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« Tu pensais que j’allais rentrer quand ? » Ruben haussa les épaules. « Demain ? Après-demain ? Je sais pas, j’ai pas spécifié de temporalité dans mon invitation, alors je me suis pas penché sur la question. » Et si Rose avait envie de rester ici trois jours encore, bien sur qu’il aurait fait en sorte que cela puisse arriver. Même s’il avait du lui céder son propre bracelet pour qu’il ait toutes les chances de son côté pour participer au maximum aux différentes activités et festivités sur place, il l’aurait fait - lui sachant pertinemment qu’il rentrerait plutôt rapidement tôt ou tard dans tous les cas. Il avait prévu de faire le soir suivant sur place, mais si cela pouvait arranger Ambrose au moins pour son soucis de trajet retour, bien sur qu’il ferait l’aller et retour pour le redéposer en ville à l’heure pour qu’il ne se fasse pas taper sur les doigts au travail. « Dans cet état ? Ouais, hors de question. » Il leva les yeux au ciel. « Avec du repos et un arrêt immédiat de l’alcool, pas là là. » Ils avaient encore du temps devant eux, il pourrait dormir quelques heures et être apte à ramener Ambrose par la suite. Il serait pour sur en manque de sommeil, mais n’était-ce pas déjà le cas d’ordinaire de toutes façons ? « Tôt. » Il aurait pu lui répondre sans détour, en lui donnant les détails, mais apparement c’était une information qu’il se devait de garder secret défense - ça fit lever les yeux au ciel une seconde fois à Ben. « Je pourrais trouver un moyen de rentrer demain, j’ai juste besoin de trouver un logement ce soir. » De toutes façons, ce n’était là que des idées jetées à la volée pour tenter de trouver une solution - mais Ambrose était un grand garçon, et bien assez apte à se charger de trouver seul comment gérer son manque d’organisation, justement. Ben, un brin vexé ? Peut-être. Il ne le montrait pas, mais bien sur qu’il n’était jamais réellement ravi lorsque ce n’était pas ses idées qui finissaient par être choisies. « Non, ça me plaît. C’est juste… faut gérer les détails. » Pinçant les lèvres, laissant son regard accrocher le visage de Constantine un instant de plus, il finit par hocher quelque peu la tête avant de partir en direction de la scène et du prochain concert auquel ils allaient assister - ce n’était pas un problème qu’ils pourraient résoudre de suite, toutes façons, et Ruben n’avait pas envie d’argumenter pour avoir une conversation qui tournerait en rond; ils étaient tous les deux bornés, Rose avait clairement décidé qu’il rentrerait par le moyen qu’il lui plairait plus tard, et Ben avait un poil trop bu pour comprendre que ce n’était pas contre ses idées qu’il allait, ni contre lui. Autant profiter du spectacle et remettre ce problème à plus tard.

