| (Dinah) ♦ Jeune fille cherche canapé à louer. |
| | (#)Ven 4 Mar - 4:01 | |
| 01.03.22 Aéroport de Brisbane ft. Dinah
Premier mars 2022. Il était passé midi aux Pays-Bas, Catherine avait quitté un petit 6 degrés sous la pluie à Amsterdam. Lorsqu’elle franchit les portes de l’avion, l’air chaud de Brisbane fit virevolter une mèche rebelle de cheveux blonds. Il était 21 :36 ici en Australie. La jeune femme, en regardant sa montre en plastique rose pâle qui affichait midi et demi, réalisa soudain l’ampleur de sa connerie. L’Australie, ce n’est pas simplement quelques heures de décalage horaire. C’est aussi… les saisons inversées. Il faut dire que la petite blonde était partie dans la précipitation, presque sur un coup de tête. Elle posa une main délicate sur son ventre, tout en ôtant son écharpe – complètement inutile au vu des 24 degrés à l’extérieur du Boeing. Son esprit fit rapidement le tour de ce qu’elle avait emporté : quelques pantalons, des pulls… beaucoup de pulls. Et des sous-vêtements, quelques produits de soin. Son chargeur de téléphone. Une trousse pleine de matériel de dessin. Un carnet. Bon, okay : 4 carnets. Pas de protections hygiéniques. Elle n’en avait plus besoin. Elle avait appris sa grossesse moins d’une semaine auparavant. Une semaine. C’était le temps qu’il lui avait fallu pour réaliser, et prendre une décision. Elle devait retrouver le père de ce bébé. Gideon O’Connor, militaire et disant venir de Brisbane. Évidemment, il ne lui avait pas donné son numéro de téléphone. Elle avait commencé par le chercher sur les réseaux sociaux. En bon militaire, sa présence en ligne était inexistante – ou alors, il utilisait un pseudo. Elle avait bien essayé de contacter l’armée australienne, mais avait vite compris que personne ne lui donnerait les renseignements – apparemment suspects – qu’elle réclamait.C’est ainsi qu’elle se retrouvait dans un autre pays, elle qui n’avait jamais mis les pieds hors des Pays-Bas auparavant. Elle descendit les marches de l’avion, ôta également sa veste et suivit en silence le flot de passagers vers la zone de déchargement des bagages. Surtout, ne pas réfléchir à ce qu’elle était en train de faire. Ne pas faire le calcul. Trop tard : elle était enceinte depuis la semaine entre Noël et Nouvel An. Ça en faisait donc exactement 9. Elle pouvait avorter jusqu’à la semaine 12… (parce qu’elle n’avait pas pensé à vérifier si l’information était la même en Australie, évidemment) Ça lui laissait trois petites semaines pour trouver Gideon. Le délai était court. Trop court, elle le savait. Mais Kitty n’avait pas le choix, elle ne pouvait pas prendre cette décision seule. En attendant sa valise, elle songea à sa stratégie : elle avait cherché tous les « O’Connor » à Brisbane et prévoyait de leur rendre à tous une petite visite, afin de leur demander s’ils faisaient partie de la famille de Gideon. La tâche s’annonçait ardue. Il lui faudrait attendre le lendemain pour se mettre à leur recherche, au vu de l’heure avancée.
Une fois son bagage récupéré, la jeune hollandaise quitta l’aéroport avec le flux des voyageurs et se rendit à l’arrêt de bus. Direction, le centre. Elle s’était inscrite sur un site de couchsurfing, mais n’avait pas encore reçu de réponses aux nombreuses demandes envoyées sur ce même site, étant donné qu’elle s’y était prise à la dernière minute. En attendant, elle comptait prendre une chambre dans une auberge de jeunesse – mais c’était tout de même plus cher que le couchsurfing, qui consistait à dormir sur le canapé d’un hôte ou d’une hôtesse doté du sens de l’hospitalité. Un bus qui semblait être le bon à Kitty s’arrêta, elle monta dedans avec sa petite valise et son sac à dos, prit un billet et s’installa sur une banquette à l’arrière du véhicule. La chaleur l’accablait, elle n’était pas du tout habillée en conséquence. Elle pesta intérieurement contre elle-même d’avoir été si bête, et de n’avoir pas pensé une seconde que les saisons différaient, ici. Elle avait quelques économies, mais l’argent ne tombe pas du ciel et il lui fallait absolument éviter de tout claquer en quelques jours. Sachant qu’elle allait au moins acheter un tee-shirt ou deux, ça commençait bien… Le bus se mit en marche, elle retint un soupir et jeta un coup d’œil à son application, espérant qu’une personne aurait répondu à sa demande d’hébergement pour la semaine qui arrivait.
Dernière édition par Catherine Smet le Mer 9 Mar - 5:00, édité 2 fois |
| | | | (#)Lun 7 Mar - 13:52 | |
| C’étaient des collègues de Dinah qui lui avaient parlé de cette application. Ils disaient que grâce à ça ils avaient pu partir en voyage et découvrir d’autres cultures en rencontrant vraiment des gens qui vivaient là. La doctoresse avait d’abord été assez sceptique, s’imaginant mal se présenter ainsi chez les autres, mais ses collaborateurs avaient aussi dit que ça permettait d’accueillir des gens chez soi et… Qui serait intéressé pour découvrir la « culture australienne » ? Dinah n’avait pas vraiment d’idée de ce qui rendait les Australiens particuliers, du moins en-dehors des anciennes cultures des natifs, dont elle ne faisait pas partie.
Elle avait téléchargé l’application pendant sa pause déjeuner, commençant à scruter les annonces et à déchiffrer le fonctionnement de la plateforme avant de se faire biper pour une urgence et de se dire qu’elle s’occuperait de ça plus tard. Ce ne fut qu’une fois rentrée chez elle qu’elle sortit à nouveau son téléphone. Allongée sur son canapé, la télé affichant une émission qui ne l’intéressait pas mais dont les voix faisaient comme une présence, elle faisait défiler les annonces.
Dinah ne prenait jamais de vacances ou presque. Si elle avait eu l’habitude de ce genre de moments de repos, peut-être que son mari ne l’aurait pas quittée d’ailleurs. Elle soupira, s’apprêtant à se lever pour passer à autre chose quand elle sentit le petit corps chaud et minuscule de son chaton se glisser sur son ventre. Prozac avait le chic pour venir se caler sur elle quand elle décidait quelque chose. Elle sourit, néanmoins, laissant sa tête retomber contre les coussins avec un air attendri. D’une main, elle entreprit de caresser les poils du petit animal qui se mit à ronronner. De l’autre, elle changea d’onglet pour lire les demandes de couchsurfing sur Brisbane.
Elle n’aurait jamais cru qu’autant de gens chercheraient ça. Elle passa sur quelques profils, d’abord sans trop d’intérêt, puis l’idée fit son chemin… Ses collègues, ses rares amis, son ex-mari, tout le monde lui disait qu’il fallait qu’elle voie du monde, qu’elle ne reste pas enfermée entre chez elle et l’hôpital… Et puis, il fallait avouer que la maison était immense. Un grand salon, une grande cuisine, plusieurs salles de bain, quatre chambres, un grenier, une cave, un garage… Elle avait été achetée dans l’optique de fonder une famille. Depuis que son ex-mari était parti, Dinah n’avait même pas refait une seule tapisserie, rien n’avait changé en trois ans, comme dans une espèce de sanctuaire. Il n’y avait que sa fille qui laissait toujours un bazar différent dans sa chambre quand elle venait là. Peut-être que ça lui ferait du bien de faire entrer de nouvelles personnes ici. Peut-être que quelqu’un oserait enfin lui faire remarquer qu’elle devrait virer les photos de son ex encore accrochées au mur.
Dinah traîna encore un peu mais au fond, sa décision était prise. Elle cliqua pour accepter une demoiselle – parce qu’il était hors de question de prendre le risque de se retrouver avec un serial killer – qui cherchait apparemment un endroit où dormir le plus vite possible. Au moins, comme ça, Dinah n’aurait pas le temps de changer d’avis. Elle était parfois assez indécise et si on lui laissait trop de possibilités de revenir sur ses décisions, ça la poussait un peu à le faire. Elle frotta un peu Prozac entre les oreilles en regardant le plafond, seulement éclairée par la lumière de l’écran de la télé.
- On va avoir de la visite chaton, j’espère que tu aimes ça.
Évidemment l’animal ne se donna pas la peine de répondre. Enfin, il miaula de mécontentement quand sa propriétaire dut le pousser et se lever. Si elle avait une invitée, il fallait qu’elle aille préparer la chambre d’amis. @catherine smet |
| | | | (#)Mar 8 Mar - 5:44 | |
| Installée sur la banquette, dans un bus sans âge où l’air conditionné n’aurait clairement pas été un luxe, Kitty ouvrit son application de Couchsurfing. Elle ne s’attendait pas réellement à obtenir une réponse aussi rapide à l’une de ses demandes, ainsi quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’elle découvrit la notification qui confirmait que Dinah acceptait sa demande pour la semaine à venir ! La blondinette confirma à son tour, et reçut immédiatement l’adresse de sa logeuse-sauveuse. Un coup d’œil à son application « map » lui permit de s’assurer qu’elle était dans la bonne direction et de noter à quel arrêt elle devait descendre pour le 160 Third Avenue, à Logan City. Il s’agissait du quartier sud de la ville de Brisbane. Kitty dut changer de bus à deux reprises, elle arriva finalement dans un très joli quartier arboré de parcs où elle s’imaginait sans aucun problème les familles venir pique-niquer sous le beau soleil australien. A cette heure-ci, en revanche, il n’y avait pas grand-monde aux alentours. La blondinette se mit en marche, smartphone dans une main et valise dans l’autre, en direction de l’adresse donnée par son application. Le couchsurfing avait réellement été un choix basé sur ses finances, et non sur ses capacités sociales. Si Catherine avait dû écouter sa timidité, elle aurait opté directement pour un hôtel où elle n’aurait pas eu à partager sa chambre, ou la maison de quelqu’un. Malheureusement, on ne fait pas toujours ce que l’on veut dans la vie. Il ne restait qu’à espérer à la blondinette que son hôte ne serait pas trop intimidante.
