« Oui, Joanne, il est encore au bureau… Je ne sais pas pour combien de temps il en a, il a l'air vraiment occupé. Dans combien de temps est le rendez-vous ?… Ah, merde. Bon, je file lui tirer les bretelles et le jeter de la radio. S'il arrive façon boulet de canon, c'est parce que je te l'aurais expédié avec un bon gros coup de pied au cul. » Daisy raccroche et s'approche prudemment de mon côté du bureau, une oreille tendue pour savoir où j'en suis. Après une grande inspiration, elle se décide à se montrer. « Jamie ? » La tête de la jeune femme se devine sur le côté du paravent qui sépare nos deux bureaux. Au téléphone, visiblement dans une discussion des plus houleuses, elle n'ose pas vraiment m'interrompre. Pourtant, il le faut bien. « Pas maintenant. » dis-je un peu trop sèchement, absorbé par ma conversation avec le service de communication d'un parlementaire qui refuse de nous accorder la moindre interview s'il n'a pas eu connaissance des questions avant de passer à l'antenne -ce qui est complètement ridicule. « Jamie ! » lance-t-elle un peu trop fort à travers la pièce, si bien que le rouge lui monte aux joues. Je pose un regard quasiment assassin sur mon assistante qui se fait violence pour insister alors qu'elle me sent de plus en plus énervé par la voix féminine à l'autre bout du fil -ce qui est généralement une mauvaise idée. « Quoi ?! » Je pose une main sur le combiné du téléphone pour que mon interlocutrice n'en entente pas plus. Daisy fronce les sourcils, plisse son nez et croise les bras, faisant le mur entre elle et ma mauvaise humeur. « Ca fait une demie-heure que tu es censé avoir quitté le bâtiment pour accompagner Joanne à l'hôpital pour l'échographie. Je viens de l'avoir au téléphone, elle t'attend là-bas, alors t'as intérêt à te bouger. » Mon visage se décompose. Déjà une demie-heure ? Je vérifie l'horaire sur mon ordinateur. Je n'arrive pas à croire que la pimbêche qui me tient la jambe le fait depuis autant de longues minutes, me faisant non seulement perdre mon temps, mais me mettant en retard pour un rendez-vous bien plus important. Je lui dis sèchement que je la rappellerai demain, en espérant qu'elle sera revenue à la raison, puis claque le combiné dans le boîtier sur mon bureau. J'espère que Joanne ne m'en tiendra pas rigueur, mais je suis loin d'en être certain -même si, la connaissant, elle n'osera rien me dire. Rapidement, je récupère mes affaires, laissant tout de même ma surface de travail dans un joli bordel que Daisy devra ranger après mon départ. Je l'embrasse d'ailleurs sur la joue pour me faire pardonner d'avoir été sec et la remercier de s'être tout de même imposée, m'empêchant d'être encore plus en retard que je ne le suis. Je ne prends pas la peine de dire au revoir à qui que ce soit dans l'open-space et dévale immédiatement les escaliers du bâtiment, rejoins le parking et saute dans ma voiture. Direction l'hôpital. L'idée n'étant pas d'y arriver plus vite en terminant dans une ambulance, je m'efforce de garder le pied léger sur l'accélérateur. Heureusement, les rues de Brisbane sont relativement calmes en ce début d'après-midi, et j'arrive en quelques minutes. J'abandonne ma cravate et ma veste sur la banquette arrière et fonce à l'intérieur. A force d'allers et venues ici, je connais quasiment l'endroit par coeur. Je me pilote donc seul dans les couloirs blancs, allant de service en service jusqu'à arriver dans la salle d'attente des consultations. L'horloge suspendue au-dessus du secrétariat indique que l'heure du rendez-vous est dépassé d'une vingtaine de minutes. Pourtant, après avoir rapidement observé toutes les personnes présentes dans la pièce, je trouve Joanne assise non loin de la porte du cabinet. Les médecins sont toujours en retard, et pour une fois, cela m'arrange fortement. Je prends la place à côté de ma fiancée, forçant une autre femme, une chaise plus loin, à dégager la veste et le sac qu'elle avait posé là pour ne pas s'encombrer. Je vole un baiser à ma belle, légèrement essoufflé par le rythme de marche que j'avais adopté dans l'hôpital pour arriver aussi vite que possible. « Je suis tellement désolé pour le retard. »
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
"Vous n'allez pas cracher le morceau, pas vrai ?" demandait Wade d'un ton moqueur, alors qu'ils étaient en train de déjeuner au musée. Elle secouait négativement la tête. "On m'avait pourtant dit qu'on arrivait à lire en vous comme dans un livre ouvert. Grande nouvelle, Joanne Prescott parviendrait à devenir secrète ?" Elle rit nerveusement, tout en essuyant sa bouche avec l'une des serviettes. "Je suis très mal placé pour vous juger. J'espère juste que ce ne soit pas trop grave." "On verra ça." dit-elle avec des yeux pétillants quoi qu'un peu anxieux. "D'ailleurs, il faut que j'y aille." Joanne regardait sa montre avant d'avaler rapidement ce qui restait dans son assiette. Elle s'habillait de son trenchcoat, prenait son sac à main, et comptait sortir de la salle de pause. Wade la stoppa dans son élan, en lui prenant la main. Elle le regarda d'un air interrogatif. Avec un sourire et l'air serein, il lui dit. "Peu importe ce dont il s'agit, je suis certain que tout va bien se passer." Joanne lui rendait aussi un rictus, touchée qu'il prenne tant en compte l'état de santé de son employée. Elle quittait le musée et prit la voiture afin de se rendre à l'hôpital. Ses doigts n'arrêtaient pas de bouger, ou de trembler sous la nervosité. Ce n'était qu'une échographie, rien de sorcier. Pourtant, son coeur battait à tout rompre. Durant le trajet, elle faisait plusieurs fois de longs soupirs, pour évacuer tout le stress qui s'accumulait en elle. Arrivée près du secrétariat, elle précisa sa présence à celle qui se trouvait de l'autre côté du guichet, l'invitant à s'asseoir en salle d'attendre. Elle était loin d'être la seule à avoir une consultation avec le Dr. Winters. Elle avait un quart d'heure d'avance. Regardant sa montre toutes les trente secondes, la jeune femme commençait tout doucement à paniquer. Encore plus lorsque l'heure prévue initiale du rendez-vous s'affichait sur l'horloge de son portable. Et Jamie n'était toujours pas là. Avait-il oublié ? Avec la charge de travail qu'il avait, c'était tout à fait possible. Qu'il soit pris dans ses dossiers en oubliant complètement l'heure, voir même la date du jour. Il semblait pourtant si enthousiaste pour cette première échographie, il disait qu'il voulait être présent à la moindre consultation, au moindre examen. Et pourtant, il n'était pas là. Joanne était un peu confuse et se faisait rapidement des idées, ne se sentant claire pas prête à faire face à tout ceci toute seule, bien que son médecin serait tout à fait enclin à ramasser la casse si cela était nécessaire. Elle avait appelé au bureau, et elle était tombée sur Daisy, qui comptait bien aller faire bouger son boss. Une vingtaine de minutes plus tard, Jamie apparut dans son champ de vision, créant en elle un véritable sentiment de soulagement. Il s'installa juste à côté d'elle, un peu à court de souffle. Il avait certainement couru, supposait-elle. Il fit de plates excuses. "Je... J'ai cru que tu avais oublié." dit-elle à voix basse, avec un sourire léger. La belle blonde prit l'une de ses mains entre les siennes, en mêlant leurs doigts. Un nouveau soupir pour évacuer tout ce stress, puis elle embrassa l'une des mains de son fiancé. Enfin, elle le regardait. "Je n'aurais pas pu faire ça toute seule." lui chuchota-t-elle, alors que ses yeux s'humidifiaient, au point que quelques gouttes lacrymales ne vienne se bercer au bord de ses yeux bleus. Il paraît que la grossesse rend la femme particulièrement émotive. Dieu sait ce que ça donnerait avec Joanne, la pauvre. "Joanne Prescott." dit Winters en la voyant immédiatement dans la salle d'attente. Elle lui adressa un sourire avant de se lever, serrant de plus belle la main de Jamie. S'approchant de lui, son médecin lui dit à voix basse. "Il me semblait vous avoir dit qu'on attendait la fin de l'examen pour les larmes." Il avait un sourire qui aspirait immédiatement à la sympathie. Il saluait Jamie d'une bonne poigne de main avant de les inviter à entrer dans le cabinet. Fermant la porte derrière lui, il demanda de suite. "Toujours des nausées ?" Joanne le regarda et acquiesça d'un simple signe de tête. Les médicaments qu'il lui avait prescrit n'avaient pas vraiment d'effets. "De plus en plus, j'ai l'impression." avoua-t-elle. Surtout durant la nuit et le matin, et elle était plus sensible à certaines odeurs. "Ca ne devrait plus tarder à devenir rare. Ce sont les premières semaines en général où les nausées sont les plus fréquentes." expliqua-t-elle, l'air désolé. "Allez donc vous allonger, Joanne. Je ne vais pas vous faire attendre plus longtemps." Sans dire mot, elle se défit de sa veste et de son sac à main qu'elle posait sur l'une des chaises qu'il y avait de l'autre côté du bureau du médecin. Elle retira ses chaussures au pied du brancard avant de s'y allonger. Elle avait un regard loin d'être rassuré lorsqu'elle était installée, Jamie n'avait pas tardé à s'approcher d'elle. Joanne lui serrait la main de toute ses forces alors que Winters prenait le soin de soulever l'égèrement son haut, et d'abaisser un peu sa jupe sur sa taille. Il appliqua le gel sur le bas de son ventre, modifiant quelques paramètres sur l'échographe. "Prêts ?" demanda-t-il d'une voix douce. Joanne acquiesça d'un signe de tête, mais elle ne l'était clairement pas. Elle posait sa tête sur le brancard, en fermant les yeux, de craindre de voir une expression négative sur le visage de son médecin. Une première larme coulait. Il était difficile de savoir si c'était de la tristesse, de la peur ou de la joie. Elle sentait que le gel froid s'appliquait s'étalait sur son ventre, cherchant l'angle parfait. Cela durait une poignée de minutes, mais c'était une éternité pour elle. "Joanne, ouvrez les yeux." Elle hocha négativement la tête, plaçant sa main libre devant ses yeux. "Ouvrez les yeux." répéta-t-il, d'une voix tout aussi douce. "Allez. Prenez une grande inspiration. Voilà. Maintenant, expirez profondément. Et ouvrez les yeux." Ses yeux rougis finirent par regarder l'écran du doigt. "Il est juste là, Joanne, vous voyez ? On voit déjà qu'il a bien adhéré à la paroi de l'utérus, ce qui est le plus important. Et là, vous voyez ? Ces petit signaux qui s'affichent là, de manière régulière et très rapide. C'est son coeur qui bat Joanne. C'est son coeur qui bat." A ces mots, Joanne ne se retenait même plus de pleurer, toujours la main sur ses yeux. Mais là, c'était certain, ce n'était que de la joie. Le Dr. Winters posait une main amicale sur son épaule. "Maintenant, vous avez droit à toutes les larmes de bonheur du monde."
