Jon s'ennuyait à mourir. Il lui en fallait plus pour animer la flamme dans les yeux du dragon. Mais il essayait de faire bonne figure pour le bien-être mental de Nyx qui avait de se frapper la tête contre les murs à cause de lui. Et ceux qui se passaient devant ses yeux n'avait pas fière allure. Du déjà vu et sur-vu pour Monsieur Deauclaire. Mis à part les créations d'un nouveau styliste qui faisait ses débuts cette année. Et Jon avait bien l'attention de lui mettre le grappin dessus. Mais une toute autre scène se passait non loin de lui et presque en face. Joanne et Jamie étaient aussi présents. Un sourire se dessina sur ses lèvres. Quel beau couple. Se tenant la main, se regardant avec amour… Dommage qu'il soit dans la ligne de mire du styliste. La fiancée de Jamie était une fois de plus sublime avec ce brin de vulnérabilité qui la rendait irrésistible. L'ami de Jon était d'une élégance qui rivalisait presque avec celle de Jonathan. Le brun n'avait envie que d'une seule chose, les rejoindre et c'est bien ce qui l'avait l'attention de faire.
Jon attendit la fin du défilé pour essayer de les retrouver, mais une femme vint s'interposer. Une journaliste encore et toujours. Il roula des yeux en entendant les mêmes questions se répéter. « Oui, je suis heureux d'être élu styliste de l'année, c'est un grand honneur… Non, je ne dirai rien sur ma prochaine collection et oui, je suis venue tout seul ce soir… Pourquoi vous êtes libre ce soir ? » Il s'approcha du visage de la journaliste, avec un regard qui déstabiliserait n'importe quelle femme. « Si vous le permettez… Je suis attendu ! » La jeune femme bouche-bée, plantée dans le sol, ce qui fit pouffer de rire Jon lorsqu'il fut assez loin pour qu'elle ne puisse s'en rendre compte. Le dragon s'approchait dangereusement de sa cible. Le couple n'était qu'à quelques mètres. Jon essaya, malgré sa très grande taille de rester discret pour les prendre par surprise. Il adorait faire ça ! Surtout qu'il était sûr de voir la belle Joanne virer au rouge magnifiquement pivoine. Jon passa par l'arrière de la salle. Il croisa certaines personnes qui voulaient le féliciter, faire une photo avec lui. Le styliste essaya de rester le plus courtois malgré son empressement.
Mais Jonathan finit par trouver un chemin jusqu'aux chaises se trouvant non loin du couple. «Pardon mesdames, je ne fais que passer…» Son sourire et son charme firent son effet. Tout le monde le laissa passer sans rechigner. Il aperçut une chaise derrière eux qui était par chance libre. La personne était peut-être partie prendre quelque chose à boire ou autre, mais Jon allait lui piquer cette place. Il était drôle de voir cette grande perche se faufiler avec un manque de souplesse défiant toutes concurrences. Mais le dragon finit par arriver derrière ses amis. « Mais que vois-je… » Sa tête était placée entre celles de Jamie et Joanne. « Quelle ravissante apparition ! » Dit-il en regardant Joanne. « Toi aussi tu es très élégant Jamie ! Mais ta fiancée est à croquer ! » C'était dit sous le ton de la rigolade, mais c'était infiniment pensé. « Vous êtes magnifiques tous les deux ! Ça me fait plaisir de vous voir !» Jon fit une accolade à son fidèle ami. « Je ne pensais pas vous croiser ici ! Si j'avais su, je serais venu sans toutes les menaces de Nyx…»
