| | | (#)Mer 3 Avr 2024 - 2:49 | |
| Naïf, Archie avait pensé que dès le moment où Carmine poserait les fesses au sol, le calme suivrait la tempête. À l’écoute aveugle des supplices de son amant, il se sent complètement impuissant. Pas de lumière pour le guider dans la bonne voie, pas de maîtrise en psychologie pour l’aider à gagner la bataille contre cette peur invisible. Archie n’a jamais eu de phobies. Le noir, les endroits étroits, les araignées, les germes… Tout cela lui passait à des kilomètres au-dessus de la tête. Mais il pouvait s’adapter. Il devait s’adapter. Retranscrire la dernière crise de panique qui l’a submergé le jour de leur rupture dans d’autres mots qui décriraient mieux la chose contre laquelle Carmine se bat dans la réserve étriquée. Des éléments sont similaires. Lui non plus n’était plus capable de remplir ses poumons, avait l’impression que ces derniers étaient ratatinés dans sa poitrine et morts avant lui. « Archie ! » La supplication, dépourvue de la colère qui faisait rimer leur échange quelques secondes plus tôt, lui pince le cœur. À tâtons, il se met à ramper au sol comme un gamin qui n’a pas encore appris à marcher. C’est la semelle du garçon qu’il vient d’abord sentir sous sa paume, puis il suit la ligne de sa silhouette jusqu’à ses hanches, constatant que Carmine s’est couché sur le dos. « I CAN'T BREATH ! » « Yes, you can. Focus on the amount of air you can breathe, not on what you cannot. » Il annonce comme un présentateur météo. Ses organes vitaux fonctionnent encore, c’est son cerveau qui lui joue des tours. Sous sa paume, le garçon ne cesse pourtant de s’agiter, et au mouvement qui s’agglutine au niveau de son thorax, il comprend que la cravate est de trop avant que l’ordre ne sont prononcé. « I will. » Toujours aussi serein, Archie doit faire preuve de courage pour deux. S’approchant encore plus en s’abimant les genoux au sol, il arrive à dénicher le nœud de cravate qui surplombe une poitrine bouleversée et pleine de sursauts. Une fois la tâche accomplie, il pose une paume légère et froide sur le front du garçon. Archie est complètement frigorifié, l’air climatisé dans la réserve étant configurée de sorte à maintenir les boissons au frais. Carmine, lui, est bouillant et coulant de sueur. Il vient replacer quelques mèches qui s’étaient visiblement collées à ses sourcils afin de lui épargner de la sensation d’être pris dans un filet de pêche. « Je te l’ai retirée. Il n’y a plus rien qui t’empêche de respirer désormais. » Même si c’était dans sa tête depuis le début, Archie pouvait se permettre de truquer un peu la réalité à son avantage.
Des minutes de concentration et de silence passent. Sous sa seconde main, le rythme cardiaque de Carmine a décéléré. « I’m sorry I told you about my feeling on the eve of the storm. »
@Carmine Cavendish |
| | | | (#)Mer 3 Avr 2024 - 10:40 | |
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Closet party Archie ❦ Carmine
Il était sur le point d'imploser. Ou peut-être d'exploser. Carmine ne savait plus. Son savoir se résumait au fait qu'avec cette cravate autour du cou, il finirait à coup sûr par rendre l'âme. « Je te l’ai retirée. Il n’y a plus rien qui t’empêche de respirer désormais. » La voix d'Archie le traversa comme une lame de fond. C. sentit ses muscles se contracter tous en même temps puis se relâcher aussi soudainement. L'impression de vertige était si grande que, même allongé, le monde entier continuait de tanguer sous son dos. Yeux fermés, Sa Majesté s'accrochait au contact rassurant des doigts de l'actionnaire sur son front. L'absurdité de la situation lui échappait autant que celle de la solution apportée au problème. Fallait-il vraiment qu'il se rapprochât d'un problème encore plus dangereux pour lutter contre un autre ? Si la claustrophobie était une cage sournoise, Archie était le requin de l'autre côté des barreaux. Mais ce soir-là, dans la réserve, il n'était plus question de se protéger de l'un par le biais de l'autre. La porte de la cage avait cédé et Kwanteen nageait tranquillement à ses côtés, comme ces grands prédateurs inquiétant de calme et