Encore une nouvelle soirée où j’ai été conviée. Exceptionnellement, on m’a aussi demandé de faire des petites sucreries pour le buffet et je n’ai été que plus encline à me mettre au travail. C’est rare que l’on demande à une invitée de préparer quelque chose mais cela n’est pas surprenant quand on considère que ma page instagram est à moitié remplie de pâtisseries - ma passion, mon cocon, ma zone de confort. Le seul domaine dans mon existence où je me sens douée. Mais cela n’empêche pas ma nervosité de guider mes pas dans le processus. Chaque message avec la personne dont j’étais en contact pour demander telle ou telle chose me donnait le palpitant. Mais c’est une soirée assez huppée, assez importante et je pense que mes talents de pâtissière sont mon ticket d’or pour entrer dans cette soirée prestigieuse. Je sens comme un défi que l’on me donne pour voir si je serai à la hauteur - et malgré mon stress combiné à ma nervosité, je compte bien l’être. Je suis douée et c’est une opportunité folle de pouvoir faire mes preuves.

(outfit + tartelettes myrtilles et violettes) La soirée a commencé depuis quelques heures déjà. Le défilé est fini depuis longtemps mais la fête ne fait que commencer. Tout le monde se tient bien, il y a une musique entrainante mais douce qui est chantée en direct sur la plateforme et des gens comme moi, invités pour promouvoir, passent des espaces de démonstrations un à un. Une gamme de produits spécialement conçue pour allier le sport et la mode, que ce soit des vêtements ou des gadgets. Autant dire que je ne suis guère emballée par le principe. Je ne fais plus d’exercices depuis que j’ai arrêté mon travail au club l’an dernier et je ne pense pas en avoir besoin vu ma taille fluette. Alors le sport me passe au-dessus de la tête mais je fais un effort car je me trouve dans un monde professionnel malgré tout. Même si cela ne m’empêche pas de taper dans les coupes de champagne et autres cocktails alcoolisés proposés - autant en profiter tant que c’est gratuit.

Mes yeux parcourent distraitement la salle pour la énième fois de la soirée, jusqu’à tomber sur lui de nouveau. Deklan Lewis. Je l’ai repéré depuis le début de la soirée ; c’est une tête reconnue dans le milieu. Naturellement que je le suis, clairement plus pour sa plastique et ses beaux yeux que pour son contenu - encore une fois, le sport, meh. Mais c’est un beau garçon, je ne peux pas le nier, et c’est sûrement pour cette raison que je reste plantée au loin à seulement le regarder sans oser l’aborder. Je ne saurai même pas quoi dire, je suis en bas de l’échelle alimentaire des influenceurs, je ne représente absolument rien. Parfois rencontrer ses idoles n’est pas toujours la meilleure des idées - non pas que Deklan est un idole mais il reste avec plus d’étoiles sur son front que moi. Je me sens insignifiante et il aura fallu attendre la quatrième coupe de champagne pour que je commence sérieusement à réfléchir à ce que je peux dire pour l’aborder. De préférence seul car avoir le regard d’inconnus en plus sur moi, ça va me pétrifier sur place. Je suis vraiment ridicule à ne pas pouvoir me foutre un coup de pied au cul.

@Deklan Lewis

Je reste coincée à distance et je n’ai jamais autant prié que l’alcool me donne le même petit coup de pouce que les cachetons pouvaient me donner à l’époque. Cependant, je refuse d’y retoucher de nouveau, mais je compense peut-être un peu trop avec ces verres d’éthanol qui font brûler mon gosier qui s’habitue cruellement de plus en plus à leur doux parfum âpre. Je ne le surveille pas, je ne suis pas non plus en train de le dévisager mais j’ai le regard souvent attiré, et clairement impressionné comme je peux l’être devant la plupart des gens qui réussissent dans ce milieu. Ils sont les visages même du succès que j’ambitione. Cela semble si simple pour eux, si naturel de les voir sourire et évoluer au milieu de ces gens qui les accaparent sans cesse. Personne n’a l’air de se plaindre d’être utilisé, de recevoir des petits fours sucrés/salés hors prix pour acheter leurs venues. En tout cas, je ne m’en plains pas. Même si j’ai souvent l’estomac trop noué pour avaler quoique ce soit.