Contrairement à Joanne, je suis des plus attentifs face au défilé qui a lieu sous nos yeux. Cette fois, Vee n'est pas à mes côtés. Triste détail. Je ne connais pas la personne à ma gauche, et je ne sais pas si je peux me permettre d'avoir le même caractère faussement médisant avec ma belle sans la choquer. Avec Hannah, je ne me serais pas gêné. Je suppose que cela est normal, les comportements changent selon les personnes avec lesquelles nous nous trouvons, et je ne tiens pas à ce que ma fiancée me prenne pour quelqu'un capable de dénigrer pour le plaisir. Je reste donc silencieux, admirant chaque détail de chaque tenue de la collection féminine et masculine -repérant même un costume que je m'offrirais volontiers, comme à chaque fois que l'on me met du Valentino sous le nez. A la fin du show, ayant sûrement estimé avoir assez réfléchi, Joanne se tourne vers moi pour approuver l'idée que je lui avais soumise plus tôt. Les sourcils hauts, surpris, j'ai du mal à croire que la jeune femme vienne réellement d'accepter d'apparaître dans les pages d'un tel titre de presse sans avoir l'air plus paniquée que ça. A vrai dire, je m'attendais à essuyer un refus. « Vraiment ? » je demande, légèrement abasourdi. Mais, même nerveuse, elle semble relativement sûre de son choix. Je prends ses mains dans les miennes avec un large sourire rassurant et ravi à la fois. « Crois-moi, tu n'as pas besoin de dire des choses forcément très intéressantes. Ca reste un magazine de mode. » dis-je, sans chercher à rabaisser une institution, mais en disant ce qui est : ce n'est pas dans cette centaine de pages de publicité plus ou moins dissimulées que l'on parle politique, économie ou philosophie. Tout ce que Joanne risque, c'est de devoir dévoiler la marque de son fond de teint. « Ca sera amusant, tu verras. » Autant l'interview risque d'être une corvée, dans un certain sens, le shooting photo, lui, peut devenir une vraie partie de plaisir selon ce qui sera décidé par la direction artistique du numéro en question. Il y a moyen de vraiment passer un bon moment. « Elle acceptera. Quand je lui en aurai parlé, elle sera même persuadée que c'est son idée. » j'assure au sujet de la directrice du magazine. Je pense même qu'elle sera ravie et des plus impatientes, qu'elle souhaitera superviser la chose elle-même. Comme toute personne se trouvant sur le chemin de Joanne, Victoria s'est prise d'affection pour ce petit bout de femme, et, comme toujours dans son travail, voudra tirer de cette trouvaille des pages de qualité. « Ca sera le travail de la journaliste de trouver quoi te faire dire, ne t'en fais pas pour ça. » j'ajoute en sachant parfaitement de quoi je parle. Autant certains titres n'ont pour but que de mettre leurs invités en difficulté, ce n'est pas le cas de Vogue, dont les enjeux sont bien différents. Si la portée de cette idée est considérable, cela reste dans la continuité de l'introduction en douceur que je souhaite pour Joanne dans ce monde. Elle ne sera pas malmenée, bien au contraire. « Je t'aime aussi. » je murmure entre deux baisers, un sourire en coin, et non sans ressentir un peu de fierté vis-à-vis de ma courageuse Lady. La chaleur demeurant dans la salle, elle souhaite, forcément, de quoi ne pas finir déshydratée. « Oui sûrem- » Et la voix de Jonathan me coupe, et me fait sursauter. Moi qui me croyais habitué à ses arrivées surprises. Je ris doucement. Quel phénomène. Lui non plus ne tarit pas d'éloges au sujet de la jeune femme. « Elle est toujours ravissante. » je souligne avec un sourire, sans douter qu'il sera d'accord avec ce constat. Lui aussi a craqué devant cette bouille angélique et ne pourrait le nier. Je passe amicalement une main autour des épaules, répondant à son accolade. « Ca me fait plaisir aussi. J'étais déçu de voir que tu ne présentais pas de défilé ce soir. » Sûrement la collection est-elle prête, quoi que des finitions soient à faire sous l'oeil exigeant du dragon, et préfère-t-il se faire un peu désirer, d'autant plus depuis que son titre fort décoratif de styliste de l'année est tombé. Il ne faudrait pas surfer sur la vague, il vaut mieux que