@Itziar Cortés de Aguilar

“T’es sûr ? Sinon je peux chercher encore un peu, mais je me dis que si on a une autre solution qui peut fonctionner, ça nous évite de perdre du temps. - Tu veux déjà te débarrasser de moi le plus vite possible ?” Jonah sourit, soulignant son trait d’humour et d’autodérision. Il n’était pas le binôme le plus efficace du monde, il en avait conscience. Et peut-être qu’au fond, la blague ne faisait que masquer grossièrement sa crainte qu’Itziar ne l’apprécie pas et ne réponde pas à son besoin d’être aimé d’absolument chaque personne qu’il croisait. S’il rattrapait la situation, il avait des chances de gagner des points, ce pourquoi la recherche de la boussole fut annulée au profit d’une autre solution : l’orientation grâce au soleil. Heureusement, la jeune femme avait l’heure. Elle comprit rapidement où le Fletcher voulait en venir. Faute d'être d'excellents astronomes en plus d’être de piètres aventuriers, la direction qu’ils déduisirent était approximative.

Ils commencèrent à marcher, bien forcés d’avoir confiance en leurs capacités de déduction. Le craquement sous le pied d’Itziar laissa Jonah un peu perplexe, mais il comprit rapidement ce qui s'était passé. Regardant l'aiguille qui pointait toujours dans la bonne direction malgré le verre brisé, Jonah lâcha un petit rire ironique. "Tu vois ? On en avait plus besoin !" Ils la ramassèrent quand même, avec l’appréhension de se faire taper sur les doigts par les instructeurs à leur arrivée pour avoir bousillé du matériel.

Ils continuèrent à avancer, maintenant confiants qu'ils se dirigeaient vers le bon endroit. Au fur et à mesure qu'ils progressaient, Jonah prit la parole. "Pourquoi tu t’es inscrite à cet atelier ?" Pour impressionner les potes au camping ? Se sentir plus proche de la nature ? Rechercher le bonheur ? L’âme soeur ? “Moi je voulais juste améliorer mon sens de l’orientation pour me repérer dans Brisbane sans Google Maps.” plaisanta-t-il histoire de faire la conversation. Vivant là depuis plus de vingt ans, il connaissait déjà bien des endroits par cœur.

Win : Ils arrivèrent au grand arbre où poussaient des pommes de pain géantes. Définitivement la bonne direction !
So close : Le ventre de Jonah se mit à gargouiller de manière très sonore. Il n’aurait pas dû sauter le petit déjeuner avant de se prendre pour Indiana Jones.
Fail : “Regarde, le ciel !” Jonah pointa une flopée de petits points noirs au-dessus d’eux. Pas une nuée d’oiseaux, pas des mouches, mais… une pluie d’araignées !

La remarque de Jonah la fait rire. Elle n’avait pas pensé à ça une seule seconde. Son envie de finir rapidement n’était en rien motivée par une quelconque envie de se débarrasser de lui. “Pas du tout, c’est juste que je préférerais largement passer du temps avec toi à boire un coup au camp de base plutôt qu'à tourner en rond au milieu de nulle part.” Lui répond-elle sérieusement. Ce n’était pas sa présence le problème. C’était plutôt le contexte en lui-même. Bien qu’elle ne parlerait pas vraiment de problème non plus. Après tout, elle était là de son propre chef. Elle préférait juste se focaliser sur l’activité, réussir à la terminer avant que toutes les vilaines bestioles qui peuplent la nature australienne ne décident de sortir de leur cachette pour s’occuper de leur cas. Rien de plus. D’autant plus que le jeune homme se révèle avoir de très bonnes idées et alternatives leur permettant de se repérer malgré la perte de leur boussole. Boussole sur laquelle Itziar finit par mettre le pied. Comme quoi, la légende qui dit qu’on retrouve ce qu’on a perdu quand on ne cherche plus est vraie. Un peu tard du coup, pour la pauvre boussole qui semble tout de même encore fonctionnelle malgré la vitre brisée. “Comme quoi … Peut-être qu’on aurait pu s’en passer dès le début. Utiliser la montre et la carte pour se repérer, ça revient au même visiblement.” Répond-elle en riant. C’était un peu plus compliqué que ça quand même. La boussole était plus précise que la montre et pouvait également être utilisée en cas de mauvais temps alors que le soleil lui serait aux abonnés absents.

C’est donc confiante et avec un regain d'enthousiasme qu’elle continue d’avancer avec Jonah dans la direction qui doit être la bonne, à la recherche de leur prochain point de repère. “Hm .. Pour enfin percer le mystère du fonctionnement des boussoles ?” Répond-elle en plaisantant avant d’ajouter. “Non, en réalité, parce que j’aime bien me balader dans la nature et que bien qu’il y ait plein d’appli sur le téléphone pour se repérer, on sait jamais, s’il y a plus de batterie ou quoi. Puis ça reste intéressant de comprendre comment se débrouiller sans l’aide de la technologie.” Elle n’utiliserait sans doute pas de boussole, ni de carte au format papier pour se balader dans les rues de Brisbane, mais pour explorer les grandes étendues australiennes, cela pouvait être un bon back up plan. “C’est tout à ton honneur, j’avoue que pour la ville, je vais m’en tenir à Google map, j’crois qu’il faudrait un atelier en plus pour se repérer DANS la ville.” Plaisante-t-elle, continuant toujours de marcher, jusqu’à ce que l’estomac de son binôme ne décide de se faire entendre. “T’as faim ?” Lui demande-t-elle, s’arrêtant pour ouvrir son sac à dos.

