the smile that haunts my days and nights

Encore un mois à tenir. C'est ce que se dit Channing en marchant silencieusement, escorté par un garde, jusqu'à la sortie de la prison. Comme il en a pris l'habitude depuis quelques mois, l'héritier vient rendre visite à son meilleur ami aussi souvent qu'il le peut. Leurs échanges au parloir ne s'éternisent pas forcément mais les deux amis accordent une importance particulière à ces petits moments. Ceux durant lesquels l'héritier essaie de faire esquisser l'ombre d'un sourire sincère sur les traits pâles du Leckie, sur le visage de celui qu'il connaît mieux qu'il ne se connaît lui même. Caelan et lui sont inséparables depuis la fac, depuis que leurs chemins se sont croisés. Jamais la moindre querelle n'est venue se mettre en travers de leur amitié, ils ne sont jamais restés trop longtemps sans nouvelles l'un de l'autre et ce ne sont certainement pas des barreaux qui leur feront couper les ponts. C'est le coeur lourd que Channing franchit les portes de l'enceinte pénitentiaire pour lui rendre visite, et c'est le coeur tout aussi lourd qu'il les emprunte en sens inverse. Cae peut prétendre aller bien, il sait pertinemment qu'il n'en est rien. Ils le savent tous les deux. Mais c'est la première fois, et ce alors que la lumière pointe son nez au bout du tunnel, qu'il découvre des ecchymoses sur les traits de son visage. Des cernes plus noires, des marques violacées, et une ouverte dont la cicatrisation a déjà commencée. Naïvement, il avait pensé qu'il y échapperait. Mais que savait Channing de ce qui se passait réellement entre ces murs ? Rien, absolument rien. Parce que ce qu'on voit dans des films ou des séries n'est rien de plus que de la fiction, que les reportages filtrent soigneusement leurs images et que finalement, aucune lumière n'est levée sur les agissements des détenus entre eux. et si jusque son visage était abîmé, il frissonnait désagréablement à la simple pensée d'imaginer le reste de son corps. Caelan devait sortir, il était temps qu'il sorte.

Channing n'est pas au mieux de sa forme dernièrement, et voir Caelan ainsi a brisé un petit quelque chose en lui. Il va mal, son meilleur ami va mal et il ne peut rien faire pour l'aider à l'exception de lui parler une poignée de minutes avec un gorille qui écoute leur échange quelques mètres derrière eux. Il va mal, s'est visiblement fait passé à tabac et Channing ne peut pas même lui donner un anti-douleurs. Il a conscience que son incarcération était inévitable afin qu'il puisse passer à autre chose et définitivement tirer un trait sur cette histoire, mais merde. Merde, il voudrait faire davantage pour l'aider, il aimerait faire n'importe quoi pour le tirer de là. Il veut qu'il sorte.

Le Walker est finalement raccompagné jusqu'à la sortie, les gardes commençant à s'habituer à la récurrence de ses visites. Il faut dire que le grand brun ne passe pas inaperçu avec son look soigné, passant voir son ami en majeur partie du temps après une journée de travail. Ici, les codes vestimentaires se comptent sur les doigts d'une main : le personnel a un uniforme, les détenus en ont un autre et les visiteurs sont souvent des civils plus ou moins ordinaires. Rares sont ceux qui viennent rendre des visites et qui portent des costumes, à l'exception des avocats. et parlant d'avocats, il en reconnaît une alors que le garde qui l'accompagnait lui demande de patienter, ce à quoi il acquiesce. Gabrielle se tient là-bas, visiblement en tenue de travail, et il se pince chastement les lèvres sans oser attarder son regard sur elle. Ils ne se sont pas revus depuis le nouvel an, n'ont pas même échangé quelques textes et il ne pensait en réalité pas la revoir avant un moment. Mais de elle ou de lui, il est celui dans la présence dans une prison est inhabituelle. Enfin, en temps normal. Le garde revient vers lui et Channing signe le registre attestant de la fin de sa visite, avant de prendre congé d'un signe de tête et de s'avancer vers l'avocate. Elle l'a probablement vu aussi, et après les évènements récents l'héritier se voit mal prétendre le contraire. Ils peuvent après tout, même après cet ultime aurevoir, s'adresser la parole n'est-ce pas ? Il s'approche par conséquent pour la saluer, lui offrant un sourire poli. « Bonjour Gabrielle. » La nuit qu'ils ont partagé le hante encore, il mentirait en prétendant le contraire, pourtant une certaine distance est d'ores et déjà réinstaurée entre eux alors qu'il s'arrête à une distance courtoise. Elle ne semble pas occupée à l'instantané, et il se permet une question. « Tu viens le voir ou tu es ici pour le travail ? » Pas besoin de prononcer son nom, mais Channing l'interroge d'une manière qu'il veut aussi détachée que possible. Caelan ne lui en a pas parlé, mais elle peut après tout venir le voir également. Ils vont échanger quelques mots et Channing a pour intention de partir pour de bon par la suite, pourquoi pas pour prendre à emporter sur la route, rentrer à Bayside, manger et se changer avant de revenir sur Spring Hill. Sa sportive récemment passée entre les mains habiles de Hunter, son ami et mécanicien privé, l'héritier compte bien en profiter pour se changer les idées. et qui sait, peut-être qu'il allait rejoindre Caelan un beau matin à force de continuer ses stupidités.

rainmaker

the smile that haunts my days and nights

Une seule et dernière nuit. Les termes étaient simples, plus encore que ceux qu'ils se sont imposés à Los Angeles. Une nuit, une seule, pour se dire adieu. Pour clore cette histoire laissée en suspens en Californie, celle à la fin abrupte et amère que Channing n'arrive pas à oublier. Pourtant il a essayé, à plusieurs reprises, depuis des années. Il a trouvé de la chaleur dans le lit d'autres, s'est donné quelques chances, s'est persuadé d'aller. et à la fin, il pensait y être parvenu. Il pensait avoir tourné la page, il pensait être passé à autre chose, et ce jusqu'à croiser son regard un peu trop longtemps. Il lui avait fallu un regard, un seul, pour que tous ses efforts de ces dernières années s'effondrent et jamais le brun ne s'était détesté autant. Tout avait été si simple à l'époque, tous leurs moments tellement faciles et plaisants. Pourquoi fallait-il que leurs adieux soient si durs, pourquoi fallait-il qu'ils ternissent l'image si précieuse de leurs souvenirs ? Gabrielle a été et sera toujours sa plus belle histoire. Pas que les autres n'aient pas compté, mais celle aux côtés de l'avocate avait été la plus réelle. Elle avait été celle ayant eu le pouvoir d'aller le plus loin, Gabrielle celle avec qui il s'était imaginé sur le long terme. et lui qui se persuade d'avoir raison, de sentir toutes ces choses et d'avoir un instinct en ce qui concerne autrui... instinct my ass.

Ses pas sont lourds alors qu'il suit le garde qui l'escorte jusqu'à la sortie, et en y pensant Channing était loin de s'imaginer en être ici à presque trente six ans. La quarantaine le guette et lorsqu'il se regarde dans le miroir, l'écho du gamin perdu qui s'est mis à faire des courses à vingt ans se reflète encore dans ses yeux. Il se souvient encore de ses premiers départs sur des parkings déserts, des soirs où lui et Caelan se perchaient au Kangaroo Point et regardaient Brisbane s'étendre devant eux en trinquant avec leurs bières bas de gamme. et, aussi éprouvante que cette phase de sa vie avait été, il la regrette presque à celle qu'il vit actuellement. Avec du recul, tout parait toujours tellement plus simple. Comme ce soir sur les hauteurs de la ville des anges où il aurait dû proposer à Gabrielle de s'asseoir sur le siège passager de sa sportive pour rentrer avec lui. Peut-être aurait elle refusé, ou peut-être pas. Peut-être aurait elle négocié avec lui pour échanger sa place avec la sienne une fois dans l'avion, lui faisant les yeux doux pour s'asseoir du côté du hublot. Peut-être. Mais il n'en saurait jamais rien, et devait à présent se contenter du regard fuyant de la brune alors qu'il s'approche d'elle une fois celui qu'il juge être son collègue s'éloigne. Il s'approche mais ne sait pas vraiment pourquoi il s'en donne la peine quand un signe de tête aurait probablement suffit. Ni elle ni lui n'avait envoyé le moindre texte à l'autre, respectant ce dernier aurevoir échangé sur le pont du yacht, et l'héritier devrait s'en contenter. Il devrait se satisfaire de ce bon souvenir et ne pas le mettre en danger, et pourtant. « Bonjour, Channing » Ils échangent un sourire poli, le grand brun s'arrêtant à une distance courtoise avant de l'interroger par principe sur sa présence ici, surtout pour confirmer son impression. « Pour le travail, je devais rencontrer un client… » Cela ne lui a pas sauté aux yeux au premier abord, mais elle est tendue. Sa voix contrôlée, sa mâchoire sensiblement serrée, ses épaules droites et il se pince chastement les lèvres. Non, il n'aurait pas dû l'aborder, elle est visiblement dans un mauvais jour et il risque de se heurter à tout moment à un mur. À moins que sa présence suffise à la mettre dans cet état ? Formidable. « Je voulais lui rendre visite  mais on me l’a déconseillé. Et puis, l’agent m’a dit qu’il y avait déjà quelqu’un » On lui a déconseillé ? Il fronce légèrement les sourcils, acquiesçant sans oser s'attarder sur le sujet. Il n'a pas envie de l'écouter se décharger sur lui, pas alors que lui aussi vient de passer des dernières minutes loin d'être plaisantes. Oh, il encaisserait sans un mot si elle venait à vider son sac, mais autant les épargner. « Je vois. » Il pourrait poursuivre, dire être désolé alors qu'elle avait visiblement espéré rendre visite au Leckie, mais il ne l'est pas. Pas après avoir vu Caelan dans cet état. Autant épargner à Gabrielle l'image meurtrie de celui dont ils sont tous les deux proches, même s'il se doute qu'elle a dû voir pire ou au moins l'équivalent dans sa carrière. La donne est toujours différente lorsqu'on tient à la personne dont il est question.

