We’ve been friends for so long I can’t remember which one of us is the bad influence ft @Amaya Spellman

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Mabel venait de sortir du cabinet médical, pour un suivi de grossesse. Des rendez-vous normaux, juste pour voir si le bébé grossissait bien, mais qui la plongeait autant dans la joie de voir se rapprocher le moment où elle rencontrerait son enfant et l'angoisse qu'il se passe quelque chose de terrifiant. Son gynécologue lui avait assuré plusieurs fois que c'était normal et que la plupart des futures mères ressentaient ce stress, ça ne l'aidait pas à mieux gérer les choses.

Heureusement, son mari arrivait à venir aux consultations, même s'il devait parfois sécher le bureau quelques heures. Sa présence était réconfortante pour Mabel, et l'aidait à mieux appréhender les choses. Il savait la faire rire, et comment la détendre quand elle était trop tendue, attendant une mauvaise nouvelle - qui ne venait jamais puisque leur bébé était en pleine forme, grandissant comme il fallait.

Il venait de partir rejoindre leur maison pour un rendez-vous en visio très important, et plutôt que de le suivre pour rester silencieuse dans sa propre maison, Mabel avait décidé de se balader un peu dans Logan City. La proximité des parcs lui donnait un bon objectif de marche, même si elle n'était pas sûre de pouvoir aller très loin. A presque sept mois de grossesse, marcher devenait difficile, lui faisant mal au dos et l'essoufflant facilement. Mais ses médecins lui assuraient que continuer à faire un peu d'exercice était bon pour elle et le bébé, aussi essayait-elle de marcher régulièrement, même sur de petites distances.

Alors qu'elle peinait à avancer, la chaleur de ce joli jour de printemps n'aidant pas, elle finit par se laisser tomber sur un banc bordant l'avenue, ses mains venant caresser son ventre instinctivement. Elle allait plonger la main dans son sac pour commander un uber quand il lui sembla reconnaître une silhouette. Elle se redressa pour mieux observer la jeune femme, attendant qu'elle soit à portée de voix pour l'interpeller.

« Amaya ! Comment tu vas ? »

Elle aurait pu être étonnée de croiser son amie, mais les rues du quartier commençaient à se remplir, les gens sortant manger et profiter du ciel bleu. Et peut-être aussi qu'Amaya travaillait dans le coin - Mabel ne se souvenait plus vraiment de ce que faisait la jeune femme, où du quartier dans lequel elle travaillait.

« Je te dérange pas ? » demanda-t-elle quand même par acquis de conscience.

Ce n'était pas parce qu'elle profitait de sa fin de grossesse pour essayer de se reposer que c'était le cas de toutes ses connaissances. Pour ce qu'elle en savait, Amaya pouvait avoir un rendez-vous professionnel, et Mabel ne voulait pas la retenir si c'était le cas.

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Il faisait beau ces dernières semaines, et Amaya semblait avoir déjà profité des rayons du soleil, affichant déjà quelques couleurs sur son visage. Ça donnait presque envie à Mabel de quitter sa véranda ou l'abri de sa maison pour profiter à son tour du beau temps - mais elle savait que soleil et grossesse n'étaient pas vraiment compatibles et n'avait pas envie de tenter le diable malgré toutes les couches de crème solaire qu'elle pourrait se mettre. Il ne lui restait qu'à admirer les Australiennes autour d'elle en attendant l'année prochaine...

« Et bien écoute, ça va pas trop mal ! J'essaye de profiter un peu du quartier tant que je peux encore marcher. »

Une activité pleine d'espoir, son ventre lui ayant interdit depuis un moment les longues promenades. Il ne lui restait plus que la possibilité de faire quelques mètres avant de s'asseoir fatiguée, ayant l'impression d'avoir couru un marathon.

« Il fait déjà assez bon pour la plage ? » demanda-t-elle ensuite, un peu surprise.