Au bout de quelques minutes qui suffirent à lui donner vraiment chaud – rappelons qu’elle ne portait absolument pas une tenue appropriée à la saison – elle arriva devant une grande maison familiale. Une belle bâtisse, où on pouvait presque entendre les rires des enfants derrière les fenêtres. « Allez, courage » murmura la jeune femme pour elle-même, en remontant l’allée. Elle posa son doigt sur la sonnette puis attendit sagement que quelqu’un vienne lui ouvrir la porte, le cœur battant. Une belle femme brune se présenta devant elle, et Kitty fut immédiatement impressionnée par son visage aux traits délicats et son allure. Elle sourit à son hôtesse, et se présenta – bien que son profil sur l’application contenait déjà son prénom, son âge et sa ville d’origine, Amsterdam. « Bonjour, je… je suis Kitty ! Vous êtes Dinah ? » Son accent ne pouvait de toute façon pas laisser de doute quant au fait qu’elle était étrangère. « Je vous r… remercie pour votre réponse sur l’application, je sais que je m’y suis prise un peu… à la dernière minute… » ajouta-t-elle, sur un ton désolé. La hollandaise ne supportait pas l’idée de déranger les gens, mais elle s’était répété sur le trajet que si son hôtesse avait été dérangée par sa présence, elle ne se serait pas inscrite sur un site de couchsurfing pour proposer à des inconnus de squatter son canapé, ou alors elle n’aurait tout simplement pas accepté sa demande de logement. Ce petit mantra lui avait donné du courage, suffisamment pour sonner à la porte de cette charmante inconnue.
Elle suivit Dinah à l’intérieur, après ces courtes présentations. La maison était vraiment très belle, et surtout immense aux yeux de Kitty qui vivait dans un tout petit appartement depuis plusieurs années maintenant. Dire qu’il lui avait semblé grand, au regard des logements étudiants qu’elle avait d’abord habité à Amsterdam. Quelques mètres carrés, la douche dans la kitchenette, une mezzanine pour le lit… son appartement avait au moins le mérite d’avoir une salle de bain, mais peut-être cette maison en possédait-elle plusieurs ?! Kitty avait hâte de faire le tour du propriétaire, mais bien entendu elle n’aurait jamais osé le demander à Dinah. Elle remarqua également quelques photos sur les murs et se demanda immédiatement où étaient les gens présents dessus : une petite fille, un homme. Son mari, peut-être ? @Dinah Whitebird
Dernière édition par Catherine Smet le Mer 9 Mar - 5:00, édité 1 fois |
| | | | (#)Mar 8 Mar - 14:49 | |
| Dinah choisit des draps et s’empressa d’aller les installer sur le lit d’une des deux chambres d’amis, à l’étage. Dit comme ça, « deux chambres d’amis », ça pouvait paraître beaucoup évidemment – surtout quand on savait que Dinah n’était pas du genre à avoir énormément d’amis et encore moins en dehors de Brisbane. Mais la vérité, c’était que cette chambre d’amis avait été destinée à devenir une autre chambre d’enfants, que cette maison aurait dû être pleine de vie et de rires, et pas aussi déserte qu’elle l’était. La pièce était peu décorée, les murs étaient beige sauf un, vert clair, les draps étaient assortis, les rideaux de même. Quelques cadres étaient accrochés, pas vraiment personnels, simplement de quoi habiller les murs et éviter de donner l’image d’une pièce trop vide.
Elle retourna ensuite dans son salon, zappant devant la télé sans vraiment s’intéresser aux images qui défilaient. Elle pensait surtout à cette fameuse « Kitty ». Dinah, elle, n’avait pas de pseudo sur le site, elle avait simplement mis son prénom sur cette application. Elle n’avait pas trop l’habitude de s’inscrire où que ce soit, de toute façon, en-dehors peut-être de Tinder et d’Instagram. Est-ce que ça voulait dire que la fille qu’elle allait accueillir appréciait les chats ? Dinah ne savait pas si c’était lié mais elle l’espérait un peu : une invitée allergique aux chats risquait de ne pas trop apprécier la présence de Prozac, aussi mignon soit-il…
La sonnette retentit enfin, faisant sursauter la doctoresse qui bondit presque sur ses deux jambes pour se diriger vers la porte et ne pas faire trop attendre son invitée. Qui d’autre cela pourrait être, à cette heure ?
« Bonjour, je… je suis Kitty ! Vous êtes Dinah ? »
La fille était jolie, blonde, élancée et probablement un peu plus jeune que Dinah. Elle avait l’air timide, étant donné sa manière de parler, à moins que ce ne soit un mélange de son accent et du fait que l’anglais n’était sans doute pas sa langue maternelle qui donnait cette impression. La médecin sourit. Elle n’était pas non plus la personne la plus sociable qui soit, mais c’était plus parce qu’elle était réservée que timide. Elle avait l’habitude, au fond, de parler à beaucoup d’inconnus qui se présentaient dans son service. Et même de leur annoncer des nouvelles funestes, bien loin de la discussion qu’elle allait sûrement avoir avec « Kitty ».
- Oui, Dinah Whitebird, enchantée.
Dinah commença à se décaler pour éviter de coincer son invitée dehors, tandis que celle-ci s’excusait.
« Je vous r… remercie pour votre réponse sur l’application, je sais que je m’y suis prise un peu… à la dernière minute… »
Le sourire de la doctoresse s’agrandit, amusée que Kitty s’excuse pour quelque chose qui avait finalement été comme un déclencheur pour elle : elle avait accepté parce que c’était une fille certes, mais aussi parce que l’échéance était trop proche pour qu’elle se dégonfle. Elle n’osa néanmoins pas dire les choses comme ça.
- Pas de problème, ne t’inquiète pas. Je t’en prie, entre.
Elle tint la porte suffisamment longtemps pour que la demoiselle puisse entrer dans la demeure et y rapatrier sa valise, la laissant découvrir une petite entrée desservissant un grand salon et une grande cuisine qu’elle pouvait apercevoir. Il n’y avait pas de portes ici, seulement de belles arches. Une maison pensée pour être ouverte. Pour être heureuse.
- Je me permets de te tutoyer, comme on va passer la semaine ensemble, tu peux le faire aussi si tu veux, ajouta Dinah, espérant mettre Kitty un peu plus à l’aise.
Ce devait être impressionnant d’arriver comme ça chez quelqu’un qu’on ne connaissait pas du tout, dans un pays qu’on ne connaissait probablement pas non plus. Ce n’était pas difficile à deviner : si Kitty avait connu le pays elle aurait sûrement trouvé une autre adresse où dormir que celle d’une inconnue. A moins qu’elle apprécie particulièrement les rencontres, mais elle avait l’air trop timide pour ça.
- Tu peux laisser tes chaussures dans l’entrée, et je vais te faire visiter comme ça tu pourras poser tes affaires.
Après tout, la soirée était déjà bien entamée, la pauvre devait être fatiguée. Son profil faisait mention d’Amsterdam et non seulement c’était loin, mais en plus il y avait un certain décalage horaire… Elle devait être épuisée.
- Il y a la cuisine juste ici, ajouta Dinah en pointant la bonne direction, et le salon juste là.
Le salon faisait office de salle à manger et de séjour. Le canapé était si grand qu’on aurait pu y allonger plusieurs personnes sans presque qu’elles se touchent. Les parents de Dinah lui avaient transmis un patrimoine important, son métier était très bien payé, et celui de son ex-mari également. Ils n’avaient pas lésiné sur le confort de l’endroit. Dans le salon, on apercevait également deux portes, et un escalier qui conduisait à l’étage.