« Comment il va ? » La question tombe et Channing est celui qui fuit le regard, se portant distraitement sur les gardes un peu plus loin en soupirant mollement. « Tu veux la vérité ? » lui demande t'il avant de se reporter sur elle, et cette fois ses yeux noisettes s'attristent. « Je l'ai jamais vu aussi mal. » Bien sûr qu'il avait déjà vu Caelan dans de mauvais jours. Ils avaient au moins une fois échappé des larmes l'un dans les bras de l'autre, avaient déjà passé des après-midis à ruminer ensemble dans un canapé et trouvé bien d'autres façons de broyer du noir. Mais la vue de son meilleur ami, le regard vide et le sourire éteint, les cernes profondes et les tempes violacées, était plus difficile à soutenir encore. Il prétendait aller bien, et c'est ce qui l'inquiétait le plus. À quel point allait-il mal, vraiment ? « Il s'est... » il marque une pause, chasse le regard en secouant légèrement la tête. Les mots rendent la situation encore plus réelle qu'elle ne l'est déjà. « Il s'est fait passé à tabac et continue de me sourire niaisement en prétendant aller. Je déteste cet endroit. » et il déteste plus encore ceux qui ont osé abattre leur colère sur lui. Channing aurait bien besoin de se défouler lui aussi, tiens. Il se reporte sur Gabrielle, l'ombre d'un sourire passant sans l'ombre d'un effort sur ses lèvres. « Je vais rentrer, j'ai pas envie de m'attarder ici. Bon courage pour la fin de ta journée. »

rainmaker

the smile that haunts my days and nights

Avec du recul, il a du mal à comprendre ce qui vient de se passer ces dernières minutes. Il a quitté la prison sans laisser à l'avocate ne serait-ce le temps de le saluer, est monté dans sa voiture et à rouler jusqu'à Bayside en faisant un rapide crochet dans une enseigne asiatique pour prendre à emporter. Il n'a pas jeté le moindre regard en arrière, a quitté le parking dans un grondement de moteur agacé et s'est volatilisé. Channing n'a pas un tempérament impulsif ou impoli, et pourtant ce soir il avait été les deux. Il avait été brusque et sec en disparaissant de la sorte, et alors qu'il pose le sac contenant son repas sur un plan de travail de la cuisine, il s'en rend compte. Il en prend conscience et siffle d'un air résigné entre ses lèvres avant d'aller se doucher pour s'éclaircir les idées, s'attardant sous l'eau chaude avant de sortir de la salle d'eau une dizaine de minutes plus tard vêtu d'un jogging ample et d'un gilet pendant sur ses épaules. Peu importe qu'il soit fatigué et à cran, Gabrielle n'a pas à payer les frais de son humeur qu'il sait détestable ces derniers temps. L'héritier s'empare donc de son cellulaire et compose un message d'excuse à l'intention de la californienne, espérant qu'elle n'ait pas changé de numéro depuis tout ce temps. Il lui envoie un sms et repose immédiatement son portable à peine la touche « send » pressée. Il prétend n'accorder aucune importance à une potentielle réponse et se dirige vers son mini bar pour se servir un verre, emportant ce dernier avec lui sur la terasse. et ce n'est qu'au bout de quelques minutes que la curiosité le pousse à se relever pour retourner chercher son téléphone resté à la cuisine, le ramenant à l'extérieur et le posant sur la table basse près du transat sur lequel il s'installe.

et contre toute attente, le cellulaire vibre à réception d'une réponse de la brune. Une première fois, puis une deuxième, et c'est une conversation courte mais légère qui s'engage entre les deux amants d'antan. Ils échangent, Gabrielle accepte ses excuses et ne lui tient pas rigueur de son comportement, et Channing se sent obligé de prendre un risque supplémentaire. Il est éternellement insatisfait, ne peut se contenter de ces messages légers et agréables, et propose à la demoiselle de la rejoindre chez lui. Il ne devrait pas, tout comme il n'aurait pas dû l'embrasser lors de cette soirée du nouvel an. Ils n'auraient pas dû partager cette nuit et pourtant, si c'était à refaire, il ne changerait pas le moindre détail de cette soirée. et là était tout le problème. Mais Gaby ne lui refuse pas cette invitation, y accède, et l'héritier est plus surpris encore. Elle devrait le repousser, lui refuser ce semblant de rendez-vous : et pourtant. Pourtant ils en sont là, à se revoir sans savoir ce que cela signifie si toutefois cela signifie quelque chose. et alors que Channing lui envoie son adresse, il prend conscience d'un détail qui le fait pâlir. Aucun des sushis de sa commande abandonnée à la cuisine n'est végétarien et Gabrielle elle l'est, végétarienne. et il vient de l'inviter à manger d'ici une demie heure, prétendant avoir tout le nécessaire.

Son verre vidé d'une longue gorgée, il retourne à l'intérieur et passe rapidement se changer dans sa chambre. Il n'a pas l'intention de se mettre sur son trente-et-un mais ne tient pas non plus à recevoir la brune en jogging, bien que cette dernière l'ait déjà vu par le passé sous tous ses accoutrements. Il troque par conséquent son jogging et son sweat contre un jean noir et une chemise bleue marine, déboutonnant quelques boutons du col de cette dernière en retournant dans la cuisine. Peut-il vraiment préparer, en si peu de temps et avec ce que contiennent ses placards, des sushis végétariens ? L'héritier comprend en quelques minutes après avoir fouillé dans son frigo qu'il va, et ce sans surprise, manquer d'ingrédients au-delà de manquer de temps. Merde, très malin l'invitation irréfléchie Channing. Smart move. Il s'empare alors de son téléphone et commande à nouveau auprès de la boutique, n'ayant pas assez de temps dans le quart d'heure qui lui reste pour faire un aller-retour et ce même s'il aime courir contre la montre au volant de sa voiture.


Il a eu le temps ces quinze dernières minutes de tourner bêtement en rond dans sa villa et de faire un peu de rangement, avant de se résoudre à retourner sur sa terasse pour patienter. Il s'agace seul d'être nerveux de la recevoir quand il ne devrait pourtant pas l'être, quand tout cela ne veut rien dire et surtout quand elle pourrait même ne pas se présenter à sa porte. Après tout, rien ne l'y oblige n'est-ce pas ? Elle a accepté mais pourrait se défiler et ce sans même le prévenir, et que pourrait-il lui reprocher ? Sa bouteille vide, Channing retourne à l'intérieur pour s'en débarrasser au moment où on sonne à la porte. Il tourne la tête, jette un oeil à l'heure - comme si cela pouvait être quelqu'un d'autre, pas comme si ses derniers visiteurs nocturnes avaient pris la peine de sonner. L'héritier s'avance vers la porte et l'ouvre après une inspiration, un sourire apparaissant sur les lèvres à la vue de l'avocate. « Bonsoir » Elle est superbe. Elle est très jolie et il s'en veut de le remarquer quand il préfèrerait être indifférent à son charme, à ses yeux grands yeux expressifs qui ont toujours été sa plus grande faiblesse et à tout ce qui fait d'elle la personne qu'elle est. La californienne a toujours su se mettre en valeur sans en faire trop, être naturelle mais apprêtée, et le brun est au regret de constater une nouvelle fois qu'elle n'a pas laisser son charme à LA. « Bonsoir Gabrielle. » Il l'invite à entrer en se décalant, ne remarquant qu'avec un certain décalage la bouteille de vin qu'elle lui tend. Il pose les yeux sur cette dernière, surpris de l'attention avant de se saisir lentement du présent. « Tiens… Je me suis dit que ce ne serait pas de trop. » Il la remercie d'un sourire, posant les yeux sur l'inscription du vin, un peu désarçonné. Non, il ne s'attendait vraiment pas à ce qu'elle ramène quelque chose. « C’est une bouteille que Luke m’a fait parvenir de Los Angeles » Il reconnaît le nom du vignoble sans le moindre effort et se reporte sur l'avocate en refermant derrière elle, se remettant à sourire un peu. Luke... il affectionnait particulièrement le meilleur ami de la brune, son énergie et son tempérament, et il se surprend à se demander ce qu'il peut bien être devenu depuis tout ce temps. « Tu n'avais pas besoin de ramener quoique ce soit, mais on va lui faire honneur. Merci. » Il s'avance vers l'îlot central de sa cuisine pour y poser la bouteille, sortant deux nouveaux verres alors que Gabrielle s'avance dans l'espace. Elle n'avait jusque maintenant jamais, ô grand jamais, mis les pieds dans l'une de ses maisons. Il avait toujours été l'invité, jamais l'hôte, et son regard noisette se pose curieusement sur la brune qui découvre son chez lui pour la toute première fois. et inévitablement, comme lui chez elle dans la même situation, son regard est happé par la baie vitrée et la vue qu'elle offre sur l'océan. « Tu as une très belle vue… » Il leur sert deux verres de vin, ne relevant les yeux vers elle que lorsqu'elle reprend la parole. « et une très belle maison... » Son regard s'ancre au sien et il sourit timidement, contournant le plan de travail pour s'avancer vers elle et lui tendre son verre. « Merci. » c'est simple, un peu trop peut-être, et c'est pourquoi Channing l'invite d'un signe de tête à l'accompagner sur la terasse pour qu'ils puissent profiter de la vue. Sa maison ressemble finalement beaucoup à celle qu'ils ont partagé en Californie, si ce n'est qu'elle est probablement plus grande et plus luxueuse. Elle impressionne un peu plus, mais le charme et l'ambiance sont très similaires et cette vue ne fait pas exception. L'océan s'offre à eux sous les reflets lunaires, et l'avocate a tout le loisir de découvrir les lieux. De découvrir la piscine à débordement légèrement en contre-bas, les quelques transats installés à proximité et un peu plus loin un semblant d'escalier naturel qui guide à la plage. « Je n'habite pas ici depuis longtemps en réalité, cela ne fait même pas un an. » J'ai fuis Spring Hill pour trouver refuge ici pourrait-il ajouter même si, évidemment, il s'en abstient. « On peut s'installer dehors si ça te va, il fait bon. Je vais nous chercher des apéritifs. » Il pose son propre verre sur la table basse, invite la demoiselle à se mettre à l'aise d'un regard sur l'une des assises, avant de retourner à l'intérieur pour préparer quelques amuse-gueules. Il revient peu après avec un plateau bien garni et le dépose sur la table, s'installant à son tour. « Ça nous fera patienter en attendant le livreur. » amorce t'il en se pinçant chastement les lèvres, son sourire se faisant mi mal à l'aise mi amusé. « J'ai pris des sushis sur la route du retour, mais ma commande n'est pas végétarienne. Normalement, la tienne devrait arriver sous peu. » Il la regarde, s'excuse d'une moue sincère avant de finalement porter son verre vers le sien pour qu'ils puissent trinquer.