« Non, bien sûr que non, je n'avais pas oublié. » j'assure à Joanne. Comment aurais-je pu ? « J'ai juste eu ce coup de téléphone qui n'en finissait pas... » Et cela n'a rien d'intéressant pour être évoqué ici. L'important, c'est que je sois arrivé à temps. Elle serre ma main et dépose un doux baiser dessus, persuadée qu'elle n'aurait pas été assez forte pour affronter cette échographie seule. De toute manière, cela était hors de question. « Je suis là, tout va bien se passer. » je murmure en devinant déjà quelques larmes au bord des yeux de la jeune femme, craquant presque sous la pression. Je lui souris, attendri ; « Quelque chose me dit que la grossesse ne va pas arranger ton émotivité. » Elle qui pleure si facilement, déjà si sensible. Cela ne sera sûrement pas facile à vivre tous les jours, mais en vaudra largement la peine. Winters apparaît finalement sur le pas de la porte de son cabinet, appelant Joanne. Mes jambes peinent à me relever, alourdies par une soudaine vague de crainte ; la possibilité d'apprendre une mauvaise nouvelle se trouve juste là, à quelques mètres, je le réalise seulement maintenant. Je parviens à ne pas montrer mon anxiété, même si elle doit se deviner dans la main que j'adresse au docteur pour le saluer -mais il doit en avoir l'habitude. Refermant la porte derrière nous, l'homme ne perd pas plus de temps, nous sentant sûrement tous les deux bien nerveux. Les nausées de Joanne sont persistantes et parfois fortes, malgré la prescription de Winters. J'avoue qu'à part lui faire éviter les odeurs qui l'indisposent, je ne sais pas vraiment quoi faire. Il n'y a sûrement pas grand-chose à faire à vrai dire, c'est un mauvais moment à passer. Le médecin ne tarde pas plus longtemps avant d'inviter la jeune femme à s'allonger pour débuter l'échographie. Mon rythme cardiaque s'affole dans la seconde, et je crois bien que cette fois, c'est moi qui suis nauséeux. Bien plus fébrile que je ne l'aurais pensé, je tire l'une des chaises du cabinet près de la table où se trouve Joanne pour m'asseoir à côté d'elle. Elle ne tarde pas à attraper ma main et la serrer avec plus de force que je ne lui en connaissais jusqu'à présent. Gardant contenance autant que possible, je dépose un baiser sur ses doigts, là où sa bague brille doucement. Aucun de nous deux n'est prêts, et s'il fallait attendre que nous le soyons, cette échographie n'aurait jamais lieu. Alors nous nous contentons de prendre sur nous en donnant le feu vert à Winters. Le laissant analyser les images pendant quelques minutes, je porte mon attention sur ma fiancée, morte de peur. Mon état d'esprit n'est pas loin du sien, intérieurement, mais je n'en montre rien ; il en faut bien un pour rester solide et rassurer l'autre. Du dos de la main, très délicatement, j'essuie la petite larme qui s'est échappée de l'un de ses yeux, qu'elle garde fermement clos. Je caresse tendrement sa joue, espérant réussir à la calmer un peu. Le docteur a cessé de faire bouger le petit appareil sur son bas ventre. Je n'ose toujours pas jeter un coup d'oeil sur l'image de la machine, préférant encore m'occuper de la jeune femme. Lorsqu'il demande à Joanne d'ouvrir les yeux, elle refuse, complètement paniquée. Je caresse sa main dans la mienne. Winters trouve immédiatement les mots pour l'inciter à enfin regarder l'écran. Moi, je n'y parviens toujours pas, mais je finis par me faire violence et laisser mon regard se poser sur le point indiqué par le docteur. Je ne sais pas depuis combien de secondes je retiens ma respiration, une main, légèrement tremblante, sur ma bouche. Il est là, juste là. Bien installé, et grandissant de jour en jour. Une vague de soulagement me fait tressaillir de haut en bas. Je dois sûrement écraser les doigts de Joanne dans ma main devenue légèrement moite à cause de la nervosité. J'expire longuement, un fin filet d'air, essayant de calmer tant bien que mal ce coeur qui fracasse mes os lorsque Winters évoque celui, battant, de ce petit être de quelques millimètres. J'observe la réaction de ma belle, ses yeux rougis laissant finalement se déverser un torrent de larmes de joie. La voir ainsi me touche si profondément qu'une larme m'échappe également, et je ne cherche même pas à l'essuyer. Je me lève un peu de ma chaise afin de pouvoir l'embrasser sur le front. « Je t'aime tellement... » je murmure à son oreille. Mon regard se pose de nouveau sur l'échographie, dont l'image me laisse muet, ému au possible. Ma respiration, saccadée, trahit complètement mon émotion. « Tout va bien alors ? » je demande à Winters à travers une gorge encore trop serrée. Même s'il vient de dire que l'embryon est bien accroché, j'ai simplement besoin de l'entendre le répéter, être certain. D'autres larmes ne demandent qu'à m'échapper, mais elles restent au bord de mes paupières. « On peut l'entendre, non, son coeur ? » Souriant, le docteur pianote sur les boutons de la machine pendant quelques longues secondes. C'est sans prévenir que ce son se met à résonner dans tout le cabinet. Un coeur minuscule battant à folle allure et imposant son rythme au mien. Un rire nerveux m'échappe, de ces rires inexplicables qui interviennent pour traduire un trop plein de bonheur à extérioriser. Je retire la main que Joanne a plaqué sur ses yeux, délicatement, et lui fais tourner la tête vers moi. J'essuie doucement ses joues trempées en lui adressant un sourire comblé, un regard débordant d'amour. Je dépose un baiser tendre sur ses lèvres salées.
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L'émotion était vive et intense. Le genre qui est totalement incontrôlable, que l'on exprime avec tout ce que l'on a. Et ça finit par des larmes. Ici, il s'agissait d'une joie sans nom, d'un bonheur difficilement mesurable. Joanne venait de voir cette petite boule, ce tout petit embryon, qui était bien là, bien accroché. Qu'il y avait son coeur qui battait et qui faisait de lui déjà un être vivant à part entière, aux yeux de la jeune femme. Jamie était tout aussi touchée, en serrant de plus belle la main tremblante de sa fiancée, en plaçant une main devant sa bouche, réalisant enfin que oui, son enfant était là, juste sous ses yeux. De l'une de ces dernières se déversaient même une larme. Il était si rare que Jamie laisse couler une larme, sans l'essuyer à peine délogée de la paupière. Il s'en fichait bien, il était heureux, comblé. Il y avait toujours ces gestes de tendresse, qui cherchaient à la rassurer, à lui rappeler qu'il était bien là et qu'ils vivaient tout ceci à deux. Jamie ne put s'empêcher de l'embrasser sur le front et lui dire quelques mots d'amour avant de perdre toute notion de langage. Emu au possible, il regardait l'image diffusé sur l'échographe, demandant rapidement à être rassuré. Dr. Winters lui sourit gentiment. "En voyant cela, et les premiers résultats, tout laisse à croire que l'embryon se porte bien." dit-il d'un ton calme, en regardant aussi les images. Entre temps, Joanne avait retrouvé un peu ses esprits, bien que les larmes continuaient de couler. Elle avait relevé un peu la tête pour revoir un peu l'image. Jamie demandait alors à entre les battements de coeur de leur bébé. Et à les entendre, un nouveau flots de larmes envahissaient les joues de Joanne, posant une nouvelle fois sa main sur ses yeux. Jamie la retira doucement et fit en sorte d'attirer le regard de sa belle vers lui. Ses yeux verts n'était qu'amour, et bonheur, comme on en voyait rarement. Elle ne pouvait s'empêcher de sourire ou de lâcher ici et là quelques rires après avoir reniflé. "Je t'aime." lui dit-elle d'une voix débordante d'émotions. Elle répétait ces mots à plusieurs reprises, ne quittant pas son regard pendant de longues minutes. "Je pense qu'il serait préférable que vous vous reposiez dorénavant, Joanne." La jeune femme regardait son médecin. "Je sais très bien ce que vous allez en penser, que vous allez me dire que votre métier n'est pas le plus physique qui soit. Mais je pense que vous m'écouterez si je dis que c'est pour votre bien, et celui du bébé. Je suis certain que votre fiancé sera du même avis que moi." Joanne se voyait déjà passer de longues journées seule à la maison. "Ca ne vous empêche pas de sortir, de prendre soin de vous, de faire ce que vous aimez. Même assister à des soirées ici et là avec Jamie. Puisque, si j'ai bien compris ce qu'il a dit durant son émission la semaine dernière, il vous a présenté au grand public." dit-il avec un sourire malin. Joanne riait nerveusement. "C'est une moindre mesure, Joanne, en connaissant vos antécédents." Elle acquiesçait d'un signe de tête. "Une grossesse n'est pas toujours facile, et vous, en l’occurrence, vous avez surtout besoin de repos. Arrêtez-moi si je me trompe, Mr. Keynes." Après quoi, le médecin regardait l'échographe, manipulant encore un peu l'appareil, il s'arrêtait soudainement. "Regardez, sous cet angle là, nous voyons même son coeur battre, juste là." On devinait le rythme régulier sur l'image, extrêmement rapide. Joanne restait figée, à regarder l'écran. Le médecin l'avait remarqué et restait ainsi tout le temps dont elle avait besoin. "Il est tellement beau." dit-elle, presque rêveuse, la voix tremblante. Bien sûr qu'ils ne pouvaient pas savoir comment il était et comment il serait. Mais à ses yeux, ce petit miracle était le plus beau du monde. "Bien sûr qu'il est beau." dit Winters, tout sourire. "Il suffit de regarder comment sont ses parents." Il finit par imprimer quelques clichés, en faisant des doubles : quelques uns pour le dossier médical, les autres pour les futurs parents, qu'il plaçait avec précaution dans une enveloppe. A l'aide d'une serviette, il enlevait le reste de gel qu'il y avait sur le ventre de Joanne. Celle-ci se rhabilla et se redressa, se mettant assise sur le brancard. "Je sais que ce n'est pas ce qu'il y a de plus professionnel, et que je ne suis pas obstétricien, mais je tiens à maintenir votre suivi au cours de votre grossesse. Bien sûr, je travaille en étroite collaboration avec le Dr. Bush, votre gynécologue. Il sera informé de tout résultat de toute manière, mais je pense que la prise en charge doit aussi surtout se faire par rapport à vos soucis de santé, même si rien ne m'alarme pour le moment." "Oui, bien sûr." A vrai dire, cela relevait de l'évidence pour Joanne. Elle ne se voyait absolument pas se faire consulter par un autre professionnel que lui. "Et on se verra très souvent, ces prochains temps."
