when the rain begins to fall
Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell
♫ allez hop

« - et cet été, je vais faire un stage de deux mois à la direction marketing d’une succursale de Michael Hills. » Fière comme un paon, j’étale ma réussite auprès de mon professeur d’économie, venu chaperonner le bal de fin d’année. Cet été sera mon dernier en tant que lycéenne puisque j’entamerai après ça ma dernière année au lycée. J’ai hâte d’évoluer dans un monde d’adulte, hâte de prendre mon indépendance et de laisser derrière mon irritante petite sœur que mes parents m’obligent à traîner derrière moi comme un boulet. La dernière en date ? ”Raelyn, emmène Spencer avec toi au bal de fin d’année, elle n’a pas de cavalier.” Peut-être, mais moi il se trouve que j’en ai un, Amos Taylor, quaterback de l’équipe de football américain du lycée, futur roi du bal de promo et moi, cela va sans dire, je serai sa reine. Alors je n’ai pas prévu de me coltiner Spencer toute la soirée. Ma soeur est mon opposée. Je suis féminine, populaire, obsédée par l’idée d’être appréciée de tous et addict aux couleurs vives.

Ce soir, je porte une magnifique robe rose pâle en satin, alors que ma soeur est triste à pleurer, comme d’habitude. Le professeur d’économie m’adresse toutes ses félicitations, avant de s’éclipser et moi, je fais volte face pour lancer un regard noir à ma cadette. « C’est pas parce papa et maman ont insisté pour que je t'emmène que t’es obligée d’être collée à moi toute la soirée. T’as pas des potes à aller  emmerder plutôt que moi ? » J’adresse un signe de la main et un grand sourire à mon petit ami qui, au loin, me fait des grands gestes. « T’as pas intérêt à me gâcher la soirée. » Puisque ce soir, c’est le grand soir. Ce sera notre première fois à Amos et moi. J’ai dit aux parents que je dormais chez mon amie Ariane, qui est dans la combine et supposée me couvrir. « Et c’est quoi cette robe ? Tu pouvais pas faire un effort ? Tu veux vraiment me foutre la honte ? » Juste ciel, heureusement que les votes pour la reine et le roi du bal sont scellés depuis le début de la semaine.

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Pas vraiment une surprise pour qui que ce soit, Spencer n’est pas le genre de personne qui fonctionne bien en société. Et autant dire qu’elle déteste être ici ce soir. “Allez, fais un effort, ça sera amusant tu verras.” avait dit Rose. “Ce n’est pas tous les jours que tu as l’occasion de sortir t’amuser.” avait insisté Jeremiah. Sauf qu’une soirée dansante dans une salle bondée de monde où chacun essaie à sa façon de faire rentrer de l’alcool sans se faire griller par les professeurs, c’est pas tellement sa définition d’une soirée fun. Sauf que voilà, la seule personne avec qui elle voudrait se trouver maintenant est en voyage à l’autre bout du pays pour voir de la famille et tout la fait chier au plus haut point. Heureusement qu’ils se rattrapent sur la musique. Ça enchaîne les tubes de Michael Jackson et de Cyndi Lauper, quelques chansons qu’elle ne connaît pas et qui sont assez sympa, mais rien de tout ça n’est suffisant pour tromper son ennui.

Alors elle se retrouve là, non loin de sa sœur qui minaude avec un professeur, et forcément, elle ne peut s’empêcher de rouler des yeux. Blablabla, regardez mon succès monsieur, je suis destinée à de grandes choses et je fais mieux que les autres. Ca la fait rouler des yeux et elle ne fait même pas d’efforts pour réprimer ses soupirs. Le prof se tire, elle lui offre un sourire forcé et se planque à moitié derrière son gobelet en plastique pour éviter qu’il ne lui parle aussi. Parce que s’il le fait, ça sera pour lui rappeler son devoir en retard d’au moins une semaine. A peine a-t-il fait trois pas que Raelyn se retourne, l’air irrité réservé uniquement pour sa cadette accroché au visage. « C’est pas parce papa et maman ont insisté pour que je t'emmène que t’es obligée d’être collée à moi toute la soirée. T’as pas des potes à aller emmerder plutôt que moi ? » elle fait mine de réfléchir et fait non de la tête. « Ils ont eu la bonne idée de pas venir. » elle raille en soupirant pour la énième fois. C’est un truc de popular kid, le bal. Pas le genre d’endroit où les marginaux dans son genre se complaisent. Elle les envie un peu, les absents. « T’as pas intérêt à me gâcher la soirée. » « Fais gaffe de pas tomber enceinte quand même, parce que ça c’est l’genre de truc qui te gâche plus d’une soirée. » qu’elle dit en terminant son verre. Elle n'est pas bête, la cadette. Elle a bien vu le petit manège de Raelyn avec son petit copain et elle sait comment ça se termine, les bals de fin d’année. « Et c’est quoi cette robe ? Tu pouvais pas faire un effort ? Tu veux vraiment me foutre la honte ? » Spencer hausse les épaules d’un air désinvolte. Elle a opté pour une robe noire et ses habituelles Dr. Martens, le tout allant parfaitement avec sa couleur de cheveux du moment,. Bon, elle a plutôt l’air parée pour un enterrement que pour un bal de promo, mais c’est pas important. « Ça va, lâche moi un peu. » qu’elle râle de nouveau. « J’vais pas monter sur le podium avec toi hein, respire un coup. » nan, mais ça sera sûrement le moment qu’elle choisira pour se tirer de cet enfer.

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« Ils ont eu la bonne idée de pas venir. » A mes yeux, il est préférable d’être morte et enterrée que de rater le bal de promo. Je passe toute l’année scolaire à penser à la robe que je mettrai, aux chaussures qui iront le mieux avec et à la fleur qu’Amos m’offrira pour accrocher à mon poignet. Je travaille sur ma campagne pour être élue reine du bal pendant des mois entiers et, jusque-là, ça a fonctionné. Je me revois encore l’an dernier, coiffée du diadème brillant. Spencer n’était pas là, cette fois-là. Elle avait prétendu être malade et j’avais pu passer la meilleure soirée de toute ma vie. Sauf que celle-là, il est prévu qu’elle soit encore mieux, alors je n’ai aucune intention de la laisser tout gâcher. « Et bein fais-toi-en d’autres. C’est quand même pas si compliqué d’être agréable. » Pour ma petite sœur, rien n’a l’air plus dur. A part peut-être s’habiller avec goût.

