Il ne s’en cachait pas : Mateo était stressé. Marier son ami d’enfance était tout sauf anodin et il rêvait que la journée se passe sans accroc, pour Raf. Il méritait que son mariage ne soit entaché d’aucune façon ; toute sa famille méritait que ces retrouvailles se fassent dans la joie. Évidemment, rien ne pourrait les empêcher de penser à Lucia, qu’ils avaient tous perdus trois ans auparavant. Mais leurs esprits devaient rester à la fête. Mateo avait assisté à la préparation du marié, de la salle, et s’était préparé avec le plus grand soin pour faire honneur à son ami en ce jour si particulier. Après la cérémonie il avait déjà salué une bonne partie des invités, s’était acquitté de la majorité de ses missions de témoin – il ne lui restait plus qu’à offrir à la foule son plus beau discours un peu plus tard dans la soirée - et il profitait d’un instant de répit pour aller se chercher de quoi s’hydrater. De son costume il ne lui restait déjà plus que sa chemise et son pantalon ; force était de constater qu’être témoin d’un mariage était plus sportif qu’il n’aurait voulu le croire. Il avait fait tomber la veste à peine la cérémonie terminée et les premiers verres de champagne versés. Ce serait sa tenue pour le reste de la soirée, le marié lui ayant fait promettre de ne pas faire tomber sa chemise aussi : c’était certainement par peur pour son égo, un peu comme quand on demande aux invitées de ne pas porter de robe blanche pour ne pas faire d’ombre à la mariée. Il s’y tiendrait, il l’avait promis. Il attrapa une coupe au niveau du bar à champagne et prit une minute pour se délecter de la boisson en observant les différentes personnes présentes dans la salle. Il aimait s’imaginer quelles conversations chacun d’entre eux était en train de tenir, même s’il serait certainement déçu du peu d’intérêt de la majorité d’entre elles. Raf avait beau être son meilleur ami depuis toujours, Mateo n’avait pas spécialement d’atomes crochus avec son entourage. Son intérêt à lui, en revanche, venait d’être piqué par une tête qu’il savait connaître mais qu’il avait du mal à associer à un prénom. Au fil de la soirée il s’était efforcé de le retrouver, refusant de rester sur un oubli alors qu’il l’avait sur le bout de la langue et puis, sans crier gare et sans qu’il ne comprenne pourquoi, c’était revenu à lui comme une évidence : Diego. C’était donc lui, l’absent de l’enterrement de vie de jeune garçon, qui bossait à l’hôpital et n’était jamais disponible. Leurs chemins semblaient s’entremêler d’une façon étrange : assez pour qu’ils connaissent l'existence de l’autre mais sans jamais leur donner l’opportunité de se connaître vraiment. L’esprit curieux de Mateo lui criait de s’intéresser à lui, pour une raison qu’il n’avait pas encore définie - peut-être était-ce simplement le fait qu’il le trouvait très beau dans son costume. Son instinct le trompant rarement, il se lançait alors que Diego s’était approché à son tour de la table des boissons. « Vous formez un très beau couple tous les deux. » Qu’il avait commenté sans réfléchir, ignorant même si la blonde qu’il avait vue à son bras quelques instants auparavant était sa copine, sa sœur, sa cousine ou une parfaite inconnue qu’il venait de rencontrer. Il avait laissé ses yeux vagabonder dans la salle tout en parlant puis avait fini par se tourner vers lui. « Mateo. » Qu’il lançait en guise de présentation tout en tendant sa coupe pour trinquer, pour s’éviter un échange gênant si Diego ignorait complètement qui il était. « Enfin j’imagine que tu le sais déjà, » Il marquait une courte pause, prenant une gorgée de champagne. « vu qu’on m’a cité pendant la cérémonie. Le témoin de Raf, tout ça… »  C’était d’ailleurs surprenant qu’en ayant Rafael en commun ils ne s’étaient pas plus croisés que ça, jusqu’ici. « Tu passes un bon moment ? » Loin d’être un adepte des small talk, Mateo semblait ne pas avoir d’autre solution pour une fois.

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ft  @Mateo Alvarez

Diego avait eu du mal à avouer à Rafael qu’il ne serait pas présent à son enterrement de vie de garçon. Son métier devenait une excuse pour tout, il n’était pas le plus extravertie ni le plus sociable mais cette tendance à devoir refuser les invitations devenait pesante pour lui. Ce jour-là lui tenait particulièrement à cœur, il avait toujours pu compter sur son ami et s’il y avait un moment à ne pas rater, c’était bel et bien celui-là. Alors il avait tourné le problème dans tous les sens, ne sachant pas s’il devait se confondre en excuse, expliquer combien il avait insisté auprès de sa direction, ou s’il devait faire profil bas. Malgré cet accroc, Diego était resté sur la liste des invités et avait plus facilement négocié son week-end pour le mariage, et aurait probablement réagi bien différemment avec sa hiérarchie si cela n’avait pas été le cas. Prendre le temps de célébrer, profiter d’un mariage qui était bien plus adapté à son caractère que les soirées agitées dans les bars, Diego n’avait réalisé à quel point il en avait besoin qu’une fois au milieu de l’effervescence. Se changer les idées lui faisait un bien fou et être accompagné de Cece rendait l’expérience encore plus amusante. A son bras, il se sentait invincible mais il n’avait dû la quitter qu’une fraction de seconde pour que la soirée prenne une toute autre tournure. Il se dirigeait vers lui avec une certaine nonchalance qui n’entachait pas sa détermination et Diego restait planté là, sa coupe de cocktail sans alcool dans la main. Le destin était en train de se moquer ouvertement de lui. « Vous formez un très beau couple tous les deux. » Deux options s’offraient à lui. Démentir immédiatement former un quelconque couple avec Cécilia et laisser une porte ouverte. Ou feindre la relation parfaite pour éviter toute équivoque avec Mateo. Il s’était remémoré la fameuse soirée en une fraction de secondes pour ensuite passer à ces moments de doute et cette bataille mentale qu’il avait mené depuis leur baiser et, très vite, la seconde option avait semblé être la plus juste. « On nous le dit souvent, merci. » Sa confiance en lui n’était que de la poudre aux yeux parce qu’il était évident qu’encore ce soir, le garçon lui faisait perdre tous ses moyens. « Mateo. » Il avait légèrement frémi en l’écoutant prononcer son prénom, un prénom qui lui trottait dans l’esprit depuis ce fameux soir. Cependant il avait tout de même arqué un sourcil étonné en l’entendant se présenter.  « Enfin j’imagine que tu le sais déjà, vu qu’on m’a cité pendant la cérémonie. Le témoin de Raf, tout ça… » avait-il précisé comme si son étonnement résidait là, comme si Diego était supposé le connaître grâce aux discours de mariage. « Oui, exactement, c’est ça. » Sa voix n’était plus aussi assurée et son regard fuyait le sien, si la gêne de leur rencontre s’effaçait, Diego ne se sentait pas mieux pour autant. Il se sentait presque humilié maintenant mais ses pieds semblaient fixés au sol, il était incapable de couper court à la conversation et de s’éloigner. « Diego. » avait-il finalement prononcé du bout des lèvres.   Il avait haussé les épaules, la réponse semblait évidente. « Marier Raf’ c’est forcément un bon moment… Du coup vous vous connaissez depuis toujours ? J’aurais adoré avoir encore plus d’anecdotes croustillantes sur son enfance. » Il comblait les vides, parlait trop pour se focaliser sur Rafael et uniquement lui et tentait de ne pas montrer qu’un malaise était en train de s’installer chez lui. Alors que son discours ne menait à rien, Diego avait arrêté un serveur qui passait par là pour attraper quelque chose à manger sur son plateau. Il avait commencé à manger ce qui se trouvait sur la brochette apéritive avant d’arriver à… l’olive. Et le silence les avait gagnés alors il avait retrouvé les yeux de Mateo, qui se souvenait peut-être au moins de leur discussion sur la théorie des olives et là où cela les avait menés. « Très bon choix de traiteur, si tu veux mon avis. » Et il avait mangé l’olive avant que Mateo ne puisse lui confirmer si ce détail avait ravivé sa mémoire.

