Dans son adolescence assez mouvementée, Icare avait toujours été... à la recherche de sensations fortes. Il avait toujours recherché... la perte de contrôle et l'anarchie. C'était sans doute pour ça qu'il avait détesté rester chez lui où tout avait sa place, où tout était rangé, aligné de la même façon, où sa mère avait toujours la même teinte de couleur de cheveux et où ses frères se fondaient dans le moule imposé par la figure paternel, omniprésente mais aussi absente, le foyer des Cox était un cauchemar pour Icare à l'époque. Surtout qu'il était à la recherche de chaos pour exprimer ce qu'il ressentait à l'intérieur de lui sans arriver à mettre les mots dessus.

Et c'est comme ça qu'il avait découvert son havre de paix. L'endroit des marginaux, un petit coin de Redcliffe où être différent prenait enfin tout son sens. Ici, on pouvait être qui on voulait sans craindre les regards scrutateurs. Il y avait toujours des feux de joies, des gens qui taguaient des murs, de la musique à droite et à gauche. Le pire et le meilleur de la race humaine se rencontrait en ses lieux. Le plus riche et le plus pauvre aussi.

Il y avait toujours de l'alcool dans le coin et une odeur persistante de joints et de cigarette, l'endroit ne sentait pas bon, et pourtant Icare ne s'en formalisait pas, c'était la première fois depuis qu'il était rentré qu'il se sentait enfin à son aise, qu'il aimait de nouveau la ville où il avait grandi... pas dans les beaux quartiers, pas à son boulot... ici, dans ce quartier délabré et abandonné de tous exceptés des marginaux...

Il était tout occupé à danser avec une parfaite inconnue. Une salsa qu'il avait appris à maitriser et qui semblait satisfaire sa cavalière du soir... mais pas tellement son petit-copain qui finit par surgir, le poing levé, prêt à l'attaquer ou à l’assommer. Icare l'esquiva et partit les jambes à son cou sans demander son reste, oui, il aimait danser, mais pas au point de se prendre un poing dans la face ! Et oui, il avait trop bu, mais jamais au point de se prendre pour plus fort qu'il ne l'était ! Il avait le physique d'un type musclé, mais c'était juste une pure illusion, il était plus nounours que ours pour résumé sa situation ! S'il venait à se battre, il se ferait massacrer à tous les coups, il n'avait jamais appris à se battre, il savait surfer tout au plus, chacun ses points forts et ses points faibles. De plus, s'il abimait son visage, sa patronne le détesterait encore plus, déjà qu'elle supportait parfois à peine sa présence, ce n'était pas le moment de se faire mal voir. Du moins encore plus. Il arriva dans une autre salle avec des vieux canapés qui avaient vécus beaucoup d'histoire, Icare par soucis de santé n'oserait jamais s'asseoir volontairement sur ce genre de choses infestés d'il ne savait trop quoi. L'odeur de joint était plus prenante encore ici, il se faufila parmi les corps avachis et quand il aperçut du coin de l’œil le "petit-copain" latino, il se cacha derrière une colonne. Il poussa un soupire et prit le temps de sortir nerveusement une cigarette de sa poche avant de réaliser qu'il n'était pas le seul dans sa cachette. Il ne releva pas le regard et tenta vainement d'allumer son briquet. Comprenant que c'était peine perdue, il poussa un soupir de mécontentement et il s'adressa de façon penaude à l'autre personne présente. « Hey, tu n'aurais pas... » il releva le visage et il se figea, la fin de sa phrase mourant sur ses lèvres. Il cligna des yeux une fois. Deux fois. Déposa sa main sur son cœur, s'assurant qu'il était toujours en vie et pas mort. Il déglutit alors. La fille qui se tenait en face de lui était... il n'avait pas les mots. « Est-ce que les fantômes grandissent ? » demanda-t-il sans même le réaliser. Cette question était si perturbante. Jamais il n'aurait pu imaginer... il ne trouvait pas les mots. Il n'y avait pas de mots sur les troubles qu'il éprouvait à formuler la moindre pensée cohérente. La fille qui était là ressemblait... non. Si sa sœur avait pu vieillir, si sa sœur avait vécu... si elle avait pu grandir et dépasser ce cap des 9 ans, il était clair dans son esprit qu'elle aurait ressemblé à cette brune qui se tenait devant lui. Il posa sa main sur son front, vérifiant s'il ne faisait pas de la température et ne commençait pas à halluciner. Ce n'était pas vrai. Ce n'était pas possible. Alors pourquoi se tenait-elle là en face de lui ? Il ferma douloureusement les yeux, peut-être que s'il les fermait assez longtemps, il récupérerait ses esprits et ce fantôme du passé disparaitrait comme il était apparu histoire de le torturer.

