Quelques semaines après l’ouragan ‘Violet Dawson’. Ça fait depuis la visite à l’improviste de la mère d’Oli’, -visite qui n’était pas vraiment à l’improviste d’ailleurs-, qu’on fait comme si de rien n’était. C’est comme ça, que je l’ai vu revenir le lendemain à la Brigade, sans qu’on débriefe sur cette étrange matinée. Et, par pur mimétisme inconscient, je l’ai suivi. J’ai pas parlé avec Oliver, de ce qui s’est passé. De ce que sa mère a peut-être pensé de moi, qui peut profiter ainsi de son fils aîné. Non, on en a rien dit. Parce que, dès qu’on se retrouve tous les deux seuls, on est pas loquaces. On ne parle généralement pas. Ce sont nos corps qui s’adressent l’un à l’autre et non nos mots. C’est peut-être plus facile d’officier par des gestes que par des paroles, finalement. Alors du coup, le sujet maman-louve-d’Olly, n’est plus vraiment mis sur le tapis.
Sauf que moi, ça me ronge un peu. Même si on est rien aux yeux du monde, qu’on est rien d’officiel, bah ça me perturbe. Parce que d’ordinaire, je m’enfuis ou on me largue avant de me présenter à la belle-famille. Parce qu’à partir de ce moment-là, ça devient trop concret pour exister. C’est bien trop réel. Et surtout, y’a pas d’échappatoire possible. Là, ça devrait pas me faire ça. Je devrais pas penser à ça, étant donné que mon binôme m’a présenté à sa mère comme tel. Mais, je crois que j’y peux rien. Qu’au fond de moi, y’a cette petite voix qui me murmure que j’aurais dû faire bonne impression. Parce que devant moi, s’est trouvée la génitrice de mon partenaire et que dans mon fort intérieur, je devais étrangement pas merder. Et, comme j’ai dit : on statue sur une stratégie d’évitement du sujet. Car dès lors, qu’on se voit, on a mieux à faire. Bien. Mieux. À. Faire.
Sauf qu’aujourd’hui le Chef en a décidé autrement. Alors que je suis en train de remettre au propre un rapport, mes lèvres contre ma gourde d’eau, il nous exhorte Olly et moi de filer un suspect à l’Aéroport de Brisbane. Son signalement apparait sur nos bureaux respectifs et on a pas vraiment le choix que de s’associer. Encore. C’est hyper tôt le matin, et il me faut ma dose de caféine en plus de celle de nicotine, alors que je m’adosse contre la voiture banalisée. Fumant, tout en jetant un œil au dossier du type qu’on va interpeller, mon regard gris dévie sur mon binôme. Occupé à me fixer, sans parler. Haussant un sourcil pour le moins circonspect, je l’invite à prendre place derrière le volant. Parce qu’en ce qui me concerne, j’ai une putain d’autre idée : on va passer chez Trent prendre deux cafés bien noirs et une dose de sucre. Ses muffins, qu’il fait maison et que tout le monde s’arrache.
Dans la voiture, on cause pas. Alors, que mon regard gris scrute la route jusqu’à arriver à la destination voulue. L’étape, avant l’Aéroport de Brisbane. Sortant en vitesse du véhicule, je reviens avec ce que j’ai promis à Oli’ dans les mains. Deux énormes gobelets de café, et une portion de sucre. Là, j’avoue que j’en ai besoin : vu qu’on va se taper huit heures de planque. Caché le plus finement possible, pour arrêter un touriste qui doit transiter par l’Aéroport, durant une escale. Ce qui signifie, un court laps de temps sur notre sol, logiquement. Soufflant sur le café brûlant, j’attends précautionneusement, avant d’en boire une seule gorgée. Mais, je me permets de prendre une bouchée de mon muffin à la myrtille qui me fait pousser un soupir d’extase. Et là, je me rends compte d’un truc : on va avoir huit heures pour parler. Huit. Heures. Et, que le moment est peut-être venu pour aborder le sujet de la fois passée : sa mère. Violet Dawson.
- Comment va Violet ? Que je lui demande, avec un petit sourire, derrière mon gobelet de café, que je sirote doucement. J’avoue, j’ai jamais été très douée pour lancer une amorce. On est un peu mal barrés. Et toi ? Prêt à se farcir huit heures ?
On se fait souvent des idées sur ce que peut penser l’autre. Est-il sur la même longueur d'onde ? Pense-t-il la même chose que moi ? Est-ce-que cet événement est aussi important pour lui que pour moi ? A-t-il lui aussi besoin d’en parler ? On se torture l’esprit avec ces interrogations pendant des heures, des jours voire des semaines. Pour ce qui est du cas Oliver Dawson, il a déjà oublié l’événement Violet Dawson. La raison est très simple : l’avis de sa famille, il s’en fout. A force d’avoir bâti une barrière infranchissable entre sa vie privée et la vie des Dawson, il parvient à les ignorer. Tous. Alors forcément, il ne ressent pas le besoin de débriefer la rencontre des deux femmes. Il n’en a pas le besoin et ne s’imagine pas une seule seconde que Billie puisse en avoir elle-aussi besoin. Après tout, elle ne lui en a pas parlé. Elle ne l’a même pas évoqué ou énoncé. Alors pour lui, rien est différent. Billie n’est pas bavarde, lui non plus. Si elle ne parle pas, c’est qu’elle n’a pas besoin de s’épancher sur ses sentiments ou évoquer quoique ce soit. Peut-être a-t-elle un mauvais jour, une mauvaise semaine … il respecte, il se tait et se concentre sur la route tout en les conduisant chez Trent, histoire de pouvoir se préparer à une journée qui sera sans aucun doute interminable.
Saisissant le gobelet qu’elle lui tend, il souffle un merci poli pour finalement le caser à l’endroit réservé près de l'autoradio. « Comment va Violet ?» Il fronce les sourcils tout en tournant la tête vers son binôme. Il ne pourrait vous dire pourquoi mais entendre Billie prononcer le prénom de sa mère a quelque chose d’étrange. Positif. Négatif. Neutre. Il n’en a aucune idée mais c’est juste bizarre. « Et toi ? Prêt à se farcir huit heures ?» Il se concentre de nouveau sur la route et ne peut que saluer la manière dont elle a de placer des bombes sur son chemin. Balancer le prénom de sa mère et enchaîner avec une question encore plus anodine : du Billie tout craché. « Violet se porte à merveille.» dit-il en se redressant, lui jetant un regard amusé du coin de l'œil. « Comme tu as pu t’en apercevoir en personne, elle est du genre coriace … elle se porte toujours à merveille.» ironise-t-il sans vraiment s’en cacher. Un clignotant vers la droite, il prend la direction de l’aéroport tout en ayant le dossier du suspect à suivre dans la porte de sa voiture. Pas sûr qu’il soit suffisamment concentré pour surveiller les allers et venus pendant huit heures mais avec elle à ses côtés, il y ait des chances pour qu’ils se concentrent. Pas leur première fois à devoir faire ce genre de boulot des plus ennuyants et pourtant si importants.
« Moi, je me demande comment on va survivre par ce temps avec deux cafés et quelques muffins ...» et il tourne la tête vers elle pour lui adresser un sourire complice. Évidemment qu’il va bien et qu’il n’appréhende pas ces huit heures. Ils ont l’habitude après tout. « T’en as pensé quoi de la Violet ? Est-ce-qu’elle explique mon comportement de gamin élevé parmi les loups ? Si jamais je me fais convoqué un jour chez le psy du service, faut que je sache si je peux compter sur toi …» Plaisanterie par-ci, plaisanterie par-là car il ne se doute pas encore de ce que cela signifie pour Billie et les interrogations qui l’occupent.
