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@Faith Palmer + Autumn Galloway

Tu ne sais pas trop comment tu te sens, maintenant que tu as enfin quitté l’hôpital. Tu pensais que de ne plus avoir à regarder les murs blancs t’apporteraient un soulagement certain, mais la vérité est que tu es incertaine maintenant que tu as retrouvé ta vraie vie. Cette vraie vie qui ne ressemble en rien à celle que tu as laissé derrière, il y a six mois à peine. Si tu refuses de te replonger dans les évènements qui ont tout déclenché, cette soirée qui a précédé ton hospitalisation, tu ne peux t’empêcher de ressentir maintenant plus que jamais l’absence de Kieran, ce départ que tu aurais dû voir venir à des kilomètres à la ronde, mais que tu n’arrives toujours pas à accepter. Il y a cette rage qui bouille au fond de ton être, celle que tous les spécialistes autour de toi te forcent à extérioriser d’une manière saine, mais tu ne sais pas comment, et honnêtement, tu n’es pas certaine d’en avoir envie. Parce que tu lui en veux tellement, à Kieran, de t’avoir abandonné à ce moment précis, alors que tu avais besoin de lui plus que jamais. Tu lui en veux d’avoir disparu dans la nature, ne t’offrant qu’une lettre avec des explications bancales et des adieux que tu ne veux pas accepter. Tu lui en veux d’être lâche, oh si lâche, et tu ne sais pas de quoi tu rêves le plus après plusieurs mois à devoir te faire à l’idée : le retrouver, ou te venger.

Dans l’immédiat toutefois, tu ne peux faire ni un ni l’autre, alors tu tentes de faire ce que ta psychiatre t’encourage à faire depuis des mois : te concentrer sur ce que tu peux contrôler. Tu peux contrôler comment réagir à la nouvelle de ta mère, celle qui t’ordonne de ne plus rentrer en contact avec Faith, celle que tu considères pourtant comme ta tante depuis des années. Tu as essayé de lui tirer les vers du nez, mais ta mère refuse de s’étendre sur le sujet, donc tu contrôles la situation en te dirigeant directement à la source. Tu ne l’as pas dit à tes parents parce qu’ils ne comprendraient pas – comme ils ne semblent jamais en mesure de te comprendre – mais il te faudrait une raison extrême pour tourner le dos à Faith. Même avant ton hospitalisation, même avant cette descente aux enfers qui semble être tienne depuis des mois, des années peut-être, elle semblait te comprendre mieux que quiconque, mieux que tout ceux qui juraient être tes proches pourtant et tu as besoin d’elle. Quelque chose te dit qu’elle aussi, a besoin de toi. Tu ne pourrais pas l’expliquer, tu ne sais pas le pourquoi, ni le comment, mais c’est un pressentiment que tu ne peux secouer depuis cette discussion cryptique avec ta mère. La distance entre Toowomba et Brisbane n’est pas longue, et tu tais toutes tes pensées sous une playlist qui t’amène à chanter d’un bout à l’autre de la ville. Ce n’est pas une solution permanente, mais tu te sens un peu plus légère après ta séance karaoké improvisée, préférant arriver chez ta tante avec un semblant de sourire qu’une humeur misérable. Quelques coups contre la porte laissent entendre ton arrivée, et quand la silhouette de Faith apparaît une fois la porte ouverte, il te suffit d’un coup d’œil porté sur elle pour savoir que ton pressentiment ne t’avait pas trompé. « Coucou tata. » que tu souffles, utilisant ce surnom que tu utilisais pour elle lorsque tu n’étais qu’une gamine. « T’as un peu de temps pour moi? » que tu lui demandes, plaçant une boîte de beignes entre vous. S’il y a une chose que ta mère a instillé en toi, c’est de ne jamais te présenter chez autrui les mains vides.

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Faith Palmer + @Autumn Galloway

