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Le soleil se levait à peine à travers la fenêtre de sa chambre d’hôtel quand Ruben avait ouvert les yeux. Son réveil n’était pas programmé avant deux bonnes heures, mais bien sur que son corps avait décidé qu’il était pourtant déjà temps de s’extirper des draps. Pour faire quoi, il n’en avait aucune espèce d’idée, mais il ne savait rester trop longtemps allongé sans rien faire. Il était toujours habitué à connaître la charge de son emploi du temps du jour dès la veille au soir, et ne se levait jamais avec paresse pour commencer une journée pour ne pas prendre du retard dès le réveil. Aujourd’hui, les choses étaient pourtant bien différentes: il n’avait rien de prévu. Disons qu’il comptait profiter du festival, mais c’était la seule chose ancrée dans son planning, et cette tâche ne commencerait pas avant de bonnes heures. Alors, dans un soupire, il était sorti du lit, avait enfilé sa tenue de course et était sorti pendant plus d’une heure pour se défouler. Au moins, il aurait eu l’impression de faire quelque-chose de productif de sa matinée - et cela permettait de passer le temps jusqu’aux festivités.

Il lui avait donné rendez-vous dès le milieu d’après midi, afin qu’ils puissent parcourir les différents endroits où les installations avaient été montées et où les différents artistes se produisant le soir s’entrainaient, s’échauffaient. Le bruit des balances pouvaient déjà s’entendre à plusieurs endroits, et bien sur qu’un sourire s’étirait déjà sur les lèvres de Ben. Ambrose ne savait pas exactement ce qu’il avait manigancé de son côté, simplement qu’il devait le rejoindre à un endroit particulier juste à côté de l’entrée du festival à une heure convenue en avance. Conformément à ses habitudes, ce fut en étant à l’heure que Hartfield se rendit sur place, où il savait d’avance que Rose serait de son côté également parfaitement à l’heure. Passant la sécurité dans le sens inverse de toutes les personnes arrivant, ce fut donc avec un sourire qu’il s’approcha du jeune homme. « C’est ça que j’aime bien chez toi: tu sais respecter tes engagements et ne pas être en retard. » Ou alors, lorsque c’était le cas, c’était uniquement de la faute des autres et donc facilement pardonnable. S’approchant du brun, il lui claqua une bise sur la joue avec de se reculer d’un pas pour sortir de sa poche ce qu’il appelait le Saint-Graal: un bracelet-pass-VIP pour le reste de la soirée. Ruben l’agita un instant sous les yeux d’Ambrose, d’une façon dramatique en rien nécessaire, avant d’attraper sa main pour lui glisser le morceau de plastique au poignée. « Tu fais en sorte de pas le perdre, c’est valable pour touts les zones VIP du festival, et si tu restes avec moi t’as accès en plus aux coulisses. Toutes les coulisses, à n’importe quel moment. Ou quelque-chose comme ça. » C’était là ce que lui avait dit Midas, en tous cas, lorsqu’il l’avait accueilli la veille: il pouvait lui dégoter d’autres bracelets si nécessaire, simplement rester dans le sillage de son équipe pour l’accès aux zones davantage restreintes. « Je me suis dit que c’était le genre de temps dégagé de ton emploi du temps qui te ferait plaisir, et que ce serait d’autant plus amusant que ce soit une surprise. » Ce n’était pas son anniversaire, mais étant donné qu’à un moment de l’histoire Ruben lui avait brisé le coeur, il lui devait au moins ça - quoi que, son frère à lui lui avait refait le portrait à mi-chemin, peut-être que cela contrebalançait déjà les points. Peu importait: il fit un signe de tête à Rose de le suivre à l’intérieur.

Il se pose beaucoup de questions, à commencer par comment ils ont pu en arriver à se trouver un temps libre pour se rendre à ce festival. Ensemble. Après tout ce temps. Aux yeux de l’australien, rien ne fait réellement de sens, mais il s’en serait sûrement voulu toute sa vie s’il ne s’était pas présenté comme convenu, en prétendant que tout est normal. Son sourire l’est lorsqu’il se rapproche de Ruben, intrigué mais confiant. « C’est ça que j’aime bien chez toi: tu sais respecter tes engagements et ne pas être en retard. » Intrigué, confiant, et parfaitement à l’heure. La seule remarque du médecin le fait sourire un peu plus encore. “Certaines choses ne changent pas.” Il est quelqu’un d’ordonné et qui respecte ses engagements. Il a toujours été ainsi et n’a pas à coeur de changer quoi que ce soit, surtout pas alors que sa ponctualité semble lui valoir un baiser contre la joue en guise de salutations. Il lui rend son salut par un simple hochement de tête, en réalité déjà occupé ailleurs lorsque Ruben lui agite un bracelet arborant le sigle VIP. Les sourcils d’Ambrose se froncent, non de colère mais bien d’incompréhension, quand bien même il laisse Ruben le lui passer autour du poignet sans émettre la moindre critique. “Comment t’as pu dégoter ça ?” La musique est une passion pour les deux hommes, il le sait bien, mais il sait aussi et surtout qu’ils n’ont aucune connaissance dans le milieu, ni même aucun poids.

Ruben est trop occupé à donner les indications allant avec le bracelet nouvellement accroché à son poignet pour se soucier du reste, et Ambrose ne prend pas le temps de s’en offenser. « Tu fais en sorte de pas le perdre, c’est valable pour toutes les zones VIP du festival, et si tu restes avec moi t’as accès en plus aux coulisses. Toutes les coulisses, à n’importe quel moment. Ou quelque-chose comme ça. » - “Ou quelque chose comme ça ?” L’histoire est louche à tous les niveaux et Ambrose ne sait pas se décider entre l’amusement ou la volonté de rapidement avoir la réponse à toutes ses (nombreuses) questions. “T’as pris ce bracelet sur un cadavre ou quoi ?” Cette fois-ci, il le jure, ce n’est que de l’humour. Douteux, certes, mais le genre qu’il n’a pas peur d’oser en la seule compagnie de Ruben - le genre qui n’aurait jamais ô grand jamais été prononcé en interview, donc. “Avoue, c’est juste pour t’assurer que je me serve pas de toi juste pour entrer et qu’ensuite je fasse ma vie.” Son sourire s’étire, bien moins amusé cette fois-ci pourtant. Il ne comprend pas le besoin de rester auprès de Ruben pour avoir accès aux coulisses, tout comme il comprend encore moins d’où sort toute cette après-midi. Mais au fond, il aime bien l’idée de passer du temps avec lui, à simplement écouter de la musique et profiter de l’instant. C’est simple, et c’est ce dont ils avaient besoin.

« Je me suis dit que c’était le genre de temps dégagé de ton emploi du temps qui te ferait plaisir, et que ce serait d’autant plus amusant que ce soit une surprise. » Sincèrement touché, il se permet même de faire une pause au milieu de ses incessantes questions. Il replace le bracelet de sa main libre et laisse finalement sa main retomber le long de son corps, mimant ainsi de parfaitement accepter l’idée. “Tu t’es bien dit.” Cela lui fait plaisir. Evidemment que cela lui fait plaisir. Et quand bien même Ambrose ne comprend pas pourquoi il a envie de lui faire plaisir après toutes ces années, il ne cherche pas à avoir le fin mot de l’histoire pour le moment. Quelque chose lui dit qu’aucune réponse qu’il pourrait lui apporter continuerait de le rendre heureux. “T’as au moins regardé la programmation ou ton plan consistait à m’agiter le bracelet sous les yeux ?” Parce que l’un ou l’autre, de toute façon, Ambrose est déjà heureux. Ils peuvent improviser la suite, cela n’a aucune sorte d’importance. Peu importe la façon dont ils occupent réellement la suite de leur journée, elle est déjà parfaite à ses yeux. “Un festival commence toujours avec une bière.” Le reste du plan sera un problème pour plus tard.