Pourquoi est-ce qu'il fallait que ça arrive ce soir ? Est-ce qu'il devait sérieusement penser à arrêter l'alcool, la drogue ou les soirées ? Parce que s'il devait vraiment décider d'arrêter quoique se soit, ça allait lui briser le coeur ! Après, en y réfléchissant bien, il devait bien admettre que son coeur était déjà en miette depuis qu'il était gamin. La perte de sa soeur dans sa petite enfance avait fait ce taff. Même s'il commençait seulement à en avoir conscience maintenant. Aller chez un psy à l'époque n'aurait peut-être pas été une mauvaise idée... sauf que c'était assez mal vu par le reste de la société et son père avait préféré conservé son nom éloigné de ce genre de trouble plutôt que d'envoyer son fils se faire soigner. Les priorités de son paternel avaient toujours été liées à la préservation de leur patronyme plus que des personnes qui le portait.

Mais il était peut-être temps de se résoudre à l’inévitable s'il commençait à imaginer sa sœur —non seulement en vie, mais en plus en étant plus vieille !— dans des endroits aussi... bizarres, il devait sérieusement penser à consulter. De son vivant, Rosalind n'aurait jamais mis les pieds dans ce genre d'endroits, elle aurait plissé le nez et aurait préféré ignorer l'endroit d'un air pincé plutôt que d'accepter y mettre ne serait-ce qu'un orteil ! Alors pourquoi ? Pourquoi ici ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi après tout ce temps ? Est-ce qu'il hallucinait ? Est-ce qu'il devait aller se faire checker le cerveau ? Est-ce que c'était un effet secondaire de ce qu'il fumait et qu'il devait sérieusement pensé à changer de dealer ? Il tenta de se souvenir s'il s'était pris un coup ces derniers jours, quelque chose qui expliquerait la présence de... cette fille... ici. Parce qu'elle ne pouvait pas être Rosalind. Rosalind n'avait jamais été aussi vieille de sa vie. Peut-être qu'il était simplement fou aussi. Tout semblait plus probable à ce point-là. C'était soit ça, soit les fantômes existaient. “Pardon ?” Ah... il avait dû le dire tout haut.

Mais est-ce que la voix était dans sa tête ? Il se frotta nerveusement la nuque et eut un rire nerveux. Il paraissait fou. Il l'était de toute façon s'il commençait à voir tout ça. Il devait se rendre à l'évidence, il allait devoir se faire examiner. “Est-ce que ça va ?” il l'observa, elle était... belle ? C'était sans doute l'effet des cheveux et des joues rouges, elle semblait vivante et en forme. Certes, Rosalind avait toujours été magnifique à ses yeux, même sans cheveux, même mourante dans son lit ; ses yeux avaient toujours été plein de vie, plein de détermination à lutter pour survivre. C'était son regard qui était le plus beau chez sa sœur... mais cette fille avait un regard sceptique qui le perturbait un peu. Parce que tu es fou et qu'elle le voit. Il ferma les yeux, tentant de calmer les battements de son cœur en respirant profondément. Quand il fut rassurer de son état, il réalisa qu'il devait répondre, fantôme ou non, il se devait d'être poli. « Je crois ? » tenta-t-il sur un air interrogateur pas vraiment rassurant. « J'ai peut-être trop fumé, je crois que je vois des choses que je ne devrais pas... » un bad trip ! Bon sang, pourquoi n'y avait-il pas pensé plus tôt ! Bon, c'était une première pour lui de voir apparaitre sa sœur mais d'un coup, il semblait rassuré sur la cause de cette apparition. Soulagé, il l'observa avant de constater qu'elle était assise sur un vieux fauteuil. Un fauteuil sur lequel tant de choses étranges avaient pu se passer. Ils étaient là plus pour aller avec la déco lugubres, seulement une très petite quantité de personnes osaient s'y asseoir... les sans-abri, les gars défoncés ou complètement alcoolisés... ils étaient là depuis des années et non, ce n'était pas un endroit pour la fantôme de sa sœur. Il enleva aussi tôt sa veste et lui tendit. « Assied-toi là-dessus s'il te plait, personne ne sait ce qu'il s'est passé sur ces fauteuils... » murmura-t-il les yeux brillant presque d'inquiétude, il n'avait jamais autant observé les traits d'un visage de quelqu'un, il n'arrivait plus à détourner le regard, trop effrayé qu'elle disparaisse dans la nature... le nœud qu'il ressentait dans son ventre était aussi réel que son inquiétude, et si sa sœur fantomatique se chopait un truc en restant assisse-là ? Non, lui vivant, il ne pouvait se permettre de la perdre deux fois. C'était clairement une fois de trop.