Les trois derniers mois avaient été un horreur. Faith avait coulé profondément suite au décès de Noah pour tenter de refaire surface par la suite. Si elle était déjà alcoolique, elle avait laissé son vice prendre possession de sa vie complètement jusqu’à frôler l’urgence. Elle s’était complètement refermée, refusant l’aide à laquelle elle aurait eu droit, espérant même que Noah vienne la chercher. N’étant pas capable de commettre elle-même l’irréparable, elle avait prié pour que sa consommation d’alcool mette fin à sa vie, recommençant à boire lorsqu’elle ouvrait les yeux et constatait qu’elle était encore sur terre. Son mari lui demandait de se pardonner à elle-même pour les dernières années, pour son incapacité à mettre un enfant au monde, mais elle en était incapable. Il était parti avec la dernière petite partie de vie qui la retenait encore. La douleur qu’elle ressentait partout dans son corps était insupportable. Puis, un matin qu’elle s’était levée avec un marteau piqueur qui cognait dans le fond de sa boîte crânienne, elle entendit vit sur son facebook une publicité des alcooliques anonymes. Comment avait-elle fait pour se lever et se rendre au meeting ? Elle n’en avait aucune idée. Le 8 mars 2020 avait été le premier d’une série de plusieurs autres. Elle essayait de garder en tête les paroles que les gens des AA, qu’elle méritait de vivre et qu’elle méritait de s’en sortir, mais c’était souvent plus facile à dire qu’elle a fait. On était un peu plus de la mi-mars. Elle avait déjà une rechute à son actif, mais elle essayait. Elle essayait tellement fort. Elle devait le faire pour Noah. Elle devait le faire pour tous ses petits anges au ciel.
Ce matin-là, elle s’était levée avec l’impression qu’un camion lui avait passé sur le corps. Trois jours qu’elle n’avait pas touché à l’alcool, le compte étant retourné à zéro lorsqu’elle avait laissé une bouteille de vin gagner. Les symptômes de sevrage étaient difficiles à gérer. Elle avait des douleurs physiques qui lui donnaient constamment envie de reprendre la bouteille pour avoir quelques minutes de répits. Elle se dirigea difficilement vers la salle de bain, prit le temps de s’arrêter devant la chambre qui devait être celle de leur futur enfant, mais qui fut plutôt le berceau de la tragédie, posa son front contre la porte close et ferma les yeux quelques instants avant de continuer son chemin. Lorsque son regard croisa le miroir, elle constata à quel point elle avait l’air d’une épave. Ses traits étaient creusés, ses yeux bordés de cernes foncés. On pouvait lire dans son visage tout le poids de sa souffrance. Elle s’épongea avec une débarbouillette d’eau froide pour essayer de se réveiller, sans voir de réel résultat. Elle prit une grande inspiration et entendu des coups portés à sa porte. Pendant quelques secondes, il lui passa à l’esprit qu’elle n’irait pas ouvrir, que la personne devant son appartement finirait par quitter. Elle prit toutefois son courage à deux mains et tourna la poignée. « Coucou tata. » Autumn. Celle qu’elle considère comme sa nièce et même comme sa fille se tenait devant elle alors qu’elle la croyait encore à l’hôpital. Faith n’avait pas trouvé le courage depuis le décès de Noah pour lui rendre visite, ni même lui donner un coup de téléphone. Celle pour qui elle avait toujours accepté de faire des efforts, limiter sa consommation avant de lui rendre visite était devant elle et maintenant, le coeur de la quinquagénaire battait à tout rompre. « T’as un peu de temps pour moi? » Elle attrapa la boîte de pâtisserie qu’elle lui tendait, fit un signe de tête et céda sa place pour la laisser entrer. Comment ferait-elle pour lui annoncer que Noah était parti ? Qu’il avait décidé de s’accrocher à ce crochet plutôt qu’à la vie ? Faith n’avait pas eût la force de contredire les parents de la jeune femme lorsqu’il lui avait imposé de ne pas l’avertir pour ne pas retarder sa sortie de l’hôpital, mais elle se retrouvait maintenant avec le fardeau et elle n’était pas prête pour ça.  « Tu es sortie depuis quand ? » Elle se dirigea à l’évier aussi rapidement que son corps le permettait. Elle se fit couler un verre d’eau froide pour tenter de chasser la sécheresse qui s’était installée dans sa gorge.  « T’es parents sont au courant que tu es ici ? » Faith était convaincue du contraire. Après la crise que la mère d’Autumn lui avait faite au funéraille de Noah, la manière dont elle lui avait dit qu’elle ne voulait plus que sa fille soit en contact avec elle, elle savait que ses parents seraient contre tout contact.

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@Faith Palmer + Autumn Galloway

Tu n’as pas besoin de l’observer longtemps pour savoir que quelque chose ne va pas. Tu ne dirais pas que tu as un don ou quoique ce soit, mais tu as toujours été plutôt douée pour remarquer la misère des autres. Peut-être parce que tu es si familière avec cette dernière, comme une présence éternelle dont tu ne peux défaire et tu ne peux que la reconnaître chez les autres, surtout ceux qui te sont proches, ceux à qui tu tiens. Faith est parmi ceux-là, haute sur ta liste, sans doute parce que tu t’es toujours sentie bien plus comprise par elle que par tes propres parents. Parce qu’elle a une oreille attentive que tu n’as jamais su retrouver chez ta mère, parce qu’elle a une épaule soutenante plus forte que celle de ton père et qu’elle est capable de garder tes secrets, tes craintes et tes peurs plus facilement que ton frère, peu importe à quel point tu fais confiance à Owen. Tu es instantanément sur tes gardes, cherchant à comprendre ce qui peut expliquer pourquoi elle te semble si pâle soudainement. Pourquoi il manque un certain éclat dans le fond de ses yeux. Tu te demandes pourquoi elle n’est jamais venue te voir à l’hôpital non plus. Tu lui en voudrais presque, si tu n’étais pas si inquiète pour elle. Elle te débarrasse des pâtisseries que tu lui as apporté, mais plutôt que de te serrer dans ses bras comme elle le ferait normalement, t’offrant plutôt un simple hochement de la tête pour entrer dans l’appartement avant de refermer la porte derrière toi. « Tu es sortie depuis quand? » qu’elle te demande, avant de te tourner le dos et de se rendre à la cuisine. Tu as l’habitude de faire comme chez toi, alors c’est exactement ce que tu fais, laissant tes chaussures à l’entrée avant de suivre ta tante, continuant de la dévisager, un air inquiet sur ton visage. « Ça fait deux semaines. » que tu lui avoues sans trop en dire, la dernière chose que tu as en tête étant tes propres nouvelles. Pour une fois, tu n’as pas envie de parler de l’hôpital, de la bouffe immangeable, des millions de sessions de thérapie, de ta rupture et de tout ce qui s’est passé juste avant. Tu ne fais que ça, parler de toi depuis six mois, et tu as besoin d’une pause. « Tes parents sont au courant que tu es ici? » Ah. Donc de toute évidence, peu importe les raisons que tes parents pensent qu’ils ont pour te tenir éloignée de Faith, il s’est passé quelque chose entre eux. Une chicane peut-être, ou tu ne sais pas quoi. Rien qui ne te concerne vraiment, du moins, c’est ce que tu veux croire. Tes parents ont toujours eu cette tendance à exagérer, à créer des problèmes là où il n’y en a pas vraiment. À juger les autres, à toujours voir les défauts sans jamais chercher plus loin. « Non, ils m’ont dit qu’ils ne voulaient plus que je te voie. » Ça ne sert à rien de lui mentir, si Faith pose la question, c’est qu’elle a déjà une idée de la conversation que tu as pu avoir avec tes parents. « Je leur ai demandé pourquoi, mais ils ont rien voulu me dire, alors je me suis dit que toi, tu me le dirais. » Parce que Faith ne te fait pas de cachette. Parce qu’elle ne se cache pas derrière des secrets et des jugements ou toute autre chose comme peuvent le faire tes parents, et c’est exactement de ça dont tu as besoin en ce moment. Mais par-dessus tout, tu as besoin de savoir pourquoi elle a l’air si mal en point. Si fatiguée. Si triste. Est-ce que cela peut être en lien avec ce qui s’est passé avec tes parents? Tu as du mal à croire qu’ils puissent avoir tant d’influence sur ta tante, même si tu sais qu’elle a un cœur d’or, à toujours vouloir le meilleur pour autrui, à défaut d’être en mesure de se l’offrir à elle-même. « Qu’est-ce qui se passe tata? T’as pas l’air bien. » Elle te semble encore plus pâle que lorsque tu es entrée dans l’appartement, tu ne peux t’empêcher de craindre qu’elle ne perde connaissance devant toi et même si tu viens de passer six mois dans un hôpital, tu n’as pas la moindre idée de ce que tu devrais faire si cela venait à arriver. « Assieds-toi, s’il-te-plaît. » Tu tires une chaise et l’aide à y prendre place, ta main s’installant sur son épaule pour lui rappeler que tu es là. Tu es là et elle peut tout te dire.