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« C’est vrai ? Il vous reste un bungalow ? Parfait. Non, peu importe s’il est pour cinq, c’est pas grave. » Même en restant à quelques pas de distance d’Ambrose, Ruben écoutait tout de même la conversation qu’il avait au téléphone avec ceux qui géraient les locations des bungalows. Apparemment, ils étaient chanceux pour ce soir et allaient pouvoir profiter d’un confort en rien relatif pour la nuit. Toujours en restant silencieux, il suivit le brun tête baissée jusqu’à ce qu’ils récupèrent les clefs et qu’ils puissent entrer dans leur demeure pour la nuit. Constantine se retrouva à s’affaler sur le premier lit qui eut l’audace de se mettre en travers de son chemin, un long soupire de soulagement s’élevant de ses poumons, là où Ben mit un peu plus de temps avant d’arriver dans l’ouverture de la porte. Ambrose était encore reposé complètement contre le lit lorsqu’il posa son regard sur lui, ne se gênant pas pour le détailler lentement de la tête aux pieds - il s’était musclé avec les années, s’il s’en était douté quelque peu à rester à ses côtés toute la journée et à l’avoir recroisé quelques fois durant ces derniers mois, il pouvait le confirmer alors qu’il était immobile en cet instant. « T’as bien aimé ? La journée ? » Lorsque Rose se releva à l’aide de ses coudes sur le lit, lentement le regard de l’ainé rejoignit le sien. « Moi j’ai bien aimé. » Bien sur que la question, suivie de la réponse rapide de la part du brun, tirèrent un petit sourire amusé à Ruben; avait-il peur qu’il laisse un silence s’interposer entre eux sans faire en sorte de le combler, trahissant une hésitation à répondre à l’interrogation ? Ruben répondrait, il répondait toujours: il profitait simplement de la quiétude qu’ils avaient trouvé à s’isolant dans le bungalow, après avoir été la plupart de la journée et surtout toute la soirée exposée à la musique. Reposant son épaule contre l’encadrement de porte, il croisa ses bras sur son torse. « J’ai passé une bonne journée avec toi, Rose, oui. » Il avait toujours eu le don de savoir plutôt correctement lire entre les lignes. Il ne le faisait pas tout le temps, et n’agissait pas toujours lorsque c’était le cas, mais il savait le faire. Ce qu’il faisait avec un systématisme qui faisait presque peur en revanche, c’était d’ajouter un petit sourire amusé et racoleur à ce type de remarques, comme pour les souligner là où ce n’était pourtant en rien nécessaire.

Faisant finalement quelques pas à travers la pièce, Ben finit par par s’asseoir à son tour aux côtés d’Ambrose sur le bord du lit. « Ça m’avait manqué de passer un peu de temps avec toi. » Ce fut avec une lenteur exagérée qu’il remonta ses iris dans celles du jeune homme, pinçant quelque peu ses lèvres, torturant des dents légèrement sa lèvre inférieur. Oh, Rose. Il n’avait pas besoin d’ajouter ces mots là. Il n’avait pas besoin de souligner une évidence que Ben avait lu dans son regard depuis bien des heures désormais. Il n’était pas non plus obligé de se laisser avoir à chaque fois que Hartfield lui lançait un regard un peu de biais ou lui accorder un peu plus d’importance d’un jour sur l’autre - Ruben secoua légèrement sa tête de gauche à droite. « Ca m’avait manqué aussi. Ta présence m’avait manqué. » Il entendit ses mots avant d’avoir compris qu’il les avait prononcé, et il s’en voulait déjà d’effectivement pas avoir arrêté de boire plus tôt. Fermant instinctivement les yeux, il secouait de nouveau la tête avant de les ouvrir pour se relever du lit. Il ne pouvait pas jouer à ce jeu là ici - ce n’était pas la bonne personne face à lui pour se permettre d’agir de la sorte. « Je sais que tu vas être tenté, mais n’entre pas dans mon jeu s’il te plait. » Ce ne fut qu’après avoir fait quelques pas pour s’éloigner qu’il se retourna pour de nouveau avoir Ambrose face à lui. « Tu devrais aller dormir, si tu veux être en forme pour demain. » Il passait du coq à l’âne, n’évoquait pas de contexte en particulier tout simplement parce-que son idiotie avait parlé plus rapidement que lui et que les regards que Rose pouvait poser sur lui lui rappelaient des souvenirs qu’il ne ferait pas ressortir ce soir. Ruben aimait l’adrénaline, il aimait avancer sur la corde raide sans jamais réellement savoir de quel côté il allait se retrouver à la fin; ce n’était pas pour autant que c’était là une bonne chose et que cela devait être saisi par le jeune homme face à lui. Il savait ce dernier capable de le faire, et tout à fait capable de comprendre sa mise en garde aussi. « Je vais aller sélectionner le second meilleur lit du bungalow pour aller dormir un peu aussi. » Et éliminer les degrés d'alcool toujours présents dans son sang, ce serait pas mal.