Icare connaissait toutes les expressions de sa soeur, il les avait gravé dans sa mémoire. Et les expressions de cette inconnue étaient similaires. Trop. Elle était mal à l'aise. Mais peut-être que le monde entier pouvait s'en rendre compte et pas juste lui ? Il ne savait plus trop. Lui-même était perturbée, toute l'absurdité de cette situation était risible. Il ferma les yeux et se passa la main sur le visage. Il avait envie de disparaitre et en même temps, il avait juste envie de la prendre dans ses bras pour lui dire qu'il n'avait pas passé un jour de sa vie sans penser à elle. Qu'elle était la personne pour qui il était devenu "Icare". Il s'était transformé pour elle, il était sorti de sa coquille et avait entrepris un voyage à travers le monde pour "vivre", c'était sa promesse, c'était la volonté de Rosalind. Mais il n'y avait rien de logique, elle ne pouvait pas être sa soeur ! Mais elle lui ressemblait tellement... alors il voulait juste la couver, la protéger. C'était pour ça qu'il lui avait offert sa veste. “Euh… Merci.” il haussa les épaules. Ce n'était pas grand chose.

“Qu’est-ce t’as fumé ?” vrai, il avait beaucoup fumé et beaucoup bu. Il fouilla alors dans la poche de son jean et il sortit son paquet de cigarette, hormis les cigarettes habituelles, il y avait également quelques joints, plus beaucoup. Il en sortit un fièrement et il sourit. « J'ai fumé ça » avoua-t-il en lui tendant d'une main tremblante. « Mais c'est la première fois que je réagis comme ça... » ajouta-t-il comme pour s'excuser de son comportement. Il attrapa une cigarette normale et il se rappela soudain que son briquet ne marchait plus. Il poussa un soupire, la déposa derrière son oreille et il s'assit lourdement à même le sol. « Tu crois que je suis fou n'est-ce pas ? » demanda-t-il avec un sourire en coin tout en détournant les yeux pour la première fois, sa main se glissa dans ses cheveux pour se décoiffer, comment aurait-il pu en être autrement sincèrement ? Il lui avait parlé de fantôme d'entré. Comment faire une bonne première impression dans sa situation ?

Une réelle tristesse s'installa soudain dans son regard. Le monde était tellement cruel de lui faire ça. N'avait-il pas déjà assez perdu ? Sa mâchoire se contracta, ses lèvres se pincèrent. S'il n'était pas déjà complètement bourré ou allumé, il l'aurait recherché à tout prix, encore plus cette soirée-ci vu son état d'esprit ombrageux. Son attention se reporta de nouveau sur la brune, c'était plus fort que lui, elle était là, elle se tenait si proche et si loin à la fois. Si seulement elle était Rosalind... il aurait eu tant de choses à lui raconter, à lui dire... il aurait eu tant de récits à lui conter. « On t'a déjà dit que tu avais une tête à t'appeler Rose ? » murmura-t-il alors, la tête légèrement penché sur le côté avec un petit sourire désabusé. Il allait la faire fuir, elle allait prendre les jambes à son cou bientôt, il en était conscient... mais si avant il pouvait au moins obtenir son prénom... juste pour qu'elle lui brise le cœur à tout jamais quand il réaliserait enfin qu'elle ne pouvait pas être sa soeur parce qu'elle était morte d'un putain de cancer à 9 ans.   

