Vice et Versa 2

   @Jackson Mills   ft. Marley Lynch

2011.

Le soleil n'était pas encore levé lorsque Marley passa les portes de son appartement en tenue de sport. Ses écouteurs vissés  dans les oreilles, la jeune femme était partie faire son footing quotidien. Quand bien même elle était en repos ce jour-là, la brune ne dérogeait pas à son entraînement quotidien. La ville s'éveillait en même temps que ses foulées s'allongeaient. L'air pur des chemins de vigne dans lesquels elle courait, les rayons du soleil qui se levait au loin, la sensation des cailloux qui roulaient sous ses pieds, rien de tel pour la mettre dans de bonnes conditions. C'était tous les jours la même routine. L'agent se restreignait à suivre scrupuleusement son planning d'entraînement. Il n'était pas question qu'elle se ramollisse, qu'elle se relâche. Elle avait besoin d'être dans les meilleures conditions physiques possibles. Désirant aller toujours plus loin, se dépasser, grimper les échelons comme on avale les kilomètres qui nous séparent de notre destination finale, Lynch mettait tout en œuvre pour être la meilleure.

Sa course fut comme toutes les autres : paisible et efficace. Pourtant quelque chose était différent ce matin-là. La date. La lieutenant avait beau essayer de ne pas y penser, elle n'y parvenait pas. Quelques jours plus tôt, alors qu'elle célébrait la future union de l'une de ses amies les plus proches, elle avait fait une rencontre bien moins anodine qu'elle ne l'avait d'abord crue. Lui. Celui qu'elle n'arrivait pas à se sortir de l'esprit malgré les quantités astronomiques d'alcool qu'elle avait bues ce soir-là. Elle ignorait tout de lui : son nom, son prénom, son âge. Elle savait juste qu'il était strip-teaser. Lorsqu'il l'avait plantée dans les loges du bar, sa robe à moitié remontée et sa culotte humide des pensées scabreuses qu'elle avait envers lui, la jeune femme avait eu l'impression de recevoir un seau d'eau glacée sur le coin du nez. Elle n'avait rien dit, bien trop éberluée par ce qui se jouait sous son nez. Piquée dans son orgueil, vexée dans sa chair, elle l'avait laissé partir sans montrer la moindre émotion. Le reste de la soirée avait été plus morose que prévu. Elle avait désespérément essayé de se sortir de la tête le visage et le corps de cet homme qui l'avait hypnotisé. Son refus et le fait qu'il l'ait repoussée de la sorte l'avait crispée bien plus que cela n'aurait dû. Elle n'était pas restée bien longtemps faire la fête après son départ. Bien trop obnubilée par ce qui aurait pu être mais n'avait pas été. Bredouille, elle était rentrée et avait cherché un sommeil qui avait eu bien du mal à la trouver.

Les jours qui avaient suivi avaient tous été les mêmes. Quoi qu'elle fasse, elle voyait sa silhouette se dessiner. Ca l'avait agacée, ça l'avait contrariée, ça l'avait perturbée. Personne n'avait jamais réussi à la mettre dans un tel état. Etait-ce parce qu'il lui avait résisté ou était-ce autre chose ? Marley se posait encore la question alors qu'elle se trouvait sous sa douche. Lorsqu'elle en sortit, sa décision était prise : Elle se rendrait au point de rendez-vous donné. Elle avait d'abord pensé ne pas y aller mais quelque chose l'empêchait d'agir ainsi. La curiosité peut-être, à moins que ce soit l'attirance indéniable qu'elle ressentait pour cet inconnu. Elle enfila un jean et un tee-shirt, sans oublier de glisser sa plaque dans sa poche arrière ainsi que son biper. Elle était en congé mais à tout moment on pouvait l'appeler à la rescousse, pas question de louper le coche pour un mec qui semblait se jouer d'elle.