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« Certaines choses ne changent pas. » Et c’était justement parce-que certaines choses ne changeaient pas que Ruben savait qu’il pouvait compter sur Ambrose pour apprécier à sa juste valeur le bracelet qu’il était désormais en train de lui agiter devant les yeux, ces derniers surplombés désormais de sourcils froncés. Bien sur que cette réaction de la part du jeune homme lui étira un petit sourire. « Comment t’as pu dégoter ça ? » Ben était déjà occupé à attraper sa main pour lui poser le bracelet au poignet. « Midas Sterling me devait un service. » Il ne donnerait pas plus de détails, bien sur, mais il pouvait au moins transmettre à Ambrose cette partie là de l’histoire - qui était on ne pouvait plus vrai, presque, qui plus était. Ce n’était pas vraiment un service qu’il lui devait, mais disons que Ruben l’avait bien dépanné lors de leur rencontre alors il avait voulu lui rendre la pareille. Midas ne se doutait pas qu’il ferait réellement un heureux, et même deux, avec un tel engagement de sa part, mais bien sur que des étoiles avaient germé dans les yeux du médecin dès qu’il avait mentionné la possibilité d’accéder aux coulisses et aux parties privilégiées du festival. « Ou quelque chose comme ça ? T’as pris ce bracelet sur un cadavre ou quoi ? » En un instant, le regard de Ben se releva pour accrocher celui du brun, avec l’air accroché sur son visage lui demandant silencieusement s’il comptait continuer de se moquer de lui de la sorte longtemps. « Avoue, c’est juste pour t’assurer que je me serve pas de toi juste pour entrer et qu’ensuite je fasse ma vie. » Il retint un petit sourire en coin. « Tu sais parfaitement que mon égo s’en remettra pas si tu pars faire ta vie alors que c’est moi qui t’ai fait entrer. » Le pire ? C’était la vérité. « J’ai pas pris le bracelet sur un cadavre, je te donne les indications qui m’ont été données. »

Finalement, au delà de toute cette histoire un brin louche d’où ce type d’invitations avait été récupéré, c’était surtout le pourquoi qui était à retenir. Ruben aurait pu profiter seul des privilèges que lui avait offert Midas, il aurait pu prendre ces quelques jours de repos pour éviter à peu près la terre entière et surtout la population de Brisbane présente dans la foule - mais il connaissait l’amour d’Ambrose pour la musique, et à ses yeux cette dernière n’était réellement appréciée que si elle était partagée à un moment donné. Il pouvait se faire plaisir tout en lui faisant plaisir aussi, et pour une fois il avait choisi l’option la moins égoïste, aussi incroyable que cela pouvait paraitre. « Tu t’es bien dit. » Il esquissa un petit sourire. « Je sais. » Bien sur qu’il savait, et bien sur qu’il ne savait accepter le moindre compliment ou remerciement même dissimulé sans souligner d’abord qu’il avait raison à un moment donné de l’histoire. « T’as au moins regardé la programmation ou ton plan consistait à m’agiter le bracelet sous les yeux ? » A cette question là, en revanche, Ruben plissa le bout du nez et laissa un petit rire lui échapper. « Touché. » Il haussa un brin les épaules. « Je savais que tu serais ébloui par le bracelet si je l’agitais assez longtemps sous ton nez, alors j’ai pas réfléchi au reste du plan j’avoue tout. » Et puis surtout, étant donné qu’encore quelques semaines plus tôt, il n’avait pas prévu d’aller au festival, il ne s’était pas penché sur la question. « Y’a les affiches avec la programmation à l’intérieur, viens. » D’un mouvement de tête, il lui indiqua l’accès au reste du lieu des festivités, et de le suivre également. « Un festival commence toujours avec une bière » Les mots de Rose résonnaient derrière lui désormais, alors qu’un petit rire échappait à Ruben. « C’est prévu, sois pas si impatient voyons. »

Ce fut effectivement la première chose qu’il avait mis sur sa liste des choses à faire, inventée au fil des minutes qui passaient. Cependant, il avait prévu de le faire dans l’une des zones VIP - car s’ils avaient les accès pour, autant en profiter. Mettant un pied devant l’autre afin d’accéder à la première à leur portée, celle comportant le bar déjà ouvert surtout, Ruben se glissa derrière l’un des tabourets du comptoir une fois arrivée sur place. « Deux pintes, s’il vous plait. » C’était plutôt agréable, de pouvoir commander des verres sans avoir peur de se faire arrêter derrière - c’était là bien sur un commentaire qu’il ne se permettrait pas, surtout qu’il n’apporterait rien à l’instant présent et que ce serait de mauvais goût. Mouvement plus intelligent: il attrapa l’un des programmes papiers qui trainait derrière le bar, ni vu ni connu, pendant que le serveur était parti chercher des verres en réserve. « Tiens. » Posant son menton dans sa main, coude sur le comptoir, ses yeux observaient Ambrose. « J’ai déjà fait un peu le tour hier soir, alors aujourd’hui on va là où tu veux aller. C’est toi le chef du programme. » Ce n’était pas souvent qu’il lâchait du lest de la sorte, le petit; mais avec Rose, les choses avaient toujours été différentes et bizarrement plus faciles malgré tout. « Après les concerts, on pourra accéder aux zones VIP où y’aura les artistes aussi. Si jamais tes plans en politique s’effondrent, c’est le moment de refaire ton carnet d’adresses. »

« Midas Sterling me devait un service. »
“Attends, quoi ? Sterling ? Un service ? Non, tu mens.”

Il ne cherche pas une seule seconde à retenir sa surprise, tout comme il est évident qu’il ne pense pas réellement que Ruben soit en train de lui mentir. Rien n’enlève pourtant l’aspect impossible de sa révélation, alors qu’Ambrose est incapable d’associer les deux noms, encore moins pour en venir au simple fait qu’un chanteur mondialement connu en est venu à lui offrir des billets pour accéder à des zones VIP. Quel genre de service pourrait le mener jusque là, au juste ? « Tu sais parfaitement que mon égo s’en remettra pas si tu pars faire ta vie alors que c’est moi qui t’ai fait entrer. » Le pire ? C’est que ça a un arrière goût de déjà vu, sauf que dans la réalité des faits Ruben est le seul à avoir demandé à ce qu’Ambrose sorte de sa vie, il y a de ça quelques années. Le souvenir douloureux est la raison pour laquelle le politicien ne sait pas le suivre aussi simplement que cela dans son idée: la plaie guérit à un rythme différent de son côté, de toute évidence. « Je savais que tu serais ébloui par le bracelet si je l’agitais assez longtemps sous ton nez, alors j’ai pas réfléchi au reste du plan j’avoue tout. » Cette fois-ci, il peut sourire un peu plus simplement, et cela a tout à voir avec le fait qu’il avait déjà anticipé cette éventualité. “Qu’est-ce que tu ferais sans moi.” Il souffle donc simplement, avant de le suivre à l’intérieur des allées réservées aux VIP, son poignet brandi en guise de passe-partout.

Le plan débute par un passage par le bar, face auquel les deux hommes s’installent en même temps, prêts à commander une simple bière pour mieux réfléchir à la suite de leur journée. « Tiens. » Le brun sourit face aux talents de voleur du médecin, et son sourire s’étire un peu plus encore lorsqu’il croise brièvement son regard clair. « J’ai déjà fait un peu le tour hier soir, alors aujourd’hui on va là où tu veux aller. C’est toi le chef du programme. » Il le connaît assez pour savoir que Ruben Hartfield ne dit jamais des choses telles que c’est toi le chef du programme, et c’est une raison supplémentaire pour qu’il en soit touché. Ses yeux parcourent l’affiche en travers, pour recueillir le maximum d’informations avant de se concentrer sur les détails de leur futur plan. “Tu savais qu’ils ont préparé tout un truc à la Coachella ? Accès au parc national, cabane dans les arbres ? Courses de voiliers ?” Est-ce que le bracelet VIP leur donne aussi accès à ce genre d’endroits ? Parce que ce serait tout de même incroyablement intéressant. “Y’a ton Midas à la programmation.” Ton Midas, parce qu’il continue de penser que l’histoire est incroyablement louche et bizarre et qu’il soupçonne déjà qu’il se soit passé quelque chose entre eux, évidemment. “Sur la scène principale, évidemment. Je propose qu’on campe là-bas, ni plus ni moins.” Parce qu’il aime tous les noms qu’il voit défiler sous ses yeux et qu’il ne veut rien d’autre que les meilleures places, même s’ils ne seront en compétition qu’après des autres (maigres) VIP.

« Après les concerts, on pourra accéder aux zones VIP où y’aura les artistes aussi. Si jamais tes plans en politique s’effondrent, c’est le moment de refaire ton carnet d’adresses. » Il sourit simplement, rit maigrement. Maintenant qu’il a prévu de sortir un article sur Saül Williams, il sait plus que jamais qu’il joue avec le feu et qu’il vient peut-être de se tirer une balle dans le pied, effectivement. Mais il est encore trop tôt pour le penser, et encore bien trop tôt pour acter l’idée. “J’ai toujours su que tu avais un grand cœur derrière toute cette personne détestable, Ruben.” De la main, il désigne son corps tout entier, un sourire parfaitement malicieux accroché à ses lèvres. Il est incapable de parler d’un point positif sans ajouter le négatif ou un reproche avec. “Je compte pas abandonner la politique, mais ça m’empêche pas d’avoir envie de rencontrer les artistes. Et surtout Midas, puisque vous êtes devenus les meilleurs amis du monde, apparemment ?” Les bières leurs sont servies dans le même instant, laissant Ambrose attraper la sienne, en boire une gorgée, et le gratifier d’un nouveau sourire en coin laissant sous-entendre qu’il attend une fois de plus les explications. En version longue.

