La tete dans l'cul, cul dans le brouillard, t'as la memoire qui flanche et les yeux rouges, l'oeil qui part en vrille, parce que t'as failli t'aplatir comme un blaireau y a des coins dans leurs sourires, qu'as-tu bien pu faire de pire?
Elle savait pas trop pourquoi elle lui avait menti. Mais le fait était qu'il avait avalé l'histoire d'Alice O'Leary avec une facilité déconcertante. Il était trop crédule, ou encore trop bourré pour déceler le mensonge éhonté qu'elle lui avait servi sur un plateau. Ou était-elle tout simplement meilleure actrice qu'elle ne l'aurait pensé? Peu probable, elle avait jamais su mentir de façon convaincante avant aujourd'hui, préférant prôner l'honnêteté, même si elle pouvait se révéler blessante. Alors il y avait peu de chances que du jour au lendemain, elle soit devenue douée dans l'art de l'affabulation. Pourtant, il l'avait trouvée convaincante, exhalant un « Ah bon ? » tout en haussant les sourcils de surprise, après avoir ingurgité une gorgée de café brûlant, quand elle l'avait décrit comme doué pour les devinettes. Au fur et à mesure qu'elle mettait sur pieds sa fausse identité, prenant garde à bien utiliser les idées qu'il avait émis, elle avait vu son sourire s'élargir, illuminant son visage de plus en plus. Et quand elle avait gonflé son égo un peu plus, prenant un air boudeur, parce que c'était inquiétant qu'il soit aussi clairvoyant, il avait eu l'air ravi. Puis il s'était raclé la gorge. « C’était facile. Ce sont tes jambes qui t’ont trahie. Elles sont longues et mince, pourtant musclées. » Une silhouette athlétique qui était due en grande partie à son boulot, physique, et aussi aux nombreuses séances d'entraînements qui rythmaient ses jours de repos. Mais ça, Archie n'avait aucun moyen de le savoir... « C'était bien joué. T'es sacrément observateur. » Parce que même s'il se trompait complètement sur son métier, son analyse physique restait fine. Elle était même un peu flattée qu'il ait remarqué sa musculature élancée, à défaut de la voir juste comme une fille mince. Conforté dans ses propos, le brun s'était redressé, l'air fier. Jusque là, il avait l'air déphasé et vaguement nauséeux. Là, son attitude avait changé du tout au tout, comme si sa gueule de bois avait soudainement disparu, qu'il avait pris la confiance. « Teste-moi encore. Si je devine, tu me prépares un petit dej. » Il se prenait au jeu, apparemment. Elle aussi pourrait bien se laisser convaincre de continuer ce petit manège... Mais lui offrir le petit déjeuner? Elle ne pourrait pas, même si elle le voulait. La jeune femme n'avait presque plus rien dans son frigo, pour être honnête, mis à part des bananes et un pot de glace au chocolat. Pas d'oeufs, pas de bacon, pas l'ombre d'un toast ou d'un paquet de céréales. Quand à faire des pancakes, pas la moindre chance qu'elle puisse trouver de quoi les préparer dans ses placards. Détournant les yeux, elle avait simplement haussé les épaules. « Désolée. Je peux t'offrir une autre tasse de café, mais c'est tout. » Pour peu qu'il ait déjà fini celle qu'il avait entre les mains, ce qui était peut-être bien le cas, au final. Après tout, il l'avait réclamé pendant de longues minutes. « L'idée me plaisait bien. Mais avec l'entraînement, j'ai pas eu le temps de faire des courses. » C'était pas vraiment à cause de l'entraînement, mais ce n'était pas totalement un mensonge, puisqu'elle n'avait effectivement pas trouvé le temps de faire les courses cette semaine, trop fatiguée pour aller pousser un chariot quand elle pouvait passer une commande. Les cartons de pizzas entassés au dessus de son frigo en étaient témoins. Heureusement pour elle et pour sa santé, les repas qu'elle faisait à l'hôpital étaient au moins équilibrés, à défaut d'être vraiment goûtus. C'est le moment qu'avait choisi son bipeur, posé sur le plan de travail de la cuisine, pour émettre un son. Elle l'avait rejoint en deux enjambés, grimacé en remarquant le numéro qui s'y était affiché. On l'attendait à l'hôpital. Plutôt, son odieux collègue l'attendait à l'hôpital. Relevant les yeux vers Archie, elle lui avait lancé un regard désolé. « Je vais devoir te mettre dehors, on m'attend. » Elle était certaine qu'il saurait retrouver son chemin, vers sa voiture, sa maison, ou quoique ce soit d'autre. Elle avait abandonné sa propre tasse dans l'évier, avait commencé à s'affairer pour réunir les affaires dont elle avait besoin. « Tes clés de bagnole sont au bar d'hier soir. Faudra p'tête en profiter pour t'excuser. » Elle se félicitait d'avoir pensé à s'en assurer la veille au soir, pendant qu'un Archie bourré ronflait sur son canapé. Peut-être qu'il serait reconnaissant qu'elle ait mis ses clés en sureté? Va savoir. « Le petit déj, ce sera pour une autre fois. » Une fois prête, la jeune femme s'était postée près de la porte, tout en toisant le brun, toujours debout à côté du canapé. Elle lui avait adressé un sourire malicieux, tout en lui indiquant la porte d'un geste fluide. « Mais bon, comme apparemment je suis pas ton type, je m'attends pas à avoir de tes nouvelles. » Ce qu'elle attendait en revanche, c'est qu'il se décide à bouger, qu'il retrouve sa vie avant qu'elle puise rejoindre la sienne. L'irlandaise continuait de sourire, cet air narquois dessinant toujours les traits de son visage. Elle était curieuse de voir ce qu'il comptait répondre à tout ça. S'il comptait seulement répliquer.