cela. « Nyx, elle est décidément partout, hein ? » dis-je avec un petit rire. L'agent m'avait parlé de Jon, mais elle n'avait pas précisé qu'elle collaborait également avec lui. Ce monde est si petit. « Je viens juste de l'engager comme agent. Elle a repéré une de mes toiles chez toi. Je t'avais dit de ne pas la laisser en vue, non ? » Mais il s'en fiche bien. Le styliste fera toujours ce qu'il veut comme il le veut -là est plutôt le point commun de mon entourage, cet esprit sans foi ni loi qui nous réunit tous et peut créer de terribles orages. « A l'entendre, c'était presque comme si le sort de l'humanité dépendait de ma volonté d'exposer ou pas. Pas moyen de résister. » Non pas à force de ce genre de flatteries que je trouvais vraiment démesurées, mais parce que, étrangement, elle semblait croire dur comme fer à ce qu'elle disait, et qu'elle m'inspirait une immense confiance que je ne saurais expliquer. Sans oublier son charmant sourire. « Elle travaille aussi avec Hannah, mais tu le sais déjà. J'ai hâte de la voir en égérie de la maison Deauclaire. » j'avoue avec un sourire. Les nouvelles sont terriblement vite. Leur collaboration me semble couler de source, et je ne doute pas que la comédienne sera parfaite pour représenter la personnalité complexe de Jon -au fond, ils se ressemblent énormément. « D'ailleurs, je n'ai pas eu l'occasion de te remercier pour la cargaison de robes que tu as envoyée à Joanne. C'était vraiment chic de ta part. » Bien sûr, chaque pièce est plus belle que l'autre. Je me demande encore à quel moment Jon me demandera de signer un chèque pour que ma belle les garde. Rien n'est gratuit après tout. Surtout pas du Deauclaire. Mon regard se pose sur Joanne, et je saute sur mes jambes ; « Pardon, j'oubliais. Jus de fruit pour la demoiselle. Je reviens tout de suite. » Je m'éclipse dans la seconde, après un baiser volé.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Jamie avait bien du mal à cacher sa surprise lorsque sa belle accepta de vive voix ce qu'il proposait. Si cela pouvait effacer des mémoires ces photos avec Hannah et lui, bien qu'elle savait très bien que cela n'allait jamais les effacer de la sienne. Il la rassurait au plus vite, avant qu'elle ne change d'avis, lui disant qu'il ne fallait pas qu'elle dise des choses nécessairement intellects pour convaincre le magazine de publier ses dialogues. Ce sera Jamie avant tout, de toute façon, il restait et demeurait le premier intéressé. Il semblait bien certain que Victoria ne pouvait refuser une telle proposition. "J'espère qu'elle ne va pas trop s'emporter non plus." dit-elle, un peu nerveuse, sachant qu'elle n'avait qu'une vague partie de cette personnalité surprenante. Le bel homme semblait être des plus comblés, après avoir eu l'aval de sa fiancée, et cette avalanche de baisers. Soudain, un visage bien familier les interrompit durant leur conversation, Joanne ne manqua pas de sursauter et de regarder avec de grands yeux son nouvel interlocuteur. Ne manquant jamais une flatterie, il ne se gênait pas d'admirer la jeune femme. Jamie le reprit immédiatement, sur un ton plus qu'amusée. Elle, elle restait longuement muette, ne sachant pas s'il fallait qu'elle soit ravie ou encore surprise. Jon l'avait toujours impressionné. Comme Hannah, il avait une prestance hors norme, il était impossible de ne pas le voir à moins qu'il ne le cherche vraiment -il semblait d'ailleurs particulièrement doué à se faufiler comme si de rien n'était. Elle avait un vague sourire dessiné sur ses lèvres, éternellement et terriblement gênée. Les deux hommes parlaient rapidement affaires, et il y avait toujours les mêmes noms qui pendaient à leur bouche. Nyx, Hannah.. Elle ne connaissait pas l'une et ne