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« Attends, quoi ? Sterling ? Un service ? Non, tu mens. » Bien sur qu’un sourire amusé étira les lèvres de Ruben. « Tu sais très bien que je te mens jamais. » Sur la liste des choses qui ne changeait pas avec le temps, cette case là était toujours cochée sans une once d’hésitation. Surtout qu’il n’avait aucun intérêt à le faire ici, puisque c’était effectivement le cas. Juste, il ne pourrait pas donner plus de détails sur le pourquoi du comment, secret médical oblige. Ils pourraient tout de même profiter autant du reste de la journée et de la soirée, même si Ambrose n’avait pas tous les détails de ce qui sur avait permis d’entrer ici aujourd’hui. Ils venaient pour la musique de toutes façons, non ? C’était le seul plan d’attaque de Ben pour le reste des festivités, en réalité, il n’avait rien préparé d’autre que cette attaque là. « Qu’est-ce que tu ferais sans moi. » Il ne releva pas la remarque, se contenta de pincer ses lèvres en une ligne fine un instant; il avait tout son vécu des dernières années pour répondre à cette question, mais il savait que ce n’était pas réellement ce qu’attendait Rose comme réponse et que ses paroles étaient rhétoriques; il en avait fait et il continuerait d’en faire des choses sans lui, puisque leur destinée avait été écrite ainsi.

A peine étaient-ils installés derrière le bar que déjà, Ruben glissait un programme dérobé à la volée au serveur entre les mains de Constantine. A lui de choisir les activités qui allaient remplir leur programme pour le reste de leur temps ensemble sur place. « Tu savais qu’ils ont préparé tout un truc à la Coachella ? Accès au parc national, cabane dans les arbres ? Courses de voiliers ? » - « J’ai appris ça en arrivant hier, quand on m’a demandé où j’allais aller les autres jours et que j’ai pas su quoi répondre. » Parce-qu’il ne s’était honnêtement pas spécialement renseigné avant d’arriver sur place, et que surtout il pensait pas qu’un événement de cette sorte serait organisé si près de chez eux. « Si c’est construire la cabane dans les arbres, je te préviens d’avance: j’ai beaucoup de qualité et beaucoup de compétences, mais le bricolage en fait pas partie. » Aussi étrangement que cela pouvait l’être, il existait effectivement des domaines où il savait d’avance ne pas être le meilleur. « Après, si c’est un compétition et qu’il faut la gagner… tu sais que tu peux compter sur moi.» Parce-que sur cette partie là, il ne saurait lésiner - et ce ne serait en rien une surprise pour Ambrose de voir ressortir le côté compétiteur du brun. Apparemment cependant, l’attention du jeune homme était déjà repartie sur un autre élément du programme. « Y’a ton Midas à la programmation. » - « Ton Midas. » Il leva les yeux au ciel sans avoir besoin d’exagérer un seul instant; bien sur que c’était là désormais le genre de commentaire qu’allait faire Ambrose. « Sur la scène principale, évidemment. Je propose qu’on campe là-bas, ni plus ni moins. » - « On fait ça, alors. On peut accéder aux préparatifs avant en coulisses pour lui, du coup, si tu veux. C’est sur qu’on nous laissera passer sans la moindre question. » Simplement parce-que c’était Midas lui-même qui avait donné les bracelets à Ruben, et pour aucune autre raison.

Ben glissa en revanche une autre raison pour laquelle c’était là une super opportunité pour Rose de passer la soirée dans le coin, à faire copain-copain avec le carré VIP - ce qui arracha tout de même un petit sourire, un petit rire même au principal intéressé. « J’ai toujours su que tu avais un grand cœur derrière toute cette personne détestable, Ruben. » Pendant qu’Ambrose le désignait de la main, de haut en bas comme s’il avait besoin d’illustration pour comprendre ses paroles, il eut du mal de son côté à retenir le petit sourire presque amusé qui voulait étirer ses lèvres alors que clairement, une grande partie de lui ne prenait pas si bien la remarque. « Ah, ah. Très drôle. » Bien sur qu’il avait un grand coeur; simplement, il n’était pas du genre à le montrer au premier qui passait à ses côtés. Certes, il avait de temps à autres un comportement un peu agaçant, mais ce n’était pas non plus la mer à boire.  Ambrose n’aurait pas accepté de venir ici aujourd’hui, si c’était le cas. « Je compte pas abandonner la politique, mais ça m’empêche pas d’avoir envie de rencontrer les artistes. Et surtout Midas, puisque vous êtes devenus les meilleurs amis du monde, apparemment ? » Ruben ouvrit la bouche, puis la referma en attendant que le serveur leur glisse les bières devant eux. Rose avait déjà bu une gorgée que lui était toujours en train de le fixer avec un certain agacement dans le regard - peut-être même plus une certaine dose de frustration, de ne pas pouvoir se permettre de répliquer exactement comme il l’aurait désiré. « Je te ferai pas le plaisir de deviner les explications que t’attends alors qu’elles existent même pas. » Parce-que les sous-entendus de Rose étaient assez gros pour que toutes les personnes dans ce bar les aient compris à leur tour aussi. Approchant quelque peu son visage du jeune homme, il plissa quelque peu les yeux. Il allait lui retourner une droite, mais tant pis. « Jaloux, monsieur Constantine ? » Qu’importe de quoi, puisqu’il ne posait pas de mots sur ses pensées et préférait laisser Ben deviner ce que son petit sourire malicieux et amusé voulait dire.

Ambrose observe avec attention le flyer présentant la programmation autant que les différentes activités proposées à Scenic Rim. Quitte à avoir fait le déplacement, il veut en profiter autant que possible, et il sait qu’à son tour Ruben n’est pas du genre à se mettre sous le soleil et ne plus bouger pour le reste de l’après-midi. Fort heureusement, non, se dorer la pilule n’est pas sa priorité. « Si c’est construire la cabane dans les arbres, je te préviens d’avance: j’ai beaucoup de qualité et beaucoup de compétences, mais le bricolage en fait pas partie. » Le plus jeune s’amuse simplement de la remarque. Il ne connaît pas les talents de bricoleur du médecin, mais il n’a pas de mal à le croire sur parole, surtout alors que les moments où Ruben relativise ses capacités sont bien rares. Il n’est sûrement pas plus doué lui-même, de toute façon. “Quelqu’un a déjà construit les cabanes trois étoiles, t’as rien à craindre.” Après tout, il a parlé de Coachella et non d’un bootcamp de survie. « Après, si c’est une compétition et qu’il faut la gagner… tu sais que tu peux compter sur moi.» - “Tu t’y connais mieux en voiliers qu’en bricolage ?” Il demande avec amusement, prêt à tout entendre de sa part maintenant. Il n’y a cependant rien qui l’empêche de reposer les yeux sur le flyer, cette fois-ci un peu plus concentré sur la programmation du festival en lui-même, assez pour remarquer le nom de Midas Sterling parmi les têtes d’affiche: de quoi amuser l’australien. La remarque, en retour, n’amuse pas le moins du monde Ruben, et c’est le seul signe dont il a besoin pour changer le sujet de conversation et passer à autre chose: se disputer avec lui est la dernière chose dont il aurait envie, tout autant que de créer une quelconque tension. Ambrose se concentre sur le positif, sur le fait que l’évènement leur plaît à tous les deux, sur les activités qu’ils feront. Sur le temps qu’il s’apprête à passer avec lui, sans heurts ni fracas pour une fois. « On fait ça, alors. On peut accéder aux préparatifs avant en coulisses pour lui, du coup, si tu veux. C’est sur qu’on nous laissera passer sans la moindre question. » Il se retient de poser une nouvelle question à ce sujet, bien conscient que Ruben aurait tôt fait de l’éluder à son tour, une fois de plus. “Vendu.” Il a hâte. Il est un gamin à qui on promet la lune, et ce n’est pas n’importe qui qui lui tient cette promesse. “Je vais jamais couper ce bracelet, je te préviens.” Il le cachera sous les manches de ses chemises lors d’apparitions publiques, même s’il reste une figure cachée derrière Camil. Nul besoin d’attiser la curiosité des journalistes à l’oeil aiguisé.