« Demain ? Après-demain ? Je sais pas, j’ai pas spécifié de temporalité dans mon invitation, alors je me suis pas penché sur la question. »
“Ah ouais ?”

Il demande, penaud. Evidemment qu’il s’en veut, maintenant, parce qu’il aurait voulu rester aussi longtemps que l’invitation de Ruben le permettait. Simplement, il n’avait pas compris les choses de cette façon, et il se retrouve passablement agacé de l’idée qu’il s’était fait de cette journée, qui aurait pu se conjuguer avec plusieurs pluriels. Maintenant, il se sentirait stupide de dire avoir changé d’avis, lui qui est bien trop borné pour accepter de faire comprendre à Ruben qu’il a réellement envie de passer du temps auprès de lui, sans que ce soit uniquement pour la musique. Disons simplement qu’elle est une très bonne excuse.

* * *

A la seconde où ils peuvent accéder à un bungalow pour la nuit, Ambrose est le premier à s’allonger de tout son long sur un lit, y allant déjà de ses confessions envers Ruben. En réalité, aucun de ses propos n’est surprenant. « J’ai passé une bonne journée avec toi, Rose, oui. » Il annonce depuis le seuil de la porte, la distance paraissant immense aux yeux d’Ambrose, qui esquisse pourtant un sourire comblé. Il a toujours su avoir les mots justes à son égard, même s’il a aussi toujours fallu d’un rien pour que le jeune Constantine se sente roi du monde sous son regard. Lorsqu’il se rapproche de lui, Ambrose y ajoute une confession supplémentaire, se contentant en réalité de parler avec son cœur et d’enfin peser des mots sur l’absence difficile qu’a été celle du médecin dans sa vie. Il est bien plus heureux dans des moments tels que celui-ci, après avoir passé une journée toute entière à ses côtés et alors qu’il peut l’observer plus près que jamais, à quelques centimètres à peine de lui. « Ça m’avait manqué aussi. Ta présence m’avait manqué. » Il sourit instinctivement en entendant ces mots, parfaitement comblé, mais se ravise bien vite alors que Ruben a une réaction bien différente, comme s’il s’en voulait déjà, tel que le prouve la distance qu’il prend déjà avec lui. « Je sais que tu vas être tenté, mais n’entre pas dans mon jeu s’il te plait. Tu devrais aller dormir, si tu veux être en forme pour demain. » Le jeune politicien l’observe sans rien dire, prenant le temps de jauger la situation et leur taux d’alcoolémie respectifs. Il pèse le pour et le contre, il discute avec son éternel désir de retrouver Ruben et son besoin de tourner la page sur leur histoire qui, il faut qu’il s’en rende compte, ne se passera jamais de la façon dont il le désire.

« Je vais aller sélectionner le second meilleur lit du bungalow pour aller dormir un peu aussi. » Il annonce partir et ça, Ambrose sait déjà que ce n’est pas une idée pour lui plaire. A pas de félin, le brun se faufile jusque devant lui, la rapidité de ses gestes parant avec la lenteur de ceux de Ruben - il veut se faire désirer, évidemment qu’il veut se faire désirer. Il veut qu’on vienne le chercher, il veut qu’on le supplie, il veut qu’on s’arrache son attention. Et tout ça, si Ambrose a beau le savoir, ce n’est que pour mieux se plier à ses exigences ensuite, comme le prouve l’instant présent alors qu’il ne parle toujours pas mais pose ses deux paumes contre le visage du chirurgien. Il en caresse les joues un instant, retrouve ses lèvres la seconde suivante dans un baiser ayant attendu trop d’années avant de pouvoir exister à nouveau. Les sentiments passés et jamais réellement enterrés se lisent aisément au travers du baiser qu’il ne sait faire autrement que laisser perdurer une seconde puis une autre, avant d’avoir enfin la force de poser une distance nécessaire entre leurs deux visages. Ce n’est que pour mieux embrasser sa clavicule ensuite, mais ce n’est finalement pas si pire en comparaison de tout le reste et de ce qu’il lui souffle doucement. “Dors avec moi.” Ils iront ensemble dans le second meilleur lit du bungalow, s’il n’y a que ça. Ambrose jure ne pas être compliqué. “S’il te plaît.” Peu importe si cela le fait entrer dans son jeu: il l’a déjà fait en le suivant, il l’a fait encore plus encore en l’embrassant ; et il ne regrette absolument rien. “Comme avant.” Il veut simplement dormir avec lui à ses côtés, sans qu’aucune autre idée ne vienne parasiter son esprit. Sa présence lui avait manqué aussi, de toute évidence, et il peut y palier pour cette nuit au moins.