rainmaker

the smile that haunts my days and nights

Il ne sait pas pourquoi il lui a proposé, encore moins pourquoi elle a accepté. Ils sont incapables d'être amis, Channing n'a pas le souhait qu'ils redeviennent amants si cela ne le fera que souffrir, et pourtant ils en sont là. À avoir du mal à se tolérer sans se sauter dessus ou s'insulter, à ne pas savoir sur quel pied danser et à osciller entre un extrême puis l'autre. L'héritier est perdu, et si seulement ce n'était qu'au sujet de Gabrielle et lui. « Je me doute que tu as ce qu’il faut en réserve et de bons crus. Mais je me suis dit qu’une comme ça, tu ne devais pas en avoir » Elle lui tend cette bouteille de vin californien et il en reconnaît le vignoble ainsi que le millésime. Il note l'attention mais ne peut s'empêcher de se mordre chastement l'intérieur de la joue. Ils n'ont jamais eu ce genre de rapport, celui où l'autre arrive à sa porte avec un présent, et il n'est pas certain de la façon dont il doit prendre ce cadeau. Il l'accepte, bien sûr, et la bouteille a une certaine symbolique mais il n'en est pas moins perturbé. Car oui, la brune le sait ou du moins le devine, il a une cave bien remplie et de quoi satisfaire leurs envies. Elle était invitée à venir les mains vides, mais ne l'avait pas fait pour autant. « Non, effectivement. » confirme t'il. Il n'a pas pris le temps de passer dans un vignoble ou deux avant de rentrer sur le continent, aurait aimé en avoir le temps mais ne l'a pas eu, et le seul vin de Californie qu'il peut bien déjà avoir est celui importé en grande quantité sur le pays. Il l'invite à entrer et elle découvre, pour la première fois, l'endroit où il vit. Cette villa beaucoup trop grande pour une seule personne avec une décoration qui colle à la démesure des lieux, une dont Channing affectionne la vue imprenable et le calme du quartier mais dont il ne s'habitue pas à l'espace. Elle est grande, peut-être un peu trop même pour lui, et même si elle a bien des atouts l'héritier ne peut s'empêcher de repenser régulièrement à son appartement du centre. Sa villa est superbe, mais il a la désagréable impression de l'occuper inutilement quand elle pourrait facilement héberger une famille entière et un ou deux chiens. Il s'avance vers la cuisine pour poser la bouteille, et lorsqu'il se tourne vers l'avocate son regard est tourné vers l'immense baie vitrée. Une vue qui happe souvent l'attention, et ne fait pas exception avec elle. « J’avais souvenir effectivement que tu m’avais parlé d’un appartement à l’époque… Tu avais besoin de plus d’espaces ? » Non, pas le moins du monde. J'adorais mon appartement. Il n'avait pas besoin de plus d'espace. Peut-être d'un peu plus de calme et de tranquillité, certes, le chant des mouettes et le son des vagues l'apaisant bien plus qu'il ne s'en rend compte, mais cette villa est trop grande pour qu'il puisse assurer s'y contempler parfaitement. « C'est ça. » ment il l'air de rien, se saisissant de la perche tendue pour ne pas s'attarder sur le sujet. Il ne se voit de toute façon pas expliquer à Gabrielle qu'il a quitté Spring Hill car il ne s'y sentait plus en sécurité, encore moins lui dire que quoi qu'il en soit il n'est pas plus en sécurité ici puisque son alarme avait été désactivée aussi simplement que celle qu'il avait à Water Street. Il ne veut pas avouer ne pas avoir trouver refuge ici comme il l'avait initialement espéré, et ce malgré la beauté des lieux.

Channing les sert en vin et ils vont s'installer sur la terasse, profitant de l'air marin et la fraîcheur de la soirée pour s'asseoir sur les grosses assises confortables à leur disposition. Ils prennent place et l'héritier dépose devant eux un plateau préalablement garni de différents apéritifs, mentionnant l'arrivée prochaine d'un livreur à sa porte. Il mentionne attendre une commande et avant que Gabrielle ne s'interroge, il admet avoir pensé un peu tard à son régime alimentaire différent du sien. « C’est… c’est gentil, merci » Il se contente d'hausser les épaules, faisant trinquer son verre contre le sien sans vraiment chercher à s'attarder davantage sur son geste. « C'est la moindre des choses. » assure t'il avant de porter son verre à ses lèvres, en dérobant une gorgée. et sans surprise, il doit bien reconnaître que le vin qu'elle a amené est particulièrement bon, et son simple goût suffirait presque à le refaire plonger quelques années en arrière. À une période de sa vie qu'il regrette tant il s'y sentait bien, une à laquelle il aimerait tant retourner ne serait-ce l'espace de quelques jours. Il repose son verre par la suite, prend un toast avant de poser son regard noisette sur l'avocate lorsqu'elle prend la parole. « Toi aussi, tu n’étais pas obligé… Je me serai contentée de dévorer les amuse-gueules et des chocolats que tu dois très certainement avoir dans un de tes placards » Son sourire s'amuse et il secoue doucement la tête, la bouche pleine, avalant son apéritif avant de regarder la brune. « Quand même. » Gabrielle demeure une personne simple malgré les apparences, et il n'a pas de doute quant au fait qu'elle aurait été tout autant satisfaite avec un bol de chips et une plaquette de chocolats. Pour autant, elle sait également que Channing ne se serait jamais contenté de lui proposer cela ce soir. Il y a quelques années, il ne lui aurait même pas demandé avant de lui lancer son affreux pull au visage et de sortir diverses sucreries trop grasses, puis de se mettre à chercher un film sur une plateforme de streaming pour leur faire passer une bonne soirée. Mais celle-ci fait davantage écho aux premières qu'ils ont partagé plutôt qu'à leurs dernières. « Je sais qu’on en a parlé mais… » Elle plonge son regard dans le sien, marque une pause et il frisonne désagréablement. « Je tiens à te dire encore une fois que je ne t’en veux absolument pas pour tout à l’heure… » Elle n'est pas obligée de revenir sur le sujet. Il n'en a pas envie, chasse le regard alors qu'il comprend très bien ce qu'elle amorce et préfère de loin se saisir à nouveau de son verre plutôt que d'affronter ses yeux chocolatés. « Le client que j’ai rencontré a tout du profil du type capable de passer à tabac un de ses codétenus. Je ne pense pas qu’il soit nécessairement celui qui s’en est pris à Caelan, mais cette ordure a cru bon de se vanter de faire de telle chose… ça m’a fait sortir de mes gonds en l’entendant parler de la sorte, je n’ai pas manqué de lui dire ce que je pensais, ce qui ne lui a évidemment pas plus… C’est pour cette raison d’ailleurs qu’on m’a déconseillé de m’éterniser et donc de rendre visite à Cae’… » Il l'écoute sans se reporter sur elle, se tendant légèrement mais tâchant de ne pas le montrer. Les aveux sont faciles par message, sa fragilité quant au sujet bien plus facile à transmettre, mais il ne veut pas se montrer ainsi en face d'elle ce soir et n'a d'autre choix pour l'éviter que de regarder son verre. Il ne veut pas qu'ils parlent de Caelan, n'est pas prêt à tenir cette conversation avec elle alors qu'elle sait peut-être mieux que personne à quel point il aime son meilleur ami, alors qu'elle peut deviner facilement si elle s'en donne la peine à quel point il souffre de le savoir là-bas. Channing préférerait y être à sa place pour des mois entiers plutôt que de le savoir là-bas pour encore quelques semaines. « Il ne lui reste qu’un mois à tenir… Il s’en sortira, malgré tout. C’est un dur à cuire le Leckie » Un dur à cuire. Il n'a rien d'un dur à cuire, peut l'être mais ne le veut pas, et l'héritier fait distraitement tourner le contenu de son verre en la laissant poursuivre. « Il aura besoin de tous ses proches en sortant de là parce que le retour à la réalité ne sera pas évidement pour lui mais aussi parce qu’il y aura forcément des… traumatismes après ce séjour en prison… » Son regard se reporte dans le sien et Channing espère qu'elle sait qu'elle ne lui apprend rien. Le Walker a conscience qu'il va le retrouver en piteux état, n'a pas besoin pour autant de l'entendre même s'il sait qu'elle tâche de compatir à sa peine. Le sujet du Leckie est très délicat, et il n'est pas sûr que qui que ce soit puisse parvenir à lui remonter le moral, pas même Gabrielle même s'il apprécie son geste. Elle y serait parvenue sans l'ombre d'un doute s'ils n'avaient pas rompu ou si le cas de figure se serait présenté lors de leur romance, mais ce soir est différent. « Ce sera long, mais il s’en sortira, j’en suis persuadée » Il acquiesce lentement, rompant le contact visuel en reprenant une longue gorgée de vin avant de soupirer mollement. « J'espère Gabrielle... J'espère. » C'est la seule chose qu'il puisse bien faire à l'instantané. Espérer.