Les bonnes intentions d’Ambrose consistant à ne pas gratter le nouvellement appelé problème Midas ne durent que peu de temps, en démontre la nouvelle question qu’il ajoute à ce sujet, une seconde avant de boire une gorgée de bière pour temporiser. Il veut savoir, et il ne veut rien savoir. Les deux en même temps, dans tout son paradoxe. « Je te ferai pas le plaisir de deviner les explications que t’attends alors qu’elles existent même pas. » Et il le croit. Il veut le croire, du moins, donc il boit ses paroles, parce qu’il se raccroche à l’idée que Ruben est toujours le premier à statuer la vérité, qu’elle soit plaisante ou non à dire et entendre. Cependant, il se fige lorsque Ruben rapproche son visage du sien, ce qui est un geste qu’il n’avait certainement pas anticipé, comme en témoigne le regard troublé qu’il partage avec lui. « Jaloux, monsieur Constantine ? » Il se retrouve aussitôt blessé de la capacité de Ruben à s’en amuser, comme en témoigne son attitude dans son entièreté autant que son sourire malicieux. Il est toujours trop tôt pour qu’Ambrose soit capable du même recul, et il y a même fort à parier qu’il ne le sera jamais. “Joue pas à ça.” Le jeune politicien dégage son regard de celui du médecin et se concentre une fois de plus sur sa bière. Il ne veut plus jouer avec Ruben, il a assez donné et il y a surtout assez laissé de parts de lui. “Tu fais ce que tu veux avec qui tu veux, Ben.” Il se débrouille avec sa fiancée, ils gèrent les choses comme ils l’entendent. Du reste, peu importe, cela ne le regarde plus depuis bien longtemps. “Je retiens juste que je suis le seul que t’as invité.” Il détourne brièvement son regard en sa direction et y ajoute un sourire en coin. Il l’a blessé, il y a quelques secondes et il y a quelques années aussi, mais n’en reste pas moins qu’il sait ne pas être n’importe qui à ses yeux. “Arrête de discuter et bois ta bière. Y’a un artiste que je veux voir qui passe dans… 30mn, et c’est la scène à l’autre bout du monde.” Il ne voulait pas le voir plus qu’un autre, mais il est une parfaite diversion. “Et je t’en voudrais à mort si on le ratait à cause de toi.” Le sourire est plus appuyé et bien plus amusé, désormais. Il l’est dès qu’il n’est plus question de leur histoire, de toute façon.

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« Quelqu’un a déjà construit les cabanes trois étoiles, t’as rien à craindre. » - « Tant mieux alors. Ca m’évitera de m’abimer les mains. » - « Tu t’y connais mieux en voiliers qu’en bricolage ? » Il étira un sourire, plissa légèrement le bout du nez. « Pas vraiment, mais je m’y connais mieux en compétitions et en comment les gagner. » Parce-que cela faisait partie de ses capacités de base, de tenir jusqu’au bout afin de gagner, qu’importe le domaine. Alors, cela devrait pouvoir s’appliquer tout autant à une course de bateaux qu’à n’importe quel autre champ d’action. Tout ce qui avait à retenir ici surtout, c’était qu’il suivrait Ambrose qu’importe où ce dernier souhaitait aller et sans différenciation sur la partie du festival qu’il avait envie de voir. En choisissant Midas comme célébrité à aller voir performer, Ben pouvait qui plus était sans hésitation lui donner accès aux coulisses et aux préparations. « Vendu. Je vais jamais couper ce bracelet, je te préviens. » Ce fut un rire franchement amusé qui s’échappa d’entre les lèvres de Hartfield, alors qu’il secouait quelque peu la tête. « Je savais que ça allait te faire plaisir, mais à ce point là… » Faux: il avait anticipé que ce serait à ce point là, parce-que c’était facile que ce soit le cas. Pour ce domaine là, du moins.

Parce-que pour d’autres sujets, Ruben pouvait déjà voir qu’Ambrose n’était pas du tout autant enclin à laisser échapper un rire et à montrer un certain amusement. Ou en tous cas, il avait lancé les premières remarques dans ce but là, mais maintenant que c’était le brun face à lui qui tentait de reprendre le contrôle de la situation, ça ne lui plaisait plus autant - il n’avait pas besoin de le formuler à haute voix, Ben le voyait dans son regard que c’était le cas. « Joue pas à ça. » Il détournait déjà son regard, Constantine. « C’est toi qui as commencé à jouer. » C’était lui qui avait lancé les hostilités, à s’amuser avec les mots de la situation et en laissant trainer des insinuations quand à la façon dont Ruben réglait ses affaires. Ce n’était plus si drôle, finalement, lorsque la carte était contrée pour retourner vers lui ? « Tu fais ce que tu veux avec qui tu veux, Ben. Je retiens juste que je suis le seul que t’as invité. » Un regard en coin: ce fut la seule chose qu’il lui accorda en cet instant alors que le regard clair de Ben n’avait pas lâché un seul centimètre des traits du visage d’Ambrose, regardant dans les détails ses réactions. Donc il était toujours blessé - c’était une information importante à mettre de côté, ça. « Rose… » Il soupira légèrement, presque déçu d’en arriver si rapidement à adopter ce type de discours. « J’ai pas sucé Midas, ou je sais pas trop ce que t’as en tête, pour obtenir les bracelets. Ok ? » Le sourire qu’il étirait en cet instant de son côté était un brin pincé. « C’est pas question d’un serment que j’ai prêté à celle qui me passera la bague au doigt dans quelques temps. C’est à cause d’un autre serment que j’ai prêté y’a quelques années et qui m’empêche de donner des détails sur la vie des autres. » Concernant la suite des paroles de Rose… « Et t’es le seul que j’ai invité parce-que t’es le seul qui saura apprécié à sa juste valeur l’invitation. » Egalement parce-qu’il appréciait sa compagnie, cela allait de soit; il n’allait pas non plus le formuler à haute voix, il ne fallait pas exagérer. « Et je te donne les réponses directement parce-que c’est hors de question que tu te mettes à bouder dès maintenant, j’ai l’intention qu’on profite réellement du festival. »

« Arrête de discuter et bois ta bière. Y’a un artiste que je veux voir qui passe dans… 30mn, et c’est la scène à l’autre bout du monde. Et je t’en voudrais à mort si on le ratait à cause de toi. » Au petit sourire en coin du brun, bien sur que Ben leva les yeux au ciel. Quelle autre réaction aurait-il pu avoir en cet instant ? « J’ai dit que c’était toi le chef, pas que t’avais le droit de me mener à la baguette. » Comme si c’était vraiment dérangeant, alors qu’en réalité cela avait plutôt tendance à amuser Ben - comme le montra, l’instant d’après, ses gestes alors qu’il attrapait sa bière et qu’il la terminait d’une traite. C’était pas une idée de génie, mais de toutes façons il était ici pour profiter du festival et il ne rentrait pas avant le lendemain; ce n’était pas une bière bue un peu trop rapidement qui allait contrecarrer ces plans là. Il pointa du menton le verre de Rose, à la suite. « Bois la tienne aussi, alors. » Parce-que lui, il était déjà de nouveau debout sur ses deux jambes, prêt à avancer jusque la dite-scène, remettant sa paire de lunettes de soleil sur le nez. « Trente minutes, t’as dit ? Faut qu’on s’y mette, alors. » Trente minutes, le temps parfait pour que la bière qu’il venait juste de boire ait le temps de faire effet - soit sur son cerveau, soit sur sa vessie, au choix.