Quelques semaines après l’ouragan ‘Violet Dawson’. Je suis pas comme ça d’ordinaire, moi. J’ai pour habitude de tout relativiser. De prendre à la légère, ce qui peut même être problématique en ce monde. J’ai un autre regard sur ce qui peut m’entourer. Sur ce que je traverse. Quand mon père est mort, j’ai pleuré, bien évidemment. Pas beaucoup, mais quelques larmes ont ruisselé sur mes joues pâles. Quand j’ai fait interner ma mère, ça a été pareil. À l’identique. J’ai ressenti une forme de peine, que j’ai contenu durant un laps de temps assez conséquent. Ce qui m’a conduite à aller voir une psy’. Même si j’y ai jamais cru. Elle, elle m’a sorti qu’il fallait accepter ses émotions. Les accueillir. Et, comment on fait quand on sait pas ? Quand on est perdue, tout comme moi ? Là, avec la visite de la mère d’Oliver.
D’ordinaire, je passe rapidement à autre chose. C’est fait, un point c’est tout. Mais là, j’y peux rien. Puis, je crois pas que je puisse oublier. Ça me grignote les méninges comme un vulgaire parasite et huit heures sans cracher le morceau à côté de lui, je vais pas pouvoir tenir une journée de plus. Du coup, j’ai fait comme je sais si bien le faire : j’ai donné un coup de pied dans une porte entrouverte, avant de passer par la casse broutilles. C’est tout moi ça : j’amorce la grenade, je la dégoupille, je la jette et après, je viens sautiller avec un bouclier. Pour voir les dégâts que ça peut occasionner. Mais mon binôme, ça l’atteint pas. Avec un tendre sourire, je me dis qu’inconsciemment je ‘sais’. Que sa famille, il la tient éloignée de sa vie privée. Question de survie. Or, y’a mon autre petite voix qui me chuchote insidieusement comme un petit poison, que je dois ‘savoir’. Que je dois demander. Sinon, je vais tourner folle. Alors baaaah, j’ai tenté.
- Ah. Un soupir, plus qu’une affirmation. Si Violet se porte à merveille, qui suis-je pour juger ? Ouais. J’ai pu facilement m’en rendre compte. Maman Dawson, assez louve, je dirais. Prête à sortir les crocs pour protéger sa progéniture. Je ris, mais c’est le rire gêné, que j’ai eu avec sa mère en face de moi. Malaise, round two.
D’ailleurs, heureusement que mon partenaire fait la conversation pour deux. Parce qu’honnêtement, à part siroter mon café avec un certain bruit, je fais pas grand-chose. Mon regard gris scrute Oli’ à la dérobée, avant de se focaliser entièrement dessus, quand il alpague mon intérêt. Là, j’avoue qu’il a entièrement raison : comment on va faire pour survivre avec seulement deux cafés et deux muffins ? Voilà, que je me mords les joues. Parce que je suis la première à prendre une cargaison entière de bouffe et de boisson quand on se retrouve en planque. Et là, j’y ai même pas pensé. C’est vraiment que ça va pas. C’est pas ‘moi’. Je me reconnais pas. Merde.
- Ah bah, déso’. J’ai pas prévu plus. Au pire, je m’éclipserais dans l’aéroport pour aller chercher de quoi nous rassasier. Parce que ouais, huit heures avec juste ‘ça’, c’est chaud. Le ‘ça’, ça désigne mon gobelet de café presque fini et mon muffin qui l’est tout autant. Merde. Merde. Merde. Et là, y’a toute la tentative d’assurance que j’ai tenté d’accumuler jusqu’à présent qui vient de se barrer en me faisant un doigt d’honneur, s’il-vous-plait. Alors … eh bien … je comprends l’écosystème Oliver Dawson. Un rire tendre, alors que je pose mon regard gris sur lui. Tu peux compter sur moi. Je suis ton binôme, non ?
Binôme, qui se mord les lèvres d’ailleurs. Avant de poursuivre. Tout en sachant pas sur quel pied danser. Posant mes mains sur mes cuisses, j’inspire un grand coup, secouant mes boucles rousses. On dirait que je me prépare à faire un show au karaoké … bien que j’aurais LARGEMENT préféré cette option, ceci étant dit.
- J’avoue que … j’étais pas préparée à cette ‘rencontre’. Que je sais pas si j’ai fait bonne impression. Qu’elle doit penser que j’abuse de son fils en squattant chez lui avec mon putain de dégât des eaux … Et merde, je m’emballe. Moi, qui ai pas parlé pendant des semaines, je me retrouve à faire un monologue totalement décousu, comme une adolescente de quinze ans. Et encore, peut-être que l’adolescente en question est plus mature. Qui sait ? Oublie. Oublie mes conneries. Tout. Tout ce que je viens de dire. Je ferme mon regard gris, tout en massant mes tempes. Bordel. De. Merde.
« Ah. Ouais. J’ai pu facilement m’en rendre compte. Maman Dawson. assez louve, je dirais. Prête à sortir les crocs pour protéger sa progéniture. » Il vient rire avec elle car elle présente bien sa mère. Une mère louve qui protège sa progéniture. A son goût, elle le protège trop tard. Trop tard car elle n’a pas su le protéger de son père, de la pression paternelle, du stress et de ce perpétuel sentiment d’être dans l’échec. Non, elle n’a pas su le protéger du plus grand danger : celui qui était à la maison, chez lui. « Non, ma mère aboie mais elle ne mord pas. » dit-il sans vraiment avoir conscience de ce que Billie sous-entendait vraiment. Il est encore sur le ton de la plaisanterie, bien loin de prendre vraiment conscience de la situation. « Elle a jamais mordu personne ; personne qui a survécu pour en parler. » ajoute-t-il dans un éclat de rire tout en continuant son chemin vers l’aéroport.
« Ah bah, déso’. J’ai pas prévu plus. Au pire, je m’éclipserais dans l’aéroport pour aller chercher de quoi nous rassasier. Parce que ouais, huit heures avec juste ‘ça’, c’est chaud.» « Sportif, ça c’est sûr. On survivra. » qu’il dit en hochant d’un signe de tête, saisissant enfin son gobelet de café pour en boire une mince gorgée. Brûlant, pas la meilleure des idées en conduisant, il abandonne et le laisse de nouveau à sa place. « Alors … eh bien … je comprends l’écosystème Oliver Dawson. Tu peux compter sur moi. Je suis ton binôme, non ?» Et sa main vient se poser sur la cuisse de la jeune femme tout en lui adressant un sourire complice : « Meilleur binôme.» Et il le pense réellement. Il a vraiment de la chance de l’avoir à ses côtés ; depuis toujours. ils forment une belle équipe au boulot et désormais, ils forment une belle équipe même en dehors du boulot … juste qu’ils sont les seuls à en être témoins, si jamais ils en prennent conscience. La voiture banalisée s’approche de l’aéroport. Situé en dehors de la ville, ils ont encore quinze minutes devant eux avant de pouvoir se caler sur une place de parking bien placée. « J’avoue que … j’étais pas préparée à cette ‘rencontre’. Que je sais pas si j’ai fait bonne impression. Qu’elle doit penser que j’abuse de son fils en squattant chez lui avec mon putain de dégât des eaux … Oublie. Oublie mes conneries. Tout. Tout ce que je viens de dire» Il sourit avec tendresse devant l’avalanche de paroles de la rouquine. « Personne était préparé à cette rencontre du troisième type.» Un regard en biais dans sa direction et il prend finalement conscience de son malaise. Sa main se pose aussitôt sur sa cuisse, un geste rassurant. « T’aurais envie d’avoir fait bonne impression ?», demande-t-il avec candeur. « Tu te souviens que j’suis un sale gosse et que je suis du genre à pas prêter attention à ce que peuvent penser les autres … ? » Mais, apparemment elle était plus soucieuse de savoir ce qu’avait pensé sa mère à son sujet. Il lui tapote la cuisse avant de se concentrer de nouveau sur la route.
