Épuisé mais heureux. Si le premier lui était familier, cela faisait longtemps qu’il n’avait pas ressenti le deuxième aussi intensément. Lucas se sent réellement heureux, encore rempli d’adrénaline. Les deux derniers jours avaient été difficiles, fatiguants, stressants, mais il ne s’était pas senti autant lui-même depuis un moment. C’était étrange à penser, puisque la tempête qui a touché Brisbane a été particulièrement violente, et de nombreuses personnes ont un proche à l’hôpital, ou bien accusent de pertes matérielles importantes, comme leur maison. Mais aider son prochain, sauver des vies ces deux derniers jours, avait été salvateur pour Lucas. Pendant ces dernières 48 heures - plus ou moins, il a du mal à se rendre compte - Lucas a été pompier, à nouveau. Aucune douleur, aucune crainte ne s’est mise en travers de son travail. Évidemment, il se doute que l’adrénaline qu’il a ressentie est derrière tout ça, et il n’est pas encore redescendu de son nuage. Il a fallu que son ancien capitaine, Joaquin, le force à s’arrêter et à rentrer chez lui. Il a dormi une poignée d’heure et ne ressent toujours pas la fatigue. Mais s’il y a bien une chose qui l’a convaincu de rentrer chez lui, c’est son chien Jazz. Il n’a même pas pris la peine d’enlever son équipement, sale par endroit, et a pris sa voiture en sortant de la caserne, direction chez Mabel. C’est à elle qu’il a confié ce qu’il aime plus que tout au monde et elle a accepté - malgré sa réticence et son manque d’expérience avec les animaux. Il ne voulait pas abuser de sa générosité, alors il s’était dit qu’il se doucherait après être passé chercher son compagnon à quatre pattes chez son amie. Lorsqu’il gare sa voiture devant la villa de son amie, il voit son chien gambader un peu plus loin. À peine met-il un pied en dehors de la voiture, que ce dernier le répère et court vers lui pour lui faire une fête digne de ce nom. Après plusieurs secondes de gros câlins et quelques léchouilles sur la joue, Lucas se relève, fait quelque pas jusqu’à la villa, avant de toquer à la porte-fenêtre. Mabel vient lui ouvrir, l’accueillant avec une tasse de café. « Salut, la star. », dit-il, en l’enlaçant rapidement. « Désolé, je suis pas très propre. » s’excuse-t-il, en se rendant compte de l’état dans lequel il se trouve. « Je voulais pas abuser en te laissant Jazz trop longtemps. » Il prend dans sa main la tasse que lui tend son amie. « Oh, merci beaucoup, je crois que j’en ai bien besoin. », la remercie-t-il, avec un sourire. Il fait quelques pas dans la maison, suivant Mabel jusque dans la cuisine, où elle était manifestement en train de préparer le petit-déjeuner de Rosie. « Ça été avec Rosie ? Pas trop difficile toutes seules toutes les deux ? », demande-t-il. Il sait que son amie était assez inquiète à l'idée de rester enfermée avec sa fille sans pouvoir sortir, et Lucas s'en voulait un peu de lui avoir imposé Jazz ainsi. Il espère néanmoins que l'expérience n'a pas été aussi terrible que la jeune maman l'a redouté.

