« Ma licorne glacééééééeeeeeeee » oh non, il ne va pas t’avoir à coup de surnoms stupides dont vous avez le secret et dont tu trouves sacrément plus douée dans le domaine - un trait de famille mais encore une fois, cela prouve que Will a toute sa place et toutes les raisons du monde pour avoir ton nom de famille. Mais là, tu ne souris que moyennement ; t’as plutôt l’air d’être une mère qui regarde son gosse rentrer à pas d’heure après une soirée trop arrosée. Ou qui revient tout simplement au bercail - parce que l’ado des soirées arrosées, c’est toi. Non seulement t’as dû dévaler les escaliers, mais en plus il a l’air d’une grande impatience à tapoter sur la porte de façon répétée - il a plutôt intérêt d’avoir ramené une étagère d’un rayon entier de bonbons pour se faire pardonner d’une telle offense. « Je suis content que ce soit toi qui m’ouvre, mon dragibus. » tu plisses les yeux en le regardant, prête à dégainer les armes avant de voir son sac. Genre, un vrai sac qui a l’air de peser son poids en vêtements - il vient vraiment de débarquer comme ça chez toi ? Chez vous ? Certes, tu avais dit à Jordan que t’allais invité Will, mais tu n’aurais pas pensé que Will se serait invité de son plein gré. Tu n’as pas eu l’occasion de lui proposer les jours passés, sachant que tu n’étais pas en état de toute manière. « Jordie est pas là ? » il ne te laisse même pas le temps de répliquer, mais par contre, il reste dans l’entrée comme un idiot alors qu’il voit bien qu’il y a un escalier à monter, non ? Il n’ira pas loin au rez-de-chaussée composé seulement du studio de Jordan et du garage - à part s’il veut dormir dans le garage le plus clean du tout Queensland. “Salut, mon bonbon à la menthe poivré, ravie de te voir aussi, il ne peut y’avoir que moi qui t’ouvre car non, Jordie est pas là et il sera pas là pendant encore deux semaines mais vas-y, rentre, je t’en pris, oh, mais t’es déjà là, c’est fou, fais comme chez toi, mais pas trop non plus, merci!” tu refermes la porte derrière lui avec un sourire mielleux et les yeux battants une mesure rapide, le traitant clairement de stupide idiot sans le dire mais en le démontrant.

« J’ai ramené un sac avec quelques affaires tu penses que je pourrais rester quelques jours ? J’ai besoin de prendre l’air, un peu. Je pense que je fais une crise de la quarantaine précoce. » donc oui, c’est bien ‘quelques affaires’ dans ce sac et t’es à peu près sûre qu’y a pas de playstation là-dedans donc la situation doit être encore plus critique que tu ne le penses. T’es foutrement curieuse et cet idiot te fait croire que c’est la crise de la quarantaine. Quelle blague, vraiment. « Tu crois que c’est possible ? » “Pour que t’atteigne la crise de la quarantaine, faudrait déjà que t’arrête d’agir comme un enfant de six ans.” et ça, tout le monde sait que ce n’est pas possible. Tu fais signe à son sac avant de monter l’escalier. “Faut grimper les marches pour atteindre le lieu de vie alors ramène ton sac. Je vais pas être ta bonniche. Par contre, il va falloir me dire pourquoi t’as besoin d’un toit. C’est pas dans tes habitudes.” donnant donnant, car tu n’y crois pas à son excuse bidon et il a plutôt intérêt à se mettre vite à table (et on ne parle pas littéralement, ahem) car sinon, tu seras sans pitié et il en a parfaitement conscience. Tu l’amène dans la pièce à vivre où là encore, tu fermes la deuxième porte d’entrée non officielle. “Et t’enlèves tes pompes ici. J’ai pas envie de nettoyer toutes les cinq minutes.” tu ne comptes pas rendre à Jordan une porcherie à la place d’une maison mais si tu pouvais avoir à nettoyer le moins possible, ça serait le comble du luxe. “Bon alors, qu’est-ce qu’il s'est passé ? Tu t’es disputé avec Adèle ?” que tu demandes en t’affalant dans le canapé et en remarquant qu’y a toujours aucun paquet de bonbons en vue. C’est scandaleux, vraiment.