désirait plus vraiment s'entretenir avec l'autre. Joanne lui en voulait encore beaucoup. Pour beaucoup, les faits étaient évidents, mais intérieurement, et sans le vouloir, la belle blonde lui reprochait aussi certainement d'être parvenue à pénétrer dans cette sphère aussi intime de la sphère de Jamie aussi rapidement. A croire qu'il aimait s'entourer de femmes. Cette idée lui traversa très rapidement l'esprit, puis elle revint rapidement sur leur conversation. Juste les noms lui venait jusqu'à ses oreilles, mais pas le reste des phrases. Joanne restait très gênée au sujet des robes, elle ne savait ce qui lui avait pris de venir directement le voir pour le remercier - quelle étrange réaction. Jamie s'envola rapidement pour chercher de quoi boire à Joanne, qui la remercia par un franc sourire et quelques mots d'amour. "Je sais que je te l'ai déjà dit mais si je te dois quoi que ce soit pour les robes, donne-moi la facture." dit-elle au styliste, bien gênée, haussant timidement les épaules. "Jamie me paie bien assez de choses comme ça." Non pas qu'elle se plaignait d'un mode de vie que plus d'une lui envierait, mais Joanne se sentait éternellement gênée qu'il insiste à tout payer, absolument tout. "J'avoue que je ne les ai pas toutes essayées, j'avais peur de les déformer ou de les déchirer." Mine de rien, son petite ventre continuait peu à peu à s'arrondir sans qu'elle ne s'en rende forcément compte -alors qu'elle se regardait très régulièrement de profil pour constater un quelconque changement. C'était ses vêtements qui lui rappelaient qu'elle n'avait plus trop une taille de guêpe, mais elle ne s'en plaignait pas. Et Joanne se doutait que le dragon avait utilisé des tissus d'une valeur inestimable pour confectionner ces tenues parfaites, mais elle osait à peine les toucher, tellement craignait de les abîmer d'une façon quelconque. Maintenant, il fallait trouver un sujet de conversation relativement valable sans avoir l'air de se faire passer pour une cruche. Surtout qu'elle avait bien que quelques unes avaient les yeux rivés sur Jon, mais aussi sur elle. Difficile de ne pas prendre en compte ces regards insistants -mais elle ne fut pas étonnée que son interlocuteur ait un tel succès auprès de la gente féminine. "Du coup, quand comptes-tu présenter ta nouvelle collection ?" En voilà, une question correcte. Soudain, une pensée l'embarrassa au plus haut point. Un peu plus paniquée, elle dit "A moins que tu ne te sois mis en retard à cause des robes que tu as faite pour moi." Les détails sur les robes étaient incroyables, ses couturières y avaient certainement passées des heures entières. Jamie arriva quelques minutes plus tard, apportant un verre de jus plein à sa douce.
Il se délectait de les voir sursauter de la sorte face à sa venue intempestive. Jon adorait se faire remarquer, c'était bien connu. Le styliste se réjouissait de semer le trouble dans ce tableau du parfait petit couple. L'amour, les sentiments… Tout ça n'était que foutaise et futilité. « Je savais que tu avais bon goût en matière de femme, alors que tu décroches la perle rare ne m'étonne qu'à moitié ! Et le parfait amour te va à ravir ! » Dit-il en souriant sincèrement à son vieil ami. Il ne l'avait jamais vu aussi radieux qu'au bras de cette femme. Jamie avait l'air heureux de revoir son ami. Lui rendant son accolade avec plaisir. Alors que Joanne semblait un peu plus sur la réserve. Sûrement intimidée par le dragon. « Il était hors de question de montrer ma nouvelle collection parmi tout cela. » Il fit un geste de la main, un brin théâtrale faisant comprendre que les vêtements qui venaient de passer sur le podium n'étaient pas à la hauteur de ses créations et encore moins à son goût.