« Fais gaffe de pas tomber enceinte quand même, parce que ça c’est l’genre de truc qui te gâche plus d’une soirée. » Je lui jette le regard le plus noir que j’ai en stock, celui qui détonne le mieux avec le rose autour de mes jolis yeux verts. « T’as dit quoi là ? » M’a-t-elle entendue au téléphone avec Ariane ? Avec Amos lui-même ? « Je sais que t’es demeurée Spencer, mais me dit pas que j’ai besoin de t’expliquer que les bébés ça s’attrape pas vraiment en dansant un slow ou en se tenant la main. » Je nie tout en bloc, évidemment. Parler de ma première fois avec ma petite sœur, c’est dé-gou-tant.

En attendant, ce qui me dégoûte moi, c’est sa tenue. Je l’observe comme si elle risquait de déteindre sur moi, à tout moment. « Ça va, lâche moi un peu. J’vais pas monter sur le podium avec toi hein, respire un coup. » - « Y’avait quand même un dress code sur l’invitation. Pourquoi ils t’ont laissée rentrer avec ça aux pieds ? » Je désigne ses chaussures du bout du menton, avec tout le mépris dont je suis capable. « Tu crois que je vais encore gagner ? Que je vais monter sur le podium ? » J’en suis moi-même persuadée. Mais j’ai toujours aimé entendre vanter mes mérites, que ça vienne de Spencer ou d’une autre. Je suis accro à la flatterie.

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« Et bein fais-toi-en d’autres. C’est quand même pas si compliqué d’être agréable. » c’est facile pour elle, tout le monde la regarde tout le temps avec admiration et est aux petits soins pour sa petite personne. Et tout le monde passe sa vie à comparer les deux frangines tout le temps, c’est infernal. “Tu devrais prendre exemple, Spencer.”, “Pourquoi tu n’es pas plus comme ta soeur, Spencer.”, “Raelyn ne ferait pas ça comme ça, Spencer.”. Depuis toujours c’est comme ça et ça l’énerve. Alors, par pur esprit de contradiction, elle fait tout l’inverse de ce qu’on attend d’elle. « Pourquoi je voudrai être agréable avec des gens que je déteste ? » c’est vrai quoi, la plupart des élèves de ce bahut sont au moins aussi intéressants que regarder une plante qui pousse. Non vraiment, elle a en horreur les trois-quarts des personnes qui fréquentent cette école, le quart restant la laissant complètement indifférente.

« T’as dit quoi là ? » elle ricane, Spencer. Parce que la mauvaise foi dont fait preuve Raelyn est vraiment drôle. « Je sais que t’es demeurée Spencer, mais me dit pas que j’ai besoin de t’expliquer que les bébés ça s’attrape pas vraiment en dansant un slow ou en se tenant la main. » l’espace d’un instant, la cadette fait genre d’être choquée par cette information. « C’est bon j’ai plus dix ans, hein. » Spencer roule des yeux, bien peu impressionnée par le regard adressé par sa sœur aînée. Soeur aînée qui a surtout eu de la chance que ça soit la cadette qui tombe sur la conversation via l’autre combiné téléphonique de la maison. Si ça avait été un des deux parents, ça aurait été une autre histoire. « J’comptais rien dire aux vieux, si c’est ça qui t’inquiète. » elle affiche son sourire de merdeuse, profitant même qu’il n’y ait personne d’autre aux alentours pour sortir de son sac ce qui ressemble à un tube de crème pour les mains et verser le contenu liquide directement dans son verre. Drôle de manœuvre pour qui voit ça de loin, mais Raelyn est assez proche pour remarquer que le contenu est en réalité un liquide transparent semblable à de l’eau. Elle connaît assez sa soeur pour savoir que ce n’en est pas. La plus jeune défie l’aînée du regard sans se défaire de son sourire, l’air de dire “vas-y, dis quelque chose”. Parce que si elle le fait, Spencer peut très bien foutre en l’air volontairement la soirée de sa grande sœur.

« Y’avait quand même un dress code sur l’invitation. Pourquoi ils t’ont laissée rentrer avec ça aux pieds ? » « Va savoir. » peut-être que c’est parce qu’elle a partagé sa weed avec le type qui s’occupait de la billetterie. Peut-être que c’est parce qu’ils en avaient rien à faire aussi. « Comme ça je peux marcher sur les pieds des gens qui m’font chier. » quelle idée de mettre des escarpins ou des chaussures à talon, vraiment rien de plus inconfortable et impratique.  « Tu crois que je vais encore gagner ? Que je vais monter sur le podium ? » parce qu’elle en doute encore ? « Personne met autant d’efforts que toi dans la campagne, du coup ouais. Sûrement. » elle hausse les épaules et vide son fond de vodka d’une traite. « Papa et maman seront encore fiers de toi, comme d’habitude. » est-ce que c’est de la jalousie ? Sûrement un peu. Mais Raelyn peut crever pour que la plus jeune l’admette. Ca va sûrement bientôt être l'heure de l'annonce des résultats, d'ailleurs. « J'espère que t'as préparé un discours et tout. J'ai vraiment hâte de l'entendre. » son ton suinte l'ironie, parce que c'est visiblement la seule façon qu'elle a de communiquer avec la blonde.

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« Pourquoi je voudrai être agréable avec des gens que je déteste ? » J’écarquille les yeux, comme si la réponse à cette question était à la hauteur d’un enfant de huit ans. « Je sais pas. Peut-être pour être populaire ? » Qui ne voudrait pas l’être ? Dans mon esprit, c’est inconcevable et, j’en suis certaine, Spencer ne fait que prétendre que ça ne l’intéresse pas parce qu’elle a peur de pas y arriver, si elle essayait. Je n’envisage pas une seule seconde qu’elle en ai réellement rien à faire. « Si seulement tu me laissais te relooker. » C’est une plainte qui s’échappe de mes lèvres, comme si j’étais la seule et unique concernée, la seule et unique blessée dans toute cette histoire.