« Putain t’es super agréable toi aujourd’hui. » il est foutrement silencieux tout d’un coup et quand il se remet à parler, c’est pour mieux mordre en retour. T’as été si abrupte que ça ? T’as pas fait attention. Tu n’as pas passé des jours merveilleux ces derniers temps, tes nerfs sont sûrement en pelote et t’es visiblement en train de t’en prendre à Will qui n’a rien demandé qui veut que ton soutien pour quelque chose, t’ignores encore juste quoi. « Si tu voulais pas que je reste pendant quelques jours il suffisait de me le dire tout à l’heure par message aussi, ça aurait été plus simple. » tu fronces des sourcils parce que ce n’est pas son genre du tout d’être comme ça, aussi emmerdé, aussi sérieux, aussi enclin à se barrer parce que tes ondes sont mauvaises ; normalement, il se fout de toi et il devrait déjà avoir son cul sur le canapé et les pieds croisés sur la table basse en te demandant si y’a des chips quelque part - Will, quoi. Mais là, il y a quelque chose d’anormal, il reste planté sur le seuil, osant à peine rentrer et ça te fout le cafard encore plus - t’en as pas besoin, non. “J’ai pas dit ça, si ?” à aucun moment tu n’as voulu te montrer désobligeante avec lui, tu lui demandes juste de faire attention et d’enlever ses chaussures, il n’a pas non plus besoin d’être aussi sensible, quoiqu’il se passe dans sa tête et dans sa vie. « Non, ça n’a rien à voir avec Adèle. » bon, c’est déjà ça. Si c’est pas avec sa cousine, pourquoi a-t-il besoin de se tirer de l’appartement ? Tu ne comprends pas.

« Mais bref laisse tomber, je me tire, je vais trouver un autre endroit où rester pendant quelques jours. » et il n’a pas l’air enclin à t’expliquer plus alors qu’il prend son sac et commence à tourner les talons. Tu soupires en balançant ta tête en arrière ; visiblement, vous en avez tous les deux sur la patate et il serait temps d’aller rattraper son cul de nigaud pour le ramener ici avant de le perdre dans la nature. “Dis pas de conneries.” tu te lèves pour te diriger vers la porte et tu l’attrapes en attrapant son sac, les amenant tous les deux dans cette foutue pièce. Et cette fois, tu fermes la porte pour être sûre qu’il ne se barre pas. “Je voulais t’inviter à dormir, de toute façon, j’ai juste pas eu la tête à voir du monde ces derniers jours.” tu passes une main sur ton front en grimaçant. “Désolée, je voulais pas paraître rude, j’ai pas vécu les meilleurs instants de mon existence donc j’ai peut-être les nerfs un peu en pelote… Mais c’est pas de ta faute.” franchement, si tu sors d’une dispute avec Jordan pour en avoir une avec Will juste après, t’es à peu près certaine que tu finiras par t’enterrer dans la chambre jusqu’à ce que mort s’en suive - au minimum. Alors tu ravales tout ce que tu peux, l’égo, la fierté, la salive, l’envie de le claquer car il ne voit que des idioties, et tu vas le prendre dans tes bras parce que tu l’aimes, ton mari, bordel de dieu, et t’aimes pas le savoir chafouin comme ça. “Reste autant que tu veux, okay ?” au final, t’es carrément plus douce car t’es pas parée pour mener plusieurs batailles, surtout quand elles sont idiotes et surtout quand c’est toi la coupable sur tous les plans. “Mais je veux savoir ce qu’il se passe. Tu m’inquiètes quand t’es comme ça.” genre vraiment. Ce n’est pas dans vos habitudes d’être aussi sérieux - et ça a été plutôt toi qui s’est retrouvée à crécher chez lui que l’inverse. Y’a rien qui va dans cette équation et tu veux en savoir la cause. Prête à retourner tout Brisbane s’il le faut.

« Tu me sauves la vie, merci. » évidemment que tu n’allais pas le laisser à la rue, ton meilleur ami, ton mari, ton jumeau de cœur. D’autant qu’il a vraiment l’air mal, pas dans ses pompes, la mine rabougrie et pour qu’il se vexe aussi rapidement, c’est qu’y a quelque chose de conséquent qui se passe. D’habitude, c’est toi qui t’enflamme pour rien, qui s'égosille pour des trucs ridicules et qui fait perdre la tête à tes proches à cause de tes réactions disproportionnées (même si pour toi, elles te paraissent cohérentes mais tu es une grande incomprise de ce monde). Il revient, il rentre, il enlève ses chaussures (t’es fière de lui et je suis sûre que de son studio en Thaïlande, Jordan aussi est fier de lui) et je le vois qui commence à poser son sac. « Y a plus internet à la coloc. Tu comprends, c’était une question de vie ou de mort, il fallait que je trouve un endroit où je ne serai pas coupé de la civilisation. » tu plisses les yeux ; tu veux bien croire que ça peut arriver et que Will soit capable de ce genre de choses mais quand même, il y met pas beaucoup du sien et du canapé où t’es affalée, tu penches la tête avec l’air stipulant clairement que tu ne le crois pas vraiment. « Adèle a balancé la boxe par la fenêtre, elle pète un câble. Tu crois que je devrais l’emmener voir un psychiatre ? » “Si c’est le cas, jette-là aussi par la fenêtre, non ?” un problème, une solution, répète ta soeur, tu ne fais que l’écouter en suggérant le plus simplement du monde ce plan qui t’as l’air parfait sous tout point de vue - si on oublie le fait que Will risque la prison pour acte de meurtre, ahem. Pauvre Adèle, elle ne mérite pas autant de violence envers elle, petit feu follet qui a vécu l’enfer mais qui s’est relevée gracieusement et avec force. Non, vraiment, vous êtes cruels, là. “Nan, c’est pas drôle, je retire ce que j’ai dis.” car t’as du respect pour Adèle, quand même, faut pas déconner, même si elle est parfois chiante à vouloir voir quelque chose entre Will et toi alors qu’y a rien et qu’y aura jamais rien - la preuve, t’es pas avec ce blond-là.