C'est le bruit de sa sonnette qu'on enfonce qui le fait tourner la tête, et Channing s'excuse auprès de son invitée pour aller récupérer la commande auprès de celui qu'il devine être le livreur. Il en profite pour inspirer posément, tâchant tant bien que mal de se détendre et de cesser de se ronger les sangs à propos de Cae qui cherche probablement vainement le sommeil à une heure pareille. Il ouvre à l'homme, récupère la commande et la dépose sur le chemin du retour à la cuisine près de la sienne, jugeant bon d'attendre encore un peu avant de lancer les hostilités concernant leur repas. Ils ont le temps de descendre un peu de la bouteille apportée par la brunette avant de manger, et Channing revient s'installer à ses côtés. « C'était bien ta commande. On grignote encore un peu avant de manger ? » questionne t'il malgré tout par principe, lui accordant un sourire. Et alors qu'ils piochent sur le plateau de garnitures, il est celui qui vient à relancer prudemment un sujet. « Tu habites à Bayside également j'ai cru comprendre ? » amorce t'il aussi doucement que possible. Une question le torture, Gabrielle peut sans doute le deviner : pourquoi est-elle venue en Australie alors qu'elle aimait tant LA ? Alors qu'elle tenait tant à son pays, à sa ville dont elle lui a longtemps vanté les atouts. « Tu.. Tu as eu besoin de changement ? » tente t'il en la regardant.

rainmaker

the smile that haunts my days and nights

Les mots sont faciles par écrit. Ils sont fluides, spontanés, transparents. Ils sont légers de par la façon dont ils sont partagés, lourds par le poids de ce qu'ils renferment. Ils coûtent à l'héritier alors qu'il les pianote sur son clavier, mais c'est un prix qu'il est prêt à payer tant que ses écrits s'occupent à sa place d'affronter le regard chocolat de l'avocate. C'est un prix moins conséquent que celui auquel il devrait faire face maintenant s'il se risquait à parler à nouveau du Leckie alors que Gabrielle est assise à ses côtés, alors qu'elle est à une longueur de bras de lui et qu'elle attraperait sans aucun doute son regard triste et la fragilité du ton de sa voix. Il tient à Caelan, bien plus qu'il ne s'en rend compte, et étrangement cet isolement forcé que subit son meilleur ami lui fait prendre conscience que sa présence dans sa vie est indispensable. Elle est indispensable au même titre que celle de Lexie, au même titre que celle d'un membre de sa famille. et si Channing pourrait se passer de Mary tout comme il s'est passé d'Elijah ces quinze dernières années, il serait toutefois incapable de faire une croix sur les blagues douteuses du Leckie. Caelan est la famille qu'il a choisi, et il ferait n'importe quoi pour que sa frimousse fatiguée et meurtrie sorte de cette prison et reprenne un semblant de sourire sincère. Il prendrait sa place sans hésiter, se porterait volontaire pour le remplacer s'il le pouvait. Il ferait bien des sacrifices pour le libérer, mais aucun n'est possible alors que les semaines semblent des mois. et c'est probablement la sensibilité de leur échange par sms qui pousse la brunette à croire que Channing veuille à nouveau parler de lui, qui la pousse à croire que se confier à voix haute sur la situation l'aiderait à aller mieux. Mais le coeur n'y est pas, et faire mention des faits à l'oral ne fait que les rendre plus réels qu'ils ne le sont déjà. et cela, il s'en passe volontiers, mais ce n'est pas contre Gabrielle.

Le livreur qui sonne à l'entrée leur épargne un silence inconfortable, et il ne lui faut que quelques secondes pour se lever et rejoindre la porte. L'interruption plus que bienvenue, il en profite pour inspirer posément sur le chemin, se redonnant une certaine contenance avant de clencher la serrure et de récupérer la commande. Il avait pensé un peu tard au régime alimentaire de la demoiselle, mais pas trop tard pour autant. Le tir avait été rectifié à temps et ce même s'il avait conscience que les diverses sucreries en tout genre qui remplissaient ses placards auraient été amplement suffisantes. Elles auraient été suffisantes et auraient apporté satisfaction aux envies de l'avocate, ainsi qu'aux siennes. L'ambiance aurait par ailleurs sûrement été plus douce avec un énorme saladier de chocolats et de petits biscuits plutôt que deux plateaux de sushis minutieusement alignés, mais les jeux étaient faits ainsi. et ils l'avaient bien voulu, après tout. Réempruntant le même chemin en sens inverse, Channing retourne vers la terasse en déposant distraitement le sac cartonné sur le comptoir de la cuisine. Les sushis ont cet avantage de ne pas refroidir, et ils ont par conséquent encore un peu de temps s'ils le désirent avant d'ouvrir les hostilités. Il en fait la remarque à la brune alors qu'il regagne l'air extérieur, surprenant son invitée perdue dans ses pensées en regardant l'océan. L'héritier marque une pause en la regardant une seconde, toujours à l'abri de son regard pour le moment, avant de suivre le sien. La sensation de déjà vu le fait frémir alors qu'une scène aussi simple que celle-ci a été à de maintes reprises vécue à Los Angeles, à l'exception que le regard que lui portait la brune en se tournant vers lui était, à l'époque, bien différent de celui fade qu'elle lui adresse ce soir. « Oui » Sa voix n'est qu'un murmure et il ne répond pas immédiatement avant de venir se réinstaller à ses côtés, chassant le regard à son tour pour se reporter sur un apéritif puis sur l'océan. Bayside est un quartier calme, où il fait bon vivre, et le bruit des vagues leur parvient en un écho à la fois lointain et proche tandis qu'il l'interroge quant à son emménagement ici. « J’ai été plutôt chanceuse, à vrai dire. Cette maison devait être ma deuxième visite. Ça a été un coup de cœur… Et puis le quartier évidemment a bien aidé, et surtout cette proximité avec l’océan » Il n'est pas vraiment surpris par ses paroles alors qu'en ce qui le concerne, cette villa a été sa seule et unique visite. Pour le directeur d'une agence immobilière de prestige, l'un de ceux qui encourage ses clients à faire plusieurs visites afin d'être sûr de leur choix, c'est un comble. Mais si Channing est l'un des mieux placés pour savoir que les meilleurs biens se vendent vite même s'il privilégie au moins la visite de deux, il sait aussi reconnaître un coup de coeur quand il en voit un. et il n'est pas surpris que Gabrielle n'ait pas échappé à l'un d'eux. « J’habite à quelques pâtés de maison d’ici » Il acquiesce à ses paroles, prenant une gorgée de son verre en s'interrogeant quant au look de sa nouvelle demeure. Est-elle similaire à celle de LA, d'une certaine façon ? Qui, de elle ou de lui, a la plus belle vue ? La brunette a-t-elle ramené avec elle des parts de sa vie californienne jusque ici ? si oui, lesquelles ? Il se pose plusieurs questions, étonnement, mais s'abstient bien évidemment d'en faire mention. « Tu as fais le bon choix en misant sur Bayside. C'est de loin le quartier le plus agréable de Brisbane. » celui qui te correspond le plus, pense t'il alors qu'il esquisse un sourire timide à son attention. Mais rapidement, alors qu'il la regarde en posant une nouvelle question plus personnelle, son rictus retombe aussitôt alors qu'il se heurte à son silence. Elle se met à réfléchir, ne le regarde plus, termine son verre et les yeux noisettes de l'héritier suivent ce dernier jusqu'à la petite table basse alors qu'il se pince chastement les lèvres. « On peut dire ça » Son ton de voix est plat, détaché, et il l'écoute poursuivre en terminant son verre à son tour. « Mes frères vivent ici, et c’est aussi pour cette raison que j’ai choisi de venir ici, à Brisbane » De tous les continents, de tous les pays, c'est ici  qu'elle est venue. Pour ses frères ? Alors que le monde entier s'ouvrait à elle si l'envie de changer d'air était devenue à ce point indispensable ? Au point de quitter sa si chère et tendre à son coeur ville de LA ? Non, il se doutait que Gabrielle n'était pas venue à Brisbane pour lui, mais sa réponse n'en apporte pour autant pas vraiment une à sa question. « Je vois. » souffle t'il toutefois, incapable de lui en vouloir quand lui non plus n'est pas sincère avec elle quant à sa présence ici, dans cette villa démesurée, loin du CBD.