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Lucas ne peut réprimer un léger rire lorsque son amie lui fait remarquer qu’il sent la tempête. Son étreinte lui apporte du réconfort et il comprend qu’elle a tout de même dû s’inquiéter un peu à son égard. Lui n’avait pas eu peur, mais il a parfois tendance à oublier l’inquiétude que son métier a toujours causé, d’une façon ou d’une autre chez ses proches : son frère, sa cousine, Greta, Mabel… Il accueille sa tasse de café avec plaisir. Jazz s’en donne à coeur joie dans le jardin - il doit en avoir bien besoin. Lucas culpabilise un peu d’avoir dû confier sa bête à poils à Mabel en catastrophe ; il la sait peu à l’aise avec les animaux, et elle était déjà certainement assez anxieuse à l’idée de gérer la tempête avec sa toute petite. Si seulement il avait pu le faire garder par Greta, il aurait pu ne pas lui imposer la garde Jazz. À la pensée de l’écrivaine, le trentenaire repense alors aux derniers messages échangés avec elle. Il se souvient avoir été assez ennuyé, perplexe et… un peu jaloux, en les lisant. La savoir avec son ex, confinée pendant la tempête, ne l’avait pas réjoui des masses, alors il a préféré ne pas y répondre toute de suite pour se concentrer sur son renfort à la caserne. Il sort son portable de sa poche, tandis que son amie répond à la question qu’il lui a posé quelques instants plutôt. L’écran refuse de s’allumer : plus de batterie. Perdu dans ses pensées, il a à peine entendu les questions posées par Mabel. « Hein ? », dit-il en levant le nez. Il range son portable dans sa poche, et essaie de se souvenir des derniers mots de son amie. Ah, oui, les blessés. Accoudé contre le comptoir de sa cuisine, il avale une gorgée de café, avant de lui répondre. « Oui, pas mal de blessés, effectivement… Mais par chance, ce ne sont pas des blessures très graves. La plupart ont pu être soignés à la caserne et n’ont pas eu besoin d’être envoyés à l’hôpital. », explique-t-il. Il finit sa tasse, et se dirige vers l’évier pour la nettoyer. « Désolé de t’avoir laissé Jazz un peu en catastrophe. Je te revaudrai ça, c’est promis. », lui dit-il, en guise de remerciement. Il ouvre le robinet d’eau, et commence par se remonter les manches. Mais lorsqu’il remonte sa manche droite, une douleur assez vive fait tressaillir son épaule. « Ouch. », gémit-il, posant sa tasse vide, sur le bord de l’évier. Il croise le regard inquiet de Mabel. « Je suis sûr que c’est rien. », dit-il. A vrai dire, il n’en savait rien. Il avait emmagasiné tellement d’adrénaline ces deux derniers jours qu’il n’avait pas dû sentir qu’il s’était blessé, mais le fait de se poser plus calmement et la fatigue accumulée ont enfin permis à son cerveau d’envoyer les bons signaux à son corps. Il palpe le haut de son épaule avec son autre main, doucement, essayant de déterminer s’il s’agissait juste d’un vilain bleu ou d’une blessure potentiellement un peu plus profonde. Il ne se souvenait pas avoir chuté, ni de s’être fait percuter par un arbre. Il sent le regard de son amie, insistant, derrière lui. Elle n’allait pas le laisser partir juste après avoir lavé sa tasse, c’était certain. « Euh, si jamais t’as une trousse de soin, quelque part… », suggère-t-il. Il allait devoir regarder son épaule d’un peu plus près et Mabel allait devoir l’y aider. Entendant son amie s’éloigner pour chercher ce dont il pourrait avoir potentiellement besoin, il en profite pour enlever son sweat-shirt des pompiers de Brisbane. Se retrouvant ainsi torse nu dans la cuisine de Mabel, les cicatrices des brûlures de son accident zébrant son corps de toute part, il se sent vulnérable, même si la situation est plutôt comique. Il se contorsionne, essayant d’y voir quelque chose. En passant sa main, il ne sent pas grand chose, si ce n’est l’aspect de sa peau rugueux, comme s'il avait été griffé par quelque chose. Il en conclut que sa blessure doit être sans gravité. Son amie fait de nouveau irruption dans la pièce, il lui tourne alors le dos, pour qu’elle puisse jeter un oeil à sa blessure. « Tu peux me dire ? J’arrive pas bien à voir. », demande-t-il, un peu gêné.