« Plus sérieusement… » nous y voilà, parce qu’évidemment que tu n’y crois pas à son histoire d’internet. Si ça n’avait été que ça, il aurait fait les grands dramaturges, mais il n'aurait pas été vraiment sérieux. T’es complètement accrochée à ses lèvres - pas littéralement, meh, non, c’est pour vos versions adolescentes, ça - trépignant intérieurement et priant pour qu’il se magne le cul à cracher le morceau. « J’ai couché avec ma coloc, du coup l’ambiance est un peu awkward. » “Quoi ?” oh Birdie, t’as très bien entendu, faut arrêter de faire genre que non alors que oui. T’éclate de rire malgré tout. “Waaw, il était temps que ça arrive, monsieur “je m’entoure que de meufs H24 chez moi”, hein ?” si Will trouve ça gênant, toi tu trouves ça hilarant - évidemment. “Par contre… On parle de quelle coloc, là ?” car si tu sais qu’il y a des femmes autour de lui, à part Adèle, tu ne te rappelles d’aucune des autres. Tu finis par tapoter la place à côté de toi pour inciter ton mari à venir s’installer - il ne va quand même pas rester debout comme un idiot, si ? Au moins, la venue de Will te distrait grandement de ton mal-être des jours passés, c’est extrêmement plaisant. “Je vois pas où est le problème. Vous avez passé un peu de bon temps, ça fait du bien, non ? T’as été performant, j’espère ?” oh god, sûrement que Will va t’en vouloir de lui poser ça mais t’en as rien à faire ; t’es fière de voir que ton meilleur ami ne perd pas totalement la main de ce côté-là - il a quand même osé à Vegas sous LSD. T’es comme un professeur qui demande si son élève préféré a réussi le test haut la main ; on n’est pas vraiment loin, à vrai dire. T’as du mal à croire que Will fasse tout un fromage juste pour ça, ce n’est pas si aberrant que ça à tes yeux.

Tu n’aimes pas vraiment les sensations qu’il y a dernièrement. Ce n’est pas franchement une étape jolie à passer, même si tu sais que les jours meilleurs finiront par arriver, ton esprit optimiste n’a pas l’air d’être pressé de venir frapper de nouveau à la porte. Pour l’instant, tu donnes l’impression de manger tout ce que tu mérites et ce n’est pas franchement très appétissant. Voir Will aussi renfermé n’aide pas non plus ton moral - enfin ça, c’est avant qu’il te dise la raison profonde et réelle d’une bouille aussi chafouinne. Et la raison est tellement adorable que perce irrémédiablement un sourire sur tes lèvres ; ça fait du bien et t’es presque heureuse que ton meilleur ami soit venu te voir au final. Tu n’aurais pas pensé qu’il aurait réagi d’une façon aussi radicale pour une simple coucherie, toi qui te faisais déjà des montagnes et qui t’inquiétais, l’ascenseur émotionnel est foutrement présent. Cependant, t’es ravie de voir qu’il n’y a rien eu de si grave ; ça aurait pu être pire, tes scénarios dans la tête l’ont prouvé plus d’une fois. « Bah à ton avis ? » tu plisses les yeux sous son air condescendant ; t’es censée le deviner ? C’est une vraie auberge espagnole, cette colocation, ça va, ça vient, ça part, y’a que Will et sa cousine qui sont constants dans ces murs. Ces filles ne t’intéressent pas plus que ça, évidemment que tu ne t’en rappelle pas. Ce qui te frustre un peu sur le moment car tu aurais bien aimé te rappeler de leurs tronches pour savoir laquelle a réussi à dépoussiérer l’engin mis en berne depuis Vegas - t’es quand même fière de lui, il faut bien l’avouer. « Prim bien sûr. Je vois pas avec laquelle tu veux que je couche. » Prim… “C’est la blonde ou la brune ?” oh misère de misère, tu n’as vraiment aucune mémoire quand tu ne t’intéresse pas, c’est incroyable. Ceci dit, tu te rappelles vaguement de les avoir vu toutes les deux pendant la fête des voisins ; si c’est la blonde, tu vas croire que Will tape dans les jeunettes, et si c’est la brune… Il doit apprécier les coincés. Au moins, tu te souviens de tes aprioris, à savoir si c’est une bonne chose ou non - et vu leur nature, tout porte à croire que non.