La première chose à savoir sur une personne pour éviter tout quiproquo, c'était son statut. Il était déjà difficile de savoir avec qui il pouvait entrer dans un jeu de séduction parce que pas toujours évident de déceler les attirances de ceux qui lui faisaient face, alors mieux valait se simplifier les choses si la possibilité se présentait. C'est ce qu'il venait de faire avec Diego, qu'il savait désormais hors de portée. Non pas qu'il avait spécialement prévu de le draguer, mais au moins les choses étaient fixées dans son esprit. « On nous le dit souvent, merci. » Dans un mariage, on croise toujours des têtes nouvelles, des têtes connues, mais aussi certains visages qu'on a déjà croisé pour une raison ou pour une autre, sans trop savoir de qui il s'agit. Mateo n'avait pas l'audace de croire que tout les membres de l'entourage de son ami sauraient qui il est, d'autant plus qu'il ignorait s'il arrivait à Raf de parler de lui. C'est pour cette raison qu'il s'évertuait à se présenter machinalement depuis le début de l'évènement, même s'il aimait penser qu'il était du genre à marquer un minimum les esprits de ceux qu'il croisait. « Oui, exactement, c’est ça. » Il hochait la tête nonchalamment avant de reprendre une gorgée de champagne. « Diego. » Il écarquillait les yeux, surpris que Diego se présente en retour. Il n'aurait pas dû l'être, ayant fait la même chose quelques secondes avant. « Oui je sais. » Si Mateo n'attendait pas des autres une parfaite mémoire le concernant, il avait de son côté une cartographie plutôt détaillée des proches de son ami en tête. « Marier Raf’ c’est forcément un bon moment… Du coup vous vous connaissez depuis toujours ? J’aurais adoré avoir encore plus d’anecdotes croustillantes sur son enfance. » Un sourire taquin vint illuminer le visage de Mateo. Des histoires à raconter, il en avait un nombre incalculable. « On a grandit ensemble alors j'en ai des tas. T'en auras un aperçu pendant mon discours de tout à l'heure, tu verras ça vaut le coup. Si t'en veux plus après ça n'hésite pas, ce sera avec grand plaisir. » Il ne se privait jamais de raconter une belle ou drôle histoire et avait un certain talent pour imager son propos. Nul doute que son discours de témoin captiverait les foules. « Mais tu dois aussi avoir des choses à raconter, non ? Si tu l'as connu à la fac, je suis sûr que tu connais des anecdotes encore plus croustillantes que les miennes. » Bon, Mateo avait certainement déjà entendu tout ce que Diego pourrait bien lui raconter, mais si ça lui permettait de prolonger la conversation et d'éviter certaines personnes présentes, il n'allait pas s'en plaindre. Surtout que ça lui permettrait de rester en bonne compagnie, Diego étant tout à fait agréable à côtoyer et regarder. Mateo restait stoïque en croisant le regard de son interlocuteur qui semblait insistant en mangeant sa brochette apéritive, sans qu'il ne comprenne pourquoi. Mais peu importe. « Très bon choix de traiteur, si tu veux mon avis. » Il acquiesçait en hochant la tête vivement, pas peu fier d'avoir aidé au choix de certains prestataires. Il aurait presque été capable de se vanter les mérites de la réussite de ce mariage, mais puisqu'il avait promis de rester tranquille, il s'en abstiendrait. « C'est vrai que tout est bon, mais ce serait encore meilleur s'ils avaient pas foutu des olives partout. » Mateo les avait en horreur depuis toujours. « Au moins maintenant je sais à qui les refiler. » Ça lui rappelait une vieille théorie qu'on lui avait raconté un jour, une histoire qui dit que dans un couple il faut toujours qu'au moins une des deux personnes les aime. Ou quelque chose du genre. Il se demandait même s'ils n'en avaient pas déjà parlé, avec Diego, mais il avait du mal à saisir pourquoi ils auraient parlé d'olives, pour le peu de fois qu'ils s'étaient croisés jusqu'ici. Ça aurait presque pu passer pour une technique de drague mais si c'en était une Mateo ne la connaissait pas. Il jetait un œil au verre du Gutiérrez qui semblait presque vide. « Tu bois quoi ? »

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La façon dont il avait ravalé sa salive et immédiatement laissé tomber son sourire lorsqu’il était apparu dans son champ de vision n’était que la face cachée de l’iceberg. A l’intérieur, le sang de Diego était en train de bouillir et il ne pouvait mettre de mot sur aucun des sentiments qu’il ressentait. Cette chaleur interne qui avait pris possession de lui et qui lui montait aux joues, encore plus parce qu’il s’efforçait d’y mettre un terme. Il ne savait pas dire si elle était dû à l’effet qu’il avait sur lui ou simplement au malaise que leur rencontre allait générer. Le moment était mal choisi, le mariage de Rafael ne pouvait pas être le théâtre d’autre chose que de la bonne humeur de chacun des convives. « Oui je sais. » Diego s’accrochait à sa coupe, si fort qu’elle aurait pu se briser sous la pression qu’exerçait sa main sur celle-ci. Était-il en train de confirmer se souvenir ? Probablement pas car Mateo n’avait pas quitté la neutralité qui était la sienne depuis le début de la conversation, depuis qu’il avait estimé que Diego ne le connaissait que comme témoin. Comme un pion de ce mariage. Depuis son siège, durant la cérémonie, il s'était imaginé qu'il n'était qu'un homme lui ressemblant énormément. Que le Mateo qui se tenait à côté de Rafael n'était pas le même que celui qu'il avait rencontré. Il ne pouvait maintenant plus nier. Mateo se trouvait là et Diego ne savait pas trop comment il avait pu le manquer, comment l’information de qui serait le témoin de son ami avait pu lui échapper. Ils n’étaient pas si proches que cela, et peut-être avait-il mentionné que Mateo serait son témoin mais le prénom était trop répandu pour que cela lui laisse autre chose d’une impression de déjà-vu. Mais alors qu’il se tenait devant lui, c’était un sentiment bien plus fort qu’un déjà-vu qui s’emparait du mexicain. Il avait enchaîné la conversation, prétextant simplement se renseigner sur ce mystérieux témoin. « On a grandit ensemble alors j'en ai des tas. T'en auras un aperçu pendant mon discours de tout à l'heure, tu verras ça vaut le coup. Si t'en veux plus après ça n'hésite pas, ce sera avec grand plaisir. » Le regard de Diego avait trouvé le sien, plus fuyant, alors qu’il accompagnait ses explications de plusieurs mouvements. « Mais tu dois aussi avoir des choses à raconter, non ? Si tu l'as connu à la fac, je suis sûr que tu connais des anecdotes encore plus croustillantes que les miennes. » Il fallait qu’il trouve. Vite. « Oui, des tas… » avait-il lancé sans quitter le regard de Mateo, faisant tourner doucement sa coupe entre ses doigts parce qu’elle était la seule chose qui le ramenait au moment présent. Détournant le regard, Diego avait passé une main derrière son crâne avant d’ajouter un rire qui, il l'espérait, n'illustrerait pas toute sa gêne.  « Raf’ a toujours été du genre à essayer de m’entraîner dans ses conneries, je pense que le pire qu’il m’a fait c’est sauter du haut d’un mur de plus de deux mètres complètement ivre. J’ai bien cru qu’il allait se casser les deux jambes. » Du coin de l'œil, il pouvait voir le marié rire aux éclats et il se concentrait si fort sur lui qu’il avait presque réussi à avoir un discours cohérent. Puis la spontanéité l’avait rattrapé et il avait lancé un premier indice en direction de celui qui ne semblait se souvenir de rien. « C'est vrai que tout est bon, mais ce serait encore meilleur s'ils avaient pas foutu des olives partout. » Le cœur de Diego s’était mis à battre un peu plus fort, une sorte d’adrénaline prenant possession de lui. « Au moins maintenant je sais à qui les refiler. » Il s’apprêtait à enchérir, mais Mateo l’avait stoppé dans son élan et c’était probablement pour le mieux. « Tu bois quoi ? » « C'était un cocktail sans alcool. Je bois pas, à vrai dire. Je pourrais m'autoriser une coupe de champagne pour dire de, mais... » Se montrer avenant avec lui n’était pas une option alors que passée la surprise, passée la nostalgie et passée le pic d’adrénaline, Diego ressentait maintenant une immense rancoeur envers lui. « Je trouve que l’acool nous prive parfois des meilleurs souvenirs. » avait-il ajouté, plantant à nouveau son regard dans le sien. « Et je sais pas toi mais je suis du genre à faire des erreurs quand je bois. » Son rire s’était rapidement cassé parce qu’il n’avait pas réussi à y mettre une quelconque sincérité. Il devait garder la tête haute, alors il avait enchaîné. « T’as déjà vu à quelle table tu serais pour le dîner ? On est à la dix, nous, je crois ? » Il aurait pu tourner les talons, fuir et oublier, mais ce fantôme là l’avait hanté depuis trop longtemps et il était incapable de faire un mouvement de plus.