Il est tout fier de lui, Archie, il ronronne comme un lion faisant sa toilette sur son trône de pierre. Il avait raison, et c’est tout ce qui compte. Évidemment que la jeune femme était danseuse, ça se voyant dans sa pose, la finesse de ses membres et sa beauté (oui, un critère essentiel aux yeux d’un macho comme Archie). « C'était bien joué. T'es sacrément observateur. » Rrrrr, rrrr dit le chaton heureux. Et il veut jouer encore, pensant pouvoir prouver ses talents encore plus, mais son hôte lui coupe l’herbe sous les pieds. « Désolée. Je peux t'offrir une autre tasse de café, mais c'est tout. » Il tire une moue à la fois déçue et fatiguée, comme s’il retombait sur terre. Il avait presque oublié qu’il se trouvait dans la maison d’une étrangère, et ses yeux se baladent autour de lui une énième fois alors qu’il prend conscience de son intrusion. Avait-il quelque chose de prévu aujourd’hui ? Il devra jeter un coup d’œil à son agenda. « L'idée me plaisait bien. Mais avec l'entraînement, j'ai pas eu le temps de faire des courses. » Ce à quoi il acquiesce sans rien y connaître : « C’est normal, j’imagine. » Les danseuses doivent bien s’entraîner, non ? Histoire d’apprendre les chorégraphies et tout...
…
M’ouais, ne demandez pas à Archie de parler de ce sport plus en détails. Il fera semblant de s’Y connaître mais les informations qu’il baratinera se limiteront aux clichés qu’il a vus dans les films.
« Je vais devoir te mettre dehors, on m'attend. » Il ne bouge pas de son siège aussitôt, prenant soin de terminer le fond de sa tasse. Cette fois, la saveur plus amère qui s’était accumulée le fait légèrement grimacer. « Tes clés de bagnole sont au bar d'hier soir. Faudra p'tête en profiter pour t'excuser. » Ses lèvres se serrent. Il ne saurait pas quoi dire puisqu’il ne se souvient de rien. Avec un peu de chance, le personnel du bar ne l’accueillera pas avec des torches et des pieux. Nah, en fait, il enverra quelqu’un d’autre les chercher ; vaut mieux contourner le problème plutôt que de l’affronter. « Naturellement. » Il bredouille derrière un sourire faux en se levant, à nouveau happé par un ouragan qu’il contrôle un peu mieux cette fois. Il tape ses poches par réflexe afin de s’assurer qu’il a son téléphone et il ricane en voyant son reflet dans le miroir à la porte d’entrée. Il ne ressemble absolument à rien. Sa chevelure, il l’a déjà vue dans une étable, et c’est ce que bouffent les chevaux. Ses cernes sont plus creux que le noyau de la terre et il a le regard aussi vide que ses couilles après une branlette (désolée). Son habit de travers et sa cravate dénouée ; n’en parlons même pas. « Mais bon, comme apparemment je suis pas ton type, je m'attends pas à avoir de tes nouvelles. » Il détache par dépit son regard de son reflet pour le poser sur la jeune femme qu’il dévisage sans vraiment le vouloir. « En effet. Je n’ai de toute façon pas envie de te demander ton numéro et c’est pas seulement parce que j’ai pas de crayon. » Un peu trop honnête, oui. Mais, la vérité, c’est qu’il aurait approché Cait dans une situation où il se sent en charge, et dans le but de déverser ses pensées négatives le temps d’une soirée. Dans d’autres occasions, il n’approche pas les femmes puisqu’il ne sait pas gérer ses amitiés et, plus important, il n’a pas espoir de tomber en amour. Ça n’est jamais arrivé dans le passé alors ça n’arrivera jamais, il croit. « Je te souhaite une agréable vie. » Il conclut en faisant une sorte de salut américain avant de tituber jusqu’à la soirée en contactant son chauffeur privé afin de rentrer chez lui le plus rapidement possible pour commencer cette journée une deuxième fois.