La soirée se poursuit sur un air léger à mesure que le niveau de la bouteille de vin descend et que les plateaux de sushis se vident, ayant remplacé ceux de petits fours terminés plus tôt. Ils parlent de choses et d'autres, semblent s'accorder un peu de leste alors que l'alcool détend leurs épaules et délient leurs langues. « Je n’avais pas goûté aux sushis de ce resto encore mais ils sont succulents » Appuyé en arrière sur son avant bras, à moitié allongé dans le confort des coussins épais qui ornent sa terasse, Channing laisse échapper un souffle amusé alors qu'il jette un regard en coin à son invitée. « Une adresse de plus que je vais mettre dans mes favoris » Il porte son verre à ses lèvres, se reportant sur l'océan dont la surface anguleuse brille sous les reflets lunaires. « Fais moi penser à te donner leur carte, j'en ai une à la cuisine. Ils proposent des sushis mais aussi des ramens et d'autres spécialités en tous genres, c'est excellent. » Il marque une brève pause, le temps de prendre une gorgée de vin. « Ils ont une carte exclusivement végé, qui plus est. » remarque t'il avant de s'étirer un peu, posant son verre à présent vide. La bouteille ramenée par la brune a le goût de leur romance, et il ne peut s'empêcher d'être un peu nostalgique même si son attitude ne change pas vraiment. Le pétillement de son regard est plus doux, mais pas pour autant plus confiant. « On avait visiblement très soif » Elle le tire de ses pensées alors qu'il jette un oeil à la bouteille, effectivement et malheureusement, vide. C'est d'un air un brin dramatique que son regard rencontre à nouveau son verre délaissé un peu plus tôt et il fait une moue. « C'est triste qu'elle soit déjà terminée. » constate t'il en se penchant pour attraper la bouteille et s'attarder à nouveau sur les inscriptions de l'étiquette. Gabrielle se lève et il la regarde distraitement un instant, détournant son attention des inscriptions sur le verre pour apprécier une seconde durant la silhouette de la californienne qui se découpe face à l'océan. Pour l'apprécier elle et ses courbes qui hantent ses nuits, celles dont il a retrouvé la chaleur le temps d'une nuit et qu'il admire à présent de loin. « C’est apaisant… j’imagine qu’après une longue journée de boulot, tu dois te complaire à venir t’installer sur les grandes assisses pour juste observer l’océan et profiter du calme… » Il repose la bouteille en l'écoutant sans un mot, se redressant en position assise sur les coussins, repliant ses jambes. La scène qu'elle décrit est une à laquelle il donne régulièrement vie, pour ne pas dire quotidiennement. Boire un verre sur cette terasse est sa façon de clôturer ses longues journées, et la plupart le sont. Longues et fatigantes, interminables et pesantes. Surtout ces derniers temps. « [...] je me visualise bien faire ça moi, en tout cas » Il acquiesce toujours en silence, son regard rivé sur l'océan alors qu'il demeure assis dans cette position tout à fait ordinaire, une qui renvoie avec une facilité surprenante l'image d'un homme simple loin des fioritures de son image médiatisée d'héritier. L'image de l'homme qu'il est, un aux traits fatigués mais au sourire doux alors qu'il croise le regard de la demoiselle. « Je le fais souvent, je t'avoue. » « Que demander de plus, après tout ? » Que demander de plus ? C'est une question qu'il se pose souvent lorsqu'il fait face à ses cernes dans le miroir. Il a bon nombre d'ingrédients pour finaliser la recette du bonheur et pourtant, il en manque certains indispensables à la liste sur lesquels il ne parvient pas à mettre la main. Il manque à sa vie ce qu'il refuse d'admettre, ce qu'il refuse de voir. et s'il sait ce qu'il pourrait demander de plus, Channing ne répond pas pour autant alors qu'il se lève après un léger haussement d'épaules. « Tu sais ce que je fais d'autre, après une longue journée de boulot ? » Il la regarde, ne répond pas à sa question, lui laisse le temps éventuellement d'émettre une quelconque hypothèse avant de se détourner et d'aller récupérer une nouvelle bouteille de vin dans sa cuisine. Il revient peu après, deux nouveaux verres en main pour accompagner ce nouveau cru, contourne l'avocate ainsi que sa piscine pour s'approcher de la bordure de sa terasse. « Viens, qu'est-ce que tu attends ? » lance t'il avec un peu d'amusement avant de descendre les escaliers naturels en roche, empruntant ce chemin forgé par le temps pour gagner la plage sans offrir davantage d'explications à la brune avant qu'elle ne le rejoigne. « J'affectionne les assises épaisses et confortables de ma terasse, mais rien n'égale le sable encore chaud de fin de journée et la plage déserte. Alors, quand j'ai assez de courage, je descends ici. » explique t'il en s'avançant vers l'océan, le bruit des vagues se faisant plus distinct et l'air marin plus prononcé. Ils avancent jusqu'à être proches de l'eau tout en restant au sec, et Channing s'assoit avec un air d'habitué dans le sable avant d'enfoncer légèrement la bouteille dans ce dernier pour la maintenir debout. Il étend ses jambes, pose leurs deux verres et reprend la bouteille avant de se rendre compte qu'il a oublié de l'ouvrir avant de venir. « Je viens rarement sur la plage en journée, finalement. » avoue t'il avant de s'affairer à retirer l'opercule protecteur puis à, faute de pouvoir l'enlever, enfoncer le bouchon à l'intérieur de la bouteille avec ses mains. « C'est tellement plus agréable quand il n'y a personne... » ajoute t'il entre deux efforts pour pouvoir leur servir leurs verres, soupirant un peu contre lui même avant de finalement venir à bout du bouchon. Channing s'accorde un léger sourire victorieux avant de les servir et de tendre son verre à la brune. « Un dernier ? » Un dernier, s'ils parviennent à s'en contenter.

rainmaker

the smile that haunts my days and nights

Il a conscience que Gabrielle ne lui dit pas tout. Qu'elle n'a pas quitté Los Angeles sans y avoir été contrainte, qu'elle n'aurait jamais abandonné derrière elle sa superbe villa et la ville où elle s'est faite connaître sans une très bonne raison. Combien de fois lui a-t-elle vanté les atouts de la cité des anges ? L'amour qu'elle lui porte, la symbolique qu'elle lui attache et tant de détails que Channing ne peut oublier ? Ces petites choses qui faisaient de LA la ville où elle se voyait vieillir, ces mêmes petites choses qui avaient entre autres découragé l'héritier à lui proposer de le suivre à Brisbane. Il l'aimait, mais ignorait si la réciproque était vraie et même le cas échéant si cela suffirait pour lui faire tourner le dos à sa Californie si chère à son coeur. et maintenant, l'avocate avait tout simplement déménagé pour changer d'air et se rapprocher de ses frères ? Il y a plus à cette histoire et pourtant, il est incapable de lui en demander davantage. Il n'ose insister quand elle se montre tout aussi brève que lui sur sa présence à Bayside, ne se juge pas à même de demander des explications quand il peut, après tout, se tromper complètement et réfléchir bien plus qu'il ne le devrait. Mais il n'y croit pas, pas une seule seconde. Leurs regards se croisent et le maigre sourire qu'ils échangent semble bien fade alors qu'ils auraient tellement à partager, tellement à se dire et à s'avouer.

Heureusement, d'une certaine façon, le vin les encourage à parler plus librement et l'atmosphère qui s'installe entre eux se fait plus confortable et légère au fil des minutes. Channing vante l'asiatique chez lequel il a commandé pour eux ce soir, ainsi que leur carte végétarienne qu'il a découvert par la même occasion. « C’est parfait ça… Un soir je commanderai un ramen, un autre soir des sushis… J’imagine qu’ils doivent avoir des poké bowl, ça fait trois… C’est parfait pour moi » il l'écoute en la regardant, souriant doucement tout en portant son verre à ses lèvres. Il acquiesce, s'amuse de constater que certaines choses semblent ne pas changer et qu'à son comportement, la brune doit toujours être une aussi piètre cuisinière. Il a pourtant essayé, par le passé, de lui apprendre quelques recettes. Il a essayé de l'aider à manger autre chose que des conserves ou des plats préparés, mais avait fini déjà à l'époque par renoncer et se mettre aux fourneaux lui-même. Pas que cela le dérangeait, au contraire, le brun ayant toujours pris plaisir à jouer les chefs cuistots pour eux deux. Gabrielle se glissait dans son dos pour le câliner, l'aidait à couper quelques légumes quand elle ne se faisait pas mal avec le couteau, et cela était plus que suffisant pour leur faire passer de bons moments. « Tu m'en diras des nouvelles. » demande t'il avec un sourire, l'avocate le connaissant curieux. C'était d'une manière assez régulière que le brun mangeait végétarien avec elle lors de leur romance, et il était même parvenu à considérablement réduire sa consommation de viande fut un temps. Mais en quittant le continent américain et surtout en s'éloignant de la demoiselle, ses habitudes étaient revenues. et même si cette bouteille qu'ils terminent le tire en arrière, il se contente pourtant de sa commande de makis sans lorgner sur ceux de la brune. Le niveau de vin descend, et un silence se met à planer entre eux alors qu'ils semblent s'égarer respectivement dans leurs pensées. Son regard se pose sur elle et une seconde durant - plusieurs longues minutes en réalité, et il essaie de deviner ce à quoi elle peut bien songer. Est-elle nostalgique, au même titre que lui ? Est-elle perturbée par quelque chose au cabinet ? Ou plus simplement fatiguée ? Mais plutôt que de l'interroger, au risque de mettre le doigt sur un sujet sensible, il se contente de la regarder en silence en s'ornant d'un léger sourire. Un spontané, sûrement le plus transparent qu'il puisse lui offrir à l'instantané, sincère et peut-être un brin tendre. Ils ne sont plus ce qu'ils ont été et pourtant, la présence de la demoiselle assise à ses côtés lui fait bien plus de bien qu'il ne s'en rend compte.