Cette journée était celle de Raf, alors Mateo estimait normal qu'il soit le centre d'attention et l'objet de tous les sujets de conversation. Surtout si ces conversations lui permettaient de rire un bon coup. « Oui, des tas… Raf’ a toujours été du genre à essayer de m’entraîner dans ses conneries, je pense que le pire qu’il m’a fait c’est sauter du haut d’un mur de plus de deux mètres complètement ivre. J’ai bien cru qu’il allait se casser les deux jambes. » Mateo pouffait de rire, s'imaginant parfaitement la scène. Il savait Raf casse cou mais peut-être pas à ce point. « Oh merde le con ! Je me souviens l'avoir vu une fois où il boîtait un peu et il m'a jamais dit pourquoi. En même temps s'il se prenait pour spiderman bourré...  je comprends mieux. » Il se ferait un plaisir de lui ressortir cette histoire dès que l'occasion se présenterait de le taquiner, pour une raison ou une autre. Rien qu'à y penser il affichait un sourire satisfait. Les quelques commentaires sur le choix du traiteur amenèrent Mateo à remarquer que le verre de Diego s'était vidé depuis le début de leur conversation. « C'était un cocktail sans alcool. Je bois pas, à vrai dire. Je pourrais m'autoriser une coupe de champagne pour dire de, mais... » Dès les premiers mots prononcés il s'était mis à secouer la tête de gauche à droite, prenant un air faussement réprobateur. « A moins que tu sois enceinte, c'est interdit de pas boire un coup à un mariage. C'est la règle. Et comme c'est pas le cas... » Alors qu'il était en train d'essayer d'imposer ses propres envies comme si c'était une vérité absolue pour tous, un homme âgé d'une quarantaine d'années passait devant eux pour se faire servir un soft. Mateo leva les yeux au ciel avant de reposer son regard sur Diego. « Ok bon c'est ma règle mais maintenant que je t'ai pris en flagrant délit, on va devoir y remédier. » Qu'il lançait en haussant les épaules comme si la décision était prise, comme si c'était une fatalité. A défaut de pouvoir complètement se lâcher au vu de son rôle, des responsabilités qui venaient avec lui et des promesses qu'il avait faites au marié, il avait décidé de s'assurer que les autres invités prendraient du bon temps. « Je trouve que l’alcool nous prive parfois des meilleurs souvenirs. » Diego avait un don pour prendre un air grave sans raison au cours de la conversation. « Et je sais pas toi mais je suis du genre à faire des erreurs quand je bois. » « Pourtant t'as plutôt l'air de quelqu'un qui n'en fait jamais. » Il était sincère et avait ancré ses yeux dans les siens en lui disant pour le prouver. Diego paraissait être le genre de personne droites, loyales, qui ne causent jamais de problèmes autour d'elles. Mateo se demandait quelles erreurs il avait bien pu faire dans sa vie pour dire ça, mais il n'arrivait pas à s'imaginer son interlocuteur dans un contexte où il ne maîtrisait pas totalement la situation. Une raison de plus pour lui donner envie de se lâcher ce soir, ça sonnait comme un défi. « De toute façon pour faire des erreurs et oublier des trucs faut se mettre dans un sale état. Je suis même pas sûr que ça me soit déjà arrivé. » Il était certain que l'objectif était de rester un minimum raisonnable pour ne pas ruiner la soirée. « Tu risques rien si j'te surveille. » Qu'il lançait, un sourire tentateur sur ses lèvres, un air de défi dans la voix. Il attrapait une coupe pour la poser au bord de la table, se demandant bien si Diego finirait par se laisser tenter. « T’as déjà vu à quelle table tu serais pour le dîner ? On est à la dix, nous, je crois ? » Il hochait la tête machinalement. « Je suis à la table des mariés. » La réponse était évidente mais ne lui convenait pas spécialement pour autant, et le manque d'enthousiasme dans sa voix avait dû le démontrer. Alors il s'expliquait. « Mais je vais pas y traîner plus que nécessaire à mon avis. Les mariés vont  faire le tour de tous les invités, l'autre témoin passe son temps à bécoter son nouveau mec débile qu'elle larguera d'ici trois semaines, et j'ai pas vraiment envie de rester avec leurs parents toute la soirée. » Il avait beau porter les parents de Raf dans son cœur, niveau fun, il connaissait mieux. « Ça m'apprendra à pas venir accompagné. » Inutile de le préciser mais si jamais l'information pouvait arriver aux oreilles de quelqu'un que ça intéresserait, c'était toujours ça de gagné. « Et puis de toute façon maintenant j'aurais une excuse pour m'échapper et venir te voir. On voudrait pas que tu te mettes à faire n'importe quoi. » Qu'il ajoutait en jetant un œil insistant sur la coupe de champagne que Diego n'avait pas encore touchée.

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Diego n’était pas convaincu de réussir à donner le change, pourtant, Mateo restait là lui aussi, continuant la conversation comme si c’était la meilleure chose qu’il avait à faire à ce moment-là. C’était de la pure politesse, rien de plus, et il n’avait probablement aucunement conscience du raz-de-marée qu’il venait de réveiller chez son interlocuteur. « Oh merde le con ! Je me souviens l'avoir vu une fois où il boîtait un peu et il m'a jamais dit pourquoi. En même temps s'il se prenait pour spiderman bourré...  je comprends mieux. » Diego avait pincé les lèvres et fermé les yeux en hochant la tête pour confirmer la triste vérité. Rafael étaient de ces amis qui sortaient le mexicain de sa zone de confort, une présence bien trop relative pour que cela ait un réel effet à long terme et pour preuve, il ne s’était même pas décidé à boire une coupe de champagne. « A moins que tu sois enceinte, c'est interdit de pas boire un coup à un mariage. C'est la règle. Et comme c'est pas le cas... » Il avait réussi à lui arracher un rire qui n’avait pourtant pas suffi à lui enlever totalement ce sentiment de malaise. « Ok bon c'est ma règle mais maintenant que je t'ai pris en flagrant délit, on va devoir y remédier. » S’il ne s’était pas souvenu de son visage, si celui-ci n’était pas resté ancré dans sa mémoire avec une précision étonnante compte tenu du temps qui avait passé, Diego aurait eu la confirmation qu’il s’agissait de ce Mateo là grâce à son attitude. La façon qu’il avait de sourire en soutenant son regard alors qu’il prenait les devants, s’imposant d’une manière qui ne laissait aucune chance au médecin. « J’imagine qu’une coupe ne me ferait pas de mal. » avait-il répondu en tentant de paraître le plus détaché possible. Une coupe qui aurait pour effet de le détendre, mais un verre de plus et Diego se serait retrouvé dans le même état que durant cette soirée où il avait trompée Emery avec la personne qui lui faisait face. Une erreur qu’il avait subtilement évoqué, un sourire en coin s’étant glissé sur son visage alors qu’il trouvait extrêmement ironique que Mateo reste impassible face à toutes ces similitudes avec le soir où ils s’étaient embrassés. « Pourtant t'as plutôt l'air de quelqu'un qui n'en fait jamais. » Il avait levé le menton, curieux d’en entendre davantage sur la façon dont Mateo semblait réussir à le lire. « Je ne sais pas si c’est un compliment ou pas, j’ai l’impression que ça en est pas un venant de toi, je me trompe ? » Son habituelle assurance s’était envolée laissant place à une vaine tentative de garder la face.

« De toute façon pour faire des erreurs et oublier des trucs faut se mettre dans un sale état. Je suis même pas sûr que ça me soit déjà arrivé. »
« Pardonne-moi si j’ai du mal à te croire. »

Son regard s’était fait un peu plus pressant sur Mateo, il l’invitait à se souvenir, comme s’il pourrait interpréter correctement ces quelques mots qui semblaient dénués de sens. Et au final, Diego n’était même pas certain que le fait qu’il se souvienne puisse être une bonne chose. « Tu risques rien si j'te surveille. » Son sourcil s’était arqué et lorsqu’il avait réalisé que c’était parce qu’il appréciait ce qui ressemblait à un flirt, il s’était ravisé en changeant de sujet. « Je suis à la table des mariés. » Evidemment. La demande était stupide, la réponse étant presque logique. Mais l’effet escompté était là, Diego s’était extirpé de la position inconfortable dans laquelle l’avait mis cette discussion sur la consommation d’alcool et la façon dont Mateo souhaitait le surveiller. Une nouvelle fois, il avait levé le menton pour acquiescer. « Mais je vais pas y traîner plus que nécessaire à mon avis. Les mariés vont  faire le tour de tous les invités, l'autre témoin passe son temps à bécoter son nouveau mec débile qu'elle larguera d'ici trois semaines, et j'ai pas vraiment envie de rester avec leurs parents toute la soirée. » Diego souriait, il appréciait l’attitude de Mateo qui était en totale opposition avec la sienne et ce n’était pas quelque chose qui pouvait changer malgré leur différence de point de vue. « Ça m'apprendra à pas venir accompagné. » C’était une information qui avait suscité son intérêt et plus il réfrénait les sensations que faisait naître Mateo chez lui, plus elles étaient décuplées. Le moment aurait été idéal pour dévoiler que Cecilia n’était que son +1, qu’il était libre comme l’air et que l’idée de reproduire cette fameuse soirée était tout ce qu’il avait en tête à ce moment précis. Mais Diego savait qu’il ne s’autoriserait pas à un tel laisser-aller, quand bien même il brûlait d’envie de vérifier une vérité qui le dérangeait depuis bien trop longtemps. « Et puis de toute façon maintenant j'aurais une excuse pour m'échapper et venir te voir. On voudrait pas que tu te mettes à faire n'importe quoi. » Il avait attrapé la coupe de champagne, savamment portée à son attention par Mateo, non pas parce qu’il souhaitait lui prouver quoique ce soit ou qu’il acceptait de rentrer dans ce jeu qu’il avait lancé. Mais parce que c’était la seule échappatoire qu’il avait trouvé pour s’éviter l’implosion. « Je pense que Cece sera rarement avec moi, j’aurais sûrement besoin de compagnie. » Il l’avait désignée de l’index avant de reporter son attention sur Mateo. Pouvait-il saisir toute l’intensité de son regard et de ses sourires en coin ? Il mettait la lumière sur une évidence que Diego se refusait pourtant à voir, cherchant à lutter contre de toutes ses forces. Mais ce mariage semblait être un moment hors du temps que le médecin souhaitait mettre à profit. « Je connais pas les gens avec qui on sera assis, alors… » avait-il ajouté en guise d’explication à une invitation qu’il s’étonnait d’avoir prononcée. « Mais j’ai pas besoin d’un chaperon, tu sais. » avait-il ajouté pour désamorcer cette tension qu’il installait bien malgré lui. Pour prouver son propos, un air de défi dans le regard, Diego avait terminé sa coupe d’une traite avant de la reposer sur la table et la repousser avec deux doigts en hochant la tête en direction d’une serveuse qui l'avait immédiatement remplie. « Et puis t’as raison, Mateo, je pense que Raf’ voudrait qu’on profite et qu’on s’amuse. » Et les mariés obtenaient tout ce qu’ils désiraient le jour de leurs noces.

