Depuis combien de temps n'avais-je pas accepté de travailler jusqu'aux premières heures du matin ? Longtemps, et je ne m'en portais que mieux. Il faut dire que j'ai appris un mot magique qui a déjà sauvé bon nombre de mes nuits ces derniers mois : non. Non, je n'effectuerai pas de remplacement ce soir, et oui, je laisse la radio dans la mouise pour les programmes du soir. La charge de travail supplémentaire fournie par mon émission est déjà bien assez lourde à l'heure où je souhaite vivre des semaines normales avec des week-ends entiers, je n'ai franchement pas besoin de manquer plus de sommeil que cela. Alors Roxy a essuyé une multitude de refus de ma part ces temps-ci. Sauf ce soir. Mais il ne s'agit pas vraiment de jouer les rédacteurs en chef. Pas complètement. Il s'agit d'une émission télévisée de la chaîne, de ces tables rondes entre journalistes et invités où les interviews sont entrecoupées de sketchs ou de performances musical d'un groupe en pleine promo d'un nouvel album. Au dernier moment, l'un des chroniqueurs a fait faux bond à la production. Quand l'animatrice est venue me chercher dans mon bureau, franchement en panique à force de ne pas trouver de remplaçant, je ne me suis pas vu refuser -d'autant plus que c'est une femme avec qui je m'entends vraiment bien. Je me suis juré de ne jamais toucher au petit écran, mais pour un soir, je suppose que cela ne me fera pas de mal. J'avais prévenu Joanne par sms. Lorsque la dernière émission de l'après-midi est lancée, vers dix-sept heures, je file au musée, juste de l'autre côté du pont. Non, pas au studio. D'abord le musée. En entrant dans le bâtiment, je ne m'attendais pas à un tel calme. Pas de marteaux-piqueurs, de fracas et d'éclats de voix des hommes de l'entreprise de construction, de tous ce bruits dont se plaint la jeune femme à la maison, devenu un véritable havre de paix pour ses oreilles. A côté du boucan que les travaux sont subir aux lieux, j'entendrais presque mes pas résonner sur le marbre du hall. C'est à cette heure, après les cours et le travail, que l'endroit gagne en fréquentation. Je suppose que c'est aussi l'heure à laquelle les ouvriers ont terminé leur besogne du jour. Désormais considéré comme un habitué, je me faufile dans les couloirs du musée sans gêne, sans croiser Sophia pour une fois, et frappe à la porte du bureau de Joanne. Au bout de quelques secondes sans réponse, j'appuie sur la poignée ; la porte s'ouvre. Je passe ma tête par l’entrebâillement et voit la jeune femme sur le départ. « Ceci est un kidnapping. » dis-je lorsqu'elle me remarque enfin. Je fais quelques pas dans le bureau pour la rejoindre et dépose un léger baiser sur ses lèvres. D'un coup d'oeil à ma montre, je constate que les minutes filent et que la pauvre animatrice de l'émission risque de tomber définitivement dans les pommes si je ne me montre pas très bientôt. « Je t'embarque à la chaîne. Et ce n'est pas négociable. » j'ajoute avec un clin d'oeil. Joanne avait dit, à Sydney, qu'elle trouverait des excuses pour passer chez ABC. Mais bien sûr, cela n'a pas encore été le cas. Alors cette fois, elle n'y échappera pas. Je la prends par la main et nous marchons la dizaine de minutes qui séparent le musée de la chaîne. Là bas, à l'accueil, je lui fais fournir le badge qui fera en sorte que personne ne la jettera dehors. « Bienvenue chez ABC » dis-je en passant le cordon autour de son cou. Nous passons le petit portique de sécurité qui laisse ensuite libre accès au bâtiment. Les studios d'enregistrement, que ce soit pour la télévision ou la radio, sont éparpillés à travers les étages. Mais celui où je dois me rendre est au premier sous-sol. Après quelques longs couloirs gris et franchement délabrés -l'envers du décor, que voulez-vous- nous passons une grande porte visiblement neuve nous faisant enfin atterrir sur le plateau de l'émission, qui est, lui terriblement moderne sous toutes les coutures. Le public n'a pas encore été installé ; partout fourmillent des régisseurs armés d'un casque à micro relié au téléphone attaché à leu ceinture, des caméramen effectuant des derniers réglages sur d'imposantes machines, aussi hautes que moi, montées sur des rails. Tout le monde est très speed -mais dans tout ce bâtiment, de manière générale, nous sommes tous speed. A droite de la grande salle, une baie vitrée sépare la régie du plateau. C'est là que nous nous rendons ensuite. « Ca ne sera pas très long tu verras. On enregistre l'émission en différé, à peu près une heure avant sa diffusion. Comme ça, s'il y a un gros ratage quelque part, on peut le corriger. Ces personnes là font le montage des images quasiment en direct, à chaud, dès qu'ils ont les images. Le réalisateur dirige les caméras d'ici, et voit ce qu'elles filment sur ces écrans. » je montre ces quelques éléments au fur et à mesure. Grâce à ma mère, j'ai passé des heures dans les pattes des techniciens ou dans la régie à observer tout ceci. Une autre porte mène sur un long couloirs bordé de loges. C'est une fois arrivés dans celle qui m'est assignée de façon éphémère que nous pouvons souffler. « Tu préfères qu'on te trouve une petite place côté public, ou tu préfères rester en régie ? » je demande en changeant rapidement de chemise. Pas besoin de cravate sur le plateau, amen.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
"Jo, il y a le nouveau sous-directeur qui est arrivé, tu l'as déjà vu ?" "Je croyais qu'il n'arriverait que la semaine prochaine." "Apparemment il a du avancer son déménagement, du coup il est venu plus tôt." dit l'un des restaurateurs, pendant qu'il fignolait l'oeuvre qu'il avait sous les yeux. Joanne faisait juste un tour dans l'atelier parce que c'était bien le seul endroit où l'on entendait le moins le bruits des travaux, et aussi pour voir l'avancement des restaurations. "Mais je crois qu'il voulait te voir, il a déjà vu Sophia, il me semble." A ce moment là, le directeur du musée entrait dans la pièce. Un homme de la cinquantaine, cheveux poivre et sel et tout récemment grand-père. Un papi gâteau, c'était sûr. Il s'appelait Peter, c'était quelqu'un de très abordable, qui avait une attention toute particulière pour ses employés. Selon lui, c'était l'une des clés du bon fonctionnement et la bonne entente qui régnait dans ce musée. Vêtu d'un costume gris et d'une cravate verte, il salua chacun de ses employés, terminant par la jeune conservatrice. "Vous êtes un peu pâle aujourd'hui, Joanne. Je savais que la pollution sonore vous dérangerait, mais pas à ce point." dit-il d'un oeil compatissant. "Les travaux de destruction devraient finir cette semaine ou la semaine prochaine, tout devrait retourner au calme pendant un bout de temps, d'ici là." Il invita Joanne à le suivre, pour se rendre dans les bureaux administratifs. Un autre homme, plus jeune que lui, les attendait là. Il était très élégant, et son visage aspirait immédiatement à la sympathie. Peter fit rapidement les présentations, ils se serrèrente chaleureusement la main. "Toutes mes félicitations." Joanne le dévisagea surprise, tout comme le directeur d'ailleurs. "Votre bague... ça m'a tout l'air d'une bague de fiançailles, n'est-ce pas ?" dit-il en se permettant de prendre la main de Joanne afin de regarder le bijou en question. "Une Verragio, de surcroit. Il doit vraiment vous aimer. J'ai offert une bague de cette même marque à ma femme." Peter semblait totalement perdu, regardant alternativement Joanne et son nouvel employé, qui répondait au nom d'Adrian. "Vous êtes fiancée, Joanne ?" finit par s'exclamer Peter. La jeune femme haussa les épaules, l'air de rien, en acquiesçant d'un léger signe de tête, nerveux. "Avec Monsieur... enfin Lord Keynes ?" Nouveau signe de tête approbateur. "Et ça fait longtemps ?" "Deux semaines, maintenant." Peter ne pouvait définitivement pas de faire un large sourire satisfait. Sur le coup, ce n'était pas parce que Jamie était un de ses plus précieux donateurs, mais il était véritablement heureux pour son employée. Il savait que l'année passée avant qu'elle ne le rencontre avait été particulièrement difficile pour elle - sans qu'il ne soit au courant de sa fausse-couche. Il se permit mis même de l'enlacer pour la féliciter, et de lui faire la bise. Ils discutèrent tous les trois pendant plus d'une heure, Adrian cherchant à s'informer davantage sur les projets à venir, les problèmes constatées par Joanne, histoire de savoir sur quoi se plancher en premier lieu. C'était un homme véritablement sympathique et ouvert, il était bienveillant, cela se devinait très facilement chez lui. Joanne avait un très bon premier avis par rapport à lui -il n'avait rien à avoir avec son prédécesseur. L'heure tournait, et il était déjà temps de partir. Adrian suggéra qu'une réunion soit organisée afin de mettre tout ce qui a été discuté à plat, hâtif de se mettre dans le bain de suite. Les au revois furent chaleureux, et Joanne se rendit à son bureau afin de récupérer ses affaires et rentrer chez elle. La jeune femme sursauta légèrement lorsqu'elle vit son fiancé, disant ensuite qu'il comptait la kidnapper, et elle se mit à rire. Il vint la saluer en l'embrassant, puis dit qu'il allait l'emmener à son lieu de travail. Elle n'avait vraisemblablement pas le droit de refuser. A peine eut-elle le temps de mettre tout ce dont elle avait besoin dans son sac et passer son veste plié sur son avant-bras que Jamie l'emmena par la main à l'extérieur du musée. Joanne était vêtue de la robe qu'il lui avait offerte, avec de petits escarpins noirs. Le couple arriva rapidement à la station ABC. Le bâtiment l'impressionnait déjà. Une fois rentrés, Jamie lui mit autour du cou un badge afin qu'elle puisse aller à peu près n'importe où. Elle ne lâchait pas la main de Jamie, la tenant même avec les deux siennes. Elle le suivait de très près alors que ses yeux découvrait cet endroit pour la première fois. Elle ne savait pas trop où se mettre. Tout le monde courrait autour d'eux, le stress était largement palpable. Il l'emmena jusqu'en régie, lui expliquant tout ce qu'ils allaient faire, comment l'émission allait se dérouler. Il y avait énormément de choses à voir et à découvrir, ses yeux se perdaient sur le moindre détail. Elle en restait muette. Jamie l'emmena ensuite dans un couloir où quelques loges se trouvaient, l'une à côté de l'autre. C'était assez étrange de voir une porte où il y avait le nom de son fiancé inscrit dessus. Pas sûre que c'était une très bonne idée qu'elle soit dans la même pièce que lui le temps qu'il change de haut, l'avoir vu quelques secondes torse-nu pour qu'une légère poussée hormonale vienne accélérer son rythme cardiaque (bon Dieu...). Sa question la sortait de ses rêveries. De sa voix habituellement douce, et un peu hésitante, elle lui répondit. "Je préférerai rester en régie, je crois. Si ma présence en dérange pas, bien évidemment." Une personne de trop durant un moment d'effervescence pouvait toujours être assez gênant, Joanne pouvait le comprendre. Elle avait une soudaine excitation de le voir travailler sous ses propres yeux, malgré le sentiment de malaise qu'elle avait depuis qu'elle avait mis les pieds dans ce bâtiment.