Je me dirige de nouveau vers le buffet, non pas pour tendre la main vers la nourriture mais vers une nouvelle coupe. Je devrais faire attention, je le sais, mais c’est bien plus simple comme ça. Le liquide passe toujours mieux. Mes prunelles penchées se redressant pour le voir en ligne de mire complet. J’ai les mains toutes moites et je suis profondément ridicule. Mais ce n’est rien comparé à la panique latente qui augmente quand je le vois s’approcher. Il vient vers quelqu’un à côté de moi, peut-être ? « Je mange si salement que ça pour que vous me fixiez de la sorte ? » J’écarquille les yeux en regardant autour de moi (parce que je suis stupide) avant de me rendre compte que c’est bien à moi que Deklan Lewis semble s’adresser, le rire accompagnant ce joli sourire qui en fait pâmer plus d’un(e) - et oui, je peux me mettre dans le lot, même si je n’oserai jamais le dire à voix haute. « C’est délicieux, j’ai rarement l’habitude de m’offrir ce genre de plaisir mais ce soir, tout est permis non ? » D’autant que visiblement, c’est une de mes créations qu’il vient de manger et voilà que je sens la chaleur sur mes joues arriver. “Oh, non, je- Désolée, je ne voulais pas paraître impolie.” Je suis complètement mortifiée, mes phalanges se resserrant sur ma coupe alors que j’ai le sourire sincèrement désolé mais nerveux. “Je… Je suis ravie que vous vous laissiez tenter. Il se trouve que, ahem, j’ai fait ce que vous venez de manger.” C’est tellement gênant et je ne veux pas passer pour quelqu’un qui se vante - même si mon talent pour la pâtisserie est ma plus grande fierté. J’ai les prunelles bleutées qui s’agitent à regarder un peu partout dans un signe de nervosité apparent avant que je me force à me ressaissir. Deklan Lewis me parle, je ne devrais pas me montrer aussi sotte. “Je suis contente que vous appréciez.” Je finis par dire un peu plus calmement. Puis je plisse mes yeux légèrement en mordant ma lèvre. “Par contre, vous en avez un peu…” je mime le propre coin de mes lippes pour lui informer où les miettes résident. Il a l’air si à l’aise, lui, j’aimerai pouvoir atteindre ce niveau de confiance un jour. Mais je ne suis pas un joli coeur au corps de dingue non plus, malheureusement.

Oh le monde impitoyable des strass et paillettes ; et pourtant, c’est féérique aux yeux de l’ingénue Anderson qui ne l’est pas tant que ça dans le fond. Mais elle donne cet effet, elle qui est prostrée dans son coin, qui hésite, qui crie une petite victoire interne quand elle réussit à décrocher plus de trois phrases à une tête impressionnante ou toute personne lambda. Jamais Primrose ne met autant de coeur à la sociabilisation qu’à ce genre d’évènements. C’est le meilleur endroit pour créer des liens, des contacts et de futurs potentiels partenariats ; les places sont chères et rares, elle le sait, tout le monde le sait, et son air minaude pour paraître plus stupide qu’elle ne l’est vraiment est totalement fait pour séduire n’importe quel sponsor.

Cependant, quand il s’agit d’aller titiller la crème de la crème, quand ce n’est pas une Lena Edwards qu’elle accueille avec une langue piquante, c’est un Deklan Lewis plus brillant que jamais et encore plus séduisant en vrai qu’en photo. Comme quoi, tout n’est pas que mensonge sur les écrans, il y a des surprises inverses qui peuvent se produire - oh que les abonnés de la jolie fleur ne seraient pas déçus de connaître l’envers du décor de leur fashionista pâtissière préférée. « Vraiment ? » elle serre les dents, ses phalanges retiennent un peu mieux sa coupe et elle hoche la tête à la positive. “Oui, vraiment. Elles sont à la myrtille et à la violette. Et sachant que la soirée était sous le signe du bien-être et de la santé physique, j’ai fait une version qui ne…” qui ne viendra pas ternir ce beau corps saillant sous ce costume. “...laissera aucune trace.” se rendant compte de ses yeux qui traînent un peu trop vers la silhouette du jeune homme, elle relève les yeux vers son visage et ses lippes dans un doux petit sourire timide.