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La réaction de Mabel quand elle voit Lucas grimacer ne se fait pas attendre, puisqu’elle lui demande quasi immédiatement de prendre rendez-vous chez le médecin. « Oui, j’appellerai Swann, mon kiné. », lui promet-il. Après le départ inattendu de Sofia, l’ancien pompier s’est retrouvé un nouveau praticien, par connaissances interposées. Il était bien heureux de pouvoir la contacter quand il avait besoin d’une séance supplémentaire, et ses aventures des dernières quarante-huit lui rappelaient qu’il allait certainement en avoirs besoin de quelques-unes dans les semaines à venir. Il prend entre ses doigts la poche de froid que lui tend Mabel et la pose quelques instants sur son épaule, le temps que cette dernière revienne avec une trousse à pharmacie. Il décide d’enlever son haut néanmoins pour pouvoir palper doucement sa blessure, histoire d’en évaluer la gravité. Une fois son amie de retour dans la pièce, il la questionne sur ce qu’il en est réellement et cette dernière confirme ce qu’il pensait. Une grosse égratignure, voilà tout. « Hm, je pense que c’est plutôt quand je me suis pris dans un grillage. J’ai dû m’accrocher en allant sauver un petit chat, sa propriétaire était affolée, je pouvais pas rester sans rien faire. », raconte-t-il, tâchant de se rappeler ce qui avait pu causer les marques sur son épaule. Il sent Mabel lui appliquer du désinfectant, et il ne peut s’empêcher de rire légèrement lorsqu’il entend son petit commentaire. « Effectivement, ça ne pique pas. C’est le désinfectant pour Rosie, j’imagine ? », lui demande-t-il. Il jette un œil à la boîte posée à quelques centimètres, dans laquelle il peut observer des pansements plus colorés les uns que les autres. « Trop beaux les pansements ! », s’exclame-t-il, en fouillant distraitement avec son autre main. Il finit par trouver son bonheur. « Je veux celui avec la Reine des Neiges dessus. », lance-t-il, un peu taquin. Il peut remarquer derrière son épaule le regard un peu désabusé de son amie, en train de le soigner, qui doit bien se demander où est-ce qu'il trouve l'énergie de plaisanter. « Quoi ? J'ai toujours eu un crush sur elle. », plaisante-t-il. « J’espère que Rosie ne m’en voudra pas de lui avoir pris celui-ci. »
Quelques minutes plus tard et un pansement Reine des Neiges sur l’épaule, Lucas s’était rhabillé et Mabel avait rangé la trousse de soins à l’abri des petites mains curieuse de sa fille. « Merci. Tu vas pouvoir rajouter ‘infirmière’ à la liste de tous tes métiers. », dit-il à la jeune femme, en finissant de passer son sweat. « Ça se passe bien le boulot, d’ailleurs ? Tu bosses sur quoi en ce moment ? », demande-t-il. Lucas n’étant pas un grand lecteur de presse people, il préférait toujours demander directement à son amie ce qu’il se passait dans sa vie. Néanmoins, il sait que la biographie sortie en début d’année sur Rhett – écrite par Greta – l’a pas mal bouleversée. Evidemment, il l’avait lue, puisque la blonde lui en avait envoyé une copie. Il n’avait posé aucune question sur la véracité des propos tenus dans le livre, sachant les répercussions que sa sortie avait eu sur le moral de son amie ; il avait estimé qu’il n’y avait pas besoin d’en rajouter une couche. Pour autant, il espérait tout de même que les répercussions sur sa carrière avaient été minimes et qu’elle s’épanouissait toujours dans son travail.