Pour quelqu'un qui ne comptait pas boire, Diego avait été facile à convaincre. « J’imagine qu’une coupe ne me ferait pas de mal. » Quoi que les actes ne s'étaient pas alliés aux mots immédiatement, la coupe de champagne n'étant pas encore parvenue à ses lèvres. « Je ne sais pas si c’est un compliment ou pas, j’ai l’impression que ça en est pas un venant de toi, je me trompe ? » « Pourquoi ça n'en serait pas un ? » Diego était-il de ceux qui n'ont de confiance en eux qu'en façade ? Lui qui avait une posture si fière et digne, lui qui paraissait taillé pour la réussite, était-il simplement comme les autres en train de jouer le rôle de sa vie ? Mateo était bien conscient que derrière chaque homme d'apparence parfaite se cachaient des failles, mais il n'aurait pas associé Diego à celle ci. Ne pas faire d'erreurs signifiait souvent ne pas se laisser la chance de vivre suffisamment d'expériences pour avoir le loisir d'en faire et oui, ce n'est pas de cette façon dont Mateo traçait sa route. Ça ne l'empêchait pas de croire sincèrement qu'être assez fort pour contrôler sa vie de cette façon était un tour de force, dans un monde où la tentation est présente à chaque seconde. « Pardonne-moi si j’ai du mal à te croire. » Il fronçait légèrement les sourcils. Mateo n'était pas du genre à entamer des conversations profondes avec des inconnus, ni même à se soucier bien longtemps de ce que les gens qu'il ne connaissait pas - ou à peine - pouvaient bien penser de lui. Il aimait vivre sans trop se prendre la tête, et essayait à tout prix de ne jamais se retrouver coincé avec des pensées obsessionnelles ou des réflexions qui le rendraient fou puisqu'il n'avait de toute façon pas le pouvoir de lire dans les pensées des autres pour savoir exactement ce qu'ils avaient en tête. Ou en tout cas, il aimait donner cette illusion pour faire croire que rien ne pouvait le toucher. Sur ce point là, Diego était spécial et intriguant : il semblait presque qu'il ait quelque chose à reprocher à Mateo. Si une réflexion de plus se faisait entendre au cours de la soirée, il serait bien obligé de creuser pour étancher sa curiosité, au risque de se dévoiler un peu plus que d'habitude. En attendant, il préférait garder un sourire sur ses lèvres et s'amuser avec un peu avec Diego, qui lui semblait à deux doigts de se lâcher un peu. Après tout, en tant que témoin, c'était son rôle de s'assurer que le mariage de Raf se passe dans la meilleure des ambiances. Mateo se sentait comme un petit diable posé sur l'épaule de Diego alors qu'il essayait de l'inciter à craquer pour une coupe de champagne, rajoutant sur la liste de ses arguments celui de sa compagnie pour un bon bout de la soirée. « Je pense que Cece sera rarement avec moi, j’aurais sûrement besoin de compagnie. » Ça semblait fonctionner et il ne pouvait qu'en être ravi, Diego étant certainement l'un des invités que Mateo avait le plus envie de découvrir jusqu'ici. « Je connais pas les gens avec qui on sera assis, alors… » Mateo allait finir par croire que son imagination lui jouait des tours, persuadé que certaines paroles prononcées par son interlocuteur étaient plus chargées en sous entendus que ce qu'il ne laissait penser. « Mais j’ai pas besoin d’un chaperon, tu sais. » Et dans un air de défi ou de contestation qu'il n'avait pas su interpréter, Diego avait avalé sa coupe d'une traite. « Ok, ok, je vois. » Qu'il lançait comme une excuse à demi mot pour l'avoir sous estimé. Le sourire en coin qui s'était dessiné sur ses lèvres s'était intensifié à présent. « Et puis t’as raison, Mateo, je pense que Raf’ voudrait qu’on profite et qu’on s’amuse. » Il ne pouvait qu'être d'accord mais il préférait s'assurer de ne pas retrouver Diego couché par terre d'ici une heure ou deux, alors il précisait : « Essaie quand même de pas t'en enchaîner trois ou quatre comme ça, sinon tu finiras vraiment par avoir besoin d'un chaperon. » A quelques mètres de là, le père de Raf venait appeler Mateo pour qu'il le rejoigne. « Je te laisse, le devoir m'appelle. » Il avalait en vitesse les deux gorgées qu'il lui restait pour vider son verre et le reposer vide sur la table. « A plus. » Et il s'éloignait d'un pas rapide pour ne pas ralentir le programme de la soirée.

L'apéritif s'était terminé sans avoir trop traîner, Mateo avait fait entrer les invités dans la salle de réception pour le dîner et lorsqu'ils furent tous réunis à l'intérieur, les mariés avaient fait une entrée remarquée. Le temps filait à une vitesse difficilement gérable et c'est seulement une fois les entrées débarrassées de table qu'il avait eu le loisir de sortir s'aérer l'esprit avec une cigarette et quelques convives, avant de se décider à se rendre table 10 comme il l'avait promis plus tôt dans la soirée. En entrant Mateo aperçu la blonde qui accompagnait Diego - sa copine, donc - se lever, laissant Diego seul. C'est alors qu'il s'empressait d'aller lui piquer sa place. « Ils t'ont déjà tous abandonnés ? » Il avait vu une bonne partie de ses colocataires de la soirée dehors lorsqu'il y était quelques minutes plus tôt. « T'as l'air toujours en forme. C'est une bonne chose. » Ça devait vouloir dire qu'il n'avait pas continué de vider des verres d'alcool d'un coup d'un seul, et c'était une bonne chose. « Je crois que j'peux pas en dire autant. » Depuis qu'ils s'étaient quittés Mateo avait bu quelques verres, avait couru partout pour aider à l'organisation et il avait fait sauter le bouton du col de sa chemise.

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ft  @Mateo Alvarez

« Pourquoi ça n'en serait pas un ? » Il n’avait pas anticipé la question et un rire gêné s’était échappé de ses lèvres. A la place d’une réponse banale, Diego s’était contenté d’hausser les épaules, comme si cela donnerait l’occasion à Mateo de se poser encore un peu plus de questions sur lui. Et pour donner l’illusion de maîtriser la situation, il avait finalement laissé entendre qu’il n’avait pas besoin que Mateo le surveille - quand bien même il espérait de toutes ses forces qu’il le ferait. « Ok, ok, je vois. » avait-il répondu et Diego se doutait qu’il n’en resterait pas là, comme s’il anticipait son besoin d’avoir le dernier mot. « Essaie quand même de pas t'en enchaîner trois ou quatre comme ça, sinon tu finiras vraiment par avoir besoin d'un chaperon. » L’air de défi qui avait paré son visage n’était qu’une façade, Diego ne se risquerait pas à dépasser un nombre précis de verres, n’étant même pas certain de s’en autoriser un second alors que, déjà, celui-ci faisait son effet. Peut-être juste ce qu’il lui fallait pour se détendre et entamer une discussion un peu plus sérieuse avec celui qui le prenait pour un inconnu. « Je te laisse, le devoir m'appelle. » Le moment était passé, l’opportunité avait disparu et Diego ne savait pas s’il était soulagé de ne pas s’être mis dans une position encore plus confortable ou déçu de ne pas avoir crevé l’abcès. « A plus. » Diego était resté planté là, le regardant partir et s’immiscer avec aisance dans le déroulement de la suite des événements.

Il avait forcément profité des discours, de l’entrée des mariés, de toute cette effervescence et cette émotion qui régnaient. Pourtant, malgré la joie communicative de Rafael et sa femme, Diego ne réussissait pas à resté pleinement concentré sur l’événement. Il n’avait pensé qu’à lui depuis qu’ils avaient discuté au vin d’honneur et Cecilia avait forcément remarqué la nervosité de son ami. Lui parler de ce qu’il se passait l’avait soulagé, mais il savait également combien le fait de mettre une pareille information entre les mains de Cece pouvait être dangereux. Un sentiment qui s’était intensifié lorsque celle-ci avait à nouveau choisi de s’éclipser après les entrées, plus à l’aise que lui à ce mariage où elle ne connaissait pourtant personne. « Ils t'ont déjà tous abandonnés ? » Il avait sursauté, trop perdu dans le flot de ses pensées pour réaliser qu’il s’était assis à la place que la blonde venait de libérer. « Le plaisir d’être non-fumeur à ce genre d’événements. » Il avait fait de son mieux, encore une fois, pour donner le change et tenter de formuler une réponse banale. « Un problème que tu connais pas, je vais me méfier de ta mauvaise influence. » Il ne pouvait pas s’empêcher de jouer à ce jeu alors même qu’il le savait dangereux. « Quoi ? Tu sens la clope à des kilomètres. » avait-il ajouté devant sa mine étonnée. S’il prônait normalement ses propres vertus, devant Mateo, Diego avait le sentiment d’apparaître comme ennuyeux. « T'as l'air toujours en forme. C'est une bonne chose. » Il s’était tourné vers lui pour le toiser du regard, l’invitant une nouvelle fois à cesser de le considérer comme un enfant qu’il se devait de surveiller. « Je crois que j'peux pas en dire autant. » Diego avait pivoté son corps sur la chaise pour lui faire face et c’était à ce moment qu’il avait constaté la mine rosée et la chemise défaite de Mateo. « On dirait qu’on a pas vécu la même soirée. » avait-il dit dans un rire, lui était encore propre sur lui quand Mateo semblait avoir vécu mille choses. Et cette phrase aurait été tout aussi adaptée à la soirée d’il y a trois ans qui semblait être restée insignifiante pour lui quand elle avait remis tout en perspective chez Diego. « C’est peut-être moi qui devrais te surveiller, finalement. » Son sourcil s’était arqué et ses doigts étaient venus saisir le col de sa chemise pour le remettre correctement avant de prendre une gorgée de son verre d’eau.