« C’est bon j’ai plus dix ans, hein. » - « Je sais pas des fois je me demande. » Je donne le change parce que j’ai horreur de ce que je crois comprendre. Spencer fait la crâneuse, et ça veut forcément dire qu’elle sait quelque chose. Et personne ne peut lui en avoir parlé. « J’comptais rien dire aux vieux, si c’est ça qui t’inquiète. » - « Je rêve mais depuis quand tu m’espionnes ? Tu veux pas te construire une vie ? » Forcément, je n’envisage pas que ce soit autre chose que de la jalousie. Spencer m’épie puisque Spencer m’envie. C’est aussi simple que ça. « T’as pas l’âge de boire ça. » Je désigne des yeux le liquide qu’elle verse dans son verre. « Si un chaperon t’attrape avec ça, ça sera mauvais pour l’image de papa et maman. Tu penses vraiment qu’à toi. » Notre père est candidat au sénat, et notre mère directrice du comité des parents d’élèves. Ce ne sont pas des postes où on reste sans une réputation impeccable, et j’ai depuis longtemps intégré que mon comportement rejaillit directement sur la façon dont sont perçus nos parents. Qu’est ce que Spencer peut-être égoïste.

« Va savoir. Comme ça je peux marcher sur les pieds des gens qui m’font chier. » On dirait qu’elles tombent en lambeaux ces chaussures. Quelle idée mettre ça avec une robe, aussi triste et banale soit-elle. « Personne met autant d’efforts que toi dans la campagne, du coup ouais. Sûrement. Papa et maman seront encore fiers de toi, comme d’habitude. » Je hausse les épaules. Je n’ai pas l’impression d’être une privilégiée : Spencer l’a dit : je mets beaucoup d’effort dans ma côte de popularité, comme je mets beaucoup d’effort dans les cours et toutes activités extra scolaires auxquelles je participe. On ne devient pas la plus jeune capitaine des cheerleaders de l’histoire du lycée en se tournant les pouces. « J'espère que t'as préparé un discours et tout. J'ai vraiment hâte de l'entendre. » - « Je sais ce que tu fais. » Je suis loin d’être aussi stupide que ma légère superficialité peut laisser croire. « Ils vont annoncer les résultats. » Autrement dit, elle n’existera plus pour moi dans quelques secondes. « Tu vois Amos ? Je le vois pas. Faut qu’on soit ensemble pour quand ils annonceront. » Je fronce les sourcils, agacée de ne pas trouver mon petit ami.

Le reste se passe en un battement de cil. Un cri féminin aigu et terrifiant se fait entendre, et l’électricité est coupée dans le gymnase, nous plongeant dans le noir. Moi aussi, je pousse un cri, comme tous les élèves autour de moi, et je m’accroupis, par réflexe. « Ils ont retrouvé le corps de Bethany Hamilton dans les vestiaires des filles ! » Les hurlement reprennent de plus belle, et nous sommes toujours plongés dans le noir. C’est un cauchemar. Je vais me réveiller et on annoncera les gagnants de la soirée. Sauf que je ne me réveille pas : à la place, c’est la cohue. Tout le monde hurle et tente de trouver une sortie sans se soucier de pousser les autres au passage.

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« Je sais pas. Peut-être pour être populaire ? » « C’est ton truc à toi ça. » Spencer en revanche, disons qu’elle n’est pas très friande d’être sous le feu des projecteurs. Elle préfère rester dans l’ombre et être tranquille avec quelques rares personnes qui ont au moins l’avantage de ne pas être fausses jusqu’au bout des ongles. « Si seulement tu me laissais te relooker. » ah ça lui ferait bien trop plaisir de pouvoir la façonner à son image. Et aux parents aussi, en fait. La jeune femme plisse le nez dans une grimace et secoue la tête. « Merci mais non merci. » elle aime ses chemises en flanelle et ses pantalons trop larges. Les paillettes, les couleurs flash, c’est pas tellement ce qu’elle aime non plus.

« Je sais pas des fois je me demande.  » juste pour l’embêter, Spencer papillonne des yeux comme une gamine, puisqu’on la considère toujours comme telle. « Je rêve mais depuis quand tu m’espionnes ? Tu veux pas te construire une vie ? » comme si elle avait que ça à faire, la cadette. « T’as qu’à être plus discrète aussi, chaque fois j’ai voulu utiliser le téléphone cette semaine t’étais dessus. » y a d’autres personnes dans la maison qui doivent se servir du combiné des fois, merde. Et puis elle est à peu près sûre que la facture de téléphone est bien trop importante chaque fin de mois. Seulement comme c’est Raelyn chérie, personne ne moufte jamais et surtout pas leur père. « T’as pas l’âge de boire ça. Si un chaperon t’attrape avec ça, ça sera mauvais pour l’image de papa et maman. Tu penses vraiment qu’à toi. » nouveau roulement d’yeux exagéré. Tout le monde dans le lycée passe son temps à boire en cachette ou à s’envoyer en l’air dans les chiottes ou le placard du concierge. Faut être sacrément aveugle pour ne pas s’en rendre compte. « Faut bien que quelqu’un le fasse. » parce qu’à part des reproches et des critiques à longueur de journée, personne ne pense à elle ou ne s’intéresse vraiment à ce qu’elle fait ou avec qui elle le fait. Elle a pris l’habitude et ça lui convient bien. « Tu vas faire quoi, aller me balancer ? » elle ne le fera pas, parce que sinon elle peut dire adieu à son projet de soirée avec Amos.