- Tu as déjà mangé ? Demanda la doctoresse en même temps qu’elle se dirigeait vers les escaliers pour accompagner son invitée dans sa chambre. Elle entendait son ventre gargouiller, en tout cas, et songeait à commander à manger. Ça pourrait être une idée sympa pour faire connaissance ? @catherine smet |
| | | | (#)Mer 9 Mar - 4:59 | |
| Dinah Whitebird, l’oiseau blanc. Lorsqu’on est pas anglophone de base, n’a-t-on pas tendance à tout traduire dans sa langue maternelle ? Ainsi, Reese Witherspoon devenait Reese avec sa cuillère et Tom Cruise, Tom croisière dans la tête de la blondinette, pour ne citer qu’eux. Dinah proposa à Kitty de se tutoyer, ce qui était effectivement une bonne idée dans la mesure où elles allaient passer une semaine ensemble. Elle sourit et hocha la tête, se promettant de faire de son mieux. Tutoyer les gens n’avait jamais été une évidence, pour Kitty. Ses parents lui avaient toujours répété que la politesse et le respect exigeaient un vouvoiement envers nos ainés ou les inconnus, notamment. La hollandaise songea qu’elle devrait parler à son hôtesse de sa mission, qui consistait à retrouver un mystérieux militaire qui l’avait mise enceinte… mais pas tout de suite. Elle ne voulait pas faire mauvaise impression dès les premières minutes de son arrivée chez Dinah. Kitty n’avait pas quitté sa valise, sa veste était toujours posée sur cette dernière – de même que son écharpe. Elle restait là, debout dans l’entrée, attendant qu’on lui autorise le moindre mouvement. Dinah lui proposer d’ôter ses chaussures et de la suivre pour une visite. Catherine ne se fit pas prier et se débarrassa de ses bottines. Elle portait des chaussettes dépareillées, l’une avec des licornes (rose et mauve) et la seconde avec des cornets de frites (jaune). Lorsqu’elle le remarqua, une légère teinte rouge colora ses joues et elle pesta contre elle-même : pourquoi diable était-elle partie en se précipitant ainsi ? Chercher les chaussettes assorties quand elle portait des bottines hautes lui avait toujours semblé être une perte de temps, et évidemment elle n’avait pas pensé une seule seconde qu’elle risquait de se retrouver en chaussette en face de quelqu’un. La jeune femme fut éblouie par la taille du salon, et celle du canapé. Elle pouvait aussi apercevoir une grande cuisine, qui aurait donné envie à n’importe qui de cuisiner. « C’est vraiment joli, chez vo… euh, chez toi » complimenta-t-elle, en jetant des regards dans tous les sens. L’escalier qui montait à l’étage lui faisait penser à celui dans la maison de sa grand-mère. Les deux femmes se dirigèrent vers celui-ci, tandis que Dinah demandait à Kitty si elle avait déjà mangé. Il avait beau être presque 22 heures ici en Australie, cela ne faisait jamais que 13h aux Pays-Bas et effectivement… c’était l’heure de manger. « Je dois avouer que non, pas encore… Je suis un peu décalée, par rapport à chez moi. Et… et toi ? ». Catherine avait beau avoir un accent très prononcé, elle parlait parfaitement anglais – seules quelques expressions lui échappaient. Aux Pays-Bas tous les enfants apprennent à parler anglais assez rapidement, à l’école. Rares sont les gens qui ne sont pas au moins bilingues, de ce fait.
Kitty hésita devant l’escalier, et jeta un regard vers le salon. Le principe du couchsurfing est que les gens louent leur canapé. Ici, Dinah semblait l’inviter à monter ses affaires. Dans une chambre ? Les joues rosies, Catherine dut demander une précision à ce sujet : « Euh… Dinah ? Je dois prendre mes affaires à l’étage ? ». Oui, ça ressemblait à une bête question, mais Kitty avait vraiment un doute. Si Dinah lui offrait carrément de dormir dans une chambre, ce n’était pas assez cher payé ! Kitty se promit donc d’offrir le repas du soir, puisque ni l’une ni l’autre n’avait encore mangé. Et effectivement, elle se retrouva à déposer sa valise dans une charmante chambre d’amis. Tout ici respirait l’élégance… mais aussi, étrangement, le calme. Kitty se serait attendue à une maison un peu moins magazine, un peu plus vivante peut-être ? Elle qui avait quelques tendances bordéliques pourrait toutefois très bien s’en accommoder. « C’est trop… vraiment, je ne sais pas comment vous… euh, pardon, comment te remercier pour cet accueil. Je n’en espérais vraiment pas tant… Tu permets que je t’offre le repas, ce soir ? » dit-elle à son hôtesse, tandis qu’elles quittaient la chambre pour poursuivre la visite.
Lorsqu’elles revinrent dans l’espace salon, Kitty remarqua le chaton de Dinah, attirée par un petit miaulement. Elle avait un peu peur des chats, à cause d’un évènement qui s’était produit alors qu’elle était adolescente. Il lui arrivait de travailler dans un refuge à Haarlem, le mercredi après-midi et les week-ends. Un jour, quelqu’un avait déposé une boîte en carton remplie de chatons, et la responsable de la chatterie avait demandé son aide à Catherine – qui habituellement, aidait du côté du chenil. La blondinette avait accepté, et au moment de sortir le premier chaton de la caisse… celui-ci s’était rebellé contre elle, lui avait griffé et mordu les mains, tant et si bien qu’elle l’avait lâché. Il avait fallu lui courir après dans toute la chatterie, le rattraper avait été difficile. Mais le pire, dans l’esprit de Kitty, restait – et resterait – l’état de son doigt après cet épisode : son index droit avait doublé de volume car le chaton, pas encore vacciné, l’avait mordue à la base de l’ongle. Elle avait dû prendre des médicaments pour soigner l’infection et retrouver un doigt à taille humaine. Bref, depuis cet épisode, elle se méfiait des chats. « Comment il s’appelle ? Il… il est gentil ? » ne put-elle s’empêcher de demander sur un ton légèrement inquiet. @Dinah Whitebird |
| | | | (#)Mer 9 Mar - 13:21 | |
| Dinah remercia Kitty pour son compliment. Elle n’était pas vraiment responsable de la décoration, c’était son ex-mari qui avait géré cet aspect de la maison… Tous les aspects de la maison, en fait. Il y avait sa patte partout, dans le choix des meubles, des peintures, de l’agencement. Ce n’était pas que la médecin n’avait pas voulu participer, c’était plutôt qu’elle avait toujours répondu qu’elle était trop occupée, qu’elle n’avait pas le temps, qu’elle était de garde… Jusqu’à ce qu’il la quitte. C’était bien fait pour elle, finalement, elle l’avait bien cherché en quelque sorte. En tout cas, elle ne pouvait s’en prendre qu’à elle-même.
- Non, j’ai pas encore mangé, répondit-elle à son tour alors qu’elle commençait la visite de la maison. C’était un peu bizarre de montrer les pièces à une inconnue. Heureusement, Kitty n’avait pas l’air d’une cambrioleuse ! La brune ne décrivit rien, laissant à la vacancière – elle était sûrement venue pour des vacances non ? - observer les alentours et s’approprier un peu les lieux. C’était bien assez grand pour qu’elles ne se marchent pas sur les pieds, et en même temps ça pouvait être intimidant. Dinah les imaginait très bien, chacune assise à une extrémité du canapé, sans oser se dire quoi que ce soit ou sans trouver de sujet de discussion…
« Euh… Dinah ? Je dois prendre mes affaires à l’étage ? »
Elle s’arrêta net dans les escaliers, tournant la tête vers Kitty qui ne l’avait pas encore suivie. Était-ce si surprenant que ça de l’inviter à monter ses affaires dans une chambre ? Avec autant de pièces vides ou presque, ce serait très impoli et ridicule de laisser son invitée sur le canapé malgré le nom de l’application. Ou peut-être qu’à Amsterdam il y avait une superstition qui empêchait de placer les chambres à l’étage ? Peu probable, mais assez drôle à imaginer.
- Si tu tiens vraiment à dormir sur le canapé, tu peux, mais je t’avais préparé une chambre en haut, oui.
Dinah sourit à Kitty avant de reprendre son chemin, gravissant les dernières marches de l’escalier pour arriver sur le pallier, ouvrir une des portes, et inviter la demoiselle à y entrer et au moins à déposer sa valise. Elle avait fait un long voyage pour arriver jusqu’ici, même si Dinah ne connaissait pas le nombre d’heures d’avion nécessaires.
- Tu as une salle de bain juste à côté, j’ai la mienne en bas, ajouta-t-elle en faisant demi-tour, ne sachant pas trop si elle ferait mieux de laisser un peu d’intimité à Kitty ou de lui faire la discussion – voire de lui montrer tout le reste de la maison.
« C’est trop… vraiment, je ne sais pas comment vous… euh, pardon, comment te remercier pour cet accueil. Je n’en espérais vraiment pas tant… Tu permets que je t’offre le repas, ce soir ? »
Trop ? Dinah ne voyait pas les choses comme ça. Elle s’était inscrite sur cette application pour faire quelque chose de sa grande maison trop vide, voilà tout, et il aurait été bien bête dans ces circonstances de ne pas laisser une chambre à Kitty. Elle la regarda avec une certaine incompréhension, ne voyant pas de vraie raison pour qu’elle lui dise une chose pareille.
- Si ça te fait plaisir, mais vraiment c’est rien, j’ai une grande maison ce serait bête de ne pas partager un peu.
Elles descendirent les escaliers pour retrouver un espace plus propice à la discussion : le salon. La télévision tournait encore, sur une série sans trop d’intérêt, mais le volume était assez bas pour qu’elles ne soient pas dérangées. Du moins pas dérangées par autre chose que le petit miaulement de Prozac qui avait choisi ce moment pour signaler son existence.
« Comment il s’appelle ? Il… il est gentil ? » Ah. Kitty n’avait pas l’air très rassurée et son visage paraissait démesurément inquiet comparé à la petite taille de l’animal. Dinah espérait que la présence de son petit compagnon n’allait pas trop la gêner.
- Prozac. Il est gentil oui, même s’il fait parfois quelques bêtises. Son activité favorite est la sieste – et il aime miauler pour qu’on le caresse. Tu as peur des chats ?