Les locaux d'ABC sont dans un marathon permanent. Tout bouge, tout fourmille, tout le temps. Les pics d'activités se concentrant juste avant les émissions, lors de la mise en place et de la vérification des derniers détails. Le mouvement sur les plateaux de télévision sont plus impressionnants qu'en radio ; chez nous, nous courrons partout, mais nous n'avons pas de décors pareils. En réalité, les plateaux sont toujours bien moins grands qu'ils n'en ont l'air à la télévision. Tout est question d'angles de caméras et diverses illusions d'optique afin de faire paraître la salle plus grande ; de nombreux miroirs sont cachés un peu partout, notamment dans le public, afin d'en multiplier le nombre artificiellement. Sur le petit écran, tout le monde tombe dans le panneau. Souvent, chroniqueurs et invités sont assez agglutinés les uns sur les autres, la place manque parfois, mais les jeux de champs et de contre champ suffisent à créer de l'espace dans l'imaginaire du téléspectateur. Enfin, tout est parfaitement calculé. Même les sketchs n'en sont pas vraiment. Tout le monde sait exactement à quel moment tel chroniqueur va débarquer en maillot de bain ou qui va lancer quelle vanne. Sauf peut-être les invités, histoire qu'ils aient l'air surpris -mais leurs agents, eux, savent. Je crois que c'est pour toutes ces raisons que je n'ai jamais voulu toucher à la télévision. A cause de ma mère, on m'a souvent fait du pied, mais cela ne m'intéresse vraiment pas. Je suis trop attaché à la radio. La spontanéité que nous avons en studio. Il n'y a pas de montage pour rattraper les bourdes, pas de droit à l'erreur : si un journaliste bafouille en direct, si quelqu'un a une seule hésitation, on l'a dans l'os. Il n'est pas rare de voir les journalistes aller dans un média ou l'autre de temps en temps. Et cette fois, cela tombe sur moi. Je ne tiens pas spécialement à ce que Joanne me voit en action, non. Mais j'avais envie d'enfin lui montrer où je passe mes journées, comment les choses se déroulent, et puisque mon programme de ce soir avait changé à la dernière minute, cela nous permet également de passer plus de temps ensemble. La jeune femme me répond qu'elle restera en régie, si cela ne dérange personne. « Bien sûr que non, ne t'en fais pas. Ils sont habitués. Il n'y a pas un jour où un invité ou même un technicien n'ait pas envie de montrer l'envers du décor à un de ses proches. Il y a constamment des petits intrus en régie ou dans le public. » dis-je pour la rassurer. Je me souviens que, enfant, il m'arrivait de passer des heures à traîner sur les plateaux, entre les immenses câbles des spots et des caméras, parfois avec un autre enfant d'une personne travaillant là -et à cet âge, il vaut mieux avoir de la compagnie pour ne pas s'ennuyer ferme pendant que maman présente son talk-show. « Tu pourras leur poser tout plein de questions si tu veux, ils t'expliqueront les rouages avec plaisir, sauf s'il y a des petits moments de stress. Mais tout le monde est rodé, alors ça ne les dérangera pas de te parler un peu. » j'ajoute. Mais la connaissant, Joanne n'osera pas ouvrir la bouche et restera sagement sur sa chaise dans un coin de la pièce, à regarder les écrans, écouter le réalisateur faire le chef d'orchestre, et jeter un coup d'oeil au montage. « Tu verras que c'est beaucoup moins impressionnant que ça en a l'air une fois à la télévision. » En réalité, le plus impressionnant se passe en régie. Nous, en plateau, nous nous contentons de suivre le script et lire un prompteur. Une main frappe à la porte de la loge et la tête d'une toute jeune femme apparaît ; la maquilleuse. Je lui fais signe d'entrer. Timide comme tout, elle ose à peine saluer Joanne et préfère déposer ses affaires sur la petite table face à moi pour faire sa besogne vite et bien. J'ai du mal à m'empêcher de rire à chaque fois qu'elle passe ses pinceaux sur certaines parties de mon visage, n'étant pas habitué à ces sensations. J'ai droit à une couche de fond de teint, et une tonne de poudre afin que mon visage ne brille pas sous les projecteurs. « Je t'emmènerai à l'étage de la radio juste après, ça sera plus détendu à l'heure à laquelle nous aurons fini. » dis-je à Joanne pendant que la demoiselle termine de passer ses doigts dans mes cheveux pour me recoiffer un peu. Une autre femme apparaît, sans prendre la peine de frapper ; une longue tige blonde composée de deux mètres de jambes, Laura, la présentatrice, me tend une feuille de papier. « Tiens, le conducteur. J'espère que tu ne tiens pas trop à ta chemise. » dit-elle avec un clin d'oeil. En lisant de travers ce qui ressemble au scénario minuté de l'émission, je comprends pourquoi ; bataille d'eau prévue un peu avant la fin de l'émission. « Oh, bonsoir ! » s'exclame Laura en apercevant enfin mon invitée. « C'est Joanne, ma fiancée. Laura est l'animatrice de l'émission. » dis-je avec un sourire. La taille mannequin -qui snobe complètement Joanne, mais c'est une habitude chez elle- prend un air offusqué en me jetant un regard noir. « Tu ne m'avais même pas dit que tu t'étais fiancé ! Ca, mon cher, ça va se payer sur le plateau. » J'hausse les épaules, l'air innocent. Je crois qu'à part Daisy, qui a remarqué ma bague, personne à ABC ne sait pour nos fiançailles. Rapide comme l'éclair, un régisseur passe dans la loge après la maquilleuse, m'attache un micro-cravate et l’émetteur à la ceinture. Enfin prêt, nous retournons en régie en attendant le début de l'émission ; je trouve deux chaises que j'installe dans un coin qui ne dérangera personne. « Keynes ! Sur le bandeau, j'suis obligé de mettre ''Lord'' ? » « Bon dieu, non, absolument pas, ne le mets pas. » Le monteur se tourne vers moi, me dévisage sans gêne, et ajoute ; « Sérieux, t'as pas une tronche de Lord. » « Je sais bien. » je réponds en lui tapant l'épaule. L'agitation est moindre désormais. Tout le monde est à sa place ; pendant que nous étions dans la loge, le public a été installé, les caméras testées, et les lumières réglées. Puisque je ne dois pas être en plateau immédiatement, je reste là un instant avec Joanne, prenant l'une de ses mains. « Silence ! On commence dans une minute ! » lance le réalisateur dans son micro. Je pose le conducteur sur les jambes de ma fiancé afin qu'elle puisse suivre le déroulement des événements. C'est un véritable ballet bien calibré. « J'entre là. » dis-je en lui montrant la fin du premier tiers de l'émission. « Et ils comptent ruiner ma chemise à ce moment là. » j'ajoute en indiquant une dizaine de minutes avant la fin. Puis je dépose un baiser sur sa joue, tandis que Laura, sur les écrans, commence son speech. « Tu es encore un peu pâle. Les travaux ne te font vraiment pas du bien décidément. » je remarque en caressant son visage du bout du pouce, anxieux.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Joanne ignorait que c'était monnaie courante d'emmener un membre de sa famille ou un proche dans les locaux afin de leur permettre de voir comment tout ceci se passait. Elle aurait plutôt tendance à penser que c'était assez privatif, que seules les personnes qui pouvaient assister à ce genre de choses avaient une sorte de contrat d'exclusivité. C'était certainement à cause de ce qu'elle s'imaginait qu'elle n'avait jamais osé franchir les portes de la station. Quand elle devait rejoindre Jamie pour un déjeuner ou autre, elle attendait systématiquement à l'extérieur. Le bel homme tentait de rendre cela moins impressionnant pour sa fiancé, ajoutant même qu'elle pouvait poser autant de questions qu'elle voulait, si quelque chose venait tout particulièrement piquer sa curiosité. "Je ne pensais pas que tu viendrais un jour toucher du doigt le petit écran." dit-elle avec un sourire timide. Lui qui vénérait tellement la radio, voilà qu'on allait voir son visage parfait sur tous les écrans australiens. Elle ne savait pas si elle devait s'en réjouir ou plutôt s'inquiéter. "Rien que là, tout est assez impressionnant pour moi." lui répondit-elle. "Le stress, l'effervescence, tout le monde qui se marche dessus..." La liste de tous les facteurs qui pourraient la stresser elle était encore bien longue, sans tenir compte des détails. On toqua soudainement à la porte, pour voir apparaître une jeune femme, pas plus haute que Joanne. Cette dernière recula d'un pas pour lui laisser de la place et la salua poliment, souriante et joviale. Elle le couvrit d'une bonne couche de fond de teint, rendant la couleur de sa peau quasi irréelle. Et la maquilleuse termina par bichonner ses cheveux, Jamie promettant à sa douce de montrer un étage qu'il voyait de manière quotidienne. "Tu me montreras aussi ton bureau ? J'aimerais bien savoir à quoi il ressemble." Histoire de voir si c'était à peu près pareil à ce dont elle pouvait s'imaginer ou non. C'était rarement le cas, mais au moins, elle pourra mettre une image plus concrète de son lieu de travail. Joanne se sentait un peu inutile, à être là, les bras balants, alors que le monde entier courrait après Jamie. Soudain, une femme à la silhouette longiligne et parfaite entrait sans gêne dans la loge. Elle observait très attentivement ce qu'on lui disait, le bloc de papier qu'on lui donnait. Jamie la présenta à l'animatrice, prenant le soin de préciser qu'ils étaient fiancés -ce dont la journaliste n'était pas au courant. La conservatrice avait toujours beaucoup de mal à dire quoi que ce soit ou à s'imposer -mais je ne crois pas qu'elle se soit déjà imposée ne serait-ce qu'une fois dans sa vie-, lorsqu'il y avait la présence d'une personne avec autant d'assurance, de prestance. Une fois que Jamie était prêt, Joanne et lui retournèrent en régie. Elle ne le lâchait pas, cherchant continuellement ne serait-ce qu'un contact avec lui. La belle blonde ne put s'empêcher de rire lorsque le monteur fit la remarque à Jamie qu'il n'avait apparemment pas la tête d'un homme de titre. Elle le regarda tendrement, un large sourire dessiné sur ses lèvres. Il avait pris le temps de déposer deux chaises dans un coin de la régie -quoique la pièce n'était pas si grande que ça- et Joanne s'y installa. Il lui donna ensuite le fameux conducteur, prenant le soin de lui montrer à quel moment il apparaissait, et à quel moment il allait voir sa chemise être mouillée. Joanne était impressionnée de voir à quel point tout était absolument orchestré, dans le moindre détail. Elle feuilleta quelques pages par curiosité, jusqu'à ce que Jamie lui fasse le remarque de son teint encore bien pâle. Elle lui fit un sourire qui se voulait rassurant. "Normalement, ils commencent bientôt la maçonnerie, ça devrait être un peu plus calme à ce moment là." De plus Joanne, dormais assez mal ces derniers temps. Elle rentrait à la maison avec des oreilles qui sifflaient, du au trop plein de bruits qu'il y avait au musée la majeure partie de la journée. Elle lui aurait bien caressé tendrement le visage, mais elle se souvint au dernier moment qu'il était plein de fond de teint, elle ne voulait pas gâcher le travail de la maquilleuse. "J'espère que je dormirai mieux ce soir." lui dit-elle à voix basse, d'un sourrie tendre. "Je vais bien." lui dit-elle, dans le but de l'apaiser un peu. Son sourire était honnête, elle ne se forçait. Il y avait certes des traits de fatigue, mais elle tenait bien le coup. Un des régisseurs vint les interrompre pour signaler à Jamie qu'il allait bientôt apparaître. Elle embrassa la main de Jamie alors qu'il était en train de se lever et de se préparer. Elle se sentait un peu nerveuse pour lui. La voilà seule en régie, en compagnie de toutes ces personnes qui orchestraient l'ensemble de l'émission. Joanne regardait d'abord les écrans, surprise de la différence de couleur par rapport à la réalité. Jamie commençait à papoter. La jeune femme se permit de se lever et d'aller près du réalisateur, qui donnait les consignes à la régie son, régie lumière, etc. "Les couleurs ont tellement changé." pensa-t-elle à voix haute. L'homme qui se tenait à côté d'elle, sourit en la regardant. "Oui, on le change tout le temps. C'est pour ça qu'à première vue, les maquillages peuvent choquer. Mais en utilisant les balances couleur, ça permet d'avoir un meilleur rendu. Effet bonne mine, des couleurs vives, histoire que ça ne semble pas trop dépressif comme émission. Et de rendre des personnes déjà parfaites encore plus parfaites à l'écran." Il visait du regard la dénommée Laura, puis Jamie. "Ca impressionne toujours, les premières fois." dit-il avant de donner davantage de consignes. Joanne continuait de poser quelques questions ici et là, véritablement curieuse et intéressée de tout ce qu'il se passait. Elle restait un long moment à regarder ce qu'il se passait à travers la vitre. Elle entendait soudainement une voix, comme un écho. "Wowowoh... Restez avec moi, Joanne." Le réalisateur la soutenait par la taille, Joanne ne s'était même pas sentie partir. "Greenberg, viens par ici. Remets-la sur la chaise et apporte-lui de l'eau, la pauvre. Ils ont toujours pas réparé l'air conditionné de la pièce, ces nazes." L'homme en question aida la jeune femme à s'asseoir sur la chaise. "C'est sûr que quand on n'est pas habitué à une chaleur pareille, on tombe vite dans les pommes, ma fille m'a fait le même coup la semaine dernière." s'exclama le réalisateur, alors qu'on venait apporter de l'eau fraîche à Joanne. Cette dernière n'avait pas trop compris ce qu'il s'était passé, elle avati eu comme une absence et se sentit suer à grosse gouttes. "Ca va ? Vous êtes sûre ?" "Oui, oui, c'est bon, merci beaucoup." dit-elle tout sourire, prenant une gorgée d'eau qui lui fit le plus grand bien. "Je suis désolée." "Vous en faites pas. Vous êtes pas la première et certainement pas la dernière, ça fait des semaines qu'on signale qu'on étouffe ici, pas un seul technicien est venu voir la ventilation pour le moment." Puis Greenberg retourna à son poste initial. Joanne se faisait un peu d'air en secouant le conducteur devant son visage.