C'était encore le début du printemps, et il ne faisait pas si chaud. En tout cas, pas assez pour Mabel pour aller à la plage et se baigner, ou rester sur la plage à bronzer. Peut-être que les surfeurs trouvaient leur bonheur sous le ciel bleu, mais ils avaient des combinaisons leur tenant chaud. Là, il faisait à peine une vingtaine de degrés le matin, bien trop peu au goût de la jeune mannequin.

« Si tu as un peu de temps, je veux bien qu'on aille s'asseoir quelque part ! »

Mabel aimait discuter avec Amaya, son amie étant toujours une oreille attentive et pleine de bons conseils. Mais si elles étaient amenées à passer un bon moment ensemble, parce qu'elles étaient toutes les deux libres, Mabel n'allait pas tenir au milieu du trottoir. La fatigue et le poids supplémentaire au niveau de son ventre n'aidaient pas vraiment à ce qu'elle apprécie la station debout.

« Je deviens pas grand chose. J'attends avec impatience de ne plus avoir l'impression d'être une baleine ! Ça devient difficile de me déplacer sans avoir le souffle coupé » avoua-t-elle doucement.

Heureusement que Brisbane comptait de nombreux bancs et cafés. Mabel se laissa donc presque tomber sur les chaises du café le plus proche d'elle, profitant un peu d'être assise et de pouvoir souffler.

« Tu es de congés ? C'est cool d'avoir un travail qui permet de se poser en semaine ! Tu fais quoi déjà ? »

Amaya avait déjà dû lui dire, mais Mabel n'arrivait jamais à se souvenir de ce qu'elle faisait exactement. Elle se sentait bête à le lui redemander à chaque fois... Heureusement que la jeune femme n'en prenait pas ombrage !

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Mabel devait être une grosse frileuse - ou peut-être qu'elle l'était normalement, et que c'était Amaya qui était hors norme. Mais la perspective de se baigner à cette époque de l'année suffisait à la faire frissonner. Quoi que même au cœur de la chaleur, elle n'aimait pas particulièrement faire trempette - elle s'était plus souvent retrouvée à la piscine pour la couverture de magazines de mode que par plaisir personnel.

« On se connaît depuis des années, mais ça m'étonne toujours que tu te trempes si tôt dans la saison ! Je préfère rester à profiter de la chaleur sur la plage... »

Elle n'avait plus qu'à espérer que bébé soit pareil, et qu'elle n'ait pas à subir des matinées à la piscine, à grelotter dans l'eau trop froide à son goût... Ou elle déléguerait ces activités-là à son mari, pour les attendre au chaud chez eux !

En attendant, son enfant était encore en train de flotter dans son ventre, et sa seule préoccupation était de se déplacer sans avoir le souffle coupé. Elle accepta donc avec joie la proposition d'Amaya de rejoindre un café, se préparant avec plaisir à prendre une tasse de sa boisson favorite - même si elle avait bien réduit la caféine depuis le début de sa grossesse, elle se faisait quand même plaisir, incapable d'arrêter entièrement de boire du café.

« J'en suis à quasi sept mois. Je dois accoucher début janvier ! J'ai hâte, et en même temps, j'ai un peu peur. »

Elle n'en pouvait plus de se voir gonfler, mais il fallait que le bébé sorte. Et l'accouchement lui faisait un peu peur, même si elle se répétait que c'était naturel et que des millions de femmes l'avaient fait avant elle. Elle ne trouvait pas cette pensée très réconfortante.

Ne voulant pas garder la conversation que sur elle, Mabel redemanda à Amaya quel travail elle faisait, se sentant un peu coupable de ne pas savoir. Mais la réponse vague de son amie lui fit comprendre pourquoi elle oubliait si facilement : Amaya ne donnait pas vraiment de détails, gardant les choses un peu cachées. Et si Mabel était un peu curieuse de savoir ce qui méritait d'être gardé secret, elle ne voulait pas trop insister non plus.