“Qu’est-ce que tu entends par comme ça ?” il hésita avant de se passer la main dans les cheveux, en remarquant leur longueur, il fronça un peu les sourcils, peut-être qu'il devait sérieusement penser à aller se couper les cheveux. Puis il réalisa qu'il digressait et il fut rassuré, au moins ça, c'était un effet de la drogue qu'il connaissait sur lui. Son esprit qui partait dans tous les sens, c'était plus coutumier que voir des esprits. Et les entendre. Et puis leur taper la causette parce qu'après tout, pourquoi pas, au point où il en était. « Voir et entendre des choses comme si c'était vrai » parce que c'était ça le problème. Où était la réalité et où commençait l'imaginaire ? La frontière semblait si mince et pour la première fois de sa vie, il n'arrivait pas à marquer la différence entre les deux. Cette fille avait cassé tous les codes en apparaissant dans sa vie. Elle jurait. Elle était trop bien habillé pour l'endroit, elle ne dégageait pas le même air désespérée que tous les autres. Elle ne pouvait pas être vrai parce qu'elle ressemblait bien trop à sa sœur.

Sauf qu'elle ne pouvait pas l'être. C'était impossible et lui devenait fou par la même occasion. “Un peu, oui.” il sourit, même son fantôme le pensait. Mais il devait en avoir le cœur net, il devait savoir la vérité, quitte à se briser le cœur en miette. Il lança une bouée à la mer, enfin, c'était comme ça qu'il l'appelait, il avait de façon détournée tenter une manœuvre pour découvrir son prénom. “Je m’appelle Primrose donc j’imagine que oui ?” et il avait visiblement réussi. Il était à la fois soulagé, parce qu'au moins, il ne voyait pas d'esprit, elle n'était pas Rosalind. Mais il était aussi déçu, parce qu'elle n'était pas Rosalind. Mais elle restait tout de même une Rose en quelque sorte. « Primrose » dit-il, faisant rouler son prénom sur sa langue. Comme pour s'habituer à le dire et à la penser. « Icare » fit-il alors tout en se pointant du doigt. « Primrose c'est vraiment joli » et c'était la vérité, il aimait bien. C'était une fleur et c'était toujours mieux qu'un prénom sorti de l’œuvre Shakespearienne, ses parents étaient bien trop coincé pour avoir de l'imagination. “On ne se connait vraiment pas, hein ?” ah ah. Il se mit à ricaner en l'entendant dire ça. Bon sang, il allait encore avoir l'air fou ! « Moi j'ai le sentiment de te connaitre depuis que je t'ai vu, toi tu as eu l'impression que j'étais fou à l'instant où je me suis mis à parler. » il ne se voilait pas la face, c'était la pire première impression du monde qu'il lui avait laissé. Il haussa les épaules, ce qui était fait était fait, il ne pouvait plus revenir en arrière ou changer quoique se soit de toute façon. « C'était peut-être le destin. Je devais tomber sur toi et toi tu... devais gagner une nouvelle veste ? » tenta-t-il un peu amusé par la situation. Après tout, Icare devait toujours tenter de trouver du positif à toutes les situations, c'était pour ainsi dire sa marque de fabrique. Il n'était pas fou finalement, elle était juste Primrose, pas Rosalind, il ne voyait pas de fantôme, il ne parlait pas aux esprits. Il était rassuré mais triste, drôle de combo pourtant véridique. Après "parler aux fantômes" en compétence dans son CV ça pouvait claquer, quoique pouvait en penser les gens.