Il n'y a sûrement pas de mot pour définir toutes ces émotions qui me traversent, nouvelles, intenses, terriblement enivrantes. Rien qui soit à la hauteur de tout ce que je ressens à cet instant, tout ce dont mes yeux humides débordent, tout ce qui fait parfois trembler mes muscles, m'empêche de respirer correctement, obstrue ma gorge, fait éclater mon coeur, et m'arrache parfois un rire. Je suppose que c'est le bonheur. Le vrai bonheur comme jamais je ne l'ai expérimenté. Ce moment où il semble que toutes les pièces du puzzle se sont enfin emboîtées, les étoiles se sont alignées, que tous les événements sont dans l'ordre, tels qu'ils doivent être, parfaits, et que la route est parfaitement claire devant nous. J'ai la conviction que ce petit être, Joanne, notre futur mariage, notre vie à deux, et tout le bonheur qu'elle m'apporte ; tout cela est véritablement ma revanche sur toutes les autres années sombres qui sont désormais loin derrière moi. La jeune femme, elle aussi, est vengée. Vengée de son divorce qui l'a laissée pour compte, de cette fausse-couche traumatisante, de la nature qui ne voulait pas la laisser avoir d'enfant. Nous avons tous les deux droit à ce tremplin, menant droit vers un avenir amplement mérité. Joanne ne cesse de pleurer, et étrangement, je trouve cela beau. Ses grands yeux bleus brillent d'autant plus sous ce flot de larmes. Même le rouge de ses pommettes et du bout de son nez la rendent adorable. Le plus attendrissant étant ses éclats de voix, ces petits rires qui traversent ses lèvres et qui sont autant d'émissaires de son bonheur et de son soulagement. Je lui souris largement, mordillant ma lèvre inférieure pendant qu'elle répète à plusieurs reprises ces mots d'amour. Je caresse tendrement sa joue. Winters nous laisse ces quelques minutes où nous oublions presque sa présence et, muets, nous partageons toute cette foule d'émotions qui traverse chacun de nos pores. Mais il finit par reprendre la parole afin de conseiller à la jeune femme de se consacrer à son repos dès à présent. Ce que même moi je n'aurais pas osé lui demande -n'en pensant pas moins. Je suis ravi d'avoir le médecin de mon côté à ce sujet ; pour son bien et celui du bébé, il est largement préférable qu'elle ne se fatigue pas plus que nécessaire. Quelle se consacre à cette grossesse, à prendre soin d'elle. J'acquiesce d'un discret signe de tête pour marquer mon approbation à ces paroles. Les longues journées à la maison seront un mal à prendre en patience. Il faut ce qu'il faut. Même si Joanne risque de vraiment mal vivre ces huit prochains mois seule à la maison avec les chiens. J'écarquille les yeux et rit de surprise quand le médecin évoque l'émission de la semaine dernière. Je ne m'attendais pas à ce qu'il l'ait écouté. Cherchant mon appui concernant ses indications pour Joanne, j'hausse les épaules, ne sachant pas si mon avis compte vraiment face aux conseils d'un homme ayant fait dix ans d'études pour avoir le droit de les prodiguer. « Je suis… très loin d'être médecin. » dis-je avec un sourire nerveux. « Mais Joanne n'arrête pas de dire qu'il n'y a pas plus compétent que vous, qu'il faut vous écouter à la lettre et vous faire confiance. » Et elle a toujours eu raison à ce sujet. Winters a toujours été là pour elle, pour nous, toujours de bons conseils. Il doit être la seule personne extérieure à notre relation qui en a vu tous les aspects, des plus sombres au plus joyeux. « Alors je pense qu'elle suivra votre conseil. » dis-je en posant mon regard sur la première concernée. « Et je trouverais un moyen d'être plus présent. » Je ne sais pas encore lequel, ni comment je m'en sortirais, mais il le faudra bien. Je ne pourrais plus rentrer si tard tous les soirs, et si épuisé. Il faudra que je sois là pour elle. Que je trouve un moyen. Le docteur nous imprime ensuite les clichés de l'échographie. Joanne se rhabille. Le moment est passé, mais l'émotion est toujours palpable, là, dans l'air. Bien sûr, Winters souhaite continuer de suivre la jeune femme pendant toute sa grossesse. Pour le moment, rien ne l'alarme. Pour le moment. Mon esprit tique sur ces quelques mots qui soulèvent en moi une foule de questions. Et il est hors de question pour moi de rester dans l'ombre, d'avancer sans réponses, sans savoir à quoi m'attendre. « Et maintenant ? » je demande, tripotant l'enveloppe contenant les clichés. « A quelle fréquence Joanne devra venir vous voir, vous ou le Dr. Bush ? Est-ce qu'il y a encore des examens à faire pour s'assurer que le bébé va bien ? Est-ce qu'il y a encore des chances pour que ça n'aille pas ? Est-ce que… Est-ce qu'il y a n'importe quelle personne sur cette planète que je dois appeler pour vous prêter main forte ou prendre soin de Joanne ? » Je sais, j'assomme le pauvre médecin de questions, mais je suis un parfait ignorant dans tout ce domaine, et cela me rend terriblement nerveux. J'ai véritablement peur de ne pas être à la hauteur, me laisser dépasser, et n'être plus qu'un témoin de ces prochains mois, attendant sur le bas côté de la route. J'ai besoin de savoir, tout savoir, avoir ne serais-ce que l'illusion d'avoir un peu de contrôle sur les événements. « Je… Je ne cherche pas à avoir l'air pessimiste, au contraire, je veux juste être sûr… Être sûr d'avoir toutes les cartes en main. »
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Jamie ne pouvait qu'approuver les recommandations du médecin quant au repos de Joanne. Il n'avait de cesse de le lui proposer depuis qu'il avait appris la nouvelle. Il riait nerveusement lorsque Winters mentionna l'émotion de la semaine passée. "Vous n'êtes pas médecin, mais vous savez certainement mieux que moi comment elle vit sa grossesse en ce moment." lui rétorqua-t-il gentiment. Mais Jamie avait raison, sa belle allait suivre à la lettre ses conseils, pensant forcément plus au bébé qu'à sa propre personne. Elle lui fit un regard plus qu'amoureux lorsqu'il dit qu'il trouverait une manière d'être plus là, avec elle. A ne pas rentrer trop tard. Ce serait merveilleux s'il y parvenait mais elle ne lui en tiendrait pas rigueur s'il n'y arrivait pas. Il avait un travail très prenant et elle le savait depuis qu'ils se connaissaient. Elle trouverait bien des manières d'occuper ses journées. Après qu'elle se soit rhabillée, Joanne remarqua son fiancé en train de jouer nerveusement avec l'enveloppe. Elle prit délicatement l'une de ses mains entre la plaçant entre les siennes, caressant son dos avec son pouce. Et Jamie se mit à poser les questions que sa fiancée n'aurait jamais osé poser, certainement parce que ça l'angoissait de trop. Mais le Dr. Winters restait parfaitement calme et serein, malgré l'avalanche de questions qui venait de lui être posée. "J'aimerais qu'elle revienne d'ici deux semaines, puis dans un mois, à la fin du deuxième mois de grossesse. Entre temps, il y a plusieurs bilans à faire. Des bilans sanguins notamment pour voir s'il y a une présence d'anémie, si elle est bien immunisée contre certaines pathologies susceptibles de causer des séquelles, évaluer les taux d'hormones aussi. Et il y aura également chaque mois des tests urinaires à faire, pour dépister un éventuel diabète causé par la grossesse, une hypertension notamment. Bien que je pense que dans le cas de Joanne, il y ait plus de probabilités qu'elle fasse des hypotensions, qui se traduisent notamment par des vertiges, de la fatigue, des malaises." Le Dr. Winters marquait une pause, voyant le regard peu rassuré pour la belle. "Les bilans que nous avons fait en premier lieu sont tout à fait corrects, Joanne. Cela ne reste que des contrôles afin de prendre en charge au mieux votre grossesse." Elle acquiesça d'un signe de tête. Mais tout ceci lui semblait énorme à faire. Mais si c'était le prix pour accoucher d'un enfant en bonne santé, elle était tout à fait prête à le faire. Il y aurait par contre toujours une appréhension quant aux résultats, à chaque fois. "Et dans votre cas, l'examen le plus décisif sera l'analyse du liquide amniotique. Cela nous permet de faire un dépistage génétique, s'assurer qu'il n'y ait pas d'anomalies à ce moment là. Nous ne pouvons pas le faire maintenant, puisque la quantité reste minime et que l'embryon en a besoin. On le fait normalement à partir de la seizième semaine de grossesse, mais je vais me concerter avec le Dr. Bush afin d'essayer d'avancer l'examen d'une semaine ou deux. Nous ferons une échographie en même temps aussi. Et bien évidemment, je vous contacterai pour chacun de vos résultats." Nouvel hochement de tête, et beaucoup d'appréhension. "Ca va aller, Joanne ?" lui demanda-t-il en voyant encore de nouvelles larmers border ses émotions. "S'il y a bien un truc qui ne va pas s'arranger, c'est votre émotivité." plaisanta-t-il, avec un regard rassurant. "Je sais bien que vous ne souhaitez que le meilleur pour elle, afin que tout se passe bien. Pour le moment, il n'y a pas lieu de contacter d'experts. S'il le faut, je vous tiendrai informer. Là, la priorité, c'est le repos de Joanne, et laisser l'embryon grandir tranquillement. Ca ne servirait à rien de vouloir précipiter quoique ce soit, d'accord ?" Le Dr. Winters commença à griffonner ses ordonnances, pour les divers examens prévus dans les prochaines semaines, ainsi que l'arrêt de travail. Pendant ce temps, Joanne se levait du brancard et réenfila ses chaussures, puis se blottit contre son fiancé, à la fois soulagée et inquiète pour les temps à venir. "Avez-vous d'autres questions ? Joanne ? Mr. Keynes ?" demanda-t-il pendant qu'il pliait les feuilles afin de les protéger en les mettant dans une enveloppe. "Au moindre signe inhabituel qui vous inquiète, il ne faut surtout pas hésiter à venir, d'accord ? Appelez-moi, ou appelez le Dr. Bush, mais il ne faudrait surtout pas laisser traîner ça, d'accord ?" Il sourit tendrement. "Il n'y a pas de raison que ça se passe mal." ajouta-t-il, serein.