Lancer de dés:

@Itziar Cortés de Aguilar

“Hm .. Pour enfin percer le mystère du fonctionnement des boussoles ? plaisanta Itziar, arrachant un sourire à Jonah qui n’était vraiment pas un public difficile en termes d’humour. [...] Puis ça reste intéressant de comprendre comment se débrouiller sans l’aide de la technologie.” Il approuva d’un signe de tête. "On sait jamais quand on aura besoin de revenir aux bases," fit-il remarquer avec un clin d'œil. Au fond, c’était avant tout à cela que servaient les ateliers de survie, et le survivalisme de manière générale ; l’idée n’était pas tant de se paumer sciemment dans la nature pour le plaisir de se mettre en danger, mais d’être préparé à tous les scénarios, au cas où. Le Fletcher, qui regardait beaucoup trop de films pour son propre bien, était plus rassuré à l’idée d’avoir des notions dans tous les domaines au cas où la fin du monde arriverait de son vivant. Il n’en était pas encore au point d’acheter un abri anti-atomique et y stocker l’équivalent d’une vie entière de plats en conserve, non. Cela lui permettait juste d’avoir l’esprit tranquille. Cette histoire de GPS en ville n’était qu’une simplification de la réflexion globale, disons. “C’est tout à ton honneur, j’avoue que pour la ville, je vais m’en tenir à Google map, j’crois qu’il faudrait un atelier en plus pour se repérer DANS la ville.” Ce n’était pas pour rien que l’on appelait aussi cela ‘la jungle urbaine’ après tout. “Avec des ateliers comme ‘trouver un appart’, ‘survivre aux bouchons’, ‘remplir le frigo sans se ruiner’...” Et puis, au moment où ils évoquaient la nourriture, l’estomac de Jonah se rappela à lui avec un grognement embarrassant. “T’as faim ?” Vu son long sourire pincé qui haussait ses pommettes comme un enfant pris d’un petit creux en plein cours de maths, oui. “Pt’être bien que j’ai fait l’impasse sur le petit déj.” avoua-t-il sans en être fier. Quelle idée de ne pas faire le plein de calories avant de crapahuter ainsi. Bear Grylls ne serait pas fier. Les barres de céréales sortirent du sac d’Itziar, suscitant un sentiment de gratitude anticipée dans l'estomac de Jonah. “T’en veux une ? Je te laisse même le choix du goût : chocolat ou beurre de cacahuètes.” Le choix n’avait rien de difficile et Jonah s’écria avant de le réaliser ; “BEURRE DE CACAHUÈTES !” Son éclat de voix fit s’envoler une flopée d’oiseaux. Surpris par la puissance en décibels de sa propre exclamation, le jeune homme tourna au rouge tomate. “Hm, pardon, j’veux dire, toi, choisis ce que tu préfères, j’aime les deux.” Ce qui n’était pas un mensonge. Il s'avérait simplement qu’il avait une nette préférence pour le beurre de cacahuètes qu’il avait visiblement besoin d’apprendre à maîtriser.

Win : Jonah prend donc l’une des barres aux céréales et l’engloutit en dix secondes max, ce qui le calera pendant une poignée de minutes.
So close : En attrapant la barre de céréales, ses mains moites font glisser l'emballage ouvert qui tombe par terre. Si on en croit la règle des cinq secondes, en se ruant dessus assez vite, Jonah pourra quand même avoir l’esprit tranquille en mangeant le snack.
Fail : Sorti de nulle part, un grand oiseau fonça sur eux et attrapa la barre aux céréales de Jonah dans ses serres. Pas d’encas pour lui aujourd’hui.

Au milieu de la nature, on n’était jamais trop prudent. C’était de ce principe que partait Itziar et c’est pour cela qu’elle hoche la tête de haut en bas à la réponse de Jonah. Ils n’étaient jamais à l'abri d’une panne de batterie, d’une absence de réseau ou tout autre désagrément les obligeant à se débrouiller sans technologie. Après tout, si elle lançait son téléphone à la moindre frayeur, comme elle avait lancé la boussole, il était effectivement plus judicieux de maîtriser d’autres techniques d’orientation. Juste pour assurer ses arrières et se préparer à toute éventualité. Il manquerait peut-être juste une technique pour se repérer avec les étoiles, mais chaque chose en son temps, ça, c’était tout de même un bon cran au-dessus et ils n’avaient toujours pas rejoint leur point de départ. Cependant, ils semblaient enfin marcher dans la bonne direction et être bien lancés. L’occasion d’échanger quelques familiarités et de ne pas contenter de chercher leur chemin. “J’crois que tu tiens un concept-là. C’est un peu l’équivalent de ce stage qu’on est en train de faire, mais la version citadine.” Déclare-t-elle en plaisantant avant d’ajouter. “Franchement, je crois que je m’y serais inscrite direct si un tel truc existait quand je suis arrivée ici.” C’était vrai. Elle s’était retrouvée confrontée à tout un tas de difficultés qu’elle n’avait pas forcément envisagé quand elle avait décidé de mettre les voiles. Une fois à Brisbane, pourtant, il avait fallu se débrouiller avec l’immobilier avant toute chose. Elle avait eu un budget limité à l’époque et si elle avait pu réserver un Airbnb au départ, le but avait été de le quitter rapidement pour économiser de l’argent. Seulement, elle n’avait pas de travail, ce qui avait rendu sa quête plus compliquée. Rien que cela, couplé à la barrière de la langue, avait relevé du défi. Un peu d’aide sous forme d’ateliers ne lui aurait donc pas fait de mal.