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Le moindre sourire qui pouvait apparemment sur les lèvres d’Ambrose était immédiatement perçu par Ruben, qu’importe le taux d’alcoolémie qui emplissait ses veines en cet instant. Il voyait bien qu’il ne savait faire autrement que de se raccrocher à ses regards et à ses paroles, et qu’il avait également parfaitement entendu ce qui, à lui, lui avait échappé. Ce n’était pas que Rose ne lui avait pas manqué au cours des dernières années, c’était surtout qu’il en vienne à le formuler à haute voix le problème: il se serait bien gardé de lui avouer ce genre de détail. Les raisons ? Pour toutes celles qu’il pouvait déjà desceller d’avance sur les traits du visage de Constantine, et pour tous les éclats dans son regard allant de paire - il les entrapercevait déjà, alors qu’il se relevait du lit pour ne pas rester à ses côtés. Ben ne pouvait pas se permettre de jouer à ce jeu là maintenant, et il ne pouvait pas laisser Ambrose y plonger tête baissée; parce-qu’il savait que ce dernier en était capable et ce n’était, pour aucun des deux, une bonne idée.

Pourtant, à peine avait-il instauré une certaine distance entre le lit où se tenait le brun et lui, à peine avait-il commencé à faire quelques pas en direction de la sortie de la chambre tout en annonçant qu’il allait se coucher partout ailleurs plutôt qu’ici - parce-que c’était le bon choix à faire en cet instant, et que c’était même logiquement le seul choix qu’il se devait d’avoir à son tableau -, Ambrose se leva sans attendre une seconde de plus. Agilement, et rapidement surtout avant que Ben n’ait eu le temps de passer le seuil de la porte, il s’interposa sur son trajet; ses mains se posèrent de part et d’autre du visage de Ruben, caressant sa peau des pouces. Il aurait voulu lui dire de s’arrêter là, de ne pas aller au bout de son idée, qu’il agissait comme un idiot alors qu’il savait pertinemment que rien de tout ça ne pouvait réellement se passer. Il aurait voulu avoir assez de volonté pour attraper les mains de Rose et les décoller de son visage, afin de prendre un pas de recul et éviter ce qui allait se passer ensuite - parce-qu’il n’avait pas besoin d’être devin pour deviner ce que le jeune homme avait en tête. Il y avait bien une liste encore longue comme le bras de choses que Ben aurait du faire en cet instant - et pourtant, l’instant suivant, les lèvres d’Ambrose se posèrent sur les siennes et il ne fit pas le moindre mouvement de recul. Au contraire: ses mains à lui se posèrent contre ses hanches, le reprochèrent de lui, afin de donner une profondeur supplémentaire à ce baiser qui n’aurait jamais du voir le jour - quitte à ce que ce soit encore un faux pas, autant profiter du moment. Embrasser quelqu’un que vous aviez quitté à contre coeur avait ce goût particulier d’interdit et de libération en même temps, comme si une de vos bouteilles d’oxygène avait coupé pendant trop longtemps, demandant aux autres de fonctionner à un régime plus élevé. Ruben pouvait sentir aussi que ce n’était pas que de son côté que l’effet était présent.