« Pas vraiment, mais je m’y connais mieux en compétitions et en comment les gagner. » Et ce trait de caractère aussi, parmi tout le reste, ils l’ont en commun. Ce qu’ils n’ont toujours pas en commun, cependant, c’est l’avis qu’ils se font de leur histoire passée, et sans doute aussi l’avis qu’ils ont du nouveau lien qu’ils tentent de (re)construire aujourd’hui. Du côté d’Ambrose, soutenir le regard de Ruben est difficile dès que ce dernier y ajoute un brin de malice et énormément de sous-entendus. Cela fait écho à bien d’autres moments passés ensemble, lesquels étaient parfaitement heureux à l’époque et ne le font que souffrir aujourd’hui en y repensant. Cela lui rappelle simplement tout ce qu’il a perdu. « C’est toi qui as commencé à jouer. » Et cette fois-ci, sans chercher à rejeter la faute ailleurs, Ambrose change son fusil d’épaule. “Je recommencerai pas.” Il annonce et capitule, aussi simplement que cela. Il voulait se souvenir de ce que ça faisait que d’être sous ses auspices, voilà tout. « Rose… » Rose relève son regard en sa direction, déjà inquiet à l’idée que le week-end prenne fin avant même d’avoir débuté. « J’ai pas sucé Midas, ou je sais pas trop ce que t’as en tête, pour obtenir les bracelets. Ok ? » Il passe son regard d’un oeil à l’autre de Ruben, sans avoir douté un seul instant de la véracité de ses mots. “Ok.” Il les accepte simplement, sans chercher plus loin. Il croit le discours que lui partage Ruben, et il se moque bien de la façon dont il a pu avoir ces fichus bracelets. Ils existent, il lui en a donné un, et c’est tout ce qui devrait compter. Quand bien même ils étaient faux, ce serait le cadet des soucis de l’australien qui est surtout heureux de passer à nouveau un peu de temps avec Ruben, peu importe qu’ils soient en VIP ou non. « C’est pas question d’un serment que j’ai prêté à celle qui me passera la bague au doigt dans quelques temps. C’est à cause d’un autre serment que j’ai prêté y’a quelques années et qui m’empêche de donner des détails sur la vie des autres. » Tout ce qu’il retient, c’est le peu de considération que Ruben sembler donner à ses fiançailles. Il ne comprend décidément pas comment les hommes de son entourage peuvent passer la bague aux doigts de femmes qu’ils n’aiment pas comme ça, et pourtant il s’apprête ironiquement à en faire de même. Lui, au moins, sait déjà qu’il fera tout pour ne jamais aller au-delà des fiançailles. De belles paroles, voilà ce dont il veut se contenter. « Et t’es le seul que j’ai invité parce-que t’es le seul qui saura apprécié à sa juste valeur l’invitation. » Le sourire du jeune adulte s’étire, parce qu’il sait très bien qu’il n’a pas été invité parce qu’il est le seul de ses amis à aimer écouter de la musique. Si c’est l’excuse que Ruben se répète en boucle depuis quelques temps, pourtant, il n’a pas le coeur à la mettre à mal. Elle a quelque chose de touchante, peut-être même de mignonne. “Bien sûr.” Il acquiesce faussement et lui offre un sourire un peu plus rassuré, maintenant. « Et je te donne les réponses directement parce-que c’est hors de question que tu te mettes à bouder dès maintenant, j’ai l’intention qu’on profite réellement du festival. » Disons simplement qu’Ambrose ne s’était effectivement pas attendu à ce que ses interrogations reçoivent une réponse aussi élaborée de sa part, mais il est heureux de savoir que Ruben n’a pas de mal à mettre cartes sur table avec lui. A dire vrai, il n’en attendait pas moins de sa part. “Me demande pas de pas bouder, c’est le meilleur moyen de t’assurer que ça arrive.” Ça l’aurait été en temps normal. Aujourd’hui, Ambrose a trop à coeur de lui aussi profiter du festival pour laisser le moindre nuage s’immiscer.

« J’ai dit que c’était toi le chef, pas que t’avais le droit de me mener à la baguette. »
“Oh pardon, je t’ai demandé ton avis peut-être ?”

Ruben a un caractère parfois difficile, mais Ambrose en a un parfaitement semblable, et cela explique son manque de conviction lorsqu’il s’agit de courber l’échine face aux remarques du médecin. Bien au contraire, il préfère y répondre aussitôt et sourire à son tour. « Bois la tienne aussi, alors. » Il demande, après avoir bu sa propre bière d’une seule traite, chemin que suit Ambrose à son tour pour terminer la pinte. Les deux idées sont mauvaises, mais ils le savent. « Trente minutes, t’as dit ? Faut qu’on s’y mette, alors. » - “On aurait pu les prendre dans des gobelets, quand même.” Mais il s’en rend compte un peu trop tard, en réalité, comme en témoigne sa mine dépitée. Il a promis de ne pas bouder et fait un effort seulement pour ne pas donner raison à Ruben, en réalité.

* * *

Accoudé à la barrière, aidés dans leur ascension par leurs précieux bracelets, Ambrose se balance machinalement d’avant en arrière en attendant les quelques minutes les séparant du début de la prestation. “On les a déjà écoutés dans un bar. Je sais pas si tu t’en souviens.” Il annonce machinalement, ses yeux rivés sur la scène, son esprit alimenté par le début d’un regret à avoir bu aussi rapidement sa bière. Il n’aime pas vraiment ça, qui plus est. “Je sais pas en quelle année exactement, mais ils en ont fait du chemin depuis.” Ils sont passés à un autre niveau, pour aujourd’hui être invités à l’affiche d’un tel festival. Cela rend Ambrose fier, dans une certaine mesure, mais surtout nostalgique.

Ses bras se reposent contre la barrière, son menton glisse par dessus, et sa tête bascule simplement en direction de Ruben. “Merci. Pour le bracelet, et pour l’invitation.” Il ne le lui avait pas dit, il avait cherché la petite bête et a trouvé le temps de se moquer de tout un tas de choses. Mais il n’avait pas dit merci, alors il se rattrape, le show démarrant enfin.

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***
« Je recommencerai pas. » Si c’était pour qu’ils doivent en arriver à se donner des explications en mettant de côté l’aspect amusant des conversations couvertes de sous-entendus, c’était peut-être pour le mieux effectivement - en revanche, Ruben aimait bien jouer, et savait qu’Ambrose était particulièrement performant dans ce domaine, cela aurait pu être diversion pour le reste de la soirée. Simplement, savoir doser l’utilisation de la blague alors qu’il pouvait percevoir autant dans le comportement que dans les paroles du brun qu’il n’était pas tout à fait à l’aise avec qu’il avait pourtant seul lancé, était le cheval sur lequel Ben parait pour ce soir. Alors, plutôt que de laisser le doute planer un instant de plus sur eux et sur la conversation, il préféra statuer lui-même la façon qu’il n’avait pas utilisée pour obtenir ces bracelets. « Ok. » De toutes façons, il n’existait pas d’autres versions de cette conversion: bien sur qu’il devait acquiescer, puisque c’était de cette façon que les choses s’étaient déroulées. Il lui demandait juste de s’en rendre compte, alors qu’il sous-entendait que ce n’était peut-être pas le cas. Tout comme il pensait sincèrement que Rose pourrait apprécier avec une saveur particulière l’invitation du chirurgien à le rejoindre pour profiter de l’événement musical. « Bien sûr. » Même s’il doutait également de cette version là des faits, pourtant bien réelle. Peut-être qu’il avait été plus simple pour Ruben d’inviter Ambrose plutôt que n’importe qui d’autre, peut-être qu’il le faisait pour lui montrer qu’il ne lui en voulait pas, voire plus surtout, réellement de la façon dont les choses avaient tourné lors de leur dernière rencontre; il le faisait également parce-qu’il savait que le jeune homme saurait apprécier à sa juste valeur l’invitation. Et ce dernier avait intérêt à lui prouver qu’une fois de plus, il avait raison avant de poser la moindre question. « Me demande pas de pas bouder, c’est le meilleur moyen de t’assurer que ça arrive. » Il utilisait de nouveau l’humour pour répondre: c’était bon signe. Oh, et il connaissait parfaitement l’esprit dont faisait preuve Constantine en cet instant; il aurait même été plutôt surpris qu’il ne réponde pas de la sorte à cette remarque de la part de Ben. Ce dernier étira un petit sourire en coin. « Je vais me retenir alors. » Parce-qu’il savait aussi que cela serait particulièrement facile d’en arriver à une telle conclusion, effectivement, et il n’en désirait pas pour ce soir.

« Oh pardon, je t’ai demandé ton avis peut-être ? » Il secoua quelque peu la tête, ajouta un petit rire amusé, se retint même de lever les yeux au ciel. Parfois, il oubliait à quel point effectivement Ambrose savait lui tenir tête là où d’autres auraient abandonné l’idée depuis longtemps. Ca faisait du bien; pas trop souvent bien sur, parce-qu’il n’appréciait pas particulièrement être contredit, mais de temps à autres se retrouver face à quelqu’un de plus coriace était bénéfique. « Bois ta bière, j’ai dit, je t’attends pas après. » Qu’il se contenta alors de renchérir, désireux de montrer qu’il se pliait à l’exercice mais simplement parce-qu’il était de bonne volonté et non parce-qu’il n’en avait que peu à faire d’être mené par le bout du nez par Ambrose de la sorte. « On aurait pu les prendre dans des gobelets, quand même. » L’idée n’était pas mauvaise, mais arrivait trop tard étant donné que les deux verres avaient déjà été vidés; tant pis, ce n’était pas une bière bu trop rapidement qui faisait peur à Ruben, il en avait vu des pires et saurait profiter tout de même de la soirée.