« Pas très sexy et racoleur pour les sponsors qui pourraient être dans le coin. » elle sera bien forcée d’admettre que si c’est pas très ‘racoleur’ ou ‘sexy’ pour les sponsors, Primrose trouve qu’au contraire, dans certaines situations, ça peut être carrément être les mots à utiliser. Mais elle ne dit rien car même si elle a la douceur de l’éthanol dans les veines, elle n’en a pas encore assez bu pour être sans filtre - et elle se contiendra car elle a un minimum de professionnalisme. « Si c’est vraiment vous qui avez fait ces délices, vous devriez sourire et bomber le torse. Être fière, et allez en servir à tous ces gens-là… Ils sont là pour ça mais si vous n’allez pas à eux, ils ne viendront pas à vous, ces goujats. » voilà de prodigieux conseils alors qu’elle suit le mouvement de son interlocuteur en jetant un coup d’oeil à ladite salle. « Et ils passeraient sérieusement à côté de quelque chose. » elle passe légèrement ses lèvres avant de faire un sourire de coin tout en reprenant sa vision sur le jeune homme. “En utilisant un terme tel que ‘goujat’, ça donne encore moins envie de les approcher.” elle essaie seulement de faire de l’humour mais ce n’est pas vraiment de son ressort ni son domaine de prédilection ; elle n’inspire pas la joie de vivre, Primrose. “Vous n’avez pas peur qu’ils vous entendent ?” car elle, ça la terrifie. Un mot mal placé et ça peut être la fin de tout. Elle reprend une profonde inspiration interne tout en finissant sa coupe qu’elle repose sur le bord du buffet. “Ce sont de bons conseils mais je… Je ne suis pas très à l’aise avec les goujats.” ni même avec l’Humanité entière mais ça, ça ferait mauvaise figure dans un tel lieu. Un souci d’intérêts interne qu’elle apprend à gérer du mieux qu’elle peut depuis qu’on commence de plus en plus à la voir et à la remarquer depuis un an.

« Mmmh je vois. Cela peut peut-être intéresser mes abonnés… Tu as une chaîne ou un compte Insta que je peux taguer ? » savoir que Deklan Lewis a apprécié ce qu’il a mangé et qu’il lui demande à présent son contact pour la taguer, c’est la douce promesse euphorisante et incroyable d’une petite promotion sans prétention de ce qu’elle aime le plus faire au monde. Primrose sourit un peu plus, ses yeux bleus brillants d’un éclat nouveau alors que ses poumons reprennent une inspiration émue - oui, elle est en bas de l’échelle mais elle a l’air de côtoyer la cour royale, à présent. “Oui, oui, bien sûr, je…” là, elle se met à rougir en fuyant son regard et en passant sa main libre contre sa nuque, le teint se voilant d’un rose léger de la gêne qui la cisaille soudainement. “Je te suis depuis longtemps sur instagram. Je peux t’envoyer un DM, ça sera plus simple.” avec l’expression criant clairement “si tu veux bien” mais vu que c’est lui qui a proposé en premier lieu, ça ne serait pas déconnant de le suggérer, non ? Elle sort donc son téléphone après avoir posé son verre sur le rebord du buffet pour aller sur l’application et retrouver le compte de Deklan. « Tu les as faites spécialement pour cette soirée, sinon tu fais des pâtisseries plutôt classiques ? » là, c’est un sourire sincère et un menton plutôt fier qui se redresse face au jeune homme en face d’elle. “Je fais de tout mais j’aime toujours rendre les créations jolies. Donc même le gâteau le plus simple comme celui au yaourt, je trouve toujours un moyen pour le rendre plus beau… Et bon.” qu’elle se permet de rajouter dans un petit rire sur la retenue malgré tout car elle reste incroyablement épatée, l’Anderson. Le nez de nouveau sur son téléphone, voilà qu’elle envoie le message. “Voilà, tu dois avoir reçu quelque chose normalement.” et le “quelque chose” étant un simple “coucou” suivant du smiley qui rougit. Primrose aux joues toujours aussi rosées reprenant son verre pour boire quelques gorgées.