Et contre toutes attentes, ce ne fut pas celui qui devait se comporter de façon raisonnable qui mit fin à ce contact. Ambrose recula son visage, descendant ce dernier pour déposer un baiser au creux du cou de Ben - qui étira un brin ce dernier au contact, fermant les yeux, inspirant autant pour profiter du geste que pour tenter de redonner un brin d’ordre à ses idées. Quel idiot, sérieusement: n’était-il donc pas capable un seul instant de se tenir et d’adopter le comportement qui était supposé lui incomber ? « Dors avec moi. » - « Rose… » Ses mains se décollèrent de ses hanches pour que ses doigts puissent s’agripper plus facilement autour du tissu se tenant sur ses dernières. Il ne pouvait pas lui faire ce type de proposition, alors que c’était exactement ce que Ruben lui avait demandé de ne pas faire - plonger dans son jeu alors qu’il n’aurait jamais du avoir envie d’y jouer en premier lieu. Aucun des deux, même, n’aurait du avoir envie d’y jouer. « S’il te plait. » Rouvrant les yeux, le chirurgien se servit de sa prise autour de Rose pour le faire reculer d’un pas, que son regard puisse se poser sur son visage. « Comme avant. » Comme avant, comme avant qu’il ne lui brise le coeur, qu’ils ne se parlent plus pendant des années et que lui ne soit plus un homme disponible ? L’un, l’autre, les trois ? Libérant une de ses mains pour glisser son index sous le menton de Rose et le relever dans sa direction, Ben garda les mâchoires serrées un instant supplémentaire en le regardant droit dans les yeux. Il n’y avait pas idée d’avoir une bouille mignonne comme ça, aussi, d’avoir un regard à vous envouter de la sorte - oh, il savait qu’il ne le faisait pas tellement exprès, mais c’était quand même quelque-chose à notifier. « Je t'ai demandé une chose et t’es pas capable de t’y plier, c’est ça ? » Bien sur qu’il y avait une pointe d’énervement dans sa voix - mais son regard ne la laissait pas transparaitre, il n’arrivait pas à être assez énervé contre Ambrose pour faire apparaitre son agacement à travers ses yeux. Parce-qu’il était le premier à mettre le feu aux poudres pour ensuite s’indigner que la pièce prenait feu - alors, c’était un agacement relatif qu’il éprouvait à son égard. « Dormir, Ambrose. » Penchant son visage pour s’arrêter juste à hauteur de son oreille, il susurra son itération. « Dormir, seulement. » Mais parce-qu’il était absolument insupportable et qu’il ne savait qu’à moitié se tenir de toutes façons, il déposa un baiser du bout des lèvres, presque comme une caresse, sur l’épiderme de Rose juste en dessous de son oreille.

Ben s’écarta ensuite du brun, pour faire demi-tour et reprendre le chemin inverse du peu qu’il venait de faire - il avait dit qu’il désirait choisir le second meilleur lit du bungalow, en sous-entendant que le meilleur serait de toutes façons forcément celui où le jeune homme se trouverait; celui qu’ils avaient là à côté d’eux ferait donc largement l’affaire pour s’y glisser et laisser Morphée régner en maitre par la suite. Ruben étant Ruben, et Ambrose ayant de lui-même précisé qu’il voulait que ce soit comme avant, il se défit alors de ses vêtements qu’il laissa tomber en pile au pied du lit. « T’as dit comme avant, alors littéralement comme avant. » Désormais nu comme un vers pour ne pas changer ses habitudes, il se laissa tomber sur le lit, reposant sur ses coudes, regardant Ambrose à distance. « Une seule main baladeuse et je te pousse du lit, je te préviens. » La menace était-elle réellement dirigée envers l’autre ou s’appliquait-elle également à lui, surtout ? « Tu peux regarder mais pas toucher. » Le pire ? Une partie de lui était amusée - en témoignait le rictus accroché au coin de ses lèvres, d’un sourire qu’il peinait à retenir. « Y’a onze nouveaux tatouages depuis la dernière fois, si tu veux trouver lesquels. » Ce n’était pas comme ça qu’il était supposé établir les règles du jeu, normalement.