Quelques semaines après l’ouragan ‘Violet Dawson’. Bon. J’ai eu l’art de taper dans le mille avec ma description de la mère d’Olly. Violet. Elle, je l’ai vue vraiment comme une louve gardienne de ses petits. En mode, qu’il faut pas les toucher. Qu’elle doit les protéger. C’est comme ça, que ma première rencontre avec elle, s’est soldée. Avec cette drôle d’impression que si je touche à son fils aîné, elle va me sauter à la gorge. Malgré ses airs de ‘grande dame fortunée’. Lorsque mon acolyte rit, je lui offre un sourire contrit. Aussitôt, assorti d’un rire, parce que le sien est communicatif, alors que je reste assez stressée. C’est plutôt un rire de stress que je lui octroie alors. Ça, et une petite grimace. Tandis que je me pince les lèvres, je sens bien qu’il essaye de me rassurer et qu’il y parvient. Un peu. Juste. Un. Peu.
- Ça va alors. Un silence, et à nouveau un pincement de mes lèvres. Bon. J’estime que je m’en sors pas trop mal alors. Si j’ai pas perdu un bras ou une jambe dans cette rencontre ? Non ? Des questionnements, pour relativiser. Okay. Okay. Je peux être heureuse, du coup. Cette fois, je lui donne en réponse, un sourire des plus éclatants. Et, un froncement de nez pour le moins taquin. Même si ça continue de me trotter dans la tête. Et, que ça a pas l’art de s’évaporer si facilement. Si seulement.
Comme quand j’ai oublié nos rations, comme une pauvre abrutie. D’ordinaire, je prévois un énorme sac de ravitaillement militaire. Le truc, bien fat, couleur kaki. Où, à la place de tout un panel d’armes, j’y place toutes les crasses culinaires que je peux trouver. Rapidement. Y’a du coca pour nous tenir éveillés, et une putain de dose de sucre qui remplace du diabète en intraveineuse, limite. Là, bah j’ai tout oublié. Sous couvert que mes pensées se sont tournées essentiellement vers la mère d’Oliver Dawson. De ce qu’elle a pu penser de moi, pour une première. Alors que bon, je suis rien moi. La meuf de passage. Et, il suffit qu’elle ait débarqué un week-end pour chasser d’un coup d’escarpin, toute mon audace et cette propension manifeste à prôner la résilience en tout temps.
- Hum. Pardon d’avoir été conne à tout oublier, là. Surtout que je suis la première à mordre les collègues de la Brigade, si je bouffe pas correctement. Et là, comme une bleue, je prends juste deux petits cafés et deux muffins qui vont pas nous nourrir. Je l’ai dit, ‘ça’, c’est pas moi. Pas moi du tout. Je te fais confiance, si tu dis qu’on va survivre … Un soupir, avant que mes lèvres n’arborent un sourire tendre, lorsqu’il me qualifie ainsi : meilleur binôme. Surtout, que je ressens exactement la même chose à son égard. Oliver Dawson : meilleur binôme. Dans et en-dehors du terrain. Merci. Pour moi, c’est pareil.
Tout ça, avant que je lui jette en pleine figure une horrible logorrhée verbale. Un flot de paroles incessant qui est totalement déconstruit. Sans début et sans fin. Surtout, que j’ai tout noté. Tout ce que j’ai eu envie de lui dire après le départ de sa mère. Quand on a fait ‘semblant’. Mais, y’a rien qui est sorti. Sauf ici. Alors que c’est une totale catastrophe et que je sais pas la gérer plus que ça. Mon regard gris s’ancre à son regard brun, qui se veut là encore, hyper rassurant. Et, son sourire tendre me réchauffe le cœur. D’un coup. Au lieu de pousser un soupir désabusé face à cette situation que j’ai jugé insurmontable, j’en pousse un soulagé, cette fois. Avant de rire. Doucement.
- Tu compares ma rencontre avec ta mère, à un chef d’œuvre de Spielberg ? Un tendre sourire, alors que pose ma main sur la sienne qui se trouve sur ma cuisse. Je me suis sentie comme Barry, le gosse de quatre ans devant ses jouets qui deviennent fous … Un rire, à nouveau. Avant qu’il ne me cloue le bec avec son interrogation. Et, c’est d’une toute petite voix, cachée derrière mon gobelet presque vide que je lui réponds. Moui. Inconsciemment, oui. C’est con, hein ? Un silence. Je le sais ça. Que t’apportes peu d’importance, voire pas du tout, à ce que peuvent penser tes congénères. Un autre silence. Mais, j’avoue que quand je me suis retrouvée face à ta mère, ça m’a déstabilisée. Pour être honnête, je pensais qu’on serait seuls. Mais, Violet prépare les meilleurs petits-déjeuners du monde ! Un autre soupir. Alors que je plante mes iris grises dans les siennes qui savent me réconforter, tout en caressant sa main avec mon pouce. Et, vu que je suis nulle pour discuter … je savais pas comment aborder le sujet. Tu peux te foutre de ma gueule ou me rire au nez. Je t’en voudrais pas, tu sais. Clairement pas. Une petite moue contrite. Y’a mon autre petite voix qui elle, commence tout doucement à être soulagée.
« Ça va alors. Bon. J’estime que je m’en sors pas trop mal alors. Si j’ai pas perdu un bras ou une jambe dans cette rencontre ? Non ? » Il ne répondit pas et tourna simplement la tête vers elle pour croiser son regard quelques secondes, les sourcils levés. Elle exagérait sans aucun doute et il voulait la voir relativiser sur cette rencontre certes tordue et bizarre mais elle devait relativiser. Cette rencontre ne signifiait rien, pour lui. C’était d’ailleurs sans doute le problème : il n’avait pas encore conscience que cette rencontre signifiait quelque chose pour elle. « Okay, okay, je peux être heureuse, du coup. » « Voilà qui est mieux. Tu peux être heureuse, rassurée, satisfaite, tout ce que tu veux. » qu’il dit tout en agitant une main libre comme pour amplifier ses problèmes.
« Hum. Pardon d’avoir été conne à tout oublier, là. Surtout que je suis la première à mordre les collègues de la Brigade, si je bouffe pas correctement. Et là, comme une bleue, je prends juste deux petits cafés et deux muffins qui vont pas nous nourrir. » Un rire de bon cœur vint s’immiscer au milieu de ses excuses sincères. Ouais, elle était toujours responsable de la bouffe … pas son truc à Oli. Elle avait un côté Hulk quand elle ne mangeait pas assez ou avait faim, ils s’étaient rapidement mis d’accord que ca serait son business à l’avenir pour sa propre survie, leur propre survie. « Je commence à avoir un peu d’expérience avec la Redfield affamée, je connais les signes qui avertissent d’une possible transformation en Hulk. On va gérer, t’inquiètes », qu’il ajoute sur un ton extrêmement rassurant. « Je te fais confiance, si tu dis qu’on va survivre. » Acquiescement d’un signe de tête tout en saisissant son gobelet de café pour en boire une mince gorgée. Non, toujours trop chaud. « Merci, pour moi c’est pareil. » qu’elle ponctue pour lui rendre ce compliment dissimulé qu’ils se font sans en faire tout un roman.