J'acquiesce régulièrement d'un signe de tête pour montrer à Winters que je saisis bien tout ce qu'il me dit. Il détaille une multitude d'examens qui, à l'oreille, n'ont absolument rien de rassurant, puisqu'ils sont finalement autant de possibilités de recevoir une mauvaise nouvelle à un moment donné. Anémie, diabète, hypotension. Autant de termes qui ont une grande capacité à inspirer la panique. Pourtant, le ton de l'homme, toujours doux et posé, a un pouvoir naturel me permettant de rester plutôt serein. Quelque part, de savoir que ce médecin qui connaît Joanne par coeur sera là à chaque étape, veillera aussi sur elle, et saura quoi faire si un problème survient, même minime, me rassure beaucoup. Je n'ai jamais beaucoup aimé les docteurs, cette impression qu'ils donnent d'être assis sur le monde, leur syndrome de dieu qui se devine dans le dédain qu'ils ont parfois pour leurs patients. Je ne suis peut-être tombé que sur les mauvais. Et je suis vraiment ravi qu'on ait placé Winters sur notre chemin. De temps en temps, je caresse le bout des doigts de ma fiancée, je serre un peu plus sa main. Je la devine anxieuse, pleine d'appréhensions face à ces prochains mois qui promettent d'être éprouvants, surtout pour elle. Chaque examen sera une montée de stress, chaque attente des résultats rendra les heures encore plus longues, et sûrement les soulagements n'en seront que plus grands lorsqu'il nous sera confirmé que tout se poursuit normalement. Parce que cela sera le cas. Tout ira bien. Forcément. Nous resterons sûrement bourrés de craintes en attendant ce fameux examen devant nous révéler si notre enfant possède des anomalies génétiques. Quelques semaines de nervosité que nous devrons dompter, afin de vivre ce bonheur au mieux, au jour le jour. Mon regard se pose sur Joanne, toujours au bord des larmes. Toutes ces émotions sont si grandes et intenses pour un si petit corps. Je m'imagine pas les litres de larmes qui s'écouleront de ses pauvres yeux, parfois pour un rien, ses réactions dictées par la moindre poussée d'hormones. Elle sera à fleur de peau, et je n'aurais qu'à composer avec cela. J'en rirais sûrement moins dans quelques mois. J'acquiesce une nouvelle fois aux dires de Winters. Pour le moment, il nous faut seulement attendre, laisser notre enfant grandir et s'épanouir, sa mère se reposer et effectuer tous les tests nécessaires. C'est sans autre crainte momentanée que je réponds n'avoir plus de questions. Mais je me permets d'ajouter avec un sourire amusé; « Si vous tenez vraiment à éviter toute familiarité avec moi, autant m'appeler Lord Keynes plutôt que Monsieur. Mais je crois que vous pouvez m'appeler Jamie, maintenant. » Je récupère les ordonnances qui sont faites à Joanne pendant que celle-ci termine d'enfiler ses chaussures. Elle s'approche ensuite de moi afin de réclamer une étreinte tendre que je lui donne immédiatement, passant un bras autour d'elle et déposant un baiser sur le haut de son crâne. J'écoute les dernière instructions de Winters avant d'échanger une poignée de main en signe d'au revoir, puis il nous ouvre la porte afin que nous sortions du cabinet, passant à la patiente suivante. Laissant Joanne se remettre de ses émotions, c'est sans un mot que je la garde près de moi pour aller de couloir en couloir, prendre l'ascenseur et sortir de l'hôpital. « J'ai pris mon après-midi, histoire de faire un break. » dis-je dans le parking en arrivant près de la voiture de Joanne. La mienne est un peu plus loin. J'aurais certainement du la prévenir plus tôt, mais j'avoue ne pas y avoir pensé. « Est-ce que je peux espérer te kidnapper pour le reste de la journée, ou tu dois retourner au musée ? » Sûrement, oui, ne serais-ce que pour les prévenir qu'elle ne reviendra pas la semaine prochaine à cause de sa grossesse. Mon Royaume pour voir la tête du directeur lorsque ses yeux tomberont sur l'arrêt de travail, qu'il comprendra que le donateur et sa petite conservatrice qui se sont découverts lors d'un événement dans son établissement il y a moins d'un an se sont non seulement fiancés, mais attendent aussi leur premier enfant.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Jamie avait récupéré tous les papiers, précisant ensuite au médecin que celui-ci pouvait tout à fait l'appeler par son prénom. Il acquiesça d'un signe de tête et d'un large sourire avant d'empoigner la main du bel homme, puis de la fiancée. Le couple sortait du cabinet et empruntait les nombreux couloirs de l'hôpital. Joanne tenait toujours de ses deux mains celle de Jamie, ça la rassurait. Ce ne fut que dans l'asceuseur qu'il réengagea la discussion, précisant qu'il avait réussi à se débrouiller pour libérer toute son après-midi. "Vraiment ?" dit Joanne, les yeux encore tout brillants, ravie d'entendre qu'il avait pu imposer un peu de temps libre sur son planning surbooké. Ils s'étaient arrêtés devant la voiture de la jeune femme, alors qu'il demandait à ce qu'elle reste avec lui pour le reste de l'après-midi. Elle adorerait. "Je devrais peut-être passer au musée, ramener l'arrêt de travail." Elle rit, nerveusement. "Je ne sais pas vraiment comment Wade et la patron vont réagir." Elle n'en avait strictement aucune idée. "Et puis Sophia va se douter de quelque chose lorsqu'on lui apprendra ça, je ne pourrai pas le lui cacher bien longtemps." ajouta-t-elle avec un sourire presque amusé. "Tu veux bien venir avec moi ?" Ce n'était pas pour impressionner la galerie, elle voulait juste qu'il soit là, avec elle. Joanne restait ensuite longuement plongée dans les yeux de Jamie, complètement envoûtée. Pensive, elle finit par lui dire, à voix basse. "Je ne voulais pas le faire devant le médecin." Joanne s'approcha doucement de lui, glissant ses doigts jusqu'aux lombaires de son fiancé. Elle prit d'assaut ses lèvres pour lui faire un baiser des plus langoureux, ses doigts venant ensuite saisir son visage. Elle se fichait de la durée du baiser, s'il y avait du monde qui passait. Joanne désirait juste l'embrasser, lui dire plus d'un millier de fois je t'aime, qu'il comprenne à quel point il était parvenu à la combler, à lui donner autant de raisons d'exister. Elle était encore très émue, voyant encore et encore ces images d'échographie défiler devant ces yeux. Et avant tout, ce si tout petit coeur qui battait à une allure folle. Qui vivait. D'une certaine manière, elle savait que petit allait vivre, qu'il allait avoir une belle vie. Elle ne se l'expliquait, certains parleraient d'instinct. Bien sûr, il y avait énormément d'appréhension et d'angoisses en vue des examens, mais l'air serein de son médecin l'avait beaucoup rassuré. Certains examens étaient des passages obligatoires à ses yeux, histoire de déceler n'importe quoi qui pourrait venir perturber la grossesse. "Merci." lui souffla-t-elle alors que son visage n'était qu'à quelques millimètres du sien. "Je t'aime." Et elle l'embrassa à nouveau. Elle lui vouait une très grande reconnaissance pour tout ce qu'il faisait pour elle, même pour les petites choses dont il ne se rendait même pas compte. Son baiser passait progressivement de passionné au plus tendre, pour finalement se détacher de ses lèvres et le regarder, on ne peut plus amoureusement. Ils avaient convenu de déposer la voiture de Joanne à la maison, et de prendre celle de Jamie pour se rendre au musée. Une fois dans une même voiture, elle posait soi sa main sur sa cuisser, ou au niveau de sa nuque. Ils entraient ensemble dans le musée. Il y avait pas mal de monde, pour un jour de semaine, malgré les travaux d'agrandissement. Joanne se dirigeait vers les bureaux administratifs. Jamie marchait juste à côté d'elle. La conservatrice toqua à la porte du bureau de son supérieur, craignant qu'il ne soit en entretien avec quelqu'un. On l'invita à entrer, elle ne fit qu'entrouvrir la porte. "Oh, Joanne ! Entrez donc !" Elle ouvrait plus grandement la porte, entrant grandement." Et... Lord Keynes, bienvenue." dit-il en passant à côté de son bureau afin de venir lui serrer la main en guise de salutations. "Qu'est-ce qui vous amène ?" Joanne était un peu embarrassée, elle n'aimait rapproter ce genre de nouvelles. "Je... Je viens vous ramener mon arrêt de travail." Le directeur écarquilla les yeux, d'un air interrogatif. Elle sortait de son sac le papier justifiant son arrêt et le tendit à son supérieur. Au fur et à mesure de sa lecture, un large sourire, bourré de satisfaction. Il devait se sentir incoyablement fier dans toute cette histoire.