Lorsqu'elle arriva au stade, la flic fronça les sourcils devant le monde qui s'y trouvait. Que venait-elle foutre ici ? Elle se glissa dans les gradins au deuxième rang, au plus près de la piste sans vraiment savoir ce à quoi elle allait assister. Captant des conversations ça et là, elle comprit bien vite l'enjeu. L'inconnu était-il un compétiteur ? Visait-il une place dans l'équipe nationale ? Elle eut bien vite sa réponse lorsqu'elle le vit sautiller sur le côté de la piste. A peine avait-elle remarqué sa stature que son cœur s'était emballé. Depuis quand était-elle devenue si mièvre ? Alors qu'il n'était qu'à quelques mètres, elle ouvrit la bouche pour l'appeler mais se ravisa. Pas question de le déstabiliser à cet instant précis. Elle aurait bien l'occasion de le faire plus tard. L'homme prit enfin place à côté de ses concurrents. Marley ne loupa rien du spectacle, ni son processus d'avant course, ni ses muscles qui se tendaient sur les starting block. Bientôt le coup de feu retentit et ce fut avec une surprise non dissimulée qu'elle le vit déguerpir. Ses foulées étaient amples et aisées, son corps semblait embrasser la piste tandis qu'il paraissait plus léger qu'une plume. La puissance qui se dégageait de son corps en action finit d'achever la jeune femme qui se leva comme tous les autres à la fin de la course. Elle se mit à applaudir et à siffler pour féliciter les sprinters. Lorsqu'il passa non loin d'elle, elle cria : « Hé Barrett ! ». Un sourire en coin glissa sur son visage lorsqu'elle capta son regard, et amusée elle ajouta : « T'en as des talents cachés. ». Elle ne savait pas s'il parviendrait à remettre son visage ou non. L'espace de quelques secondes, elle se demanda combien elles étaient dans les gradins à être venues parce qu'il leur avait dit de le faire. Ses sourcils se froncèrent à cette pensée déplaisante. Combien d'autres pauvres filles étaient là parce qu'il les avait allumées lors d'une danse un peu trop spéciale ?

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   @Jackson Mills   ft. Marley Lynch

2011.

Si Marley ne s'était jamais réellement intéressée au sport, elle comprit bien vite que le jeune homme venait de réaliser un petit exploit. Arrivé premier avec un chrono à en faire pâlir plus d'un, le jeune homme avait le poing levé. La foule était déchaînée et la brune comprit qu'il avait réussi. Il venait de se sélectionner. Impressionnée par les capacités sportives du garçon, elle sourit de plus belle devant l'air surpris qu'il afficha lorsqu'il la vit. A cet instant la métisse comprit : jamais il n'avait pensé qu'elle viendrait. Sans doute avait-il pensé qu'elle aurait oublié, après tout, il l'avait laissée pantoise et dans tous ses états parce qu'il pensait qu'elle avait trop bu. Sur l'instant elle n'avait rien dit, ne l'avait pas contredit. Elle aurait pu pourtant. Lui dire que ce n'était pas ces quelques verres qui allaient lui faire tourner la tête, lui faire comprendre qu'elle savait exactement à quel jeu elle jouait. Elle n'avait rien fait pourtant, le laissant s'envoler, gardant simplement les images de ce corps nu gravé dans l'esprit et la frustration ancrée dans sa chair. Il finit par s'approcher et du tac au tac lui répondit : « Presque autant que toi ... ». Un sourcil surpris se dressa sur le visage de la jeune femme. De quels talents parlait-il ? Elle ne lui avait encore rien montré. Son regard se perdit sur la poitrine du garçon qui se soulevait. Elle ne put s'empêcher de penser qu'il était beau, même dans cette tenue, même couvert de sueur. Il y avait quelque chose de différent sur son visage. Il avait l'air heureux, détendu, dans son élément. Lynch prenait conscience que ce Barrett qu'elle avait rencontré n'était définitivement qu'un personnage, qu'une mise en scène. L'homme qui lui faisait face avait l'air d'être une autre personne et elle devait admettre que ce n'était pas pour lui déplaire.