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Faith Palmer + @Autumn Galloway

Elle n’était pas préparée à ça. Elle n’était pas prête à annoncer à Autumn que Noah était malade, qu’il s’était donné la mort et que tout le monde autour d’elle avait décidé de la garder hors de la nouvelle. Elle n’était pas d’accord avec la décision des parents de celle qu’elle considérait comme sa nièce, mais elle était qui pour aller contre eux ? Après tout, elle n’était qu’une alcoolique en qui son mari n’avait pas assez confiance pour lui confier son diagnostic et lui demander de l’aide. Faith avait peur de la réaction d’Autumn. Elle n’était pas capable de s’occuper d’elle, de gérer une réaction qui risquait d’être intense. Elle avait elle-même de la difficulté à faire son deuil malgré sa décision d’arrêter de boire et de consulter un spécialiste pour l’aider à s’en sortir. « Ça fait deux semaines. » Elle s’en voulait de ne pas avoir été la voir depuis mi-décembre. Bien sûr qu’elle y avait été à quelques reprises avant, mais ça avait toujours été difficile puisqu’avec sa consommation, elle n’avait pas beaucoup de moment de lucidité pure où elle se permettait de voir des proches. Elle hocha de la tête, n’ayant pas la force de lui dire à quel point elle était soulagée qu’Autumn soit capable de sortir de son hospitalisation. « Non, ils m’ont dit qu’ils ne voulaient plus que je te voie. Je leur ai demandé pourquoi, mais ils ont rien voulu me dire, alors je me suis dit que toi, tu me le dirais. » Elle avait l’impression que son coeur allait lui arrêter. Elle prit une gorgée d’eau, essaya de rassembler ses idées pour avoir les bons mots. Elle se rendait compte qu’il n’y en avait pas vraiment et que peu importe ce qu’elle dirait, ça n’enlèverait pas de poids à la tragédie. La douleur qu’elle ressentait depuis trois mois allait frapper Autumn de plein fouet et Faith ne pouvait rien faire pour la protéger. « Qu’est-ce qui se passe tata? T’as pas l’air bien. » Non elle n’était pas bien. Elle avait la gorge nouée, ne parvenait pas à parler. La pièce semblait soudainement se rétrécir. Elle avait besoin de son verre de gin pour engourdir la douleur, pour oublier qu’encore une fois elle souffrait d’une perte. Elle n’avait pas assez d’avoir été rejetée de sa famille, d’avoir perdu Ella, d’avoir survécu à toutes ses fausses couches et sa grossesse ectopique, elle avait maintenant perdu son mari. « Assieds-toi, s’il-te-plaît. » Elle s’assit tranquillement avant de perdre pied. La main d’Autumn sur son épaule la ramena doucement sur terre. Elle prit une grande inspiration, ouvrit la bouche pour commencer à parler puis décida de prendre un verre d’eau à la place. Elle ferma les yeux, inspira une seconde fois et se décida à dévoiler une partie de la vérité. « Je… J’ai arrêté de boire le 8 mars. Enfin… J’ai bu il y a trois jours, mais je crois que je suis en sevrage… » Faith ne savait pas à quel point sa nièce était au courant de son alcoolisme. Elle avait toujours fait attention pour ne pas boire devant elle, pour ne pas être trop soûle lorsqu’elle lui rendait visite, mais les parents détestaient tellement ce côté de la Palmer qu’elle devait bien évidemment en avoir déjà parlé en sa présence. « Noah est… Noah avait un cancer du cerveau… » Lorsqu’elle releva les yeux vers Autumn, on ne pouvait pas y lire de tristesse. On y lisait plutôt de la douleur. Elle n’était pas capable d’en dire plus, sa voix s’était cassée et elle ne parvenait pas à lui annoncer qu’il avait commis l’irréparable.

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@Faith Palmer + Autumn Galloway

tw. mentions de cancer, d'alcoolisme et de mort.

