| (#)Lun 7 Aoû 2023 - 12:13 | |
| « Tu n’as pas à t’excuser, pas avec moi. Je comprends » Ils se comprenaient depuis le début sans le savoir. Ça aurait changé tellement de choses s’ils ne s’étaient pas nourris de mensonges pour les apparences. Ils devaient être plus que ça, Archie et Madison. Ils se sont contentés d’être ce qu’on attendait d’eux et d’assumer qu’ils étaient les seuls à se sentir seul. Une part d’Archie veut assumer la faute car il aurait dû être celui qui se jette dans la gueule du lion le premier mais sa sœur avait été plus forte que lui. La plus silencieuse crie toujours le plus fort. Il est chanceux de l’avoir. « Je ne fais que ressortir le meilleur en toi. Et te remettre à ta place de temps en temps. » Il abdique en hochant de la tête. Elle peut le prendre, ce mérite. Elle est bien celle qui a pris le moins de mauvaises décisions dans la fratrie. Même adolescente, elle ne protestait pas contre les règlements alors qu’Archie et Saddie occupaient tout leur temps à frôler les limites et à tirer le poil de la bête jusqu’à ce qu’elle morde. « Je ne serais absolument rien sans toi. » Il se confie d’une voix amusée et fluette, préférant faire dans l’exagération parce que c’est difficile pour lui d’être entièrement vrai. Il doit toujours ajouter trop de couches de glaçage sur le gâteau parce qu’il craint de découvrir la vraie saveur de la pâte. Aussi, en tant que garçon, on lui a appris à ravaler ses émotions ou à n’en effleurer que la surface. Ce n’est pas son rôle, de parler avec son cœur.
C’était impossible d’aborder ce sujet sans que Dieu ne se joigne à la discussion. Il est le centre de leur éducation, de leur croyance, se sont forgés autour de l’éventualité selon laquelle cet être tout puissant aura le choix de les récompenser ou de les punir quand le temps viendra. Le cerveau d’Archie a absorbé toute l’information et il ne l’avait jamais remise en question avant de devenir assez mature pour penser pour lui-même. Il croit encore en Dieu, oui, mais plus en ses jugements. « Je n’arrive pas à imaginer Lola aux côtés d’un Dieu qui ne nous aimerait pas. J’ai l’impression que c’est l’interprétation des humains le problème, pas Dieu. Mais… Je ne sais pas… » Il acquiesce. Ses réflexions vont dans le même sens. Il ne trouve pas mieux les mots qu’elle. Ce sujet est abstrait et basé sur une hypothèse. S’il a la certitude que le monde a été créé par un Dieu, il ne sait pas à quel point ce dernier possède une emprise sur les êtres humains. Comme Charles n’aura jamais l’emprise sur ses trois enfants qui se métamorphosent en quelque chose qui ne lui plairait pas. Ses yeux sont absents la majorité du temps, ils ne peuvent pas superviser leurs décisions comme avant. Alors les enfants se libèrent, tâtent de nouveaux territoire, et si Archie s’en était empêché pendant plus de dix ans, aujourd’hui il veut se laisser une chance d’être heureux. Ce n’est pas sa fortune qui lui a apporté le bonheur tant espéré. Il doit essayer quelque chose d’autre. Aussi, il espère que Madison s’y retrouve plus facilement dans cette sphère-là et qu’elle n’est pas aussi malheureuse que lui. « Les humains ont les pires défauts. » Il s’inclut dans cette affirmation. Il s’est longtemps cru roi du monde mais ce temps est révolu. Il a commis autant de fautes que ceux qu’il pointait du doigt, et ça ne lui a apporté que des malheurs de se prendre pour un supérieur. Ceci dit, il ne changera pas en un claquement de doigt. Le naturel revient toujours au galop, et le naturel d’Archie, il est un cheval de compétition. « Je crois que c’est lui qui a tort. Mais la seule chose que je sais faire, c’est être leur petite fille parfaite. Et je n’arrive pas à réconcilier ces deux choses-là. » Il glousse tristement en la couvrant d’un regard compréhensif. « Je n’ai jamais eu peur d’imposer mon avis et pourtant je n’arrive pas à contredire papa. Ne sois pas trop sévère avec toi. Tu ne veux pas le perdre parce que, malgré ce qu’il dit, tu l’aimes toujours. » L’amour est inconditionnel. Il les a élevés pour réussir, a été un bon père autrement. « Ce sont nos parents et même si nous n’avons plus douze ans, nous voulons qu’ils soient fiers de nous. » Alors soit, ils seront fiers de la façade qu’Archie et Madison ont érigé.
« Tu… Quand tu parlais d’arrêter de résister… Tu, tu as quelqu’un ? Je veux dire, vraiment quelqu’un, pas quelqu’un que tu paies » Son visage se resserre. Il détourne encore les yeux. Non, il n’est pas prêt. Mais la précision de la jeune femme lui arrache un petit rire. « Je n’ai jamais eu besoin de me payer des prostituées, que racontes-tu-là ! » Il s’offusque faussement, la bouche en forme de O. Puis il voit au regard de Madison qu’il ne pourra pas s’en sortir avec une simple boutade. Elle lui a posé une question. Si la réponse ne plaît pas à Archie, il peut la maquiller un peu et n’en offrir que quelques miettes. « Tu es bien curieuse. » Ses lèvres pincées renferment un sourire communicateur. Bien sûr qu’il pense à Carmine, peu importe ce qu’il y a entre eux. Ce n’est pas le grand amour, mais ce n’est pas rien non plus. C’est une aventure qui le sort de sa zone de confort, c’est tout. Mais c’est énorme, aussi. « J’ai peut-être quelqu’un, oui, mais ça ne te concerne pas, petite sou… » Il plaque sa main sur sa bouche. « Je devrai rapidement te trouver un nouveau surnom pour oublier le premier. » Cette maladresse lui aura permis de changer de sujet. « Allez, sèche tes joues. On va aller saluer les autres, et je vous reconduis chez vous, Saddie et toi, d’accord ? »
@Madison Kwanteen |
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