Je sens Joanne assez nerveuse, et je veux bien croire que pour quelqu'un qui découvre tout ceci pour la première fois, tout puisse sembler beaucoup plus impressionnant que ça ne l'est. Ce qu'on ne peut pas enlever à la télévision, c'est que l'image met une bonne dose de pression sur les épaules de tout le monde -comme le direct dans ma branche. Cela étonne la jeune femme que je mette un pied sur un plateau de télévision. Il faut dire que je regarde très peu d'émissions, surtout les infos ; le reste du temps, la télévision n'est allumée que pour regarder des films. Elle sait bien que ce n'est pas un milieu que j'affectionne beaucoup. « C'est absolument pas mon intention, ce n'est pas un univers fait pour moi. Je ne fais que dépanner ce soir. » dis-je, avec une certaine volonté de la rassurer. Passer d'une émission de radio sur les ondes locales à une émission de télévision nationale, cela ferait beaucoup trop à encaisser et beaucoup trop vite pour tout le monde. Et la célébrité n'est pas vraiment un objectif de vie. Être reconnu à Bisbane me suffit déjà, je n'ai pas besoin que le reste du monde me connaisse. De plus, cela impliquerait d'abandonner mon fauteuil actuel de rédacteur en chef pour me concentrer uniquement sur la direction des émissions, et je ne quitterai mon équipe pour rien au monde. « C'est comme ça tous les jours, toute la journée. » je réponds au sujet de l'effervescence ambiante. Ce n'est pas vraiment du stress ; tous les employés ici sont tellement rodés dans leurs tâches qui sont répétées tous les jours qu'il n'y a plus vraiment de peur à avoir, si ce n'est celle d'être en retard -ce qui est la pire hantise du métier de manière générale. Mais il y a tant de choses à faire et à penser très rapidement que les gens deviennent de véritables machines. Tout va terriblement vite, si bien que je suis préparé en mois de dix minutes et paré à aller sur le plateau. Avant cela, je prends un peu du temps qu'il me reste pour être avec Joanne. Sa pâleur m'inquiète. Je me demande si elle n'est pas plutôt en train de vraiment tomber malade ; une simple grosse fatigue au début, puis il suffit d'être au mauvais endroit au mauvais moment pour attraper un virus, et le corps est alors bien trop faible pour se battre contre cela. Je commence à songer à la traîner chez un médecin si elle ne va pas mieux dans un ou deux jours. « Je me fais quand même du souci pour toi… » je murmure alors que la jeune femme essaye tant bien que mal de me rassurer sur son état de santé. Rien à faire ; tant qu'elle ne retrouvera pas quelques couleurs, je serais inquiet. Problème ; je ne suis pas dans une émission où je peux me permettre d'avoir l'air anxieux ce soir. Alors quand j'entends « Keynes, en plateau. » je dois respirer un bon coup et je vider rapidement la tête avant de faire mon entrée avec le plus grand des sourires. En soi, l'exercice n'est pas très difficile, d'autant plus que j'ai une bonne alchimie avec Laura, mais la complication vient du fait qu'il faille avoir l'air naturel et spontané alors que tout est planifié -sans oublier qu'il fait une chaleur atroce sous les spots. J'ai deux chroniques au cours de l'émission ; la première est un éditorial économique d'un peu moins de cinq minutes face caméra afin de traiter aussi rapidement qu'avec des mots simples et surtout autant de traits d'humour relativement subtils que possible du crash de la bourse chinoise (à savoir que la semaine noire de Shanghai a fait perdre l'équivalent de la totalité du marché boursier australien à la Chine, ce qui nous fait sentir franchement petits, et que vu l'énormité des spéculations en cours, venant d'ailleurs d'investisseur du marché chinois, la prochaine bulle qui éclatera sera celle de la bourse de Sydney, ce qui risque de faire de beaux dégâts, en bref), la seconde est une interview de l'un des invités du jour, qui s'avère être l'acteur en pleine tournée de promotion que j'avais déjà reçu lundi -cela s'annonçait donc cordial. Au bout de quarante-cinq minutes de tournage, Laura lance un sujet d'enquête et la vidéo apparaît sur tous les écrans. Pendant que le public dans la salle prend connaissance du reportage, la voix du réalisateur résonne dans nos oreillettes. « Ok, vidéo de cinq minutes, vous pouvez souffler. » On me lance une bouteille d'eau que je pourrais vider d'une traite tant la chaleur me donne soif, et la petite maquilleuse passe corriger mon teint. « Keynes, en régie. » nous entendons cette fois, et Laura et moi nous interrogeons du regard. Je ne tarde pas à me rendre dans la petite salle sombre où il fait au moins aussi chaud qu'en plateau. Le réalisateur est en sueur. Mon regard se pose sur Joanne, assise sur sa chaise, plus pâle que lorsque je l'ai laissée. « Elle nous a fait un petit malaise, rien de grave. C'est qu'on étouffe ici. » me dit-il pour me rassurer -sans effet. Étouffer, c'est bien ça le problème. Mais ils ne peuvent pas le savoir. Immédiatement, je m'accroupis face à la jeune femme et prend ses mains, mort d'inquiétude. « Joanne, est-ce que ça va ? » je demande, ne sachant pas si je dois croire au malaise à cause de la température de la pièce ou s'il s'agissait d'un moment de détresse respiratoire qui lui aurait fait perdre connaissance. « Tu as tout ce qu'il te faut avec toi ? » Je ne tiens pas à hurler la fragilité de sa santé sur tous les toits, d'où le vague de ma question, mais je pense qu'elle comprend que je parle des comprimés qu'elle doit prendre en cas de problème. Sur le coup, je m'en veux terriblement de l'avoir fait venir. Elle est fatiguée, elle a besoin de repos plus que de venir ici. Je suis vraiment le dernier des idiots. « Keynes, on reprend. » J'ignore le réalisateur, et garde toute mon attention sur Joanne, l'embrassant sur le front. « Tu devrais peut-être rester dans la loge, il fait moins chaud, et tu pourras t'allonger dans le petit canapé. » Elle y sera sûrement bien mieux qu'ici. Et lorsque j'aurai terminé, je la ramènerai à la maison. « Keynes... » « Lâche-moi deux secondes, tu veux ?! » j'hurle sur l'homme, m'emportant un peu trop -mais l'inquiétude met mes nerfs à rude épreuve. La main délicate de Laura se pose sur mon épaule ; son geste est affectueux, mais son ton est froid. « Jamie, tu vois qu'elle va bien, c'était rien du tout. Nous on a du boulot. » J'entends l'un des régisseurs dire qu'il reste moins d'une minute de vidéo. Je serre les dents et me résigne à quitter la pièce pour retourner sur le plateau. Laura m'adresse un regard encourageant, et je lui réponds d'un signe de tête que je vais bien et que j'assurerai très bien ma part malgré tout. Au top de la régie dans l'oreille, nous reprenons. La seconde partie de l'émission est bien plus potache, et à vrai dire, les rires échangés me font du bien et parviennent à me détendre rapidement. J'effectue mon interview dans une ambiance des plus amicales, et à la fin de celle-ci, la miss météo, qui est un gag par sa seule allure, s'installe à côté de moi. Prenant l'air aussi naïve et idiote que possible -et le faisant à la perfection- elle glisse une feuille de papier devant moi. Et je ne me souviens pas d'avoir lu ça dans le script. « Aujourd'hui, météo particulière. Je prends des cours de langage des signes, et j'aimerais pratiquer un peu. Donc, tiens, Jamie, tu vas lire ceci, et je vais traduire. » Définitivement, cela défile sur le prompteur, mais je n'étais pas au courant. Sûrement la vengeance de Laura pour avoir caché mes fiançailles. Je lis donc le fleuve d'âneries que la jeune femme avait écrit, et qu'elle traduit par des gestes tout aussi idiots, me retenant difficilement de rire. Lorsque j'en viens à dire qu'il pleuvra ce week-end, l'un des chroniqueurs s'étant planqué derrière moi vide un beau seau d'eau sur ma tête avant de partir en courant. Laura s'étouffe de rire, fière de son coup. Je prends ma bouteille d'eau pour lui en jeter sur la figure -et finalement, tout le monde fait de même pendant quelques minutes, si bien que nous entendons à peine le réalisateur dire que nous avons terminé d'enregistrer. Le seul complètement trempé de la tête au pied, c'est moi. « Je te déteste. » je siffle à Laura sans être sérieux. Elle se contente de me répondre avec un clin d'oeil. Je ne m'attarde pas plus sur le plateau, souhaitant savoir comment se porte Joanne.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
L'air un peu plus frais que lui procuraient les battements du conducteur lui faisait le plus grand bien, Joanne allait déjà beaucoup mieux. Son fiancé apparut quelques minutes en régie, elle avait un peu perdu le fil de l'émission. Il s'approcha rapidement d'elle, se mettant accroupi face à elle, véritablement inquiet de son état. Le réalisateur lui explique rapidement ce qu'il s'était passé. Joanne lui sourit tendrement, et acquiesça d'un signe de tête. "Je vais bien." Elle but une gorgée d'eau fraîche, sa bouteille était presque vide. "Il fait une telle chaleur ici." commença-t-elle. "Je ne me suis pas sentie partir." Elle esquissa un sourire légèrement amusée par ce qu'elle était en train de penser, puis partagea à voix basse son idée avec Jamie. "Pour une fois que ce n'était pas toi qui me donne chaud comme ça." Une petite note d'humour ne pouvait pas faire de mal. Jamie avait besoin de tout, sauf de savoir et de voir que sa fiancée n'était pas au top de sa forme. Joanne s'en voulait un peu de ne pas être en bonne forme. Il s'assura si elle avait tout ce dont elle avait besoin avec elle. Elle comprenait aisément ce dont il voulait parler. "J'ai laissé mon sac à main dans ta loge, il y a tout dedans." La jeune femme prit quelques instants la même de son compagnon. "Je vais bien, Jamie. Il ne s'agit pas de ça." Joanne le sentait lorsqu'il s'agissait de sa maladie, comme à la soirée où ils s'étaient rendus et où on l'avait bombardé de questions privées concernant Jamie. Celui-ci ne voulait que le meilleur pour elle, qu'elle ne se sente pas obligée de faire quoi que ce soit. Il lui suggéra fortement d'aller s'isoler dans sa loge et de s'y reposer. On appela Jamie pour la deuxième fois afin qu'il revienne sur le plateau. Il monta d'un ton envers le réalisateur. Sa nervosité était palpable. "Je vais bien, Jamie. Je te promets que ça va." Elle lui sourit tendrement, caressant du bout des doigts son visage. "Je vais rester assise ici et tout regarder de là, je ne bougerai pas d'un pouce." Autant ne pas prendre de risque de se lever pour mieux retomber ensuite. L'animatrice, à la taille mannequin, posa une main sur l'épaule de Jamie - la jeune femme focalisa son regard là-dessus, trouvant ce geste peut-être un peu trop amical. Mais elle ne conaissait pas l'affinité entre les deux personnes. Laura allait dans le sens de la conservatrice, soutenant qu'elle allait bien, et qu'il fallait reprendre. Joanne la remercia d'un hochement