« Tu compares ma rencontre avec ta mère, à un chef d’œuvre de Spielberg ? Je me suis sentie comme Barry, le gosse de quatre ans devant ses jouets qui deviennent fous … » Il rit tout en secouant la tête de droite à gauche. « Moui. Inconsciemment, oui. C’est con, hein ? Je le sais ça. Que t’apportes peu d’importance, voire pas du tout, à ce que peuvent penser tes congénères. Mais, j’avoue que quand je me suis retrouvée face à ta mère, ça m’a déstabilisée. Pour être honnête, je pensais qu’on serait seuls. Mais, Violet prépare les meilleurs petits-déjeuners du monde ! Et, vu que je suis nulle pour discuter … je savais pas comment aborder le sujet. Tu peux te foutre de ma gueule ou me rire au nez. Je t’en voudrais pas, tu sais. Clairement pas. » Avec sa simple question, il avait déclenché une vague de paroles chez son binôme. Elle avait laissé s’échapper tous ces doutes en quelques secondes. Et, il comprit soudainement qu’elle avait gardé toutes ces paroles dans un coin de son esprit, beaucoup trop longtemps. « J’ai pas envie de me moquer. » lâcha-t-il soudainement avec le plus grand sérieux. « C’est presque mignon de te voir comme ça » ajoute-t-il sur un ton plus taquin. « Quand tu sais pas comment aborder le sujet, fonce dans le tas, mets les pieds dans le plat … je sais que tu sais exactement comment t’y prendre » Une fois de plus, il voulait la voir relativiser. Ils se connaissaient. Il l’avait déjà vu mettre les pieds dans le plat … et il avait même eu envie de se planquer devant tant de franchise. « Si savoir ce que pense ma mère à ton sujet t’intéresse et compte … alors je vais te le dire, elle pense qu’une femme ne devrait pas bosser dans la police, encore moins dans la criminelle. Elle te trouvait néanmoins polie, bien élevée mais un peu trop masculine à son goût … si masculine à ses yeux qu’elle ne peut même pas s’imaginer tout ce qui m’est passé par la tête quand on s’est dit au revoir. Pas mal d’idées cocasses. » Il avait exagéré sur le terme masculine pour bien lui montrer que c’était l’avis d’une femme étriquée, pas très féministe et dont les apparences sont toujours aussi primordiales.
« C’serait quand même plus intéressant de savoir ce que moi, j’ai pensé, nan ? » Un regard dans sa direction. « Merci d’avoir joué le jeu. » finit-il par dire, apercevant au loin la sortie qui les conduirait à l’aéroport.
Quelques semaines après l’ouragan ‘Violet Dawson’. J’ai peut-être l’art d’exagérer souvent. De me raconter un peu trop d’histoires. Mais là, c’est fou comme ça m’a perturbée. Pour pas me reconnaitre ainsi, c’est que Violet a eu une forme d’impact sans précédent. Alors que merde, moi généralement j’ai une aptitude folle à me foutre de tout. Pas de n’importe qui, mais de tout. Ça me passe au-dessus de mes boucles rousses. Sauf au boulot. Parce que ce boulot, c’est ma vie. Et, que pour rien au monde je n’en changerais. Comme je changerais jamais de binôme. Lui, je peux pas trouver mieux. Parce que je crois que c’est comme ‘ça’ en fait. Malgré les mères surprotectrices qui font un peu peur. Et, que leur fils a un potentiel hors norme pour tout dédramatiser. Pour ça, je lui tire mon chapeau imaginaire. Mais, ce qu’il a comme réponse, c’est un sourire. Tendre.
- Ça va. Ça va. Que je lui rétorque en riant à nouveau. Et de m’excuser à nouveau concernant le manque de bouffe. Décidément, je m’excuse assez souvent ces temps-ci. Fronçant mon nez avec malice, je ne peux cacher bien longtemps mon éclat de rire qui se pointe. Parce qu’il est pas le seul à connaitre une Billie totalement régie par le manque cruel de nourriture. Ah ? Comme les grands fauves, faut me jeter un appât, c’est ça ? Une petite tape sur son bras, avec un sourire complice. Merci, de dire qu’on va gérer. Comme d’hab’, t’as toute ma confiance. Tu le sais ? De toute manière, il le sait. Comment, il peut en être autrement, après tout ?
Puis, j’ai tout déballé. J’ai tout sorti sans parachute pour l’atterrissage. Faut croire, que je me suis rattrapée comme une pro’, parce qu’Oli’, il a pas l’air de me juger. Et, que ses paroles sont teintées toujours d’une dose de bienveillance. Qu’il tente de me rassurer, je trouve ça adorable. Mordant ma lèvre inférieure, je l’écoute avec un certain intérêt, mon regard gris ne quittant pas le sien. Au terme ‘mignon’, je peux pas m’empêcher de lui donner un coup de poing dans l’épaule, faisant mine d’être vexée au plus haut point. Avant, de lui sourire. À deux doigts, d’être prise d’un fou rire. Parce que j’ai relâché une bonne partie du stress qui me bouffait l’esprit. Avec cette rencontre, totalement saugrenue, là.
- Mignon ? Tu te moques, en plus Dawson ? Un rire, avant d’hausser un sourcil circonspect. Me rendant compte qu’il n’a pas tort. Je peux être bourrine quand je veux. Mais là, j’avoue que le principe même m’est pas venu à l’idée. Que ça a été tout l’inverse. Hum. En effet. Là, ça a été pas du tout ça. Ça a été le revirement total inverse. Une petite moue taquine. Comme quand je t’ai dit que tu me plaisais ? C’était ça, mettre les pieds dans le plat façon Redfield ? Je le sais pertinemment et je l’embête ostensiblement avec ça. Or, il me plait toujours autant et ça, je peux pas le nier vraiment.
Quid de sa mère ? J’écoute le verdict de la matriarche à mon égard, avec une forme étrange d’appréhension. Selon elle, je devrais pas avoir rejoint les rangs de la criminelle. Cependant, je reste quand même polie et bien élevée. Et ça, ça me fait sourire alors que je contemple toujours mon binôme. Jusqu’à ce qu’il attise pleinement ma curiosité. Il est à noter que j’ai pas tiqué sur le terme ‘masculine’. Parce que je sais, que je me maquille pas et que j’opte pas pour des ‘vêtements féminins’. Là encore, je persiste et signe en pensant qu’on peut très bien être ‘féminine’, -je déteste cette catégorisation-, en portant des pantalons et des baskets. C’est l’attitude qui joue souvent. Même quand je deviens Hulk. Au féminin, cette fois-ci.
- Attends … Fais-moi le topo de tes idées cocasses là. Ça m’intéresse. Un tendre sourire alors que mes iris grises pétillent de curiosité. À quoi, t’as bien pu penser Olly’ ? Avant de redevenir pleinement sérieuse. Car il a raison sur un point : je me suis focalisée sur ce qu’a pensé sa mère de moi … mais lui, je l’ai quasiment oublié dans l’équation. Doucement, je viens poser ma main sur l’une des siennes, pour que je puisse avoir son attention alors qu’on pénètre sur la sortie nous menant à l’Aéroport. Pardon … toi. Qu’est-ce que t’as pensé ? Un silence et un sourire des plus tendres et des plus complices. De rien. Mais … Je viens chuchoter à son oreille avec une voix rieuse : … tu m’en dois une.