Quitte à m'absenter aujourd'hui, autant en profiter pour prendre tout mon après-midi, m'étais-je dit en prévoyant cette journée. Je ne me serais pas vraiment vu capable de travailler après autant d'émotions ; j'aurais été devant mon ordinateur, sans avoir la tête à quoi que ce soit d'autre que ressasser les images de cette échographie, écouter en boucle les battements si rapides de ce petit coeur qui bat dans le ventre de ma fiancée. Autant m'accorder quelques heures pour me remettre de mes émotions avec Joanne, partager ce moment avec elle, à condition qu'elle soit disponible pour cela -sinon, je saurais me contenter d'avoir un après-midi pour moi seul, comme ils sont terriblement rares depuis de nombreux mois, histoire de remettre un pied dans la salle de sport que j'ai déserté depuis quelques semaines. Comme je le pensais, la jeune femme me dit qu'elle doit passer par le musée pour déposer son arrêt de travail. J'acquiesce d'un signe de tête. « Wade ? » je répète, curieux, ne sachant plus si j'ai déjà entendu ce prénom, si je suis censé m'en souvenir, puisque Joanne l'utilise directement plutôt que le poste de la personne en question. Il y a le patron, dont la dénomination marque le respect et une distance. Et il y a Wade, qui semble tout de suite plus intime présenté de cette manière. Je plisse les yeux. Vilaine jalousie. Finalement, la belle m'invite à l'accompagner au musée pour apprendre la nouvelle à ses supérieurs en quelque sorte. Nous pourrons voir ensemble leur réaction. « Bien sûr, je ne voudrais pas manquer ça. » dis-je avec un sourire excité, une main sur le visage de Joanne dont mon pouce caresse sa joue. La belle s'approche de moi, et m'incite à approcher également d'une main dans le bas de mon dos. Avant que je ne puisse réagir, elle me donne un long baiser des plus passionnés. Instinctivement, mes bras l'enlacent et la serrent fermement contre moi, me laissant complètement emporter par tous les sentiments transmis et partagés dans ce baiser qui nous exaltaient pendant l'échographie. Tout cet amour l'un pour l'autre que nous ne prononcions qu'avec des regards, des sourires, quelques gestes tendres en présence du médecin, et qui peuvent enfin s'extérioriser maintenant qu'il n'y a plus que nous -et quelques passants qui s'en fichent bien. La jeune femme articule un remerciement qui me laisse interrogatif, mais une fois encore, je n'ai pas le temps de demander pourquoi que Joanne est déjà repartie à l'assaut de mes lèvres. Je passe une main dans ses cheveux, glissant mes doigts entre ses mèches blondes afin de garder son visage proche du mien encore de nombreuses secondes. « Je t'aime aussi. » je murmure au bord de sa bouche entrouverte une fois nos lèvres détachées, mon regard noyé dans le sien. Je lui souris, tout simplement comblé, caressant une dernière fois sa joue avant que nous nous décidions à partir. Je retrouve ma voiture sur le parking et suis de près celle de la jeune femme jusqu'à chez nous. Là, je l'attends juste devant la maison pendant qu'elle garde son auto dans l'allée du garage ; je peux entendre les chiens aboyer derrière la porte, et cela me fait presque mal au coeur de leur donner ce faux espoir de notre retour si tôt dans la journée. Ils n'attendront pas bien longtemps, mais tout de même. Joanne monte dans l'Audi, et nous repartons aussitôt en direction du musée. J'avoue que je ne m'attendais pas à y voir autant de monde en pleine semaine, d'autant plus avec les travaux. Mais je ne joue pas au touriste et continue d'emboîter le pas de la belle jusqu'à l'aile administrative, atteignant le bureau du directeur de l'établissement. L'homme nous invite chaleureusement à entrer -et je devine que ma présence le surprend beaucoup. Je ne suis toujours pas habitué -tout du moins pas à l'aise- lorsque l'on s'adresse à moi en utilisant mon titre. Je serre la main du directeur avec un sourire amical, puis laisse Joanne lui tendre son arrêt de travail. Je mords l'intérieur de ma joue pour rester aussi stoïque que possible alors que je trépigne d'impatience à l'idée de lire une expression sur le visage du supérieur de ma fiancée. Celui-ci s'illumine peu à peu. « Oh Joanne, je suis tellement heureux pour vous ! » finit-il par s'exclamer une fois arrivé au dernier mot du papier. Il se jette sur elle pour l'enlacer, faisant fi de toute distance imposée par la hiérarchie qui les sépare pendant quelques secondes. Ce qui est un peu moins le cas avec moi, puisqu'il se reprend assez soudainement et se contente d'une longue poignée de main particulièrement amicale accompagnée d'un large sourire. « Et toutes mes félicitations, Lord Keynes. » Assez nerveux, je le remercie d'un signe de tête. « Si je peux me permettre, vous n'avez pas perdu votre temps ! » Un rire gêné m'échappe. C'est une manière relativement subtile et aimable de nous faire comprendre que tout est allé particulièrement vite entre nous -et de traduire sa surprise sans doute. Je ne sais pas vraiment où me mettre, mais je garde contenance. « C'est une grosse surprise pour nous, ce n'était pas vraiment prévu. Pas tout de suite en tout cas. Mais nous en sommes vraiment heureux. » Et encore, le mot est faible, mais je ne sais pas s'il en existe un autre pour résumer cette avalanche de bonheur qui a dévalé sur nous. Le directeur a l'air sincèrement ravi. « Vous nous volez l'une des plus précieuses pièces de ce musée. » dit-il en fronçant légèrement les sourcils, faisant mine de m'en tenir rigueur. J'hausse les épaules, prenant un air assez snob pour jouer le jeu. « Je n'en suis même pas désolé. » Son rire s'ajoute au mien tandis que nos mains se séparent enfin. Mais mon naturel tactile me fait poser une main sur son épaule, gardant son attention encore un peu, me faisant un peu plus sérieux. « En revanche, je vous remercie de m'avoir permis de… rencontrer quelqu'un d'aussi merveilleux qu'elle. Vous êtes plus ou moins l'un des instigateurs de tout ceci. » Auprès de lui, autant faire l'impasse sur la première rencontre avec Joanne. Nous ne nous sommes réellement connus que lors de ce gala, au musée. « Vous pouvez être fier. Et pas seulement parce que cela assure mes dons pour le musée pour les prochaines années. » Derrière moi, la porte s'ouvre de nouveau, laissant apparaître un autre homme, assez grand, avec le genre de prestance qui m'est familière. Son visage, lui, m'est inconnu. « Wade ! Tenez, lisez ça. » Le directeur lui place le papier entre les mains. Le fameux Wade.
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Joanne n'était pas tout à fait à l'aise lorsque son patron l'enlaçait en guise en félicitations. Elle souriait nerveusement. Il restait par contre un peu plus sur la réserve lorsqu'il venait féliciter Jamie. A vrai dire, toute la situation prenait une tournure qui la dérangeait un peu, surtout pour la suite de la conversation. Elle était même surprise des remarques faites par le directeur, son fiancé n'hésite par à parler dans le même sens que lui. Puis on revenait à la comparer à une pièce de musée. Elle savait que Jamie la voyait un peu ainsi, lorsqu'il ne voulait que la garder pour elle, mais que ces mots sortent de la bouche de son supérieur la surprenait beaucoup. Elle le regarda d'un air incrédule pendant une fraction de secondes. Jamie jouait aussi le jeu, fier comme un coq. Le Lord montrait ensuite toute sa reconnaissance au directeur, disant que c'était grâce à lui -indirectement-, qu'il avait pu faire la connaissance de la belle conservatrice. Elle était un peu plus contrariée par ce que son fiancé disait ensuite. Que la suite de ces événements garantissaient ses dons pour les années à venir. Peut-être était-ce les hormones, mais Joanne avait la soudaine impression qu'elle n'était qu'un pont qui transférait des sommes d'argent considérables dans un sens, des courbures et des invitations pour des soirées prestigieuses de l'autre. Juste un catalyseur entre deux grand protagonistes. Ca la désenchantait un peu, qu'elle et son bébé se résume à cela. Elle restait dans ce flot de pensées alors que Wade lisait déjà l'arrêt de travail en question. Il afficha un large sourire, en riant un peu. "J'aurais du le parier." dit-il à voix basse, avant de regarder la première concernée. Il avait bien remarqué qu'elle était perdue dans ses pensées. "Joanne, ça va ?" demanda-t-il en posant amicalement une main sur son dos. Joanne sursauta légèrement avant de voir ce visage familier qu'elle appréciait beaucoup. "Oui, oui, ça va. Je... Je pensais à quelque chose." Wade la regarda d'un air tendre, lui montrant la feuille qu'il avait en main. "Toutes mes félicitations, Joanne." dit-il en l'enlaçant chaleureusement. Une étreinte qu'elle appréciait beaucoup plus que celle de son patron. "Depuis combien de temps, dites-moi ?" La jeune femme devint beaucoup plus souriante. "Un peu plus d'un mois, maintenant." Et elle ne tarda pas davantage avant de le présenter à son fiancé. "Jamie, je te présente Wade Johnson, notre nouveau sous-directeur. Il est arrivé peu après notre week-end à Sydney." Wade aspirait vraiment à la sympathie - sauf peut-être pour Jamie. "Et voici Jamie Keynes, mon fiancé." dit-elle en le regardant. "Enfin... Lord Keynes." Wade regardait Joanne d'un air faussement désolé. "Je le connais déjà, à vrai dire." La jeune femme le regarda d'un air surpris. "De l'émission qu'il anime, je la suis depuis le début." Il fit un clin d'oeil complice à la conservatrice. "Je n'ai pas pu écouter celle de la semaine passée, je n'ai toujours pas eu le temps de l'écouter en podcast non plus, d'ailleurs. Mais j'aime beaucoup ce que vous faites." Wade avait aussi énormément de prestance, il était le genre d'hommes à rapidement savoir à qui il avait affaire, et comment se comporter le cas échéant. "Sophia le sait déjà ?" demanda le directeur. "Non, mais j'ai déjà ma petite idée sur la manière de le lui annoncer." dit la jeune femme, les yeux pétillants. "Pensez à bien vous reposer Joanne." commença Wade. "Mais j'espère que vous viendrez nous donner quand même quelques signes de vie, même si ce n'est que pour la pause du déjeuner. Vous êtes comme chez vous, ici." "Ce sera avec plaisir, Wade, merci beaucoup." Le directeur regardait sa montre. "Oula, nous ne sommes pas en avance. Nous avons encore une réunion en fin d'après-midi. Je ne veux pas vous mettre à la porte, mais j'y suis bien obligé." dit-ill d'un air désolé. Tout le monde se saluait, même si Jamie semblait un peu plus sur la retenue lorsqu'il s'agissait de serrer la main à Wade. Le couple sortait ensuite du bureau, puis du musée. Joanne tenait la main à son fiancé, l'entraînant dehors. "Ce soir, c'est moi qui t'invite." Elle l'embrassa tendrement. "Avant d'avoir des envies bien particulières, autant te laisser encore choisir où nous pourrions aller." ajouta-t-elle, d'un air malicieux.