Dinah s’installa sur le canapé, faisant signe à Kitty qu’elle pouvait faire de même si elle le voulait. Elles avaient décidé de commander quelque chose, puisqu’elle avait proposé de lui payer à manger ce soir, autant s’asseoir et choisir tranquillement.
- Qu’est-ce que tu veux manger ce soir ? On a pas une très grande tradition gastronomique en Australie, je te préviens, mais on a de quoi commander les grands classiques.
@catherine smet |
| | | | (#)Jeu 10 Mar - 14:02 | |
| Tenait-elle vraiment à dormir sur le divan ? Bien qu’il lui ait semblé confortable lorsqu’elle l’avait aperçu, la réponse à cette question était bien entendu « non ». Ainsi, Kitty suivit Dinah dans la chambre d’amis et y déposa sa valise avec reconnaissance. Elle se dit qu’elle verrait la salle de bain indiquée par la belle brune plus tard, et la suivit tandis que Dinah lui parlait de sa grande maison qu’il serait bête de ne pas partager – tout à fait vrai. « Tu vis toute seule, ici ? » osa-t-elle demander, un peu curieuse. La timidité et la curiosité ont tendance à ne pas trop s’entendre, mais Kitty se sentait finalement assez bien en présence de son hôtesse. Elle la trouvait réconfortante, elle aimait aussi le son de sa voix. Les deux femmes descendirent au rez-de-chaussée, où Kitty s’aperçut de la présence d’un chaton nommé Prozac. « Prozac ? C’est… un bon antidépresseur, c’est ça ? » demanda-t-elle, amusée par le choix du prénom. Pas une seule seconde elle ne pensa que sa propriétaire souffrait peut-être réellement de dépression. La naïveté de Kitty n’était plus à prouver, pour ceux qui la connaissaient depuis longtemps. Ce n’était pas rare non plus qu’elle mette les pieds dans le plat, lorsqu’elle se sentait à l’aise avec les gens. Dans le cas contraire, elle restait en retrait et assez silencieuse, ce qui lui permettait de ne pas faire de bourde, puisqu’elle ne parlait pas. « Ce n’est pas vraiment que j’ai peur… disons que je me méfie d’eux », ajouta-t-elle à propos du chat. Rapidement, elle expliqua pourquoi : son expérience au refuge pour animaux en tant que bénévole, la caisse en carton remplie de chatons, celui qui l’avait mordue et griffée ainsi que son doigt qui avait doublé de volume. Tout en parlant, elle observait Prozac – qui en faisait de même – et se disait qu’il avait effectivement l’air inoffensif.
Kitty s’était installée à côté de Dinah sur le canapé, à une distance raisonnable. Pas question de s’asseoir à l’autre bout de celui-ci, mais elle ne voulait pas non plus pénétrer son espace personnel en s’asseyant trop près de la brune. Les conventions sociales, celles qui sauvaient la hollandaise, bien souvent. Il suffisait de s’y fier, de faire comme tout le monde et le tour était joué. Son hôtesse lui demanda ce qu’elle voulait manger, puisqu’il avait été décidé qu’elles dineraient ensemble. « Oh, question gastronomie, on est pas gâtés non plus dans mon pays » avoua Kitty en souriant quand Dinah lui dit que la gastronomie australienne n’était pas très riche. « Aux Pays-Bas, on mange beaucoup de choses qu’on fait frire. Des croquettes, des beignets… je ne dirais pas que c’est notre spécialité, mais c’est à ça que je pense en premier quand je pense à notre gastronomie. Du coup, ce n’est pas top non plus. Pour le repas de ce soir… pourquoi pas un chinois ? ». Elle aurait tout aussi bien pu proposer une pizza, ou même des sushis. Kitty n’était pas difficile en matière de nourriture, elle mangeait de tout. Elle essayait de faire trois repas et de ne pas grignoter dans le courant de la journée, même si c’était parfois difficile de résister. C’était son truc à elle pour garder la ligne, en plus du sport qu’elle pratiquait plusieurs fois par semaine. La natation, déjà… et le vélo, évidemment. C’était son unique moyen de transport, lorsqu’elle vivait à Amsterdam. Elle ne prenait par exemple pas le bus ou le tram, préférant toujours se déplacer sur sa bicyclette – comme bon nombres de ses compatriotes. Les jeunes femmes commandèrent leur repas, que Kitty se fit un devoir d’offrir à Dinah pour la remercier. Il ne restait plus qu’à attendre le livreur et à savourer. En attendant, elle espérait en apprendre un peu plus sur cette belle brune qui l’accueillait chez elle à bras ouverts. « Tu accueilles souvent des gens avec cette application ? » demanda-t-elle, curieuse à nouveau. @Dinah Whitebird |
| | | | (#)Ven 11 Mar - 6:09 | |
| - Ma fille sera là ce week-end, se contenta de répondre Dinah à l’interrogation de Kitty sur le fait qu’elle vivait seule.
Il y aurait eu beaucoup de choses à dire, mais elle ne connaissait pas assez cette demoiselle pour entrer dans les détails d’un mariage difficile et terminé. Il y avait les photos encore accrochées au mur, les cadres sur certains meubles… La médecin savait qu’elle devrait les enlever. Mais c’était difficile. Soit elle passait devant sans les voir, parce que ça faisait partie du décor depuis trop d’années, soit elle n’osait pas y toucher. Ce serait admettre que tout était fini, et au fond d’elle, Dinah n’était pas sûre d’être prête. Malgré les années déjà écoulées… Heureusement elle ne vivait pas tout à fait toute seule, il y avait ce bon petit chaton, Prozac. Avec un nom très bien compris par Kitty.
- Oui, c’est ça, répondit le médecin avec un sourire.
Prozac, c’était une idée bizarre. Enfin, pas le nom, le fait même de prendre un chaton était une idée bizarre. Dinah n’avait jamais eu d’animaux avant, pas même quand elle était petite. Elle avait été habituée aux grandes maisons très vides depuis son plus jeune âge. Et pourtant, quand elle en avait fini avec l’alcool, elle avait décidé de prendre un chaton comme s’il pourrait combler le vide de son existence. Le pauvre animal n’avait sans doute pas conscience de la lourde responsabilité qui pesait sur ses épaules, lui qui aimait la sieste plus que tout.
Kitty n’aurait probablement pas choisi le même animal, en tout cas, puisqu’elle expliqua à Dinah qu’elle se méfiait de ce genre d’animaux depuis une mésaventure avec une boite de chatons dont un qui l’avait mordue. Pour quelqu’un comme Dinah, médecin aux urgences et habituée à voir bien pire, cette histoire n’avait pas l’air si dramatique que ça. Mais la pauvre Kitty n’était apparemment pas de cet avis et Dinah respectait ça.
Une fois bien installées sur le canapé – ni trop éloignées ni trop proches pour que ce soit gênant – elles entreprirent de discuter de ce qu’elles allaient manger ce soir. Enfin, presque « cette nuit », vu l’heure qu’il était. Kitty expliqua en quoi consistait la gastronomie de son pays – où Dinah n’avait jamais mi le moindre orteil- mais même si elle expliquait que ce n’était pas très glorieux non plus, ça donnait envie de goûter à l’Australienne.
- Je croyais que les Pays-Bas étaient connu pour du fromage ? Genre… Du Gouda ? Mais j’imagine bien qu’on ne peut pas manger que du fromage à tous les repas. Aller, chinois, c’est parti !
Dinah dégaina rapidement son téléphone portable pour commander de quoi manger grâce à une application qu’elle utilisait assez régulièrement, le passant ensuite à Kitty pour qu’elle sélectionne aussi ce qu’elle voulait. Dinah n’aimait pas cuisiner, elle avait l’habitude de commander plutôt que de se mettre aux fourneaux. Après tout, c’était laborieux pour un résultat évaporé en une dizaine de minutes, c’était une perte de temps ! Dinah n’avait déjà pas énormément de repos avec son travail, autant ne pas le gâcher avec une activité qui ne l’intéressait franchement pas.
Tu accueilles souvent des gens avec cette application ? »
Elles n’avaient plus qu’à attendre la livraison – et donc en profiter pour discuter un peu. Ce n’étaient pas tous les jours qu’on avait de la visite et encore moins de la part d’une inconnue. Enfin, chez elle en tout cas, parce qu’aux urgences, ça lui arrivait tout le temps.
- En fait, pas du tout. C’est des collègues à moi qui m’en ont parlé ce midi et ça avait l’air sympa. J’ai une grande maison, autant que ça serve un peu.
Dinah attrapa Prozac qui passait juste à côté. Elle s’assit en tailleur et glissa le petit chat avec délicatesse dans le creux de ses jambes. Il sembla s’y plaire, et commencer à ronronner en même temps que la brune le caressait.