L'euphorie de la soirée avait largement emporté Mateo qui ne savait plus où donner de la tête, mais qui adorait cette sensation d'être utile à ses proches tout en appréciant le moment. Il s'était empressé de retourner voir Diego dès qu'il en avait eu le temps et l'occasion, comme il le lui avait promis. Son envie de passer du temps avec lui pour percer ses mystères ou juste apprécier sa compagnie n'avait fait que grandir alors qu'il s'était absenté. « Le plaisir d’être non-fumeur à ce genre d’événements. » C'était plutôt évident que Diego ne fumait pas. Dans l'esprit de Mateo, aucun médecin ne pouvait être aussi informé sur le sujet et ses dangers et prendre malgré tout le risque de s'y exposer. Ce devait être le cas de certains, mais ce n'était certainement pas une généralité. « Un problème que tu connais pas, je vais me méfier de ta mauvaise influence. » Il avait froncé les sourcils, surpris. Sans qu'il ne comprenne pourquoi il avait la sensation d'être à la merci de Diego dans un jeu dont il ne connaissait pas les règles, mais qu'il avait hâte de comprendre. « Quoi ? Tu sens la clope à des kilomètres. » « Ah ouais ? T'es en train de dire que je pue ? » Il fit mine de se sentir en attrapant le col de sa chemise. « Je te jure que je suis loin d'être le pire. » Qu'il lançait en riant franchement, quelque peu désinhibé par l'alcool et l'ambiance de la soirée. « Je vais finir par croire que tu me prends pour un délinquant, un mauvais gars, ou je sais pas quoi. » La réflexion qu'avait fait Diego sur lui n'était pas la première alors qu'ils n'avaient passé que quelques instants ensemble, ce qui piquait encore plus sa curiosité. Encore une fois, son air taquin et ses propos auraient pu réveiller son radar à drague, mais il semblait brouillée aujourd'hui. Il lui manquait certainement des éléments pour comprendre la dynamique qui semblait s'être installée entre eux, malheureusement il ne savait pas comment le percer à jour pour le moment. Alors il essayait de faire comme si de rien était, de garder son air nonchalant, faisant la conversation en espérant qu'une faille lui laisserait l'opportunité de saisir les sous entendus que Diego avait eu à son encontre. « On dirait qu’on a pas vécu la même soirée. » C'est clair qu'à côté de lui, Mateo faisait un peu minable, alors même que la soirée n'était clairement pas encore arrivée à sa fin. Il n'était pas au stade d'avoir du mal à se mouvoir ou à parler - et était bien décidé à ne pas y arriver - mais il n'était clairement plus assez "parfait" pour poser sur des photos qui finiraient dans l'album souvenir. Il en était plutôt au stade des photos qui resteraient précieusement gardées dans les téléphones de quelques invités ou des mariés aux mêmes. « C’est peut-être moi qui devrais te surveiller, finalement. » Il n'avait pas lâché Diego des yeux. « J'ai rien contre. » En un échange de regard, en deux phrases à peine, Mateo en était désormais certain : il se passait quelque chose entre eux. Plus de questions encore affluaient dans son esprit, mais il n'était pas du genre à les garder pour lui. Alors même s'il risquait de gêner le mexicain ou de mettre les pieds dans le plat, il se lançait sans chercher à faire preuve de tact. « C'est ta copine que ça va déranger si elle te vois les yeux braqués sur moi toute la soirée. » Qui était-elle, d'ailleurs ? Il aurait peut-être mieux fait de se renseigner auprès de Raf ou de ses parents pour savoir quelle était leur relation, mais ça aurait été bien moins drôle d'agir de cette façon. « Quoi qu'elle ait pas l'air collante, tu me diras. » Depuis le début de la soirée, et même déjà pendant le vin d'honneur, il ne les avait pas vus ensemble plus de quelques minutes. Bon, il n'avait pas non plus passé sa soirée à les espionner, mais il n'avait cessé de jeter quelques regards dans la direction et c'était le constat qu'il avait fait. « T'es du genre collant, toi ? »

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Peut-être que Diego était resté assis seul à cette table dans un but bien précis, dans l’espoir de le voir revenir, comme il l’avait évoqué. Mais maintenant que Mateo se tenait à ses côtés, il s’en voulait de ne pas avoir fait le choix de rester aux côtés de Cecilia pour s’éviter de sombrer. « Ah ouais ? T'es en train de dire que je pue ? » Il avait attrapé son col en feignant de se sentir, et l’effet dramatique de la situation avait eu pour effet de faire pouffer Diego. « Je te jure que je suis loin d'être le pire. » avait-il finalement ajouté, les laissant partager un rire parce qu’ils savaient très bien à qui il faisait référence. A ces oncles éméchés qui n’avaient pas quitté la piste de danse ou encore à ces gamins mal élevés que les parents laissaient se traîner au sol. Le choix ne manquait pas. Et sans réellement y réfléchir, les mots de Diego avaient franchi ses lèvres. « C’est une odeur que je déteste alors je préférais forcément le parfum que je sentais tout à l’heure. » Le coup d'œil qu’il lui avait lancé lui avait permis de constater ce sourire en coin, un mimique qui avait encore une fois participé à le désarçonner. Le médecin prenait des risques, mais plus il tentait de se ressaisir, plus il se sentait étrangement attiré par lui. « Je vais finir par croire que tu me prends pour un délinquant, un mauvais gars, ou je sais pas quoi. » L’idée que ce que Diego pouvait bien penser de lui lui importe l’avait fait sourire. Le voir justifier intensifiait ce sentiment, cette même sensation qu’il avait ressentie lorsqu’ils s’étaient rencontrés la première fois. Une connexion viscérale qui n’avait pas permis à Diego de réfléchir comme il avait l’habitude de le faire et l’avait amené à ce qui était selon lui la pire erreur de sa vie. Tromper Emery. Pour ce qui était d’embrasser quelqu’un du sexe opposé, le débat était encore ouvert. Et pour ce qui le concernait, Diego avait bien du mal à résister à l’envie de passer du temps avec lui, parce que même s’il était la principale raison de tous ses questionnements, il les oubliait en sa présence. C’était d’ailleurs la raison qui l’amenait à tant de spontanéité - la maigre dose d’alcool ayant cassé un temps la gêne qu’il ressentait - et à des réponses qui suggérait un flirt qu’il ne contrôlait absolument pas. « J'ai rien contre. » Il répondait de la même façon, sur le même ton, et la façon dont leurs regards restaient plongés l’un dans l’autre empêchait Diego de voir plus loin que cette bulle. « C'est ta copine que ça va déranger si elle te vois les yeux braqués sur moi toute la soirée. » Il avait eu un mouvement de recul et avait affiché une moue confuse avant de se ressaisir. Sa copine, oui. Et, heureusement, ce moment de flottement qui lui avait été nécessaire pour se souvenir de son propre mensonge lui avait évité de réaliser la seconde partie de ce qu’avait dit Mateo. « Quoi qu'elle ait pas l'air collante, tu me diras. » avait-il ajouté avant qu’il n’ait eu le temps de répondre, et peut-être que sa détresse passait inaperçue. « T'es du genre collant, toi ? » Sa question l’avait pris de cours, et il avait reposé son verre dont il s’apprêtait à prendre une gorgée. « C’est quoi cette question ? » Il avait ajouté un rire nerveux à la suite de sa réponse avant de se réinstaller sur sa chaise, gagnant du temps. « Elle est du genre à me laisser discuter avec qui je veux sans se poser de questions parce qu’elle a confiance en elle. Et en moi. » Faire l’éloge de Cece n’était pas compliqué, il pensait réellement ce qu’il disait. Pour ce qui était de lui, la blonde n’avait aucun besoin de lui faire confiance ou non, parce qu’elle n’avait que faire de ses histoires - à part peut-être de celle avec Mateo, justement, qui avait su piquer sa curiosité. « Et la question se pose pas, là, de toute façon. » Un nouveau rire s’était échappé de ses lèvres - il discutait avec un homme, alors personne ne saurait y trouver quoique ce soit à redire. « La seule personne collante ce soir, c’est toi, Mateo. » avait-il finalement lancé, son aplomb ayant dépassé la crainte de le voir s’évaporer dans la foule.