Après l'assurance de ses mots arriva l'anxiété. Elle le vit changer d'attitude l'espace de quelques secondes lorsqu'il leva les yeux en direction du haut des gradins. Quelque chose le mettait mal à l'aise. La jeune femme prit sur elle pour ne pas scruter l'horizon alors que ses instincts de flic la poussaient à balayer la foule du regard. Finalement il passa par-dessus la rambarde et une fois à ses côtés lui demanda : « Tu bois du café ? ». Un fin sourire glissa sur les lèvres de la demoiselle tandis qu'elle hochait la tête tout en répondant : « Seulement s'il y a du whisky dedans. » Un clin d'oeil accompagna ses propos, preuve qu'elle plaisantait. La proximité soudaine de leur corps provoqua une accélération de son rythme cardiaque. Elle ne montra pas son trouble même si cette réaction physique la déstabilisait grandement. Que ce soit ici en tenue de sport, ou dans un bar à moitié nu, l'homme parvenait toujours à la bousculer et à remuer ses entrailles. Elle finit par descendre les marches à sa suite et attendit qu'il prenne ses affaires de sport. Pas de douche pour le champion ? Tant pis, ou tant mieux. Elle ne savait plus. L'odeur musquée qui se dégageait de son corps n'avait rien de déplaisant, loin de là. Alors qu'ils sortaient du stade, elle lui demanda taquine : « C'est qui celle que tu cherchais du regard dans la foule ? ». Elle l'avait bien vu détourner le regard et curieuse comme elle l'était, elle ne pouvait garder le silence plus longtemps. Alors qu'ils marchaient côte à côte elle ajouta : « Tu sais, faut pas donner des rendez-vous à des filles si tu veux pas qu'elles se pointent après. » Son regard se planta dans celui du coureur, cherchant à intercepter la moindre réaction, le moindre tremblement, la moindre faille. Cet homme était pour le moment un véritable mystère et dieu savait à quel point la lieutenant aimait les résoudre.

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   @Jackson Mills   ft. Marley Lynch

2011.

Leur tête à tête était léger, naturel, comme s'ils se connaissaient depuis longtemps. Elle avait l'impression de se balader avec un ami, un proche. Comment était-ce possible alors qu'elle ne connaissait même pas son véritable prénom ? Elle, si suspicieuse, se surprenait à être détendue. Habituée à être constamment sur ses gardes, Marley prenait plaisir à marcher aux côtés du sportif. Il n'y avait pas de gêne pour le moment alors que leur première rencontre avait définitivement laissé des traces : Lui, le sexe à l'air tendu, elle, la robe remontée, les propos scabreux hors de ses lèvres. Ils auraient pu être mal à l'aise pourtant ce n'était pas le cas. La flic préférait ne pas se poser de questions – elle qui passait son temps à le faire – mais plutôt profiter de la compagnie du sprinter.

Lorsqu'elle lui demanda qui était celle qu'il avait cherchée du regard, elle le vit l'observer du coin de l'oeil mais ne rien répondre. Piquée à vif, elle se mordit la lèvre. Elle ne s'était donc pas trompée, il y avait bien quelqu'un dans les gradins qui avait attiré son attention et ce n'était pas elle. Orgueilleuse la brune prit sur elle pour ne pas le planter là. Elle n'avait eu d'yeux que pour lui, constater que la réciproque n'avait pas été vraie la contrariait sans qu'elle ne comprenne vraiment pourquoi. Elle oublia bien vite cette déconvenue lorsqu'il la corrigea : « À des filles saoules. » Un sourire amusé glissa sur ses lèvres et elle ne put s'empêcher de répliquer : « Certes, mais pas assez saoule pour ne pas me souvenir de cette invitation... ». Elle disait vrai, elle avait besoin qu'il comprenne que même si elle avait bu, elle était parfaitement conscience de ce qu'elle avait fait ou dit. Elle n'avait rien oublié. Elle s'arrêta soudainement lorsqu'il poursuivit : « J'veux pas finir en #METOO. » Les sourcils froncés, Marley comprenait parfaitement où il voulait en venir. Aucun homme ne voulait être associé à ce mouvement et surtout pas en tant que prédateur. Que le jeune homme redoute ce fait alors qu'il risquait d'être sur le devant de la scène en tant que futur champion Australien était parfaitement logique. Devant l'honnêteté du garçon, Marley en fit de même : « Parce que tu crois que j'ai envie que tout le monde sache que le lieutenant Lynch s'est envoyé en l'air avec un strip-teaser ? Aussi attirant soit-il ? ». La brune avait toujours été directe et cash, si cela pouvait surprendre voir décontenancer, la jeune femme n'avait jamais changé sa façon de faire. A cet instant deux informations étaient données: Il lui plaisait. Jamais elle ne le mettrait dans une position qui pourrait lui porter préjudice.