« Le problème c’est que c’est bizarre maintenant. » tu roules des yeux parce que tu ne comprends vraiment pas où est le souci même s’il vient de te le dire aussi limpidement que clairement. Il faut dire que tu n’as jamais réussi à avoir des colocataires sans que ça ne déborde en relation sexuelle un moment ou un autre, les aléas d’avoir une sexualité débridée et libérée, combinée à des envies à satisfaire un peu trop souvent (mais hey, personne ne s’en est plaint jusqu’à maintenant). Cependant, la technique de la fuite de ton mari est largement quelque chose que tu peux comprendre. « Tu penses que dans combien de temps ça reviendra normal entre nous ? Faudrait pas qu’Adèle se doute de quelque chose déjà. » t’as un sourire amusé qui s’agrandit sur tes lèvres. “Pourquoi, elle serait jalouse ?” la petite prude enfantine d’Adèle t’amuse beaucoup trop, il faut dire. « T’as des chips ? J’ai envie de chips. Tu me montres où est la cuisine pour que je cherche des chips ? » tu plisses les yeux tout en balayant ton bras juste en face de vous. “Elle est juste là, espèce de bigleux.” cuisine et salon ouverts, c’est à la fois un plaisir et une contrainte. “Fais-toi plaisir. Mais évite de casser quoique ce soit, s’te plait.” et tu sais qu’il va le faire. “Je peux pas savoir pour vous comment ça reviendra. Même si j’aurai fait la même, je suis pas sûre que débarrasser le plancher soit la meilleure des solutions. D’autant que la pauvre fille va se sentir coupable de savoir que tu n’oses même plus être chez toi par sa faute.” tu ne fais que t’avancer vu que tu ne connais pas vraiment ses colocataires. Il faudrait que tu te penches sur cette Prim, visiblement. “Qu’est-ce qui te perturbe tant que ça ? Qu’elle dise à quel point t’as été nul ?” que tu (re)demandes avant de te pencher pour tapoter son genou. “Moi, je suis fière de toi, mon bouchon de champagne pétillant.” il est de loin la meilleure nouvelle que tu as eu ces dernières vingt-quatre heures ; est-ce que tu vis par procuration ? Oui, tu sais te réjouir des aventures de tes amis. Will est un grand garçon, il finira par passer à autre chose et à régler son problème ; il a juste besoin de temps. Et au moins, lui a pris du bon temps ; on ne peut pas dire que ce soit la même chose pour toi dernièrement.

« La brune. » donc celle qui a l’air d’avoir le balai dans le cul. Ou l’effarouchée. Très bien, tu vois laquelle c’est. A peu près. Il faut dire que tu ne t’intéresses pas vraiment aux têtes de passage quand tu vas voir Will. Il aurait pu faire pire donc mine de rien, tu es plutôt fière de lui. “T’as un faible pour les brunes, décidément.” que tu dis avec un ton rieur tout en lui rentrant le coude dans le bras. Après tout, son ex charmante femme était aussi brune. Aussi coincée du cul, d’ailleurs. Une romantique. Oh god, tu espères que Will n’est pas en train de te refaire le même schéma que des années plus tôt. Il ne va pas s’enticher pour des potiches ingénues à chaque fois, si ? Okay, le bon côté dans la situation actuelle est qu’il ne s’agit que d’une histoire de coucherie. Une seule fois, ce n’est rien une seule fois. Qui te dit que ça ne va pas se reproduire ? Et qui te dit que ça ne va pas finir comme Jordan et toi ? Oh non. Non non non et non. Tu refuses d’y penser. Tu apprécies que Will soit célibataire, voyez-vous. Au moins, tu peux l’accaparer autant que tu veux sans avoir une femme sur tes côtes à te faire sentir que t’es de trop ou que tu n’es pas la bienvenue. Il est bien, libre, ton mari. C’est comme ça qu’il doit vivre sa vie. Il a essayé le couple, il a essayé le mariage, ça a été deux beaux échecs cuisants alors pourquoi il irait s’empiétrer de nouveau dans une affaire aussi sordide dont il sait qu’il ne va pouvoir qu’être malheureux au final ? Non pas que tu souhaites la mauvaise providence à ton meilleur ami, loin de là, mais tu penses simplement que Will n’est pas fait pour être en couple. Comme toi. Normalement. Oh tu espères ne pas t’être attirée le mauvais oeil en pensant ça. Tu ne pourras t’en prendre qu’à toi-même. Après tout, tu n’es pas censée être taillée pour ça. Oui mais la différence est que Jordan et toi vous accordez mieux que Will et Sofia ne l’ont jamais été - évidemment, c’est très objectif tout ça, n’est-ce pas.