« C’est une odeur que je déteste alors je préférais forcément le parfum que je sentais tout à l’heure. » Les mots que Diego prononçaient ne tombaient pas dans l'oreille d'un sourd, et Mateo se posait de plus en plus de questions. Oui, il faut dire qu'il avait tendance à très vite penser que quelques échanges cordiaux pouvaient être des flirts à peine déguisés et oui, il aimait jouer et entrer dans le jeu des personnes qu'il considérait comme attirantes plutôt rapidement. Mais avec Diego les choses étaient plus difficiles à déterminer que d'habitude et il ne cessait d'envoyer des signaux contradictoires. C'est pour ça qu'il s'était décidé à creuser un peu plus le sujet, s'intéressant à lui et à cette fameuse Cece. « C’est quoi cette question ? » Il avait bien vu que son regard venait de changer du tout au tout, que ses questions ne lui avaient pas plu. « J'en sais rien, c'est une question c'est tout. » Qu'il lançait pour désamorcer les choses. Les questions qu'il avait posé n'entraient même pas encore dans la catégorie indiscrétion aux yeux de Mateo, alors il avait du mal à saisir la gêne qu'il lisait sur le visage de Diego. « Elle est du genre à me laisser discuter avec qui je veux sans se poser de questions parce qu’elle a confiance en elle. Et en moi. » Il le voyait rire mais son rire sonnait faux d'autant que sa réponse avait l'air bien trop argumentée pour paraître spontanée. Diego donnait la sensation de devoir se justifier, comme s'il venait d'être attaqué. Ce n'était pas le cas. « Et la question se pose pas, là, de toute façon. » Il l'avait laissé déblatérer sans intervenir, réellement choqué de la tournure que venait de prendre la conversation. Mateo avait l'habitude qu'on lui reproche certaines de ses remarques ou maladresses, il avait l'habitude de dépasser certaines limites et de se faire un peu recadrer de temps en temps. Mais rien de ce qu'il ne pouvait dire en général ne partait d'une mauvaise intention, tout comme c'était le cas ici. Il avait du mal à comprendre pourquoi Diego se mettait dans un tel état soudainement. « La seule personne collante ce soir, c’est toi, Mateo. » Nerveusement, il se mit à pouffer de rire, l'air moqueur, comme s'il trouvait la scène hilarante et qu'il essayait de décrédibiliser son interlocuteur. « Ah ouais ok. C'était pas le but. » L'air détaché qu'il affichait n'était pas assez convaincant pour dissimuler complètement sa frustration, mais il était hors de question qu'il ne laisse voir à Diego qu'il l'avait vexé ou qu'il lui donne encore la possibilité de l'atteindre de cette façon. Ils n'étaient que deux inconnus liés par un proche en commun, ils ne se devaient rien l'un à l'autre. Ils ne s'étaient croisés qu'une ou deux fois jusqu'ici et rien ne les obligeaient à se revoir après ce mariage s'ils n'en avaient pas envie. Et bien que Mateo n'avait pas caché l'intérêt qu'il portait au mexicain, il était hors de question qu'il reste parler avec quelqu'un qui venait le traiter de la sorte. Il avait beau être un bon acteur quand il en avait besoin, il n'était pour autant pas idiot au point de continuer à fanfaronner avec quelqu'un qui venait de lui dire que sa présence n'était pas désirée. « Bah pas de soucis alors, je te laisse. Bonne soirée. » Malgré tout, il avait laissé un battement de quelques secondes avant de se lever pour laisser éventuellement à Diego le temps de s'expliquer sur sa réaction d'une manière ou d'une autre. Mais c'était inutile et il refusait de perdre plus de temps, alors il s'était levé et s'était éloigné sans dire un mot de plus.

Du temps s'était écoulé depuis qu'il s'était un peu lâchement éloigné de Diego, et même si Mateo aurait voulu pouvoir l'éviter pour le reste de la soirée, il venait d'être missionné pour réunir un certain nombre de convives à ce qui serait la dernière séance photo du jour. Il avait rarement vu un mariage avec autant de shootings organisés et riait déjà d'avance de voir son apparence sur les photos évoluer au fur et à mesure de l'avancée de la soirée, mais il n'avait pas son mot à dire et se contentait d'obéir à la demande des stars de la journée. Mateo était parvenu à dédramatiser la remarque qu'il s'était prise de Diego. Même s'il l'avait encore en travers de la gorge, il tenait à ne pas le lui montrer et s'était approché de lui avec la nonchalance qui le caractérisait, s'appuyant d'une main sur le dossier de sa chaise pour attirer son attention alors qu'il était en train de parler. « Surtout va pas penser que je veux jouer au gars collant ou quoi, mais t'as deux minutes ? » Il n'avait pu s'empêcher une pique, qu'il avait masquée d'un merveilleux sourire amusé - et complètement faux. « Raf voudrait faire des photos avec tous ses potes réunis. » Apparemment la mariée avait estimé que ce serait une bonne idée, l'essentiel des clichés pris jusqu'ici montrant essentiellement leurs familles. Il lâchait Diego du regard pour montrer du doigt deux des gars installés à cette table. « Ça vaut pour vous deux aussi. » Et bien qu'ils s'étaient mis tous les deux à râler de devoir se lever, il ne leur laissait pas vraiment le choix et ils s'étaient dirigés tous les quatre vers l'arrière de la salle. A peine la photo fut prise que le marié s'était éclipsé et que les deux grincheux et les autres présents pour le shooting étaient repartis s'installer en attendant le dessert, laissant Mateo le collant avec celui qui ne voulait surtout pas être collé.

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ft  @Mateo Alvarez

Il serait mentir de dire qu’il n’était pas coupable de ce jeu qui l’avait très vite dépassé, avant même qu’il n’ait pu réellement démarrer. Cecilia était apparue comme son joker, et la pointe de culpabilité qu’il ressentait était très vite oubliée lorsqu’il pensait à l’obsession de son amie pour les coups de ce genre. Il en était convaincu, elle adorerait l’histoire lorsqu’il prendrait le temps de lui raconter, peut-être ce soir, lorsqu’il aurait lui-même digéré le fait que Mateo était bel et bien présent. C’était un secret qu’il gardait pour lui, rajoutant à ce sentiment d’interdit qui rendait la discussion encore plus déroutante. De la même façon qu’il avait vécu la soirée où ils s’étaient rencontrés, Diego perdait pied et ne contrôlait pas la situation ce qui ne lui ressemblait absolument pas. Alors il avait tenté de s’en donner l’apparence mais ses tentatives se transformaient bien rapidement en ce qui sonnait comme des appels désespérés à Mateo pour qu’il se souvienne. « J'en sais rien, c'est une question c'est tout. » avait-il répondu et le médecin avait pu voir la mine de l’intéréssé changer du tout au tout. Malgré la façon dont il semblait avoir toutes les difficultés du monde à suivre un Diego qui soufflait le chaud et le froid, celui-ci n’avait pas calmé le jeu. Au contraire, il avait pris une direction bien définie et elle n’était évidemment pas celle qu’il aurait souhaité dans un monde où l’effet que Mateo avait sur lui était quelque chose qui ne le faisait pas paniquer. « Ah ouais ok. C'était pas le but. » L’ambiance avait changé et Diego était soudain plus conscient de ce qui l’entourait, comme si la bulle dans laquelle il n’était pas conscient d’avoir été enfermée venait d’éclater. Le son qui résonnait dans la pièce était maintenant précis, un tube populaire qui passait lors de tous les mariages. « Bah pas de soucis alors, je te laisse. Bonne soirée. » Mais entre eux, les choses ne s’étaient pas aussi bien déroulées que dans les clips vidéos qui accompagnaient les chansons romantiques et Diego n’avait réalisé son erreur qu’à la seconde où Mateo s’était éloigné.

Le reste de la soirée, Diego était resté agité, agitant nerveusement sa jambe sous la table et grignotant l’ongle de son pouce. Cecilia avait posé tout un tas de question, et il avait cru réussir à l’avoir avec un récit banal sur son travail. Cela n’avait pas pris et il avait du lui révéler la présence de Mateo, le fameux garçon dont il lui avait parlé trois années plus tôt. Ses supplications pour qu’elle reste discrète avait porté leur fruit, mais son coup de coude, lui, était flagrant. Il n’avait pas eu besoin de se retourner pour comprendre, il pouvait sentir ce parfum qu’il avait mentionné plus tôt l’enivrer et sa présence se faire un peu plus pesante lorsqu’il s’était approché. « Surtout va pas penser que je veux jouer au gars collant ou quoi, mais t'as deux minutes ? » Il avait eu la confirmation que ses dernières paroles ne lui avaient pas plu et si cela paraissait négatif, Diego voyait cela comme la confirmation qu’il pouvait avoir un intérêt à ses yeux. Il ne se souvenait pas, et pourtant, il ne cessait de revenir vers lui et cela était difficilement appréciable alors qu’il ne réussissait pas à comprendre ce qu’il était en train de ressentir. « Raf voudrait faire des photos avec tous ses potes réunis. » Il n’était pas seul à la table, cette fois, alors il se devait de garder la tête haute. « Ça vaut pour vous deux aussi. » Il avait levé le menton pour acquiescer avec un sourire faux, s’était levé et avait exercé une pression sur l’épaule de Mateo avant de le suivre. Les photographies ne permettraient probablement pas de distinguer toute l’incertitude qui se dissimulait dans son sourire mais cela ne rassurait pas Diego dont les sentiments s’étaient à nouveau mélangés lorsqu’ils s’étaient à nouveau retrouvés seuls. « C’est le moment où je m’excuse ou un truc du genre ? » avait-il lancé avec un rire, le regard encore assombri de Mateo lui indiquant que cela ne suffirait pas. « J'ai l'impression que t'as mal pris ma remarque, dis-moi si je me trompe. » Il avait soupiré, agacé de ne pas réussir à être honnête. « Je pensais pas que ce que je te dirais te gâcherait la soirée. » Leur discussion, d’abord banale, avait pris une tournure qui n’était plus celle qu’entretiendraient deux connaissances à un mariage par politesse et rien ne justifiait de le prétendre. Tout comme affirmer qu'il ait eu un impact sur lui n'était pas un excès d'égo, simplement un constat, parce qu'il avait vu son attitude changer du tout au tout depuis. Au point de reprendre ses mots pour l'interpeller juste avant. « C’est juste que je me demande pourquoi c’est avec moi que tu passes tout ce temps alors que t’as l’air de connaître tout le monde ici. » Si Diego faisait semblant avec le reste du monde, il ne pouvait pas en être de même avec celui qui était au coeur de ce problème. CeCe était la dernière barrière qui l’empêchait de lui rappeler leur première rencontre, et de cette façon, il se sentait protégé. Quelque chose l’empêchait de toute façon de rester sur cette pointe de sarcasme qui avait fait fuir Mateo, cette même chose qui l’avait lié à lui quelques années auparavant. Réalisant l'intensité qu'il avait donné au moment et qu'il n'était pas prêt à tout cela, il avait désamorcé. « C'est à se demander si je te dois de l'argent ou si tu me caches un autre truc. » Il avait attendu de s'assurer que l'amertume de Mateo se soit envolée pour oser une plaisanterie, et s'était retenu de justesse de lui indiquer qu'il semblait presque qu'ils avaient un passif. Pour une raison qui lui échappait, Diego voulait qu'il se souvienne seul.