Il n'était pas fou ! Enfin, si, un peu, mais certainement pas au point d'être arrêté ou interné. C'était rassurant. Il ne pouvait pas avoir tous les défauts du monde après tout, déjà que c'était un p'tit con, si en plus il était fou... oh et en plus d'être con, il était aussi un peu alcoolique, insomniaque, accro au bédo à l'occasion. Mais pas fou. Bref. Primrose était bien là devant lui, à portée de main, bien réelle et surtout vivante. C'était un joli prénom, c'était aussi une fleur qu'il avait toujours trouvée jolie, simple. Amour simple se rappela-t-il soudain de la signification de cette fleur, un peu tard aurait souligné son ancienne patronne fleuriste mais bon, mieux vaut tard que jamais, non ? “Je l’aime beaucoup.” et elle avait raison d'aimer son prénom, c'était toujours mieux que Jack. Icare détestait son prénom, il ne prenait même plus la peine de le donner à quiconque, les gens croyaient tous qu'il s'appelait réellement Icare. Au moins Icare, c'était son choix à lui. “Icare, c’est… Original.” il eut un sourire aux lèvres et il arqua un sourcil. Original... ça pouvait être en bien ou en mal. Réalisant sans doute qu'elle avait été maladroite, la brune tenta de se rattraper. “Enfin, je veux dire que c’est peu commun… Ça fait presque… Mythe ou un truc comme ça, tu vois…” Icare lui sourit tendrement, évidemment qu'il allait l'aider à se dépatouiller de son malaise. « Je l'ai trouvé dans un livre quand j'étais jeune » avoua-t-il. « Lui et son père Dédale étaient des aventuriers, dans la mythologie grecque, ils ont été les premiers à voler » il teint sous silence le fait qu'à force de prendre des risques inconsidérés, Icare avait fini par se brûler les ailes en allant trop près du soleil et qu'il en était mort. Beaucoup trop tragique. Encore plus quand on comprenait qu'il avait littéralement choisi ce prénom à cause de son histoire.

Il arrive à la faire sourire, c'est un maigre sourire mais cela sonne comme une victoire pour Icare, elle n'a pas peur de lui, du moins, elle ne semble pas effrayée outre mesure par sa personne, peut-être inquiète pour sa santé mentale mais ça, il pouvait comprendre vu la première impression qu'il lui avait offerte. Mais il tentait de montrer, de prouver qu'il était inoffensif dans le fond. “J’avoue que je suis intriguée par un truc… Comment t’as su qu’y avait le mot ‘rose’ dans mon prénom ? T’es pas un creep qui se fait passer pour un drogué, j’espère ?” oh... il se gratta la joue de son index, hésitant sur la marche à suivre. "You just looked like my dead sister... kinda. But alive and older of course" ne semblait pas être la chose à dire mais il était supposé faire quoi ? Mentir ? Dans son état, ça allait se voir. Quand il était ainsi, défoncé, tout ce qu'il disait était imprégné d'un fond de vérité. « Tu ressembles à une fille que j'ai connu dans le passé. C'était une Rose, belle, piquante, vivace... » avoua-t-il le regard plus doux, un ton nostalgique dans la voix. « Donc non, j'suis pas un "creep", junkie, okay, mais pas creep. Par contre les gens autour de nous, je ne leur suis pas garant ! » ajouta-t-il tout en ayant un geste circulaire de la main. Son regard tomba alors sur un latino furax. Oh oh. Problème. Le latino arriva comme une fusée et l'attrapa par le col. « Hi... » fut la réponse instantanée d'Icare avec un air mutin, il allait ramasser, il le savait, tout le monde pouvait le voir. « Pas le visage, c'est utile pour le boulot » l'autre lui retourna alors un poing dans l'estomac qui lui coupa le souffle. « Tu danses plus avec ma copine ! » s'écria l'autre tout en tournant les talons près à partir après avoir obtenu ce qu'il voulait. « C'est elle qui l'avait demandée » répondit-il par réflexe. Oh oh. L'autre s'arrêta, son regard encore plus furibond et décocha cette fois-ci un coup à son visage. C'était mérité. Un peu. Il se retrouva au sol et toucha du bout des doigts son arcade douloureuse. Il grimaça tout en observant Primrose. « Si je raconte demain que je me suis pris un coin de table, je sonne crédible ou débile ? » demanda-t-il pour se rassurer tout en exerçant un peu de pression sur son coup. Putain, on l'avait pas raté. Sa patronne allait encore moins l'apprécier ! Son visage était son gagne pain, c'était un serveur bon sang, il le savait pourtant, sa putain de langue l'avait encore trahie ! "It's the last time I smoke that shit" pensa-t-il sans sincèrement y croire.

