L’atmosphère change en un claquement de doigt. Les lumières ne se sont pas tamisées, mais les yeux de Joseph sont tant accrochés à ceux de Maritza que tout devient noir autour d’elle. Il attend une confession qu’il est certain d’entendre parce qu’ils sont deux adultes qui n’en n’ont plus rien à faire des secrets, des cachoteries, des détours. Ce soir, il n’est pas question de commettre un crime, seulement de profiter de ce qu’ils peuvent encore accueillir. « On n'est plus ensemble. Depuis des années mais... » Penchant la tête sur le côté, il est soudé à ses lèvres et aux prochains mots qui ne tarderont pas à venir clôturer ses doutes. « … ce sera jamais vraiment terminé avec lui. » Il comprend le sentiment. Même s’il a vécu sa vie entière en solo, Joseph n’a jamais été à l’abris des histoires de cœur. Il est tombé amoureux à de nombreuses reprises et même si les années se sont écoulées et les plaies se sont cicatrisées, il repense encore à toutes ces femmes qui l’ont sorti de sa route. Des chapitres de sa vie aux pages qui résistent à l’eau et au feu. « J’comprends. » Qu’il annonce d’une voix calme. Il ne sera pas son psychologue (il n’en a pas les moyens), mais il peut l’accompagner dans ses réflexions. Si une histoire d’amour doit se présenter à lui, il la chérira au creux de sa poitrine. Si le destin n’en voulait pas, alors il ne se battrait pas contre lui. Après tout, Joseph n'a jamais eu le temps de plaindre son célibat, d’abord trop occupé à survivre, et désormais trop occupé à recommencer depuis le début pour tenter de seulement vivre. Ce qu’il peut encore espérer recevoir avant de mourir, c’est du plaisir et des moments importants. « J'ai envie de t'embrasser. » À cette confession, le dos du garçon se redresse. Il ne la dévisage pas, apprécie les mots dénudés et crus, ceux qui ne lui laisseront pas le temps d’élaborer des théories erronées. Il prend la jeune femme au sérieux, ne se permet pas de moquer ses envies. À vrai dire, l’idée de l’embrasser lui a aussi effleuré l’esprit. Il ne peut pas nier le fait que quelque chose de naturel se produit entre eux, comme des plantes grimpantes qui trouvent leur chemin jusqu’au toit des maisons. C’est simple. Il n’a pas mal. Il n’a plus mal. Ça reviendra demain matin, mais qu’est-ce que ça lui apporterait de se soucier du lendemain ? « J'ai envie de t'embrasser mais ça ne serait pas juste si je le faisais. Pas juste parce que demain je ne serai plus là. » Oh, l’histoire de sa vie. Cette pensée lui fait esquisser un sourire. « Merci d’t’en soucier. » Il faut beaucoup de maturité pour renoncer à la facilité. Oui, ils pourraient s’embrasser, s’entrelacer, danser, mais ça ne viendrait pas sans suite. Enfin, pas lorsque le respect est placé en priorité. Hésitant, Joseph baisse les yeux pour mieux réfléchir. Peut-être que ce mouvement envoie une mauvaise impression à Maritza, qui décide de changer de sujet, de rediriger les feux des projecteurs sur le dégât dans la cuisine. Joseph ouvre la bouche en O, surpris de la voir ainsi s’agiter, puis quand elle propose de partir. « Si c’est c’que tu veux, j’vais jamais t’en empêcher. » Il y a un mais qui flotte entre eux. Un petit mais, dont Joseph hésite encore quant à la nature à lui donner. Se rapprochant de Maritza pour annuler la distance qu’elle avait installé entre eux pour le protéger lui, il se permet : « Mais j’crois en l’importance du moment présent, parc’qu’on sait jamais vraiment si on va s’réveiller demain matin. » Combien de fois a-t-il pensé que son heure était venue ? Il a arrêté de compter, ses doigts ne supportaient plus le nombre. « Tu peux partir, ou tu peux créer un souvenir important, sans conditions. » Il secoue la tête, hausse mollement les épaules. « J’ai pas d’attentes. Ça fait longtemps qu’j’en ai plus. Alors si j’peux simplement te rendre heureuse une soirée, ça m’f’rait plaisir. » C’est à elle de choisir. Les cartes sont entre ses mains.