“Mignon ? Tu te moques, en plus Dawson ?” Il leva les mains en l’air, prenant un air innocent. “Hum. En effet. Là, ça a été pas du tout ça. Ça a été le revirement total inverse. Comme quand je t’ai dit que tu me plaisais ? C’était ça, mettre les pieds dans le plat façon Redfield ?” Il claqua des doigts avant de la pointer du doigt pour lui faire comprendre que c’était exactement ce dont il parlait. C’était de cette méthode là dont il parlait. Elle avait mis les pieds dans le pied et regardez où ils sont aujourd’hui. Pas forcément le couple de l’année mais une relation sérieuse et monogame comme le font les vrais adultes. Tout cela avait lieu uniquement parce que parfois, elle prenait la ligne droite, directe et disait ce qu’elle pensait sans penser aux conséquences. Parfois, cela les mettait dans la merde. Et d’autres fois, cela leur sauvait la mise et jouait en leur faveur. Cinquante, cinquante. “Exactement, du grand Redfield.”, dit-il tout en accompagnant son geste, le regard rivé sur la route mais l’index accusateur pointant toujours la coupable.
“Attends … fais-moi le topo de tes idées cocasses là. Ca m’intéresse.” Il laissa échapper un éclat de rire. “A quoi t’as bien pu penser Oliv’?” “Oh si seulement tu savais ….” répondit-il aussitôt en sifflant presque en accompagnant ses propos, augmentant son exagération. Sa mère avait débarqué au moment où il pensait pouvoir passer une matinée sans heurt avec celle qu’il considérait comme une petite-amie sans pour autant l’appeler ainsi. Elle avait mis le chaos dans leurs plans. Alors évidemment ses pensées avaient été plutôt cocasses et il était trop tôt pour en parler ou alors …“On est en service, je ne voudrais pas te déconcentrer avec toutes ces idées.” ajouta-t-il sur le ton de la plaisanterie. Son regard se posa sur sa main qui venait se poser sur la sienne et il la regarda pendant une seconde dans les yeux avant de se concentrer de nouveau sur la route. “Pardon … toi. Qu’est-ce-que t’as pensé ? ” “Que j’ai de la chance.” qu’il dit avec le plus grand sérieux cette fois-ci, un sourire ravi accroché à ses lèvres. Oui, il avait de la chance de l’avoir à ses côtés. Il le savait depuis leur rencontre. Elle avait été une collègue incroyable, un binôme exemplaire, une amie sans comparaison et désormais elle était cette havre de paix qu’il n’avait jamais osé espérer avoir. Il saisit alors sa main pour la poser à ses lèvres et y déposer un bref baiser avant de se concentrer de nouveau sur la route, les deux mains sur le volant.
Un éclat de rire nouveau s’empara de l’habitacle quand elle lui rappelait la donne. Il lui en devait une. Encore. “Ah t’es comme ça ? Tu mets ça direct sur la liste ? Tu pourrais partir du principe que c’est fait de bon coeur et que je ne suis pas redevable … tu es vraiment coriace en négociation, Redfield. ” et c’était ainsi qu’ils entraient sur le parking de l’aéroport et que automatiquement l’ambiance devenait un peu plus lourde, plus sérieuse.
Quelques semaines après l’ouragan ‘Violet Dawson’. Je fronce les sourcils à toutes ses mimiques. Mais, je ne peux m’empêcher de sourire. M’offusquant presque quand il me désigne de l’index. Et moi, en guise de réponse silencieuse, j’ouvre grand ma bouche. Parce que je le maintiens que je suis limite outrée. J’avoue, qu’il m’arrive de pas faire dans la dentelle. Surtout, quand je lui ai dit qu’il était à mon goût. Qu’il me plaisait. Au moins, j’ai été honnête. Et peut-être, un peu trop cash pistache. En plus, pour couronner le tout, j’avais un sérieux coup d’alcool dans le nez. Mais ça, je crois que ça a aidé. Parce que sans lui, j’aurais rien dit. Et, on en serait pas là, où on en est aujourd’hui. Là encore, pour rien au monde je modifierais ça d’un chouilla. Jamais.
- Avoue, t’es impressionné ! Dans l’habitacle, je tente de lui faire une révérence, tout en éclatant de rire. Je compte pas m’arrêter en si bon chemin, si c’est du graaaand Redfield. Un nouvel éclat de rire, avant que là, je ne sois vraiment mais vraiment choquée. Comment, il croit tout simplement que je vais tenir, s’il ne me dit rien ? COMMENT ? Tu te fous de moi, là ? Dawson, tu te fous de moi ? Comment tu veux seulement que je tienne huit putains d’heures, si tu me dis rien ? Là, je lui jette une œillade grise qui parait énervée mais qui ne l’est pas. Parce que bon, hé, j’avoue que je risque pas d’être très concentrée en fait. S’il me balance tout avec une certaine honnêteté. Ça risque d’être déstabilisant. Mais tout au fond de moi, j’aime quand c’est le cas. Un petit indice … Alleeeez.
Je passe sous silence, le fait que je peux lui proposer de faire tout ce qu’il veut de moi. Et là, où il me met une sorte d’uppercut dans le cœur, c’est avec son petit aveu. Je lui offre un sourire tendre et je me dis que s’il ne conduisait pas avec autant de précaution et d’attention, je l’aurais déjà embrassé à perdre haleine. Sa petite confession, j’en ressens la même chose. Que j’en ai de la chance. Et, son sourire j’en partage la même teneur. Car, je suis ravie d’être avec lui. Un froncement de nez mutin, alors que je suis rapidement émue, -chose improbable-, me détournant pour regarder le paysage quelques instants. Avant de me reconcentrer sur Oliver, mon partenaire. Mon précieux binôme. Qui me fait encore rire, alors que je me joins à lui. Oui, je suis une redoutable négociatrice : à l’image de Korben Dallas comme dans le Cinquième Élément. Si je peux encore citer un chef d’œuvre.
- Hé, appelle-moi Korben Redfield, la prochaine fois. Un nouvel éclat de rire, alors que l’ambiance se fait automatiquement plus pesante. La faute à cette planque et ce suspect qu’on doit impérativement arrêter. De l’index, je lui désigne une place libre. À l’abri des regards mais facilement exploitable, étant donné qu’on a une vue imprenable sur les allées et venues dans l’Aéroport. On va encore s’imprégner du dossier et de la gueule du gars. Un sourire tendre, alors que je m’empare du dossier que la hiérarchie nous a prévu. Huit heures, ça va être bieeeen loooong. Encore faut-il qu’on le traque. Pas trop rapidement. Pas que ça s’éternise mais pas que ça soit trop rapide. Je sais, c’est paradoxal. Mais, y’a l’adrénaline du flic, là-dedans. À un moment donné, je ferais un saut dans l’Aéroport, histoire d’avoir peut-être un regard plus global. Et, si je parviens à le choper ou à le trouver, je t’enverrais un message codé, sur ton tél pour que tu me rejoignes, okay ? Un seul mot. Je réfléchis quelques secondes, seulement. ’Bolly’. Ça t’irait ?
«Avoue, t’es impressionné ! » « T’emballes pas.» « Je compte pas m’arrêter en si bon chemin, si c’est du graaaaand Redfield. » Elle était donc en forme, ce qui était bon signe pour les prochaines heures. Il n’y aurait rien de pire que de lutter contre l’ennui et la fatigue. D’ailleurs elle élevait soudainement la voix. « Tu te fous de moi, là ? Dawson, tu te fous de moi ? Comment veux- tu seulement que je tienne huit putains d’heures, si tu me dis rien ?» Et ils échangèrent un regard amusé ; elle prétend être agacée mais il savait ce que cachait ce regard. « Un petit indice … alleeeeez.» Un soupir s’échappa de ses lèvres, faussement exaspéré par l’insistance de la rouquine. « Un indice ? .» Il répéta ce mot tout en prenant un faux air pensif. Il lui fallait réfléchir à un indice qui ne la mettait pas sur la piste trop rapidement. « Nan, pas d’indice. Disons que c’est parti remise ….» qu’il dit d’une voix amusée avant d’ajouter sur le même ton tout en se dandinant sur place prenant un faux air gêné qui ne lui allait pas du tout : « C’est d’ordre privé tout ça, entre moi et moi-même. J’ai le droit à mon petit jardin secret..» Un éclat de rire vint mettre terme à cette remarque pour entamer une conversation un peu plus sérieuse.