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« Oh, je suis pas le patient modèle, tu t’en doutes. Mais j’essaie d’aller chez le kiné aussi souvent que possible. Et puis… j’ai commencé à aller aux NA. Pour mon autre problème. », répond Lucas lorsque Mabel lui demande s’il pense à prendre soin de lui. Il a avoué à son amie ses problèmes d’addiction au mois de mars, quand il était au plus mal. De l’eau avait coulé sous les ponts depuis, avec notamment le mariage de Swann où Greta lui avait avoué à demi mots ses sentiments, qui étaient réciproques. Mais tout ça n’avait mené nulle part. Ni elle, ni lui n’étaient prêts pour quoi que ce soit. Lucas avait ressenti le besoin de changer d’air, et était aller voir son frère à Londres quelques semaines. À son retour, son ancien Capitaine, Joaquin lui a reparlé des réunions des NA. À force d’insister, l’ancien pompier avait cédé et promis de s’y rendre.
Lucas finit donc par choisir un pansement Reine des Neiges et Mabel ne manque pas de le taquiner à ce sujet. « Je vais essayer d’apprendre cette chanson au trombone. Tu crois qu’elle aimerait bien ? », réplique-t-il à la jeune maman. Une fois soigné et rhabillé, le trentenaire en profite pour demander à son amie quels sont ses projets du moment. Sa réponse ne se fait pas attendre et ne manque pas de le surprendre. « Ah ouais, tu fais pas dans la demie mesure. Ça sort quand ? », questionne-t-il l’actrice. Lucas n’a jamais été un grand fan de cinéma - sa culture cinématographique s’arrête à quelques Disney, deux ou trois grand classiques, le film Whiplash (son préféré), et la saga Harry Potter. Mais il a toujours été assez admiratif du travail de Mabel et de ses différentes casquettes : mannequin, chanteuse et maintenant actrice. Il est très loin du milieu du show business - et il ne s’en plaint pas - et il s’est toujours demandé comment son amie vivait le fait d’être épiée plus ou moins en permanence. Mais lorsque la jeune femme lui annonce quel sera son prochain film, il ne peut s’empêcher de remarquer sa grimace. « Oh. » Sa première réaction, peu loquace, traduit sa surprise. « Tu vas jouer ton propre rôle..? Rhett est d’accord ? », demande-t-il, perplexe. Lucas ne connaît que quelques bribes de sa relation avec l’ancien rugbyman, mais dans son souvenir leur relation n’est pas au beau fixe, et la sortie de la biographie écrite par Greta n’a pas dû arranger les choses. « Décidément, cette biographie aura secoué toute la ville. », dit-il à la fois pour lui et pour elle. En effet, si elle a certainement eu des conséquences pour Rhett et Mabel, elle a aussi eu pour Greta, dont la carrière a pu décoller ici, à Brisbane. Malheureusement, ce succès a eu son revers, puisque les journalistes ont fini par révéler dans la presse qui elle était réellement. « Ça va aller pour toi ? J’imagine que oui, si t’as accepté le rôle, mais… si jamais t’as besoin de discuter, je suis là. », finit-il par dire. Il ne pouvait pas faire grand chose de plus, si ce n’est soutenir son amie.

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En voyant la mine de Mabel quand il lui explique qu’il a commencé à se rendre à des réunions pour son addiction, Lucas ne peut réprimer un petit sourire. La décision n’avait pas été facile à prendre - sa fierté l’avait empêché pendant plusieurs mois de se faire aider et il avait fallu que Joaquin insiste à plusieurs reprises pour qu’il cède. « J’y vais plusieurs fois par semaine. Je dis pas grand chose, mais je crois que ça me fait du bien quand même d’y assister. Au moins, ça m’aide à ne pas rechuter. C’est vraiment le plus dur, dans le sevrage. », explique-t-il à son amie. Parfois, il arrivait sans problème à ne pas écouter la petite voix dans sa tête qui lui proposait de prendre une pilule ou deux. Mais d’autres jours, c’était un combat permanent, au point qu’il en tremblait. La douleur se réveillait de temps en temps dans sa jambe et il devait lutter pour ne pas avaler toute la boîte.