Tu n’aimais que l’on te traite comme une enfant, comme une petite chose fragile qu’il fallait préserver des intempéries de la vie. Oui, tu avais pris une sacrée chute. Oui, tu n’étais sans doute pas aussi solide que l’on voudrait te voir après six mois passés à l’hôpital, le mental toujours un peu chambranlant, mais tu méritais d’entendre ce que l’on essayait tant de te cacher. Tu n’étais pas une enfant à qui l’on devait tout cacher. Tu étais une adulte, malade peut-être, mais tu étais assez grande pour prendre tes propres décisions et juger par toi-même ce que tu pouvais gérer ou non. Ou du moins, c’est de ça que tu t’es convaincue avant de te rendre chez Faith, là où tu espérais enfin apprendre ce qu’on essayait tant d’éviter de te dire. Tu sais dès que tu arrives toutefois que quelque chose cloche. Que Faith ne va pas bien. Que si tu es censée être la malade entre vous deux, elle semble encore plus mal en point que toi, et ça, ce n’est absolument rien pour te rassurer. L’idée te vient en tête que peut-être, tes parents voulaient te protéger. Ça a souvent été leur intention, même s’ils n’avaient pas l’habitude de s’y prendre de la bonne manière. Peut-être que ce que Faith a à te dire risque de te mettre au plancher une fois de plus, toi qui t’en relèves à peine, mais à en juger son état, Faith a besoin de quelqu’un bien plus que tu n’as besoin d’être protégée et c’est ça qui te force à rester. Qui t’empresses vers elle pour t’assurer qu’elle ne tombe pas, elle qui semble à peine tenir sur ses jambes. Tu lui donnes le temps de reprendre contact avec la réalité, de chercher ses mots sans jamais la presser. Tu es là, devant elle, patiente et attentive, mais inquiète surtout de ce qui peut bien sortir de sa bouche ensuite. « Je… J’ai arrêté de boire le 8 mars. Enfin… J’ai bu il y a trois jours, mais je crois que je suis en sevrage… » « T’as fait une rechute? » Tu étais persuadée qu’elle avait arrêté de boire, avant tous tes déboires personnels, mais peut-être avais-tu fait fausse route? L’alcoolisme de ta tante était quelque chose qui se savait dans la famille, mais comme bien des images imparfaites, ce dernier était caché sous le tapis, sujet tabou à ne jamais discuter autour de la table. « Est-ce que ça va? Tu as besoin de quelque chose, pour tes symptômes? » Tu ne connaissais pas grand-chose sur les symptômes de sevrage, mais simplement à la voir, tu pouvais deviner qu’elle semblait être en douleur, possiblement un mal de tête et des nausées? Peut-être qu’elle avait des médicaments quelque part pour l’aider à passer au travers. « Noah est… Noah avait un cancer au cerveau… » Le whiplash est brutal parce que tu ne t’attendais pas à ce qu’elle te parle de ton oncle. Noah est malade. C’est Noah qui ne va pas bien, et c’est Faith qui est au bord du désespoir. Tu ne comprends pas. Automatiquement, ton regard se met à fouiller un peu partout autour de vous, dans l’appartement, à la recherche de l’homme. Est-ce qu’il est là? Comment est-ce qu’il prend la nouvelle? Les questions s’entassent dans ton esprit à une vitesse fulgurante, si vite que rien ne semble en mesure de sortir d’entre tes lèvres. « Il est où? » que tu réussis finalement à lui demander après quelques secondes, une minute peut-être, tu ne sais pas et tu t’en fous. Les mots de ta tante jouent en boucle dans ta tête et tu finis par accrocher sur la tournure de sa phrase. Noah est… Noah avait. Le présent qui devient le passé. « Il avait un cancer? Est-ce qu’il s’est fait opéré? Est-ce que tout s’est bien passé? » Une main vient sur ta bouche alors que ton expression passe de l’inquiétude à l’horreur. « Dis-moi… Dis-moi qu’il est pas… » Mort. Le mot quant à lui meurt sur tes lèvres, sans que tu ne puisses le laisser prendre toute la place entre Faith et toi.

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Faith Palmer + @Autumn Galloway

« T’as fait une rechute? » Faith savait qu’Autumn était au courant pour son alcoolisme. Elle avait donc décidé de lui mentionner qu’elle avait arrêté de boire récemment, qu’elle avait pris la décision de devenir sobre, mais elle fut prise par surprise lorsqu’Autumn lui demanda si elle avait fait une rechute. Elle était loin de se douter que quelqu’un lui avait dit qu’elle avait enfin arrêté de boire, qu’elle avait trouvé le chemin de la sobriété puisque ce n’était absolument pas le cas. Elle n’avait jamais été aussi profonde dans sa maladie que les moments avant le décès de Noah. Elle ne comptait plus le nombre de fois qu’elle s’était écroulée dans le couloir de leur appartement, trop saoule pour se rendre à leur chambre. Et c’était sans compter les fois que le chauffeur de taxi avait dû la rendre jusqu’à la porte pour que Noah puisse prendre la relève par la suite. « Je ne sais pas qui t’a dit que j’avais arrêté de boire, mais c’est pas vrai. » Faith prit une grande inspiration. La douleur dans sa tête commençait à diminuer, probablement l’effet des cachets qu’elle avait pris juste avant qu’Autumn arrive chez elle. La nausée était toutefois encore présente ainsi que la douleur qu’elle ressentait dans son coeur depuis le décès de Noah. « Je n’ai pas été te voir à l’hôpital parce que c’était hors de contrôle… Je n’arrivais pas à trouver un moment où je n’étais pas assez sous l’effet de l’alcool pour pouvoir te rendre visite… Je m’excuse tellement… » Elle s’en rendait compte maintenant que l’alcool lui avait enlevé des moment précieux qu’elle ne retrouverait jamais. Si elle avait été assez forte pour faire face à ses démons à la place de tenter de les engourdis, de les faire taire, elle aurait remarqué à quel point les sorties avec les amis de Noah était rafraîchissante, elle aurait pu mieux s’intégrer dans sa famille, amener la petite Autumn dormir plus souvent à la maison pour faire des sorties et des activités avec elle… Mais elle n’avait pas eût la force. Elle s’était laissé envahir par sa douleur, par sa détresse, en repoussant tout le monde autour d’elle. Elle avait tout détruit sur son passage et maintenant, elle espérait que les gens qu’elle aimait trouverait un jour la force de lui pardonner… « Est-ce que ça va? Tu as besoin de quelque chose, pour tes symptômes? » Faith prit une gorgée de son verre d’eau froide. Elle devait endurer les symptômes de sevrage si elle voulait se souvenir à quel point elle avait empoisonné son corps avec l’alcool. Lorsqu’elle serait tentée de boire, elle devait se rappeler la souffrance qu’elle avait dû endurer pour se détoxifier et renoncer à rechuter. « J’ai pris des cachets avant ton arrivée… Le mal de tête diminue, ça devrait mieux aller bientôt. » Toutefois, il n’y avait rien contre les douleurs de l’âme. Elle ne pouvait compter sur rien pour que sa détresse disparaisse, pour que son sentiment de culpabilité diminue. C’est d’une manière un peu brusque qu’elle lui annonça que Noah avait un cancer du cerveau. Elle n’avait pas été capable de lui dire qu’il était décédé et la manière dont elle se mit à le chercher du regard lui fit l’effet d’un coup de poignard. « Il est où? » Les larmes lui montaient aux yeux. Elle se devait d’être forte pour Autumn, mais elle en était incapable. C’était trop lui demander pour le moment d’essayer de consoler quelqu’un d’autre alors qu’elle était incapable de le faire pour elle-même. « Il avait un cancer? Est-ce qu’il s’est fait opéré? Est-ce que tout s’est bien passé? » Les larmes roulaient en silence sur ses joues. Elle ne faisait aucun geste pour les essuyer, sachant pertinemment que ça ne donnerait rien. Puis, elle vit dans les yeux d’Autumn qu’elle venait de comprendre. L’horreur dans les yeux, la main sur la bouche. La douleur qu'éprouvait jusqu’alors Faith se multiplia encore une fois. « Dis-moi… Dis-moi qu’il est pas… » Elle ne fut pas capable de prononcer le mot. Et Faith se contenta d'un bref mouvement de tête positif. Elle avait de la difficulté à reprendre la parole, le souffle lui manquait au travers de ses larmes. « Son pronostic était…était mauvais. Il n’acceptais pas de…de devenir un…un fardeau pour qui que ce soit. » Faith enfouit ses mains dans son visage elle ne parvenait pas à regarder Autumn. Elle ne voulait pas lire le dégoût dans ses yeux, la rage qu’elle allait avoir envers elle-même lorsqu’elle comprendrait que Faith n’avait pas été en mesure de supporter son oncle dans sa maladie. « Il m’a pas laissé l’aider… Il me l’a annoncé au travers de sa lettre. » Elle avait de la difficulté à faire des phrases, ses mots étant entrecoupés de sanglots de plus en plus forts.