« Moi qui voulais péter toute la vaisselle. » tu clignes plusieurs fois à coup de paupières exagérées. “Très bien. Fais. Mais je te laisserai régler l’addition avec Jordan.” pour le coup, ça ne sera pas de ta faute et ça sera très bien comme ça. Ton partenaire aime quand c’est rangé, t’ignores par contre s’il tient auxdites affaires. Cela serait une bonne occasion pour le savoir - ou pas, à vrai dire, la vaisselle de Jordan est aussi très bien là où elle est. Tes fesses ne quittant pas le canapé, tes yeux suivent Will jusqu’à la cuisine pour faire mine de le surveiller (et être sûre qu’il ne prenne pas la porte mais il a l’air de s’être assagi, le garçon). « Tu crois ? » t’hausses les épaules. “Ca serait pas surprenant. Elle a l’air d’être de ce genre-là.” chieuse, pleurnicheuse, timide, réservée, tous ces termes différents de toi et qui te font grimacer. Même si elle a quand même réussi à se faire Will. C’est presque équivalent à attraper un Pokemon rare, à ce stade - ce qui te convient parfaitement car ton mari est précieux et il ne mérite que le meilleur. Pas les premières traînées qui peuvent passer… Un peu comme toi, en somme. « Je veux pas qu’elle se sente coupable quand même. Mais ça ferait bizarre si je lui envoyais un message, non ? » tu hoche la tête et la main. “Pas de message, non, sinon elle va clairement savoir que c’est à cause d’elle. Par contre, tu peux envoyer un message à Adèle. Genre t’es parti pour… Je sais pas, une urgence de dinosaures à l’autre bout du pays à la dernière minute ou qu’on passe la nuit à tester les matelas d’un hôtel luxueux pour savoir lequel fait le meilleur trampoline. Ca serait beaucoup moins bizarre.” y’aura plus qu’à compter sur Adèle pour répéter à Primrose le message l’air de rien et les deux filles seront rassurées chacune de leur côté. En tout cas, un petit mensonge n’a jamais fait de mal. “Parce que sinon, tu lui enverrai quoi, comme message ? Salut, Prim, désolé pour l’autre soir, surtout te sens pas mal mais j’ai besoin de partir de l’appart pendant quelque temps, bisou bisou ? Avoue que c’est pas mieux.” c’est même carrément affligeant. Toute cette situation est affligeante et tu ne comprends même pas pourquoi les gens font tout un drame d’une histoire pareille.

« Alors déjà j’ai pas été nul. » tu glousses légèrement. « Enfin je crois pas. » puis tu ris franchement car même lui n’a pas l’air d’en être sûr, c’est assez drôle. Tu évites d’avoir l’image dans la tête car ça reste Will. Mais son hésitation face à ses compétences sont assez drôles. Au moins, il en a conscience si c’est le cas. Beaucoup d’hommes pensent qu’ils sont extraordinaires alors qu’il n’y a pas grand chose à en tirer. « Mais non je sais pas ça me gêne, genre je l’ai vue toute nue maintenant et je dois agir comme si rien ne s’était passé ? J’sais pas c’est un peu gênant. » tu te penches pour aller mettre la main dans le paquet de chips afin d’en prendre une poignée avant de t’avachir de nouveau dans le canapé. "Ce sera plus comme avant. Au mieux, essaie d’avoir une conversation avec elle et de passer à autre chose. Au pire… Je sais pas, tu finis à la rue ?” oh, t’abuses, Birdie, sérieusement. Tu fourres une chips dans ta bouche tirée dans un trait amusé parce qu’il est clair que c’est la situation la plus drôle que t’es entendue ces derniers jours. « On m’a proposé de rejoindre une équipe de chercheur à l’Université. » oh. “Oh mais c’est génial ça! C’est le truc que t’as toujours voulu faire, non ? C’est hyper cool!” que tu t’exclames en allant t’avachir à moitié sur lui pour lui faire un câlin de façon un peu étrange, sur le côté et les mains avec des chips. “Attends, t’as dit ‘proposé’ ? T’as pas encore accepté ?” que tu t’arrêtes deux secondes en te redressant pour regarder ton mari avec le point d’interrogation dans les prunelles. Décidément, Will est rempli de bonnes nouvelles contrairement à toi.