de tête. Alors que Jamie se redressait, elle lui chuchota. "Ca va aller." Et il s'éclipsa. Joanne se redressa pour mieux voir ce qui se déroulait au plateau, et le réalisateur relança l'émission. Elle le trouvait terriblement charismatique durant l'interview qu'il faisait, il avait beaucoup d'aisance, pour quelqu'un qui n'aimait pas le petit écran. La dernière partie de l'émission arrivait avec la miss météo, qui s'installa juste à côté de Jamie. La belle blonde se mordilla la lèvre inférieure, lâchant parfois des petits rires en voyant l'absurde de la scène. Et une grand inspiration sonores lorsqu'on vint lui déverser un grand seau d'eau sur la tête. Le pauvre était trempé de la tête pied. "Les femmes de ménage vont être joyeuses en voyant ça tout à l'heure." s'exclama le réalisateur. "Ca va, vous ?" demanda-t-il à Joanne, qui dit oui par un signe de tête et un sourire timide. "Bon Dieu, maintenant que c'est fini, ouvrez-moi cette fichue porte qu'on ait un peu d'air qui rentre. Si d'ici la fin de la semaine c'est pas réparé, je vais péter un câble. Greenberg, rapporte donc une autre bouteille d'eau à Joanne, veux-tu ?" Il continuait à marmonner dans sa barbe, tamponnant son front avec un mouchoir en papier. "Peut-être qu'ils attendent que quelqu'un se blesse en faisant un malaise pour qu'ils se bougent les fesses, bon sang." Son ton n'était pas véritablement énervé, mais il avait toutes les raisons de l'être. Joanne se demandait comment il faisait pour travailler dans une fournaise pareille. Jamie entra dans la pièce, le regard se rivant directement sur sa douce. Celle-ci se leva prudemment, afin d'être face à lui. Elle parvint à s'exprimer la première. "Je vais bien." dit-elle, encore une fois. Elle avait légèrement repris des couleurs, mais rien d'extravagant. "C'est passé, et ça va beaucoup mieux depuis que cette porte est ouverte." Joanne prit l'une de ses mains pour en embrasser le dos. "Regarde-toi." souffla-t-elle en essuyant de ses doigts quelque gouttes d'eau qui coulait le long de sa joue. "Tu as emmené des habits de rechange ?" demanda-t-elle. Il ne faisait pas si froid que ça dehors, mais elle craignait tout de même qu'il n'attrape froid. "Tu as été fantastique." lui dit-elle à voix basse, les yeux pétillants. "Et pour l'avoir vu, tu rends vraiment bien sur l'écran, même entièrement mouillé." lui avoua-t-elle, très honnête. Plusieurs fois devant l'écran, elle se disait plusieurs fois à quel point son fiancé était beau, physiquement parfait. "Je ne suis pas encore sûre si je dois apprécier l'idée de partager mon fiancé avec toutes les ménagères du pays." ajouta-t-elle, un peu rieuse. Jamie l'emmena ensuite à nouveau dans sa loge. On lui apporta rapidement des serviettes pour qu'il puisse un peu se sécher, ainsi que deux bouteilles d'eau, dont une pour la jeune femme. "Tu veux bien quand même montrer l'étage dans lequel tu travailles tous les jours ?" Elle voyait déjà Jamie le lui refuser, soutenant ses arguments avec le petit malaise qu'elle avait fait un peu plus temps, qu'il faudrait qu'elle se repose. Elle pensait qu'il ne ferait certainement pas aussi chaud là-haut. Certes, elle était un peu fatiguée, mais elle était encore assez en forme pour voir le milieu quotidien de son cher et tendre.
Le seau d'eau a eu l'avantage de me rafraîchir. Maintenant, il faudrait éviter d'attraper froid. Ce n'est pas très conseillé, dans le métier, quitte à porter une écharpe en été. Je m'approche immédiatement de Joanne pour savoir comment elle va et, devinant mes pensées, elle m'assure que je n'ai pas de souci à me faire. Il est vrai que l'air est moins oppressant dans la régie lorsque la porte est ouverte. « Tu es sûre ? » je demande tout de même, comme s'il était nécessaire de me répéter assez de fois qu'elle va bien pour que cela s'imprime dans mon cerveau. Sa petite main vient légèrement essuyer mon visage. Je suis ruisselant d'eau de la tête aux pieds, et malheureusement, où que j'aille, une flaque se forme. « L'oeuvre de Laura. Je me suis fait avoir comme un bleu. » dis-je avec un petit rire, passant une main par mes cheveux pour rabattre en arrière les quelques mèches qui se collent à mon front. J'aurais pourtant du m'y attendre à la seconde où elle m'avait dit qu'elle se vengerait. Je suppose que toute l'équipe était au courant de la blague, excepté moi. Heureusement, même trempé, il fait si chaud que je ne risque pas de tomber malade. « J'ai ma chemise de tout à l'heure dans la loge. » j'assure à Joanne. En revanche, pour ce qui est du pantalon, je ne suis plus certain d'en avoir encore un dans mon bureau ; auparavant, je gardais toujours une tenue complète au travail, au cas où, et j'avais perdu cette habitude lorsque ma fiancée était entrée dans ma vie. Savoir que je pouvais me changer au travail m'incitait parfois à rester jusqu'à vraiment très tard, pour ne pas dire toute la nuit. Je rougis un peu et fuit Joanne du regard quand elle me complimente sur ce bref passage télévisé. « Tu trouves ? » Fantastique, je pense que le mot est très fort, mais n'ayant pas l'habitude du petit écran -pas de ce côté du plateau en tout cas- je serais assez content si ma prestation n'était pas complètement mauvaise. Je ris, gêné, lorsqu'elle ajoute qu'elle ne veut pas vraiment me partager avec les téléspectatrices. « Il va bien falloir Joanne ! » coupe Laura, s'incrustant sans gêne sans la conversation. « Regardez-moi ça. » Elle tend devant nous son téléphone et nous monte la vidéo qu'elle a prise du moment ou le seau d'eau me tombe dessus et je termine trempé, les vêtements collant à ma peau. La scène est assez drôle, je l'admets. « Ma main à couper que ça va buzzer. On va faire exploser twitter. » dit-elle avec une satisfaction totale. A vrai dire, je ne comprends pas en quoi ma tête de chien mouillé pourrait intéresser qui que ce soit, jusqu'à ce qu'elle ajoute, me toisant de haut en bas ; « En plus, on voit tout. » Je me regarde également et, en effet, la chemise bleue clair et le pantalon mouillés moulent un peu trop mon corps. Laura m'adresse un nouveau clin d'oeil et n'hésite pas à me donner une tape sur la fesse avant de se diriger vers sa loge. Je l'arrête avant qu'elle ne passe la porte donnant sur le couloir. « Tiens, vous n'auriez pas un change quelque part dans le dressing ? » Elle prend une moue déçue de savoir que je ne tiens pas à rester ainsi, puis reprend son sérieux. « J'vais te trouver ça. » Elle file. Joanne et moi retournons également dans ma loge où je ne tarde pas à retirer mon haut trempé, et attendant d'être plus sec pour enfiler l'autre chemise. Je prends volontiers les serviettes qu'on me fournit pour me sécher un peu. J'en profite également pour utiliser le coton et le démaquillant laissés là par la maquilleuse pour me défaire de l'épaisse couche de fond de teint et de poudre. Joanne souhaite tout de même aller à l'étage de la radio. Je la regarde à travers le miroir. « On ne devrait pas plutôt rentrer ? Histoire que tu te reposes. » A son regard déçu, je comprends que la réponse est non. « Bon, d'accord... » dis-je finalement. Après tout, maintenant qu'elle est là, et si elle se pense en forme pour finir la visite des lieux… Laura ne tarde pas à apparaître dans la loge, me tendant le pantalon que je lui ai demandé. « Tiens. Et merci pour le dépannage Jay. » Je lui réponds d'un simple signe de tête. Elle salue Joanne, et ne reste pas plus longtemps. Je peux enfin retirer mon bas, sécher mes jambes et enfiler le jean qu'on m'a trouvé -un brin trop grand, mais rien de dramatique. Je mets également la chemise sèche sur mon dos. Reprenant la main de la jeune femme, je la guide dans les différents couloirs du dédale de l'immeuble jusqu'aux ascenseurs, et appuie sur l'étage qui nous intéresse -celui où je passe mes journées. « L'équipe du soir sera là. Ils ne sont pas beaucoup et ils sont très cool, mais il faudra éviter de trop déranger. » j'explique à ma belle pendant les quelques secondes qui nous mènent là-bas. Les portes s'ouvrent sur un grand espace complètement vitré ; le centre de l'étage n'est qu'un grand vide commun à tout le bâtiment, comme un puits donnant sur le hall, tout en bas -mieux vaut ne pas avoir le vertige- et permettant de voir le plafond de l'édifice. Autant dire que tous les bruits de toutes les rédactions se mêlangent en permanence, crént un bruit de fond incessant qui devient notre propre définition du silence. « Voilà. En journée l'open space est un vrai champ de bataille. Personne ne tient en place, il y a un bruit monstre en permanence. Sur ces écrans, on a constamment les chaînes d'information en continu, et ABC bien sûr. Parfois, on diffuse même les émissions et la musique qui passent en studio dans les hauts-parleurs, tout en même temps. Il n'y a jamais énormément de monde, les journalistes sont surtout sur le terrain et reviennent pour monter leurs sons sur l'ordinateur. » dis-je en indiquant chaque élément dont je parle. Nous faisons le tour du puits et arrivons devant une porte ; d'un doigt sur ma bouche, je fais signe à la jeune femme de ne pas faire de bruit. La porte donne sur la régie, minuscule pièce terriblement sombre dont la vitre laisse voir le studio où se déroule actuellement une émission -à peu près l'équivalente de celle à laquelle je viens de participer pour la télévision. Je salue silencieusement le régisseur et m'adresse tout bas à mon invitée. « La régie, bien plus petite que celle de la télévision. Le studio aussi d'ailleurs. On a quatre sur cet étage dont un pour les répétitions. Je passe pas mal de temps là-dedans. » A simplement m'assurer que tout se passe bien, ou à renouer avec l'immense et fort complexe table de mixage qui prend énormément de place dans la pièce. Je suis toujours complètement fasciné par cette multitudes de boutons qui me rendent nostalgique. « Regardez qui est là ! » s'exclame le présentateur dans le studio. Je relève la tête, avec une certaine crainte de deviner ce qu'il va se passer. « Jamie ! Viens ! Rejoins-nous ! » Je secoue négativement la tête avec de grand yeux, mais il s'en fiche bien. L'un des chroniqueurs quitte même son siège pour ouvrir la porte séparant le studio de la régie et me tirer par le bras. « Sérieux, fais pas ton timide, pose tes fesses. Han, tu nous as amené une jolie créature en plus. Faut partager ! » Ou pas, hein. Le chroniqueur pose un casque sur la tête de Joanne et la fait s'asseoir à sa place. Je m'installe à côté d'elle, résigné, et lui asurant du regard que nous ne resterons qu'une minute. « Jamie, mesdames et messieurs, est l'un des rédac' chefs d'ABC, et le bougre s'est aussi offert une émission le lundi, juste avant celle de votre serviteur. Et toi alors, qui t'es ? »