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@Faith Palmer + Autumn Galloway

tw. mentions de cancer, d'alcoolisme et de mort.

« Je ne sais pas qui t’a dit que j’avais arrêter de boire, mais c’est pas vrai. » Tu baisses la tête, peinée de l’entendre. Ce n’était pas la première fois après tout que tes parents maniaient la réalité dans l’espoir d’adoucir les choses pour toi, surtout depuis ton hospitalisation. Il te croyait faible et fragile, cette petite chose qu’il ne fallait malmener sous aucun prétexte. Tu ne sais pas ce que tu détestais le plus : le fait que tes parents n’aient jamais à chercher à te comprendre dans toute ta complexité, ou le fait que tu n’étais désormais qu’une poupée fragile à leurs yeux. Mais Faith n’était pas comme tes parents. Elle savait faire dans la douceur, même sans s’empêcher de te couvrir de vérités qui pouvaient être difficiles à entendre. « Je n’ai pas été te voir à l’hôpital parce que c’était hors de contrôle… Je n’arrivais pas à trouver un moment où je n’étais pas sous l’effet de l’alcool pour pouvoir te rendre visite… Je m’excuse tellement… » Tu secoues la tête, tes bras venant l’enlacer par derrière sa chaise, là où elle est assise pour éviter de succomber à son propre poids. Tu niches ton visage contre son cou, avant de déposer un baiser contre sa joue. Dans d’autres circonstances, peut-être que tu lui en voudrais, qu’elle n’ait pas été là pour toi quand tu avais besoin d’elle, mais il te suffit de la voir pour comprendre qu’elle n’aurait jamais été en état de venir à l’hôpital. « C’est pas grave, je vais bien. Regarde, je vais bien. » Tu défais ton étreinte autour de son cou pour venir t’agenouiller devant elle, attrapant son visage entre tes mains pour qu’elle te regarde. Tes traits sont tirés, tu as perdu du poids pendant que tu étais à l’hôpital, mais tu as repris un peu de couleurs, dans les dernières semaines. Tu ne vas pas encore parfaitement bien, mais tu y travailles. Tu fais ce que tu as à faire pour aller mieux, même si quelque chose te dit que cette rencontre avec Faith risque de secouer ta fondation peut-être un peu plus que tu n’es capable d’en prendre. « J’ai pris des cachets avant ton arrivée… Le mal de tête diminue, ça devrait mieux aller bientôt. » Tu hoches la tête doucement, espérant que son mal la lâcherait plus vite que tard. Tu n’aimais pas la voir ainsi. Elle te paraissait complètement exténuée, la fatigue étirant chacun de ses traits, et tu te demandes elle remonte à quand, sa dernière bonne nuit de sommeil. Tu te demandes il est où Noah, et s’il s’occupe d’elle vu cette dernière dérape. C’était sans savoir que Noah était derrière cette dérape. C’était sans savoir que les mauvaises nouvelles ne s’arrêtaient pas à l’allure de ta tante, que ce n’était que le début d’une descente pour laquelle tu n’étais clairement pas prête. Faith te dit les choses à demi-mots, elle te cache quelque chose, ou plutôt, elle est incapable de te le dire et les conclusions que tu en fais suffisent à faire monter la panique en toi. Quand les yeux de Faith se mouillent, tu sais que la vérité va faire mal, trop mal. Soudainement, c’est toi qui es incapable de finir ta phrase, et tu veux tellement qu’elle te dise que tu as tort. Que tu t’imagines le pire pour rien. Que Noah est malade, oui, mais qu’il y a encore de l’espoir. Tu as besoin d’espoir, juste un peu, mais ce dernier meurt complètement quand les sanglots de Faith remplissent la pièce. « Son pronostic était… était mauvais. Il n’acceptait pas de… de devenir un… un fardeau pour qui que ce soit. » Non. Non, non, non. Tes mains viennent couvrir ton visage alors que tu es ramenée à ta propre douleur, à ton propre malheur. Celui qui t’a causé de crier que tu en voulais en finir à plusieurs occasions dans les derniers mois. Non, ton oncle n’aurait pas fait ça. Pas à Faith. Pas à toi.  « Il m’a pas laissé l’aider… Il me l’a annoncé au travers de sa lettre. » « Une lettre? » Un rire mouillé s’échappe de tes lèvres. Les maudites lettres. Entre ça et cette lettre laissée par Kieran, tu en venais à détester tout échange épistolaire. « Je suis désolée Faith, je suis tellement désolée… » Que pouvais-tu dire de plus? Il n’y avait pas de mots. Pas de paroles qui lui feraient du bien, qui te feraient du bien. Il n’y avait qu’une douleur profonde et cruelle au fond de ton être, une douleur sans aucun doute similaire à celle que devait ressentir Faith présentement. « Combien… ça s’est passé quand? » Depuis combien de temps est-ce que Faith vivait avec cette peine, sans que tu ne sois là pour elle? Tu essuies maladroitement les larmes qui coulent abondamment sur tes joues, ta respiration difficile entre tes sanglots qui se mêlent à ceux de Faith.