« Ouais c’est pour ça que t’as aucune chance avec moi. » “As if.” elle rit légèrement en se prenant le poing de son mari dans l’épaule, Birdie ; comme si Will avait eu la moindre chance avec elle en premier lieu. Quand ils étaient gamins, il y a bien eu cette passade que tout le monde a vu comme le joli début d’un beau conte à l’eau de rose, les amis d’enfance qui tombent éperdument amoureux. Seulement, même si c’était un joli début rempli de cuteness et moments gênants, il n’y a jamais eu le truc. La flamme. La passion. L’amour véritable. Ils s’aiment, ces deux-là, ne vous y trompez pas. Ils l’ont prouvé qu’ils s’aiment profondément ; mais malgré les bagues à leurs doigts respectifs et les promesses offertes à un curé sous la forme d’un chanteur des années d’avant, il est clair que leur amour n’est que fraternel. Une fraternité solide et intense, mais un lien malgré tout purement amical. Pour Birdie, cela s’équivaut - ou s’équivalait. Parce qu’avec ce qu’elle vit ces derniers temps, le bon comme le mauvais, le meilleur comme le pire, c’est finalement bien plus fort qu’elle ne l’aurait pensé ou imaginé. Mais son adoration envers Will reste inébranlable - aussi qu’elle fait l’effort de mettre une nouvelle fois de l’eau dans son vin pour ne pas faire fuir une nouvelle fois une autre personne importante à son oxygène personnelle - l’accumulation des derniers jours a été un peu trop pour le petit oiseau qui tempête et qui s’égosille mais qui réussit à s’échouer bien plus rapidement qu’on ne peut le croire.

« J’ai déjà dit à Adèle que je venais faire quelques pyjamas parties chez toi. » elle pouffe de rire, la gamine. “Des pyjamas parties. Ça fait bien au moins quinze ans que je t’ai pas entendu dire ça.” ça lui rappelle des souvenirs, à la demoiselle. Ceux où Will et elle faisant les yeux suppliants aux parents Dunham pour que ces derniers acceptent qu’il dorme chez elle. Ceux où ils allaient se réfugier dans leur cabane confectionnée durant le début de leur adolescence par Zeke, perché en haut des arbres en pleine forêt. La cachette idéale pour faire la carte de leur monde imaginaire et de se faire des promesses que jamais rien ne les séparera. Il se trouve que l’oiseau s’est déjà envolée une fois loin de son dinosaure ; autant dire qu’elle ne retentera pas l’expérience une nouvelle fois. « Quoi ? Tu veux que je lui parle du fait que je l’ai vu toute nue ? » la Cadburn s’exclaffe car la situation est hilarante en son sens, mais pas au goût de son mari qui provoque l’effroi et le malaise mais d’une sincérité qui la dépasse, elle et son esprit libre, son corps libre aussi qui en a vu beaucoup trop pour être effarouché par un tel scandale. Le seul scandale est sûrement le fait que Will se pose beaucoup trop de questions et que sa Prim ne doit pas mieux agir de son côté. « T’es bizarre, toi. » elle hausse des épaules d’un air las. “Alors passe directement à autre chose. Et évite de la revoir nue si ça te gêne tellement.” le petit sourire de coin, fourbe à souhait, signe qu’elle n’en pense pas moins, la maligne ; son meilleur ami a pris du bon temps malgré tout. “Tu profites que je sois maintenant en couple pour faire ton womanizer, c’est ça ? Tu devrais t’inscrire sur Tinder. Ça pourrait être drôle.” une idée lancée sur le ton de l’humour dont elle ne pense pas une seconde à sa réalisation parce que Will est deux choses : un solitaire et un casanier. Et une troisième qu’il assume moins ; il a peur. Il aime son confort, ses habitudes, sa routine, sa manette. Alors Tinder n’est qu’une idée humoristique, une bonne tranche de rire passagère dont elle ne se laisse pas bercer très longtemps.