«Hé, appelle-moi Korben Redfield, la prochaine fois. » « Korben ? Sérieux ? c’est le premier personnage qui te vient à l’esprit … perso, y’a un autre nom qui me vient en tête quand je te vois ….» peut-être la crinière rousse ou le côté extravagant … on avait le choix dans ce chef d'œuvre cinématographique.
Il suit les instructions de la rouquine pour finalement se garer et couper le contact. Aussitôt les mains libres, il s’empara de son café pour en boire une longue gorgée. Enfin la température idéale. «On va encore s’imprégner du dossier et de la gueule du gars. » Hochement de tête alors qu’il la regardait sortir le dossier pour y jeter un coup d’oeil. Elle était studieuse, il avait juste envie de boire son café. Elle avait quelques minutes d’avance sur lui. « Une belle gueule de branleur dans tous les cas. Une bonne tête à claques, je trouve.» qu’il commenta tout en tapotant du doigt la photographie qui trônait en haut à droite du dossier qu’elle tenait entre ses mains. Juste une plaisanterie habituelle. «À un moment donné, je ferais un saut dans l’Aéroport, histoire d’avoir peut-être un regard plus global. Et, si je parviens à le choper ou à le trouver, je t’enverrais un message codé, sur ton tél pour que tu me rejoignes, okay ? Un seul mot. » Il ne la regardait pas mais fixait les alentours, sérieux. Son arme était à sa place. Sa plaque était plaquée sous son tee-shirt. Il avait un café entre les mains. Ils avaient une belle vue sur les allées et venues de l’aéroport. Tout allait bien se passer. «Bolly. Ca t’irait ? » Il leva un sourcil et tourna la tête vers elle. « On dirait le nom d’un chien, non ? Bolly, viens-là, Bolly. » qu’il dit tout en tapotant sur sa cuisse pour héler un chien qui n’existait que dans son esprit. « Allons-y pour Bolly, ouais. » finit-il par lui concéder, gentleman.
La tête appuyée contre l’appui tête, ils avaient parlé de tout, de rien. Ils critiquaient les passants. Ils avaient parlé de vacances ; d’ailleurs, cela remontait à pas mal de mois qu’ils n’avaient pas pris de jours de vacances, c’était ce dont ils s’étaient souvenues. Déjà deux heures de passées. « Possible que ma vessie implose dans les prochaines minutes … juste pour te prévenir. » dit-il soudainement tout en s’enfonçant davantage sur sa place. « Attends … » l’interrompit-il avant qu’elle ne finisse sa phrase. Il s’était redressé, avait plissé les yeux et fixait une voiture qui venait de s’arrêter à l’entrée.
Quelques semaines après l’ouragan ‘Violet Dawson’. - Mens pas, je sais que tu l’es ! Je m’exclame toujours en riant. Prête à affronter ces huit heures de planque acharnée à ses côtés. C’est pas comme si on en avait pas l’habitude. À force de bosser ensemble, ça développe certains automatismes. Je le connais comme il me connait et c’est peut-être pour ça que ça fonctionne aussi bien en fait. En-dehors du terrain, c’est pareil. Comme lorsqu’il ‘sait’ que mon regard et ma mine des plus courroucés, à son égard sont l’exact contraire. Un indice, ouais. Et, me fais pas languir. Tu sais combien ça m’agace. Mais, je sais pertinemment qu’il va le faire. Je le sais. Que partie remise ? Okay. Je le note dans un coin de ma tête.
Et là, à voir encore ses mimiques, je peux clairement pas m’empêcher d’avoir un énorme fou rire. Ainsi donc, Monsieur Dawson en vient à faire le timide ? État d’esprit que je lui connais pas d’ordinaire. Faisant la moue devant pareille gestuelle, je le gratifie d’un hochement de ma tête aux boucles rousses. Tentant, -vainement-, de garder mon sérieux. Ça me parait bien impossible pour le coup. Vu comment mes prunelles grises pétillent d’une certaine malice face à l’outrecuidante fausse pudeur de mon binôme.
- Mouais. M’est avis qu’il y a des petites idées interdites aux mineurs qui ont éclos dans ton jardin secret, n’est-ce pas ? Un rire clair et tendre. Avant de sourire à nouveau. D’un sourire tendre. Parce que je reste une référence cinématographique. Même si dans mes œuvres préférées, y’a certains nanars. Mais, c’est pour se marrer ça. Rien d’autre. Ouais, j’adore Korben. Et ouais, si on juge à la crinière, y’a toute de suite Leeloo Dallas qui vient à l’esprit. Un silence, avant un petit clin d’œil très complice. Même si je suis pas vraiment partisane, de sa tenue. S’il y a un évènement à la Brigade tiens, je ferais peut-être l’effort …
Au fil des minutes qui s’égrènent, je redeviens sérieuse. La flic avec son appât. Avec ce type qu’on doit attraper et dont le faciès nous est offert sur un plateau grâce à cette magnifique photo qui le met ostensiblement en valeur. Fixant l’homme, ou du moins ses traits caractéristiques, j’y vois apparaitre le doigt d’Oli’ et une sentence venant de sa part, sans précédent. Je dois avouer qu’il a la tête de l’emploi : connard, toutes catégories confondues. Branleur et tête à claques, ça définit assez notre charmant suspect. Sur l’échelle, des branleurs je lui mets un beau neuf et demi sur dix. J’attends de ce fait, l’avis très précieux et éclairé de mon cher collègue.
- Un beau neuf et demi sur dix, sur l’échelle des branleurs, tête à claques et connards, non ? Je me sus permise de rajouter connard. Ça convient excessivement bien. Un silence, alors que je contemple mon collègue se tenant déjà à l’affût. Il a entièrement raison, on doit pas en louper une miette. Y’a rien qui doit nous passer sous le nez. Rien. Hé ! Moi, j’aime bien Bolly. Mais dans mon for intérieur et dans ma -trop- grande fierté, je vais pas verbaliser qu’il a entièrement raison. Ça ressemble à un nom de chien. Or, il me concède l’effort. Merci, très cher.
J’ai fini mon café depuis un moment, le muffin, pareil. Cependant mon regard gris est attiré par ces allées et venues qui rythment l’Aéroport dans son entièreté. Du coup, je me mets à inventer des scénarios que je déclame à Oliver, comme le mari pressé qui vient récupérer sa maîtresse à la sortie. Ou bien la famille, qui a hâte de refouler le sol de Brisbane parce que ce pays leur a tant manqué. Puis on se moque sans vergogne. Ça fait passer le temps : deux heures. Et, je me dis qu’en voyant ces gens avec leurs valises, bah partir en vacances me semble être inévitable dans le fond. Ça fait un bail, qu’on a pas pris de congés, tiens.
- Les congés, faudrait qu’on en prenne tiens … Un sourire en coin. Rest In Peace, ta … ve … Je suis interrompue à la fois dans mon rire et dans la finalité de ma phrase. Parce que mon coéquipier a vu quelque chose. Étrécissant mon regard, je suis le sien. Le reportant instinctivement vers la photo de ce dossier que je possède entre mes mains. Voiture noire, vitres teintées. Gars en costumes façon Men In Black, c’est un peu louche, ça. Non ? On attend de voir qui descend. Et, on fonce.