***
Bien sur qu’ils avaient pu arriver en première ligne pour la prestation qui s’apprêtait à commencer - autant parce-qu’ils étaient aidés de leurs bracelets magiques que parce-que s’ils voulaient quelque-chose, ils l’obtenaient généralement plutôt facilement. Et s’ils combinaient leurs forces, il n’y avait pas grand chose qui pourrait les empêcher de mener leur mission à bien. « On les a déjà écoutés dans un bar. Je sais pas si tu t’en souviens. » Un fin sourire étira les lèvres de Ben, même si Ambrose et son regard tourné vers la scène ne pouvait présentement le voir. « Je sais pas en quelle année exactement, mais ils en ont fait du chemin depuis. » - « C’était en 2016. » Bien sur qu’il se souvenait parfaitement de quand datait la scène dont parlait Rose, comme de toutes les autres soirées qu’ils avaient pu passer ensemble à l’époque. Ce n’était pas parce-que Ruben avait mis fin à leur relation naissance et à toutes les possibilités de cette dernière qu’il avait effacé de sa mémoire les souvenirs qui s’y rattachaient. « Y’avait à peine une vingtaine de personnes à leur concert ce soir là. Ca a bien changé. » Il n’y avait qu’à voir le nombre de personnes qui se pressaient dans la plaine pour tenter d’avoir la meilleure place et pour entendre le plus proche possible le groupe qui s’apprêtait à jouer. « Merci. Pour le bracelet, et pour l’invitation. » Le regard de Ben se concentra alors de nouveau sur les traits du visage d’Ambrose à ses côtés, tournant sa tête en direction du son de sa voix et de la présence à ses côtés, qui avait fini par reporter son attention sur lui également. Pendant un instant, Hartfield resta silencieux, se contentant de laisser son sourire s’étirer et s’élargir encore un petit peu; il aurait pu ici se moquer de lui à son tour, glisser une remarque ou autre mais pour une fois il n’en avait pas envie. Il était trop heureux, en réalité, qu’il y trouve son compte également dans cette invitation des plus hasardeuses et peut-être un brin sortant de l’ordinaire. « Y’a pas de quoi. Tout le plaisir est pour moi. » Il espérait que ce ne soit pas le cas, bien sur, et qu’Ambrose était tout autant heureux que lui de se trouver ici ce soir. « Merci à toi d’être venu. » Cette réponse suffirait au jeune homme pour comprendre qu’il était on ne pouvait plus sincère en cet instant, alors que la musique se mettait à jouer et que les artistes montaient sur scène. Les cris se faisaient entendre de part et d’autres de la scène, alors Ruben reporta son regard sur ce qui se passait devant eux.

Il ne dériva de sa mission qu’une seule fois, lorsqu’après avoir fait des bains de foule chacun leur tour, les artistes du groupe invitèrent certains du public à monter sur scène avec eux. Bien sur que ceux se situant devant étaient les prioritaire pour l’exercice, par la facilité avec laquelle ils pouvaient se rendre sur cette dernière. Ben s’était alors rapproché de Rose afin de lui parler à l’oreille pour qu’il puisse entendre ses paroles - le son était bien trop élevé pour s’entendre parler autrement. « Tu devrais y aller. » Du menton, il montra la scène et les mains tendues des artistes qui allaient arriver à leur hauteur dans une poignée de secondes à peine. « Peut-être qu’ils te donneront un micro, qui sait. » Ce n’était même pas pour se moquer de lui qu’il disait ça, promis, mais simplement pour ne pas qu’Ambrose manque une occasion de prendre un bain de foule alors qu’une grande partie de lui était faite pour ce type de moments - là, dans la lumière, où elle rendait justice au charme et au charisme qu’il portait naturellement.

« Bois ta bière, j’ai dit, je t’attends pas après. » Malgré l’ordre de Ruben et le fait qu’Ambrose s’y plie, ce dernier ajoute néanmoins un immense sourire en coin, persuadé d’avoir marqué son point. De toute façon, le plan de la journée ne peut pas se résumer à rester à côté du bar, et c’est bien la raison pour laquelle le benjamin se décide à dernier sa bière rapidement: Ruben ne s’en rend peut-être pas encore compte, mais le programme de la journée est chargé.

***

Avec de l’imprécision, Ambrose ramène pourtant dans leur esprit cette soirée qu’ils avaient passés à écouter le groupe qui se produit aujourd’hui sur la scène d’un festival mondialement connu. Certains diraient qu’ils sont sur une scène annexe et pas même en dernier partie de soirée, quand tout le monde est présent, mais peu importe: ils ont été invités, ils sont là, et ils sont écoutés. « C’était en 2016. » Contrairement à 2016, donc, où la foule les écoutant était bien plus éparse. Ambrose pose un instant son regard sur la silhouette du médecin, toujours aussi impressionné par la précision de ses souvenirs. « Y’avait à peine une vingtaine de personnes à leur concert ce soir là. Ca a bien changé. » Pensif et rêveur, Ambrose s’accoude à la barrière face à eux, occupé à écouter Ruben autant que le groupe, chacun pour des raisons différentes. Il esquisse même un sourire en coin, heureux pour eux quand bien même il est loin de les connaître personnellement ou d’avoir suivi un peu plus intensément leur carrière. “Tant mieux pour eux.” Ils sont en train de vivre leur rêve en cet instant même, alors oui, tant mieux pour eux. L’instant de réalisation pousse même Ambrose à enfin prendre le temps de remercier Ruben pour l’invitation, celle que rien ni personne n’avait forcé. « Y’a pas de quoi. Tout le plaisir est pour moi. Merci à toi d’être venu. » Leurs regards se croisent quelques secondes supplémentaires dans un silence qui n’a rien d’oppressant, avant que le concert ne débute réellement et dérobe toute leur attention.

Ils sont avant toutes choses présents pour la musique et Ambrose ne se dérobe pas un seul instant de cette ligne de conduite, comme le prouve son regard n’ayant pas quitté la scène malgré l’omniprésence de Ruben à ses côtés. Et tout du long des nombreuses chansons, rien n’a changé, jusqu’à ce que ce soit le médecin qui brise la règle tacite. « Tu devrais y aller. » Pris de court, c’est un regard étonné qu’Ambrose repose aussitôt sur Ruben, ce dernier n’hésitant pas un seul instant avant de pointer la scène du menton. « Peut-être qu’ils te donneront un micro, qui sait. » L’idée est alléchante et elle a tout pour lui plaire, évidemment, mais il ne peut pas se permettre une telle chose, tout comme il ne peut simplement pas se permettre de faire de tous ses rêves une réalité. “Non, je peux pas. Je ne peux pas être vu sur scène.” Ce serait le genre de vidéo qui ressortirait au mauvais moment et, bien qu’il ne fasse rien de mal, cela lui nuirait. Être dans la foule est déjà bien assez jouer avec le feu pour quelqu’un qui devrait faire profil bas lors de ce genre d’événement. “Vas-y, toi.” Un médecin peut bien faire ce qu’il veut de son temps libre, en revanche, et c’est ce qui pousse Ambrose à lui renvoyer la perche avec un sourire amusé. Il est sûr de lui au point d’attraper le poignet de Ruben pour le garder en l’air, leur tour venant trop rapidement pour qu’il lui laisse le temps de la réflexion - ce dernier étant de toute façon inutile, de toute évidence.

win: Ruben est sélectionné, bravo à lui, amuse toi bien sur scène.
so-so: Plot twist, le chanteur a cru qu'ils voulaient monter tous les deux, alors les voilà sur scène.
fail: Ils font les bg mais en fait personne veut d'eux sur scène, cheh l'ego.

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« Tant mieux pour eux. » Tant mieux pour eux, effectivement; ce n’était jamais déplaisant de voir un groupe que vous aviez connu à peine débutant sur scène progresser à un tel niveau de reconnaissance. Ils avaient encore du chemin à parcourir, certes, mais pour les fan tous relatifs qu’étaient les deux jeunes hommes, cela était amplement suffisant.

Cela leur permettait également de profiter d’un avenir qu’ils auraient pu partager avec le groupe, un quotidien commun dont ils auraient pu discuter tous ensemble, si Rose ou lui-même avait finalement choisi la musique plutôt qu’une toute autre carrière. Alors, lorsque les musiciens commencèrent à faire monter des personnes de la foule sur scène, bien sur que Ben montra du menton l’agissement en question en suggérant au brun à ses côtés d’en profiter pour vivre un petit moment de gloire. « Non, je peux pas. Je ne peux pas être vu sur scène. » En exagérant le trait, Ruben tira une petite moue déçue quant à la réponse d’Ambrose. Si un jour quelqu’un en venait à lui dire de nouveau qu’il était trop sérieux, il renverrait vers Constantine pour que les gens puissent se rendre compte ce qu’était une personne réellement sérieuse en toutes circonstances apparemment. « Vas-y, toi. » Le regard qu’il jeta en direction de son acolyte de la soirée voulait clairement dire tu te fous de moi, alors qu’Ambrose n’attendit après rien ni personne pour saisir le poignet de Ben et pour l’agiter sous les yeux de l’un des membres du groupe qui passait à leur niveau à ce moment là. Et bien sur qu’il saisit la main du médecin pour l’attirer sur scène avec lui. Ben eut juste le temps de marmonner un je te déteste à l’intention d’Ambrose, avant de suivre le mouvement qui lui était imposé vers la scène.