“C’est pas ton vrai nom ?” Icare cligna des yeux. Effectivement. Vu comme il avait présenté les choses, la conclusion était la bonne, mais souvent, les gens ne le réalisaient pas, quand ils entendaient son prénom, ils se contentaient de dire que c'était étrange puis ils passaient à la question suivante. Il se gratta l'arrière du crâne. « Je m'appelle Jack mais... » sa grimace à son vrai prénom fut réelle. « J'ai jamais été fan, puis mon père le prononce plus comme "Jacques", je reste persuadé qu'on ne l'a pas compris quand il a été me déclarer. » et Jacques il détestait encore plus, surtout quand uniquement son paternel l'appelait de la sorte.

Leur conversation par la suite est plus légère, elle semble être plus encline à lui parler maintenant qu'elle a statué qu'il n'est pas si fou que ça finalement. Elle semble même vouloir l’interroger un peu plus, mais tout ça est balayé par le latino furieux de son début de soirée. Tout ça pour une danse qu'il n'avait pas plus que ça cherché, c'était la fille qui l'avait embarqué dedans, en soit, pouvant-on le considérer comme fautif quand c'était clairement les danses latines qui étaient plus sensuelles que toutes les autres ? Il s'était contenté de garder le rythme pour sa part. Mais il fut quand même content de voir que Primrose avait réagi directement... “Hey, lâche-le!” sauf qu'une fois debout, il était claire qu'elle ne pouvait pas faire grand chose, elle était toute petite... vraiment toute petite et il eut peur pour elle, qu'elle ne se blesse, que ce soit de sa faute à lui, il s'en voudrait tellement... sauf que l'intérêt du latino était tout sur sa petite personne. Et il lui donna un bon premier coup. Tout aurait pu s'arrêter là s'il avait juste fermer sa gueule. Mais sa bouche avait parlé avant que son cerveau réalise ce qu'il venait de faire. Crétin. Sombre cré-tin. “T’aurai pas pu te la fermer ?” il grogna regrettant sa réaction évidemment avant de s'en prendre un bon coup au visage. “Mais ça va pas!” il cligne des yeux rapidement, l'esprit un peu hagard. « Dejarla » murmura-t-il en espagnol à moitié assommé... mais il voulait la protéger quand même. Il espérait que Primrose serait plus intelligente que lui et n'allait pas le provoquer aussi ce latino qui savait plus se battre qu'Icare. Blague du siècle : il ne savait pas le faire du tout.

Il tenta de faire un peu d'humour malgré sa situation, elle était inquiète et il n'aimait pas la voir de la sorte, il voulait la rassurer mais avec sa sale tête, c'était assez mal parti. “Ça dépend. Tu te serai pris les pieds dans un tapis ou en essayant de sauver quelqu’un dans un incendie ?” il marqua un temps de réflexion, jouer au super-héros c'était bien pour les autres mais pas pour lui clairement, il serait même plus doué pour jouer la demoiselle en détresse malheureusement. « Le tapis » opta-t-il de dire avec un sourire qui, il le réalisa après, lui fit mal à son arcade, okay, sourire c'était fini pour ce soir. “Il faudrait mettre de la glace là-dessus. Il t’a pas loupé.” mais ce n'était pas à porté de main. « Je pourrais avoir ton verre d'alcool ? » demanda-t-il, parce que ça au moins, c'était à porté de main ! “Tu as l’air d’avoir un talent pour te foutre dans la merde, je me trompe ?” oh oh, c'était le cas de le dire. C'était même assez inné tout ça chez lui. Ce n'était pas la première fois —et encore moins la dernière— qu'il se ramassait un bon coup mérité en quelque sorte. Et puis comme il n'était pas violent, c'était souvent lui qui finissait amoché. Il tenta de se redresser sur ses coudes avant de s'asseoir en tailleur et il appuya sur sa blessure, au moins, il ne saignait pas, la vue du sang était insupportable chez lui. Déjà qu'il venait de s'en prendre une, si en plus il s'évanouissait, il allait perdre toute sa crédibilité aux yeux de Primrose. Puis il réalisa qu'il n'avait toujours pas répondu. « C'est un talent de naissance chez moi, mes frères ont toujours dit que j'avais une tête à claque » entre autres, sa main glissa alors sur son torse, la douleur au visage était plus lancinante, mais il avait aussi reçu un coup là et il était sûr d'avoir un autre bleu à cet endroit. « Hey, j'ai déjà vu pire, ne t'en fais pas trop pour moi » relativisa-t-il simplement. « Ma patronna va juste m'étriper si elle me voit, je suis serveur, je peux pas travailler si j'ai une trop sale tête, donc question vitale, est-ce que ma tête passe ou j'ai l'air d'un parent proche d'Elephant Man ? » demanda-t-il sincèrement tout en s'humectant les lèvres un peu inquiet de la réponse de Primrose.