« Mouais. M’est avis qu’il y a des petites idées interdites aux mineurs qui ont éclos dans ton jardin secret, n’est-ce pas ? » Elle rit et il l’accompagne. Evidemment. « Tu lis en moi comme dans un livre ouvert » réplique-t-il d’une voix rauque et sur un ton bien trop officiel pour être pris au sérieux. Il a même accompagné son geste en posant une main sur son torse, prenant un air des plus solennels et il finit par conclure dans un soupir pas vraiment déçu « Pas pratique pour avoir un jardin secret. » « Ouais, j’adore Korben. Et ouais, si on juge à la crinière, y’a toute de suite Leeloo Dallas qui vient à l’esprit. Même si je suis pas vraiment partisane, de sa tenue. S’il y a un évènement à la Brigade tiens, je ferais peut-être l’effort … » Quand elle prononce le prénom de Leeloo Dallas, il fit claquer sa langue comme si elle venait de marquer un point dans une partie de charade. Pas difficile de ne pas faire le parallèle quant à la couleur de leur crinière. Niveau caractère, il pouvait y avoir un poil de ressemblance … son caractère légèrement agacé quand elle avait faim, elle pouvait se rapprocher d’un Hulk ou d’une Leeloo sans Multipass. « Ah ouais ? Je demande à voir, tiens. » qu’il lance sur un ton de défi tout en sachant pertinemment que cela ne resterait que dans l’hypothèse, dans leurs fous échanges et ne viendrait jamais apparaitre dans leur réalité. Mais l’idée d’une Billie en Leeloo pouvait avoir quelque chose d’assez intéressant. Un concept à approfondir peut-être.
« Un beau neuf et demi sur dix, sur l’échelle des branleurs, tête à claques et connards, non ? Je me suis permise de rajouter connard. Ça convient excessivement bien. » « Le connard convient très bien. » lui dit-il sur le même ton sérieux tout en acquiesçant d’un signe de tête. Ils étaient certes professionnels et sérieux, y n’empêche qu’on ne pouvait pas les changer en tout pour tout juste parce qu’ils étaient de service. Leur connerie humaine faisait partie de leur caractère, même en service.
« Les congés, faudrait qu’on en prenne tiens … » Ensemble ? Son envie de pisser lui coupa la parole puis ce fut au tour de cette drôle de voiture qui avait attiré son attention. Voiture noire, vitre teintée, ce n’est pas la voiture traditionnelle pour une famille moyenne qui va se rendre en vacances. Il fronça les sourcils en voyant s’échapper de la voiture quelques types en costume. Un coup d’œil au dossier. Le mec qu’il traquait était connu pour avoir pas mal de relations avec des entreprises locales et quelques revendeurs. Il était suffisamment intelligent pour se tenir à distance avec les petites merdes de la rue mais suffisamment attiré par la thune et le succès pour se rapprocher de ceux et celles qui prennent des risques. Pas un mec tranquille. Pas une petite bille. On leur avait dit de surveiller … d’intervenir ? « On attend de voir qui descend. Et, on fonce. » L’idée était intéressante, logique même. « On devrait prévenir le poste pour être sûr qu’on se lance pas un truc trop gros. » Ils n’étaient que deux. Il y avait beaucoup trop de civils. « Prévenir le poste … et on sort. » qu’il ajouta en se tournant vers elle, le sourire habituel aux lèvres.
Quelques semaines après l’ouragan ‘Violet Dawson’. - To-ta-le-ment. C’est peut-être l’un de mes super-pouvoirs, qui sait ? Je ris, mais n’empêche que ça a été facile à déchiffrer. Vu son ton employé et son petit sourire, là. Ainsi donc, Monsieur Dawson en vient à penser à des petites envies particulières qui peuvent aisément choquer un public, s’il vient à les énoncer. D’office, j’imagine Violet. Sa mère. Mais, je me garde de lui partager cette drôle de pensée. Même si c’est ma foi, assez ‘cocasse’. Non. Pas pratique du TOUT. C’est même l’inverse. Un petit clin d’œil très taquin. Mais, il n’empêche que je veux savoir. Et, tu sais que j’arrive jamais à lâcher l’affaire. Surtout, si ça me concerne. Les gros yeux gris, pour appuyer mes dires, hein.
Je lève le menton, hyper fière. Avant d’éclater de rire à nouveau. Ainsi donc, j’ai l’air d’avoir marqué un point. En trouvant une sorte d’homonyme cinématographique en la personne de Leeloo Dallas. Bon, j’avoue qu’il y a quelques similitudes. La couleur de cheveux et le sale caractère qui ressort. Quand j’ai faim, ça loupe pas. Comme l’a dit Olly’, je peux me transformer rapidement en Hulk, sans passer par la case, j’éclate mes fringues et je deviens verte. Moi, c’est plus dans le regard et dans les mots. Y’en a qui jugent pas par la bouffe, bah moi si. Là, on a l’adrénaline de la planque et du suspect et j’estime que ça compense cette nourriture qui rentre pas dans mon corps. Or, mes pensées se tournent quand même vers un potentiel food-truck, pas loin de l’Aéroport en plus. Mais, mon partenaire dévie mes pensées, avec sa petite question. Et là, c’est à moi de jouer ‘jardin secret et tout le tralala’.
- Ouais. Qui te dit, que j’ai pas déjà la tenue ? Et, que je l’ai pas encore sortie pour te surprendre ? Je lève les paumes de mes mains vers le plafond de la voiture, avec un air PARFAITEMENT innocent imprimé sur mon visage. Je mets sur la table aussi, la carte du ‘mais c’est mon jardin secret’ ! Un silence, avant que je ne lui murmure à l’oreille cette phrase : Tu verras. Ça laisse la place à l’imagination, et j’aime ça.
Or là tout de suite, il est temps de nous reconcentrer sur le gars qui a un master es connards dans la poche de son costume trois pièces. Ce type, comme tous les suspects qu’on a dû arrêter depuis qu’on bosse ensemble, il a une tête qui me revient pas. Bien que j’estime, que certains, on peut leur donner le bon Dieu sans confession et ce sont les pires crapules possible. Les pires raclures. Lui, bah il le porte sur sa gueule, qu’il ne traine pas avec les bonnes personnes. Que c’est limite lui, le nid à emmerdes. Persifflant, j’observe. Et, ça y’est, y’a la jauge d’adrénaline qui monte en flèche. Parce que putain, je veux foncer dans le tas, moi. Y’a pas à faire dans la dentelle. Toutefois, mon binôme a raison : on doit prévenir le Poste. Histoire qu’on se retrouve pas dans la merde.
On est que deux, et malgré toute ma bonne volonté pour castagner du connard, il se peut qu’on se choppe une balle perdue dans l’histoire. Puis, que nos collègues débarquent en renfort, que le Chef soit au courant, c’est la procédure. Mais, Olly, il me connait. Il sait que je dois me canaliser là et me concentrer sur lui, pour pas bondir hors de la caisse banalisée. Hochant ma tête aux boucles rousses, j’accepte le deal. Bon gré mal gré, ceci étant dit.
- Ouais, on prévient le Poste rapidos. Mais on va se grouiller, parce que si c’est notre gars, y’a pas trente-six solutions. On doit lui tomber dessus, manu militari. Je vérifie mon insigne et mon arme, toutes deux bien en place. Et, ce même sourire aux lèvres. C’est mon partenaire, j’ai prévenu le Poste et let’s go. Avant de lui murmurer avant de sortir : On fonce mais on reste prudents. D’acc ? Parce que bon, j’ai envie de poser mes congés. Un rire, doublé d’un sous-entendu assez identifiable.