Quinze minutes, peut-être vingt au plus large: là était le temps qu’il était resté au vu et au su de tous les spectateurs sur la plaine, commençant à se presser pour la suite de la programmation de la soirée. Il détestait Ambrose de l’avoir mis en avant pour qu’il monte sur scène, mais bien sur qu’il avait adoré chaque seconde de l’attention qui lui avait été accordée. Ce n’était pas grand chose, puisqu’ils étaient plusieurs à avoir été sélectionnés pour rejoindre le groupe, mais rien que de se retrouver avec une guitare prêtée en mains, de jouer trois accord et d’avoir participé à ce type d’événement avait permis de souffler un nouveau courage et un nouveau vent dans l’égo de Ruben. Lui qui passait son temps à critiquer son frère à qui le feu des projecteurs manquait toujours plus de jour en jour, ne pouvait nier qu’il avait particulièrement aimé ce moment. Bientôt déjà, il se trouvait de nouveau aux côtés de Rose, alors qu’il descendait de scène et longeait la barricade pour le rejoindre dans la foule. Certains dans la foule le saluait d’une forte voix à son passage à leurs côtés, mais c’était sur Ambrose que le regard de Ruben était rivé sans s’en défaire. « Je te déteste toujours, crois pas le contraire. » En deux mouvements, trois tout au plus, il se retrouva du même côté de la barrière que le brun. « Mais t’as quand même manqué quelque-chose. » L’adrénaline de la performance devant la foule, mélangée à la bière qu’il avait vu trop rapidement un peu plus tôt - combinée à celle qu’on lui avait offert sur scène… Ben était bien, il était à l’aise, en cet instant. Et alors que le groupe quittait à leur tour la scène, il passa son bras par dessus les épaules de Constantine pour le faire pivoter sur lui-même. « On va où maintenant, champion ? » Après tout, c’était pour qu’il puisse profiter de toutes les attractions présentes sur place comme bon lui semblait qu’il l’avait invité, qu’il lui avait fourni l’un des bracelets que Midas lui avait offert, alors il le redirigeait simplement vers la direction que devait prendre le reste de la soirée.

Au je te déteste de Ruben, Ambrose répond par un clin d’oeil surjoué, marquant ainsi son amusement et l’absence total de remords de sa part. Ce n’est que lorsque son ami se retrouve sous le feu des projecteurs qu’il cherche à taper dans ses mots plus fort que n’importe quel autre élément de la foule, uniquement parce que Ruben le mérite, mais pas au point qu’il le lui dise aussi simplement en face à face. En réalité, Ambrose est aussi soulagé d’avoir réchappé à ce genre de spectacle qu’il est heureux que le chirurgien puisse en profiter de son côté, pour le sortir de son quotidien autant que pour lui attiser un brin de bonheur, tout simplement. « Je te déteste toujours, crois pas le contraire. » Sont pourtant les mots qui marquent son retour, le genre qui pourtant n’effleure pas le moins du monde l’ego ou le coeur du plus jeune, comme en témoigne son immense sourire. Ruben n’en pense pas un mot, il le sait. Il le déteste au point de retrouver une place à ses côtés, et c’est tout ce que le brun garde à l’esprit. « Mais t’as quand même manqué quelque-chose. » - “Pas un brin du spectacle, en tout cas.” Il fanfaronne, occupé à sourire avec espièglerie alors qu’il l’aide à repasser par dessus la barricade pour qu’il rejoigne à nouveau la foule, le groupe quittant désormais la scène pour laisser place à un autre. En posant pied à terre, Ruben en profite aussi pour nouer un bras autour des épaules d’Ambrose sans que ce dernier ne cherche à s’en plaindre ou à le repousser. Bien au contraire, c’est un sourire en biais qu’il partage avec lui - mais il jure qu’il est passé à autre chose, comme en témoigne l’absence de baiser soudain qui suit cette scène. Il est simplement heureux de le savoir à ses côtés, et cela devrait valoir pour les amis, les simples amis. « On va où maintenant, champion ? » Champion noue ses doigts autour de son poignet, toujours logé contre son torse, et mène la marche pour les faire sortir de la foule, son plan pour le reste de la journée consistant en tout autre chose.

Et le plan a consisté en de nombreuses bières, de nombreux gigs, de nombreux bracelets VIP brandis à la moindre occasion pour pouvoir accéder aux meilleures places, loin du public. Le plan n’était pas millimétré, mais il n’en était pas moins parfait, comme le témoigne le sourire qui a toujours animé Ambrose et celui qu’il pense avoir aussi sincèrement retrouvé sur les lèvres de Ruben, malgré l’alcool montant sans jamais qu’ils ne lui donnent la chance de retomber. Sur ce plan là, aucun ne s’en sort mieux que l’autre, pas même le garçon à qui on reproche à tout va son opulence de sérieux et son absence de laisser aller. Assis dans l’herbe, profitant d’une énième bière en attendant le dernier concert de la journée, Ambrose réalise enfin son erreur. “Merde. Merde, le dernier bus rentrait à Brisbane à 22h.” Et puisque l’heure est déjà dépassée, il n’a aucun espoir quant à la probabilité qu’il réussisse à monter dedans. Constantine souffle longuement, agacé de lui-même, et se laisse retomber de tout son long contre la terre, le crâne quelque peu abîmé par autant de boissons qu’il n’a pas pour habitude d’accumuler. En réalité, une seule chose est sûre à ses yeux: s’il n’est pas à la réunion du lendemain, 8h tapante, Camil va le tuer. “Ça nous donnerait pas accès à un des bungalow, ça, à tout hasard ?” Il montre son poignet et le bracelet vip associé, attendant évidemment une réponse positive de la part de Ruben, à défaut d’avoir le moindre plan B. “Je vais définitivement avoir une gueule de bois aussi, si je continue.” Raison pour laquelle il repose son verre, la bière s’étant substituée à autre chose en cours de route, sans qu’il ne sache trop quoi. Il l’a su, il a simplement oublié. Peu importe. “Je chercherai une solution plus tard. Viens, ça va commencer.” Peut-être que le bracelet ne lui donnera aucun logement pour la nuit, mais il leur permet toujours de passer outre la foule et arriver à la dernière minute pour être mieux placé que quiconque, ce dont il compte bien profiter une dernière fois. Il se relève le premier avant de tendre une main à Ruben dans l’objectif de l’aider à se lever à son tour, les problèmes relégués à un plus tard dont il n’a que faire. Il refuse que la soirée soit gâchée.

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Il le détestait, mais c'était là une façon de parler; juste, le plan initial était que ce soit le jeune homme sur scène pour qu'il profite de la soirée et non pour que ce soit lui qui saisisse l'opportunité. « Pas un brin du spectacle, en tout cas. » Bien sur que cela fit lever les yeux au ciel à Ruben, mais avec un grand sourire accroché à ses lèvres en parallèle. Il pouvait compter sur Ambrose pour ne pas manquer le spectacle, c’était sur - même s’il aurait surement préféré que les rôles soient inversés pour, à son tour, profiter de ce qui se passait sur la scène. Pour le moment de toutes façons, ils ne s’attardaient plus de qui était monté sur scène ou non, alors qu’ils s’en allaient vers d’autres endroits de la plaine festivalière, le bras de Ben passé par dessus les épaules de Rose mais laissant ce dernier guider leurs pas. Du moment qu’ils passaient du bon temps ensemble, le reste n’importait que peu en réalité.