« A vrai dire, je m’en fiche. Ils ont autant besoin de moi que j’ai besoin d’eux. J’ai déjà entendu des choses sur moi que j’aurais préféré ignorer, mais bon… C’est le jeu ! » elle se mord la lèvre parce que ça, c’est ce qu’elle redoute le plus dans ce milieu. Les trolls, ceux qui se cachent derrière leurs écrans pour mordre, pour attaquer, pour critiquer gratuitement. Elle a déjà reçu des messages concernant sa taille trop fine pour être réelle, que sa silhouette n’est pas agréable et qu’il faudrait qu’elle mange plus de burgers. Quelque chose qu’elle n’a pas encore appris à gérer. « Je me suis pas présenté d’ailleurs, je m’appelle Deklan. » la jolie brune a un léger rire. “Je sais.” alors qu’elle replonge les lippes dans la liqueur qu’elle va finir dans pas longtemps à ce rythme au lieu de se présenter à son tour - quelle idiote avec des yeux en étoile, vraiment. « Cela fait pas longtemps que vous êtes du milieu pas vrai ? » Primrose a un léger sourire un peu nerveux. "Ça se voit tant que ça ? Ça commence à prendre un vrai tournant depuis un an réellement. D’où le fait que je ne sois pas encore très à l’aise ni rodée sur tout ça.” qu’elle dit en montrant d’un signe de la main la salle entière. “Ni sur les commentaires négatifs d’ailleurs… Comment tu fais pour passer outre ?” qu’elle demande d’une voix un peu plus incertaine. Quitte à parler à Deklan, autant prendre un peu de son expérience et de ses techniques. Elles ont l’air de fonctionner, après tout.

« Je vois, tu m'as l'air passionné et c'est le plus important. » je le suis, il n’y a aucun doute à avoir. Je suis fière de cette passion qui m’enchante et me fait oublier le monde le temps d’un gâteau, d’une création sur laquelle j’aurai travaillé. On ne vient pas à de tels résultats sans rien faire, en suivant une simple recette. Il faut du temps, de la créativité, de la patience, de l’envie. Mon sourire s’accroche à mon visage, il est sincère et je suis heureuse que ça se voit. Que ça se ressente. Je mets tout mon coeur dans ces pâtisseries. C’est bien une de mes seules passions saines - elle peut seulement attiser la gourmandise et les dents sucrées, provoquée des kilos superflus à ceux qui ne feraient pas attention mais sans pour autant que cela ne me dérange ; mes jambes, ma corpulence sont aussi fines que des baguettes et pourtant, j’assure que j’ai un bon coup de fourchette - sauf quand je suis nerveuse comme là, où mon ventre est trop noué pour avaler quoi que ce soit. A part le champagne, apparemment. « Trouvé ! » je souris devant son air de victoire qui est adorable. « Je posterai un truc dans la soirée et je te taguerai ! » je suis complètement épatée et soufflée par son enthousiasme. “Merci, je… C’est énorme, merci beaucoup!” je ne peux pas retenir l’air guilleret qui me prend soudainement, mais il faut bien au moins ça pour le remercier comme il faut. Même si je ne saurai montrer ma gratitude par des mots qui le méritent car je suis sur la réserve et qu’après tout, il n’a encore rien fait ; mais rien que la perspective de penser à moi dans quelques heures quand il fera son post me fait rougir de plaisir et d’honneur. C’est un coup de boost incroyable qu’il m’offre là - et voilà que je me rappelle pourquoi ces soirées sont importantes et très utiles pour le contact.