- Et toi ? Tu voyages beaucoup comme ça ? On m’a dit que c’était un bon moyen de découvrir la culture des pays qu’on visite, mais j’ai pas vraiment l’impression que la culture australienne soit si incroyable que ça. En vérité, je saurais même pas dire s’il y en a vraiment une. A part le surf, peut-être. Tu vas essayer ? @catherine smet |
| | | | (#)Mar 15 Mar - 16:03 | |
| Ainsi donc, l’enfant que Kitty avait vu sur les photos dans le salon de Dinah viendrait le week-end. La blondinette supposa que ses parents étaient séparés, et que par conséquent Dinah ne la voyait pas tout le temps. Mais alors, pourquoi y avait-il encore des photos de l’homme qui semblait être son père, sur le mur ? Une question qu’elle n’oserait bien entendu pas poser. Ça ne la regardait pas, après tout. Il pouvait y avoir des tas d’explications, mais la curiosité n’est pas une raison suffisante pour obtenir la bonne. La plus probable étant que la séparation était récente, et que Dinah n’avait simplement pas encore fait son deuil de la relation. Kitty pouvait comprendre, car elle aussi mettait du temps à se remettre d’une déception amoureuse. Elle n’en avait certes connue qu’une seule, mais c’était bien suffisant pour elle.
Les deux femmes s’installèrent sur le canapé, parlèrent du chaton et commandèrent à manger. Il n’y avait plus qu’à attendre leurs plats, à présent. Kitty avait choisi du bœuf à l’oignon, avec du riz sauté. Elle aimait tellement la nourriture asiatique ! Quand Dinah lui parla du fromage, réputé aux Pays-Bas, Kitty sourit. « C’est vrai, on est assez connus pour nos fromages et en particulier le gouda, mais ça ne suffit pas pour faire valoir la gastronomie hollandaise sur la scène internationale, malheureusement ». Kitty avait tellement l’habitude de ces produits laitiers qu’elle n’y pensait même plus comme étant des spécialités, mais rendons à César ce qui appartient à César ! « On est aussi reconnus pour nos belles tulipes… et les sabots de bois » ajouta la jeune femme, puisqu’elles parlaient de son pays. Elle adorait les fleurs, et voir les champs de tulipes lui procurait toujours beaucoup de plaisir lorsque c’était la saison. En revanche, elle ne faisait pas partie de ces gens qui portent des sabots ! Elle avait déjà essayé, bien entendu… mais la grande blonde trouvait que c’était extrêmement inconfortable.
Kitty demanda à Dinah si elle avait l’habitude d’accueillir des gens via l’application de Couchsurfing, et la belle brune lui répondit qu’en fait, pas du tout, car il s’agissait de sa toute première expérience. Des collègues lui en avaient parlé le jour-même, Kitty avait donc eu extrêmement de chance d’envoyer son message à peine quelques heures après l’inscription de son hôtesse sur la plateforme. « Quel bon timing ! » commenta-t-elle en souriant, réellement contente d’être tombée sur cette belle femme qui lui inspirait confiance et apaisement. Dinah lui demanda à son tour si elle était une habituée de ce mode de voyage, bien qu’elle-même ne comprenait pas l’intérêt de visiter l’Australie – à part le surf ? « En fait… c’est aussi une première, pour moi » confessa Kitty en baissant les yeux sur Prozac qui se faisait câliner près de sa maîtresse. « Je n’avais jamais quitté les Pays-Bas avant aujourd’hui et… et puis… ». Voilà qu’elle se mettait à bafouiller, quelle poisse. Kitty se mordit la lèvre et soupira, relevant les yeux vers Dinah pour l’observer. Pouvait-elle vraiment lui dire ce qui l’amenait par ici ? C’était délicat, elle n’avait encore abordé le sujet avec personne. Ni par message avec ses amis restés au pays, ni de vive-voix avec sa famille par exemple. C’était quelque chose qu’elle avait gardé pour elle tout ce temps, gardant l’existence de ce bébé quelque peu irréelle. Elle changea d’angle d’approche pour expliquer à Dinah ce qui l’amenait ici, en Australie et plus particulièrement à Brisbane. « Je ne vais pas essayer le surf, du moins je ne pense pas. Je ne suis pas sûre que j’aurai le temps, je cherche quelqu’un. Un… un homme, un militaire. Je sais juste qu’il est originaire du coin et que c’est un militaire. Il s’appelle Gideon. Gideon O’Connor ». Puis, prise par un élan d’espoir elle ajouta : « peut-être que tu le connais ? ». Elle en oublia de préciser à Dinah pour quelle raison elle cherchait Gideon mais en en parlant, elle avait posé une main distraite sur son ventre qui ne s’arrondissait pourtant pas encore. Ce geste était un indice sans le vouloir. Kitty avait toujours été mince, voir même maigre. Ce n’était pas faute de manger, mais presqu’uniquement pendant les repas. Ses parents l’avaient éduquée de sorte qu’elle ne prenne jamais cette mauvaise habitude – et cela avait fonctionné, pas de grignotage pour Catherine qui préférait le plaisir d’un bon repas. « Enfin, peut-être que si je mets rapidement la main sur lui, j’aurai du temps pour faire du tourisme. Tu fais du surf, toi ? » @Dinah Whitebird |
| | | | (#)Mer 16 Mar - 4:09 | |
| Des tulipes et des sabots de bois... Voilà qui donnait une image assez bucolique, on imaginerait presque un berger ou une bergère, assis dans l'herbe, en train de déguster du fromage... Bon d'accord, Dinah n'y connaissait rien en bergerie et en fromage, mais la description de Kitty lui faisait penser à quelque chose de ce genre. Bien loin de l'image de l'Australie à vrai dire, ce qui expliquait peut-être en partie l'intérêt que son invitée du jour pouvait trouver à venir jusqu'ici pour dormir chez une inconnue.
Kitty se félicita de leur bon timing une fois que Dinah eut répondu qu'elle ne connaissait l'application que depuis sa pause de midi, ce qui lui tira un nouveau sourire. Elle était d'accord pour dire qu'elles avaient eu de la chance de se rencontrer: Kitty avait l'air très sympathique et sa timidité apparente laissait penser qu'elle ne serait pas une colocataire désagréable pour la semaine. Dinah avait l'habitude de juger rapidement du potentiel de gêne que quelqu'un pouvait renfermer, à force de voir débarquer aux urgences des personnes parfaitement insupportables pour un rhume ou très gentille alors qu'elles devaient souffrir le martyr. Même si elle n'était pas forcément la meilleure en relations humaines de manière générale, elle savait qu'elle avait ce petit avantage né de son métier. Et Kitty passait le test haut la main.
« En fait… c’est aussi une première, pour moi. Je n’avais jamais quitté les Pays-Bas avant aujourd’hui et… et puis… »
Surprise, Dinah suspendit sa caresse à l'attention de Prozac qui, mécontent, donna un coup de tête dans la main de sa maîtresse pour qu'elle reprenne. En voyant la timidité de Kitty, Dinah avait logiquement - du moins selon elle - imaginé qu'elle devait avoir l'habitude de voyager et que ça lui avait donné envie de rencontrer "les locaux". Comment expliquer, sinon, qu'elle ait choisi de venir chez quelqu'un ? La médecin n'imaginait qu'une succession d'aventures réussies qui auraient pu la pousser à tenter cela et pourtant, Kitty était là, quittant pour la première fois son pays... Et pas pour un petit voyage en plus ! Dinah n'était pas si douée que ça en géographie mais elle en savait assez pour comprendre que Kitty avait traversé le globe avant de se retrouver dans son salon.
Mais Kitty n'avait pas fini son explication. Elle s'était mordue la langue de manière assez visible pour que Dinah le remarque, avant de soupirer et de croiser son regard comme si elle n'osait pas lui annoncer la raison de sa visite. Peut-être qu'il ne s'agissait pas de vacances finalement, ou pas tout à fait, et qu'elle avait été un peu indiscrète de poser des questions sur la venue de son invitée.
« Je ne vais pas essayer le surf, du moins je ne pense pas. Je ne suis pas sûre que j’aurai le temps, je cherche quelqu’un. Un… un homme, un militaire. Je sais juste qu’il est originaire du coin et que c’est un militaire. Il s’appelle Gideon. Gideon O’Connor. Peut-être que tu le connais ? »
Gideon, Gideon, Gideon... Dinah réfléchissait mais ce prénom ne lui disait rien. Elle avait beau côtoyer énormément de monde aux urgences elle ne connaissait pas ce militaire, et même si elle l'y avait rencontré elle n'aurait pas eu le droit de transmettre ses coordonnées à quelqu'un car ça aurait été briser le secret professionnel auquel elle était farouchement attachée. Elle aurait voulu aider Kitty pourtant. Mais il fallait aussi avouer que de toute façon, elle se souvenait souvent des visages sans être capable de leur attribuer une identité. Dinah se souvenait mieux de leurs traitements que de leurs noms.
- Non désolée, ça ne me dit rien.
Elle avait remarqué le geste presque distrait de Kitty, habituée qu'elle était à devoir lire les mouvements des corps pour comprendre ce qui leur arrivait, mais évidemment Dinah ne dit rien. Même si elle n'avait rien vu elle n'aurait rien dit. Une fille qui traversait le monde pour retrouver un homme devait être très amoureuse, très désespérée ou les deux. Ajouter un bébé dans l'équation ne changeait rien à ce constat d'après Dinah. Ce qui était surtout bizarre, c'était que Kitty ne soit pas directement allée rejoindre son petit-ami chez lui. Voilà qui laissait penser que la situation était un peu... Compliquée. Et qu'elle se passait donc de commentaires.
