qui feraient sûrement plus attention à leurs rapports entre eux qu’à la troisième personne. Ceci dit, cela serait le meilleur moyen pour voir Victoria dans son plus simple appareil et d’apprécier peut-être Caleb dans un autre univers. T’as presque chaud, tout d’un coup, car les images hypothétiques passent dans ta tête à l’esprit lubrique et très souvent mal tourné. « Quoi ? » tu caches ton sourire amusé en buvant de nouvelles gorgées de champagne, la réaction de Caleb ne te surprenant pas le moins du monde. « On ne sait jamais, mon chéri. Pas vrai ? » elle réitère ses paroles et tu réitères les images dans ta tête alors que tu fixes un point distrait au sol avant de la relever vers Victoria pour t’amuser de son sourire fier d’avoir perturbé Caleb - ce qui n’est pas bien compliqué ceci dit.

« Si tu l’avais déjà vécu tu ne te poserais même pas la question. » donc la réponse est non, tu ne l’as donc jamais vécu ; le sexe est pour toi un moyen simple de communier avec quelqu’un le temps d’un instant, de pouvoir ressentir fort quelque chose pendant quelques minutes avant de partir dans un tourbillon de liberté pour voir si ce n’est pas mieux ailleurs - même si au final, tu as beaucoup d’amis avec qui tu mélanges les rapports de ce genre, c’est sûrement parce que ton corps n’est pas un blocage mais presque un sentiment continu de ta personne. Une façon de se montrer à l’autre vulnérable pendant quelques secondes, de se faire plaisir et de sceller quelque chose. Même si l’ironie veut que tes deux plus proches amis sont ceux que tu n’as jamais touchés - comme quoi. « Après ce genre de petit jeu peut aussi être très amusant et plaisant. » tu grimaces légèrement en secouant la tête. “Non, ça n’a rien de plaisant dans ce cas-là. Si tu veux, à la base, ce n’était même pas censé arriver avec Dan. Mais sa mère était assez chiante, assez étouffante et pour qu’elle lui foute la paix, j’ai proposé à ce qu’on joue les faux couples. Seulement…” tu soupires en tournant le liquide de ton verre d’un geste distrait de la main. “Seulement, je m’attache et je suis sûre que lui aussi, Victoria ricane en secouant la tête, quoi, c’est vrai! Mais il est juste trop con pour le voir et encore plus pour l’assumer!” déjà que tu es réticente à toute forme d’engagement, Dan est encore pire. “Donc le voir traîner avec des nanas différentes tous les jours sur les réseaux… Ça me bute.” et ça, ça t’arrache beaucoup de le dire. Mais tu as bu et tu te sens en confiance avec le couple. D’autant que ce n’est pas Caleb qui pourrait te juger - pas plus que Victoria qui te donne un regard compatissant (de pitié) que tu fusilles du tien.

Et c’est encore pire quand elle parle de maison de retraite car cela suggère la vieillesse, les rides, la perte de la jeunesse et tu ne veux absolument pas y penser. « Alleeeeeer ça pourrait être drôle !  On ferait vivre aux infirmiers un enfer et on pourrait même fuguer de la maison de retraire pour partir rejoindre nos amants qui seront beaucoup plus jeunes que nous. » okay, là, tu réussis à éclater de rire, ce qui ôte ces traits faussement sévères qui ne te vont pas du tout au teint tellement que ça pue le jeu. « Je dois faire les derniers essayages de ma robe dans deux semaines. Je t’enverrai l’adresse et la date exacte, il me faudra ton avis. Mais normalement tout est prêt chéri, non ? » tu sautilles sur tes fesses tout enjouée car s’il y a un bien un truc dont tu colles au cul de Victoria depuis qu’elle t’a annoncé ses fiançailles, c’est bien la robe. “Oh oui, tu sais que tu peux m’appeler jour et nuit pour ça! C’est dommage que t’es pas voulue que je t’en fasse une.” Victoria sourit gentiment, la lueur brillante dans ses yeux. “Tu sais que je veux quelque chose de plus sobre que ce dont tu es capable, ma belle, je ne voulais pas t’infliger ça.” la preuve, tes croquis partaient dans des délires aussi pittoresques que colorés, ce n’est pas étonnant que ton amie t’es mis un stop, sachant que tu es incapable de faire du sobre - tu ne connais même pas la définition de ce mot.