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Faith Palmer + @Autumn Galloway

Elle avait repoussé le moment où elle annoncerait à Autumn le décès de Noah trop longtemps. Elle n’avait pas eût le courage de déplaire aux parents de sa nièce même si elle savait que plus longtemps elle attendrait, plus ce serait difficile. La crise qu’avait fait la mère de Noah aux funérailles en lui criant dessus qu’elle n’avait pas d'affaires à être présente, qu’elle avait tué son fils avec son alcoolisme et qu’elle avait toujours été mauvaise pour lui, avait fini de l’achever. Elle avait finit par croire qu’elle était mauvaise pour les Palmer, qu’elle devait se retirer de cette famille pour qu’ils aient la chance de vivre leur deuil adéquatement. Mais elle n’avait jamais vraiment renoncé à Autumn. Elle n’avait jamais voulu la tenir loin d’elle, mais elle avait besoin de se rebâtir avant de pouvoir la regarder en face. Elle avait peur de ce que la jeune femme allait penser d’elle. Est-ce qu’elle allait dire comme ses parents ? Que c’était de sa faute si Noah s’était donné la mort ? Faith ferma les yeux lorsqu’Autumn l'enlaça par derrière, profitant de cette chaleur alors qu’elle se sentait si seule depuis le départ de son mari. Personne ne l’avait prit dans ses bras pour lui souhaiter ses sympathies. Faux, il y avait bien eu Joaquin, mais Faith n’avait pas réussi à le laisser revenir dans sa vie, voyant son mari dans les yeux de son meilleur ami. Elle était plus seule que jamais à tenter de combattre ses démons. « C’est pas grave, je vais bien. Regarde, je vais bien. » Faith eu un petit sourire, ayant l’impression que son visage allait craquer tellement ça faisait longtemps que ses muscles n’avaient pas fait ce mouvement. Elle avait le goût de lui dire qu’elle avait déjà eu meilleure mine, mais elle avait l’air effectivement plus en forme que lorsqu’elle l’avait vu, juste avant son hospitalisation. Elle mit sa main sur la joue d’Autumn, profitant du contact avec sa nièce. Puis, le moment fatidique arriva. Elle devait lui dire que Noah s’était donné la mort. Faith avait peur qu’Autumn replonge, que la détresse s’empare d’elle et que le geste de son mari donne le goût à sa nièce de faire la même chose. Elle n’était pas sans savoir qu’elle y avait pensé quelques fois et Faith ne supporterait pas de la perdre elle également. La jeune femme se mit à pleurer aussitôt qu’elle comprit ce que Noah avait fait. Faith se leva, l’attira dans ses bras et la serra du plus fort qu’elle le pouvait. Les deux femmes pleuraient à chaudes larmes, essayant de se comprendre et de se parler entre deux sanglots. « Je suis désolée Faith, je suis tellement désolée… » Faith se recula, attrapa le visage d’Autumn pour la forcer à la regarder au travers de ses larmes. « Tu n’as pas à être désolé de rien… C’est moi qui le suis. J’aurais tellement aimé être plus forte, qu’il puisse me faire confiance et s’appuyer sur moi pour tenter de vaincre la maladie à la place de la laisser gagner… » Ce sentiment de culpabilité ne l’avait jamais quitté. Elle se sentait terriblement coupable de la mort de Noah et c’était ce qui l’empêchait d’affronter tous les gens qu’il avait connus. Elle tenta d’attirer Autumn vers le salon, pour qu’elles puissent s’asseoir toutes les deux sur le sofa avant que l’une d’entre elles s’écroulent au sol. « Combien… ça s’est passé quand? » Faith tenta d’essuyer ses larmes, de reprendre le contrôle sur ses émotions alors qu’elle en avait aucun. Comment pouvait-elle penser un jour prendre le dessus sur cette détresse qu’elle ressentait profondément au fond d’elle ? Elle prit une grande inspiration avant de répondre à la blonde. « Le soir de Noël… Je l’ai trouvé en rentrant du bar d’à côté… » Parce que oui, pendant qu’elle buvait un verre avec Cade, qu’elle l’embrassait dans un coin sombre du bar, son mari était en train de se donner la mort dans cette chambre de leur appartement qui aurait dû être celle de leur enfant. « Je t’ai gardé un signet… Je me suis dit que tu apprécierais d’en avoir un pour toi… » Il était dans le tiroir du bureau dans l’entrée, mais Faith n’était pas capable de faire un pas pour aller le chercher pour l’instant. Les sanglots l’épuisaient et elle n’avait déjà pas beaucoup d’énergie.

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@Faith Palmer + Autumn Galloway

tw. mentions de cancer, d'alcoolisme et de mort.