dont il était impossible de prédire la morsure. Dans le silence assourdissant de leur naufrage, l'Anglais comptait ses respirations autant que celles de son associé. Il aurait souhaité que le livre se termine sur ce sentiment de vide après le plein ; sur la moiteur froide de son cadavre surplombé par son meurtrier. « I’m sorry I told you about my feeling on the eve of the storm. » Cavendish n'eut pas la force de soupirer. Il n'était de toute façon plus en position de prendre Archie de haut et se contenta d'accueillir, résigné, la vague de souvenirs associés à ce regret. Carmine se souvenait de la mallette posée aux pieds de son associé. De cette étreinte en beurre fondu et pleine de larmes. Il le revoyait attraper le scone comme s'il avait s'agit d'un poussin à peine né, observer d'un air fébrile la tempête déraciner les palmiers de l'autre côté de la baie vitrée tandis qu'il lui avouait avoir besoin de certitudes afin de ne pas tout perdre. Où étaient passée la promesse de faire des efforts et de ne pas reproduire les mêmes erreurs ? « Ne m'abandonne plus jamais dans la cuisine. » Vulnérable, l'Anglais se moquait bien de l'image qu'apposait cette réplique sur sa personne amoindrie par la crise de panique. La faiblesse de son timbre était moins due à la fragilité qu'à la fatigue. Il ne suppliait pas Kwanteen de faire mieux, il l'en défiait. « We're partners. » Rappela-t-il. Au rugby et en affaires. « I can pretend you never told me about it. » Effacer l'intimité comme si elle n'avait jamais existé. Oublier la joie, la complicité, le bonheur. Tirer un trait sur cet aspect de leur collaboration pour sauver ce qui pouvait - ce qui devait - l'être. « Just stop letting us down. »
Dernière édition par Carmine Cavendish le Ven 12 Avr 2024 - 15:21, édité 2 fois |
| | | | (#)Mer 3 Avr 2024 - 16:40 | |
| « Ne m'abandonne plus jamais dans la cuisine. » Les souvenirs de cette étape fatidique de leur collaboration sentimentale viennent lui arracher quelques autres larmes silencieuses. Dans la noirceur la plus totale, il peut se permettre de vivre les émotions sans porter son masque. Il ressent à nouveau que la simple présence invisible de Carmine à ses côtés lui rappelle la puissance des sentiments qu’il éprouve à son égard, et la légitimité de cette étreinte dans le couloir quelques mois plus tôt. Toute sa vie il a fait semblant ; cette fois il était vrai, pour l’anglais, pour lui-même, pour les quelques personnes qu’il a croisées avant que les médias ne s’arrachent une histoire de complicité masculine entre un musicien et son mannequin. Il avait ressenti une telle délivrance, si forte, si libératrice, mais il aurait dû se douter que rien ne dure dans un cœur qui mène une bataille perpétuelle opposant ses envies et l’importance d’être un bon fils. Le seul fils. « We're partners. » Redressant le nez de ses larmes, il observe en silence la position du visage de Carmine dans le noir de la réserve. Le rythme cardiaque de l’homme maintenant calmé, Archie a interrompu le contact de sa main froide contre son front. Il n’a plus besoin de lui. La trêve devra être signée, que son cœur le désire ou non. « I can pretend you never told me about it. » Prétendre jusqu’à ce que ça fasse trop mal. Le destin est déjà écrit dans la pierre. Archie est maître en la matière, et il a l’a appris à ses dépens – il a aussi eu un rappel au gré de quelques écriteaux barbouillés sur le miroir de sa salle de bains, un certain soir. Combien de temps cela pourrait durer ? Quelques jours ? Mois ? Années ? Combien de temps Archie supportera-t-il de sentir cette lame caresser sa carotide ? A-t-il d’autres choix, de toute façon… « Just stop letting us down. » Nouvelles larmes tandis que son visage se crispe et sa gorge laisse échapper un gémissement que Carmine peut capter. Bien sûr qu’il est le seul fautif. Il ne croit plus en l’importance de ses exploits maintenant qu’il a goûté la saveur du bonheur sans artificialité. Il continuera de se cacher derrière les médailles et les signatures de contrat, mais il ne se laissera plus convaincre par ces illusions d’optique de piètre qualité.