« C'est un bon avantage ! Au moins tu peux éviter la foule du week-end, et faire tes activités plus tranquillement » approuva-t-elle doucement. « Même si tu dois louper des trucs à travailler tous les week-ends, non ? »

Quoi qu'en tant que gérante, Amaya gérait peut-être plus facilement son emploi du temps qu'une salariée lambda. Mais la plupart des gens étant de repos le week-end, c'était là qu'étaient souvent organisés les rassemblement familiaux ou entre amis, en toute logique. (En tant que mannequin, Mabel était plutôt habituée à faire la fête n'importe quand, tant qu'ils étaient assez à être disponible, et elle avait parfois un peu de mal à s'imaginer ce que faisaient les autres, aux vies un peu plus régulières...)

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Enfant ou adolescente, Mabel avait aimé les premières rayons de l'année, ceux qui étaient juste tièdes et réchauffaient la peau. Puis elle était partie à Londres pour devenir mannequin, et le soleil était devenu le pire ennemi de sa peau. Elle ne s'exposait presque plus, et pas avant de s'être badigeonnée de crème solaire.

« Je reste sous mon parasol à regarder les courageux qui se baignent par ces températures » trancha-t-elle en souriant.

Enfin, si Amaya y trouvait son compte, c'était tout ce qui comptait, n'est-ce pas ? Et puis leurs promenades du jour les avaient poussées à se retrouver par hasard, et c'était ça l'information importante à en retenir. Et comme Mabel n'allait pas rester dans la rue, elles migrèrent vers un bar tout proche, histoire que la femme enceinte puisse s'asseoir un peu et se relaxer. La marche sur de petites distances, elle y arrivait encore, même si son périmètre se réduisait à mesure que son ventre prenait du volume.

Elles commencèrent par parler grossesse, Mabel partageant les détails avec une joie mêlée d'angoisse. Elle qui ne s'était jamais projetée en tant que mère avait un peu de mal à appréhender les semaines qui lui restaient avant de plonger dans cette nouvelle vie.

« Ben, peur d'accoucher déjà. C'est pas le truc le plus cool du monde, et je suis pas super douée pour gérer la douleur. »

Elle préférait limite revivre une rupture. C'était douloureux, mais elle l'avait déjà vécu et savait qu'elle pouvait s'en sortir. Alors que l'inconnu de l'accouchement, même avec la promesse d'une péridurale, restait angoissant à ses yeux.

« Et puis... La perspective d'être responsable d'un petit être vivant, de devoir l'éduquer... Je ne suis pas sûre d'être la meilleure pour ça. »

Mabel n'était que bien trop consciente de ses failles en tant que personne. Elle avait un caractère détestable, râlait beaucoup et était plutôt douée pour se faire des ennemis. Autant de choses dont elle ne voulait pas que son bébé hérite. Elle n'avait pas eu non plus le meilleur des exemples, ses parents faisant beaucoup de choses pour l'image familiale mais déléguant l'éducation de leurs filles à des nourrices qui changeaient beaucoup trop souvent.

Plutôt que de s'éterniser sur ses problèmes familiaux - pas qu'elle ne fasse pas confiance à Amaya, mais Mabel n'aimait pas en parler -, elle chercha plutôt à savoir ce que son amie devenait. Elles ne se voyaient pas très souvent, mais elle restait curieuse de ce que faisait son amie, et impressionnée qu'elle soit sa propre patronne.

« C'est déjà bien un week-end par mois, même si ça reste peu. Surtout que la plupart des gens travaillant en semaine, ils doivent venir faire leurs achats surtout sur le week-end ? »

C'était en tout cas la représentation qu'elle s'en faisait. En période de soldes, elle évitait toujours le mercredi et le week-end, où les gens étaient généralement plus disponibles. (Quoi qu'elle faisait rarement les soldes, ses vêtements étant souvent offerts pas les créateurs pour qui elle défilait ou des marques qui voulaient apparaître sur ses réseaux.)

« Te connaissant, je suis sûre que tu es une patronne plutôt cool ! Même si je suis pas sûre que tu aimes gérer tous ces soucis d'emplois du temps... »

Amaya était quelqu'un de généreux et essayant de trouver des compromis pour tout le monde, et Mabel était sûre que ses employés appréciaient de travailler avec elle.