Une fois soigné, Mabel lui parle de ses projets variés et Lucas ne peut s’empêcher d’être impressionné. « Wow, ça n’a pas dû être facile de mener tout ça de front. Surtout que les deux registres sont bien différents, j’imagine. Tu m’inviteras à une avant première ? », demande-t-il, avec un clin d’oeil. Puis, vient le sujet de la biographie de Rhett, Nine, qui a fait couler tellement d’encre qu’elle sera adaptée au cinéma. Mabel avait été choisie pour jouer dedans, la mettant dans une position délicate. Tout comme lui, puisque la personne à l’origine de l’écriture du livre était Greta, avec qui il avait une relation plutôt compliquée, ces derniers mois. Il repense aux messages qu’ils se sont écrits avant la tempête… L’actrice confie à Lucas ses craintes, notamment sur la promotion du film. « J’imagine que tu pourras garder un peu la main sur ce que tu souhaites qu’il soit dit ou non pendant les interviews… Mais la presse à scandale risque de ne pas passer à côté de votre histoire, c’est sûr… » Il est un peu embêté pour Mabel, qui n’avait certainement pas spécialement envie que son histoire avec Rhett soit dévoilée au grand public de cette façon. Il n’avait jamais eu les détails de ce qu’il s’était passé entre eux - la carrière de Lucas en tant que pompier décollait et la jeune femme était à Londres - et il aurait trouvé bien indiscret de lui demander qu’est-ce qui était vrai ou faux dans les paroles de Rhett, rapportées par Greta dans son livre. Les mots marmonnés ensuite par Mabel le mettent soudainement un peu mal à l’aise. La sortie de l’autobiographie avait relancé la carrière de Greta, qui n’avait fait que son travail, et si le livre avait été encensé par la critique, c’est que ce travail avait été bien fait. Mais, évidemment, il comprenait Mabel, puisque le succès de ce livre avait mis pas mal de pagaille dans sa vie. « Je comprends. », finit-il par dire. « Ce que je vais te dire ne va peut-être pas te faire très plaisir mais… Ne lui en veut pas trop, c’est une fille super. » Il ne peut s’empêcher de trouver ironique de prendre la défense de la blonde, alors que leur relation était plus qu’effritée depuis le mariage de Swann - où il avait d’ailleurs pris la défense de Mabel. « Enfin, ça me regarde pas trop, ce qui s’est passé entre Rhett et toi… Mais je lui ai aussi dit de ne pas te juger trop durement, qu’il y avait toujours deux versions d’une même histoire. », raconte-t-il. Bien sûr, ce qui lui dit ne changera rien : la biographie était sortie depuis un moment, avec les conséquences qui allaient avec. « Si ça peut te consoler, tu n’es pas la seule dont la vie a été un peu bousculée par Greta. », dit-il, avec un petit sourire amer. Bousculé était certainement un euphémisme, puisqu’elle l’avait autant rendu heureux que triste ces derniers mois. Les SMS échangés avant la tempête avec la blonde tournait de plus en plus en boucle dans sa tête : elle s’était confinée avec son ex et même s’il essayait d’avoir l’air cool, un sentiment bien plus vicieux rongeait son coeur - la jalousie.