Elle finit par passer son bras sous celui du jeune homme et l'entraîna à sa suite : « Allez viens, il faut nourrir la bête. ». Un petit sourire carnassier glissa sur ses lèvres. Parlait-elle de l'athlète ou d'elle-même ? Après tout, elle n'avait pas caché l'attirance qu'elle ressentait pour lui. Arrivés devant le Starbuck, la métisse poussa les portes et entra. Elle se dirigea vers le comptoir et laissa passer le garçon devant elle. Enfin elle allait connaître son prénom...

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   @Jackson Mills   ft. Marley Lynch

2011.

Sa franchise n'effraya pas le jeune homme qui au contraire se mit à rire face à sa remarque. Marley ne savait pas ce qu'il pensait réellement. Riait-il parce qu'il se rendait compte qu'en effet la position n'était pas plus agréable pour elle que pour lui ? Ou riait-il parce qu'il pensait qu'elle plaisantait vis-à-vis de son statut de flic ? Elle l'ignorait mais se dit qu'elle aurait bien le temps d'obtenir la réponse à son interrogation. Lorsqu'elle passa son bras sous le sien, il n'opposa aucune résistance. La brune sentit juste le muscle de son biceps se tendre. C'était la première fois qu'elle le touchait sans chercher à l'allumer. Il n'y avait pas d'alcool dans son organisme, pas de musique pour l'hébéter, pas d'ambiance festive, pas d'homme à moitié nu et pourtant le corps de Lynch réagit à nouveau. Des frissons parcoururent sa colonne vertébrale alors qu'ils continuaient d'avancer. C'était la première fois que le désir qu'elle éprouvait pour un jeune homme ne s'envolait pas une fois la nuit passée. Elle qui ne s'attachait pas et qui avait tendance à passer entre les bras des hommes simplement pour s'envoyer en l'air se retrouvait aujourd'hui perturbée par l'inconnu qui provoquait en elle une foule de sensations différentes.

Lorsqu'il répéta son grade et son nom en ajoutant : « T'essayes vraiment de me faire croire que t'es flic ? » Marley lui offrit un sourire en coin mystérieux. Ainsi il ne la croyait pas. Pouvait-elle lui en tenir rigueur ? Si au début de sa carrière cela l'énervait et pouvait la faire entrer dans une colère noire, elle avait avec le temps accepté que son physique ne collait pas avec ses ambitions. Ce qu'elle avait pris pour un défaut se révélait être l'une de ses plus grandes qualités. Un avantage indéniable. Qui se méfierait d'une petite brune un peu trop énergique ? Nombreux étaient les suspects qu'elle avait interpellés parce qu'ils ne se méfiaient pas d'elle. La surprise et le dépit qui se lisaient dans leur regard lorsqu'ils prenaient conscience de leur méprise procuraient toujours une vague de jouissance chez la métisse.

Elle le laissa commander ses muffins et se mordit la lèvre lorsqu'elle constata qu'il ne prenait rien à boire. C'était raté pour obtenir son prénom. Tant pis, elle l'aurait plus tard. « Qu'est-ce que tu prends ? ». Elle observa quelques secondes les produits proposés et répondit : « Un double Sumatra. » Elle avait besoin de quelque chose de fort qui la maintiendrait en éveil. Même si elle était de repos, elle devait se tenir prête. Alors que la vendeuse allait lui demander son prénom, le sprinter ajouta avec provocation : « Tu m'prends pour un novice, hein ... ». L'estomac de la brune se contracta, mélange de plaisir et de frustration. Serait-ce toujours ainsi en sa compagnie. Le sourire amusé qui glissa sur ses lèvres indiquait qu'elle ne baissait pas les bras. « Marley » dit-elle avec simplicité à l'attention de la vendeuse.