Wade est supposé inspirer beaucoup de sympathie, et je ne doute pas que cela est le cas auprès d'une grande majorité de personnes. Sauf qu'en quelques minutes, briques par briques, c'est un immense mur qui se dresse entre lui et moi, et empêche toute adhésion des deux protagonistes que nous sommes dans la vie de Joanne. Une main dans le dos, sa manière de la regarder, de lui sourire, de la faire sourire, de la prendre dans ses bras, de lui adresser un clin d'oeil, d'autant se préoccuper d'elle, de lui demander de passer au musée de temps en temps… Non, plus qu'un mur, c'est une surface parfaitement blindée qui s'est façonnée soudainement en assistant avec une immense amertume à tous ces gestes trop amicaux, trop chaleureux, trop affectueux. Tant qu'ils se croient seuls dans cette pièce et qu'ils se fichent bien de ma présence, mon regard posé sur Wade est des plus froids. Je cherche à savoir à qui j'ai affaire, à en décrypter un minimum sur cet homme qui, je le pense, provient du même monde que le mien ou le côtoie d'assez près depuis assez longtemps pour s'en être imprégné. Mais cette personne m'a l'air hermétique. A moins que ma jalousie ne m'empêche de voir quoi que ce soit en lui qui ne soit pas une menace. Pour le moment, il ne fait que me rappeler un autre sous-directeur qui était supposé n'être « qu'un simple supérieur ». Joanne me présente finalement à ce cher Wade. Comme si de rien n'était, je lui adresse un sourire des plus amicaux. « Le fameux remplaçant de Lionel. » dis-je quand la jeune femme annonce son poste. Car jusqu'à présent, il n'est que cela à mes yeux. Un autre sous-directeur trop tactile et trop proche de ma fiancée. Il ne sait peut-être pas pourquoi son prédécesseur a démissionné. Mais s'il est au courant, il devinera facilement que je n’hésiterais pas à le mettre sur le banc de touche de la même manière, tout comme lui. Je pourrais presque remercier Joanne de préciser mon titre avant que je n'ai à le faire. Ce qui me surprend, c'est lorsque l'homme avoue me connaître déjà. Non, aucune chance, j'ai une bien trop bonne mémoire des noms et des visages pour pouvoir oublier qui que ce soit, même en remontant des années en arrière. Sauf que lui me connaît, et moi non, pour cause, il écoute mes passages à la radio. J'hausse les sourcils, surpris -c'est idiot, mais même en ayant conscience d'être écouté par des milliers de personnes, je m'étonne toujours de rencontrer un auditeur, comme si cela était hautement improbable. « Merci beaucoup. » je me contente de répondre, un sourire en coin, baissant humblement la tête. Tout son attention se reporte de nouveau sur Joanne, et même si le directeur s'efforce de me dire quelques mots pour meubler notre côté, mon regard reste posé sur elle et Wade, et je lui réponds à peine. Heureusement que nous sommes jeté dehors. C'est presque un soulagement. Je serre rapidement de la main des deux hommes et ne me fait pas vraiment prier pour quitter le musée sous couvert de ne pas vouloir déranger plus longtemps deux personnes qui m'ont l'air fort occupées. Une fois dehors, je me sens déjà mieux -quoi que toujours tendu et agacé par la scène à laquelle j'ai assisté, même si je m'efforce de ne rien en montrer à Joanne. « J'espère que tu ne seras pas de celles à me demander de me lever à trois heures du matin pour avoir des sardines à la chantilly. » je réponds au sujet de ses futures envies particulières de femme enceinte. Je dépose à mon tour un rapide baiser sur ses lèvres avant de marcher en direction de la voiture. « Je vais réfléchir à une bonne adresse. » j'ajoute, ayant déjà une idée assez précise en tête d'un lieu qui pourrait plaire à la jeune femme sans aucun doute. Je déverrouille l'Audi, ouvre ma portière et m'installe sur le siège conducteur. « En attendant, je crois que Ben et Milo n'ont pas compris pourquoi ils ont entendu les voitures, mais personne n'est rentré. Je pensais les balader sur la plage. Ca fait longtemps. » A vrai dire, je ne sais pas depuis combien de temps je n'ai pas promené moi-même les chiens. Joanne étant toujours rentrée plus tôt que moi, elle s'occupe d'eux. Et puis, la porte de la véranda est toujours constamment ouverte sur le jardin, alors ils ne manquent pas d'espace pour se dégourdir les jambes. Mais, je ne sais pas, ils me manquent. Je démarre finalement la voiture, me repassant le film de chaque geste trop affectueux qu'avait eu Wade envers Joanne, et ravalant au mieux ma possessivité. Elle n'aimerait pas que je me montre si dur envers un homme que je viens à peine de rencontrer et qu'elle semble tant apprécier. Je prends sur moi. « Comment tu comptes annoncer la nouvelle à Sophia alors ? » je demande pour me changer les idées, en chemin vers la maison.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
"Avoue que ça te ferait plaisir de me cuisiner quelques mignardises, cordon bleu que tu es." dit Joanne, avec un large sourire dessiné sur ses lèvres. Elle s'approcha doucement de lui afin de lui voler un baiser. Gardant son visage à près du sien, elle plongea son regard dans celui de Jamie, les yeux pétillants. Elle entourait doucement sa taille en se mordillant la lèvre inférieure. "Et je suis prête à parier que tu t'y mettrais encore plus vite si je te disais que c'est le bébé qui réclame." Joanne le dévorait des yeux, envieusement, et l'embrassa tendrement une nouvelle fois. Le bel homme proposait d'aller promener les chiens sur la plage. Elle les y emmenait souvent, mais ça leur ferait certainement plaisir de voir leurs deux maîtres être là pour une belle promenade. Elle accepta l'idée par un simple sourire, puis le couple entrait dans l'Audi. Durant le trajet, Jamie demandait comment sa belle voyait l'annoncer à sa meilleure amie. "Je pensais photocopier l'une des images d'échographie, celle où... on voit le mieux notre enfant. Je la mettrai dans une enveloppe. On irait manger dans un restaurant français, et je la lui donnerai au moment du dessert. Quelque chose comme ça." dit-elle, assez fière de son idée. "Il ne lui faudra pas bien longtemps pour comprendre ce qu'il se passe." ajouta-t-elle en riant. Ils arrivaient à la maison. La porte d'entrée était à peine ouverte que les deux bestioles se ruèrent sur leurs maîtres. Joanne les gâtait en caresses. Les pieds dans la maison, elle vola un baiser à son futur époux. "Je vais vite me changer, il ne fait pas si chaud que ça, dehors." Elle grimpait les escaliers, Milo tenait à l'accompagner à l'étage. Elle enfila un pantalon, ainsi qu'un pull en laine assez épais. Et une paire de bottines. Milo jouait avec l'un de ses jouets, un bout de corde avec un gros noeud. Jamie montait également quelques minutes plus tard, voulant certainement se débarasser de sa chemise et mettre quelque chose dans lequel il serait le plus à l'aise. La jeune femme s'installa dans l'un des fauteuils, les chiens ne tardaient pas trop à s'approcher d'elle et réclamer encore et toujours plus de caresses -chose dont elle ne se privait absolument pas de faire. Milo était même monté sur ses genoux. "Tu crois qu'ils le savent ?" demanda-t-elle à Jamie pendant que celui-ci terminait de se changer. "Qu'ils sentent la présence du bébé ?" Une fois que le bel homme était prêt, ils descendaient tous et quittèrent la maison. Ils marchaient tranquillement, les chiens étaient sans laisse. A croire que Jamie avait réussi à dompter Ben comme il se devait. Milo suivait le plus grand de près, ils couraient parfois même ensemble, se chamaillant un peu. Milo embêtait beaucoup Ben. Alors qu'ils approchaient de la plage, Joanne finit par demander. "Tu penses que tu vas réussir à toruver plus de temps libre ?" Elle pensait à ce qu'il avait dit, lors de la consulation avec le Dr. Winters. "Je sais que ça sera compliqué, pour toi." Elle lui tenait la main depuis le début de la promenade. "Tu sais que je ne t'en voudrais pas si tu n'y parvenais pas, hein ? Je n'aimerais pas que ça te porte préjudice par la suite." Elle lui souriait tendrement. C'était vrai, elle ne le lui reprocherait pas. Il aimait son travail, bien que c'était devenu très prenant pour lui. Joanne se disait qu'elle allait trouver de quoi s'occuper et remplir ses journées, en dehors des siestes et des grasses matinées - si elle arrivait à dormir. Les pieds dans le sable, les chiens courraient tout droit en direction de la mer. C'était assez venteux, ce jour là. En marchant, Joanne trouva un petit morceau de bois flotté et le lançait au chien, dans l'eau. Les deux se ruèrent dessus, se disputant le morceau de bois. Milo en resortant bien évidemment perdant et revint vers ses maîtres. Joanne se mit à genoux afin de le caresser. Il était trempé. "Tu auras le droit à un sacré bain en rentrant, histoire d'enlever le sable et le sel." lui dit-elle en riant. "Viens, on va t'en trouver un rien que pour toi." Joanne se releva et s'éloignait un peu de Jamie afin de trouver quelque chose de satisfaisant pour le plus petit des chiens. Elle trouvait un autre morceau de bois une vingtaine de mètres plus loin, qu'elle lui lança discrètement, alors que Ben était bien trop occupé à mordiller le sien.