Jonathan fut peu surpris d'apprendre que Nyx s'occupait de Jamie. Elle lui en avait touché deux mots en voyant le tableau de son ami qui trônait fièrement dans le salon. « Tu voulais que je fasse quoi ? Un pareil tableau méritait la meilleure place dans ma demeure. Il est sublime ! Et c'est sûrement la seule chose qui montre qu'une partie de moi, si infime soit-elle, est capable d'émaner une once de sentimentalisme… » Jon explosa de rire à l'idée qu'il puisse être sentimental. Il avouait à travers cela que ce tableau provoquait certaines émotions en lui et qu'il était fière de pouvoir dire qu'il s'agissait d'une peinture de son ami. Il aimait ce tableau autant que son peintre. Jay lui expliqua comment Nyx s'acharnait sur lui afin de le persuader d'exposer ses toiles. « Oh mais je suis bien d'accord avec elle. Tu DOIS montrer ces toiles. Tu as du talent Jamie… Laisse le commun des mortels en profiter ! » Le prénom d'Hannah le fit sourire. D'une manière complètement incompréhensible, il tenait à cette femme. « Mademoiselle Siede est plus que parfaite pour la maison Deauclaire… Même si tout cela va me coûter une petite fortune ! » Tout cela ne le dérangeait en aucun cas. « Qui dit Hannah, dit caprices… Je ne te fais pas savoir comment il fut faussement rude de lui faire accepter. Elle aime se faire désirer, tu la connais ! Mais c'est ce que j'aime chez elle, rien n'arrête cette beauté sauvage sous ce teint froid de porcelaine ! » Jonathan s'arrêta. Pensant que l'actrice était peut-être un sujet sensible pour la jolie blonde. Son œil bifurqua vers cette dernière, un sourire aux coins des lèvres. Mais son regard se retourna vers son ami lorsqu'il parla des fameuses robes envoyées à sa fiancée. « Mais je t'en prie tout le plaisir était pour moi. Disons que c'est avant goût de votre cadeau de mariage… Un cadeau de fiançailles ! Il fallait bien des robes à la hauteur de cette bague qui doit valoir une petite fortune et de la femme qui la porte ! »
Jamie se leva pour aller chercher un verre de jus de fruit pour la future maman. Laissant Joanne et Jonathan seuls. Le styliste ne se fit pas prier pour s'installer à la place son ami, surveillant que personne d'autre ne prenne la chaise qui se trouvait derrière eux. Le dragon regarda Joanne, un parfait sourire aux lèvres. La jolie blonde cherchait encore comment ne plus se sentir gênée face au cadeau plus que farfelu du styliste. « Ma Chère Joanne… » Il se rapprocha d'elle sans pour autant que cela paraisse gênant aux yeux des autres. Même si les regards commençaient à se tourner vers eux. Se demandant encore ce que Monsieur Deauclaire pourrait faire comme frasque ce soir pour ne pas passer inaperçu. « J'ai les moyens de pouvoir créer des robes sans pour autant demander de l'argent en échange… Et comme je viens de le dire, ça me fait sincèrement plaisir ! » Jonathan se souvint de la conversation qu'il avait eut avec sa muse. « Cela te rassurait peut-être de savoir que je ne fais pas cela que pour toi ? » Il plongea son regard dans le sien, cherchant à déceler ce que ressentait la jeune femme en apprenant cela. « Hannah veut que je fasse de même pour elle et je le ferai… Alors ne soyez pas gênée mademoiselle Prescott…» Jon essayait de se persuader que Joanne n'était pas importante à ses yeux. Qu'elle n'était qu'une femme parmi tant d'autres. Même s'il devait se rendre à l'évidence, c'était tout le contraire. Une partie de lui aimerait voir un brin de jalousie sur cette tête d'ange aux prunelles bleues.