« Et tu es ? » il me tend la main et j’ai une légère moue surprise. “Oh. C’est vrai. Primrose.” que je glisse, aussi bien de mes mots que de mes doigts dans sa main. Je sui en train de me présenter à Deklan Lewis et c’est grisant à souhait. Tellement que j’ai oublié de le faire en premier lieu. Je suis carrément dans mes petits souliers, vertigineux à plafonner à quinze centimètres de haut. Puis je l’interroge sur les haters, ces gens qui peuvent faire vivre un véritable enfer sur internet. Je ne suis pas assez populaire ni connue pour en avoir tant que ça mais le peu que j’en ai eu, ceux critiquant notamment ma silhouette, j’ai eu du mal à les accepter et à passer outre. « Je les ignore. » ou les ignorer. « Le truc c’est que… Faut que tu saches ce que tu vaux. Quand tu auras réalisé à quel point t’es unique, tu t’en foutras de l’avis des autres. » cela semble logique. Mais l’exercice est toujours facile à dire qu’à faire. C’est facile pour lui ; il est beau, il a déjà l’expérience derrière lui, il peut compter sur son joli minois pour attirer abonnés et sponsors. Mais moi, je suis une femme donc le discours n’est pas le même. C’est moins évident, nous sommes évidemment moins bien traitées. « Ça peut paraître mégalo, mais dans ce monde, faut être sûr de soi et surtout, oh oui surtout… Reste toi-même, ne te donne pas des airs de je ne sais quoi juste pour plaire. On te cramera vite. » je fronce mon nez. Je ne veux pas croire que tout est sincère et solide. J’ai vu des dessous peu glorieux. J’ai vu Lena, par exemple. J’ai vu moi, aussi. Je sais que je ne suis pas entière sur mon réseau. Mais les gens ne regarderaient pas s’ils savaient la vérité. Je ne suis pas de ceux qui ont comme cadeau des objets de luxe. Pas encore. Je l’ambitionne, en tout cas. “C’est bien plus compliqué tout ça.” que je dis en riant brièvement, ma main dans les cheveux. “Les conseils paraissent si faciles… Mais tu as de l’expérience. Je n’en ai pas encore.” la théorie est toujours simple que la pratique. Je me laisse abattre trop facilement. Je peux pleurer des heures pour un commentaire mal placé. J’ai parfois mes commentaires négatifs moi aussi ; mais je les garde dans ma tête. Je regarde le buffet puis la salle. “Est-ce que la soirée est à ton goût ?” je demande car curieuse ; j’attends à avoir des histoires sur son vécu. C’est totalement grisant.

« Enchantée Primrose, c'est un joli prénom. » c’est bien une des seules fiertés réelles que tu as. “Merci.” que tu émets avec un petit sourire tout timide. Les joues rougissent légèrement de nouveau, le regard se fait fuyant, tu es vraiment touchée par son compliment - il ne t’en faut pas beaucoup, c’est certain. Mais il s’agit de Deklan Lewis, ce n’est pas rien et tu ne prends pas cette rencontre avec toute la légèreté et l’entrain qu’il faudrait. Tu devrais vraiment apprendre à te détendre - et non, je ne dis pas ça pour que tu zieutes de nouveau les verres qui s’étalent sur le buffet un peu plus loin. Il te faut être sous ton meilleur jour dans des moments pareils, encore plus dans celui-ci. Au moins, ton sourire est loin d’être faussé, à cet instant précis ; Deklan réussit à te mettre à l’aise et le compliment prend rapidement des proportions énormes dans ta petite cabosse. Il ne faudrait pas s’enflammer pour si peu, Anderson.