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Il va bien falloir le partager. Joanne ne savait pas si elle devait le prendre à la rigolade ou rester sérieuse sur le sujet. Elle fit un bien bref sourire à Laura, qui s'approcha sans gêne d'eux, montrant la vidéo du désastre. La jeune femme ne put s'empêcher d'en rire une nouvelle fois, désenchantant un peu lorsque l'animatrice semble si certaine que cette vidéo allait faire le tour du globe. Elle échangea brièvement un regard peu assuré à son fiancé. Laura nota également la transparence sidérante de la chemise de Jamie. La conservatrice avait beau connaître ses traits et son corps parfaitement, ça ne le rendait pas moins séduisant ainsi. Elle regarda avec des yeux ronds l'autre blonde tapoter sans gêne les fesses de Jamie. Ca devait être monnaie courante dans l'ABC puisque Jamie ne semblait absolument pas choqué par ce geste. Elle se rendait compte à quel point elle pouvait être possessive par moment, mais n'en dit pas un mot. Ils étaient de retour dans la loge, Jamie s'était débarrassé de la chemise complètement trempée. La jeune femme se permit de lui déposer un baiser au niveau de son omoplate, juste par envie, avant qu'il n'enfile son vêtement sec. Il avait du remarquer assez rapidement la mine déçue de sa belle à travers le reflet du miroir pour céder et finalement accepter de visiter les locaux dans lesquels il travaille tous les jours. La jeune femme récupéra les habits mouillé de son fiancé, les mettant dans un sac plastique qui traînait toujours dans son sac au cas où, pour les ramener plus facilement à la maison. Jamie prit sa main libre et la guida, comme promis, à l'étage où il travaillait tous les jours. Il lui fuit quelques rapides explications quand ils étaient dans l'ascenseur, attendant d'arriver à l'étage correspondant. Il lui expliqua l'ensemble de l'étage, Joanne suivant des yeux ce qu'il indiquait, ici et là. C'était immense. "Et ton bureau fait aussi partie de l'open space ? Ou tu as un endroit un peu confiné et plus silencieux pour pouvoir travailler ?" demanda-t-elle, intéressée par tout ce qu'il racontait. Ils entraient tous les deux dans la régie de la radio, bien plus petite que ce qu'elle avait vu auparavant. La jeune femme restait agrippée au bras de son fiancé, alors qu'il continuait le descriptif des lieux. Tout était bien calme lorsqu'un des animateurs remarqua la présence de Jamie. Complètement hébétée, elle ne comprenait pas vraiment ce qu'il se passait. Un des chroniqueurs prit doucement sa main et l'entraîna dans le studio. Son coeur ne fit qu'un bond. Sans qu'elle puisse faire quelque chose, elle se retrouvait avec un casque sur les oreilles, devant un micro, Jamie juste à côté d'elle. Elle lui fit un regard assez inquiet. Spontanément, elle posa sa main sur la cuisse de Jamie, serrant entre ses doigts le tissu de son pantalon. L'animateur commençait sa tirade à présenter Jamie, jusqu'à ce qu'il porte son attention sur Joanne. Elle ne clignait même plus des yeux, sentant un léger vent de panique en elle. D'une voix extrêmement douce, elle dit, tout simplement. "Joanne..." Elle essayait de décrypter le regard du chroniqueur en face d'elle, en quête de mots pour étoffer son intervention. "...une fervente admiratrice..." tenta-t-elle. Elle n'allait pas non plus hurler qu'elle était la fiancée de Jamie, loin de là. "Et pas que fervente." dit l'animateur, vraisemblablement satisfait de sa présence. "Je dois vous avouer, messieurs, et aussi mesdames, tant qu'on y est, que Joanne a des yeux que l'on voit rarement de nos jours." On ne savait pas si c'était de la nervosité, ou plutôt l'acceptation d'un compliment, mais la jeune femme souriait timidement. "Qu'on se le dise, franchement. Ses yeux sont d'un bleu, comme je n'en ai jamais vu, vraiment. C'est presque dommage de n'entendre que sa voix, parce que moi, pour la voir, je peux vous dire que vous tomberiez immédiatement sous le charme si vous l'aviez en face de vous." Le chroniqueur semblait un peu subjugué, ses collègues ne faisaient que confirmer ce qu'ils disaient. "Un ange dans le studio." dit l'un. "Exactement. C'est exactement ça. Vraiment... Ouah ! J'en perds même le file de ma chronique, tiens !" "Tu parlais des prochaines sorties cinéma." "Ah oui, c'est ça." Et il terminait ce qu'il avait commencé, regardant couramment que Jamie, et plus particulièrement Joanne, restaient bien à leur place. "Mais puisque nous avons des invités surprise, entre le boss, et l'une des femmes les belles que j'ai jamais vues, j'ai juste envie de modifier un peu le programme, avant de faire le point sur les infos." Joanne supposait que c'était toutes les heures, les informations. Elle regarda l'horloge présente dans le studio, et constata avec surprise qu'il restait encore dix longues minutes avant qu'ils ne puissent être éventuellement libérés. Si elle s'attendait à ça. Mais étrangement, ces minutes là étaient passés incroyablement vite. Les chroniqueurs avaient leur travail, parlant et faisant des remarques jusqu'au moment buttoir. Sauvée par le gong. Il lançait alors un morceau de musique, Joanne pouvait se libérer de ce cas avec un long soupir. Elle n'avait presque rien dit, certes, mais pour elle c'était déjà beaucoup. Elle tenait d'ailleurs, toujours assez fermement, le pantalon de Jamie entre ses doigts.
S'il y a un avantage à travailler dans les programmes de nuit, c'est certainement le calme. Il n'y a personne dans les étages, ceux qui restent sont les employés de la télévision qui s’agglutinent dans les studios, souvent au sous-sol. La journée, le bruit est un véritable enfer. Il faudrait vraiment que Joanne vienne au milieu de l'après-midi pour entendre ça, et comprendre mon amour du silence à la maison ainsi que la raison pour laquelle il m'arrive de parler très peu. Lorsqu'on vit dans le bruit, lorsque le bouhaha indéfini et continuel devient un élément permanent, rien qu'un aboiement de Ben peut devenir le son en trop pour mes nerfs. L'habitude n'y fait rien : toute une journée dans cette soupe finit par vraiment fatiguer, et parfois, filer un bon mal de crâne. « J'ai un bureau pour moi, par là-bas. C'est loin d'être le silence complet, mais c'est pas mal. » je réponds à la question de la jeune femme. Les bureaux individuels sont les seuls murs en dur, avec ceux des studios et des régies. Cela empêche pas mal le bruit de s'infiltrer, mais il parvient toujours à nos oreilles, même la porte fermée. Nous entrons finalement dans l'une des régies de l'étage, et ne tardons pas à être pris d'assaut par les animateurs de l'émission en cours qui nous ont remarqués. Nous avons tout les deux l'air bien bêtes lorsque nous nous retrouvons devant les micros autour de la table, casque sur les oreilles, sans rien avoir pu faire ou dire comme cela. La main de Joanne qui s'agrippe à mon pantalon laisse deviner la taille de sa nervosité -et la connaissant, elle doit véritablement être morte de peur. Je pose ma main sur la sienne et la serre doucement, lui adressant un regard tendre, néanmoins aussi discret que possible. Je ne tiens pas à ce que l'animateur devine ce qui nous lie elle et moi et en fasse un long sujet de conversation pour les heures à venir ; je suis loin d'avoir honte de ma Joanne, mais l'idée que notre relation soit au coeur d'une chronique improvisée ne m'enchante pas. Je suis assez content lorsqu'elle ne se présente pas comme ma fiancée, mais comme une admiratrice. Je vois déjà venir le post-it sur mon bureau demain matin pour me demander si j'avais réussi à conclure avec ma groupie. Lorsque l'animateur se lance dans une tirade sur la beauté de la jeune femme et de ses yeux, je ne peux pas m'empêcher de lui jeter un regard noir. Il la drague en direct juste devant moi. Je rêve. Sur le moment, je transpire la possessivité. Il est en train de décrire la beauté de ma Joanne à des milliers de personnes qui sont désormais en train de se l'imaginer et, pour certains, de coller leurs fantasmes dessus. Je ne dis rien et me contente de serrer les dents, retenant un long soupir. Je suis soulagé que l'autre reprenne sa chronique, nous oubliant un instant. Le répits est de courte durée, l'attention se repose sur nous. Je pense que mon regard en dit tellement long que l'animateur n'insiste pas énormément -même si cela est déjà bien trop. Il prend rapidement une photo de Joanne et la poste sur la page facebook ainsi que sur le twitter de l'émission. « Pour ceux qui ne vivent pas dans une grotte, rendez-vous sur les réseaux sociaux pour pouvoir admirer la très très belle Joanne. Sur facebook et twitter, lâchez vos commentaires et mettez-lui une note sur dix ! » Intérieurement, je suis en train de l'étrangler. Ou de le faire virer. Je n'ose rien dire, je sais que mon agacement se sentirait dans ma voix. A la radio, le moindre changement, la moindre fluctuation du timbre se devine. « Ca nous fait une belle moyenne de huit sur dix dis donc ! » lance l'animateur après une dizaine de minutes à lire tout haut certains messages particulièrement flatteurs pour la jeune femme et commenter les notes qui défilent. Lorsque la musique est envoyée, nous pouvons retirer nos casques et partir. « Désolé Jay, j'voulais pas te contrarier, t'sais que c'était pas méchant. » me dit tout bas le jeune homme. Trop soulagé que ce soit terminé pour lui en vouloir, je me contente de lui sourire et lui tapoter l'épaule pour lui assurer que je suis sans rancune. « Que huit sur dix ? » je demande une fois sortis de la régie, et enfin tranquilles, réussissant à me détendre. Puis je soupire en secouant négativement la tête, désapprouvant ce maigre score. Je reprends la main de Joanne et l'attire à l'autre bout de l'étage, jusqu'à mon bureau. L'endroit est assez grand, surtout très sobre, je n'ai jamais pris le temps de beaucoup le personnaliser ; il y a un premier petit bureau qui est celui de Daisy, et le mien se trouve quelques pas plus loin. Au milieu de la pièce, il y a une sorte de paravent qui permet de moduler l'espace ; si je souhaite être parfaitement isolé, nous le tirons, mais il reste replié le reste du temps. « Voilà mon antre. » dis-je en m'asseyant sur mon bureau. Seule réelle trace de ma personnalité ici : le fait qu'il s'agisse de la seule pièce dans tout l'étage dont tous les meubles soient en bois.