Il est en terrain conquis, Ambrose. Il connaît ses lèvres, il connaît son odeur, et il sait qu’à son tour Ruben ne sait plus être raisonnable une fois les premières barrières franchies. Il espérait qu’il répondrait à son baiser sans pour autant pouvoir en être certain et maintenant que c’est chose faite, il sait qu’il a tout gagné, comme le prouve simplement le besoin qu’a Ruben de le ramener aussi près de lui que possible. A aucun instant Constantine ne tente d’aller contre cette idée, déjà occupé à négocier la façon dont ils passeront les heures à venir. « Rose… » La plainte est faible, pour ne pas dire inexistante. Il mime de se montrer raisonnable alors qu’il n’en est rien, en témoigne l’autre contact physique qu’il initie lorsque son index trace une ligne invisible le long du cou d’Ambrose, pour mieux s’arrêter au bout de son menton. Il n’y avait pourtant pas à forcer quoi que ce soit pour qu’il pose son regard dans celui de Ruben. « Je t'ai demandé une chose et t’es pas capable de t’y plier, c’est ça ? » Ambrose aurait pu être destabilisé par de tels mots s’ils se trouvaient encore dans cet entre-deux ne portant pas de nom, mais en cet instant il n’en est rien, tel que le prouve le sourire amusé qu’il affiche désormais. “Et moi j’ai pas dit que j’obéirais.” Il n’en fait qu’à sa tête et agit selon ses propres règles seulement, ce n’est pas une nouvelle.

« Dormir, Ambrose. » Il cède. Il joue à l’homme raisonnable, il tente de faire croire qu’il dicte les règles et surtout les limites, mais il cède. Le sourire d’Ambrose grandit un peu plus encore, même s’il doutait que ce soit possible. « Dormir, seulement. » Il dit une chose et en fait une autre, témoigne la marque de ses lèvres contre le cou du plus jeune, plus réellement capable de donner le change alors qu’il lutte pour ne pas se laisser aller trop facilement aux souvenirs d’une histoire qui, il le sait, ne pourra pas exister à nouveau. “Dormir, Ruben.” Il répète avec amusement. Il a été le premier à statuer la règle, et il a surtout été le premier à souhaiter ne pas aller trop loin, déjà bien conscient qu’embrasser Ruben et ranimer de vieux souvenirs était une mauvaise idée. Ambrose ne compte pas aller plus loin ; ou du moins il ne compte pas initier une telle suite. Si cela venait de Ruben, cependant, il serait le premier à dire que ce n’est pas de sa faute et surtout qu’il n’a pas été le plus faible des deux. Et comme à chaque fois, le chirurgien ne tarde pas davantage avant d’enlever tous ses vêtements, clamant à qui veut bien l’entendre qu’il ne sait pas dormir avec le moindre bout de tissu. Cette scène n’a rien de nouvelle pour le plus jeune, qui se contente d’esquisser un rire fin juste derrière lui. Il n’a pas changé. Malgré toutes les années écoulées, rien n’a changé. « T’as dit comme avant, alors littéralement comme avant. » - “T’es qu’un allumeur, Ben.” Il note avec humour sans le lui reprocher. Ambrose retire son propre t-shirt en même temps qu’il se rapproche du lit et, une fois aux pieds du lit, il retire son pantalon, gardant de son côté un dernier bout de vêtement: dormir, Ruben.