« Je sais ce que tu fais. » elle feint l’innocence et hausse les épaules. « J’vois vraiment pas de quoi tu parles. » au moins elle a compris, c’est bien. « Ils vont annoncer les résultats. » Spencer jette un coup d’oeil à sa montre et effectivement, c’est bientôt le moment. « Tu vois Amos ? Je le vois pas. Faut qu’on soit ensemble pour quand ils annonceront. » « J’sais pas, t’as oublié de lui mettre sa laisse ? » c’est d’ailleurs bien étonnant qu’il ne se soit pas manifesté plus tôt celui-là. Ils sont toujours collés l’un à l’autre, c’est dégoutant. Si ça se trouve il est parti batifoler avec une autre cheerleader.

A deux doigts de prendre le large, tout s’enchaine bien trop vite. Le cri à glacer le sang, les lumières qui se coupent et la voix qui annonce la sinistre nouvelle; « Ils ont retrouvé le corps de Bethany Hamilton dans les vestiaires des filles ! » un moment de blanc, juste le temps d’un battement, puis tout le monde se met à hurler. Comme hébétée par la situation, Spencer met un peu de temps à assimiler. Elle jette des regards paniqués aux alentours, tout ça pour constater l’amas de personne sous la lumière rouge du panneau EXIT de la porte visiblement bloquée. Ça beugle partout et rien n’a de sens. Son cerveau semble se rallumer en même temps que ses yeux s’habituent petit à petit à la pénombre. A taton, elle cherche sa soeur et pose une main sur son épaule tremblante. « Faut pas qu’on reste là- » elle tire son bras et essaye de la relever. « On peut passer par la sortie de secours derrière la scène, viens. » pour quoi faire et pour aller où ? Aucune idée. Mais quelque chose lui dit que rester dans cette salle au beau milieu d’une foule paniquée et incapable de s’échapper est une sacrée idée de merde. Quand ils se rappelleront de l'existence de cette porte là, il sera vite impossible d'y accéder alors autant prendre les devants.

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« Tu pourrais au moins faire quelque chose pour tes cheveux. C’est horrible ce noir. » Naturellement, nous avons toutes les deux les cheveux châtains, mais elle choisit de se les teindre dans ce noir qui lui donne l’air malade. Moi, il va de soi que mon parfait balayage est l’oeuvre du coiffeur le plus cher de la ville. « T’as qu’à être plus discrète aussi, chaque fois j’ai voulu utiliser le téléphone cette semaine t’étais dessus. » - « Qui est-ce que tu pourrais appeler, de toute façon ? » Elle l’a dit elle-même : elle n’aime personne et ne veut pas se faire d’amis. Elle n’a qu’à prendre son vélo et retrouver ses looseurs de potes au skate parc, plutôt que d’écouter mes appels. De toute façon, je demanderai à papa une ligne juste pour moi, l’an prochain.

« Faut bien que quelqu’un le fasse. » - « Tu t’en fous de cette famille, prétends pas le contraire. » Et surtout, ne viens pas pleurer. Pauvre petite Spencer est libre d’être qui elle veut quand, moi, parce que je suis l’aînée, nos parents me mettent une pression faramineuse pour que je sois parfaite. « Tu vas faire quoi, aller me balancer ? » Je lui jette un regard dédaigneux, avant de répondre. « J’espérais juste que tu reviendrais à la raison toute seule. Mais faut croire que t’as le cerveau trop cramé par la beuh que y’a dans ton sac. » Moi aussi Spencer, je connaîs certains de tes secrets. Ainsi, je lui fais comprendre qu’elle n’a pas plus intérêt que moi à déclarer une guerre ouverte auprès des parents.

« J’vois vraiment pas de quoi tu parles. » Bien sûr. Elle ne peut même pas comprendre que tout ça a de l’importance pour moi, parce qu’elle s’en fout. « J’sais pas, t’as oublié de lui mettre sa laisse ? » - « Peut-être que toi je devrais te mettre une muselière. » Spencer n’est pas la seule à être capable d’avoir du répondant. Et de toute façon, Amos est aussi fou de moi que je suis folle de lui : nous prévoyons déjà de tout faire pour aller à la même université pour prendre un appartement ensemble, dès notre majorité.

La joute verbale aurait continué longtemps, sans les cri, les pleurs, le noir total et cette annonce qui me tétanise. Je me suis glissée sous la table la plus proche de nous quand une main m’attrape. Je crie lorsqu’elle me touche, avant de réaliser qu’il s’agit de ma sœur. « Faut pas qu’on reste là. » Elle tente de me redresser tant bien que mal, et je me laisse faire comme une poupée de chiffon. « On peut passer par la sortie de secours derrière la scène, viens. » - « Amos était de l’autre côté de la pièce. » Je l’ai vu juste après avoir quitté le professeur d’économie. « Je peux pas partir sans lui. Je peux pas le laisser là. »

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« Tu pourrais au moins faire quelque chose pour tes cheveux. C’est horrible ce noir. » cette remarque lui arrache un sourire en coin. A croire qu’elle le fait exprès, de faire tous les pires choix qui soient. « Moi j’aime bien. » qu’elle dit simplement. On lui a dit que ça lui donnait des airs de Mercredi Addams et elle l’a pris comme un compliment vu qu’elle aime bien le personnage. Et aussi parce que ça fait chier les moqueurs quand elle se fout de leurs remarques. « Qui est-ce que tu pourrais appeler, de toute façon ? » « Personne vu que t’es toujours sur la ligne. » par exemple, elle aurait beaucoup aimé pouvoir avoir Mac au bout du fil avant d’être traînée à cette soirée pourrie ou tout le monde affiche des sourires trop faux pour être honnêtes. Sauf que non puisque madame prévoyait sa petite escapade avec son copain.

« Tu t’en fous de cette famille, prétends pas le contraire. » « Ouais, si tu l’dis. » elle n’essaie même plus de convaincre qui que ce soit, Spencer. C’est toujours la même rengaine de toute façon. On lui a tellement rabâché qu’elle se foutait de tout et tout le monde qu’elle a fini par prendre au mot les paroles des autres et par appliquer ce qu’on attendait visiblement d’elle. « J’espérais juste que tu reviendrais à la raison toute seule. Mais faut croire que t’as le cerveau trop cramé par la beuh que y’a dans ton sac. » « Tu devrais essayer, ça te ferait du bien d’te détendre un peu. » c’est qu’elle est toujours tendue comme un string, Raelyn. C’est à se demander comment elle encaisse la pression au quotidien.