« Enfin, peut-être que si je mets rapidement la main sur lui, j’aurai du temps pour faire du tourisme. Tu fais du surf, toi ? »
Mettre la main sur lui ? La situation s'éclaircissait un peu plus mais elle était loin de se simplifier. Kitty était venue ici pour retrouver un homme qu'elle avait perdu de vue, et il y avait de quoi penser que ce n'était pas seulement parce qu'elle était amoureuse, mais aussi - et peut-être surtout - parce qu'il lui avait laissé un cadeau plus ou moins enviable.
- Je vois. Non, je ne fais pas de surf, je préfère le patin à roulettes pour tout te dire !
Dinah réfléchit un peu, souhaitant à la fois changer de sujet et montrer à Kitty qu'elle pourrait lui être utile, sans pour autant mettre les pieds dans le plat.
- Et, tu fais quoi dans la vie ? Finit-elle par demander, à la fois curieuse de savoir quel genre de travail lui laissait le temps de se rendre jusqu'en Australie à la recherche d'un militaire et désireuse de lui annoncer le sien, qui pouvait être rassurant quand on débarquait apparemment sans personne, enceinte, dans un pays inconnu. Enfin, peut-être que tout se passerait bien, qu'elle retrouverait son Gideon, et qu'ils formeraient une heureuse famille. Dinah le souhaitait à Kitty mais avait du mal à y croire, pour être honnête. Elle formerait une heureuse famille avec son bébé si elle décidait de le garder, mais probablement pas avec Gideon. Il y avait peu de chances, en tout cas. Moi, je suis médecin urgentiste.
@catherine smet |
| | | | (#)Ven 18 Mar - 13:51 | |
| Évidemment, Dinah ne connaissait aucun Gideon O’Connor. Brisbane était une grande ville, et la probabilité pour que la première personne avec qui Kitty avait une vraie conversation le connaisse était proche du zéro absolu. La jeune hollandaise changea rapidement de sujet, préférant enchaîner sur le surf et le tourisme afin de ne pas entrer dans les détails avec son hôte. Elle n’avait encore parlé de sa grossesse à personne, et c’était très bien ainsi. Pour l’instant, du moins. Elle se doutait que Gideon ne serait pas le premier à qui elle pourrait le dire, puisqu’elle n’avait pas son numéro ou même un email. Toutefois, elle espérait parvenir à joindre quelqu’un qui le connaîtrait. Un parent, avec un peu de chance. C’est pourquoi elle avait prévu de contacter tous les O’Connor de Brisbane. Bref, quand elle changea de sujet, Dinah la gratifia d’un je vois que Kitty ne releva pas. Elle ne se demanda pas ce que la belle brune voyait, au juste… ne se doutant pas un seul instant qu’elle avait deviné son état très facilement. Le langage corporel ne trompe pas. Surtout pas un médecin ! Et puis, sa meilleure amie d’enfance passait son temps à ponctuer ses phrases de l’expression « tu vois », et Catherine n’avait jamais rien vu. Elle était habituée à ce qui ressemblait à ses yeux à un tic de langage. Dinah lui parla de patins à roulettes, ce qui fit sourire Kitty. « Quand j’étais adolescente, mes amies et moi on allait de temps en temps dans une salle de roller dance. Je n’étais pas très douée, mais j’en garde de bons souvenirs » commenta-t-elle, songeant que ça faisait probablement une éternité qu’elle n’avait plus chaussé de patins à roulettes – ou même à glace. Ces salles étaient pourtant si chouettes, avec leurs lumières psychédéliques et la musique assourdissante.
Lorsque la brune demanda à Kitty ce qu’elle faisait dans la vie, la grande hollandaise fut tentée de lui dire qu’elle faisait ce qu’elle pouvait. Cette question l’avait toujours un peu perturbée, quand il s’agissait de parler du travail. Parce que c’était étrange de résumer toute sa vie en fonction de son travail, non ? A moins peut-être que le travail prenne tellement de place qu’il en devienne la quasi-totalité d’une vie, bien sûr. Mais ce n’était pas du tout comme ça que Kitty voyait les choses. Elle n’avait jamais pensé qu’on puisse mêler plaisir et travail, en vérité. C’était surtout alimentaire, et obligatoire. Parce que pas question d’être un poids pour la société. « Avant de quitter les Pays-Bas, j’étais commerciale la journée et barmaid presque tous les soirs » répondit-elle donc poliment, comme une jeune femme bien élevée. « J’ai démissionné en partant, je ne savais pas combien de temps j’allais rester ici alors… ». Elle haussa les épaules, en ayant presque l’air de s’excuser pour ce qu’elle osait dire. Elle savait que le travail était important aux yeux de beaucoup de gens, et qu’ils pensaient que ça révélait beaucoup de choses sur la personnalité d’une personne. Encore une chose qui n’était pas vrai, aux yeux de la blonde : elle avait beau avoir été commerciale, elle n’avait absolument aucun bagout – ce qui la rendait peu douée dans ce travail, sans parler de sa timidité. Quant à son travail de barmaid, il ne révélait pas un possible amour de l’alcool ou des sorties, ni même une aisance en société, une sociabilité hors norme ou l’absence totale de timidité. A-li-men-tai-re. « Et toi ? » retourna-t-elle à Dinah, un peu curieuse mais aussi polie. La brune lui révéla qu’elle était médecin urgentiste, ce qui impressionna Kitty. « C’est vrai ?! Ce métier doit vraiment être éprouvant ! » Ce n’était clairement pas quelque chose qu’elle aurait pu faire, déjà parce qu’elle aurait été incapable de faire d’aussi longues études, probablement très compliquées mais aussi et surtout parce qu’elle n’était pas très à l’aise avec le sang, les blessures et autres trucs un peu dégoûtants à ses yeux. Dinah devait en voir des vertes et des pas mûres, surtout aux urgences. « Qu’est-ce qui t’a donné envie de faire ce travail ? »
Tout à coup, alors que les deux femmes discutaient, la sonnette retentit. Le repas était arrivé, pour le plus grand plaisir de Kitty qui commençait vraiment à avoir faim. Elle espérait qu’il y aurait des baguettes, car elle n’aimait pas manger asiatique avec une fourchette.
@Dinah Whitebird |
| | | | (#)Ven 18 Mar - 16:28 | |
| « Quand j’étais adolescente, mes amies et moi on allait de temps en temps dans une salle de roller dance. Je n’étais pas très douée, mais j’en garde de bons souvenirs »
Du roller-dance… Dinah adorait ce genre de salles. Elle n’y allait pas souvent et pratiquait le plus généralement ses talents au skatepark non loin, dans le parc du quartier, mais elle adorait. C’était toute une ambiance, et pas seulement le plaisir de faire du patin. Il fallait essayer pour le savoir. Et Kitty faisait partie des gens qui avaient essayé.
- Eh bien si tu veux en faire par ici, j’ai une bonne adresse, répondit Dinah.
Si elles s’entendaient bien cette semaine, peut-être qu’elle lui proposerait d’y aller toutes les deux. Cependant, Dinah était une femme très occupée et elle avait appris, depuis le départ de son ex-mari, qu’il valait ne pas faire de propositions qu’on n’était pas certain de pouvoir tenir, comme celle, par exemple, de se dégager du temps libre. Elles verraient ça au jour le jour, et puis, peut-être que Kitty n’aurait même pas envie de faire du patin à roulettes avec elle. Alors Dinah revint sur un sujet qu’elle maîtrisait mieux et qui, qui sait ?, serait peut-être utile à Kitty un de ces jours, si elle avait besoin d’aide pour naviguer dans le système de santé australien. Le travail.
« Avant de quitter les Pays-Bas, j’étais commerciale la journée et barmaid presque tous les soirs »
Il n’était pas difficile de voir que Kitty ne tirait aucun orgueil de ses précédents emplois. A vrai dire, c’était presque comme si elle en avait honte plutôt qu’autre chose. Elle ne devrait pas. Pour Dinah, le travail était quelque chose de très important, c’était la pierre angulaire de sa vie, mais elle savait très bien que ce n’était pas comme ça pour tout le monde. Elle savait que ça ne devrait pas l’être. Elle savait que si ses parents n’avaient pas autant travaillé, elle les aurait vus vraiment, ils auraient passé du temps ensemble, ils auraient pu tisser des liens au lieu de se disloquer et de ne jamais se reparler, non pas parce qu’ils se haïraient, mais tout simplement parce qu’ils n’avaient rien à se dire. Elle n’aurait peut-être pas gâché son mariage. Elle ne craindrait pas de perdre l’amour de sa fille. Le travail disait effectivement quelque chose du caractère des gens, d’après elle, mais pas de la manière dont on pourrait le penser.
- Tu as bien du courage.
Kitty était terriblement timide, mais elle avait été commerciale. Dinah n’était pas du genre à se dire qu’elle avait dû être mauvaise, mal choisir ses études, prendre n’importe quel travail, non. Elle était du genre à trouver ça courageux et déterminé. Elle avait eu deux métiers, le jour et le soir, elle avait probablement travaillé autant ou presque que Dinah en nombre d’heures par semaine, dans deux métiers qui n’avaient pas l’air d’avoir un quelconque rapport avec une quelconque passion. Kitty était courageuse. Et Dinah ne pourrait jamais faire comme elle. Peut-être à cause de son ancienne addiction à l’alcool.
