Les réserves s'effacent lamentablement, les filtres se fissurent à mesure de mon épiderme qui effleure tels deux aimants jouant du froid et du chaud celui d'Abel. Mes mains se veulent aussi voraces que sauvages lorsqu'elles s'autorisent enfin à arpenter sa chaire et répondre à l'attraction inexorable. Mes doigts retracent attentivement certains de ses tatouages puis saisissent son cou avant de se nouer à son collier. Mes pupilles ambitionnent de le brûler à chaque regard, dardant une arrogance insatiable relevant d'un jeu dangereux auquel je m'autorise de plus en plus à m'adonner et que je désire absolument remporter. « Tu te donnes beaucoup d'importance, Bel, » je fais, quand bien même j'étais irrémédiablement touché qu'il laisse entendre que j'ai eu un impact sentimental ou chimique sur lui. « Je frissonne pas, » j'annonce, impérieux, un sourire éloquent naissant néanmoins à la commissure de mes lippes. Je me retiens de lui glisser un "Pas encore" à l'oreille lorsque mes dents glissent vigoureusement dans son cou et que je m'emploie à chérir sa peau tendue du bout de ma langue puis de mes lèvres. Bestial, mon objectif est de laisser un souvenir de notre rencontre à Abel, de le violacer de mes armes.
Je laisse la dernière question du danseur en suspend, prenant sans cérémonie aucune possession de ses lèvres. Je joue le tendre et le violent, alternant entre ma langue et mes dents. Son parfum m'envahit et fait tonitruer mon coeur tandis qu'une impatience dévorante consume mon organisme et fait bouillir le sang dans mes veines. Je me délecte de la chaleur de sa bouche contre la mienne, me faisant tout juste la réflexion que je m'y plairais à m'y éterniser avant que je me l'interdise brusquement, détachant brutalement le pantalon du garçon pour le dénuder entièrement.
Est-ce que le ton qu’emploie Kai pour repousser chacune de mes paroles ne me conforte que davantage dans ma position ? Assurément. Ces mots sont aux antipodes de ses mains qui parcourent mon corps presque voracement alors que ses yeux clairs me fixent comme s’ils espéraient m’immoler sur place. Cette façon dont il avait de souffler tantôt le chaud, tantôt le froid alors que je sentais la pression de ses dents sur ma peau avait pourtant de quoi me consumer sur place. Je mentirais sans doute si je disais que je n’avais pas imaginé pareils moments, lorsque mon regard céruléen avait décidé de s’aventurer sur les contours de sa silhouette que je devinais sans mal sous ses vêtements ; laissant mon visage exprimer une attitude prédatrice à son égard qui se dérobait bien vite pour reprendre un visage plus calme alors que l’éclat de mes yeux témoignait encore de mon féroce appétit à son égard. Alors il allait de soi que lorsque je sentais de nouveau ses lèvres s’écraser sur les miennes, voraces de sentir sans doute le contact de ma propre langue qui glissait entre les siennes pour venir livrer bataille, j’en ressentais une certaine fierté, une certaine victoire de savoir que je pouvais le faire fondre en dépit qu’il me repoussait de toute son ardeur pour s’approcher encore de moi. « Tu prônes l’auto-persuasion ? » Un commentaire plutôt qu’une question face à ses mots, alors que mes doigts avaient glissé le long du creux de ses reins alors que je le maintenais contre moi pour savourer davantage son corps vibrant contre le mien.
La tension croît périlleusement, en confrontation ultime avec Abel. Je le toise sans vergogne tandis que la distance qui nous sépare est promptement annihilée. Mon coeur tambourine du désir d'avoir le contrôle sur lui, même s'il ne s'agit que durant quelques minutes, dans un dessein vil de vengeance mêlé acerbement aux regrets d'un passé où je l'ai convoité à distance. Les répliques s'écorchent entre nous et je m'applique à lever les yeux au Ciel en retour à une énième provocation arrogante de la part du danseur. Ses doigts s'immiscent sournoisement dans mon dos, mon souffle se coupe lâchement, bien malgré moi. Je me mords discrètement l'intérieur de la joue, tel une punition auto-infligée, avant de communiquer mon objectif charnel pour ces retrouvailles aussi inopinées que surprenantes.
Sa jambe s'impose néanmoins, sonnant une pause ordonnée, et ses doigts étreignent mon cou pour me forcer à revenir à sa hauteur. Mon dos se heurte contre la paroi métallique de l'engin, les lèvres de mon interlocuteur prennent possession des miennes derechef. Ma main retrouve pernicieusement son entrejambe érigée pour la choyer de caresses, jusqu'à ce que d'un mouvement brusque, je me retrouve dos à Abel. Sa bouche descend sournoisement le long de mon échine, y fait naître une armée frénétique de frissons. Ma respiration se bloque quand la chaleur ardente du corps d'Abel remplace le rugueux de mon pantalon qu'il m'ôte avec presse. Mes muscles se contractent dès lors qu'ils s'approchent de mon fessier et j'abats fermement mes paupières pour reprendre contenance tandis que les images de mes précédentes agressions accaparent progressivement mon esprit. C'est totalement contre-productif de se laisser dominer par les traumatismes du passé lorsque j'ai tout mis en application pour reprendre possession de mon corps, de mes envies, de mes désirs. Je milite pour m'autoriser la félicité que pourrait générer les gestes habiles d'Abel ; cependant, lorsque sa main vient se refermer son mon pénis, je finis par faire volte-face, me dégageant de son emprise, l'instinct m'ayant fait réagir assez violemment, comme s'il venait de me brûler. Je remonte vivement mon pantalon avant d'annoncer, livide : « Je peux pas. » Un éclat de honte transperce mon regard et je rectifie, comme si soudainement un rendez-vous important justifiait de laisser en plan de la sorte Abel : « Je dois partir. » Sans réclamer mon reste, je tourne les talons, quittant précipitamment les lieux, le coeur battant, la respiration saccadée, le corps tremblant.
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