Gabrielle reprend la parole et si Channing évite soigneusement sa question, revenant sur celle posée précédemment, à laquelle la demoiselle fait une hypothèse. « Sauter dans la piscine ? » Le brun secoue doucement la tête avec un sourire, surpris qu'elle le croit à ce point enthousiaste en rentrant du bureau, se levant avant d'aller chercher une bouteille de vin à la cuisine. Non, il n'est pas du genre à sauter dans sa piscine en riant une fois chez lui, du moins ne l'est plus même si cela aurait sûrement été son genre il y a de ça quelques années. « D’ailleurs si c’est le plan… Ne compte pas sur moi » Il revient vers elle avec une bouteille pleine, la rassure dans un rire. « Non, rassure toi. » Si cela avait été le cas, cependant, Gabrielle aurait terminé à l'eau que cela soit son souhait ou non. Mais la tenue de l'avocate allait être épargnée ce soir, ou tout du moins ne serait pas ruinée dans sa piscine. « J'ai autre chose en tête. » Channing se dirige vers l'arrière de sa terasse, s'arrête en haut d'une petite butée et tourne la tête vers son invitée qui le suit des yeux sans bouger, se demandant sûrement ce qu'il fabrique. Mais ses intentions se font plus claires alors qu'il l'invite à s'approcher puis à le suivre, et la californienne s'exécute alors qu'elle délaisse ses talons et le rejoint sans poser de question. Elle s'approche d'un pas tranquille, plus petite de quelques centimètres sans ses escarpins, et le brun la suit des yeux avant de descendre les marches une fois qu'elle atteint sa hauteur. Bouteille à la main, expliquant d'un ton léger ce qu'il a en tête, le duo gagne la plage alors qu'un silence s'installe à nouveau. Le sable chaud sous leurs pieds, le calme de fin de journée, le bruit des vagues... tous les ingrédients sont réunis pour qu'ils puissent relâcher la pression, et Channing ferme les yeux une seconde pour s'imprégner de l'air marin. Enfin, tous les ingrédients... à condition qu'il parvienne à ouvrir leur bouteille. À présent installés dans le sable, il lui faut quelques minutes de persévérance pour venir à bout du bouchon sans ustensile. Mais finalement, ce fameux dernier verre est proposé à l'avocate qui a courageusement gardé le silence en le regardant batailler, s'abstenant de toute moquerie... « J'ai cru que tu n'allais jamais me le proposer... » ou presque. Son sourire s'amuse alors qu'il fait une petite moue à moitié désolée, les servant avant qu'ils ne trinquent. « J'aime faire durer le suspens. » souffle t'il sur le même ton, à voix basse, avant de prendre une gorgée bien méritée. Son attention se reporte par la suite sur l'océan qui leur tend les bras, celui sur lequel ne se découpe pas le moindre bateau ou nageur, et une seconde durant Channing regrette de ne pas avoir son portable pour saisir le moment. « J’aime aussi quand la plage est moins fréquentée… Mais je m’y égare davantage le matin avant d’aller travailler… pour y faire mon footing. C’est tout aussi agréable » Il ne la regarde pas mais tend attentivement l'oreille. Sans le moindre mal il la visualise avec ses habitudes, celles qu'il lui connait et qu'il prend pourtant plaisir à l'écouter lui rappeler. Lui remémorer car Channing est loin d'avoir oublier ces détails en qui la concernent, ne serait-ce puisqu'en avril dernier les ex-amants s'étaient retrouvés par hasard sur une plage aux aurores alors que leurs points communs s'heurtaient à nouveau. Channing avait fait sonner son réveil plus tôt ce matin là pour aller s'aérer les idées, uniquement pour tomber sur l'avocate au bout de quelques mètres. Le duo avait été contraint de s'entendre pour libérer une tortue prise dans des filets de pêche, à une période où la tension entre eux était plus électrique d'aujourd'hui, et l'héritier s'était souvenu trop tard que Gabrielle et lui partageaient ce plaisir de se dégourdir les jambes au réveil. Et même si l'évènement remonte à bientôt un an, le souvenir qu'il en garde est précis. Tout aussi net que cette entaille que la brune lui avait infligé dans la paume de la main en coupant les filets, une dont il garde une fine cicatrice aujourd'hui. alors oui, il sait que la brune aime courir avant d'aller au travail, comme elle le lui en a donné l'habitude à lui aussi lors de leur histoire. « Je viendrais sûrement tous les soirs aussi si j’avais un accès aussi pratique que le tien pour déguster mon verre de vin. Mais peut-être que je pourrais venir te tenir compagnie de temps en temps… » Son regard quitte l'immensité pour se poser sur son visage, celui à la mâchoire fine et ciselée dont il a longtemps parcouru les courbes à l'aide de ses lèvres, alors que ses paroles le surprennent un tantinet. Il penche légèrement la tête sur le côté, son air inquisiteur étirant son sourire. « Tu ferais ça ? » l'interroge t'il avec un brin de malice, avant de reprendre un air plus sérieux après un souffle rieur. « Tu sais où j'habite, tu es la bienvenue. » souffle t'il d'une voix douce, assistant au mouvement de cette sa mèche qui vient barrer son regard. et si l'héritier ne bouge pas, il doit se faire violence pour ne pas glisser ses doigts sur cette dernière et dégager ses traits. Il se pince légèrement la lèvre inférieure, et avant qu'il ne prenne la décision de tendre la main l'avocate s'occupe de secouer la tête pour laisser ses mèches basculer en arrière d'elles-mêmes. « Peut-être pas un jour où il y a du vent cependant, le vin croquant n’est pas vraiment mon truc » Il grimace à cette remarque, porte son verre à ses lèvres avec une moue. « Je comprends. » remarque t'il, forcé de constater qu'elle se débat avec ses cheveux et les fines particules de sable qui virevoltent dans l'air. « Je suis déçue cependant que tu n’es pas pensé au chocolat pour accompagner ce vin… La petite touche sucrée pour terminer un repas… » Son sourire retombe sensiblement à cette remarque, et il la regarde sans rien dire avant de poser son verre dans le sable. Quel idiot. Il sait que l'avocate ne le dit pas comme un reproche, et ce n'est pas de la façon dont il le prend, mais il se rend compte avoir bêtement oublié alors que l'attention lui aurait inévitablement fait plaisir. « Je suis un peu ailleurs, désolé. » avoue t'il d'un air coupable, ayant conscience de cette habitude de la demoiselle. De celle-ci, de son régime alimentaire... Mais il est, et ce d'une manière indéniable preuve à l'appui, fatigué. Naturellement, Channing s'apprête à se lever pour faire un aller-retour rapide à la villa, au moment où elle l'interrompt. « Don’t bother » Il la regarde, se coupe dans son élan au contact de sa main sur son bras, fronce légèrement les sourcils. « Je n'en ai pas pour longtemps, Gabrielle... » précise t'il mais cela ne semble pas atteindre les oreilles de la demoiselle qui se lève après avoir terminé son verre, tandis que lui reste au sol en la regardant. En gardant le silence et en la regardant elle qui s'étire une seconde une fois debout, elle avec qui il est heureux de passer la soirée, elle à qui il a tant de choses à dire. Elle s'approche pas à pas de l'eau et lui ne bouge pas, quoiqu'il sourit légèrement. « Tu viens ? » Il termine son verre à son tour puis se lève, époussetant distraitement ses jambes avant de venir se saisir de sa main une fois à sa hauteur. et cette scène, malgré elle, fait un écho inévitable à leur première soirée partagée à Los Angeles. Celle où après s'être éternisés dans un bar ils avaient pris la direction de la plage, avaient appris à se connaître un peu davantage et avaient commencé à approfondir une relation dont ils ne pouvaient imaginer l'impact. Il glisse sa main dans celle que lui tend la brune et sans comprendre pourquoi décide de la faire tourner sur elle même, toujours en gardant le silence, préférant sourire et la regarder plutôt que de s'exprimer à voix haute. Les mots se meurent sur sa langue, pas que cela lui plaise puisqu'il a bien conscience d'être étrangement silencieux, et ils se mettent à marcher en trempant les pieds tandis les mouvements des vagues viennent lécher leur peau. Son regard évite à présent le sien alors que ses doigts restent contre les siens, ses yeux noisettes dirigés vers le sable avant de se reporter sur l'horizon. « J'en connais une qui va avoir le bas de son jean trempé. » souffle t'il en lui jetant un regard en coin par la suite. « Enfin, mieux vaut le bas du pantalon que la tenue entière. Non ? » l'interroge t'il d'un air innocent, s'efforçant de briser le silence pour ne pas paraître distant quand en réalité il ne sait pas comment se comporter. L'héritier sourit toutefois, faisant mine de trainer un peu les pieds pour éclabousser légèrement le bas des jambes de l'avocate. « Je ne voudrais pas que tu crois que je voue une passion à ruiner tes tenues. » même si, inconsciemment, c'est peut-être un peu vrai.