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« J’ai un nouveau kiné depuis quelques semaines, alors on est en train de mettre en place un nouveau protocole. On verra ce que ça donne. », rassure-t-il Mabel, lorsqu’elle lui demande s’il voit un médecin. Swann savait se rendre très disponible, mais était en échange très exigeant. Et Lucas était loin d’être le plus discipliné et assidu, lorsqu’il était question de ses exercices à faire à la maison. La conversation dévie ensuite sur les projets de Mabel, et notamment l’adaptation de la biographie sur Rhett, écrite par Greta. Même si l’actrice avait décroché un rôle dans le film, tout ce qui allait avec semblait vraiment la fatiguer et l’embêter. La presse people prenait un malin plaisir à mettre la lumière sur sa relation passée avec l’ancien rugbyman. Et tout ceci était indirectement la faute de l’écrivaine, qui se trouvait être également son amie. Lucas essaie tant bien que mal de prendre sa défense, sans succès. Il comprend la colère de Mabel, il avait également cherché à arrondir les angles à son sujet auprès de Greta, au mariage de Swann quelques mois plus tôt. Il préfère faire un trait d’humour, en disant que la blonde avait aussi remué un peu sa vie dernièrement. La réaction de son amie ne se fait pas attendre. Visiblement, Lucas n’avait pas été assez clair sur la relation qui l’unissait à l’écrivaine. Il a l’impression de revivre la même scène qu’avec Greta, quand elle aussi a appris que Mabel et lui se connaissaient. Il se racle la gorge, à peine mal à l’aise. Les deux femmes ne se sont jamais parlé et pourtant, il a l’impression de se trouver entre elles deux, à tenter de calmer une animosité bien réelle. « Ouais, on est… On se connaît depuis trois ans, je l’ai rencontrée sur une intervention, et on est amis depuis. », répond-il à sa question. A vrai dire, leur relation était bien plus compliquée aujourd’hui mais il ne savait pas si c’était forcément le moment d’en parler à Mabel. Mais c’était sans compter sur la jeune maman qui ne comptait pas en rester là. Il ne peut s’empêcher de rire en l’entendant lui demander ce qu’il s’était passé entre eux. Son visage devait trahir son malaise à parler de l’écrivaine, et son amie ne lui avait pas laissé l’opportunité de s’échapper. « C’est si évident que ça ? » Il se gratte la tempe, un peu gêné. « Tu sais, je veux pas t’embêter avec ça… » Il essaie de se défiler, mais le regard que lui lance Mabel lui montre bien qu’il en a trop dit ou pas assez. « Bon… », concède-t-il. Il ne sait pas trop par où commencer. Il y a certaines choses qu’il ne souhaitait pas forcément dévoiler, car il s’agit de la vie privée de Greta, et même si son vrai nom avait été révélé par les journalistes il y a peu de temps, il ne se voyait pas divulguer cette information à Mabel. « On a toujours été assez proche et après mon accident, on s’est pas mal reproché. », commence-t-il. « Elle a été hyper présente pour moi. Puis elle a merdé, un peu. Et moi, j’ai merdé beaucoup. » Il n’avait pas envie de rentrer dans les détails et essayait de donner une version de l’histoire la plus neutre possible. « Ça s’est arrangé au début de l’année… Jusqu’au mariage de Swann et Rory, cet été. Je crois qu’on s’est rendu compte elle et moi qu’il y avait plus qu’une amitié entre nous. Sauf que son ex est revenu dans les parages et moi… je suis toujours en train de me sevrer, j’ai encore du mal à accepter ma nouvelle vie après les pompiers… Donc on s’est dit que c'était mieux de rester amis. », explique-t-il, en jouant distraitement du bout des doigts avec une cuillère qui trainait sur la table. Il repense aux messages échangés avant la tempête, à la jalousie qu’il a ressenti en apprenant que Greta allait se confiner avec Arthur. « Mais c’est un peu compliqué… J’essaie de garder mes distances pour pas la faire souffrir, pour qu’elle puisse retenter… quoi qu’il puisse arriver avec son ex. Bref, tu sais tout. », finit-il par avouer. Il n’avait pas l’habitude de confier des choses aussi personnelles, mais il sait que Mabel ne le jugera pas. Peut-être pourra-t-elle aussi lui porter conseil, qui sait ?