Malgré ses remarques, il ne se fait pas prier pour se frayer un chemin jusqu’à ses côtés. « Une seule main baladeuse et je te pousse du lit, je te préviens. » Il pouffe cette fois-ci de rire sans savoir se retenir. “Tu parles à moi ou t’essaies de te convaincre, là ?” Des deux, Ruben a été le seul à tenter de mettre à mal les dernières barrières, là où Ambrose jure s’être contenté de l’embrasser. « Tu peux regarder mais pas toucher. » Son esprit de contradiction le pousse à bousculer légèrement l’épaule du Hartfield, certain que ce n’est pas le genre de toucher qui vient de lui être interdit. “Fais au moins semblant de croire que t’appartiens au commun des mortels.” Et qu’il n’est pas la chose la plus désirable qui puisse exister en ce monde, au point où rien ni personne ne saurait y resister. Quand bien même cela a une part de vérité à en juger par le regard qu’Ambrose porte éternellement sur lui. « Y’a onze nouveaux tatouages depuis la dernière fois, si tu veux trouver lesquels. » Il n’est pas supposé toucher, mais Ruben l’invite tout de même à le faire. “Tu joues avec le feu, Ben.” Il souffle, son regard détaillant pourtant les nouveaux tatouages en question, incapable d’être pleinement raisonnable. Il n’a pas besoin de réfléchir pour savoir lesquels sont nouveaux. Ambrose se montre plutôt raisonnable à sa façon, abandonnant sa contemplation pour plutôt trouver sa place près de Ruben, son dos s’imprégnant de la chaleur du torse du chirurgien. “Tu le regretterais plus que moi.” Finit-il par souffler en prenant la main de Ruben et joignant ses doigts aux siens. Être raisonnable ne lui amène pas plus de bonheur que l’inverse, et même au contraire, mais il sait que Ruben a tout à y perdre de son côté - bien qu’il serait le premier à en jurer qu’il n’en parlera à absolument personne.

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Le sourire taquin qui étirait les lèvres de Rose en cet instant n’avait rien pour aider Ben à être un brin remonté contre lui; comme si, évidement, ce n’était pas lui-même le soucis dans cette situation. Après tout, Ambrose pouvait agir comme bon lui voulait, là où ce n’était pas le cas de Hartfield - et pourtant, c’était ce dernier qui ne faisait rien pour que les choses se tiennent parfaitement à carreaux. « Et moi j’ai pas dit que j’obéirais. » Il leva les yeux au ciel, secouant quelque peu sa tête. « C’est peut-être ça le problème. » A d’autres, Ben, à d’autres. Il avait beau être le premier à avoir demandé à Rose ne pas entrer dans son jeu, il était également le premier à montrer quelles règles comportaient des failles, pouvaient être contournées. Après tout, ils pouvaient se permettre de dormir ensemble ce soir: cela ne brisait aucune règle pré-établie de façon implicite avant la soirée. « Dormir, Ruben. » - « Bien. » Au moins, ils étaient tous les deux d’accord sur les bases que devaient comporter les prochaines heures - jusqu’à temps qu’Ambrose soit obligé de s’arracher à cette parenthèse qu’ils s’étaient permis de créer alors qu’elle n’aurait surement jamais dû exister jusque maintenant.

Ruben n’avait jamais promis, à aucun moment, de s’y tenir en n’agissant pas comme il le faisait d’ordinaire, et comme il l’avait toujours fait: « T’es qu’un allumeur, Ben. » Il entendit l’humour qui perçait dans les mots de Constantine; bien sur que ce type de réaction n’allait pas l’aider à justement moins l’être, allumeur. Il ne vivait que pour ce type de regard, pour ce type de réaction à son encontre, Ruben. Et surtout: il connaissait son public. Alors bien sur qu’Ambrose ne mit qu’une poignée de secondes pour le rejoindre sur le lit, et bien sur que de son côté il n’eut pas autant d’audace que le chirurgien - ce type d’image, rappelant certains souvenirs, ajouta une pointe de nostalgie invisible pour un regard ne sachant observer dans le sourire de Ben. « Tu parles à moi ou t’essaies de te convaincre, là ? » Il fut à ça de lui tirer la langue, tant il n’était pas nécessaire pour le brun de relever à haute voix ce type de détail. Bien sur que c’était lui-même qu’il tentait de convaincre en cet instant - mais il n’allait pas non plus l’avouer, il ne fallait pas rêver. « Rigole si tu veux. » Il ne savait garder un visage sérieux de son côté non plus, ceci dit. Il était de toutes façons bien trop occupé à abattre une carte qui n’avait pas besoin d’être dévoilé, jouant avec les souvenirs de façon bien trop dangereuse et ajoutant des éléments d’un présent dont ils faisaient de nouveau tous les deux partie. Ils n’étaient pas ce qu’ils avaient pu être, mais ce n’était pas pour autant qu'il pouvait s’amuser quelque-peu - en témoignait le sourire qu’ils portaient tous deux, alors qu’Ambrose bousculait légèrement son épaule pour aller exactement à contre-courant des mots de Ben tout en restant dans la limite de ce qui était permis. « Fais au moins semblant de croire que t’appartiens au commun des mortels. » Un petit rire siffla entre les lèvres de Ruben. « Bien sur. » Comme si c’était là dans ses habitudes, comme si c’était quelque-chose d’à moitié vrai surtout; il en profita pour basculer sur le côté, s’allongeant sur le lit à la manière dont les Dieux grecs avaient l’habitude de s’allonger pour qu’ensuite quelqu’un puisse les nourrir de grappes de raison ou… - non, c’était là une très mauvais idée et un jeu vers lequel glisser devenait réellement dangereux.