« Peut-être que toi je devrais te mettre une muselière. » « Ouais essaie toujours. » ça serait très amusant de la voir tenter. Parce que pour sûr, Raelyn finirait par vraiment se faire mordre, et là elle aurait une vraie raison d’être en colère après sa soeur.

La partie la plus fun de sa soirée se termine un peu abruptement, et c’est bien dommage. Elle aurait nettement préféré continuer à se disputer avec sa soeur plutôt que de devoir assister à une scène pareille. La panique des autres, l’ambiance un peu pesante qui s’est installée, le chaos. Spencer tente de faire réagir son aînée qui gueule au moins autant que le reste de la salle. « Amos était de l’autre côté de la pièce. Je peux pas partir sans lui. Je peux pas le laisser là. » mais rien à faire d’Amos, c’est pas le moment de traîner ! « On le retrouvera dans le couloir, il fait genre deux mètres de haut, il va pouvoir pousser tout le monde pour passer. » il aura qu’à jouer des coudes et des épaules pour se frayer un chemin. Et Spencer n’a aucun doute sur le fait qu’il s’empressera de rejoindre Raelyn dès qu’il se rendra compte qu’elle n’est pas accrochée à son bras. « Allez bouge ou on va s’retrouver coincées ! » elle la presse un peu plus, attrape son poignet et commence à l’embarquer vers l’estrade. Le sol est collant et plein de toutes les boissons que tout le monde a lâché dans la précipitation. Pour le coup, elle est bien contente de ne pas avoir des petits escarpins pour patauger dans tout ça. « Putain ils sont où les profs ? » qu’elle râle en constatant que personne ne semble faire l’effort d’apaiser les gens. Ça va finir en émeute ce bordel. De nouveaux hurlements se font entendre dans la salle et Spencer hâte le pas, manquant de trébucher sur quelque chose avant même d’arriver jusqu’à la scène. « Il a un couteau ! » ça gueule derrière et ça hurle de plus belle, et dans la pénombre, Blackwell ne voit pas qui ou à quelle distance. « Dépêche ! » qu’elle siffle en se hissant sur l’estrade sans lâcher sa soeur. Quelle idée de porter une robe, bordel.

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« Personne vu que t’es toujours sur la ligne. » De toute façon, ce n’est pas comme si Spencer voyait quelqu’un. Et ce n’est pas non plus comme si elle avait la moindre chance que ça arrive un jour, avec son allure et le peu de coquetterie qu’elle possède. « Comme si un garçon s’intéressait à toi. » C’est la seule raison qui serait assez valable à mes yeux pour que je la laisse accéder au combiné de temps en temps, cela va sans dire. « Tu devrais essayer, ça te ferait du bien d’te détendre un peu. » Je secoue la tête, un air choqué et dégoûté. « Non merci. J’ai pas envie de devenir une ratée. » Une ratée dans ton genre. Voilà la suite de la phrase que je ne prononce pas mais que Spencer peut probablement deviner, puisqu’elle sait tout de ma délicatesse et de mon tact légendaire. « Ouais essaie toujours. » Les méchancetés volent, et à mes yeux c’est de toute façon la faute de Spencer. Je n’envisage pas une seule seconde que l’effort à faire soit de mon côté, de toute façon.


Pour interrompre une dispute entre soeur, il faut bien un meurtre dans le lycée et un élan de panique. Une fois que j’arrive à me reprendre, toutes mes pensées sont dirigées vers mon petit ami. Où est-il ? Est-il parti sans moi ? Est-ce qu’il a été attaqué ? Est-ce qu’il est sauf ? « On le retrouvera dans le couloir, il fait genre deux mètres de haut, il va pouvoir pousser tout le monde pour passer. » - « Je veux pas le laisser je te dis. » Des larmes coulent le long de mes joues, abîmant mon joli maquillage. Des larmes de peur panique, pour lui comme pour moi. A côté, un nouveau cri me tétanise à nouveau et je suis bousculée par une ombre. « Allez bouge ou on va s’retrouver coincées ! » Les doigts de ma sœur se referment sur les miens et elle m’entraîne dans son sillage. Mes jambes s’activent, mais je suis dans une sorte d’état second : je ne suis plus maître à bord de mon propre corps. « Putain ils sont où les profs ? » Je ne vois rien ni personne, je suis loin de me soucier des professeurs. Ma soeur se hisse sur l’estrade, et essaye de me hisser après elle. « Il a un couteau ! » La phrase me fait l’effet d’un électrochoc. Toujours en larme, mais de retour à bord, je tente de monter mais je trébuche à cause de mes talons. « Dépêche ! » Je grogne, avant de réussir à grimper sur l’estrade. « Tu sais où ça mène ? » Elle ouvre la porte et je me précipite derrière elle, en sueur et haletante. Dans les couloirs, je cours à toute vitesse sans savoir où je vais. « Pas à gauche, ça mène vers les vestiaires des filles ! » Contrairement à Spencer, je ne sèche pas les cours de sport. « Viens, à droite, c’est vers les cuisines. » Personne n’aura eu l’idée de se cacher là, non ?

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell    

« Comme si un garçon s’intéressait à toi. » forcément, la cadette roule des yeux. « Tu sais que tu peux t’en servir pour autre chose, hein ? » elle lui ferait bien part du fait qu’elle a quelqu’un et tout le bordel, mais le fait qu’elle voit une fille et non pas un gars ne ferait qu’ajouter au mépris qu’elle se prend déjà au quotidien, alors elle préfère garder ses petits secrets. Et surtout c’est le genre de truc qu’elle risque de répéter aux parents. « Non merci. J’ai pas envie de devenir une ratée. » ça l’aurait étonnée, aussi. « Oh bah non, si tu prends ma place je deviens quoi moi ? » elle ironise en connaissant très bien le fond de la pensée de l’autre. Pas besoin d’un dessin, elle a compris le tableau.