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La question de Mabel le laisse un peu perplexe. Cela pouvait lui arriver de nouer des liens avec des personnes qu’il avait sorties d’une situation délicate, mais il est vrai que Greta était bien la seule avec qui il avait construire une relation solide, dans le temps. « Euh… c’est arrivé, parfois, oui. Pour Greta, elle m’avait filé son numéro pendant l’intervention, c’était une blague. Mais finalement, je l’ai rappelée. », raconte-t-il. Son visage s’illumine un peu en se remémorant le jour où la blonde avait fait dépêcher toute une équipe de pompier pour une cheville foulée. Après avoir hésité, et face au regard insistant de son amie, Lucas finit par lui expliquer brièvement le tourbillon qu’a été sa relation avec l’écrivaine ses derniers mois. Et visiblement, il n’a pas réussi à être clair, puisque Mabel fronce les sourcils, avant d’essayer de reformuler ses propos. « Je t’ai dit, c’est compliqué… », avoue-t-il, un peu embarrassé. Lorsqu’elle souligne le fait que sortir avec un addict n’est pas chose facile, l’ancien pompier ne peut s’empêcher de sentir son coeur se serrer. Les images de ce jour où elle avait découvert son secret et avait quitté son appartement en pleurant lui reviennent en mémoire. « Oui, c’est sûr… », approuve-t-il, avec un triste sourire. S’il avait tout avoué, au lieu de tout nié en bloc ce jour-là, quel tournant aurait pris leur amitié ? Il se pose la question, de temps en temps, avant de l’enfouir à nouveau dans un coin de son cerveau. Mais quand Mabel lui demande s’il n’essaie pas de se préserver, il fuit son regard. Évidemment, elle était loin d’être idiote et avait vu clair en lui. « Moi ? Me préserver ? Je vois pas de quoi… », dit-il, avec un faux air surpris, en levant les yeux au ciel de façon exagérée. La conversation devenait un peu trop sérieuse à son goût, alors il s’était senti obligé de l’alléger un peu avec un peu d’humour. Mais Mabel semblait réellement inquiète pour lui et il savait qu’elle n’aimait pas trop quand il faisait mine de ne pas comprendre ce qu’elle voulait dire pour éviter un sujet qu’il ne voulait pas aborder. « Je pense que j’essaie de nous préserver tous les deux… », finit-il par avouer. « Le soir du mariage, elle m’a avoué voir en moi plus qu’un ami. Et moi… je savais pas trop si elle disait ça parce qu’elle avait peur de retomber amoureuse de son ex ou si elle m’aimait vraiment. Alors, je lui ai posé la question, en lui faisant comprendre que pour moi aussi, elle était plus qu’une simple amie. » Il se souvient de la blonde face à lui, perdue. Elle l’avait évité une bonne partie de la soirée, et lui l'avait observée de loin, chercher Arthur du regard. « Elle m’a dit que le timing était pas bon. Et je suis d’accord avec elle. Son ex refaisait surface et moi, j’étais défoncé un jour sur deux aux médocs. Si on s’était mis ensemble, on fonçait droit dans le mur. », admet-il, avec un rire amer. « Mais… même si on s’est dit qu’on ne voulait pas gâcher notre amitié, c’est plus pareil maintenant. Parce qu’elle est souvent avec lui, et moi, je me mets en retrait, pour pas la mettre dans une situation de merde. » Parler de tout ça à Mabel le soulage et l'aide à mettre un peu d'ordre dans sa tête. Il sait que la jeune maman ne le jugera pas au contraire. Même si ce qui lui dit ne l'aidera pas spécialement à porter davantage Greta dans son coeur... « C’est pas simple, tout ça. Et… je pensais pas que ça arriverait un jour mais putain, parfois, ça me fout un peu les nerfs de me dire qu’elle le choisira. J’ai aucune chance face à ce mec. » Ça lui fait mal de l’admettre, mais c’est aussi une des raisons qui l’avait poussé à s’éloigner petit à petit de la blonde : sa fierté l’empêchait de se battre pour elle. « Avant la tempête, elle m’a dit qu’elle était partie se confiner avec son ex. Et ça m’a… juste fait chier, en fait. » Il fait une pause, un peu honteux de dévoiler des pensées si intimes à Mabel, qui était pourtant une amie de longue date. « Je suis juste jaloux, en fait, c’est ça ? », finit-il par demander, se sentant ridicule.

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