Jonathan regarda le ventre de la jeune femme lorsque celle-ci évoqua le fait que les robes seraient bientôt plus à sa taille. « Ne t'inquiète pas. Tu pourras toujours venir à l'atelier pour des retouches après ton accouchement et je m'en occuperais personnellement ! » Jonathan se sentait comme observé par le reste des invités et surtout par un groupe de femmes ne se trouvant pas loin d'eux. Le styliste y fit à peine attention, bien trop concentré sur les paroles de la jeune femme. « Elle sortira d'ici deux semaines et votre carton d'invitation est prêt à être envoyé… Et il est hors de question que vous refusiez bien évidemment. » Les yeux du dragon brillaient en repensant à tout cela. « Tout semble parfait aux yeux des autres, mais pas des miens… Comme d'habitude, je suis trop perfectionniste ! » Soudain Joanne fut prise de panique en pensant que ses robes auraient pu provoquer un retard pour la prochaine collection. Le styliste secoua négativement la tête. Jon était amusé de voir la fiancée de son ami si inquiète. « Non Joanne, je sais très bien ce que je fais, tu n'as pas à t'inquiéter ! » Il lui souriait gentiment. Oui, gentiment… C'était rare de le voir ainsi, sauf au contact de Joanne. Jamie était de retour, un verre à la main pour sa fiancée. « Votre prince charmant est de retour, je vais retourner à ma chaise derrière vous ! »
La perle rare. A plus d'un titre, Joanne l'est en effet. Pour moi, Jon, et nous autres habitants d'un monde bien étrange tournant autour de l'argent, des apparences et de la réputation. Authentique, sensible et encore naïve, tous ces traits de sa personnalité dans lesquelles elles ne voit que des faiblesses face à nos semblables sont bien les avantages qu'elle a sur eux et qui lui permet de valoir bien mieux que ces invités qui s’amassent autour du podium et du buffet. Mais bien sûr, elle ne le voit pas. Elle ne veut rien entendre, et n'en croit pas un mot. Qu'importe le nombre de fois que je le lui répète, qu'importe si mes dires sont corroborés par la parole d'autres personnes. L'idée me serre le coeur. Je ne sais plus vraiment quoi faire pour qu'elle se défasse de sa nervosité inspirée par cette image si déplorable qu'elle a d'elle-même. Si ce n'est répéter encore. Je la vois déjà balayer les compliments de Jon en secouant la tête, et sortir une de ses légendaires phrases dépréciatives pour lesquelles j'apprends à la faire la sourde oreille. La médiocrité de son estime d'elle est sûrement son unique défaut. « Mieux que du Deauclaire ? » je demande à mon vieil ami qui souligne les bienfaits de l'amour sur mon allure. Non, bien sûr, me répondra-t-il sûrement, celui qui se croit bien au dessus de tout sentimentalisme. Comme il le dit, il est bien peu de choses en lui qui laissent transparaître les quelques véritables émotions qui sont capables de le traverser. Je n'aurais jamais pensé qu'il puisse être sensible à une œuvre en dehors de sa valeur pécuniaire -et de celles qu'il crée lui-même. Encore moins un tableau de ma main, eux qui ne sont que des concentrés d'émotions -ce que Nyx apprécie tout particulièrement. Il y a bien des artistes pour peindre la réalité, dénoncer ou simplement faire du beau, faire du ''à la mode'', et bien moins pour parler de sentiments. Pourtant, si j'en fais partie, je trouve que ce sont bien ceux qui sont le moins dignes d'intérêt. « C'est grotesque. » je souffle en levant les yeux au ciel quand Jon me confère un quelconque talent. Autant je peux entendre que certaines