« Merde. » Ils étaient assis dans l’herbe, à un moment, et l’autre d’après Ruben s’était retrouvé allongé dans cette dernière sans s’en rendre compte - les yeux rivés vers les étoiles et les oreilles profitant des différentes musiques alentours. « Merde, le dernier bus rentrait à Brisbane à 22h. » Se relevant comme il le put sur ses coudes, Ruben fronça les sourcils en direction du jeune homme. « Tu comptais rentrer ce soir ? » Lui n’avait jamais eu l’intention de tenter de rentrer en milieu de soirée, il savait d’avance qu’il profiterait jusqu’à tard dans la nuit. Le fait de ne pas avoir anticipé cette partie là de la nuit ne ressemblait pas tant à Ambrose, toujours prévoyante et bien organisé, mais c’était surtout quelque-chose qui l’embêtait énormément en cet instant. « Ça nous donnerait pas accès à un des bungalow, ça, à tout hasard ? » Il parlait des bracelets VIP qu’ils avaient obtenu en début de soirée, et ce fut vers ces derniers que le regard de Hartfield se dirigea un instant. Il esquissait un semblant de sourire: il n’avait pas pensé à cette possibilité. « On peut essayer, ça coute rien. » Il avait pu loger l’hôtel pour les autres nuits, mais étant donné que c’était là le soir le plus attendu par les festivaliers, il n’avait pas pu réserver pour ce soir dans la foulée. Ses affaires avaient été jetées dans sa voiture et il s’était dit que c’était un problème pour plus tard - et apparemment, ce plus tard était arrivé côté Constantine. « On ira voir tout à l’heure. » Il ne disait pas non non plus de son côté à dormir sur une surface à peu près correcte ce soir également. « Je vais définitivement avoir une gueule de bois aussi, si je continue. » L’attention fut portée sur le verre du plus jeune, Ben laissant échapper un petit rire à cette mention. De son côté aussi, cela allait surement être le cas mais il n’en avait que faire: il ne devait pas remettre les pieds au bloc avant deux jours et deux nuits, ayant réussi à se défaire de ses sales habitudes d’y trainer trop d’heures par semaine au moins pour l’occasion. « Je peux terminer ton verre, si tu veux pas en rajouter une couche. » Pas qu’il désirait finir davantage bourré qu’il ne l’était déjà, mais si Ambrose voulait s’asseoir sur le banc de touche pour cette fois ci il ne lui en tiendrait pas rigueur.

« Je chercherai une solution plus tard. Viens, ça va commencer. » Rose était déjà debout, tendant une main dans sa direction pour l’aider à se relever. Il ne mit qu’un instant pour l’attraper, afin d’être sur ses jambes à son tour. Le monde tourna légèrement autour de lui, mais seulement un instant - et assez pour lui tirer un petit sourire idiot. « On ira voir pour les cabanes après le concert, et puis au pire je suis venu en voiture moi. » Il n’était présentement pas en état de prendre volant, certes, c’était un point important pour le moment. Il jeta d’ailleurs un coup d’oeil à son verre et à son contenu, avant de remonter ce dernier vers Ambrose. « Je reviens demain soir, mais si t’as besoin je te dépose en ville et je reviens. » Il en profiterait pour passer chez lui, prendre une douche, changer ses affaires. Il haussa les épaules de façon nonchalante, comme si c’était le plus logique et le plus simple de cette situation. « Tu dois être au boulot à quelle heure ? » Un sourcil légèrement haussé sur son visage, et ses pas qui reprenaient déjà la direction de la prochaine scène - leurs bracelets permettant de passer outre la foule qui se pressait pour être sûre d’avoir les meilleures places pour voir l’artiste qui serait sur scène pour le reste de la soirée.  Se tournant, il continua de marcher à reculons, pas sur que ce soit la meilleure des idées sur le moment. « Enfin, c’est une solution comme une autre, c’est toi qui gère comme tu veux. » Il leva son verre, regardant ce qui restait dedans. « Sauf si c’est une solution qui te plait pas, ce sera mon dernier du coup. » Pas besoin d’autre pour profiter pleinement de la soirée; il en avait déjà de toutes façons largement ingéré, nécessaire cependant à ce qu’il arrive à lâcher du lest avec la pression qu’il s’infligeait seul en permanence le reste du temps. « Et faudra que je dorme aussi. Mais tu comprends l’idée quoi. » Ils arrivèrent au niveau de la sécurité, montrèrent leurs bracelets magiques et ils se faufilèrent jusque devant la scène pour profiter pleinement du spectacle à venir. La réponse d’Ambrose ne devait pas venir de suite, il avait tout le spectacle pour réfléchir à l’idée et à lui faire signe si c’était quelque-chose qui l’arrangeait ou non. Ensuite, Ben accorderait son comportement et ferait en sorte d’être adapté en fonction de la décision du brun.

« Tu comptais rentrer ce soir ? »
“Tu pensais que j’allais rentrer quand ?”

Il demande tout aussi sérieusement, pris de court par la question de Ruben, laquelle arrive après qu’il ait lui-même été pris de court: le serpent se mord la queue. Pourtant, et sans grande surprise, le serpent remonte rapidement sur ses pattes, Ambrose tentant de savoir si leurs bracelets VIP ne pourraient pas leur donner par la même occasion un accès à des cabanes ou bungalows proposés aux festivaliers. « On peut essayer, ça coute rien. On ira voir tout à l’heure. » Le brun hoche la tête sans vouloir se poser plus de questions, partant du principe qu’à eux deux, ils arriveront à trouver une solution à ce problème qui ne devrait rien avoir de dramatique. Ambrose est certes du genre à tout planifier le plus tôt possible, mais il ne sait pas moins gérer les imprévus pour autant. Et de toute façon, il y a encore une soirée toute entière dont ils peuvent profiter. « On ira voir pour les cabanes après le concert, et puis au pire je suis venu en voiture moi. » Déjà relevé, il jette un regard curieux derrière lui, en direction du Hartfield, ne sachant comment interpréter cette réponse. Qu’est-ce qu’il pourrait bien faire de sa voiture dans l’état où il est ? Ambrose pourrait conduire, oui, mais il n’est pas certain que ce soit ce que Ruben sous-entendait.

« Je reviens demain soir, mais si t’as besoin je te dépose en ville et je reviens. »
“Dans cet état ? Ouais, hors de question.”

Il leur ferait avoir un accident à coup sûr, lui et son éternel trop plein de confiance, même en ayant bu bien trop de verres en tous genres pour que ce soit raisonnable de le laisser prendre le volant. L’offre est plaisante et il l’aurait acceptée dans un autre contexte, mais le test d’alcoolémie de Ruben dépasserait aisément la stratosphère si on lui en faisait passer un. « Tu dois être au boulot à quelle heure ? » - “Tôt.” Trop tôt pour qu’il veuille préciser l’heure exacte, mais bien avant que Ruben n’ait le temps de décuver. “Je pourrais trouver un moyen de rentrer demain, j’ai juste besoin de trouver un logement ce soir.” Il sait comment se débrouiller pour le lendemain, il trouvera son bonheur parmi les moyens de transport les plus matinaux que la ville et ses environs puisse compter. « Enfin, c’est une solution comme une autre, c’est toi qui gère comme tu veux. Sauf si c’est une solution qui te plait pas, ce sera mon dernier du coup. » - “Non, ça me plaît. C’est juste… faut gérer les détails.” N’importe quelle idée lui plaît tant qu’elle lui permet de passer un peu plus de temps auprès de Ruben, qu’il tente pourtant patiemment d’oublier depuis des années. Ses efforts ont rapidement été repoussés et oubliés. Le reste de la discussion est repoussé à plus tard, ils se contentent pour l’heure de montrer leurs bracelets et littéralement passer au travers des mailles du filet pour profiter du dernier concert de la soirée, et le dernier tout court pour Ambrose avant bien longtemps. Il s’est permis de prendre le temps d’aller à un festival de ce genre une fois mais ne pourrait pas le faire une seconde, ni ça ni aucune autre activité lui demandant de prendre plusieurs jours loin de son travail.

* * *

“C’est vrai ? Il vous reste un bungalow ? Parfait. Non, peu importe s’il est pour cinq, c’est pas grave.” Il sera immense et il s’en moque bien, tant qu’ils n’ont pas à payer quoi que ce soit - ce qui est le cas, le prénom de Midas ayant sans doute été susurré à l’autre bout du téléphone. Il ouvre véritablement des portes, et cela tire Ambrose d’une particulièrement mauvaise situation, comme en témoigne le long soupir de soulagement qui est le sien à la seconde où il raccroche le téléphone et se dirige en direction dudit bungalow pour aller récupérer les clés. Et une fois chose faite, Ambrose n’attend pas une seule seconde supplémentaire avant de se laisser retomber contre le premier lit venu, la journée ayant été particulièrement douce et particulièrement éreintante aussi. Après quelques secondes, il se redresse sur ses coudes seulement, cherchant l’australien du regard. “T’as bien aimé ? La journée ?” La journée avec Ambrose bien plus que les concerts à tout va, voilà ce que ses mots sous-entendent sans plus réellement de retenue, lui qui perd toute son aisance politique à la seconde où il se retrouve face à Ruben. “Moi j’ai bien aimé.” La passer avec lui, donc. Il se redresse déjà pleinement sur le bord du lit, assis contre ce dernier. “Ça m’avait manqué de passer un peu de temps avec toi.” Et s’il restait encore une once de subtilité, la voilà envolée.