« Je veux pas le laisser je te dis. » « Oui bah lui il s’est pas gêné pour le faire, alors magne toi sinon j’te laisse là ! » qu’elle siffle sans pour autant la lâcher. Elle ne le fera pas, Spencer. Parce que malgré les apparences et les disputes incessantes, elle y tient à sa pimbêche de grande sœur. Elle ne sait pas si c’est à force de la presser ou si c’est l’annonce d’un type avec un couteau, mais enfin elle se bouge et elles peuvent avancer. L’estrade, puis direction la sortie de secours. Okay, pour le moment ça va. « Tu sais où ça mène ? » « Heu- » elle a bien du mal à réfléchir plus loin que de l’autre côté de la porte pour l’instant. Oui. Non. Peut-être. D’habitude elle passe par là pour esquiver les jocks qu’elle n’a pas envie de croiser, c’est compliqué de réfléchir avec tout ce vacarme et ces cris. « Pas à gauche, ça mène vers les vestiaires des filles ! » ah, oui. Vrai. Et elles ne veulent pas tomber sur le corps sans vie d’Hamilton. Enfin visiblement le responsable est dans la grande salle, donc elles devraient être tranquilles. « Viens, à droite, c’est vers les cuisines. » « Ouais, bonne idée. » au moins là-bas y aura personne et elles pourront trouver de quoi se défendre si c’est nécessaire.

Un pas après l’autre, les couloirs semblent déserts et elles ne croisent absolument personne. Pas d’autre élève, pas de prof, pas de concierge ou de type avec un couteau. A croire que tout ça n’est qu’une vaste blague qui aurait mal tourné. Si ça se trouve ce n’est que ça d’ailleurs. Une plaisanterie organisée par les idiots du bahut dans le but de ruiner le bal de fin d’année. Si elle avait su qu’un truc pareil se préparait, elle aurait demandé d’en être. Au loin, elle aperçoit enfin ce qui semble être les portes à double-battant, une très légère lumière filtrant au travers des hublots. Trop concentrée dessus, elle ne fait absolument pas gaffe là où elle met les pieds et se les prend dans quelque chose qui traîne sur le sol. Elle a le bon réflexe de lâcher sa sœur pour ne pas l'entraîner dans sa chute et pouvoir se rattraper avec les deux mains et limiter les dégâts, n’oubliant pas un juron au passage. « Putain- » la chute est brutale, mais plus de peur que de mal. Irritée, elle cherche à tâtons ce qui l’a fait tomber. Elle discerne bien une forme qui gît au sol, et lorsqu’elle pose les mains dessus, ses craintes ne font que se confirmer. Il s’agit de quelqu’un, sûrement le fameux concierge vu la tenue. Tenue qui est d’ailleurs complètement trempée. « Oh merde. Merde merde merde. » cette fois plus de doute possible, tout ça là, c’est pas juste une plaisanterie de mauvais goût organisée par les cancres du lycée. Le type ne bouge pas, ne respire pas, et le liquide poisseux qui viennent tâcher les mains de Spencer c’est du sang. Beaucoup de sang. Elle se recule en vitesse, manque de glisser dans la flaque en voulant se relever et elle est au bord des larmes elle aussi. Terminé son éternel air de se foutre de tout, balayée l’attitude de merdeuse. Ne reste qu’une gamine qui commence à capter la gravité de la situattion. « Le bureau du proviseur, faut- » elle commence la voix étranglée. « Faut qu’on appelle les flics, je sais pas. » c’est la seule chose cohérente à faire dans ces conditions là, non ? Et puis le secrétariat et tout le bordel, elle connaît par cœur à force d’y être convoquée pour un oui ou pour un non, faut bien que ça serve à quelque chose un jour. Un bruit de porte qui claque dans la direction d’où elles viennent. « Faut pas qu’on reste là- » elle souffle à Raelyn quand bien même elle ne sait pas si quelqu’un est après elles ou pas.

when the rain begins to fall
Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell
♫ allez hop

« Oui bah lui il s’est pas gêné pour le faire, alors magne toi sinon j’te laisse là ! » Amos ne m’aurait jamais laissée toute seule et j’en suis persuadée. Il lui est arrivé quelque chose ou, comme nous, il a été entraîné dans toute cette folie et par la vague d’élèves tentant de s’échapper du gymnase. Je le cherche des yeux mais, de toute façon, je ne vois plus. La seule source de lumière provient de la lumière de la lune au travers des baies vitrées et les gens ne sont plus que des formes inquiétantes. Alors, dans un état second, je laisse ma sœur m’entraîner hors du gymnase par une autre sortie. Je courre derrière elle dans les couloirs, et mes talons qui claquent contre le carrelage font un bruit qui risque d’attirer le ou les responsables de tout ça. Je n’ai pas la présence d’esprit de les enlever, je suis têtanisée.

Nous prenons la route des cuisines quand, soudain, Spencer trébuche et chute au sol. « Putain- » - « Tu vas bien ? Qu’est ce que c’est ? » Je plisse les yeux pour tenter de discerner la forme sur laquelle elle s’est prise les pieds et, face à l’horreur de ma découverte, j’étouffe un hurlement en plaçant ma main devant ma bouche. Je respire fort, en larme et au bord de la crise de nerfs, en comprenant qu’un corps se tient à nos pieds et que le bas de ma robe traîne dans son sang. « Oh merde. Merde merde merde. » La main toujours devant mes lèvres, j’étouffe des couinements alors que de chaudes larmes coulent sur mes joues. J’ai peur et je suis bouleversée. « Le bureau du proviseur, faut- Faut qu’on appelle les flics, je sais pas. » Tout mon corps tremble et je hoche la tête. J’attrape la main de Spencer, mais elle est pleine d’un liquide poisseux alors je la relâche brusquement et je m’essuie sur ma robe en pleurant de plus belle. « Faut pas qu’on reste là- » Ne pas faire de bruit est compliqué quand je suis dans un état second. « Attends. » Je me penche vers le cadavre et, réprimant un haut-le-cœur, je fouille ses poches. Je tire de l’une d’entre elles le trousseau sur lequel sont attachées toutes les clés de l’école. « On devrait pouvoir tout ouvrir avec ça. Et trouver une sortie. » Je l’ai dit : je ne suis pas idiote, même si je semble superficielle. Je m’essuie sur la chemise du pauvre concierge pour ôter tout le sang sur mes mains, avant de sursauter en entendant des pas qui se rapprochent. « Viens, cours ! » Sur le chemin, je me débarrasse de mes escarpins. Nous arrivons face au bureau du professeur, et alors que quelqu’un est toujours à nos trousses, j’espère pouvoir nous y réfugier. Les mains tremblantes, je teste toutes les clés avant de trouver la bonne. Lorsque la porte s’ouvre, nous nous précipitons dans la pièce et je la referme à clé derrière nous, avant de m’accroupir sous le bureau du proviseur, tirant Spencer par le bas de sa robe pour qu’elle se planque avec moi.