Mateo n'avait mis que quelques secondes à se réfugier derrière ses grands airs je m'en foutiste, persuadé que son mécanisme de défense était indéniablement le plus efficace pour se protéger de toute souffrance qu'une autre personne pourrait vouloir lui infliger. Aux yeux du monde, lorsqu'il se repliait ainsi sur lui même, il devenait hautain, ingrat, prenait un air supérieur comme si rien au monde ne pouvait l'atteindre parce qu'il n'accordait jamais d'importance à rien. Il était conscient d'avoir ce fonctionnement mais jusqu'ici Mateo n'y voyait pas le mal, certain qu'éloigner au plus vite les personnes qui risquaient de le toucher lui permettait de se préserver. En réalité, c'était ces réflexes qui l'empêchaient de créer de vraies relations avec des nouvelles personnes. Diego faisait partie de ces gens dont il avait besoin de se méfier. Parce que Diego l'avait intrigué, il l'avait fait rire, il lui avait donné sincèrement envie de s'intéresser à lui avant de l'avoir surpris et vexé. En très peu de temps Mateo avait ressenti un peu trop de choses pour ne pas décider d'ériger ces barrières auxquelles il tenait tant, aussi difficile que cela avait pu être cette fois ci parce qu'il n'en avait pas vraiment envie. Alors quand Diego était resté à côté de lui après que tous les autres soient partis, Mateo s'était concentré sur les faits pour garder ses distances : le mexicain était en couple, il avait clairement montré son agacement et son désintérêt, ils n'étaient pas là pour se prendre la tête. Il se répétait ces phrases comme un mantra dans l'espoir que son air détaché devienne la réalité. « C’est le moment où je m’excuse ou un truc du genre ? » Mateo n'aurait pas cru que son interlocuteur reviendrait vers lui de cette façon. Bien que l'entendre se remettre en question flattait une part de son ego, il le gardait pour lui. « Pourquoi tu devrais t'excuser ? » Avait-il lancé d'un air nonchalant assez convainquant pour prouver son détachement à cette situation. « J'ai l'impression que t'as mal pris ma remarque, dis-moi si je me trompe. » Le fait qu'il avait insisté en répétant la remarque qu'il s'était prise un peu plus tôt en était la preuve même, mais il préférait garder le silence, se contenant de hausser les épaules comme s'il ne voyait pas de quoi Diego parlait. « Je pensais pas que ce que je te dirais te gâcherait la soirée. » Piqué au vif, Mateo laissa s'échapper un rire aux airs mauvais. Il refusait de laisser croire à ce quasi inconnu qu'il avait pu influer ne serait-ce qu'une seconde sur son humeur, même s'il y avait une part de vérité qu'il refusait d'admettre. La soirée s'était déroulé sans accroc, il avait passé du temps avec Raf et l'autre témoin qui n'était pas si débile que ça finalement, il avait bu et s'était amusé. Il n'avait pas passé son temps à ressasser leur conversation comme Diego semblait vouloir le croire, ou comme il l'avait sous entendu. Oui, il avait jeté un œil dans sa direction de temps en temps par pure curiosité, mais son intérêt s'était arrêté là. « T'as rien gâché, je passe toujours une bonne soirée. » Une certaine amertume teintait sa voix sans qu'il ne parvienne à la contrôler, alors il continuait à parler pour essayer de la masquer et de se justifier, en quelque sorte. « Tu m'as trouvé collant, j'ai fait en sorte de plus l'être. Je suis pas du genre à traîner avec quelqu'un qui veut pas de ma compagnie. » Voilà la seule raison qui l'avait poussé à s'éloigner de Diego et à en rester à bonne distance jusque là ; celle qu'il voulait que tout le monde croit, celle qui les arrangerait tous les deux tout autant. « C’est juste que je me demande pourquoi c’est avec moi que tu passes tout ce temps alors que t’as l’air de connaître tout le monde ici. » Ses yeux plongés dans les siens, Mateo aurait pu fondre sur place à cet instant. Ça y est, il venait de recommencer avec sa vulnérabilité, à balancer le genre de phrases qu'on ne sort pas par hasard. Diego venait de rouvrir une brèche dans laquelle il aurait pu plonger s'il n'était en train de se répéter encore et encore des faits pour le faire garder les pieds sur Terre, et surtout s'il n'avait pas désamorcé les choses, encore une fois. « C'est à se demander si je te dois de l'argent ou si tu me caches un autre truc. » Ils riaient tous les deux mais le sourire qu'abordait à présent Mateo manquait un peu de sincérité car il commençait à être piqué d'une certaine frustration. Il aurait pu monter au créneau et exiger certaines réponses, mais il devait se rappeler qu'il était là pour passer une bonne soirée et qu'en aucun cas dramatiser les choses ne serait une bonne idée, d'autant plus pour quelqu'un qu'il connaissait à peine. Alors il reprenait son habituel air taquin, son sourire en coin et son regard moqueur. « Je te cache rien. Je t'ai dit dès le départ que j'étais là pour m'assurer que tout le monde respecte les règles d'un mariage réussi, et toi tu les respecte pas. » Parce qu'entre eux, il était clair que Diego n'avait pas touché à une goutte d'alcool depuis la coupe qu'il avait engloutie cul sec au vin d'honneur. « T'es un récidiviste. Et je peux certainement pas accepter de me laisser influencer comme ça. » Il appréciait tout particulièrement le fait de pouvoir échanger le rôle du "gentil gars" et du "méchant gars" entre eux dans ce contexte, d'autant que Diego avait fait une telle réflexion un peu plus tôt dans la soirée. « Tu m'accompagne au bar, histoire de faire amende honorable ? » Il ne comptait plus jouer avec Diego, il ne comptait plus le pousser à boire ou aux taquineries, il ne comptait plus se montrer intrusif. Mais Mateo voulait avoir la confirmation, d'une façon ou d'une autre, que les réactions du Gutiérrez n'avaient rien d'anodines et qu'il n'était pas juste devenu fou à s'imaginer des choses.

old memories and new mistakes
ft  @Mateo Alvarez

Il ne s’était pas attendu à le voir revenir, il avait pu lire sur son visage et dans son attitude à quel point sa remarque avait signé la fin de ce qui avait démarré, peu importe ce que cela était. Diego avait regretté mais il n’avait que peu de solutions à portée de mains, la plus simple qui consistait à le retrouver pour aller s’excuser était également celle qu’il se refusait à offrir. Alors il avait attendu, et comme si le destin avait décidé de frapper une seconde fois, il était revenu, toujours avec ce même air nonchalant. Diego ne le connaissait pas mais il savait qu’il cherchait à dissimuler un agacement, alors il avait finalement décidé de prononcer des excuses qui étaient venues plus facilement parce qu’il n’avait pas été celui qui avait renoué le contact. « Pourquoi tu devrais t'excuser ? » Diego avait haussé les épaules, tentant de feindre l’indifférence aussi bien que le faisait Mateo et il lui avait indiqué son ressenti. « T'as rien gâché, je passe toujours une bonne soirée. » Le ton de sa voix était différent de ce qu’il avait été jusque-là, il avait perdu cette pointe de malice et d’arrogance qui faisait de lui quelqu’un d’aussi intriguant aux yeux du mexicain. Il avait levé le menton, venant acquiescer ses propos. « Tu m'as trouvé collant, j'ai fait en sorte de plus l'être. Je suis pas du genre à traîner avec quelqu'un qui veut pas de ma compagnie. » Bien sûr, le médecin était exaspéré de le voir ainsi ressasser une simple remarque qu’il avait lancée pour s’éviter d’avoir à répondre à une question qui le mettait mal à l’aise. Mateo était détendu, semblait être à l’aise en toutes circonstances, mais ce n’était pas le cas de Diego qui connaissait leur passif et continuait à camper ses positions, refusant de lui raviver la mémoire. Au fond de lui, il espérait que cela lui reviendrait de lui-même et qu’il n’était pas qu’une bribe de souvenir si insignifiante qu’elle ne valait pas la peine de quitter les méandres de son esprit. Un constat triste, que Diego avait chassé en poursuivant la discussion, adoucissant le propre ton de sa voix. « Pourquoi tu réagis comme ça, alors ? » avait-il demandé alors que le regard de Mateo soutenait le sien. « J’ai jamais dit que je voulais pas de ta compagnie. » L’intensité qui naissait dans leurs regards était difficilement gérable, et Diego avait laissé s’échapper un rire nerveux avant de secouer la tête pour regarder le sol.