« J’ai démissionné en partant, je ne savais pas combien de temps j’allais rester ici alors… »
Ah, c’était donc du sérieux avec ce Gideon ? Kitty aurait pu venir ici pour décider quoi faire de son – de leur – enfant, et repartir. Elle aurait pu se donner comme date limite celle d’un avortement. Ou n’importe quelle autre date, finalement, elle aurait pu choisir de rentrer chez elle quand elle le voudrait, elle aurait pu prendre un billet retour pour Amsterdam et se dire qu’elle ferait ce qu’elle pouvait jusqu’à cette date, avant de retourner chez elle. Mais elle ne l’avait pas fait, apparemment. C’était vraiment très téméraire, un peu étrange aussi pour Dinah qui se garda bien de faire un seul commentaire là-dessus. Elle n’allait pas dire à Kitty comment mener sa vie. Ce n’étaient pas ses affaires.
Évidemment, Kitty lui retourna la question et l’urgentiste répondit sans se cacher – ça avait un peu été son but d’en venir à cette partie de la conversation, même si Dinah n’était pas du genre à tout faire tourner autour d’elle. Elle ne s’attendait pas à l’impressionner, néanmoins, aussi l’enthousiasme de la réponse la surprit un peu.
« C’est vrai ?! Ce métier doit vraiment être éprouvant ! »
Dinah traînait surtout avec ses collègues, c’est-à-dire avec des gens qui ne trouvaient rien d’impressionnant à avoir fait des études de médecine, qu’elles soient assez longues pour être médecin ou plus courtes, pour devenir infirmier par exemple. Elle en oubliait parfois que le commun des mortels ne faisait pas plus de 8 ans d’études avec des stages sous-payés et des gardes de 36h, et qu’ils avaient donc tendance à les trouver un peu bizarres. Ou du moins légèrement différents.
« Qu’est-ce qui t’a donné envie de faire ce travail ? » Ajouta Kitty.
Vaste question. Drew lui avait demandé récemment pourquoi s’être spécialisée dans les urgences, mais cela faisait un moment que personne ne lui avait demandé plus largement pourquoi elle faisait ce métier. La question ne s’était juste jamais vraiment posée.
- J’avais envie d’aider les gens. C’est un peu cliché j’imagine ! Répondit Dinah en riant un peu.
Il y aurait en réalité beaucoup de choses à dire sur ce choix, mais rien qu’elle oserait vraiment détailler à une inconnue. Elle avait voulu aider les gens et on l’avait remerciée en la laissant tomber parce qu’aider les gens c’était chronophage. Elle n’eut cependant pas besoin de se creuser la tête longtemps pour savoir quoi ajouter, étant donné qu’on sonna à la porte. Dinah se leva rapidement et se dirigea vers l’entrée pour récupérer leurs commandes. Il était tard, le livreur devait avoir hâte de rentrer chez lui et l’urgentiste lui laissa un joli pourboire – dont elle ne parlerait sûrement pas à Kitty qui s’était sentie obligée de payer le repas quand elle avait appris qu’elle aurait une chambre.
- A table ! Annonça Dinah en approchant, déposant le sac rempli de bonnes choses sur la table de la salle à manger. Elle commença à fouiller dedans, sortant les différents contenants et essayant de les disposer en fonction de la personne qui comptait les manger. Après avoir tout bien installé, elle prit aussi le temps d’aller leur chercher des verres – il ne fallait jamais boire directement à la cannette ! - avant de s’installer sur une chaise. Bien évidemment, elle avait déjà invité Kitty à faire de même. Eh bien, à ton séjour ici ! Et encore merci pour le repas. Poursuivit-elle en levant son verra rempli de soda à l’orange pour « porter un toast ». Et si jamais tu as besoin de passer quelques jours de plus ici ça me gêne pas, hein.
Kitty était sympa et même si elles ne se connaissaient pas assez pour savoir si elles feraient de bonnes colocataires, Dinah n’allait sûrement pas lâcher dans la nature une jeune fille enceinte qui ne connaissait personne et qui venait de mettre les pieds sur le continent. Si Kitty restait deux semaines au lieu d’une, ce ne serait un drame pour personne. A vrai dire, Dinah n’avait aucune idée de ce qu’elle pourrait faire et qui pourrait lui donner envie qu’elle s’en aille. A moins peut-être de la priver de sommeil.
- Et, quand tu auras trouvé ton Gideon… Tu comptes rester ici ?
Pas question de mentionner un seul enfant avant que Kitty en ait parlé elle-même, mais ça ne voulait pas dire qu’elles ne pouvaient pas discuter quand même… A moins que la jeune voyageuse n’en ait vraiment pas envie. @catherine smet |
| | | | (#)Mar 22 Mar - 17:21 | |
| Faire du roller avec Dinah ? Pourquoi pas, si elle trouvait le temps entre ses recherches de Gideon et d’un travail ! En tout cas, la perspective emballait la blondinette, qui sourit à la belle brune et lui confirma que c’était une super idée. Elles parlèrent ensuite de leurs travails respectifs – enfin, avant que Kitty ne quitte le pays – et la blonde comprit assez vite que Dinah et elle n’avaient pas la même façon d’envisager leur travail. Il fallait de la passion pour être médecin urgentiste, de l’avis de Catherine. Il fallait aussi un énorme investissement, ce n’était un secret pour personne que les médecins des urgences ne comptaient pas leurs heures. Du courage ? Oui, peut-être leur en fallait-il à toutes les deux… mais Kitty n’avait jamais envisagé les choses sous cet angle. Elle n’allait pas au travail en traînant les pieds, c’était une chose qu’elle se devait de faire et elle le faisait. Ses parents avaient pourtant essayé de lui inculquer d’autres valeurs, peut-être les mêmes que Dinah ? Mais c’était l’une des rares choses pour lesquelles ils avaient échoué. Jamais Kitty ne verrait un travail comme un but en soi, une passion ou un plaisir. Du moins, c’est ce qu’elle pensait à l’heure actuelle, du haut de ses 26 ans. L’envie d’aider les gens n’était pas si clichée que ça, car sans cette envie Catherine était persuadée que la belle brune n’aurait pas été un bon médecin. Comment peut-on bien faire un travail en lien avec la santé / la vie des gens, si on n’est pas animé par une réelle envie de les aider, voir même de les sauver ?
Les jeunes femmes n’eurent pas le temps d’en discuter davantage car le livreur s’annonça à la porte et Dinah invita ensuite Kitty à se joindre à elle à table, ce que la blondinette fit sans se faire prier – elle avait à présent vraiment faim. Normalement, elle aurait bu directement à la cannette mais puisque Dinah avait pris la peine de ramener des verres, elle ne se posa pas la question et imita son hôte, pour finalement trinquer avec elle. « Oh, ce… c’est rien, encore merci à toi pour l’accueil ! A mon séjour ! » sourit la hollandaise, espérant que tout se déroulerait selon ses plans. Dinah lui dit que si elle avait besoin de rester quelques jours en plus, ce n’était pas un souci. Une information qui fit rosir Kitty, elle ne voulait pas abuser de l’hospitalité de son hôte. « Merci, c’est… c’est vraiment gentil ! » Elle savait qu’elle devrait rester plus d’une semaine, mais elle ne pouvait définitivement pas s’incruster comme ça chez la belle médecin, aussi gentille soit cette dernière. Ce n’était vraiment pas poli. Du moins, c’est ce qu’elle pensait à l’instant T, bien loin de se douter qu’elle avait eu énormément de chance de tomber sur Dinah via l’application de Couchsurfing. Rares y étaient les gens qui proposaient des chambres, ceux-là optaient plutôt pour un site comme Air BNB où ils pouvaient faire payer plus cher les visiteurs – ce qui était normal. Elles entamèrent le repas, et Dinah demanda à Kitty si elle comptait rester une fois qu’elle aurait trouvé son Gideon. Si seulement les choses pouvaient être aussi simples… mais il n’était pas son Gideon, il ne l’avait jamais été. C’était seulement un gars qui avait croisé sa route un soir, pour qui elle avait certes complètement craqué mais qui avait disparu tout aussi vite de sa vie qu’il y était entré. « Je ne pense pas » répondit-elle alors en toute honnêteté, « je ne sais même pas s’il vit toujours à Brisbane, s’il a de la famille ici… et encore moins si j’arriverai à les retrouver, lui ou quelqu’un qui pourra me permettre d’au moins lui passer un coup de fil ». C’était compliqué de répondre à la question de Dinah, tout en restant suffisamment vague pour ne pas prononcer les mots fatidiques à haute voix. La jeune femme glissa une bouchée entre ses lèvres et savoura, c’était bon – peut-être pas autant que dans son restaurant préféré, mais suffisamment pour qu’elle ne regrette pas son choix. « Je n’ai jamais envisagé de vivre ici, je voulais juste… des réponses ». Ou du moins, une réponse : voulait-il un enfant ? Si pas, était-il ok pour l’adoption ? Peut-être était-il contre l’avortement ? Elle, elle essayait de ne pas trop y penser. Était-elle pour ou contre ? … le droit de disposer de son propre corps lui semblait être une bonne piste de départ pour y réfléchir. La blonde soupira discrètement. Et si Gideon voulait d’un enfant, et qu’elle se rendait compte que ce n’était pas son cas ? Qu’elle n’était pas prête pour ce sacrifice ? En était-ce vraiment un ? En naissant, elle avait réalisé le plus grand rêve de ses parents, mais elle ? Kitty était encore jeune, elle ne s’était jamais projeté dans la vie – que cela soit au niveau de son travail, ou de sa vie privée. Jamais elle n’avait envisagé une vie avec une maison, un mari, un grand jardin avec un chien et des enfants qui y jouent. C’était difficile pour elle de se projeter, surtout sans avoir l’avis de Gideon. Elle songea alors que Dinah était médecin, et que peut-être elle pourrait répondre à quelques-unes de ses questions. Elle essaya donc d’être discrète en lui en posant une, l’air de rien… le nez plongé dans son plat de bœuf aux oignons. « Dis-moi, Dinah ? Euh… je… j’ai… j’aimerais savoir, puisque tu es médecin… si ce n’est pas indiscret, évidemment ! Hm, tu dois parfois pratiquer des avortements aux urgences ? » A peine les mots eurent-ils franchi les lèvres de la blonde qu’elle se rendit compte que sa question n’avait rien de discrète, elle sentit aussi ses joues se colorer à la chaleur de celles-ci, et songea qu’elle était vraiment idiote d’avoir posé la question comme ça. Ne pouvait-elle pas faire comme tout le monde et chercher des avis sur Google ? @Dinah Whitebird |
| | | | (#)Mer 23 Mar - 16:25 | |
| Kitty avait l’air assez défaitiste. Dinah avait de plus en plus de mal à cerner ce qui l’avait vraiment poussée à venir jusqu’ici alors qu’elle n’avait visiblement pas la moindre idée de ce qu’elle allait trouver. Elle avait quitté son travail, elle avait traversé le monde, tout ça pour un homme qu’elle n’était même pas certaine de pouvoir croiser. La brune commença à manger son plat, profitant que ce soit encore chaud, tandis que son invitée ajoutait qu’elle recherchait simplement des réponses.