rainmaker

the smile that haunts my days and nights

« Pourquoi pas ? » L'idée lui plaît. Elle lui plaît même s'il ne répond rien, se contentant de sourire en imaginant la brune se présenter à sa porte à l'improviste à d'autres reprises. La pensée le fait sourire alors qu'elle ne devrait probablement pas, mais peu lui importe à cet instant. À cet exact moment, Channing s'accorde à aimer la résonnance de ces mots à ses oreilles sans se torturer l'esprit plus que nécessaire en songeant aux conséquences de tout ça. Il remplit finalement leurs verres, et le duo trinque alors que la brune lui fait remarquer qu'il a oublié de prendre un carré de chocolat ou toute autre gourmandise sucrée pour clôturer leur repas, comme il sait qu'elle affectionne le faire. Sa remarque n'est pas un reproche mais l'héritier se l'inflige seul, se pinçant chastement les lèvres avant d'être prêt à se lever pour rectifier le tir. Mais l'avocate l'interrompt, place sa main sur son bras avant qu'il n'ait le temps de bouger et secoue la tête avec un sourire. « Tu n’as pas besoin de t’excuser, Channing… Je disais ça pour plaisanter » Elle ne lui apprend rien et pourtant, face à son air détaché, il se résout à rester assis sur le sable en s'avouant vaincu d'une moue. Après tout, rien ne les empêche de se quérir d'une tablette lorsqu'ils retourneront à l'intérieur, et rien ne presse. Ils ne sont attendus nul part, n'ont pas le moindre créneau horaire à respecter, et peuvent prendre tout le temps du monde sur cette plage et manger du chocolat en remontant. Elle est par la suite la première à se lever, semblant avoir une idée derrière la tête alors qu'elle s'approche de l'océan en l'invitant d'un geste de la tête à la suivre. La proposition est tentante, bien sûre qu'elle l'est quand ils ont déjà marché main dans la main les pieds dans l'eau un nombre incalculable de fois par le passé. Après de longues journées, lorsqu'ils ne trouvaient pas le sommeil la nuit, au petit matin avant de se résoudre à aller se changer chez elle pour aller travailler ensuite. Elle sait que, face à son offre, Channing va se lever et venir se saisir de sa main tendue pour marcher à ses côtés. et c'est ce qu'il fait. Ses pas rejoignent les siens et après quelques secondes, les voilà dans un silence confortable tandis que l'air marin et le bruit des vagues les berce de sa régularité.

Les foulées de l'héritier sont lentes pour ne pas devancer celles de la brune, ses pieds traînant mollement dans l'eau en créant de légers mouvements. De petites vagues taquines qui viennent s'échouer plus haut que le niveau de l'eau sur les chevilles de la californienne, humidifiant petit à petit le bas de son jean qu'elle n'a pas pensé à retrousser. Son action n'est pas réfléchie, et en réalité c'est à peine si le Walker a le temps de se rendre compte de cette malice qui s'immisce dans ses gestes avant qu'elle ne lui fasse remarquer. Qu'elle ne le menace en levant la main, le pointant de son index pour le défier de recommencer. « Certes… mais je te vois venir » et c'est ce qu'il fait, inévitablement, s'amusant d'un rire. Bien sûr qu'elle le voit venir à des kilomètres avec son regard fuyant et son sourire qu'il cherche à cacher, bien sûr qu'elle le connaît assez pour savoir qu'il s'apprête à faire une bêtise derrière son regard faussement innocent. « J’ai de sérieux doutes, Walker » Walker, Walker... Il appréciait, avant, la consonnance de son nom entre ses lèvres. Il aimait qu'elle le hèle de la sorte, le taquine avec une voix à moitié officielle, mais le sentiment n'est pas le même quand il est peut-être trop tôt - ou trop tard pour que son nom qui sorte de sa bouche sonne d'une manière mélodieuse. La distance entre eux est la responsable de ce ressenti, celle qui le pousse à croire que son nom ne sonnera plus jamais comme il a un jour résonné dans sa bouche. Mais plutôt que de trop réfléchir, il continue de s'amuser avec ses pieds en l'éclaboussant un peu davantage comme toute réponse à ses paroles.  « Stop that, immediately » « or else what ? » répond t'il du tac au tac, ses sourcils se fronçant avec défi alors qu'il la regarde en s'arrêtant une seconde durant. « Puisque c’est comme ça… » et, sans crier gare, la brunette se met à l'éclabousser à son tour à grands mouvements dans l'eau. Channing pouffe en reculant d'un pas, avant de riposter de plus belle en amplifiant la taille de ses attaques. et rapidement, les deux idiots se retrouvent trempés de la tête aux pieds, s'entendant à peine dans le brouhaha qu'ils créent, leurs rires se mêlant à ce vacarme. « Ok, ok temps mort » L'avocate parvient à se faire entendre et peu à peu, face à la posture qu'elle adopte et ses mots, l'héritier cesse ses assauts en reprenant son souffle. « Disons qu’on est quittes, tu  veux bien ? » Il acquiesce, passe la main dans ses cheveux pour les rabattre en arrière dans un dernier rire même si son sourire ne retombe pas encore. « Deal, on est quittes. » Il a le goût de sel sur les lèvres, quelques grains de sable croquent sous ses dents et il grimace alors qu'il récupère un grain de sable sur le bout de sa langue, levant les yeux vers Gabrielle qui reprend la parole. « T’es incapable de t’en empêcher à chaque fois, n’est-ce pas ? » et à ses mots, son sourire franc retombe légèrement pour se faire plus timide alors qu'il en esquisse un autre désolé. Il est vrai que, maintenant qu'elle en fait la remarque, il a une fâcheuse tendance à ne pas pouvoir marcher normalement dans l'eau sans se sentir obligé de l'éclabousser. Aurait-il ce comportement avec quelqu'un d'autre ? Il n'en sait trop rien quand Gabrielle est l'une des seules personnes avec qui il se balade sur la plage. Faute de temps ou même d'idée avec ses autres proches. Il hausse mollement les épaules sans trop s'attarder sur la remarque, ne s'excusant pas quand il sait ne pas être sincèrement désolé. « Heureusement que je n’habite pas loin… Autrement, tu aurais dû me trouver une tenue pour rentrer » Il relève les yeux vers elle après s'être baissé pour rincer ses mains dans l'eau, ces dernières ayant visiblement été victimes d'un genre de motte de sable. « Tu saurais rejoindre ta maison en partant d'ici ? » l'interroge t'il en se redressant, secouant doucement ses mains. « Pas que l'idée de te prêter un jogging me déplaise, mais si tu préfères tes vêtements allons y. Je ne voudrais pas que tu prennes froid. » souffle t'il avec un soupçon de moquerie, rien de bien méchant toutefois, son sourire se ourlant à nouveau. Elle s'approche ensuite de lui et le brun la regarde, un peu méfiant alors qu'il craint qu'elle ne l'arrose à nouveau, la regardant d'un drôle d'oeil peu confiant même s'il ne bouge pas. « Ca te va bien cet air de Robinson Crusoé » lance t'elle sans lui jouer de mauvais tour, et en comprenant qu'elle ausculte les traits de son visage Channing y passe sa main pour en chasser ce qu'il devine être quelques traces de leur querelle. « Cet air de Crusoé... » pouffe t'il légèrement en secouant la tête, se reportant ensuite sur elle et ses mèches dans un aussi piteux état que les siennes. et à ces mots, Channing se penche à son oreille avec ce même sourire malicieux. « Quant à toi, tu diras à ton âme d'aventurière qu'un haut blanc n'est pas l'idéal en terme d'opacité pour une baignade. » souffle t'il avec malice, la voix moqueuse dans son oreille, avant de se redresser et de se défaire de sa propre chemise sans un mot. Elle est toute aussi trempée que celle de la brune mais le bleu sombre du tissu demeure quant à lui opaque, et Channing la tend à Gabrielle avant de se diriger vers la terre ferme pour lui laisser l'intimité de l'enfiler. Pas qu'il n'ait jamais vu le corps de l'avocate, mais il y a une différence de circonstance ce soir et sa place n'est pas face à elle à l'instantané. Lorsqu'elle le rejoint, changée le temps d'enfiler une tenue sèche chez elle, le duo se dirige par la suite vers sa villa.