Diego avait probablement réussi à détendre l’atmosphère parce qu’après sa tentative d’humour, Mateo avait ri et avait retrouvé ce sourire en coin qui ne permettait pas au médecin de continuer à le regarder dans les yeux. Il semblait évident pour lui que quelque chose avait existé, il attendait simplement que Mateo lui explique la portée de cette soirée-là. Et au fil de la soirée, il avait compris et accepté que cela demandrait du temps parce que l’espagnol se comportait avec lui comme avec un inconnu. « Je te cache rien. Je t'ai dit dès le départ que j'étais là pour m'assurer que tout le monde respecte les règles d'un mariage réussi, et toi tu les respecte pas. » Diego avait pincé les lèvres en hochant la tête, venant acquiescer les propos bien trop exagèrement pour sembler sincère. Il ne l’était pas, il se moquait gentiment de son interlocuteur et de la façon dont il revenait, encore, sur le même sujet. « T'es un récidiviste. Et je peux certainement pas accepter de me laisser influencer comme ça. » Il le regardait en cherchant à le sonder, s'il était si rabat-joie que cela alors pourquoi continuait-il cette discussion ? Il s'était évité la remarque, ne comptant pas le faire fuir une seconde fois. « Tu m'accompagne au bar, histoire de faire amende honorable ? » « J’ai cru un instant que c’était toi qui voulais pas de ma compagnie. » avait-il lancé en arquant un sourcil, celui qu’il utilisait parfois pour charmer. Un geste rare mais qu’il accordait à Mateo sans réussir à le contrôler. Une fois au bar, les verres s’étaient accumulés - à une cadence plus importante chez Mateo - et ils avaient enfin trouvé un terrain d’entente. Cette bulle qui avait été la leur trois années auparavant ou plus tôt dans le mariage les entourait à nouveau parce que le moment s’y prêtait plus. CeCe s’était trouvée des amis pour profiter de la piste de danse et les lumières tamisées ne laissaient plus l’opportunité pour les fêtards de voir ce qu’il se passait ailleurs. « Comment ça se fait qu’on ne se soit jamais vus avant si t’es aussi proche de Raf’ ? » avait-il finalement demandé alors que la conversation précédente s’était éteinte et allait laisser place à un silence gênant. Peu à peu, l’alcool faisait son effet, la dose étant pourtant minimale et Diego avait passé une main dans ses cheveux pour tenter de ramener les mèches rebelles qui tombaient sur son front à leur place. « C’est dommage, je trouve qu’on s’entend plutôt bien. » Son visage indiquait tout le sarcasme qu’il souhaitait dégager mais il ne pouvait nier une part de vrai dans cette phrase. Ce soir avait été plus compliqué que le premier, mais il ne cessait de ressentir ce quelque chose indéniable qui le mettait dans une position inconfortable mais qui l’empêchait de vouloir mettre un terme sur cette soirée. « Tu crois qu’ils vont nous reprocher de pas avoir dansé ? » avait-il demandé, venant une nouvelle fois désamorcer une phrase peut-être trop lourde de sens. Ils avaient fait quelques apparitions sur la piste de danse, mais depuis qu'ils s'étaient installés dans cet endroit en retrait, ils ne semblaient plus vouloir en repartir. Diego avait ensuite désigné le verre de Mateo de son index avant de reporter son regard sur lui. « Tu dors sur place, rassure-moi ? Enfin, dormir est un bien grand mot. » avait-il ajouté en jetant un œil à sa montre. Lui ne dormait pas sur place, il devrait bientôt rentrer et l’idée de ne le revoir qu’après trois années lui serrait déjà le coeur.

« Pourquoi tu réagis comme ça, alors ? » Le fait qu'il rappelle sans cesse à Diego sa remarque prouvait que Mateo l'avait gardée en travers de la gorge, et le médecin était assez futé pour s'en rendre compte. En réalité, n'importe qui aurait pu le remarquer avec ne serait-ce qu'une once de discernement : Mateo avait clairement échoué la moitié de ses tentatives de paraître détaché. « Comme quoi ? Je te vanne c'est tout, déstresse. » Il avait baissé les yeux en prononçant cette phrase, ne pouvant mentir à quelqu'un en le regardant droit dans les yeux. « J’ai jamais dit que je voulais pas de ta compagnie. » Et alors que la tension était à nouveau palpable entre eux, Mateo avait décidé de briser cette dynamique dont il ne savait pas vraiment quoi faire en lançant un vague « Si tu le dis. » qui n'avait rien de convaincu.

Heureusement, l'ambiance s'était assez rapidement allégée entre les deux. « J’ai cru un instant que c’était toi qui voulais pas de ma compagnie. » « Pourtant je pensais avoir été plutôt clair là dessus. » Si Diego avait été célibataire et s'était montré plus ouvert, il aurait pu être encore bien plus clair sur le sujet. Mais le chaud froid qu'il lui soufflait depuis le départ était assez dérangeant pour que Mateo respecte une certaine distance sans essayer de la rompre. Ils s'étaient installés au bar, loin de la vue des invités tous plus occupés à se déhancher sur la piste qu'à observer les autres. Cette vision donnait à l'assistant comme un air de déjà vu. Mateo avait enchaîné quelques verres depuis qu'ils étaient là mais rien qui ne suffise à le mettre dans un état dans lequel il pourrait dire des choses qu'il risquait de regretter, alors toutes les conditions étaient là pour qu'ils puissent continuer leur conversation sans risquer un autre quiproquo ou un froid. « Comment ça se fait qu’on ne se soit jamais vus avant si t’es aussi proche de Raf’ ? » Mateo commençait par hausser les épaules, n'ayant pas de réponse préconstruite à lui servir. Il s'était posé la question un peu plus tôt dans la soirée et n'avait pas trouvé de réponse concluante. « C’est dommage, je trouve qu’on s’entend plutôt bien. »  Voilà encore ce regard, celui qu'il avait décelé à plusieurs reprises au cours de la soirée et qu'il n'était pas parvenu à déchiffrer. S'il était du genre à aimer tout savoir et à aimer gagner, Mateo avait du mal à gérer la frustration qu'il ressentait à ne pas pouvoir lire en Diego comme dans un livre ouvert. « C'est vrai. » Un silence de quelques secondes vint intensifier l'ambiance particulière qu'il y avait entre eux. « Tu dis rien, mais en général j'aime pas trop son entourage. Donc quand je le vois c'est plutôt seul à seul ou en famille. » De toute manière, Mateo était plutôt du genre à choisir ceux qu'il fréquentait plutôt qu'à subir la présence de personnes qu'il n'appréciait pas spécialement par simple politesse ou convention sociale. « Tu crois qu’ils vont nous reprocher de pas avoir dansé ? » Machinalement il avait secoué la tête. Ses passages sur la piste de danse resteraient très certainement dans les mémoires et il avait du mal à croire que Raf lui en voudrait de ne pas avoir passé toute sa soirée à lui voler la vedette - bien au contraire. « Oh non, on a quand même dansé un peu. » A moins que ce n'était une invitation et que Diego avait envie d'y retourner ? Pour s'en assurer, il tentait une approche. « Au pire la soirée est pas finie, on a encore l'occasion de se rattraper s'il le faut. » Lui ne comptait pas quitter la fête de si tôt. Il avait même prévu de rester jusqu'au petit matin et finirait parmi les derniers rescapés de ce mariage, c'était certain. « Tu dors sur place, rassure-moi ? Enfin, dormir est un bien grand mot. » Très clairement, sa nuit serait courte ou inexistante. « Non je dors pas là mais je me fait ramener, t'en fais pas pour moi. De toute façon j'ai pas prévu de rentrer tout de suite. » Il regretterait de voir Diego partir plus tôt mais comprenait bien que tous les invités ne pouvaient pas suivre le même programme que celui qu'il s'était fixé, d'autant plus qu'il avait promis de rester pour aider à ranger un peu. « C'est moi ou on est des gars vachement bienveillants quand même ? » Qu'il avait lancé sans réfléchir après avoir vidé le verre qu'il avait devant lui depuis un bon moment maintenant. Évidemment il faisait référence au fait qu'il ait proposé de surveiller Diego autant qu'au fait que ce dernier venait de s'inquiéter de la façon dont il allait finir la soirée. S'imaginant que sa réflexion pourrait être comprise pleine de sous entendus, il ajouta : « J'veux dire de manière générale, on est des gars bien. Pas juste l'un envers l'autre. » Ce qui n'était pas mieux en somme. Il ignorait pourquoi il ressentait ce besoin de se justifier ainsi, ce qui ne lui ressemblait absolument pas. Mais il n'avait pas le recul nécessaire pour s'auto-analyser à cette heure ci et avec la quantité d'alcool qui coulait dans ses veines. « Et toi tu conduis pas j'espère ? Pour quelqu'un qui bois pas, on peut pas dire que tu sois sobre là. » C'était totalement de sa faute et il en était conscient, alors il avait accompagné sa question d'un haussement de sourcils, presque fier de lui.