ÂGE : 51 ans SURNOM : Mari, Za' STATUT : Divorcée. Elle a été mariée pendant 10 ans avec Sergio. En 2002 ils signent les papiers du divorce mais depuis la mère de famille n'a jamais refait sa vie. MÉTIER : Femme de ménage, nourrice, cuisinière, en gros, elle est bonne à tout faire. LOGEMENT : #32 Parkland Boulevard (Spring Hill) POSTS : 682 POINTS : 0
Dans cette cuisine, Maritza se sentait minuscule et soudainement bien stupide. Seule en compagnie de Jo, elle avait l'impression d'être redevenue une enfant qui avait fait une grosse bêtise ou qui allait en faire une. Les confessions glissaient hors de ses lèvres sans qu'elle ne puisse véritablement les contrôler. Lorsqu'elle avoua à voix haute qu'elle serait toujours liée à Sergio et que jamais elle ne pourrait tirer une croix sur lui, elle eut envie de disparaître. Malgré tout ce qu'ils avaient vécu, malgré tout ce qu'il lui avait fait subir, malgré le nombre de fois où il avait brisé son cœur puis l'avait piétiné, la Gutiérrez restait éperdument amoureuse de Sergio. Alors lorsque Jo lui dit qu'il comprenait, elle avait relevé le visage dans sa direction et avait senti son ventre se nouer. Elle s'en voulait terriblement de le mettre dans une telle position, de se confier à cet homme qu'elle ne connaissait finalement pas. Deux fois. Ils s'étaient vus deux fois et à chaque fois il avait dû faire face aux crises existentielles de la mexicaine, à chaque fois elle avait vidé son sac auprès de lui sans prendre garde à ce qu'il pouvait penser ou non. Comme si cela n'était pas suffisant, elle avait continué, avouant sans détour qu'elle avait envie de sentir ses lèvres contre les siennes, la chaleur de sa peau contre la sienne. C'était d'un égoïsme sans nom. A peine lui avait-elle dit qu'elle avait envie de l'embrasser qu'elle l'avait vu se redresser. Elle s'était maudite d'avoir dévoilé le fond de sa pensée, de lui avoir fait espérer quelque chose qui n'aboutirait à rien alors elle s'était empressée de lui dire la vérité : Elle ne pourrait rien lui promettre parce que lui comme elle savaient désormais que son cœur était déjà pris. Le petit sourire qu'il esquissa en lui disant : « Merci d't'en soucier. » piqua Maritza qui avait l'impression que le sarcasme émanait désormais du jeune homme. Elle ne lui en voulait pas, loin de là. Elle n'avait après tout que ce qu'elle méritait. Elle avait flirté toute la soirée avec lui – involontairement ou non – pour lui avouer qu'elle en aimait toujours un autre et pour ensuite lui parler de baiser. Il n'y avait aucun sens à ce qu'elle avait fait et elle craignait par-dessus tout qu'il pense qu'elle se jouait de lui ou qu'elle le manipulait. Ce n'était pas le cas. Il baissa les yeux et à cet instant-là la mexicaine se réveilla. Il fallait qu'elle parte, qu'elle quitte cette pièce dont l'atmosphère s'était brusquement alourdie. Cette décision lui semblait être la meilleure à prendre, la plus logique et saine pourtant, alors qu'elle pensait qu'il en serait ravi, Jo parut surpris. « Si c’est c’que tu veux, j’vais jamais t’en empêcher. » Elle le regarda sans savoir quoi dire, sentant qu'il n'avait pas fini de parler. Lorsqu'elle le vit s'approcher d'elle et réduire la distance qui les séparait, son cœur se mit à battre à tout allure alors qu'elle plaquait son dos contre l'évier. Ils étaient si proches désormais qu'elle n'était plus capable de regarder ailleurs que dans ses prunelles qui ne la lâchaient pas du regard. « Mais j’crois en l’importance du moment présent, parc’qu’on sait jamais vraiment si on va s’réveiller demain matin. » Elle déglutit avec difficulté, se rappelant non sans douleur ce jour où elle avait appris que Maria n'était plus de ce monde. La veille la petite se portait bien, mais le lendemain plus rien. Le souffle de la vie l'avait quitté sans crier gare. « Tu peux partir, ou tu peux créer un souvenir important, sans conditions. » Les yeux de la brune se plissèrent alors que sans même s'en rendre compte elle posait avec délicatesse une main sur le torse du jeune homme. Leur proximité l'empêchait de réfléchir, son odeur chatouillait ses narines, invitant son visage à se rapprocher un peu plus de lui. Maritza tanguait presque, se balançant entre son désir et sa raison. La ligne à franchir était fine mais avait-elle le droit d'agir ainsi ? « J’ai pas d’attentes. Ça fait longtemps qu’j’en ai plus. Alors si j’peux simplement te rendre heureuse une soirée, ça m’f’rait plaisir. » Ses sourcils se froncèrent quelque peu à ces mots. Elle avait l'impression qu'il se laissait faire