Lorsqu'ils l'atteignent, elle n'est pas si différente de l'idée que le brun s'en faisait. Il faut dire qu'il passe beaucoup de temps à parcourir le quartier résidentiel Bayside, à faire visiter les plus beaux logements de la baie et à trouver les paires idéales entre leurs propriétaires et leurs biens. Pas que toutes les villas se ressemblent, loin de là, mais considérant celles sur le marché et les goûts de Gabrielle, ce combo ne le surprend pas vraiment. Moderne, au design structuré et architectural, aux lignes épurées et nettes, cette maison colle au style de la demoiselle qui l'invite à l'intérieur. Channing entre à sa suite et découvre le salon avec une baie vitrée offrant un accès à la terasse similaire à la sienne, bien que moins démesurée certes, et un léger sourire s'installe sur ses lèvres. Ses pas le portent au coeur de la pièce de vie et il croise finalement ses mains dans son dos par habitude avant de tourner la tête vers l'avocate. « Je t'attends ici, va. » l'encourage t'il avec un sourire, avant de se mettre à patienter dans le salon en regardant un peu autour de lui. Pas trop car il ne sait pas à quel point Gabrielle est enchantée de le faire entrer dans son intimité, mais un peu car c'est après tout plus fort que lui. et rapidement, son regard tombe sur un bibelot abstrait posé sur l'une des étagères et l'héritier doit battre plusieurs fois des paupières. Il reconnaît cet affreux truc, cette sculpture aux formes abstraites qu'il a toujours détesté avec passion et qui semble avoir fait le chemin depuis Los Angeles jusque ici. Après un regard vers le couloir où a disparu la brunette, l'héritier s'approche pour toucher avec les yeux la chose. C'est bien la même décoration qu'il a, un jour où il était seul chez elle dans la cité des anges, fait accidentellement tombé sur le sol et brisé en morceaux. Conscient que Gabrielle ne le croirait jamais s'il prétendait à un incident, il avait ce jour-là parcouru toutes les boutiques de décoration de la ville à la recherche de la réplique de la sculpture, qu'il avait fini par payé une vraie petite fortune dans un commerce huppé. Il avait remplacé le bibelot sans jamais mettre la propriétaire au courant et était forcé de constater que même un déménagement par avion n'était pas venu à bout de cette horreur. Quelle angoisse. et, alors qu'il se tient toujours près de l'oeuvre, Gabrielle revient sans qu'il ne l'entende.

rainmaker

the smile that haunts my days and nights

« Remettrais-tu en question mon sens de l’orientation ? » Il secoue la tête à cette remarque, place mollement les mains en évidence. Il ne remet rien en doute, s'interroge simplement et ce d'une manière il faut l'admettre justifiée. Lui-même ignore de combien de mètres exactement ils se sont éloignés de sa propre villa, et il n'a non plus aucune certitude quant au fait que Gabrielle vive ou non dans la même rue que lui. Les villas de bord de mer ne se ressemblent pas toutes, certes, mais plongées dans l'obscurité les lignes des habitations peuvent être trompeuses. « Rassure-toi si j’ai su arriver jusqu’ici, je devrais pouvoir me souvenir du chemin retour… malgré les nombreux verres de vin qu’on a pu boire » et il y a ça aussi. Du bon vin, quelques rires et maintenant la nuit qui les enveloppe. et si Channing est prêt à croire l'avocate et son sens de l'orientation, il précise toutefois de l'accompagner jusque chez elle et ce sans vraiment lui laisser le choix. Pas qu'il soit catégorique non plus, mais c'est par principe et sans même y réfléchir qu'il tient à s'assurer qu'elle regagne son domicile sans encombre. et peut-être aussi qu'il s'agit d'une excuse pour prolonger leurs retrouvailles, liant l'utile à l'agréable. qui sait. Ils se mettent en chemin après que sa chemise soit venue couvrir le haut transparent de la brune, et ce même si Gabrielle se renfrogne. « Je tiens à signaler que cette "baignade" n'était pas prévue » Ses épaules se haussent avec innocence et ils continuent de marcher. Oui, il est responsable de leurs états respectifs et ne cherche pas à se dédouaner, mais en reprochant à la demoiselle son chemisier blanc Channing cherchait davantage à la taquiner qu'à plaider non coupable. Il a l'habitude d'être responsable de ce genre de bêtise, son côté enfantin refaisant souvent surface lorsqu'il se sent bien en bonne compagnie.

Ils atteignent finalement le perron de la villa de l'avocate peu de temps après, et Channing est invité à entrer d'un signe de tête. C'est la première fois qu'il entre chez elle, dans son cocon, et si la sensation avait été agréable à LA ce n'est pas le cas ce soir. C'est plutôt tout l'inverse, en réalité. Il entre timidement, est un tantinet mal à l'aise d'avoir les chaussures trempées et de sentir l'eau de mer à plein nez. Ses pas sont prudents pour atteindre le cœur de vie de la villa, et il encourage Gabrielle à aller se changer en lui assurant l'attendre sagement. et c'est ce qu'il fait. Son regard circule autour de lui alors que le silence tombe à nouveau dans le salon, et Channing daigne bouger uniquement lorsque ses yeux noisettes rencontrent ce fameux bibelot. Cette petite statuette qu'il n'ose toucher toutefois, se contentant de la caresser de son regard, plongeant en un battement de cils plusieurs années en arrière. Leurs après-midis ensoleillés partagés dans sa piscine, leurs cours de cuisine improvisés, le panorama imprenable de sa baie vitrée... les souvenirs le frappent, rudement, si bien qu'il n'entend pas les pas de la brune qui s'approchent à nouveau. « Tiens… » Sa voix le ramène à l'instant présent et il se tourne vers elle, se saisissant de la serviette tendue en murmurant un « Merci » à peine audible. Il porte machinalement le tissu dans ses cheveux, frotte distraitement sa tête avant d'essuyer grossièrement son cou en reportant son regard sur la maîtresse des lieux. « Je croyais que tu le détestais » Elle lui arrache un sourire, à moitié désolé à moitié amusé. « C'est toujours le cas. » corrige t'il. Aucune chance que ce machin soit devenu plus beau avec le temps, et il ne laissera pas naître cet espoir dans l'esprit de l'avocate. « J’avais peu d’espoir qu’il résiste au voyage depuis Los Angeles mais, il est finalement arrivé en entier. Ce truc immonde est bien résistant finalement » Il cesse peu à peu de passer la serviette dans sa nuque, laissant son bras retomber le long de son corps tout en appuyant un regard sceptique sur l'objet. « Mmh... un coup de chance. » De chance ou de malchance, mais il n'ira pas jusqu'à retourner le couteau dans la plaie. « Tu vas pas remettre la chemise à moitié trempée. Viens je vais te la sécher au sèche-cheveu » Il se reporte sur elle, fronce un peu les sourcils. Il pensait récupérer sa chemise et rentrer, sans forcément éprouver le besoin de la remettre, mais suit docilement Gabrielle dans sa salle de bain. Visiblement, ils ont tous deux du mal à prédire les réactions de l'autre. Il entre à sa suite dans la salle d'eau, cherche du regard un sèche-cheveu sans succès tandis que la brune s'occupe de pendre la chemise. « Tu peux l’attraper dans ce tiroir s’il te plait » Il suit son regard, acquiesce et se penche sur le tiroir en question. Sa main saisit la poignée et il ouvre le meuble, distraitement, se saisissant de l'ustensile qui lui saute aux yeux. Mais il n'est pas le seul à attirer son attention, et l'héritier se fige lentement alors que ses doigts se resserrent autour du manche. Au fond du tiroir, ses yeux noisettes s'arrêtent sur un collier négligemment emmêlé sur lui-même. Un bijou loin d'être bling bling, précieux et raffiné, un qui n'a pas sa place dans un coin de ce compartiment alors qu'il en reconnaît le pendentif. Qu'il en reconnaît la petite pierre taillée et mise en valeur, et qu'il ne lui faut qu'une poignée de seconde pour comprendre que ce collier est celui qu'il lui a offert pour son anniversaire il y a quelques années. « Je ne sais pas si tu mérites vraiment que je te le sèches cela dit… Peut-être que tu mériterais de rentrer comme ça jusqu’à chez toi…  » Il ne l'entend que d'une oreille, le temps semblant se figer autour de lui. Pourquoi ce collier est-il ici ? Pourquoi l'a-t-elle toujours, pourquoi n'est-il pas au fond d'un carton ? Pourquoi ne l'a-t-elle pas vendu, pourquoi ne s'en est-elle pas débarrassée ? et alors qu'il comprend qu'elle se tourne vers lui, il referme précipitamment le tiroir dans un éclair de lucidité. Le compartiment claque un peu trop vite pour que cela passe inaperçu, et il se tourne vers la brune qui croise son regard au même moment, Channing s'ornant d'un sourire de façade en brandissant l'appareil. « Trouvé. Tu disais ? » Il s'éloigne du tiroir, se penche pour brancher le sèche-cheveu et l'allume dans la foulée comme pour couper court à la moindre conversation, s'affairant lui-même à sécher le plus gros de sa chemise.

Le brouhaha dans lequel les plonge l'appareil laisse tout le loisir au Walker de réfléchir et de trouver une excuse logique à la présence du collier, mais rien ne lui vient. Gabrielle ne le porte probablement plus, et doit pourtant utiliser ce tiroir plusieurs fois par semaine... alors pourquoi ? Lorsque le textile commence à avoir meilleure mine, même s'il demeure toujours un peu humide, Channing coupe le contact et le silence tombe à nouveau dans la pièce. « Ca fera l'affaire. » concède t'il en regardant la chemise, débranchant l'appareil avant de le laisser refroidir sur le côté. Il entreprend ensuite de renfiler son haut, puis de le reboutonner progressivement  en relevant son regard vers la brune. « Est-ce que… commence t'il, avant de se pincer chastement les lèvres dans un léger mouvement de tête, est-ce qu'on partagerait pas ce fameux carré de chocolat avant que je rentre ? » propose t'il à voix basse, laissant quelques boutons désunis au niveau de son col avant de faire un pas vers la brune. « Pour terminer la soirée ? » souffle t'il d'une voix tout aussi basse, avant de venir effleurer la demoiselle pour la contourner. Ses pas sont lents, et l'héritier s'arrête dans l'encadrement de la porte pour l'attendre, le regard doux. Il est troublé.

rainmaker