Ca marche. Je te donnerai mon adresse pour que tu me déposes en chemin.

Elle se sent soulagée que Megan accepte, car elle n’aurait pas osé insister plus que cela, mais elle ne se voyait pas non plus la laisser prendre un taxi alors qu’elle va du même côté de la ville avec sa voiture. Elle ressent ce qu’elle interprète comme une pointe de gêne dans sa voix dont elle ne sait pas trop quoi penser, dans tout les cas elle décide que le moment venu elle se contentera de la déposer rapidement pour ne pas la mettre dans une situation embarrassante. De toute façon, plus vite elle ira chez ce client plus vite elle aura l’esprit tranquillisé et elle pourra rentrer chez elle.

Elle est encore plus soulagée quand Megan l’accompagne vers la sortie. La tristesse de l’entourage de Catherine lui donne l’impression d’être un éléphant dans un magasin de porcelaine, que le moindre mot qu’elle pourrait prononcer serait forcément maladroit et inapproprié.

T’étouffais, toi aussi ?

Elle confirme d’un signe de tête et se rend compte qu’elle a laissé son plat à l’intérieur mais de toute façon elle ne pouvait pas le récupérer maintenant et elle n’irait pas non plus le réclamer plus tard… Et puis un plat c’était une maigre compensation pour tout ce que cette famille avait fait pour elle et son frère.

Personne nous en voudra de pas rester longtemps.

Elle réfléchit une micro seconde puis sourit doucement.

Je pense même que personne ne s’en rendra compte.

Et bien sûr c’est pas plus mal parce que de toute évidence aucune d’elles n’avaient envie de faire remarquer leur présence, pas plus que leur absence.

Elle monte dans la voiture et indique l’adresse sur le GPS, elle connaît bien le quartier car plusieurs de ses clients y habitent. Ils trouvent souvent «charmant» d’acheter des tableaux à cette « jeune fille dans sa vieille caravane» qui vit d’amour et d’eau fraîche, ou plutôt de crayons et de thé glacé. Certains d’entre eux ne comprennent même pas ce qu’elle a voulu représenter sur les toiles qu’ils achètent mais au final ça n’a pas une si grande importance.

Un de ces quatre, il faudra qu’on aille boire un café.

Dans un autre contexte elle lui aurait dit qu’elle préfère les mojitos aux cafés mais ça semble assez inapproprié juste après un enterrement.

Dans des circonstances un peu plus joyeuses.

Et elles le seront de toute façon, c’est le seul avantage du contexte de leur triste retrouvailles, les prochaines ne pourront pas être plus triste.

Quand tu veux, comme tu le sais j’ai un emploi du temps assez… flexible ! Tu m’envoies un message et je débarque.

Parce que lui ferait du bien de changer d’air un peu, non ? Elle dépose Megan dans sa rue après avoir discuté avec elle de tout et de rien durant le trajet et elle repart vivre sa petite vie d’artiste après cette parenthèse pour le moins déroutante, avec l’espoir amer que ce n’était pas la dernière fois qu’elle voyait sa vieille amie.

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