« Ouais, on prévient le poste rapidos. Mais on va se grouiller, parce que si c’est notre gars, y’a pas trente-six solutions. On doit lui tomber dessus, manu militari.» Il acquiesça d’un signe de tête même s’il espérait pouvoir la freiner un peu. Ils étaient deux … et ils n'avaient aucune idée du nombre de personnes qui se trouvaient dans la voiture ni même si elles étaient armées ou non. Armés jusqu’aux dents certainement. C’était ce dont ils devaient se méfier. Mais, le duo était prévoyant et avait appelé la brigade. Une équipe plus complète n’allait pas tarder à arriver et normalement, ils devraient attendre … ou simplement « préparer » le terrain mais ne surtout pas jouer aux gros bras. « On fonce, mais on reste prudents. D’acc ? Parce que bon, j’ai envie de poser mes congés.» « Comme d’habitude.» dit-il en cherchant son regard. « On prépare le terrain, on fait pas les malins, on attend la cavalerie … mais si on peut briller un peu.» poursuit-il dans un éclat de rire pour détendre l’atmosphère même si en réalité, c’est surtout une technique pour calmer la pression et ne pas trop stresser. Et, c’est dans cet esprit d’équipe qu’ils sortent de leur voiture banalisée. A vrai dire, ils ressemblaient à un duo anodin, pas à des flics. La seule différence avec le grand public, c’était qu’ils n’avaient pas de valise. Qui débarque dans un aéroport quand on n’a pas de valise ? Pour venir chercher des amis, la famille, Oliver avait déjà une idée de scénario au cas où. Ils marchaient à la même hauteur, le regard rivé vers la voiture qui n’avait pas bougé. Deux types se tenaient devant mais leur « cible » potentiellement dans la voiture n’était pas sortie. Ce n’était donc qu’une intuition ; ils n’étaient sûrs de rien. Ils avaient même appelé la cavalerie sans la moindre preuve : peut-être une mauvaise idée en fin de compte. Oliver sentait son flingue dans son dos, sa plaque contre son torse. Il savait que Billie était armée. En quelques secondes, ils pouvaient dégainer et assurer la situation … ouais mais il y avait les civils un peu partout. Des enfants même. Cette histoire s’annonçait vraiment à chier. Ils s’approchaient rapidement de la voiture aux vitres teintées quand un des hommes se tourna vers les enquêteurs. Un regard. Et l’un des deux hommes - certainement à l’instinct super aiguisé - fit glisser une main dans son dos. Ni une, ni deux, les deux flics réagissaient au quart du tour et la situation s'envenime à la vitesse de la lumière.
Le type à la tête rasée n’attend pas une seule seconde. Il dégaine et tire. L’avantage des criminels, ils n’ont pas de sommation à prononcer. Une balle fuse dans les airs. Une suivie par d’autres. Oli et Billie à découvert se cherchent un chemin libre mais il la voit reculer d’un pas causé par l’impact … elle recule d’un pas et s’écroule. Les pneus crissent et il tire à plusieurs reprises, un genou au sol, vers cette voiture qui prend la fuite. Remettant son arme en position, il hurle à un passant d’appeler les secours alors qu’il se précipite vers la rouquine étendue sur le sol. « Billie.» souffle-t-il alors que sa main vient caresser sa joue pour une seconde avant de constater la blessure par balle au niveau de son ventre. Un regard inquiet suffit pour comprendre l’étendue des dégâts. « Les secours arrivent.» dit-il tout en enlevant sa veste pour la mettre en boule et la poser sur son ventre. Comprimer. Compresser. Oli essaie de parler calmement mais son cœur bat la chamade. Il agit comme un robot. Il cherche son regard : « Tu voulais des vacances … tu vas en avoir ma grande, je te le dis.» Il essaie de plaisanter, de détendre l’atmosphère, de cacher sa peur panique car il a vu l’étendu des dégâts. Une balle dans l’abdomen, ça laisse toujours des dégâts collatéraux.
Quelques semaines après l’ouragan ‘Violet Dawson’. On fonce dans le tas. Ça c’est mon credo et mon leitmotiv. Ça l’a toujours été et c’est comme ça que mon père réagissait. Peut-être que j’aurais dû y aller mollo cette fois-là. Mais, je suis loin de me douter de ce qu’il va advenir de moi dans quelques minutes. Là, tout ce que je peux faire, c’est hocher ma tête rousse silencieusement aux paroles de mon binôme. On est entrainés, on sait ce qu’on doit faire et les renforts ne vont pas tarder à se pointer. Qu’est-ce qui peut décemment mal tourner ? Rien. Tant qu’on joue pas aux preux Chevaliers, parce qu’il y a des civils et des gosses, tout me va. Y’a peut-être un peu trop d’assurance qui me gagne là, subitement. Quand j’évolue aux côtés d’Oli’. Les types en costume noir, ne nous ont pas encore calculés et elle est là notre chance.
Sauf que l’un des gorilles doit avoir un radar à justiciers, parce qu’il se tourne vers nous et qu’il hésite pas à faire ce pour quoi il est payé. Tout se passe hyper rapidement, comme dans ces putains de film d’actions auxquels mon père m’a initiée. D’ordinaire, y’a ceux qui se battent pour une noble cause qui gagnent toujours. Ou presque. Les méchants, ils se prennent une branlée monumentale et ça les dissuade de continuer. Or là, bah c’est tout le contraire. Avec mon coéquipier, on parvient à se défendre mais pas à les mettre en déroute. J’entends siffler à côté de mon oreille, lorsque je parviens encore à dégainer mon arme. Mais, ce que je ressens dans le flanc droit, ça me coupe le souffle. Littéralement. Penchée en avant, je me rends compte que quelque chose cloche. Malgré l’adrénaline et le besoin irrévocable de se barrer d’ici. Mais moi, je peux pas me barrer. Mes jambes, elles ont du mal à me soutenir.
Tout ce que je ressens, c’est l’asphalte qui rencontre durement mon dos. La façon dont les bruits environnants me parviennent et s’atténuent. Ça ressemble à des bourdonnements, ou comme lorsqu’on est sous l’eau et qu’on ne parvient ni à respirer ni à entendre ce qui peut bien se passer à la surface. Là, c’est exactement ce que je ressens. Y’a l’une de mes mains qui se colore de rouge, parce que je l’ai mise sur ma plaie. Jusqu’à présent, aucune balle n’a réussi à traverser mon corps. À part aujourd’hui, apparemment. Avec application, je tente de maîtriser mon souffle mais en plus de la douleur qui commence à poindre, je panique. En me demandant si Oliver est touché lui aussi. S’il est blessé. Ou pire, encore. Cependant, c’est lorsque je le vois apparaitre et se pencher au-dessus de ma personne, que je comprends qu’il va bien. Ce qui me fait pousser un soupir de soulagement et avoir une grimace de douleur.
Peut-être le soupir de trop. Parce que j’ai mal putain. Et, que j’aimerais parler. Lui parler. Mais, j’y parviens pas. Y’a tout qui se bouscule dans ma tête … Parce que si c’est la dernière fois que je le vois ? Je vois bien qu’il tente par tous les moyens de me rassurer, alors que pour une seule fois dans ma vie, je laisse échapper une larme qui glisse sur l’une de mes joues. Ma respiration est erratique et saccadée et tout ce que je peux retenir : c’est que ça me fait souffrir. J’ai mal. Et, que j’ai même pas en tête l’ampleur des dégâts que la balle a pu occasionner. Tout ce que j’essaye, c’est de répondre à mon binôme. Mais, tout ce qui sort d’entre mes lèvres, c’est un pénible : Ouais. Seule syllabe que je suis parvenue à formuler avant de fermer mon regard gris et d’entendre, -probablement au loin-, les sirènes des secours et les collègues qui débarquent en catastrophe.