de mes toiles plaisent, mais pas qu'on leur associe du talent. N'importe qui créant quelque chose de plaisant n'a pas forcément de talent. Sans que cela soit forcément une bonne idée, le sujet d'Hannah arrive sur le tapis par ma faute devant Joanne. Ma bêtise ne m'apparaît que plus tard. Alors je n'insiste pas à propos de la comédienne que ma fiancée a désormais en horreur. Le styliste l'a parfaitement compris et lui a alors créé une petite collection personnelle et unique. « Donc pour le cadeau de mariage, je dois m'attendre à devoir doubler la capacité du dressing de la maison pour accueillir le double de robes ? » je demande, amusé. Je suis tout de même intrigué par cette histoire de cadeau de mariage. La seule chose à laquelle je m'attends de la part de Jon, c'est de l’inattendu. Je laisse mon ami avec Joanne pendant quelques minutes, le temps d'aller lui chercher sa boisson. Autour des serveurs, on devine, petit à petit, les traits benêts des invités qui ont déjà une certaine dose d'alcool dans le sang. On me regarde presque bizarrement quand je demande un jus de fruit -non, non, sans alcool, juste du jus. « Tu la laisse seule avec lui ? » Vee, comme Jon, aime apparaître sans s'annoncer. Son regard est posé sur le styliste et ma fiancée, un sourcil haut, sans que je puisse deviner si elle est inquiète ou intriguée. « Ne commences pas... » je murmure, déjà lassé à l'idée d'entendre un nouveau discours sur les frasque de mon ami, comme si je ne les connaissais pas assez bien et je n'étais qu'un abruti de plus dont il se jouera. « Tu sais comment il fonctionne. » Je soupire, un sourire en coin. Je dois décidément avoir l'air bien naïf pour que Victoria le souligne quand même. « Je sais que c'est un ami, et qu'il est heureux pour moi. Pour nous. Il n'y a rien à craindre. » Elle hausse les épaules. Aussi possessif que je peux être, j'ai toute confiance dans l'homme qui se délecte de briser des couples, cela doit sembler illogique. Pourtant, quel intérêt aurait-il à tenter -et peut-être réussir- à séduire ma belle alors que nous sommes amis ? Je les observe un peu, de loin, lui et Joanne. Il a pris ma place à côté d'elle. « Il y a quelque chose dont il faudra que je te parle. Je t'appellerai, d'accord ? » dis-je finalement à Vee en prenant le verre que me tend le serveur, puis je dépose une petite bise sur sa joue avant de retourner auprès des autres en grande discussion. « Arrête de flirter avec elle, tu veux ? » Fronçant les sourcils, l'air faussement sérieux, je souris finalement et reprends ma place. Joanne récupère sa boisson. « Vee semble bien persuadée que j'ai du souci à me faire quand tu es dans les parages, fauteur de troubles. Ridicule. » Mais il adore ça, à n'en pas douter. Faire parler de soi est bien une manière d'exister en dehors des moments où il est bel et bien présent, cela ne fait qu'étendre sa présence, déjà bien assez imposante. Je reprends ; « Avant que tu n'arrives, je proposais à Joanne ne partager quelques pages de Vogue avec moi. Victoria est dingue d'elle, elle veut absolument publier des photos d'elle. Alors je me disais que nous pourrions faire ça tous les deux. » Pas vraiment d'intérêt pour Jon là-dedans, si ce n'est de faire la conversation, et pour moi de lui proposer ; « Est-ce que tu aimerais qu'elle porte certaines de tes robes sur les photos ? » Sa nouvelle collection devrait être sortie d'ici-là. Mai peut-être y aura-t-il comme un conflit d'intérêts avec Hannah. Rien n'est jamais simple.