« J’étais aussi super bien entouré quand j’ai commencé. Puis j’ai fait d’abord mon p’tit bonhomme de chemin dans le sport et la pub avant que les réseaux deviennent réellement un de mes business. » tu grattes distraitement ton poignet avant de reporter tes prunelles céruléennes sur le jeune homme. Un exemple même d’un esprit sain dans un corps sain. Tu n’as pas les luxes qu’il a eu. Même si tu as ta passion de la pâtisserie, tu n’as pas vraiment parcouru de chemin dans cette direction, de façon assez volontaire et sûrement stupide, il faut bien l’avouer. Avec plus de volonté, tu aurais pu te bâtir une carrière dans ce domaine là ; mais ce n’était pas assez rapide et ça te demandait trop d’efforts. Tu n’es pas ambitieuse, tu as juste les yeux plus gros que le ventre. « Banal. C’est cool, mais je serai aussi bien dans mon lit. » tu mords l’intérieur de ta joue. Toi, tu es toujours excitée comme une puce même si ça ne se voit pas vraiment ; mais Deklan doit en être tellement habitué qu’il en paraît complètement blasé. Tu aspires à ça, toi aussi, un jour, car ça signifiera que tu auras atteint ton objectif le plus ultime. Mais tu en es encore loin et tu as l’impression que des montagnes se dressent devant toi. « Enfin c’est le genre de soirées où je n’aime pas forcément m’attarder non plus, mais bon ça fait partie du boulot. » du boulot, un jour, ça aussi ça sortira de tes lèvres. « Et toi ? Tu t’amuses ? » tu souris légèrement, un peu maladroitement sûrement. “Je m’amusais plus derrière mes fourneaux.” pour une grande nerveuse comme toi, quelle idée de t’être mis en tête de vouloir naviguer dans cet univers. Cela te semblait le choix le plus simple et rapide pour atteindre tes objectifs mais plus ça va, plus tu doutes - jusqu’à ce que tu vois les jolies moulures de la pièce, les tenues des uns et des autres, les verres au pied brillant et les petits fours gourmets sur le buffet, suffisant à te rappeler où tu es. “Mais c’est toujours un bon moyen de prendre mes marques. Je commence à être invitée dans des soirées comme ça que depuis quelques mois donc je… Je ne connais pas encore tous les codes d’usage.” tu passes ta langue sur tes lèvres. “Ce n’est pas vraiment le genre d’endroits où on s’amuse véritablement, de toute façon.” en tout cas, pas pour toi ; c’est une grosse pression sur tes épaules car c’est plutôt là où il faut se faire des contacts et augmenter son réseau. Tu fais un pas immense en parlant à Deklan. S’il te tag quelque part, tu auras déjà gagné ta soirée. “Est-ce que Deklan Lewis songe à arrêter tout ceci un jour ?” que tu demandes, avec un petit air malicieux et curieux à la fois, un léger sourire au coin des lèvres. Après tout, s’il semble aussi blasé, la question n’est pas si insensé, n’est ce pas ?

« Tu n’es pas à l’aise en société ? » le ton est plutôt doux mais vu son rire précédent cette remarque, il ne fait nul doute que Deklan souligne ici un point contradictoire de Primrose dont cette dernière a parfaitement conscience. En conséquence, elle en rougit, le regard fuyant vers le sol car la réponse étant positive, cela viendrait à se demander ce qu’elle fout dans un tel monde alors. L’appel des strass et des paillettes est plus intense que sa peur de parler et il se trouve qu’elle trouve son aide dans l’éthanol qui est toujours proposé quelque part dans n’importe quelle soirée ou après midi organisée. “Pas vraiment.” elle mord sa lippe en trouvant un intérêt certain à la table la plus proche d’eux avant de prendre une légère inspiration - du courage, du courage, elle en cumule, elle en a. “Je sais que ça prête à sourire quand on veut évoluer dans un milieu comme celui-ci.” mais la réalité est qu’un jour, elle n’aura plus besoin de parler, elle paiera des gens pour le faire à sa place - autant dire qu’elle voit très (trop ?) loin et qu’elle idéalise absolument tout. Il n’y a qu’un moyen de le savoir ; c’est d’y parvenir. Primrose a de l’ambition, et c’est malheureusement un pur produit de sa génération ancrée dans le fantasme de l’argent facile et parfois stupide.

« J’sais pas. Pour l’instant, j’aime bien. Tu sais moi, j’aime bien parler, découvrir des gens, des activités, et ce monde-là a peut-être des défauts et des inconvénients, mais c’est clair que ça me permet de rencontrer un tas de gens, et moi j’adore ça ! » elle a un léger sourire en remontant son attention sur lui. "Ça se voit.” qu’elle affirme presque à voix basse, discrète comme jamais, de sa voix fluette. Un petit commentaire de rien du tout mais plutôt spontanée car il est vrai que ça se voit et ça se remarque que Deklan est comme dans un poisson dans l’eau. Il a le charme pour séduire en un sourire et l’influence nécessaire pour qu’on lui donne le bon dieu sans aucun problème. « Si je peux te donner un conseil, c’est justement de t’amuser dans ce genre d’event, Sinon, à la longue, ça va devenir pénible si t’y prends pas de plaisir. » elle tapote ses ongles parfaitement manucurés contre son verre en hochant lentement la tête. “Je crois que c’est un des conseils les plus évidents mais essentiels que j’ai pu avoir entendu.” il faut dire que, jusqu’à présent, Primrose n’a pas eu beaucoup d’intérêts de la part de personnes comme Deklan, aussi haut placé dans l’échelle sociale du milieu. “Est-ce que… Est-ce que tu es attendu quelque part là ou on peut s’asseoir ? J’aimerai bien entendre des anecdotes de ce que t’as pu vivre dans ce milieu.” histoire de mieux encore comprendre dans quoi elle s’embarque. Et puis, pourquoi ne pas profiter d’un “vétéran” pour s’enrichir un peu plus ?