L’urgentiste trouvait qu’elle s’impliquait beaucoup pour un homme qui n’avait pas l’air d’occuper une place si importante que ça dans sa vie – du moins jusqu’à maintenant. Elle, elle ne se serait pas donné cette peine. Elle aurait gardé le bébé si elle en avait eu envie, elle aurait avorté si sa situation lui semblait mieux ainsi, elle n’aurait pas cherché à savoir quoi que ce soit de l’avis d’un homme s’ils ne se connaissaient même pas assez pour qu’elle ait son numéro. Enfin, peut-être que Kitty n’était pas vraiment décidée et qu’elle comptait sur cette rencontre pour choisir ? Dinah avait un peu peur que la pauvre fille tombe de haut. Comment réagirait un homme à ce genre d’annonce, de la part d’une fille qu’il n’avait pas l’air de côtoyer vraiment ? Elle ne jugeait pas son invitée, bien au contraire, elle s’inquiétait plutôt de ce qui allait lui arriver à présent.
« Dis-moi, Dinah ? Euh… je… j’ai… j’aimerais savoir, puisque tu es médecin… si ce n’est pas indiscret, évidemment ! Hm, tu dois parfois pratiquer des avortements aux urgences ? »
Dinah ne releva pas la tête de son plat mais elle releva les yeux, apercevant alors les joues rouges de Kitty qui continuait à manger sans croiser son regard. Elle avait vu juste : la demoiselle attendait un… Événement. Elle n’aurait pas osé le qualifier d’heureux ou de malheureux dans ces circonstances. La brune essaya de répondre de la manière la plus neutre possible, comme si ça n’avait aucun lien avec la situation de Kitty. Mais elles savaient bien, toutes les deux, que ça avait au contraire tout à voir avec sa situation.
- La plupart des femmes qui désirent avorter prennent rendez-vous, elles se rendent donc directement dans d’autres services, et j’en croise rarement. J’en ai déjà rencontré et accompagné, quand même, mais c’était plutôt des femmes qui venaient aux urgences pour autre chose et qui apprenaient là qu’elles étaient enceinte. Il y a aussi celles qui subissent des accidents graves, et qui ne peuvent pas avoir leur enfant… Mais c’est pas vraiment la même chose.
Elle avait sûrement déjà croisé plus de femmes qui cherchaient une pilule du lendemain que de femmes qui souhaitaient avorter. Les urgences n’étaient pas l’endroit qui leur venait à l’esprit directement quand elles avaient besoin de ce genre de choses, même si Dinah était une médecin comme une autre, c’est-à-dire à même de les aider, même si ça ne rentrait pas exactement dans la définition habituellement retenue d’une urgence médicale : personne n’avait sa vie en jeu. Du moins, pas au sens médical.
Dinah prit le temps de manger une nouvelle bouchée de son plat, assez tranquillement, laissant à Kitty le temps d’assimiler ce qu’elle avait dit. Elle reconnaissait, néanmoins, que si la demoiselle avait abordé le sujet c’était sans doute plus parce qu’elle envisageait la possibilité d’avoir besoin d’aide pour ça, si c’était la décision retenue. Alors elle finit par ajouter quelque chose, repoussant inconsciemment son plat comme pour indiquer qu’il était l’heure de discuter… Comme si ce n’était pas déjà ce qu’elles faisaient jusque là.
- Tu sais, j’ai pas de conseils à te donner, ça me regarde pas. Mais si jamais tu as besoin d’aide, hésite pas.
Dinah était médecin elle-même, mais en plus de ça elle connaissait plus ou moins tous les médecins du St Vincent’s Hospital. Elle saurait quoi faire si Kitty se décidait pour cette option… Et si elle se décidait pour une autre option aussi, d’ailleurs, à moins qu’elle rentre à Amsterdam et qu’elle ait son bébé là-bas. Dinah lorgna sur son plat, qu’elle avait bien envie de reprendre et de terminer, mais elle préférait tout de même attendre que Kitty lui réponde pour éviter qu’elle prenne sa proposition à la légère. Elle était très sérieuse. @catherine smet |
| | | | (#)Mer 23 Mar - 17:25 | |
| Dinah releva à peine les yeux vers son invitée, mais Catherine comprit immédiatement qu’elle en avait – déjà – trop dit et que la belle brune assise en face d’elle n’était pas née de la dernière pluie. Peut-être que ça aurait été plus discret si elle avait posé ce genre de question à quelqu’un qui ne travaille pas dans le domaine de la santé. Toutefois, l’Australienne fit semblant de ne pas avoir saisi et lui répondit très professionnellement. Kitty la regarda avec reconnaissance, se rendant compte de la chance qu’elle avait eue de tomber sur elle via l’application. En plus, sa question était idiote. Elle le savait, mais Dinah faisait comme si de rien n’était et pour ça, la blonde avait vraiment envie de lui sauter au cou pour la remercier. « Je… je vois, m… merci » répondit-elle, en touillant dans son plat de bœuf aux oignons. Ensuite, elle but une gorgée de sa boisson pour se donner une contenance. Était-ce le moment de parler de la météo ? Définitivement pas ! Kitty ne savait plus quoi dire.
Heureusement, Dinah repoussa son assiette et planta ses yeux dans ceux d’une Kitty dans ses petits souliers. Elle avait l’impression d’être une enfant face à une femme qui connaît la réalité de la vie, qui sait aussi ses difficultés. La brune lui dit qu’elle n’avait pas de conseils à lui donner mais que si elle avait besoin d’aide, elle ne devait pas hésiter. Kitty hocha vigoureusement la tête en sentant ses yeux se remplir de larmes. Elle était étrangement émue, et beaucoup trop sensible. Peut-être parce qu’elle était loin de chez elle, peut-être parce qu’elle n’avait plus d’argent pour retourner dans son pays aux tulipes et aux fromages… ou peut-être tout simplement parce qu’elle était enceinte. Les hormones, elle ne savait même pas à partir de quel moment elle était supposée les ressentir, ni même si on ressent les hormones, ou plutôt leurs fluctuations. « M… merci, Dinah. Merci, vraiment. J’ai beaucoup de chance d’être arrivée jusqu’à toi » dit-elle, en frottant ses grands yeux bleus pour ôter les larmes qui s’y étaient glissées.
« Gi… Gideon, c’est lui qui… tu sais… », et elle désigna du doigt son ventre – encore incapable de prononcer ces mots tout haut. « Je ne le connais même pas, je ne sais pas ce que j’ai cru en venant jusqu’ici… mais je ne peux pas prendre cette décision toute seule ». Et bien entendu, elle parlait de l’avortement. Ou de l’adoption. Comment peut-on décider du sort d’un petit être, seule, alors qu’on a rien vécu dans la vie, alors qu’on est presque encore une enfant soi-même ? Bien sûr, elle avait 26 ans… déjà 26 ans. Mais dans sa tête, Catherine se sentait encore comme une enfant par moments, souvent comme une adolescente. « Qu’est-ce que ça fait, d’être mère ? » Une question indiscrète. Mais elle avait besoin de savoir, savoir si elle en serait capable. Et si oui… si elle pourrait assumer un enfant, seule aussi. Ne valait-il pas mieux être une mère génitrice pour un enfant qui a besoin d’une famille, et offrir le plus beau des cadeaux à deux personnes qui s’aiment et qui ne peuvent pas avoir d’enfant ? L’enfant lui en voudrait peut-être… ou pas. Comment pouvait-elle le prédire ? Elle se rendait compte qu’elle parlait déjà de lui – ou elle – comme d’un enfant, alors avorter ? En serait-elle capable ? Trop de questions se bousculaient dans sa tête.
@Dinah Whitebird |
| | | | | | | | (Dinah) ♦ Jeune fille cherche canapé à louer. |
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