« J’ai une idée ! Et si on jouait à je n’ai jamais ? » tu suis la blonde qui s’est levée des yeux alors que les tiens s’illuminent. “Ca c’est une idée!” « C’est le seul où on est censé boire quand on a jamais fait quel ou tel truc ? » tu éclates de rire. “Non, c’est-” puis tu t’arrêtes une minute pour observer Caleb en plissant les yeux avant de sourire du coin des lèvres. “Oui, c’est exactement ça. Désolée, ça fait un moment que j’y ai pas joué, j’ai presque oublié les règles.” tu as l’attention qui virevolte vers Victoria et t’es presque en train de prier qu’elle joue le jeu ; après tout, il y a des chances de voir Caleb alcoolisé plus rapidement dans ce sens, non ? “Mais d’abord, rapprochez vos verres!” que tu dis en levant la bouteille pour resservir tout le monde. Une fois les coupes remplies de nouveau, tu réfléchis. “Mmh, voyons voir… Je n’ai jamais été dans un restaurant gastronomique.” et là, c’est toi qui commence à boire sous le regard incompréhensif de Victoria. “Quoi, je commence doucement.” que tu dis en haussant les épaules. Enfin doucement pour eux mais pas pour toi

« Pourquoi est-ce que tu lui dis pas simplement que tu l’aimes bien et que tu aimerais officialiser votre relation ? Ou que vous ne voyez tous les deux personnes d’autres ? » tu le regardes comme si une troisième tête vient de lui pousser sur l’épaule - ou parce que la deuxième est naturellement le ventre, c’est bien connu. Encore pire quand c’est un chef étoilé, non ? Victoria se met à rire et tu glousses à sa suite parce que c’est idiot ce qu’il vient de dire, Caleb. Mignon mais complètement idiot. « T’es trop mignon. » tu comprends pas ce qu’elle vient de lui dire et sûrement que tu en es un peu jalouse car toi aussi, tu aimerais bien qu’on te susurre dans l’oreille en français, même si tu n’y connais rien. C’est ce qui fait tout le charme de Victoria, à vrai dire. Tu l’envies autant que tu envies Caleb - quelle situation compliquée. « Parce qu’on parle de Birdie, là. Et de toute façon elle mérite mieux. » tu penches la tête en regardant la française mais tu te contentes de boire le fond de ton verre car elle n’a pas tort ; c’est de toi qu’on parle, de Dan encore plus et surtout, tu mérites mieux. Mais ce dernier point est plus compliqué à ancrer - le fameux adage disant que le coeur a ses raisons que la raison ignore. Tu ne l’aime pas, cette expression, elle t’agace prodigieusement mais surtout, elle te définit parfaitement bien. Ta coupe et tes bulles sont bien plus intéressantes soudainement et ton silence n’est qu’une preuve que la blonde a tapé dans le mille avec sa réponse.

Mais voilà que l’atmosphère se détend ; loin sont tes préoccupations avec Dan alors que vous vous lancez dans un jeu qui devrait aider à te détendre encore plus. Et aussi Caleb, qui le mérite bien après une journée de travail, n’est-ce pas ? Cependant, ton premier move n’est pas perçu comme tu l’aurais imaginé. « Je travaille dans un restaurant gastronomique. » tu regardes Caleb puis Victoria qui prend les devants. « Tu sais quoi ? Je pense qu’il vaut mieux qu’on lui dise les vraies règles. Il a fait bien plus que choses que tu ne le penses et si tu veux le faire boire, ça ira plus vite comme ça. » « Quoi ? » mais Victoria et toi ne prêtez pas attention à sa surprise alors que tu balaies la main dans l’air. “Justement, je voulais commencer doucement pour lui, je sais qu’il travaille dans un restaurant gastronomique, c’est pour ça, c’était pour pas qu’il boit d'entrée de jeu.” tu hausses les épaules. “Je disais ça pour lui.” mais Victoria a compris directement ce que tu voulais et ce n’est pas pour rien que t’es copine avec elle. Cela ne lui pose visiblement aucun souci à ce que son fiancé se rende carpet, tant que c’est dans la sécurité de leur chez eux, rien de grave ne peut arriver. Au pire, il sera ridicule mais ça restera entre vous. Et avec un peu de chance, vous ne serez pas mieux non plus ; l’égalité, c’est important.

« Si tu l’as fait, tu bois. C’est l’inverse de ce que tu pensais, mon chéri. » tu gromelles en buvant malgré tout car elle casse tout ton délire mais soit, suivons les règles même si c’est barbant à souhait. Un peu d’originalité n’aurait fait de mal à personne. « À mon tour ! » tes yeux sur la jolie blonde, tu attends avec un léger sourire, ravie de la voir aussi enthousiaste. « Je n’ai jamais… fait l’amour sur mon lieu de travail. » okay, effectivement, Caleb a sûrement fait plus de choses que tu le penses. Tu lèves ton verre également avant de lever la main. “C’était où ? Me dis pas au restaurant. C’est censé être hyper clean et tout, oh god, mais que fait l’inspection ?!” que tu t’exclames et t’insurges comme la dramaqueen que tu peux être, en en rajoutant des tonnes et des tonnes. « Ok donc c’est à mon tour ? » tu hoche la tête. « Je n’ai jamais volé quelque chose dans un magasin. » je souris à Caleb, je regarde Victoria, elle grimace puis elle boit. “Oh!” « À dix ans j’ai volé des bonbons dans un magasin. Mon père était furieux. » tu éclates de rire avant de taper ta coupe dans celle de ton amie. “T’inquiètes…” pour ensuite boire ta gorgée aussi. “Pour un défi à la con quand j’étais ado.” quand tu as commencé à être un peu conne et stupide mais surtout, où le monde se présentait devant toi avec une vision nouvelle. “Je n’ai jamais embrassé quelqu’un du même sexe que moi.” naturellement que tu lèves ton verre à tes lippes. Tu l’as fait et tu continueras parce que les femmes sont une faiblesse à elles toutes seules à tes yeux.