La commande fut préparée rapidement et lorsque Marley découvrit les cinq muffins et l'explication liée, elle se mit à rire avec le garçon. « J'espère que t'as faim ... ». « Toujours » souffla-t-elle, laissant volontairement le double sens naître entre ses lèvres. Ils prirent leur commande et allèrent s'installer à une table un peu à l'écart des autres clients. Assise face au coureur, la jeune femme détaillait les traits de son visage sans se cacher plus que de raison. Elle prit son café et les mains entourées autour de son gobelet elle lui dit : « Tu vas enfin me dire comment tu t'appelles ? » Son regard était planté dans le sien. Elle finit par lâcher sa tasse et glissa une main dans la poche de sa veste en jean. « Il y a plusieurs solutions. Soit, tu me donnes ton prénom. Soit je vais regarder sur internet. Ou alors... » à cet instant elle plaça sous le nez du brun son insigne ainsi que son badge de flic avec son nom : « J'enquête. Mais c'est peut-être un peu extrême. » Une nouvelle fois elle laissa ses dents apparaître au grand jour. Deux conséquences étaient désormais possibles : Il prenait peur en réalisant qu'elle était effectivement flic et il s'envolait ou au contraire, le badge qu'elle venait de lui coller sous le nez ne le repoussait pas et au contraire l'intriguait. La jeune femme ne quittait pas du regard celui qui lui faisait face, guettant la moindre de ses réactions. Tout serait passé au crible, il pouvait en être certain. « Ca fait longtemps que tu cours ? » s'intéressa-t-elle néanmoins. Allait-il poursuivre la conversation comme si tout était normal ou allait-il prendre ses jambes à son cou et se servir de ses capacités hors du commun pour disparaître avec rapidité ?

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   @Jackson Mills   ft. Marley Lynch

2011.

Une légère crispation dans la mâchoire du coureur ainsi que des sourcils froncés firent comprendre à Marley qu'il n'était pas franchement ravi de voir ainsi l'insigne plantée sous son nez. Les secondes s'écoulèrent durant lesquels le silence s'épaissit davantage. La brune sentit son estomac se nouer, comme si elle craignait qu'il ne se lève et qu'il quitte la table. Cette hypothèse ne l'enchantait pas, pire, elle lui déplaisait totalement. Elle avait rencontré bien des hommes qui n'avaient pas supporté de la savoir flic, et elle s'en était toujours fichue royalement. Cela ne leur plaisait pas ? Et bien qu'ils se cassent. Elle aimait son métier, elle aimait ce pour quoi elle se battait. Son job, c'était tout ce qui importait pour elle – ainsi que sa famille – elle ne remettrait jamais en question ses choix pour quiconque, et encore moins pour un garçon. Cette fois-ci c'était différent pourtant. Elle sentait que le sprinter évaluait ses options. Il semblait hésité, interdit devant l'insigne. Elle n'aurait su dire pourquoi mais elle n'avait aucune envie de le voir faire demi-tour. Finalement, il accepta de lui donner son nom : « Jax ». Un sourire s'étira sur les lèvres de la brune tandis qu'instinctivement elle se dit qu'il s'appelait sans doute « Jackson ».