I believe in the lost possibilities you can see. And I believe that the darkness reminds us where light can be. I know that your heart is still beating, beating darling. I believe that you fell so you can land next to me. ‘Cause I have been where you are before. And I have felt the pain of losing who you are. And I have died so many times, but I am still alive
Jon avait ce don de toujours la mettre mal à l'aise. Certainement son allure, la réputation qui traînait derrière lui et dont il se plaisait de mettre bien en avant. Puis toujours ce sourire serein, malicieux, sûr de lui, comme si chaque parole et chaque geste était prémédité, qu'il s'attendait absolument à tout. Joanne ne doutait pas de sa sympathie et de sa bienveillance, mais elle se demandait toujours si on pouvait lui faire confiance -déjà que de base, elle avait énormément de mal à s'ouvrir aux autres. Il mentionna Hannah sans hésiter, disant d'elle qu'elle réclamait des robes uniques qu'elle serait la seule à les porter. Ce prénom ne faisait pas plaisir à entendre, mais entre Jonathan, Jamie, et la petitesse de ce monde en général, elle ne pouvait pas le manquer longuement. "Je suppose que toute personne qui peut se le permettre peut faire cette demande, auprès de son créateur favori, je suppose." Elle haussa les épaules, n'y connaissant pas grand-chose. "Je n'en sais rien." Il y avait encore bien des choses que Joanne se devait de découvrir dans l'univers des riches et divers aristocrates, et cela n'avait rien de rassurant pour Joanne. C'était toujours une pression supplémentaire. Et puis, ne pas savoir à qui se fier, qui profitera plus qu'un autre. Les séries télévisées ne devaient pas être si mensongères que ça, se disait-elle depuis un moment. Les rumeurs, les manigances, les manipulations, ce n'était peut-être pas extrapolé à l'écran. "C'est gentil." dit-elle avait un sourire plus que gênée, lorsqu'il dit qu'il n'y avait aucun soucis pour faire retoucher les robes. Elle savait qu'elle avait une part de bienveillance en lui, mais le reste... Joanne n'arrivait pas à le cerner, et n'avait jamais été douée pour ce genre de choses. Elle était flattée que Jon comptait l'inviter au défilé de sa prochaine collection. "J'ai hâte de voir tes autres tenues." dit-elle, les yeux pétillants d'un certain enthousiasme. "Je compte sur toi pour continuer à motiver Jamie pour qu'il voit d'un plus bel oeil ses tableaux. Il trouve que je suis ne suis pas assez subjective dans mes critiques, ce qui est certainement vrai." dit-elle en riant légèrement. Quand on parle du loup. Il ne tarda pas à revenir avec le verre de jus de fruits. Elle le remercia d'un simple regard, éperdument amoureux. Son fiancé ne manqua pas de préciser au styliste leur plan à venir pour exposer la jeune femme davantage, et de manière délicate. Le fait qu'il en parle ainsi lui serra un peu le coeur, prise d'une légère anxiété. L'entendre le dire à quelqu'un d'autre concrétisait l'interview, les photos, et tout le reste. Encore plus, Jamie demanda gentiment à son ami s'il était d'accord qu'elle porte l'une de ses créations. Pas tout à fait sereine, elle demanda à Jamie. "Tu.. Tu es sûre que c'est approprié ?" Elle se voyait juste venir avec ses vêtements habituels, jamais elle n'aurait pensé devoir faire appel à un créateur pour ça. Mais ça, ça restait malgré tout une interview qui allait apparaître dans Vogue. "Et par rapport à Hannah..." dit-elle tout bas, pensive. Il n'y avait rien de plus à dire. Joanne n'avait pas adressé la parole à la mannequin depuis le soir où Jamie avait mis à tabac James. Elle n'en avait pas vraiment envie, même si elle savait combien elle était chère et importante aux yeux de Jamie. La belle blonde était certainement capable de faire des efforts rien que pour lui, mais Hannah restait à elle seule un sujet houleux, incertain. Les conversations sur son sujet était limitées voire inexistantes pour le couple, et cela convenait très bien à Joanne, mais certainement pas à son fiancé. Elle avait découvert une facette de sa personnalité qu'elle n'appréciait pas, et depuis, elle se sentait comme la dernière des stupides pour avoir cru, avoir eu cette optimisme de pouvoir se lier d'amitié avec elle. Si le monde des riches était tout aussi fourbe, la jeune femme ne s'en sortirait jamais. Elle n'arrivera jamais à être fausse, à prétendre, à avoir son masque. "Je ne connais pas assez Victoria, mais elle a l'air de vouloir tout ficeler d'elle-même, non ? Elle voudra certainement certainement choisir les créateurs, les maquilleurs, et... et tout le reste. Je ne sais pas."