Je n'ai plus vraiment le temps de grand-chose depuis que l'émission est lancée, je dois bien l'avouer. Je tente de prendre soin de Joanne, mais je sais bien que c'est le plus souvent le contraire. Elle s'occupe des chiens, du dîner, toujours douce et attentive lorsque je reviens de la radio. Elle pense toujours à tous les détails, ce qui la rend tellement adorable, et me fait sentir si coupable. Maintenant qu'elle est enceinte, je ne pourrais plus me reposer autant sur elle. Je vais devoir redoubler d'efforts pour elle, être présent, mais cela ne sera sûrement pas à contrecoeur. Je crois qu'elle sait bien que je ne demande que cela. C'est la raison pour laquelle elle ne doute pas que je répondrais à la moindre exigence venant d'elle, ou du bébé. « Je sens que cette excuse va devenir récurrente. » je réponds avec un rire. Ce n'est pas moi, c'est le bébé. Je réponds à son baiser et tapote le bout de son nez avec malice. Nous prenons rapidement place dans la voiture et nous mettons en chemin pour rentrer chez nous. Ce cher Wade reste bien incrusté dans un coin de mon crâne, c'en est agaçant. C'est une sensation particulièrement étrange et désagréable, mais à chaque fois qu'un autre homme touche Joanne, pose ses bras quelque part sur elle, j'ai l'impression que mon territoire a été souillé. Les premières minutes, j'ai du mal à poser de nouveau une main sur elle, presque révulsé ; et puis, vient le moment je dois récupérer ce qui m'appartient, et je m'applique à déposer de nouveau ma marque aux endroits qui ont été foulés par l'intrus. Ce cheminement est parfois difficile à supporter. Je me change les idées en demandant à la jeune femme la manière dont elle souhaite apprendre la nouvelle de sa grossesse à Sophia. Une photo de l'échographie glissée dans une enveloppe et donnée au restaurant. Du Joanne tout craché. « C'est une bonne idée. C'est mignon. » dis-je avec un sourire en coin. Une dizaine de minutes plus tard, nous sommes chez nous. Encore une fois, les chiens aboient derrière la porte, surexcités à l'idée de nous accueillir. Quand nous entrons enfin, ils se jettent littéralement sur nous. Nous passons quelques minutes à les gâter avec de nombreuses caresses. Milo a toujours cette tendance à léchouiller tout ce qui lui passe sous le museau, et lape le dos de ma main affectueusement. Ben, lui, comme toujours, adore se dresser sur ses pattes arrières pour déposer ses pattes avant sur mon ventre, cherchant littéralement un câlin. Submergé par les demandes de caresses, assis par terre dans l'entrée pour satisfaire tout le monde, je laisse ma fiancée grimper à l'étage pour se changer, espérant pouvoir enfiler quelque chose de plus confortable lorsque les deux bestiaux se feront moins demandeurs. Milo file comme une flèche dans l'escalier pour accompagner sa maîtresse, tandis que Ben reste un peu avec moi pour jouer, faire mine de me montrer les dents. Je finis par réussir à me libérer de cet éternel insatisfait et monter dans la chambre à mon tour. Dans le dressing, je retire chemise et pantalon pour mettre un t-shirt sur mon dos ainsi qu'un gilet plutôt épais et un simple jean -tenue généralement réservée aux week-ends adoptée depuis notre passage à Sydney. Depuis la chambre, Joanne demande si je pense que les chiens sentent la présence du nouveau venu. Réfléchissant, je m'arrête net dans mes gestes. « Je ne sais pas, je ne me suis pas vraiment posé la question… Peut-être, oui. » Il me semblent que les animaux ont un bon instinct pour cela, mais à vrai dire, je n'en sais rien. J'en oublie ce que je cherchais dans le tiroir que j'ai ouvert. Ah, une écharpe. Quelque chose de léger, juste histoire de protéger ma gorge du vent qui souffle au dehors. Et lorsque nous sortons, je réalise que cela était en effet une bonne idée. Ben et Milo ont toujours été sages en balade, à ne jamais trop s'éloigner. Ils connaissent le chemin de la plage à la maison par coeur et sauraient rentrer sans se perdre, mais ils prennent toujours soin de regarder derrière eux pour rester à une distance raisonnable -et peut-être nous dire d'accélérer le pas. Nous ne tardons pas à rejoindre l'esplanade, puis descendre l'escalier qui mène à la grande étendue de sable. Là où Joanne brise le silence pour demander si je pourrais réellement trouver plus de temps libre pour elle. « Je vais faire de mon mieux. » je réponds, une main dans une poche, l'autre serrant la sienne, regardant mes pieds foulant le sable. J'hausse les épaules ; je fais déjà ce que je peux pour être avec elle tout en continuant de fournir la même quantité de travail à la radio, et j'ai l'impression que si, soudainement, je liste tout ce que je peux faire pour me libérer un peu plus, elle pensera que je n'y mettais pas tant du mien que cela jusqu'à présent. « Je ne peux pas promettre que j'y arriverais. Seulement que je vais essayer. » Je lui adresse un sourire timide. Même si elle dit qu'elle ne m'en tiendra pas rigueur si je suis forcé de garder le rythme actuel, j'en doute. Au bout d'un moment, ma présence sera insuffisante. Les premières semaines seules, elle tiendra. Et puis, quand il n'y aura plus de livre à lire, qu'elle connaîtra par coeur le programme télévisé, qu'elle aura parcouru tout Brisbane avec les chiens, multiplié les longueurs dans la piscine, réorganisé le dressing dix fois, nettoyé la maison de fond en comble tous les mercredis, elle deviendra chèvre. C'est long, huit mois seule. Elle a des amis, des sorties à faire, mais qui sera aussi libre qu'elle aux heures où le monde travaille pour faire tourner l'économie ? Même si je tiens à ce qu'elle se repose, j'ai de la peine à l'idée que ses journées se résument à attendre mon retour du travail en s'occupant comme elle peut. « Un après-midi, comme ça, de temps en temps… Travailler de la maison parfois, rentrer une heure plus tôt tous les jours… Ca ne devrait pas être si difficile que ça. » j'ajoute timidement, ne voulant pas donner de faux espoirs à la jeune femme, mais sachant que ces options peuvent être à ma portée si je me débrouille bien. Et puis, je pourrais toujours dégainer l'excuse de la fiancée enceinte pour justifier ce rythme de travail moins soutenu que d'habitude. Je ne pense pas que quiconque osera m'en tenir rigueur. Laissant Joanne jouer avec les chiens, je l'observe leur jeter un bâton, les mains dans les poches. Elle les a toujours adorés. J'aime beaucoup Milo, je suis heureux pour Ben qu'il ait été mis sur mon chemin. Il est bie moins seul et plus joyeux depuis que le court sur pattes lui tient compagnie. Aucune des affiches disséminées dans les cabinets vétérinaires n'ont donné quoi que ce soit, ni son signalement aux associations. Il n'y a personne pour le réclamer, à part nous. Joanne va et vient, allant chercher un autre bâton pour Milo puis revenant. Pour ma part, je marche toujours au même rythme, plutôt lent, observant tantôt le ciel, l'eau, la vie autour de nous, les chiens, respirant l'air iodé. « Tu l'aimes bien, ce Wade, hein ? » je finis par demander, sans accusation aucune, trahissant ma jalousie par une question sans réel sens, attendant certainement d'être rassuré. Que ma fiancée attende notre enfant devrait pourtant suffire à cela, mais je crois que je suis un cas désespéré.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Jamie était très attentif sur les mots, sur ce qu'il pouvait faire ou ne pas faire. Comme ici, il ne pouvait pas promettre de se libérer un peu afin de passer plus de temps avec elle, il essaierait. Elle lui faisait entièrement confiance, et savait qu'il ferait ce qu'il pouvait. Elle savait également qu'il avait un travail particulièrement prenant, depuis le début. Il souriait timidement, et semblait peu convaincu d'y parvenir. Joanne était bien plus optimiste, elle lui souriait tendrement, lui embrassant le dos de sa main. "On trouvera un moyen, d'une manière ou d'une autre." dit-elle, confiante. "Et puis, nous avons tous les weekends. Je ne vais plus travailler le samedi, nous aurons déjà deux jours complets dans la semaine rien que pour nous." En faisant abstraction des éventuelles invitations pour diverses soirées. "C'est déjà une bonne chose, je trouve." ajouta-t-elle, toujours ce léger rictus dessiné sur ses lèvres. La jeune femme continuait à jouer avec Ben et Milo, les deux ayant chacun leurs bâtons, les voilà occupés pour quelques minutes. Et Jamie posa sa question concernant Wade. C'était certainement à cause du comportement de ce dernier qu'il semblait bien pensif durant le trajet en voiture. Un air légèrement agacé. Joanne se disait qu'elle aurait du s'y attendre, de la part de son fiancé. Bien que sa jalousie soit une preuve d'amour, elle n'en restait pas moins excessive. La belle blonde se posta devant lui, face à lui, le forçant à s'arrêter. Ses yeux bleus s'ancraient dans son regard. Sa voix restait douce, sans un brin d'agressivité. "Qu'est-ce que je dois faire pour que tu comprennes qu'il n'y a que toi que j'aime ?" lui dit-elle. Joanne lui souriait malgré tout. Elle restait silencieuse quelques secondes avant de reprendre. "Oui, Wade est une personne que j'apprécie. Il est gentil, bienveillant, plus terre à terre que Lionel." Elle se doutait que ça n'allait pas être des arguments suffisants pour qu'il soit un peu plus serein. Ses bras entouraient son cou, elle se mit sur la pointe des pieds pour se rapprocher un peu plus de son si beau visage. "Je ne veux que toi dans ma vie, Jamie. Je ne veux dormir que dans tes bras, passer mes soirées avec toi." Joanne était hypnotisée par les yeux verts de son amant, qu'elle regardait on ne peut plus amoureusement. "Je veux qu'il n'y ait que toi qui me touche comme tu sais bien le faire, qui..." Elle marqua une brève pause et reprit d'une voix plus basse. "Qui puisse me faire l'amour. Comme à Sydney." Sydney. Il suffisait de mentionner le nom de la ville pour lui rappeler de très vifs souvenirs. Le gala et la manière dont il s'était terminé, leurs ébats passionnés, la demande de fiançailles, la conception de leur petit miracle. Rien que le fait de s'en rappeler accélérait sensiblement son rythme cardiaque.[color=#006699] "Et qu'il n'y ait que toi comme père de nos enfants, que tu sois le seul qui puisse m'en donner." Elle l'embrassa tendrement. "Et par dessus-tout, il n'y a que toi que je veuille épouser. Que l'on continue de s'aimer dans cette vie-là comme dans la prochaine." La jeune femme pensait chacun de ses mots, ils venaient droit du coeur. Mais Jamie ne sera certainement jamais complètement serein dans la mesure où il y aura toujours, d'une manière ou d'une autre, un homme qui s'approcherait un peu trop près d'elle. Joanne l'embrassait longuement, tendrement, en glissant une main dans ses cheveux. Elle prolongeait le baiser d'autant qu'elle le pouvait, et il devint malgré elle de plus en plus langoureux. "Je t'aime." lui souffla-t-elle une fois que leurs lèvres se détachaient. La belle blonde voulait lui chasser de la tête ces mauvaises idées. Elle prit ensuite l'une des mains de Jamie qu'elle plaça sur son bas ventre, juste en dessous de son nombril, à même la peau. Malgré le vent frais qu'il y avait en bord de même, ses doigts restaient plus chauds que la peau de sa belle. Les yeux amoureux, elle lui dit. "Il est juste là. Tu te rends compte ?" Son sourire s'élargissait. "Et son petit coeur qui bat déjà, tu t'en rappelles ?" Ils l'avaient entendu il y a quelques heures de cela, mais c'était à peine réalisable. Que ce coeur battait déjà. Que l'embryon avait encore grandi depuis l'échographie. C'était difficilement concevable, et pourtant, c'était bien réel. Elle rit légèrement avant de partager sa pensée. "Il y en aura d'autres qui seront bien jaloux lorsque le bébé verra le jour." dit-elle en lançant un regard à Ben et Milo.