« Et niveau perso, qu'est-ce que tu deviens ? Est-ce que tu as quelqu'un qui te rend heureuse ? »

Il était assez évident que Mabel était comblée niveau personnel - difficile de voir autre chose que son ventre arrondi. Mais elle n'avait aucune idée de ce que devenait Amaya, à part sa petite boutique dont elle n'arrivait pas à savoir ce qu'elle vendait. Le sujet semblant sensible, elle préférait ne pas harceler son amie de questions - Amaya lui en parlerait le jour où elle serait prête.

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L'optimisme d'Amaya la fit sourire. Mabel espérait fortement être de celle dont l'accouchement se déroulait vite et bien, sans trop de douleurs. Mais c'était un premier bébé, et elle risquait surtout un accouchement long et douloureux, qui finirait par la vider de ses forces. (Elle n'était honnêtement pas sûre de subir assez de grossesses pour avoir droit un jour à l'accouchement facile, "comme une lettre à la poste".)

« On va prier pour que la péridurale fonctionne bien, oui » soulligna-t-elle.

C'était son seul espoir pour le moment, et le seul argument qui pouvait calmer un peu ses appréhensions. Et puis de toute façon, bébé était entré, il fallait bien qu'il sorte, ne laissant pas de choix à sa mère !

« S'inquiéter ne suffit pas, mais je vais au moins essayer d'être une bonne mère » reprit-elle, essayant de ne pas laisser ses émotions dominer sa voix.

Mabel avait plus connu ses nourrices que ses parents, et l'éducation qu'elle avait reçue était surtout ce qu'elle ne voulait pas transmettre à son enfant. Mais ça ne l'aidait pas à savoir ce qu'il fallait faire - heureusement que son mari venait d'une famille plus stable et aimante, et qu'il saurait la guider vers quelque chose qui leur irait à tous les deux.

La jeune femme ne voulait pour autant pas s'étendre plus sur ses inquiétudes ou ses problèmes familiaux. Pas qu'elle ne fasse pas confiance à Amaya, mais il y avait des choses qu'elle préférait garder pour elle, parce qu'elle avait encore besoin de travailler dessus avant d'oser les dire à voix haute. Elle essaya donc de poser quelques questions sur le mystérieux métier de son amie - et elle était sûre que si elle n'avait jamais retenu le nom de sa boutique, c'était parce qu'Amaya en faisait des cachotteries, ne disant jamais ouvertement où elle travaillait.

« Je dirai que ne pas aimer le conflit est plutôt un trait de caractère agréable, mais essaye de ne pas te faire marcher dessus ? »

Mabel était plutôt du genre à se comporter comme si les conflits ne la dérangeaient pas, ne fonçant pas tête la première dedans mais ne cherchant pas particulièrement à les éviter. Elle donnait son avis comme il lui venait, sans chercher à l'adoucir, et elle se moquait des conséquences. Mais elle avait conscience que tous n'étaient pas comme ça - notamment Amaya, plus douce et à l'écoute qu'elle ne le serait jamais.

« J'ai l'impression qu'il y a des ados de plus en plus jeunes qui viennent chercher refuges dans les assos lgbt, parce que leurs coming out se passent mal et qu'ils finissent à la rue. Dans un sens, je les admire de savoir si tôt qui ils sont, mais c'est terrible de voir combien ça gâche leur vie... »

Mabel n'avait jamais vraiment fait de coming out, se contentant de fréquenter des filles comme des garçons, sans faire de distinction. Elle savait que ces parents considéraient tout ça comme une "phase rebelle" dont elle était sortie en se mariant, et ça la frustrait qu'ils ne reconnaissent pas sa bisexualité - mais comme tant de chose chez les Griffiths, ce n'était pas un sujet qu'ils abordaient. La communication n'avait jamais été leur fort, et chacun se murait de son côté, sans expliquer ce qui le blessait ou pouvait l'énerver.

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Si gentille Amaya qui tentait toujours de contenter tout le monde... Elle ressemblait beaucoup à Maddy sur ce point, et c'était étrange parce que Mabel jalousait un peu ce point chez Amaya quand elle le détestait chez sa sœur. Peut-être parce qu'elle avait fini par se conditionner à détester Maddy quoi qu'elle fasse, et à être son parfait contraire parce qu'elle ne supportait plus qu'on les compare sans cesse.