Si tu avais su ce qui t’attendait, tu serais restée dans le moment présent. Dans cette embrassade si tendre d’une tante qui retrouve sa nièce, lien de sang ou non. De sa main contre ta joue, d’un sourire maladroit qui se trouve autant sur ton visage que sur le sien. Si tu savais ce qui t’attendait, tu aurais repoussé le moment un peu plus. Pour continuer de vivre dans l’ignorance. Pour pouvoir continuer de vivre sans la douleur de la nouvelle que tu étais sur le point d’apprendre. Si tu avais su, tu n’aurais jamais cherché à savoir. C’est ce qui est traître avec la rétrospection, l’incapacité de savoir ce qu’on ne veut pas savoir avant d’être à deux pieds dans le malheur. Ça te rentre dedans aussi fortement que si tu venais d’être au milieu d’un accident de voiture. Ton corps reste en place, mais tu as l’impression que c’est tout ton intérieur qui se vire dans tous les sens, ton système au grand complet qui se débalance jusqu’à ce que tu ne perdes pieds devant Faith. Pour quelqu’un qui a si longtemps rêvé de la mort, tu n’as que très rarement été confrontée à cette dernière, et tu ne peux pas dire que l’expérience en est une que tu veux renouveler de sitôt. Tu ne peux pas te permettre de tomber en morceaux devant ta tante toutefois, pas quand c’est elle qui vient de perdre son mari, l’homme de sa vie. Tu t’accroches à ta tante autant qu’elle s’accroche à toi, vos corps vous tenant aussi droites que possible dans les circonstances. Elle attrape ton visage et vous vous regardez au travers de larmes qui ne cessent de couler, autant sur tes joues que sur les siennes. « Tu n’as pas à être désolé de rien… C’est moi qui le suis. J’aurais tellement aimé être plus forte, qu’il puisse me faire confiance et s’appuyer sur moi pour tenter de vaincre la maladie à la place de la laisser gagner… » Tu secoues la tête vivement, refusant de la laisser s’accabler d’une culpabilité dont elle n’a pas besoin. D’une culpabilité qu’elle ne mérite pas. « Tu ne peux pas penser comme ça, Tata. Tu sais bien que Noah n’aurait jamais voulu que tu te blâmes de quoique ce soit. » Tu ne pouvais que partiellement comprendre ce qui avait poussé Noah au suicide, ayant toi-même contempler cette option il n’y a pas si longtemps, pour des raisons complètement différentes. Mais la maladie était une composante que tu ne comprenais pas, et peut-être que c’était trop dur pour lui de continuer, en sachant que la maladie l’emporterait éventuellement.

« C’était quoi… C’était quoi le pronostic? » Est-ce que tu avais le droit de lui poser cette question? Est-ce que tu étais en train de tourner le couteau dans une plaie qui était loin d’être guérie pour ta tante? Tu ne voulais pas lui faire mal, mais tu ne pouvais pas non plus retenir toutes tes questions. Tu avais besoin de réponses, tu avais besoin de comprendre, mais pas au détriment de la sobriété de Faith. « T’es pas obligée… T’es pas obligée de me dire quoique ce soit Tata. On a pas besoin d’en parler… » Mais serais-tu en mesure de commencer ton deuil, si tu n’avais pas les réponses à tes questions? La simple idée de t’imaginer le comment te paralyse sur place, mais si Faith a dû vivre avec ça, possiblement vivre avec le fait de le retrouver, tu peux certainement partager ce fardeau avec elle, aussi petit que ce soit pour toi. « Le soir de Noël… Je l’ai trouvé en rentrant du bar d’à côté… » Tu secoues la tête. Tu n’arrives pas à croire que ton oncle soit décédé depuis trois mois et c’est la première fois que quelqu’un ose enfin te le dire. « J’aurais dû être là pour toi. » Mais tu ne pouvais pas être là pour elle, quand tu arrivais à peine à prendre soin de toi à ce moment-là. Tu ne comprends pas comment la vie peut autant s’acharner sur ta famille, tes proches, sur toi aussi. Il y a encore tellement de colère qui régit en toi, de la colère dont tu ne sais pas quoi faire. De la colère que tu refuses de démontrer devant Faith, qui n’a pas besoin de ça par-dessus le marché. « Je t’ai gardé un signet… Je me suis dit que tu apprécierais d’en avoir un pour toi… » « J’aurais voulu être là. Pour ses funérailles. » Les mots sortent plus sèchement que prévu, elle est plus dur à tempérer que tu ne le pensais, cette putain de colère. « T’aurais dû me le dire. T’aurais pu m’appeler. » S’il y a la partie logique de ton cerveau qui te rappelle qu’elle n’était sûrement pas en état à ce moment, vu les bribes de l’histoire qu’elle t’a raconté jusqu’à maintenant, ta colère elle t’aveugle à la seule chose qui compte, la seule chose qui persiste dans ton tourbillon de pensées : le fait que tu as manqué les funérailles de ton oncle, une présence souvent plus importante que tes parents dans les dix dernières années de ta vie.

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Faith Palmer + @Autumn Galloway