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Joanne n'en revenait pas. Il venait de prendre une photo d'elle sans demander quoique ce soit, et de la balancer sur les réseaux sociaux de la radio. Elle ne se voyait pas contredire le chroniqueur en direct, mais cette brillante idée était loin de l'enchanter, ce n'était pas le genre choses qu'elle recherchait, loin de là. Son coeur s'accélérait, pris dans un étau de panique et d'angoissée, son corps était pétrifié. De plus, il demandait même aux auditeur de noter la beauté de la jeune femme. Totalement muette, elle ne parvenait à rien faire, ni dire quoi que ce soit, mis à part attendre que ce désastre prenne fin. Elle fit un très long soupir une fois que la musique avait été lancée. Joanne afficha un sourire très timide et gênée au chroniqueur avant de quitter la régie. Ce dernier s'excusa tout de même à Jamie, qui ne n'avait qu'une hâte : sortir de là. Elle était accrochée au bras de son fiancé, qui lui désapprouvait le maigre score donné par rapport au physique de Joanne. Il semblait un petit peu contrarié, d'ailleurs. Joanne ne préférait rien dire, ses pensées étaient loin d'aller dans son sens. Il l'emmena enfin dans son bureau, une immense pièce, facilement modifiable avec la présence de ce paravent au milieu de la pièce. La belle blonde fit quelques pas dans la pièce, regardant de plus près les meubles, la paperasse, ces petits détails qui faisaient tout. Elle lui sourit tendrement, avant d'avoir l'air un peu plus tracassée. "Tu crois que tu pourrais leur demander d'enlever ma... photo de leurs réseaux sociaux ?" Joanne s'approcha doucement de lui. "S'il y en a de moi, je préfère largement que ce soit posté sur ton Instagram à toi, ou jalousement conservé dans tes albums photos." Et elle le pensait vraiment, avec un sourire sincère. Joanne préférait voir des photos d'elle dans les comptes des personnes qui étaient proches. Sophia, Jamie, peut-être même James, son frère et sa soeur. Mais pas sur quelque chose de publics, visités des par des milliers d'inconnus. Ce n'était pas une histoire d'anonymat - peut-être que si. Mais la conception même de la chose la mettait extrêmement mal à l'aise. Elle se permit de déposer ses affaires à côté de son bureau. La pièce était incroyablement calme, c'était très agréable. Ca changeait radicalement du lieu de travail de Joanne avec les travaux. Elle ne se réjouissait pas d'être le lendemain, avoir affaire à ce tapage diurne qui devenait presque insupportable. Elle en avait eu une sacrée migraine la veille, heureusement vite soulagée par un antalgique. Elle vit sur son bureau un stylo, certainement hors de prix. Elle le regarda d'un peu plus près en disant. "Tu as serré ma main un peu plus fort lorsqu'il a commencé à... me faire des compliments." remarqua-t-elle, en ressassant tout ce qui venait de se passer. Joanne ne savait pas s'il s'agissait d'un plan drague ou quelque chose dans le même goût. Après avoir reposé le stylo à l'endroit exact où il se trouvait quand elle l'avait pris. La belle s'approcha ensuite de Jamie, se faufilant entre ses jambe, ses mains se posant ensuite sur les hanches de son homme. Elle l'encercla ensuite entièrement de ses bras, et déposa sa tête contre son épaule. "Si ça ne va pas un peu mieux d'ici la fin de la semaine, je pense que j'irai voir le Dr. Winters. J'ai peur que ce soit en rapport avec...ça." Même si ça s'était énormément amélioré depuis qu'elle vivait avec Jamie, il lui arrivait encore d'avoir quelques insomnies, des difficultés à s'endormir. Mais la fatigue cumulée, avec le bruit permanent au musée, n'arrangeait en rien les choses. Puis l'anxiété qui gagnait du terrain aussi, se demandant si elle était toujours en bonne santé ou non. "Je ferai n'importe quoi pour bien dormir cette nuit." dit-elle à voix basse, profitant de l'étreinte et du corps de Jamie. Elle se mettait à rire toute seule. En redressant la tête, elle lui dit. "Peut-être que si je t'imagine dans une chemise complètement mouillé, ça m'aidera." Elle l'embrassa tendrement sur les lèvres. "Je peux t'avoir avec moi dans le lit une demi-heure en plus, demain matin ?" Elle ne commençait qu'à dix heures, ce qui voulait dire qu'elle pouvait dormir plus longtemps le matin. C'était une chose, être dans les bras de Jamie à ce moment là, en était une autre. Joanne avait l'impression qu'il était encore un peu perturbé de ce qui venait de se passer à l'antenne. Sa belle la regardait d'un air extrêmement tendre, pour lui dire à voix basse. "Tu sais qu'il n'y a que ta note à toi qui compte, n'est-ce pas ? Que ce ne sont que tes compliments qui importent à mes yeux ?" Elle rit timidement. "Je suis d'accord, les accepter, c'est un autre problème."[/clor] Ses yeux bleus se plongeaient inlassablement dans son regard. "Je me fiche que les autres me donnes un huit, un sept, ou autre. Je ne veux plaire qu'à toi." Elle déposa ses lèvres sur les siennes avec lenteur, posant dans la plus grande délicatesse juste la pulpe de ses doigts sur les deux joues de son fiancé.
Je n'ai jamais été de ceux qui personnalisent beaucoup leur espace de travail. Je ne mets pas de photos de famille ou de vacances dans un cadre ou en fond d'écran de mon ordinateur, je n'ai pas de tapis de souris original, ou je ne sais quelles babioles. Mon bureau est surtout jonché de papiers, de dossiers, relativement bien rangés et empilés dans un coin, de stylos, et comporte un assez gros porte carte de visites rotatif en bois que j'aime beaucoup -mon côté rétro que Joanne me connaît bien. Ce qui trahit mes heures de désespoir lorsque je ne peux pas quitter mon bureau, c'est la grande réserve d'élastiques et de trombones dans une boîte à côté de l'écran d'ordinateur, dont la plupart sont cassés ou tordus par la nervosité, la frustration, parfois l'ennui. Assis sur la surface en bois, je laisse Joanne faire quelques pas dans la pièce, ce demandant ce qu'elle peut penser en voyant enfin le lieu où je passe mes journées ; si elle est déçue ou surprise. Je plisse les yeux en voyant l'expression de son visage changer ; elle souhaite que la photo d'elle soit supprimée, préférant sûrement garder son anonymat. Je lui souris et acquiesce d'un signe de tête. « Bien sûr, t'en fais pas. Je lui demande tout de suite, comme ça, c'est fait. » Je sors mon téléphone, trouve rapidement le numéro de l'animateur de l'émission, et lui envoie un message assez succinct -en profitant de l'occasion pour rappeler que c'est pas parce qu'on fait de la radio qu'on se fout du droit à l'image. La jeune femme s'approche du bureau et, à côté de moi, tripotant un stylo, souligne ma réaction lorsque l'avalanche de compliments s'est abattue sur elle. Je sais que j'avais serré sa main un peu plus fort, à la fois pour me rappeler qu'elle est mienne, et pour chercher un peu d'apaisement. Mais je prends un air étonné et innocent. « Vraiment ? Je n'ai pas remarqué. » J'hausse les épaules. J'ai déjà été bien plus convainquant que cela. C'est que, même si je sais que Joanne plait, que j'ai parfaitement conscience des regards qu'elle peut attirer, c'est la première fois que j'entends et lis plusieurs personnes, énormément de personnes, en même temps, la complimenter, faire l'éloge de ses yeux et de sa présence. Je crois que le plus énervant à été d'entendre quelqu'un d'autre que moi dire qu'elle est un ange. Un peu comme si ce mot m'est réservé. Je laisse Joanne se faire une place entre mes jambes et me prendre dans ses bras. Les miens ne tardent pas à l'entourer également. Elle fait finalement part de son inquiétude vis à vis de sa santé, et compte consulter Winters si nécessaire. « Bonne idée. » je murmure avant de déposer un petit baiser sur sa joue. « Je ne pense pas que ce soit quelque chose de grave, tu dois simplement nous couver quelque chose, et la fatigue n'arrange rien. Mais on ne sait jamais. » Nous savons elle et moi que nous pouvons compter sur son médecin pour savoir ce qu'elle a et trouver une solution. « Tu sais, je dois sûrement avoir de quoi t'aider à dormir à la maison. Je prenais des somnifères quand je suis arrivé à Brisbane, impossible de passer une nuit correcte. Il doit m'en rester quelque part. Je sais que tu n'aimes pas ça, mais je préférerais que tu puisses te reposer. » Je ne sais pas en quoi m'imaginer avec une chemise me collant au corps pourrait l'aider à dormir, mais l'idée me fait rire. Je repense à cette vidéo que Laura va se faire un plaisir de diffuser partout après le passage de l'émission à la télévision -ce qui ne devrait plus tarder. J'espère qu'elle ne parviendra pas à en tirer le buzz qu'elle souhaite. « Si cette vidéo fait le tour du web je pense que je m'enterre à la maison pendant tout un mois. » dis-je avec un sourire amusé avant de laisser Joanne prendre possession de mes lèvres. Je resserre légèrement mon étreinte en prolongeant ce baiser. Puis je laisse mon visage près du sien, apposé à son front, caressant la courbe de sa mâchoire du dos de la main. « Oui, bien sûr. » je réponds lorsqu'elle me demande si je pourrais traîner un peu au lit demain matin. Ce n'est pas une demi-heure qui tuera qui que ce soit. Me connaissant, je resterai même une heure entière, souhaitant rester encore un peu plus avec ma si pâle fiancée. Même plus fragile que d'habitude, elle remporte tous les suffrages. Seigneur, qu'elle idée de demander aux inconnus de lui mettre une note. Se faufilant dans mes pensées, ma fiancée ne me connaissant que trop bien essaye de me rassurer. Je souris en coin quand elle admet que même si seuls mes compliments comptent, cela ne veut pas dire qu'elle les accepte. Ma possessivité me ronge toujours quand il s'agit de mes proches. D'autant plus concernant Joanne. C'est un sentiment tellement oppressant. Une boule au ventre, comme un trou noir, aspirant mon estomac à la moindre occasion, une main puissante tordant mes organes, essorant mes poumons et serrant mon coeur, un murmure incessant à mes oreilles qui aspire toute bonne pensée, ne laissant qu'une crainte teintée d'agressivité à l'idée qu'on puisse me prendre, ou simplement lorgner sur ce qui m'appartient. Je cherche du réconfort dans le baiser qu'elle me donne, me répétant ses paroles dans l'espoir de calmer ce vieux démon. « Je t'aime. » dis-je juste au bord de ses lèvres. Je les observe avec une certaine envie, avant de replonger mon regard dans le sien. « Je n'aime pas te partager avec qui que ce soit. J'aime qu'on te trouve belle et qu'on me déteste parce que tu n'es qu'à moi. Et pourtant, je ne supporte pas que quelqu'un d'autre pose un regard ou une main sur toi, comme ce fichu Lionel, ou l'autre grand blond à Sydney, pas même Jon. Je veux que tu sois mienne, uniquement mienne, tout le temps. » J'aimerais qu'elle soit comme une pièce de musée ; belle, mais complètement inaccessible pour tout le monde, excepté moi -et je laisserai le monde me jalouser cet accès privilégié. Je laisse mes lèvres frôler les siennes, traîner légèrement à leur surface, aimant sentir parfois leur contact furtif lorsque je parle. « Mais tu mérites toutes ces attentions et ces compliments. Tu es tellement belle. » Elle doit penser que je ne parle que de son apparence -et cela déjà elle ne l'acceptera pas- mais ce mot a une portée plus vaste à mes yeux et englobe tout ce qu'elle irradie à longueur de temps. « Tu ressemble vraiment à un ange. » je murmure, à demi dans mes pensées, avant de me laisser magnétiquement attiré vers elle afin de l'embrasser tendrement.