C'était un point qu'il faudrait qu'elle travaille un jour. Pour le moment, elle avait déjà assez à faire avec sa grossesse et son questionnement sur la parentalité. Mais peut-être qu'en voyant évoluer son enfant, elle arriverait à un peu mieux comprendre ses parents - ou à totalement renier leur façon de faire.

Et il n'y avait pas que ses parents contre lesquels elle avait envie de se battre. Mabel finançait plusieurs associations lgbt+ de Brisbane, et Amaya était bénévole dans l'une d'entre elles. Elles faisaient l'une comme l'autre le constat qu'il y avait de plus en plus d'adolescents dont les coming out se finissait mal. Pourtant, la société se faisait plus tolérante, mais visiblement, certaines personnes trouvaient que c'était bien chez les autres, mais insupportables chez elles. Pas que Mabel puisse trop juger - elle était bien placée pour savoir que ses parents n'avaient pas accepté sa bisexualité et étaient soulagée qu'elle se soit mariée à un homme...

« Je trouva ça terrible d'avoir des enfants, mais de conditionner son amour comme ça. Il faut qu'il soit hétéro, qu'il ne sorte pas avec quelqu'un d'une autre origine, qu'il soit comme ci ou comme ça... Franchement, si un jour je deviens comme ça, je t'autorise à me remettre les idées en place ! »

Pour l'instant, elle voulait juste que son bébé soit en bonne santé et heureux... Mais on lui avait tellement seriné pendant sa grossesse avant j'avais des principes, maintenant j'ai des enfants, qu'elle se doutait que sa conception de l'éducation allait évoluer une fois qu'elle subirait les nuits entrecoupées de pleurs et le caractère du petit être qu'elle était en train de créer. Elle espérait juste ne pas finir comme ces parents capables de renier leur enfant parce qu'il n'était pas comme ils le voulaient.

« Je devrais peut-être essayer de passer vous vois. Un peu de nostalgie, ça me fera pas de mal. J'attendrais peut-être que bébé soit né, ce sera plus facile pour venir aider » accepta-t-elle ensuite.

Parce que pour le moment, se déplacer était compliqué, et elle ne s'imaginait pas rejoindre l'association où Amaya était bénévole pour juste rester assise à tenter de reprendre son souffle. Ça n'aurait pas vraiment d'intérêt, à part la faire se sentir inutile...

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Mabel sourit en entendant Amaya s'indigner des mêmes choses qu'elle. Elle-même avait des problèmes avec ses parents, qui n'avaient jamais accepté sa bisexualité et restaient persuadés que c'était juste une phase rebelle, soulagés qu'elle soit désormais mariée avec un homme. Amaya parlait elle aussi comme si elle était concernée, même si Mabel ne savait pas exactement quel était le point que ses parents avaient du mal à accepter.

« Après, j'imagine que c'est normal de vouloir que ton enfant ait une vie meilleure que la tienne, et qu'il ne fasse pas les mêmes erreurs que toi » souligna-t-elle, pensive.

Si elle pouvait éviter à ses enfants de fuir le pays comme elle en avait eu besoin à dix-huit, ou éviter les troubles alimentaires dans lesquels elle était tombée au début de sa carrière de mannequin - et qui la poursuivaient encore aujourd'hui -, elle le ferait. Pour éviter qu'ils ne subissent les mêmes souffrances.

« Après, leur interdire d'être différent de soi, c'est pire... Et le meilleur moyen de perdre le contact. »

C'était le but de l'association dont lui parlait Amaya, après tout : recueillir et aider ces gamins qui se retrouvaient à la rue parce qu'ils refusaient d'abandonner qui ils étaient. Plus courageux qu'elle, qui se contentait de serrer les dents face à sa famille, tout en vivant le mariage dont ils avaient rêvé pour elle (en comparaison à Maddy, l'ancienne fille parfaite mais qu'elle avait fini par détrôner sans vraiment le vouloir).