“Je comprends le changement de prénom dans ce cas-là.” il eut un sourire en coin, il en doutait un peu mais il garde le silence, il avait omis aussi de rappeler qu'Icare, ce n'était pas juste parce que c'était moche "Jack". C'était aussi pour cette grande sœur qui lui avait fait promettre de ne plus se laisser marcher sur les pieds et de ne pas avoir peur de vivre des aventures... Jusqu'à ce que mes ailes brûlent. Tragique en un sens mais ça n'effrayait pas Icare outre mesure, il était prêt à aller jusqu'au bout de ses limites pour être sûr de n'avoir aucun regret.

Mais évidemment, ce qui aurait pu juste être une rencontre cocasse se transforma rapidement pour Icare en règlement de compte. La roue avait trop vite tourné pour lui et il s'était pris un bon revers de karma... sur le visage et sur le torse. Littéralement. Et il avait mal ! Est-ce que c'était réellement sa faute ? Pour être tout à fait honnête avec lui-même, si pas le premier coup, le deuxième quand même un peu, il avait été idiot et il avait parlé avant de penser. Mauvaise idée, surtout pour quelqu'un qui refusait de se battre, la violence entrainait toujours plus de violence à ses yeux. Mais même s'il était amoché, il restait Icare et tentait d'alléger et relativiser la situation. Il ne voulait pas inquiéter Primrose. Il allait juste inventer quelque chose, toutes les personnes qui connaissaient Icare savaient que ce n'était pas un super-héros. Maladroit, quand même de temps en temps... enfin, plutôt, apparemment on aimait le frapper. En plus, il ne tirait jamais de leçon de ce genre d'aventures vu qu'il finissait immanquablement par recommencer une connerie ou l'autre. “Alors ça sera plus que crédible.” right, l'histoire du tapis. Il pouvait dire qu'il s'était pris les pieds. Il pouvait toujours... broder autour, dire qu'il avait bu et qu'il n'avait pas su se protéger en tombant. Il demanda le verre de Prim. L'alcool était toujours une solution à tous les problèmes. “Tu me dois un verre.” il ricana. « Je suis prêt à te payer une bouteille entière pour te montrer toute ma reconnaissance » répondit-il aussi tôt. Mais même si dans le fond, il restait léger, il devait avouer être un peu inquiet pour son visage, autant le corps, il pouvait couvrir, mais le visage... travailler avec une gueule amoché n'était jamais une bonne idée, à tous les coups, on allait le foutre derrière le comptoir (ce dont il n'était pas fan) et on lui taperait sur les doigts pour négliger son apparence... “En tout cas, pas d’une tête à claque.” il sourit avant de grimacer presque immédiatement et fermer les yeux. Crétin. “C’est surtout ton oeil qui a pris donc… T’as vu pire mais t’as sûrement connu meilleur. Y’a des chances pour que ta patronne t’étripe. Désolée pour toi.” il soupira. « Déjà qu'elle n'est pas fan de moi... ça ne risque pas d'arranger les choses entre nous... » avoua-t-il avec une petite moue. “Tu veux un coup de main pour l’alcool ? Faudrait déjà que tu te redresses mieux. T’as mal ailleurs ?” il se montra obéissant et il se redressa un peu mieux. Il attrapa le verre et il but une gorgée pour le bien moral. Vodka, pas mauvais, il aurait préféré un whisky pur à cet instant cela dit. Il rendit alors le verre à Prim. « J'veux bien un coup de main, si ça ne te dérange pas et j'ai mal... au torse un peu... » relativisa-t-il avant de soulever rapidement son t-shirt et de laisser tomber son regard sur un nouvel hématome d'une couleur pas très agréable sur son torse, ce n'était pas ouvert au moins (pas de sang), juste sacrément douloureux. « ça m'apprendra à danser avec des inconnues » marmonna-t-il avec ennui. Parce que la raison de tout ça avait démarré d'une simple danse innocente en vrai. Crétin.