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell    

La soirée a pris un tournant pour le moins inattendu, sauf que c’est pas tellement dans le bon sens du terme. Et vu la macabre découverte qu’elles viennent de faire, Spencer sait qu’elle aurait largement préféré continuer à se disputer avec Raelyn pour des conneries d’ado. Se chamailler pour des bêtises de couleurs de cheveux, de robes ou pour des avis divergents, ça paraît carrément bien en fait. Elle a les mains pleines de sang et s’en rend à peine compte. « Tu vas bien ? Qu’est ce que c’est ? » elle jure et Raelyn fait de son mieux pour se contenir. Encore à moitié sous le choc, Spencer tente de se relever, glisse et sursaute quand sa sœur lui prend la main pour la relâcher aussitôt. Figée, la cadette fixe le cadavre dans la pénombre et réussit à peu près à formuler un semblant de plan. Faut prévenir les autorités, faire quelque chose, n’importe quoi. « Attends. » quoi ? La blonde fouille ce pauvre Dexter le concierge et récupère son trousseau de clés. Spencer aurait dû y penser vu le nombre de fois où elle a essayé de les lui voler, mais dans la panique faut croire que son cerveau a bien du mal à fonctionner complètement. Heureusement pour le coup, elle n’est pas seule. « On devrait pouvoir tout ouvrir avec ça. Et trouver une sortie. » « Ouais. » elle souffle et sursaute de nouveau quand les pas semblent se rapprocher au bout du couloir. « Viens, cours ! » il lui faut quelques secondes pour réagir, mais finalement ses jambes bougent et elle se lance à la suite de son aînée. Elles arrivent devant le bureau du proviseur et Spencer lance des regards anxieux derrière pendant que Raelyn se démène pour ouvrir. Ça va pas assez vite, les pas se rapprochent de plus en plus et elle est maintenant sûre que la personne s’est mise à courir. Elle se fait entraîner dans la pièce et jusque sous le bureau, à peine quelques secondes plus tard, quelqu’un se met à tambouriner à la porte avec force. Spencer plaque les mains sur ses oreilles, se fout du sang partout mais s’en cogne pas mal. Ça dure un moment, trop longtemps, chaque coup plus fort que le précédent. Puis plus rien. Tremblante, elle relève les yeux vers Raelyn, l’air de demander : “tu crois qu’il nous a vu ?”, mais aucun son ne sort.

Le silence qui suit est lourd, et elle a l’impression que chaque battement de coeur, chaque respiration peut compromettre leur position. Spencer inspire, retire ses mains de ses oreilles et risque un coup d’oeil derrière leur planque. Rien, personne. La porte est toujours fermée et aucune ombre ne plane dans la pièce. C’est maintenant où jamais, pour utiliser le téléphone. « Bouge pas. » qu’elle chuchote sans attendre de réponse, faisant le tour du bureau à quatre pattes pour atteindre le combiné. Elle décroche et le porte à son oreille, prête à composer le numéro des urgences, seulement voilà- « Y a pas de tonalité… » elle couine en essayant tout de même de taper les chiffres, en vain. Frustrée, elle repose l’appareil même si elle a très envie de le jeter. Pas de police, donc. « Okay on- » c’est vraiment dur de réfléchir dans tout ce foutoir. « Le parking est de l’autre côté, faut qu’on aille jusqu’à là-bas et qu’on prenne la voiture. Si on s’fait discrètes ça ira, non ? » elle était à ça de proposer d’aller essayer de retrouver Amos, mais dans l’immédiat elle n’a aucune confiance en lui ou en qui que ce soit. Si ça se trouve, il est le responsable de tout ça.

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell
♫ allez hop

A partir du moment où je réalise quelle est la nature de la masse sur laquelle Spencer s’est étalée, mon cerveau enclenche la marche automatique. J’ai l’impression de sortir de mon corps et d’observer la scène qui se déroule sous mes yeux d’un peu plus haut, comme si la personne qui se penchait sur le concierge pour attraper le trousseau de clé était quelqu’un d’autre que moi, l’actrice principale d’un film (d’un mauvais film qui plus est) à la télévision.

Dans le bureau, alors que quelqu’un tambourine à la porte avec violence et que je pose mes mains sur mes oreilles en pleurant, le retour à la réalité est compliqué. Je suis à nouveau projetée dans mon propre corps. Il tremble, il s'accroche à ma sœur qui n’est pas vraiment dans un meilleur état, je ne le contrôle plus du tout. « C’est un cauchemar. Je comprends pas ce qu’il se passe c’est un cauchemar. » Les coups contre la porte cessent, mais je n’ose toujours pas bouger. Je suis tétanisée, et l’avertissement de ma sœur est bien inutile, je n’avais l’intention d’aller nulle part. « Bouge pas. » Elle tend le bras vers le combiné et compose le numéro des secours mais, à son visage dépité, je comprends que quelqu’un a coupé la ligne. Tout ça était un plan macabre parfaitement prémédité. Combien d’entre nous l’assassin a-t-il choisi de tuer ? S’attaque-t-il à des cibles choisies au hasard ou à des élèves sélectionnés au préalable ? « Okay on… Le parking est de l’autre côté, faut qu’on aille jusqu’à là-bas et qu’on prenne la voiture. Si on s,’fait discrètes ça ira, non ? » - « Mais comment on sait s' il est pas de l’autre côté de la porte ? » Il aurait pu arrêter de taper à la porte pour nous pousser à sortir de notre cachette. « Y’a pas d’autre moyen de s’échapper ? » Je lève les yeux au plafond. Les faux-plafonds, peuvent-ils être notre chance de salut, notre issue de secours ? « Il était juste là, s’il est encore dans le couloir… » On se fera tuer toutes les deux.