Il scrunch et scrunch ses chips alors que les prunelles de sa dulcinée amicale reste accrochées à sa forme le temps qu’il finisse ses foutues chips qui la maintiennent en dehors de la portée de la réponse pendant quelques secondes supplémentaires. « Non. » les sourcils fins blonds se soulèvent de surprise ; comment ça, non ? Mais la question n’a pas le temps de déferler car ce sont tes oreilles qui sont accarapées. « Ça me fait un peu flipper parce que ça me demanderait de beaucoup voyager. » et là, c’est comme si un bout d’elle-même se brisait un peu en elle. Ca me demanderait de beaucoup voyager. Elle se redresse complètement cette fois-ci ; évidemment qu’il aurait besoin de se déplacer pour faire ses recherches, cela tombe sous le sens. Mais même quand tout le monde s’en va partout à l’autre bout du globe, qu’elle attend comme une pauvre gourde sur son île, l’oiseau a toujours pu compter sur Will. Parce qu’il est toujours là, son mari. Il n’a jamais chaviré, jamais parti, jamais bougé. Il stationne et il est content, ravi même de le faire. Et voilà qu’il dit qu’il va voyager. Beaucoup, en plus - même si la notion de beaucoup de Will n’est sûrement pas la même que le commun des mortels. Elle l’espère presque, en tout cas. « J’ai le droit à un temps de réflexion alors je pèse le pour et le contre. » sa tête est penchée vers le sol et elle aussi, elle fait la liste des pour et contre. “C’est ton rêve de gamin, Will.” qu’elle dit doucement en regardant ses doigts. Elle n’ose pas lever ses paupières contre lui car elle sait ; son coeur est bien trop mou ces derniers jours pour pouvoir prétendre qu’elle ne va pas craquer. Elle en a conscience, elle déteste ça alors elle préfère fuir, comme toujours. “Tu devrais évidemment dire oui. Il y a pire que de voyager. Paraît-il que c’est sympa.” elle a eu le temps de le savoir et de le comprendre. Asher, Heather, Zoya, Malachi, Jordan, son frère, sa sœur, ses parents… Tous voyagent pour des raisons diverses et variées. Birdie n’aurait jamais pensé rajouter Will sur cette liste. “Tu veux quelque chose à boire ?” qu’elle finit par dire comme une excuse pour se lever et aller à son tour dans la cuisine. Elle est émue, la gosse, et même si son meilleur ami n’a pas encore dit oui, elle se prépare déjà à devoir le laisser partir aussi. Autant dire qu’elle n’est pas prête pour ça.

« On devrait en refaire une, tu penses pas ? » je le regarde en souriant. “Mais c’est exactement pour ça que t’es là, mon asticot verdoyant!” je m’exclame dans une intonation forte et claire. Il me redonne un peu d’envie, Will. J’ai envie et besoin de sa présence, de la présence d’autrui pour aider à apaiser mon moral et mon être. C’est pour cette raison que j’ai toujours préféré habiter en colocation ; je n’aime pas être seule très longtemps. Et là, après m’être disputée avec Jordan et Zoya, je me sens terriblement en solitaire. J’aurai pu (dû) l’appeler ; Will est mon meilleur ami et même s’il semble être détaché émotionnellement, je sais qu’il aurait été de meilleures oreilles et une meilleure épaule que Zoya. Peut-être qu’il aurait évité la visible catastrophe de coucher avec sa colocataire si j’avais été là. Même si, à mes yeux, il n’y a pas tant de tracas à avoir à ce propos. « Bah c’est surtout l’après qui est gênant. » je fronce le nez en remontant ma bouche pincée, peu convaincue par ses propos. Avant de faire un clin d’oeil. “Donc le ‘pendant’ était cool.” autant voir le côté positif des choses, non ? Will est une distraction parfaite qui tombe un poil en retard mais à pic quand même. La perspective qu’il loge ici pendant quelques jours est parfaite ; il va pouvoir constater que la télévision ne vaut pas celle de la villa d’avant mais que l’image est tout aussi belle. A ce stade, il pourrait y avoir sa console dans son sac que je l’aiderai à l’installer si y’a besoin. Je sais comment rattacher mon meilleur ami à moi, après tout. « Tinder, sérieusement ? Je sais pas ça fait pas trop le mec qui a trop la dalle ? » j’hausse une épaule en piquant une chips. “A part si tu préfères te taper ta colocataire… C’est que t’avais la dalle à ce moment-là. Si tu dépoussiérais tout ça un peu plus souvent, ça n’arriverait pas. Je dis ça pour le bien être de votre colocation.” bien sûr, on y croit tous ; j’avoue que je veux juste m’amuser à swiper et à voir si par hasard mon mari ne pourrait pas trouver des expériences aussi étranges que bizarres sur cette application. “Tu sais, je connais une fille, une actrice en plus, qui a visiblement trouvé l’amour dessus. Peut-être que ton âme soeur est dessus aussi.” j’ignore comment Penny a fait mais elle a réussi à trouver une relation sérieuse au milieu de ses dick pics. Un exploit.