« 10 ans ». Dix ans qu'il courrait à en perdre haleine. La brune était curieuse d'en apprendre plus. Pourquoi avait-il choisi ce sport ? Pourquoi ressentait-il ce besoin de courir si vite ? D'où lui venaient son rêve et son ambition olympiques ? Plusieurs questions se bousculaient dans son esprit mais elle n'eut pas le loisir d'en formuler une seule puisque déjà il engloutissait un muffin. Le grognement de plaisir qu'il laissa échapper surprit Marley qui sentit une vague réchauffer son bas ventre. Comment cet homme pouvait-il lui procurer autant de sensations alors qu'il était simplement en train de manger ? Amusée par sa façon de dévorer la nourriture, elle en oublia presque l'insigne qu'elle tenait encore en main mais prit conscience de son geste lorsqu'il lui demanda : « Et 'oi ? » en montrant du bout du nez son badge. Elle finit par le ranger dans sa poche et à la place prit son café qu'elle porta jusqu'à ses lèvres. Elle en but une longue gorgée puis finit par répondre : « Je suis rentrée dans la police à mes 18 ans. » Bien consciente que cela n'aidait en rien le jeune homme, elle consentit à poursuivre : « Ca fait 5 ans. L'année dernière je suis passée lieutenant. » A force de volonté et d'engagement, la jeune femme avait rapidement gravi les échelons. Elle prit un muffin qu'elle glissa entre ses lèvres et moins goulûment que l'athlète elle croqua dedans, son regard toujours planté dans le sien. « J'en avais marre qu'on me contrôle sans arrêt parce que j'étais black. » avoua-t-elle. C'était en effet l'une des raisons qui l'avait poussée à embrasser cette carrière. Fatiguée d'être harcelée simplement parce qu'elle était noire, la jeune femme avait choisi de s'engager pour défendre les siens. Il n'était pas question qu'elle laissa sa communauté souffrir à cause d'une police en partie raciste. Elle avala une nouvelle bouchée de muffin et lui demanda : « Et toi ? Pourquoi tu cours ? ». Elle but une gorgée de café pour s'hydrater et dans un souffle ajouta : « Ne me dis pas que c'est parce que t'en avais marre de te faire courser par des flics... ». Elle le disait avec une pointe d'humour pourtant on pouvait lire dans son regard qu'elle avait pleinement conscience que cette possibilité pouvait être la réalité. Pourrait-elle lui en tenir rigueur si c'était le cas ? Bien sûr que non. Si elle avait par moments souffert d'être une femme noire, elle n'osait imaginer ce qu'il en était pour un homme.

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   @Jackson Mills   ft. Marley Lynch

2011.

Elle nota un changement d'attitude chez le garçon lorsqu'elle lui expliqua brièvement les raisons qui l'avaient poussée à devenir flic. Il arrêta de mâcher, se contentant de lui lancer un regard qu'elle ne parvint malheureusement pas à décrypter. Elle avait l'impression qu'il essayait de lire en elle, à moins que dans ses yeux il lise le reflet de sa propre âme. La brune n'en savait rien mais elle détourna le regard en soufflant un : « C'est ça » lorsqu'il visa le mille : « Donc c'est toi qui contrôle, maintenant ... ». Le regard de la métisse se perdit dans le café qu'elle tenait entre ses doigts fins. Le traumatisme de voir son père plaqué violemment contre le par-choc de sa voiture simplement parce qu'il avait voulu sortir ses papiers d'identité la bouleversait toujours autant. Quel âge avait-elle à l'époque ? 5 ans ? 6 ans ? Elle était petite, trop petite. Le chemin du retour s'était fait dans un silence assourdissant, la petite guettant du coin de l'oeil son père, cherchant une quelconque réaction de sa part. Lorsqu'ils étaient rentrés, ses parents l'avaient installés sur le canapé et lui avaient expliqué ce qu'elle devait faire en présence des policiers. Lynch n'avait pas compris. Pourquoi devait-elle faire attention avec des gens qui existaient pour la protéger ? Quand elle se remémorait cet épisode cela lui retournait l'estomac. Que cela avait dû être difficile pour ses parents d'expliquer une telle chose à leur enfant. Les années avaient passé mais la brune n'avait jamais oublié. Désormais, c'était elle qui faisait respecter la loi, pas d'injustice sous son commandement, pas de délit de faciès à ses côtés.