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Spencer Blackwell & @Raelyn Blackwell    

Elle a l’impression d’être dans un foutu film, Spencer. Ca lui fait trop penser à Carrie ou un truc du genre. Si ça se trouve, le type qui a décidé de faire un massacre s’est carrément inspiré de ça pour ruiner le bal de fin d’année. C’est sans doute un des marginaux du lycée qui a été maltraité par l’équipe de football et qui a été moqué par les cheerleaders. Alors la question qu’il est légitime de se poser, c’est est-ce qu’elle est vraiment en danger, elle ? Après tout, ça ferait même plutôt d’eux des alliés de circonstance que de vrais ennemis. Si ça se trouve, c’est après Raelyn qu’il en a parce qu’elle a refusé ses avances et que tout le monde sait qu’elle allait être élue reine du bal. « C’est un cauchemar. Je comprends pas ce qu’il se passe c’est un cauchemar. » elle en sait rien, elle a ses théories et ça s’arrête là. Elle essaie le téléphone, rien. Forcément sans électricité, c’est compliqué. Mais ça veut dire aussi qu’il ne faudra pas compter sur les secours. Pas tout de suite en tout cas. « Mais comment on sait s' il est pas de l’autre côté de la porte ? » elles ne peuvent pas. Pas à moins d’ouvrir et de se mettre en danger pour rien. Si ça se trouve, c’était un autre élève qui cherchait à se planquer aussi et elles l’ont abandonné à son sort dans le couloir. Non, si ça avait été le cas, elles auraient entendu des appels à l’aide, là c’était juste quelqu’un qui essayait de forcer la porte. « Y’a pas d’autre moyen de s’échapper ? » le regard de Spencer se tourne vers les fenêtres, seule autre sortie vers l’extérieur. Mais impossible de passer par là, pas à moi d’être une foutue acrobate qui peut sauter d’un étage complet sans se tuer. Encore que, dans l’immédiat ça semble préférable que de se faire découper le bide par un fou avec un couteau. « Il était juste là, s’il est encore dans le couloir… » « Je sais ! » elle s’agace, incapable de trouver quoi faire ou encore de réfléchir. Mais surtout elle est terrifiée. Elle essaie de se rassurer en se disant qu’elles sont à l’abri pour le moment, l’autre ne pourra pas rentrer à moins de défoncer la porte. « J’aimais mieux quand on se disputait tout à l’heure. » qu’elle constate à voix basse, surtout histoire de penser à autre chose. « Donne moi les clés. » elle souffle après un temps en tendant la main vers sa soeur. « J’vais passer devant et l’attirer ailleurs. » elle arrive pas à croire qu’elle propose un plan pareil. « T’auras qu’à courir jusqu’à la sortie de secours. » comme ça y en a au moins une qui pourra aller chercher de l'aide dehors, non ?

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Raelyn Blackwell & @Spencer Blackwell
♫ allez hop (celle là est priceless vraiment ouvre là)

Mon maquillage coule sur mes joues, sur mon joli visage, sans que je ne tente pour autant de me calmer. Je mets une main devant ma bouche pour m’empêcher de pleurnicher de façon trop sonore pour ne pas attirer le tueur. Bettany, la fille qu’il a tuée, était une pom-pom girl et j’en suis la capitaine. En-a-t-il aussi après moi ou cible-t-il des élèves au hasard ? Et le concierge, était-il simplement sur son chemin ou bien faisait-il partie du plan ? Il aurait pris les clés dans ce cas, non ? « Je sais ! » Je jette un regard désespéré à ma soeur, en espérant qu’elle trouve une solution qui, pour l’instant se refuse à moi. « J’aimais mieux quand on se disputait tout à l’heure. » - « Moi aussi. » Pourtant, ma relation conflictuelle avec ma soeur me pèse, même si je prétends le contraire. Je préfèrerais tant que les choses soient différentes, que Spencer soit différentes, pas tant parce que je ne l’aime pas comme elle est que parce que je ne la comprend pas. Si je pouvais la maquiller, la coiffer, l’emmener faire les boutiques avec moi, si elle aimais toutes ces choses là ce serait tellement plus simple de nous rapprocher, toutes les deux. « Donne moi les clés. » - « Qu’est ce que tu va en faire ? » Qu’est ce qu’elle va faire ? « J’vais passer devant et l’attirer ailleurs. T’auras qu’à courir jusqu’à la sortie de secours. » Mes yeux s’écarquillent. Je sais que, dans un élan de bravoure, je devrais proposer d’échanger les rôles. Sauf que je suis tétanisée, que ma robe est encombrante et que je progresse pieds nus. Spencer est plus solide, plus courageuse, mieux battue pour le rôle. Alors, je hoche la tête et tente d’essuyer mes joues pour paraître un peu plus brave, moi aussi. Avant de sortir de la pièce, je suis prise d’un élan de spontanéité : j’attire ma sœur contre moi et je la serre dans mes bras plusieurs longues secondes, avant de murmurer. « Je t’aime Spence. » Même si on ne se le dit jamais.


Win : Le tueur suit Spencer et l'attaque.
So Close : Le tueur pousse Raelyn dans un bureau et l'enferme à clé. (spoiler alert elle hurle dans ce cas.)
Fail : Le tueur suit Raelyn et l'attaque. (spoiler alert elle hurle dans ce cas là aussi.)