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Jame s'éxecuta immédiatement lorsqu'elle lui demandait à ce qu'on supprimer sa photo des réseaux sociaux, ça la rassurait beaucoup. Il y avait certes cette envie de garder un peu son anonymat, mais surtout, le fait de savoir que des personnes qu'elle ne connaissait ni d'Adam ni d'Eve allait la voir, peut-être continuer à la noter et à la juger sur son apparence. Un sentiment très désagréable pour elle, ayant cette peur constante du jugement. Il n'était pas très convaincant lorsqu'il disait qu'il n'avait rien remarqué lorsqu'il avait serré sa main quand ils étaient sur l'antenne. Joanne lui sourit tendrement, sachant pertinemment que c'était faux, et qu'il s'était parfaitement rendu compte de ce qu'il faisait. Elle ne lui en tenait pas rigueur de toute manière. La jeune femme se blotti contre lui et logea sa tête dans son cou, alors qu'il disait qu'il était tout à fait pour qu'elle aille consulter si son état ne s'arrangeait pas. "Je n'aime pas être malade. Pas du tout." dit-elle à voix basse, parlant initialement pour elle-même. Etre dans cette état de faiblesse la mettait plus encore contre elle-même qu'autre chose. Jamie lui proposa ensuite de prendre un somnifère. Ce n'était certainement pas une simple suggestion, il était certainement capable de la motiver à prendre un comprimé. Il n'irait pas non plus jusqu'à la forcer, mais insister fortement. Ce genre de médicaments ne l'avait jamais vraiment attiré. Elle avait lu tellement d'articles qui parlait de la dépendance que l'on pouvait développer face à certains somnifères, et trouvait qu'il ne fallait qu'en utiliser vraiment en dernier recours. Sinon, la jeune femme était assez réfractaire à l'idée d'en prendre, certainement du à une crainte de ne pas arriver à se réveiller, aussi. Elle ne savait pas d'où lui était venu cette idée. Ne sachant pas trop quoi répondre - et puisqu'il savait très bien que cette idée était vraiment loin d'enchanter sa belle-, Joanne acquiesça d'un léger signe de tête, toujours blottie contre lui. Peut-être que ça marcherait, après tout. Une bonne nuit de sommeil, bien complète, lui aurait fait le plus grand bien. Joanne se redressa un peu, pour pouvoir se plonger dans ces yeux verts qu'elle aimait tant. Elle esquissa un large sourire. "Ca m'irait. Ca voudrait dire que tu ne serais que pour moi pendant tout un mois. Le rêve." dit-elle tout juste avant de l'embrasser tendrement. Il l'avait collé un peu plus contre lui, son visage restait très près de celui de la belle, et Jamie effleurer délicatement sa mâchoire. Elle adorait sa tendresse. Elle était heureuse de l'entendre dire qu'il était tout à fait possible qu'il traîne un peu plus dans le lit avec elle le lendemain, permettant à la jeune femme de se réveiller contre lui - une de ses sensations les plus agréables qui soient pour elle. A la surprise de Joanne, son fiancé s'ouvrit subitement sur la manière réelle dont il voyait les choses, l'attachement qu'il avait face à cette notion d'appartenance, relatant d'une possessivité particulièrement excessive. Joanne voyait à travers qu'il avait tout simplement peur de perdre quelque chose qui lui est précieux. Une preuve comme une autre de dire à sa façon à quel point il tenait à elle. Il faisait preuve d'une sorte d'ambivalence, cependant, disant qu'elle méritait largement tous ces mots balancés par les auditeurs. Gênée, elle baissa les yeux, et sourit très timidement. Il reprit aussi le mot avec lequel il avait pris l'habitude de l'appeler. Son ange. Elle se demandait d'où lui sortait cette idée, et il commença à l'embrasser doucement. Les bras de Joanne passèrent par dessus ses épaules, prolongeant de quelques secondes ce baiser. "Et je suis à toi, uniquement à toi, tout le temps." dit-elle, plantant son regard sincère dans le sien. "Lionel aurait pu poser la main où il voulait, Jon aurait pu dire ce qu'il voulait, et ce grand blond aurait pu danser d'autant qu'il le voulait avec moi, ça ne change rien." Elle savait bien que ces paroles ne seraient pas suffisantes. "Je t'appartiens et je veux être à toi, sinon je n'aurai pas cette magnifique bague au doigt, pas vrai ?" Elle l'embrassa brièvement. "Il n'y a qu'avec toi que je me réveille le matin, il n'y a que ton regard et tes mots qui comptent. Il n'y a qu'avec toi que nous... faisons l'amour très régulièrement. Je ne me sens aimée et heureuse qu'en ta seule présence." Joanne disait simplement ce qu'elle pensait vraiment, espérant que ses mots aient un moindre impact sur son fiancé. "Il n'y a que toi qui compte, Jamie. Je me fiche bien de plaire aux autres, d'être belle à leurs yeux. Je ne veux plaire qu'à toi." Elle ne quitta pas un seul instant son regard jusqu'à ce que ses lèvres s'aposer sur les siennes pour leur offrir un baiser des plus amoureux, prolongeant au possible ce contact qu'elle chérissait. La porte du bureau s'ouvrit soudainement. "Hé, Jamie ! T'es franchement sûre que tu veux qu'on enlève la photo ? Y'a une pluie de commentaires, que tu voies ça ! Cette nana, c'est franchement une bombe, je me la ta-..." Le chroniqueur en question ravala très rapidement ses mots lorsqu'il avait levé les yeux, et quand il avait évalué la scène qui se présentait à lui. Il se sentait soudainement extrêmement gêné et hébété à la fois, tenant fermement le portable qu'il avait en main et qu'il regardait jusque là, regardant les commentaires postés depuis la fin de son émission.
Pendant un bon moment, Joanne essaye de me rassurer. Malheureusement, je sais qu'elle n'arrive à apaiser mon esprit que temporairement. Je la crois sur le moment, je me laisse séduire par ses paroles et fais taire ma possessivité quelque peu. Je souris, gêné de me montrer aussi jaloux alors qu'elle a raison ; si elle n'avait pas envie d'être uniquement avec moi, elle ne porterai pas cette bague, elle n'aurait pas accepté de prendre cet engagement, de m'épouser. L'information n'a décidément pas complètement fait le tour de ma tête. Je dois encore réaliser que ce n'est pas qu'une bague qui signifie que nous sommes ensemble, que cette relation est sérieuse à ses yeux, mais bien qu'elle deviendra ma femme, un jour, qu'elle aussi veut que nous passions notre vie ensemble, et que c'est à cela qu'elle a dit oui. J'espère que tous ces mots seront toujours valables demain, la semaine prochaine, dans un an, dans dix ans. J'espère qu'elle ne verra jamais tous les autres qui peuvent lui tourner autour, qu'elle restera avec cette innocente naïveté et qu'elle ne les verra même pas. J'espère, vraiment, que cette beauté sur laquelle des milliers d'inconnus s'extasient sera mienne quoi qu'il arrive. Je lui souris faiblement, l'air désolé de me montrer si jaloux envers le monde entier et si possessif avec elle. Une main sur sa joue, l'autre posée dans le bas de son dos, je prolonge autant que possible le baiser qu'elle me donne, caressant tendrement ses lèvres pendant de longues secondes où je me sens enfin mieux. C'est forcément à ce moment là que nous sommes dérangés. L'animateur s'est arrêté net en nous voyant. Je descends du bureau, serrant les dents, et fait quelques pas pour m'approcher de l'animateur. « Fais pas cette tête, je t'en prie, finis ta phrase. » dis-je, faisant autant comprendre qu'il ferait mieux de se taire et se faire tout petit. Sur le moment, je bous ; je ne suis pas sûr d’apprécier qu'on veuille se « taper » ma fiancée. « Euh, ouais, non, c'est rien. » bredouille-t-il en baissant les yeux vers l'écran de son téléphone. Je fais quelques pas supplémentaires pour me retrouver juste devant lui. Je le surplombe d'une dizaine de centimètres, et on devine très facilement qu'il me contrarie à la manière dont m'enfonce mes mains dans mes poches. Pour m'avoir vu en colère ou faire sa fête à des membres de la radio plus d'une fois, tout le monde sait que je ne suis pas la personne que l'on a envie d'énerver à cet étage -surtout que je pense être assez sympa avec tout le monde le reste du temps pour ne pas mériter que l'on cherche à me contrarier. « Et donc, euh, pour la photo... » « Tu la supprime. Tout de suite. » dis-je sans lui laisser d'alternative, calme et froid à la fois. « T'es sü-… Ouais, ok. » Je montre son téléphone d'un signe d tête pour faire comprendre que je veux le voir faire immédiatement. Il pianote d'une application à l'autre, et supprime enfin le cliché de la toile. Problème : si n'importe qui a déjà enregistré la photographie sur son ordinateur avant cela, rien n'empêchera cette personne de la republier quelque part où nous n'aurons pas de contrôle. Le cliché est peut-être déjà ailleurs. C'est bien le grand problème d'internet. On ne peut rien lui faire oublier. « Et j'dis quoi aux auditeurs ? » demande l'animateur, dépité. « Que t'es un abruti qui a pris une photo sans sa permission. D'ailleurs, tu es désolé. » Mon regard se pose sur Joanne afin qu'il s'adresse à elle. « Ouais. Désolé, je pensais que ça dérangeais pas. » D'un pas vers lui, je le pousse vers la sortie ; tout bas, il demande ; « Sinon je… Je peux pas juste lui demander son numéro ? » « Sors de mon bureau. » « Mais Jaaaay ! » Je ferme la porte, roulant les yeux au ciel, et n'oublie pas de verrouiller. Au milieu de la pièce, je tire même le paravent et m'adosse à celui-ci -c'est inutile, mais au moins je me sens vraiment seul et isolé avec la jeune femme. Je respire un coup, essayant de sortir de ma tête l'énorme liste de commentaires. « Voilà pourquoi je déteste m'occuper de l'équipe du soir. » La plupart sont dans son genre, et c'est une nature trop opposée à la mienne pour que nous puissions nous entendre.