Consciente qu'elle s'était déconnectée bien trop longtemps de la conversation, la jeune femme reporta son attention sur le beau brun qui lui faisait face. Elle attendit avec curiosité qu'il lui explique son parcours, qu'il lui dise comment il en était arrivé là. Devant l'absence de réponse et désirant détendre l'atmosphère, la jeune femme plaisanta ce qui entraîna un spectacle étonnant. Le grand gaillard qui se trouvait en face d'elle s'étouffa et commença à cracher des miettes. Marley se mordit la lèvre pour ne pas rire et lui laissa bien volontiers sa tasse de café. « Comment tu peux boire ça ? » Elle leva les yeux au ciel et balançant une de ses mains en l'air lui répondit : « Pfff t'y connais vraiment rien... ». Il reprit un autre muffin qu'il prit le temps de déballer. Allait-il finir par lui répondre ? La policière commençait à en douter. Finalement il lui expliqua qu'il courait pour gagner. Elle comprenait l'objectif final mais avait du mal à saisir les raisons qui l'avaient poussé à agir ainsi. Elle lui laissa néanmoins le temps de poursuivre. « Ma mère voulait que j'fasse des études ... » Il marqua une pause et ce fut à son tour d'avoir le regard voilé par la tristesse, à moins qu'il ne s'agisse de nostalgie ? Marley n'aurait su le dire avec certitude. Il semblait perdu dans ses pensées, revenu dans un passé plus ou moins lointain. La jeune femme garda le silence, respectueuse de ce moment d'introspection. Si elle était toujours directe, et avait tendance à bousculer les gens aussi bien physiquement que verbalement, la métisse savait aussi quand elle devait se taire. « ... alors j'ai tenté la bourse. » Elle comprit que s'il courait c'était pour sa mère, pour elle et personne d'autre. Etait-elle encore de ce monde ? Lynch en doutait au vue des réactions du garçon. Elle murmura alors : « C'est la plus belle des raisons. ».

Elle continua à manger son muffin se disant qu'il y avait définitivement quelque chose qui l'attirait chez ce jeune homme. Il n'était plus question d'une simple attirance physique ou sexuelle, elle avait envie d'en savoir plus, toujours plus. Incapable de détacher son regard du sien, elle sourit lorsqu'il lui annonça la date des jeux : « Les JO commencent dans 9 mois. ». Elle hocha la tête et soupira : « Et dire que je vais devoir regarder du sport à la télévision... ». Indirectement elle lui disait qu'elle le regarderais, qu'elle le soutiendrais. Le sous-entendu était à peine voilé. Sans doute était-ce la raison pour laquelle il lui demanda de but en blanc : « T'as un mec ? » Au tour de Marley de s'étouffer avec le café qu'elle venait de laisser glisser le long de sa trachée. La voilà qui se mit à tousser, les yeux écarquillés. Rapidement elle retrouva son souffle. Son regard amusé mais aussi surpris glissa sur celui du jeune homme lorsqu'elle répondit : « Tu crois que je serais là aussi tôt pour boire un café avec toi si j'avais un mec ? ». Elle laissa sa réponse en suspens, croquant dans un nouveau muffin. Néanmoins, soucieuse de ne laisser aucun doute perdurer elle admit : « Non, je suis célibataire. ». Flattée et rassurée de le voir s'intéresser à ce point, Marley comprit à cet instant qu'elle voulait plus avec lui, plus qu'un muffin échangé autour d'une tasse de café, plus qu'un coup tiré vite fait dans un local d'un bar. Elle demanda à son tour : « Dans les gradins, c'était ta copine que tu cherchais du regard ? ». Parce qu'elle n'avait toujours pas oublié ce qu'elle avait vu, parce qu'il n'avait toujours pas répondu à ses interrogations, elle remettait le sujet sur le tapis. Elle avait besoin de savoir. Lentement, elle glissa l'une de ses mains sur celle du garçon qui était posée sur la table et entrelaça ses doigts aux siens. Elle se pencha un peu en avant et dans un murmure le questionna : « Je dois me préparer à voir une petite amie débarquer en furie si je te touche ainsi ? ».  

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   @Jackson Mills   ft. Marley Lynch

2011.