Ce fut désormais dans cette position, gardée pour l’effet théâtral dans tous les cas, qu’il enchaîna sur l’autre jeu en cours, initié par lui-même: chercher les nouveaux tatouages apposés à même sa peau. « Tu joues avec le feu, Ben. » Il laissa son regard accrocher celui de Rose. « Te brûle pas alors. » Parce-qu’il l’avait déjà prévenu que ce n’était pas un jeu auquel il devrait jouer, duquel il n’aurait même pas du tenter de connaître les règles. Même Hartfield ne savait que trop quelles étaient ces dernières, les révisant au fur et à mesure que les situations se présentaient à lui. Finalement, l’un des deux bruns sachant réellement se montrer raisonnable - une fois de plus, ce n’était pas celui qui clamait haut et fort qu’il devait l’être, comme si c’était nécessaire de le souligner là -, Ambrose finit par s’allonger à son tour, venant se glisser contre le corps de Ben. Ses doigts accrochant ceux du chirurgien, son dos se collant contre le sien. « Tu le regretterais plus que moi. » Peut-être qu’il laissa échapper un soupire qui comportait un lot important de reconnaissance, en cet instant: il avait beau faire le fier et bomber le torse, il était effectivement celui des deux qui le regretterait le plus. Passant son bras et leurs de mains entremêlées autour des hanches de Rose pour le serrer tout contre lui, glissant son visage dans le creux de son cou, Ben déposa un baiser contre sa peau. « Je sais. » Qu’il souffla, avoua à demi-mots, finalement. Il le savait particulièrement bien étant donné que c’était là un jeu qu’il pratiquait depuis de longs mois désormais, dans un secret absolu - ou presque, mais ce détail là n’était pas un auquel il voulait penser en cet instant. Non, retrouver Ambrose était la scène sur laquelle il souhaitait fermer les yeux pour aujourd’hui, alors qu’il savait pertinemment que c’était la seule fois où les choses se passeraient de cette façon là; car une fois qu’ils seraient de retour en ville, ce qui s’était passé ou aurait pu se passer au sein du festival resterait dans le désert, et ils reprendraient leurs habitudes. Ambrose avait du boulot, surement d’autres chats à fouetter que de regarder Ruben avec des yeux de biche quand ce dernier levait le coin de sa bouche en un sourire indécent. « Dors bien, Rose. » Peut-être qu’il se permit également de passer l’une de ses jambes à travers celles du jeune homme, cherchant le contact de sa peau à lui contre la sienne au maximum. Il regretterait dans tous les cas demain, mais au moins il limitait les dégâts pour ce soir - et pas grâce à lui seul, mais grâce à celui dont la respiration se faisait davantage ralentie au fil des minutes entre ses bras.