par charité. Qu'il se considérait comme un objet. Maritza ne voulait pas se servir du jeune homme, ne voulait pas profiter de lui. Il n'était pas rien. Dans un murmure elle parvint à souffler : « Mais toi ? » Serait-il heureux lui si elle l'embrassait ? Ou se sacrifiait-il pour son bien-être à elle ? Etait-il si désillusionné qu'il ne pensait plus avoir le droit de mériter plus ? Son regard n'avait pas quitté le sien tandis que ses doigts étaient toujours posé contre son torse. Lentement la mexicaine approcha un peu plus, réduisant à néant la distance qui les séparait. Elle se mit sur la pointe des pieds et glissa son visage jusqu'au sien. Son nez frôla celui du garçon sans savoir si elle devait le faire ou non. « On n'a qu'une seule vie c'est bien ça ? » demanda-t-elle plus pour elle-même que pour obtenir une véritable réponse. Finalement elle rompit le peu de distance qui perdurait encore entre eux deux et alors que ses lèvres se posaient avec tendresse sur celles de Jo, elle glissa ses bras autour de sa nuque. Les yeux clos, Maritza se laissait enfin totalement aller. Les saveurs du vin ainsi que le goût des lippes de Jo l'enlaçaient et pour la première fois depuis une éternité, elle se sentit libre et apaisée. Le baiser dura quelques secondes quand enfin elle le rompit. Elle colla son front au sien, garda les yeux fermés et murmura : « Ne m'en veux pas. » Parce qu'elle aurait aimé avoir plus mais qu'elle savait qu'elle ne pourrait pas lui rendre la pareille, parce qu'elle avait joué les séductrices pour finir par sans doute ressembler à une belle garce qui allait finir par disparaître.
made by black arrow
Cry me a river♛
You don't have to say, what you did, I already know, I found out from him Now there's just no chance, for you and me, there'll never be
Même si c’est quelque chose qui manque à Joseph, il n’est plus terrifié par les émotions d’un adolescent amoureux qui ne sait pas communiquer son amour. L’enfant a laissé placé à une adulte qui n’a plus rien à perdre et qui préfère dire les choses telles qu’elles sont ; sans détour, sans artifices, seulement la vérité prononcée dans ses mots les plus simples. Là où il se trouve dans sa vie, chanceux d’avoir survécu aux épreuves que la vie s’est obstiné à lui faire traverser avec un bateau à la coque brisée, il n’a plus le temps. Il cherche à redécouvrir une source de plaisir autrement, ses sens à moitié ravagés par tous les abus. Il ne pourra jamais offrir à Maritza ce qu’un homme peut donner, du moins, par la manière traditionnelle. Hélas, cela fait plusieurs années que le corps de Joseph ne répond plus aux stimulus, la faute de la cocaïne qui a éliminé les synapses responsables du plaisir. Il est mort en surface, à moitié à l’intérieur, mais il peut encore nourrir la flamme. Il le sent. C’est possible. Si sa compagne du soir a envie d’écrire un souvenir avec lui, il répondra présent. Autrement, il la laissera partir sans la retenir parce qu’elle ne lui doit rien du tout. « Mais toi ? » Ça le touche, qu’elle se soucie de lui. Il y en a peu qui le regardent. « C’est d’voir les autres heureux qui m’rends heureux, moi. » Il se confie en laissant flotter un suspens dans l’air, tandis que Maritza franchit la dernière distance qui les sépare. Naturellement, il vient effleurer ses côtés lorsqu’elle rapproche leurs visages pour le laisser sentir son parfum. Ses yeux se ferment, son souffle cherche le sien. « On n'a qu'une seule vie c'est bien ça ? » Elle ne lui laisse pas le temps d’acquiescer – alors qu’il l’aurait fait sans hésiter – qu’elle pose ses lèvres sur celles de Joseph, dont le cœur se gonfle immédiatement. L’échange ne fait aucune promesse, sauf celle de rapprocher deux âmes un peu perdues le temps que la petite aiguille de l’horloge fasse un tour complet. Des saveurs qu’il n’a pas goûtées depuis des années, le mélange d’alcool et de solitude, qui le fait souffler sa chaleur. Quand le baiser s’effrite, il n’insiste pas, garde son front collé à celui de Maritza, dont il a l’impression de pouvoir deviner les prochains mots avant qu’ils ne soient murmurés. « Ne m'en veux pas. » Il sourit avec douceur et soulève ses mains pour venir prendre la mâchoire de la jeune femme au creux de ses paumes. « Tu dois partir, c’est ça ? » Il demande sans jugement dans la voix, seulement une tristesse aussi bleue que son âme affaiblie. Si c’est d’un seul baiser dont elle avait besoin, qu’il en soit ainsi. Il aura été heureux de lui offrir ces secondes de répits en dehors des responsabilités, de la routine et de la pression.