« Oh… J’avais pas vraiment compris. »
“C’est pas grave.”

Tu hausses les épaules ; si jamais Caleb boit de trop, qu’on ne vienne pas te blâmer car tu as fait ta part, tu as essayé d’aider mais personne ne l’a compris dans ce sens donc tant pis pour eux. Ceci dit, voir Caleb bourré ou même avec juste un verre en trop pourrait être drôle à voir. Et puis, voilà que la première affirmation tombe ; Caleb évoque d’avoir déjà fait des cochonneries dans un lieu public, son restaurant en plus, celui qui est vanté d’avoir sa première étoile dans un futur proche. C’est du beau - mais ça t’éclate, cela va s’en dire, car tu ne t’y attendais pas du tout. « Pas dans la cuisine, détends-toi. » tu lèves ta main en signe de paix. « Enfin pas dans la cuisine du restaurant. » tu roules des yeux avant de sautiller sur place. “C’était où, c’était où, c’était où ? Allez, vous pouvez pas ne pas donner l’information complète maintenant.” c’est cruel de jouer avec les nerfs des gens en attirant leur curiosité de la sorte.

« Vraiment, c’est dommage qu’on ait grandies sur des continents différents, on se serait bien amusées. » tu glousses car tu as la même impression. “J’étais pas si populaire que maintenant, tu ne m’aurais même pas calculée, je pense.” oui, tu te vantes et tu te déglingues dans une même phrase - ce n’est que la vérité, il faut dire. Quand tu étais enfant et adolescente, tu n’avais pas énormément d’amis. Tu étais même dans le groupe de personnes dont on se moquait allègrement - mais tu as fini par prendre ta revanche en plein milieu de l’adolescence. Au moins, tout ça t’a appris à ne pas te laisser marcher sur les pieds.

Sous ta proposition à toi, voilà que tu bois un nouveau coup sans aucune surprise - tu regardes toutes les formes, que ce soit les culs ou les seins, tu te laisses amadouer facilement et tu séduis tout aussi simplement. Tu n’as pas le sexe compliqué, encore moins juste pour quelques baisers. Tu serais un mec, tu serais un petit Don Juan. Mais tu es une femme, donc tu serais cataloguée comme une salope. Que l’injustice persiste. « Sérieusement ? » ton regard suit celui de Caleb et voilà que tu vois toi aussi Victoria prendre une gorgée. Surprise tout pareillement. Un petit coup de chaud aussi à l’idée qu’elle a déjà essayé - une pointe d’envie envers la personne avec qui elle a testé. « Oui, j’avais vingt et un an, j’étais curieuse je me demandais comment c’était d’embrasser une femme. C’était pas si mal, mais juste quelques semaines après j’ai rencontré Caleb et… » et ? « …j’ai tout de suite su que je venais de rencontrer mon prince charmant. » tu mords ta lèvre pour retenir ton râle désabusé de cet abus incroyable de niaiserie. Au lieu de ça, tu restes concentrée sur le fait que Victoria a déjà embrassé une fille. “Si c’était juste “pas si mal” c’est que c’était pas la bonne fille.” tu fais un sourire de coin avec un clin d’oeil à l’appui. “Je peux me dévouer à la cause pour te donner un meilleur aperçu si y a besoin. Ou envie.” tes yeux qui dérivent automatiquement sur ses lèvres avant de tremper les tiennes dans le liquide ambré par défaut et réflexes.

« Je n’ai jamais été surpris en plein acte par quelqu’un. » voilà que tu fais la moue pour réfléchir - si c’est arrivé, tu ne m’en rappelles pas. Nouvelle surprise de voir Caleb lever son verre à sa bouche. « Par mes parents. À dix-huit ans. C’était ma première fois. » tu ouvres la bouche avec stupeur avant de porter ta main devant pour rire car c’est absolument horrible. « C’était traumatisant. » “Ohmondieu, Caleb! C’est horrible!” tu ris de nouveau alors que la tête de Victoria tombe sur ton épaule et franchement, pour de vrai, tu compatis. “J’aurai été traumatisée aussi. La première fois en plus! T’as fait ça chez tes parents du coup ? Quelle gênance!” puis tu grattes ton oreille avant de hausser les épaules pour lever ton verre à tes lippes. “J’ai bien dû me faire surprendre une fois.” cela ne te surprendrait pas. “Et puis j’ai soif.” ton verre est d’ailleurs presque vide à force de picoler aussi rapidement.

« Je n’ai jamais envoyé des nudes. » tu vois Victoria finir son verre et tu fous ta main sur ton visage en rigolant à gorge déployée, basculant presque vers l’arrière. “Comment ça, tu me l’as jamais dit ?! C’est une information importante, ça!” mais comme c’est l’hôpital qui se fout de la charité, tu bois le fond de ton verre à ton tour en posant avec force l’objet sur la table basse. “Il faut savoir se faire désirer. C’était pour toi, Caleb ?”