« Je sais pas si ce sera plus pratique, et vous allez sans doute devoir supporter les pleurs de bébé » prévint-elle après avoir annoncé qu'elle viendrait dès qu'elle pourrait à l'association dans laquelle Amaya était bénévole. « Mais ça nous fera une sortie, et ça sera une bonne expérience pour tout le monde ! »

Si depuis son retour à Brisbane, Mabel avait surtout été donatrice pour les associations, elle n'oubliait pas qu'elle avait été plus investie quand elle vivait à Londres. C'était plus facile là-bas, quand elle n'avait pas les pressions de sa famille, et pas de connaissances - ça avait été un moyen pour elle de rencontrer d'autres personnes et de mieux définir qui elle était dans la communauté queer. Et ces valeurs de respect et de tolérance qu'elle avait appris dans les associations lgbt+ était quelque chose qu'elle voulait inculquer à ses enfants.

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Mabel écoutait Amaya avec attention, curieuse de l'avis de son amie. Elles n'avaient pas d'enfants - même si Mabel approchait de son accouchement -, et ne jugeaient donc pas la situation avec totale objectivité. Mais c'était toujours intéressant d'en débattre, même si d'ici quelques années, elles auraient peut-être changé d'avis.

« Je pense pas que ce soit aussi simple que ça... Les parents veulent forcément le meilleur pour leurs enfants, mais on a pas tous la même définition de ce qu'est le meilleur. Que ce soit au niveau professionnel ou personnel, on ne voit pas tous les choses de la même façon. »

Le meilleur, selon les parents Griffiths, c'était de devenir actrice et de se marier avec un homme pour fonder une jolie famille. Maddy et elle avaient chacune réalisé une part de cet objectif - et leurs parents continuaient de les placer en compétition pour le reste, à un point toxique qui les empêchait d'avoir une vraie relation sororale.

« Je pense que c'est bien d'avoir des objectifs pour son enfant, mais qu'il faut savoir s'adapter à son caractère et à ses besoins. Comme pour plein de choses dans la vie, il faut savoir se remettre en question. »

Mabel se sentait un peu hypocrite sur celle-là, elle qui n'avait jamais été douée pour se questionner et faire évoluer son avis. Elle avait tendance à camper sur ses positions, détestant perdre les repères qu'elle avait eu tant de mal à placer...

« Le chiffre de ceux qui perdent leur famille fait peur, mais ça ne m'étonne qu'à moitié. Vraiment, je sais pas comment auraient réagi mes parents si je m'étais mariée avec une femme. »

Et pourtant, elle avait toujours assumé sa bisexualité - même si elle n'avait jamais eu de relation longue avec une femme. Quoi que sa seule autre vraie relation, avant son mari, avait été Rhett, et elle n'avait pas vraiment été amoureuse mais avait plutôt profité du statut qu'il pouvait lui apporter. Pour autant, depuis son mariage, la période où elle avait fréquenté des femmes était devenu une espèce de phase rebelle qui avait fini par lui passer, aux yeux de ses parents. Une situation qui était difficile à vivre mais dans laquelle elle ne s'aventurait pas trop, refusant de déchirer sa famille et niant la souffrance que ça lui faisait ressentir.

Peut-être qu'Amaya avait raison, et qu'il était temps qu'elle s'investisse un peu plus qu'en tant que donatrice dans des associations lgbt+. Peut-être qu'il fallait qu'elle s'assume plus, et qu'elle aide plus, pour se réconcilier avec cette part d'elle-même qu'elle cachait pour ne pas trop subir.

« Je préfère les petites associations. Les bénévoles connaissent ceux qu'ils aident, et il y a moins de problèmes avec les donations... Et puis, ça permet de voir son impact, plutôt que d'attendre des chiffres ou des rapports, ou je ne sais quoi ! »

De grosses associations avec de jolis rapports mais qui commençaient à s'effondrer dans l'opinion, Mabel pouvait en citer des dizaines. Certaines personnes semblaient savoir où trouver l'argent et comment le détourner, peu importe l'importance de la cause...