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Elle n'en revenait pas. La jeune femme était certes naïve, mais elle avait facilement compris ce que l'animateur comptait dire par rapport à la jeune femme. Celle-ci s'était à demi-retournée, à la fois prise par surprise et choquée que l'on pouvait dire de telles choses à voix haute. Elle déglutit difficilement, alors qu'elle s'entait sous doigts et contre elle Jamie se lever et prendre les devants. Elle sentait rapidement qu'il était assez froid, mécontent du comportement de l'employé. La belle blonde restait en arrière-plan, les deux mains jointes, à ne pas perdre une miette de ce qui était en train de se passer. A vrai dire, elle craignait que Jamie ne perde ses moyens. Il restait incroyablement calme, malgré la fermeté qui se faisait très facilement ressentir dans ses paroles. L'animateur n'osait même pas terminer sa phrase qu'il se résigna et se plia à la volonté de son supérieur. Jamie tenait également à ce qu'il s'excuse auprès d'elle - ça n'aurait pas dérangé la jeune femme qu'il ne le fasse pas mais son fiancé était particulièrement insistant. Elle sourit poliment à l'homme avec un léger signe de tête. Il osait même encore demander le numéro de téléphone de Joanne, qui ne cachait pas sa mine surprise face à cette demande. Enfin, ils était à nouveau tranquille, le bel homme prenant même le soin de verrouiller la porte du bureau derrière lui et de clore l'immense paravent, retrouvant un espace dans lequel il aimait certainement se confiner de temps en à autre. Jamie retrouvait son calme, faisant une grande expiration. "Je ne crois pas qu'il ait compris que nous sommes ensemble." dit-elle en riant nerveusement, de sa voix douce. "Et fiancés." tenait-elle à préciser, en passant ses deux mains au niveau de sa nuque pour chercher à décontracter un peu ses muscles. Elle n'en revenait pas. "Il voulait mon numéro de téléphone." pensa-t-elle à voix haute, regardant dans le vide. Elle n'en revenait pas, et n'était absolument pas intéressée, cela pouvait aisément se lire sur son visage. La belle blonde s'approcha doucement de lui, venant lui offrir un baiser sur le coin de la bouche. "J'avoue préférer quand tu t'occupes de moi à cette heure-là." lui chuchota-t-elle, avec un regard des plus tendres. C'était une pensée bien égoïste pour elle, et exagérait certainement ce qu'elle pensait, mais il était qu'elle préférait l'avoir avec elle à la maison plutôt que de savoir qu'il se tuait à la tâche au travail. Joanne se prenait quelques secondes pour le regarder, et uniquement contempler les traits de son visage, ses yeux verts brillants. Joanne avait comme un regard passionné, à chaque fois qu'elle se prenait le temps de le regarder ainsi. Comme si elle se rendait compte à chaque fois combien elle pouvait l'aimer, et que si c'était possible, elle l'aimerait encore plus. "Tout est si calme, d'un coup." dit-elle à voix basse, ne désirant pas trop briser le silence qui les entourait. "C'est tellement paisible, agréable." Elle était tout à fait capable de rester là pendant de longues minutes, à savourer ce silence apaisant. "Et tu es là. Tout est parfait." Elle avait là un ton un peu plus rêveur. Joanne savourait chaque seconde de sérénité qui régnait dans cette pièce, ça lui faisait un bien fou. Elle vint doucement se blottir dans ses bras, ayant un manque d'affection qui s'était cumulé tout au long de la journée. Joanne ne réclamait jamais rien directement - mis à part quand il la mettait très intentionnellement dans une situation dans laquelle elle le supplierait presque de passer à l'acte. Il avait un don certain pour jouer avec sa patience à ces moments là. "Je t'aime." Joanne avait délicatement posé ses main sur son dos, serrant malgré elle le tissu de sa chemise entre les doigts. Sa tempe était posée contre lui, les yeux regardant dans le vide. "Et je t'aime tous les jours un peu plus, même si au fond, je ne crois que cela soit possible." Quand Joanne était fatiguée à ce point, elle balançait tout ce qu'elle avait sur le coeur. Certainement beaucoup plus efficace et beaucoup plus sincère que si elle avait bu quelques verres de cocktails avant. "Si tu savais tout ce qui me traverse la tête quand quelqu'un te regarde, tu vas certainement me prendre pour une folle." Ce n'était pas encore de la jalousie, ni de la possessivité, mais ça pourrait très bien le devenir. Elle avait l'impression qu'on lui broyait son coeur et ses intestins, qu'elle devait absolument tout garder pour elle et ne rien dire à qui que ce soit, pas même à Sophia. Joanne trouvait que ses pensées étaient malsaines, peut-être même obsessionnelles, elle avait un peu honte et cet affreu sentiment d'être une mauvaise personne en pensant ainsi. Elle rit nerveusement. "Ne m'écoute pas." finit-elle par dire en relevant la tête, se rendant compte qu'elle divaguait totalement. Son visage s'approche tout doucement du sien, ses yeux regardant son regard vert, contemplant furtivement ses lèvres. Elle ne fermait ses paupières qu'une fois qu'elle sentit sa bouche contre la sienne, amplifiant de manière lente et délicate ce toucher qu'elle aimait tant. Son baiser était tendre, délicatement, excessivement amoureux, se laissant totalement envoûter par ce qu'il faisait en échange.
L'homme parti, je suis à la fois si énervé et frustré que je ressens le besoin de me sentir complètement isolé. Je ne dois pas penser à tous les inconnus qui ont bavé devant la photo de Joanne, les différents commentaires allant du plus flatteur au plus obscène, les notes, le cliché partagé, republié, rediffusé à gogo un peu partout. Je ne dois pas me dire que, demain, dans la rubrique médias d'un petit site qui aime relater tous les buzz du jour, il y aura un billet de quelques lignes sur Joanne, le canon passé à la radio dont la photo a soudainement disparu. C'est un enfer, le mélange de toutes ces pensées dans ma tête. J'ai beau respirer, avoir l'air plus calme, la réalité de mon coeur tambourinant et de mon crâne qui explose sous la pression de la jalousie est palpable. Je m'efforce de sourire quand la jeune femme fait remarquer que, de toute évidence, l'animateur n'a absolument pas compris que nous sommes en couple -et qu'il n'avait pas remarqué les bagues assorties. « C'est clair. Mais je pense que même s'il savait que nous sommes ensemble, cela ne l'aurait pas beaucoup freiné. » dis-je en sentant ma mâchoire se serrer sur la fin. Après tout, en nous voyant, il avait au moins compris que j'étais intéressé par Joanne, qu'elle n'était pas là par hasard -il devait penser que la nouvelle petite vedette voulait se « taper » la jolie admiratrice après lui avoir fait le tour du propriétaire pour l'impressionner, comme lui-même l'aurait fait. Malgré cela, il ne s'était pas gêné pour la draguer juste sous mes yeux, tenter sa chance. « Il voulait beaucoup plus que ton numéro de téléphone. » je murmure, mauvais. Si j'avais pu juste dégager la place, quitter le bureau pour le laisser avec elle, il aurait été ravi. Je ferme les yeux ; je dois vraiment me calmer. Le baiser de Joanne, au coin de mes lèvres, me sort de mes pensées. Je lui adresse un maigre sourire, l'air de dire que mon état va passer -et que moi aussi je préfère largement être rentré à la maison à cette heure-là. Mon regard fuit le sien juste une seconde, le temps de faire de la place dans mes pensées, balayer le négatif, et revenir dans le moment présent plutôt que de me projeter dans tous les pires scénarios. Quand je trouve celui de Joanne, son éclat est étrange. Il me faut quelques secondes pour comprendre qu'elle est tout simplement en train de me scruter -avant de rougir et fuir de nouveau. La jeune femme remarque le silence, et lorsqu'elle en parle, il parvient à mes oreilles également. Il n'y a pas un bruit. Pas un téléphone qui sonne, personne pour taper sur un clavier d'ordinateur, aucun talon claquant rapidement sur le sol, de télévision allumée. Rien du tout. « C'est rare ici, ce genre de silence. » je murmure aussi bas que Joanne. Celle qui vit dans les travaux depuis deux semaines trouve forcément cela agréable. Pour ma part, j'ai un sentiment étrange. Tout me semble si vide, si mort. « Je trouve ça un peu angoissant, en fait. L'habitude du bruit. » J'hausse les épaules, un sourire en coin. A mes yeux, ABC sans son fond sonore, ce n'est plus vraiment le même endroit. C'est un peu moins chez moi. Tous les sons dans l'air de rédaction ont quelque chose de rassurant. Et puis, à la fin de la journée, alors le travail laisse place à la vie dans le foyer, c'est le silence qui devient apaisant. Le bruit sert de frontière entre ces deux vies que je mène. Je laisse Joanne se faire une place dans mes bras, et l'enlace tendrement, déposant un baiser au sommet de son crâne. Comme à mon habitude, je ne sais pas quoi répondre à ses mots d'amour. Ce n'est pas faute de m'être un peu amélioré avec le temps, mais j'avoue que ses paroles me laissent muet cette fois. Je sais que je ne pourrais pas l'aimer plus que c'est déjà le cas. Ce sentiment me donne déjà l'impression d'exploser, d'être à l'étroit dans mon propre corps, et je ne cesse d’accumuler la frustration de ne pas réussir à assez bien lui montrer l'intensité de mes sentiments, que ce soit par les mots ou les gestes. Rien n'est jamais assez. Et parfois, je sens véritablement mon coeur oppressé par tout ceci, presque souffrir de ces émotions condensées dans un espace si petit. « Je ne pense pas que ça puisse être pire que mes envies de meurtre quand on t'approche de trop près. » je réponds à ma fiancée qui laisse deviner une pointe de possessivité. J'exagère les mots, mais en réalité, ils ne sont pas loin du compte. S'il n'y avait rien pour me retenir, je pense que n'importe quel homme approchant Joanne n'en prendrait une ; qu'une personne osant l'observer avec trop de gourmandise ou poser une main sur elle ne pourrait plus regarder ou toucher quoi que ce soit par la suite. Bien sûr, je ne serais jamais capable de ceci. Mais la violence de mes émotions dans ces moments là est semblable. Je pose une main sur la joue de la belle ; si elle savait, elle partirait en courant, morte de peur. Mieux vaut qu'elle reste dans l'ignorance de ces pensées qui me dévorent à chaque instant, lorsque je la sens juste un peu moins mienne. Tendrement, je poursuis de longues secondes son baiser, appuyant légèrement sur sa nuque afin d'approcher un peu plus son visage. Finalement, je resserre mon étreinte, et pendant quelques minutes, je refuse de lâcher ses lèvres, passant de baisers langoureux à des caresses plus passionnées, comme pour me la réapproprier, ayant l'impression inexplicable d'en avoir été éloigné trop longtemps, pris d'une sensation de manque. Mon inquiétude vis à vis de sa santé doit beaucoup jouer. Faute de pouvoir la serrer plus fort dans mes bras, mes doigts se crispent sur le tissus de sa robe. J'arrache mon visage au sien au bout d'un temps ; je me connais, à ce rythme, je vais en réclamer plus, et ce n'est actuellement pas dans les cordes de Joanne -d'ailleurs, ce n'est ni le lieu ni le moment. Depuis qu'elle se sent faible, je n'ose absolument pas entreprendre quoi que ce soit. Je sais qu'elle n'aime pas dire non, alors je le lui épargne, attendant qu'elle se sente mieux. « On devrait rentrer. Tu as besoin de repos. » dis-je tout bas avant de l'embrasser sur le front. « Moi aussi. »