ÂGE : 51 ans SURNOM : Mari, Za' STATUT : Divorcée. Elle a été mariée pendant 10 ans avec Sergio. En 2002 ils signent les papiers du divorce mais depuis la mère de famille n'a jamais refait sa vie. MÉTIER : Femme de ménage, nourrice, cuisinière, en gros, elle est bonne à tout faire. LOGEMENT : #32 Parkland Boulevard (Spring Hill) POSTS : 682 POINTS : 0
« C'est d'voir les autres heureux qui m'rend heureux, moi. » Les mots rebondissaient dans la boîte crânienne de Maritza alors que ses lèvres découvraient avec un plaisir surprenant et inattendu le goût de Joseph. Se sacrifiait-il toujours ainsi ? Ne pouvait-il être heureux d'une autre manière ? Elle aurait voulu en savoir plus, savoir comment et pourquoi il en était arrivé là. Jo semblait s'effacer derrière les autres, se faire passer en dernier, penser qu'il ne valait rien. Qu'il ne méritait rien. Cela nouait l'estomac de la mexicaine qui savait au fond d'elle qu'il se trompait. Il avait sans doute commis des erreurs par le passé pourtant la Gutiérrez restait persuadée qu'il était quelqu'un de bien, quelqu'un de bon, qui méritait mieux que tout ce qu'il avait présentement. Elle appuya un peu plus ses lèvres contre les siennes comme si elle tentait avec ce geste de lui faire comprendre le fond de ses pensées. Les doigts du garçon posés sur ses flancs la réchauffaient alors que peu à peu elle se laissait aller à ce moment de tendresse inespéré. Après quelques secondes néanmoins, elle mit un terme à cet échange. Sa respiration était quelque peu saccadée lorsqu'elle lui demanda de ne pas lui en vouloir. Elle évitait son regard autant qu'elle le pouvait mais bientôt elle sentit ses doigts prendre sa mâchoire afin de l'obliger à le regarder. Elle se pinça les lèvres lorsqu'il lui demanda : « Tu dois partir, c'est ça ? ». Elle sentit sa poitrine se serrer et sans détacher ses prunelles des siens, hocha doucement la tête de bas en haut. Oui, elle devait rentrer. Elle n'en avait aucunement envie mais elle savait que c'était ce qu'elle devait faire. Rester ici en sa compagnie ne ferait qu'accroître son sentiment de culpabilité. Elle ne culpabilisait pas d'embrasser un autre homme que Sergio, elle culpabilisait de le faire alors que son cœur appartenait à un autre. Joseph ne méritait pas que l'on se serve de lui ainsi. Alors qu'elle aurait dû se détacher du jeune homme, Maritza prit quelques instants pour poser son front contre sa poitrine. Elle ferma les yeux, laissa glisser ses bras dans le dos de Jo et se blottit contre lui. Ce moment ne se reproduirait plus, elle le savait parfaitement mais elle avait besoin d'un peu plus de temps en sa compagnie. Alors elle inspira profondément et quand elle se sentit prête le relâcha. Elle se recula d'un pas, hésita quelques secondes puis se mit sur la pointe des pieds afin de lui voler un dernier baiser fugace. Il avait été si rapide qu'il aurait pu s'apparenter à une sorte de mirage pourtant il existait.
Maritza finit par se détourner de Joseph qu'elle contourna. Elle retourna dans le salon, là où elle avait laissé son sac et le glissa sur son épaule. Elle le regarda une dernière fois et murmura : « Merci. Merci pour tout. » Pour son soutien, pour son oreille attentive, pour sa présence, pour sa compagnie, pour cette soirée. Pour ce baiser. Elle lui fit un petit sourire et se dirigea à la hâte vers la porte d'entrée. Alors qu'elle venait d'enfoncer la poignée et de l'ouvrir elle stoppa son geste, hésita quelques secondes puis se retourna une dernière fois : « Et Jo, tu mérites mieux que tout ça. » L'intensité de son regard ainsi que la fermeté dans sa voix indiquaient à quel point Maritza pensait ce qu'elle disait. Finalement elle franchit le seuil et claqua la porte derrière elle. Elle prit le temps de respirer à pleins poumons l'air frais de Brisbane et se rendit jusqu'à sa voiture, un sourire nostalgique et doux gravé sur son visage. Cela faisait une éternité qu'elle ne s'était pas sentie aussi bien et cela n'était pas pour lui déplaire. Elle ne devait cela qu'un seul homme. Qui aurait pu croire qu'il s'agirait de Jo, le coloc de sa fille ? Elle démarra sa voiture et sans un regard en arrière rentra chez elle, prête à se glisser sous ses draps, persuadée qu'elle finirait cette soirée dans ses rêves les plus profonds.
made by black arrow
Cry me a river♛
You don't have to say, what you did, I already know, I found out from him Now there's just no chance, for you and me, there'll never be