Ma question a propos de Wade n'a rien de surprenant. Joanne s'y attendait sûrement. Elle me connaît trop bien pour savoir que tous les gestes affectueux qu'il avait eu à son égard ne pouvaient pas me plaire, allaient me laisser sur la défensive. Si je garde souvent mes émotions et mes pensées pour moi, ma jalousie, elle, parle d'elle-même, et je l'exprime souvent pour l'évacuer. Parce que c'est un poison si corrosif qu'il a le don de me dévorer de l'intérieur en quelques heures, créant une animosité des plus terribles. Et puis, je dois apprendre à communiquer plus avec ma fiancée concernant mes pensées et mes ressentis. Qu'elle en sache plus sur tout ce qui se passe dans ma tête, les quelques rouages qui se décrochent parfois et tournent infernalement dans le vide. Ma possessivité en fait partie. Elle l'a vu lors de notre dernier gala ; il n'y a pas corde plus sensible sur laquelle tirer pour me faire réagir immédiatement, et de la pire des manières. Cela n'a rien de facile, de s'avouer si maladivement possessif. Alors je garde les mains dans les poches, le regard posé sur le sable, honteux d'avoir mentionné Wade, mais déjà si obsédé par sa manière de la toucher. Même si ses intentions n'étaient sûrement pas les mêmes que celles de Lionel en son temps. Alors quoi faire pour me faire comprendre que Joanne m'aime ? « Continuer de le répéter, je suppose. » je réponds avec un léger sourire en coin, soutenant difficilement son regard. Peut-être que cela rentrera un jour dans ma tête, peut-être pas. Je baisse de nouveau les yeux comme un enfant qu'on sermonne lorsque la jeune femme affirme apprécier son sous-directeur, qu'elle lui trouve tant de qualités. Gentil, bienveillant… Et marié. Je crois me souvenir qu'elle m'avait déjà dit, le jour où elle m'a appris l'arrivée de son nouveau supérieur, que celui-ci est marié. C'est une petite pierre en plus à laquelle me raccrocher. Joanne s'approche un peu plus, se mettant sur la pointe des pieds de cette manière qui me fait toujours fondre. Elle est adorable, quand elle essaye de se grandir de cette manière. De sa voix éternellement douce, la belle tente de me rassurer par de nombreux mots doux, évoquant Sydney. Mon sourire s'élargit. Il y a tant de souvenirs liés à ce simple nom. Tant d'images qui reviennent en mémoire lorsqu'il est prononcé, des sensations, des émotions intenses et toujours très présentes. J'aime tant pouvoir me dire que c'est là-bas, pendant nos ébats plus que passionnés, quand j'ai demandé Joanne en mariage, que ce petit être a été conçu. Le premier à pouvoir espérer pouvoir vivre. Mon enfant ; pas celui qu'elle aurait pu avoir avec son ex-mari, pas celui de l'homme que j'étais il y a quelques mois. C'est une grande fierté aussi. Pendant que la jeune femme m'offre un baiser, mes mains quittent mes poches et mes bras viennent l'enlacer tendrement. Je caresse ses lèvres amoureusement, me laissant glisser vers un contact plus passionné sans même m'en rendre compte, tenant finalement son visage entre mes mains. Quelques secondes, une fois nos lèvres détachées, je pose mon front contre le sien. « Je… Je suis désolé, je... » Je cherche quoi dire pour me faire pardonner ma jalousie, mes suspicions. Rien ne vient. « Non, en fait, je n'ai pas la moindre excuse pour me justifier. Je suis juste trop possessif avec toi. » Je ris nerveusement, sachant que je suis un cas désespéré. Il n'y aura sûrement jamais rien pour m'empêcher de montrer les crocs dès qu'un homme s'approche de Joanne de trop près. « Je t'aime... » je murmure en plongeant mon regard dans le sien, caressant tendrement l'une de ses joues. Mais la belle prend cette main et la glisse jusqu'à son ventre, la passant sous son pull afin de déposer ma paume à même sa peau. Il est juste là. Je me le répète sans cesse. Je ne pourrais jamais oublier cette première fois où nous avons pu entendre son coeur battre. « Je ne t'avais jamais vue aussi heureuse qu'à ce moment là. » Toutes ces larmes de joie qui inondaient ses joues. Le regard qu'elle posait sur moi, sur les images de notre bébé, sa manière de dire je t'aime. Je caresse son bas-ventre du bout du pouce, profitant du contact de sa peau si douce. « Je suis tellement fier d'avoir pu te donner ça, un enfant… De pouvoir vraiment te rendre heureuse. » Parce qu'elle ne l'aurait jamais été sans ça. Quelque chose aurait toujours manqué à sa vie. Elle n'aurait jamais été complète, aussi comblée, qu'importe ce que je pouvais faire pour elle. C'est son besoin vital, d'avoir un enfant à aimer. « Ca semble assez irréel quand on se souvient que nous étions sur la même plage pour nous séparer il y a quelques mois de ça… » dis-je en regardant l'étendue de sable, ne sachant plus trop si nous étions ici ou un peu plus loin. Mais c'était à cet endroit, sur ce bout de terre. Rien ne nous destinait à devenir parents. Ou peut-être que, au contraire, tout nous y destinait à ce moment là. Tout ce mettait en place dans ce but. Je glisse ma main jusqu'au dos de Joanne pour l'approcher de moi et la serrer légèrement. Elle observe les chiens par dessus son épaule, jouant avec leurs bâtons. « Jaloux, tu crois ? » C'est probable. Une nouvelle chose qui gigote va rendre leurs maîtres moins disponibles, plus fatigués, et les empêchera de dormir en braillant la nuit. « Milo, peut-être, il aime tant jouer. Il ne comprendra pas pourquoi le nouveau venu n'est pas un compagnon de jeu. » Il devra attendre avant de pouvoir partager toute son énergie avec le petit. Le temps que celui-ci se dresse également sur ses quatre pattes. « Mais je pense que Ben voudra toujours garder un œil sur le bébé. Il sera le premier à nous aboyer dessus s'il pleure. » Histoire de nous rappeler quels ignobles parents nous sommes, de laisser son petit protégé hurler ses complaintes à travers toute la maison. Nous faisant culpabiliser sans aucune gêne. Je dépose un baiser sur le front de Joanne et la lâche afin de reprendre notre balade. Je prends néanmoins sa main dans la mienne, croisant nos doigts. Au bout de quelques mètres passés dans le silence, marchant juste à l'endroit où les vagues viennent mourir et frôler nos pieds, une pensée me traverse l'esprit et, rapidement, me travaille énormément. « J'ai… J'ai cet agent, une jeune femme dénommée Nyx, qui est venue me voir à la radio. » j'avoue à ma fiancée, puisque je ne lui avais pas parlé de cette visite surprise jusqu'à présent. « Elle m'a dit qu'elle a vu une de mes toiles chez Jon. Je lui avais dit de ne pas la mettre autant à la vue de tous, mais je crois qu'il s'en fiche bien. Donc elle l'a vu, et elle a beaucoup aimé. » Ca l'a transportée, avait-elle dit. Je ne sais pas pourquoi. Je ne comprends jamais pourquoi. Ce n'est pas la première fois qu'on me complimente, ni que l'on me propose d'exposer. Et cela m'échappe toujours autant. « Elle représente déjà Jon, et elle voudrait s'occuper de moi. » Je n'ai toujours pas tranché la question. Jusqu'à présent, je n'avais jamais hésité. Mes refus étaient fermes et définitifs. Mais cette fois, je ne sais pas quoi penser. « Tu te souviens quand je t'avais dit que, parfois, je me verrais bien tout lâcher pour juste peindre ? » Une sorte de rêve que je lui avais avoué en me sentant ridicule ; elle m'avait répondu que je devais m'autoriser à rêver un peu plus, que cet idéal n'a rien d'idiot. « Entre la visite de Nyx et ta grossesse… Et si c'était le moment ? » je demande, perdu. Cela me permettrait d'être là pour Joanne, pendant sa grossesse, puis une fois le bébé arrivé. Je serais disponible, continuant de faire quelque chose que j'aime. J'ai appris à ne pas croire au hasard. Joanne n'a pas été mise sur ma route au moment où j'en avais le plus besoin par hasard. La visite de Nyx quelques jours avant que la jeune femme m'annonce sa grossesse, non plus.