Tout comme manger ce matin n’aurait sans doute pas fait de mal à Jonah et son estomac. Ce dernier décidant de se manifester de la moins discrète des manières. “Mais quelle erreur de débutants !” Lui répond-elle en riant avant d’ouvrir son sac à dos pour en sortir deux barres de céréales. Elle lui en propose une, naturellement. Ils ont encore besoin d’avancer et il ne serait pas en mesure de le faire s’il finissait en hypoglycémie. Elle, elle se fiche bien de manger celle au chocolat ou au beurre de cacahuètes, elle aime les deux, n’a pas de préférence particulière. Jonah, lui, semble avoir un avis bien tranché sur la question et elle ne peut s’empêcher de rire. D’autant plus lorsqu’il se ravise finalement et l’invite plutôt à choisir elle-même. “Je m’en fiche moi. Tiens. Prends beurre de cacahuètes, j’ai cru comprendre que tu aimais bien, mais je me trompe peut-être.” Répond-elle en lui tendant la barre, le regardant ensuite l’engloutir en quelques secondes. Alors qu’elle, elle n’avait même pas eu le temps d’ouvrir sa propre barre. “Hm .. Tu veux la deuxième peut-être ?” Demande-t-elle, en essayant de ne pas rire. “J’ai l’impression que la première va pas te caller longtemps. Ça ne me gêne pas de te la donner, j’ai mangé ce matin.” Ajoute-t-elle et oui, elle se basait exclusivement sur la vitesse à laquelle il avait ingurgité la première.

@Itziar Cortés de Aguilar

Le temps d’une pause, une fois à l’arbre aux pommes de pain géantes, Jonah s’était assis sur une souche et contemplait l’inéluctable crise d’hypoglycémie qui l’attendait s’il marchait encore deux mètres sans rien avaler. Itziar était sa sauveuse, préparée à cette éventualité elle avait en stock quelques snacks. Une première barre de céréale allait faire le job pour un petit moment, mais pour un grand gaillard comme lui, c’était fort peu malheureusement. “Hm .. Tu veux la deuxième peut-être ?” elle proposa. Il n’osa pas acquiescer, trop poli. “J’ai l’impression que la première va pas te caller longtemps.” Elle avait bien raison. “Ça ne me gêne pas de te la donner, j’ai mangé ce matin.” Pas besoin de le dire deux fois, Jonah faisait fi de la politesse de façade et accepta la seconde barre de céréales et la goba aussi rapidement que la première, laissant planer le doute sur l'existence de la moindre mastication dans le processus.

Grâce à l’astuce de la guidance avec le soleil et les ombres projetées grâce à celui-ci, le binôme était à peu près certain de ne plus se perdre. En tout cas, ils avaient trouvé la bonne direction et n’avaient plus qu’à s’y tenir. Ils étaient en retard, mais sur la bonne voie. Avec un peu de chance, ils arriveraient au point de rendez-vous avant que les instructeurs et les autres groupes ne soient tellement morts d’inquiétude qu’ils leur enverraient les secours. Ils examinèrent la carte avec une attention méticuleuse, puis déterminèrent leur nouvelle trajectoire. Avec un sens renouvelé de détermination, ils reprirent leur chemin, espérant rattraper le temps perdu. Ils n’allaient quand même pas laisser tomber.

Ils marchèrent rapidement, poussant leur corps à l'effort alors que le soleil descendait progressivement. Après ce qui leur sembla être une éternité, ils finirent par atteindre le point de rendez-vous. Les autres équipes étaient déjà là depuis un moment, assises autour d'un feu de camp et partageant des histoires de leur journée. Quand Jonah et Itziar arrivèrent, les regards curieux se tournèrent vers eux. Ils étaient essoufflés, le jeune homme couvert de la boue dans laquelle il était tombé cinq cent mètres plus loin, et de sueur, mais ils avaient réussi. Leur retard avait été évident pour tous, mais ils ne semblaient pas gênés. Itziar s'approcha du groupe et expliqua brièvement les péripéties de leur journée, y compris la boussole cassée. Les sourires amusés ne pouvaient pas entacher le sentiment d’accomplissement de Jonah. Il échangea un regard complice avec Itziar, reconnaissant que cette journée, bien que chaotique, avait été une aventure mémorable.

Fini