« Je ferai de mon mieux. »
Et tandis que les heures passent (deux, plus précisément), c’est dans un sursaut qu’Archie accueille l’arrivée nette de la lumière et le redémarrage de l’air climatisé. Il doit d’abord se frotter les yeux, remplis de sel cristallisé à la bordure de ses paupières. Gorge pâteuse et sèche, il constate qu’il n’a plus touché à la bouteille de porto, qu’il s’est laissé crever de soif. Jetant à peine un regard sur Carmine, qui réapprivoise l’environnement aussi, il lâche doucement : « J’espère qu’ils comprendront la situation et qu’ils auront reporté la rencontre en ligne. » Et il renifle, immobile au sol, laissant le garçon comprendre qu’il peut partir le premier de cette réserve de l’enfer. Lui, il n’a plus nulle part où aller.
@Carmine Cavendish |
| | | | (#)Ven 12 Avr 2024 - 16:13 | |
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Closet party Archie ❦ Carmine
« Je ferai de mon mieux. » C. ne répondit pas. À quoi bon verbaliser ses doutes quant à la capacité d'Archie d'y parvenir ? Cela n'aurait pas aidé l'actionnaire à y mettre du sien, à mobiliser son meilleur afin que toute cette histoire ne se terminât pas en fiasco entrepreneurial en plus d'avoir échoué sur le plan sentimental. Tout ce que le mannequin pouvait espérer désormais était de ne pas être encore déçu. Pour cela, Cavendish avait une stratégie imparable : ne plus rien espérer. Rongé par la froideur du bitume au creux de ses reins, Sa Majesté se replongea dans l'historique de 2023. Des présentations autour de l'étrange coïncidence de leurs Rolex aux catiminis de leurs rencontres suivantes, Cavendish s'arracha le cœur à détricoter le fil d'or de leur ligne du temps. Il n'était plus un enfant. Plus non plus un adolescent. La vie continuerait de faire son chemin sans qu'il agonise indéfiniment d'avoir perdu cet autre qu'il doutait à présent d'avoir jamais eu. On ne possédait pas l'amour. Il nous possédait. Dans le silence évangélique de la réserve, Carmine exorcisait les démons ... Deux heures d'attente ne furent pas de trop. Au bout d'une quarantaine de minutes, complétement gelé, Sa Majesté se redressa et s'assit aux côtés de son associé sans rien ajouter. Même dans le noir, il sentait la présence de Kwanteen à sa gauche. Il fallait apprivoiser cette nouvelle dynamique, ce nouvel équilibre nécessaire à la poursuite de leurs objectifs communs. Ne plus désirer. Ne plus haïr. Ne plus fuir. Ne plus mépriser. Accepter l'autre, tout simplement. Tolérer son existence si proche et pourtant si lointaine ... Ils eurent le temps de se familiariser avec ce qui serait désormais leur quotidien professionnel. Puis la lumière revint, obligeant Carmine à se protéger les yeux d'un revers de main. « J’espère qu’ils comprendront la situation et qu’ils auront reporté la rencontre en ligne. » « Je l'espère aussi. » Répondit-il tout en se redressant, le corps endolori par les péripéties de la soirée. D'un pas raide, Sa Majesté rejoignit la porte de la réserve. Sur le seuil, il hésita, puis fit le choix de s'en tenir au plan : « Bonne nuit. » Il éteignit la lumière en sortant. |
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