« Tu ne peux pas penser comme ça, Tata. Tu sais bien que Noah n’aurait jamais voulu que tu te blâmes de quoique ce soit. » Faith avait de la difficulté à ne pas ressentir la culpabilité de ne pas avoir su être présente pour Noah dans les épreuves qu’ils avaient vécues ensemble. Elle se sentait coupable envers tout le monde. Elle se mettait le décès de son mari sur le dos, la douleur de tous leurs proches d’avoir perdu trop tôt cet homme qui savait se faire aimer de tous. Elle travaillait avec les AA à ne pas se laisser emporter par cette douleur comme elle l’avait fait à chaque épreuve qui avait été mise sur son chemin, mais c’était tôt. C’était encore trop difficile. Voir Autumn tenter de garder pour elle sa douleur, de rester forte face à elle était douloureux. Faith savait lire en sa nièce depuis bien longtemps. Elle savait également à quel point Noah avait occupé une place plus qu’importante dans sa vie. Elle ne releva pas l’affirmation de la jeune femme bien que Faith savait que trop bien qu’elle avait effectivement raison. « C’était quoi… C’était quoi le pronostic? » Faith ferma les yeux et prit une grande inspiration. Elle devait rassembler son courage pour en faire part à Autumn. « T’es pas obligée… T’es pas obligée de me dire quoique ce soit Tata. On a pas besoin d’en parler… » Faith secoua la tête de gauche à droite. La jeune femme devait savoir. Elle ne lui avait jamais caché la vérité sur quoi que ce soit et ce ne serait pas aujourd’hui qu’elle allait le faire. Déjà qu’elle ne lui ait pas annoncé la perte de son oncle lorsque c’était arrivé lui avait demandé tout son petit change, Faith ne pouvait pas lui refuser les réponses aux questions qu’elle avait. « Trois mois s’il refusait les traitements. Il aurait eût des maux de tête de plus en plus fort, la perte de certaines de ses fonctions… Et s’il prenait les traitements, ils parlaient de six mois. Mais avec les effets secondaires que l’on connaît de la chimio et radiothérapie… » Il était coincé d’une manière ou d’une autre. Faith savait qu’il avait certains symptômes de son cancer, mais c’était encore supportable. Clairement qu’il n’avait pas voulu souffrir d’avantages, que sa famille et amis soient témoins d’une fin rapide, mais douloureuse… Faith tentait de se convaincre que c’était le meilleur des choix qu’il avait fait pour lui-même, mais elle ne parvenait pas à l’accepter. Pas encore du moins… « J’aurais dû être là pour toi. » Faith tenta d’essuyer ses larmes, mais c’était vain, elle ne réussissait pas à les arrêter de couler. « Tu devais te concentrer sur ta propre guérison… » Faith y croyait plus ou moins. Sa formation d’assistante sociale lui permettait de savoir que de se faire tenir loin des rituels de funérailles et de l’annonce immédiate du décès de son oncle allait seulement lui donner plus de difficulté à faire ce deuil qui était déjà assez difficile de base. Elle commença à faire quelques pas vers le sofa avant de se figer aux paroles suivantes d’Autumn. « J’aurais voulu être là. Pour ses funérailles. T’aurais dû me le dire. T’aurais pu m’appeler. » Le ton d’Autumn était plus sec, moins compréhensif. Faith l’attendait depuis son arrivée. Elle savait qu’elle le méritait, mais il n’en restait pas moins que ça lui faisait l’effet d’un coup de poignard au coeur. Elle se retourna lentement vers la jeune femme. « Je sais Autumn… Je suis tellement désolé. Je n’ai pas été capable d’ignorer les men… » Faith s’arrêta au beau milieu de sa phrase. Elle n’avait jamais parlé contre les parents d’Autumn et elle ne voulait pas commencer maintenant. « Tu as le droit d’être en colère ma choupette. J’ai été lâche et égoïste… » Elle n’était pas capable de se battre contre la famille de Noah. Elle avait pensé aller rejoindre son mari, mais à la place, elle avait tenté d’engourdir sa douleur avec l’alcool. À quel point ces quelques mois n’avaient pas été une tentative de se donner la mort à petit feu ?

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« Trois mois s’il refusait les traitements. Il aurait eu des maux de tête de plus en plus fort, la perte de certaines de ses fonctions… Et s’il prenait les traitements, ils parlaient de six mois. Mais avec les effets secondaires que l’on connaît de la chimio et radiothérapie… » C’est toi qui es prise d’une soudaine vague de nausées, à simplement t’imaginer la position impossible dans laquelle ton oncle s’est retrouvée avec de telles probabilités, plus terribles les unes des autres. Tu n’oses pas le dire à voix haute de peur que ta tante ne puisse pas comprendre le cheminement de tes pensées, de peur qu’elle craigne que tous tes efforts des six derniers mois n’aient été vains, mais tu comprends le choix que Noah a fait. Peut-être pas exactement la manière dont il a agi, mais tu comprends qu’avec les choix qui se présentaient à lui, il ait choisi la troisième option. Celle qui ferait le plus mal sur le coup, mais qui l’empêcherait de vivre des mois de misère, des mois à se perdre au profil d’un cancer qui détruit tout sur son passage. C’est compliqué, toutes les émotions qui existent tout autour de cette situation, entre la maladie et la détresse de chacun, tu sais qu’une tragédie était inévitable. Que sa mort, peu importe les circonstances, auraient laissé des blessures bien trop difficiles à guérir, le genre de blessures dont Faith ne se remettra pas en claquant des doigts. Tu espères seulement que cette nouvelle sobriété soit quelque chose qui tient, quelque chose qui lui permette de relever la pente plutôt que de s’enfoncer encore plus creux dans de mauvaises habitudes. Malgré tout, tu aurais voulu être là pour elle, pour passer au travers du plus gros de la tempête, pas arrivée seulement après la guerre, quand il ne reste que des dégâts dont tu ne comprends pas complètement l’ampleur. « Tu devais te concentrer sur ta propre guérison… » « Mais à quel prix? » À l’heure actuelle, tu ne te sentais pas très forte sur tes jambes, pas très forte dans ta tête non plus. Tes réactions premières laissaient désormais place à une confusion et une colère avec lesquelles tu ne savais pas quoi faire. Elle t’offre un signet des funérailles, mais tu ne le prends pas. Tu ne veux pas d’un memento d’un évènement auquel tu n’avais pas pu te rendre, parce que personne n’avait jugé bon de te prévenir. Tu le refuses, ressentant le besoin soudain de tourner le dos à ta tante, avant de faire ou de dire quelque chose que tu finirais par regretter. « Je sais Autumn… Je suis tellement désolée. Je n’ai pas été capable d’ignorer les men… » Les quoi? Tu ne sais pas par quoi elle allait finir sa phrase, mais elle change sa trajectoire à la dernière minute. « Tu as le droit d’être en colère ma choupette. J’ai été lâche et égoïste. » Tu te mords les lèvres pour t’empêcher de lui répondre que oui, tu l’as trouvé lâche et égoïste sur le moment. Autant cela pourrait te faire du bien, autant tu sais qu’elle n’a pas besoin de ça. « Je… Je pense que j’ai besoin d’air. » D’air, d’espace et d’un peu de temps, surtout. « Prends soin de toi tata, ok? » Sans croiser son regard, tu te retournes vers elle, viens déposer un baiser sur sa joue rapidement avant de repartir aussi vite que tu es arrivée. La seule différence, c’est que tu as l’impression que l’on vient d’éclater ton cœur en mille morceaux, une fois encore.