« Pas vraiment. Si j’avais pu être surfeur sans avoir à devoir gérer mon image, je l’aurais fait aussi. » Pourtant, tous les surfeurs ne sont pas influenceurs, si ? Ce n’est pas un domaine que je maitrise - le côté sportif. Je suis clairement plus dans le milieu de la mode et des beaux vêtements. Mais toute expérience est bonne à prendre, surtout de la part de quelqu’un qui est dans ce monde depuis bien plus longtemps que moi. Cela n’a pas l’air d’être une contrainte pour lui, cependant, car Deklan a l’air d’être comme un poisson dans l’eau. Ou alors il est lui aussi très doué pour maintenir les apparences. « Mais comme tu dis, ce milieu a certaines exigences qu’il faut combler malgré tout. » J’hoche la tête, ravie de voir que j’ai capté le point d’honneur et central de ce genre d’endroits. Je ne suis pas visionnaire, je ne vois souvent pas plus loin que le bout de mon nez mais j’ai rapidement su m’adapter aux normes des réseaux sociaux. Je suis tellement douée que ça finit par empiéter sur la réalité et que je finis par croire mes propres mensonges avant de constater une fois le rideau baissé que non, je suis loin de pouvoir encore vivre de ce que ce milieu peut m’apporter. Je dois me saigner encore plus pour cumuler l’argent et continuer à maintenir ce style de vie que je souhaite offrir à mes abonnés et au monde entier. C’est épuisant et mon mental retombe un peu plus à chaque fois - et pourtant, cette obsession ne me quitte pas, elle m’étouffe et m’envahit, une habitude dont je ne peux me séparer.

« Ouais désolé, j’suis pas très original. » J’hausse une épaule. “Mais c’est efficace.” Enfin, en théorie en tout cas. Il faut profiter de l’instant et en prendre tout l’usufruit d’une telle expérience. Cela ne pourra qu’être plus bénéfique pour moi plus tard. Si ça peut me dégourdir dans les relations sociales, je pourrai aussi épater mes collègues et mon patron. Là, mes nerfs sont un peu moins tendus car j’ai les mains rapides sur les verres. « Laisse-moi prendre un verre. » J’en profite pour m’en chercher un moi aussi, restant sur le fidèle champagne et ses jolies bulles dorées. Ce n’est pas le genre de boissons que je bois tous les jours. « Que veux-tu savoir exactement ? » Nous nous éloignons du centre de la pièce pour aller dans un endroit plus calme. Mes fesses trouvent la place d’une banquette qui fait face à l’entièreté de la salle et c’est là que mes prunelles naviguent en cherchant ce que j’aimerai savoir exactement. « Je suis pas sûr que je sois le plus intéressant à écouter ! » Je souris légèrement avant de mordiller ma lèvre. “Je suis sûre du contraire.” J’affirme avec une légère rougeur aux joues avant de lever ma coupe à mes lèvres et mon regard vers lui. “Est-ce que tu as déjà eu un moment embarrassant ? Une erreur, une bourde, un accident malheureux… Dans ce genre d’évènements.” Voilà qui me permettrait de voir que ces gens qui multiplient l’intérêt et les likes d’autrui restent des humains qui font des erreurs. Parce qu’à force de les idéaliser, ils sont des modèles de perfection impossible à atteindre. Et pour l’instant, la tranquillité et le flegme de Deklan me semblent impossibles à atteindre.