Puis mon esprit devient plus lourd, plus morne de nouveau sous l’annonce que Will me fait. Je ne m’y attendais pas. Mon premier réflexe serait de m’accrocher à lui toute entière en le suppliant de dire non mais… Il me parle de ça depuis qu’il est gosse. C’est son rêve de gamin et ça se concrétise un peu plus chaque jour. Je ne peux pas être une branche sur son trajet, aussi lourde et épaisse que je peux être. Il a travaillé dur pour en arriver là, ça serait pûrement égoïste de ma part que de le freiner et de le faire douter. Alors forcément que je vais le pousser à le faire. Même si mon coeur est lourd et que j’ai déjà envie d’en pleurer. « Tu viendras me voir quelque fois ? » ma moue a dû mal à assurer l’assurance quand il me lance son regard d’enfant cherchant l’aval de l’adulte et je suis à peu près certaine que je vais me mettre à chialer s’il continue comme ça. « Même si je dois partir dans le pays le moins glamour du monde ? » je lâche un souffle en lui souriant de mieux que je peux. “Evidemment. Tu te débarrasseras pas de moi aussi facilement, Will Cadburry.” et je l’étouffe dans un hug car j’ai le droit, j’ai la fidélité de son amitié à mon doigt et qu’importe s’il est perdu dans le trou du cul du monde, je le retrouverai toujours.

Pour m’éviter de craquer, je le lâche avant de filer dans la cuisine pour proposer à boire. J’aurai bien taper dans la Tequila de Jordan mais je ne suis pas sûre d’avoir envie de boire après ce qu’il s’est passé. « Un coca je veux bien. » alors je vais chercher la bouteille et un verre - non, un mug qui me fait sourire où je sers le coca bien crémeux à mon meilleur ami. “Tiens, je t’ai mis ça dans le mug de Baby Yoda de Jor. Interdiction de le casser ou je te casse la tête en retour.” et dieu seul sait à quel point je suis douée pour ça. Est-ce que j’essaie d’amadouer Will envers Jordan ? Totalement. Je ne suis pas sûre que ça sera sur pause un jour ; j’ai à coeur qu’ils s’entendent bien en étant les deux personnes les plus importantes de mon existence à jour-ci - en-dehors de ma famille. « Tout à l’heure t’as laissé sous-entendre que t’avais pas trop la forme. Qu’est-ce qu’il y a ? C’est Jordie qui te manque ? » il s’installe sur le plan de travail avec la question qui fait ressasser les souvenirs de ces derniers jours. Je soupire légèrement en passant une main dans mes cheveux avant de croiser les bras. “Encore plus que d’habitude.” parce qu’on s’est disputés, que je suis en faute et que j’ai juste envie qu’il soit prêt de moi pour l’étouffer de mes baisers. “J’ai fait la conne. J’ai posté quelque chose sur instagram qui ne lui a pas plu. Jor m’a pas parlé pendant trois jours et…” un nouveau soupir en allant m’accouder au plan de travail, mes bras à côté de la forme assise de Will. Les trois plus longs jours de ma vie. “Bref, j’ai été complètement stupide. Je ne l’ai pas pris au sérieux il y a quelques mois. Mais visiblement, mon partenaire a un vrai problème avec son apparence ; j’ignorais à quel point.” je mords ma lèvre, peu certaine que j’aurai dû dire ça mais… C’est Will, je dis tout à Will, même ce dont il s’en fout. “Alors oui, iel me manque car j’ai merdé et que je peux pas l’avoir contre moi là maintenant tout de suite pour me faire pardonner.” s’il y a bien une personne qui connaît mes capacités à revenir la queue entre les jambes, c’est mon mari. Quand je me sais coupable, j’ai tendance à faire la moue désolée au bout de plusieurs heures ou jours, des gâteaux ou autre pour me faire pardonner dans les mains. “Et puis je me suis aussi disputée avec Zoya. Je sais pas pourquoi je suis allée la voir pour tenter de trouver du réconfort. J’aurai mieux fait de venir te voir ou même Heather.” je lève mon regard vers lui en souriant légèrement tout en tapant mon coude contre sa cuisse. “T’aurais évité le scandale de la coucherie avec sa coloc si j’avais fait ça.” mais je ne l’ai pas fait car j’ai préféré me morfondre au milieu de glace, de biscuit, de chocolat et de films de Noël.