Elle le vit sourire discrètement lorsqu'elle lui annonça qu'elle était célibataire, tout comme elle le vit hausser un sourcil lorsqu'elle reparla des gradins. La brune tiqua. Il y avait véritablement quelqu'un d'important quelques rangées derrière elle et cela commençait à l'intriguer plus que de raison. L'attitude du jeune homme changea du tout au tout lorsqu'elle glissa sa main sur la sienne. Lorsqu'elle sentit la pression des doigts de Jackson sur les siens, son corps se raidit. Ce n'était pas la crainte ou l'angoisse qui l'étreignaient mais une forme d'excitation qu'elle n'avait pas connu depuis bien longtemps. Son corps fut parcouru de frissons lorsqu'elle le vit approcher son visage du sien. Il était si proche d'elle qu'il lui suffisait de tendre les lèvres pour pouvoir goûter à la pulpe de sa bouche. Perdu dans la profondeur de son regard, la métisse n'entendait que son cœur qui battait violemment dans ses oreilles. Sa bouche commençait à se dessécher tandis qu'elle sentait qu'elle perdait peu à peu pied. Heureusement qu'elle était formée pour cacher ce qu'elle ressentait. Son visage impassible ne la trahissait pas, sans doute que sa poitrine qui se soulevait beaucoup trop rapidement le faisait cependant. « Ma sœur. ». Elle ferma les yeux quelques instants, appréciant cette révélation qui venait de lui retirer un poids de la poitrine. Elle souleva à nouveau ses paupières et ses rétines s'accrochèrent une nouvelle fois à celles du coureur. Inconsciemment, le pouce de Marley se mit à caresser le dessus de la main de Jackson, le contact de leur peau l'électrisait. Ses doigts enlacés aux siens semblaient avoir trouvé la place qui devait être la leur.

« C'est mon coach que tu vas voir débarquer en furie. » Elle sourit de plus belle lorsqu'il poursuivit en l'imitant. Elle se mordit doucement la lèvre et chuchota : « Je suis prête à prendre le risque. Même pas peur. ». Oui elle était prête à le prendre. Elle ne savait pas pourquoi mais elle sentait que ce garçon en valait la peine. Il avait suffi qu'elle le voit seulement deux fois pour comprendre que pour lui elle était prête à tenter beaucoup de choses. C'était dangereux pour elle qui n'avait pas pour habitude de s'accrocher aux gens, pour elle qui ne faisait confiance à personne. En sa compagnie elle se sentait fébrile, instable, comme si elle marchait sur une corde raide. Jusqu'où serait-elle prête à aller ? Etait-elle capable de se brûler les ailes pour cet homme qu'elle ne connaissait presque pas ? « On parie ? » Nouveau froncement de sourcils du côté de la brune qui ne saisit pas où il veut en venir. Elle remarqua simplement son air joueur, provocateur. Son cœur loupa un battement tandis que ses doigts s'accrochèrent un peu plus à ceux du sprinter. Suspendue à ses lèvres, elle attendait la suite. « Si je gagne l'or, tu ... ». Un sourire malicieux para désormais le visage de la demoiselle. Il avait de l'ambition, elle aimait ça. Mais l'or était-il réellement accessible ? Et si la marche était trop haute pour lui ? Ce pari, qui n'était à première vue qu'un simple jeu avait beaucoup plus d'enjeux qu'il ne le laissait paraître. Elle prit le temps de la réflexion, il fallait qu'elle donne de l'attrait à ce défi sans pour autant se tirer une balle dans le pied s'il n'y parvenait pas. Elle chuchota alors : « Si tu gagnes l'or, je... t'offrirai la même danse que tu as offerte à mon amie. » Sourire carnassier en coin, pied qui frôla la cheville du garçon, Marley était pleine de surprises. Elle approcha un peu plus son visage, frôlant le nez de Jackson du bout du sien et murmura : « Ma première idée était de t'offrir une nuit en ma compagnie mais... » elle marqua une pause, humant l'odeur du garçon, laissant son souffle chaud naviguer sur son visage et elle acheva : « Je ne suis pas certaine de pouvoir attendre neuf mois. » et ses lèvres qui n'en pouvaient plus d'attendre se posèrent avec délicatesse sur celles du garçon. Si le baiser était d'une tendresse surprenante, à l'intérieur du corps de Marley, la réaction était tout autre : Elle avait l'impression d'être en feu. Sa poitrine risquait à tout moment d'exploser. 

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