we'll never get free, lamb to the slaughter crédit gif - gifpacklove raelyn blackwell & @auden williams

Le cœur de l’île qu’il a dit, le peintre - dans tous les sens du terme. Parce qu’il a vendu trois toiles à plus de quinze euros dans sa vie, parce qu’il m’a vue à poil pour l’aRt, il pense qu’il peut prendre le lead de notre groupe de deux. Faut dire que j’avais pas de meilleure idée. Faut dire aussi que dès qu'une espèce de monstre volant a fondu sur nous en piqué sur la plage, se réfugier dans la forêt a semblé une alternative tout à fait viable. Sauf que la jungle, c’était une promenade de santé par rapport au marécage dans lequel nous avons à présent atterri. « Putain, ça schlingue ici. » Ca sent la mort sous toutes ses formes de décompositions. « Je vais vomir. » Mais étant donné que nos maigres rations se composent de quelques barres de céréales et paquets de chips retrouvés dans les bagages éparpillés, il serait plus intelligent de garder mon dernier repas à l’intérieur de mon estomac. Arrivés au bord de l’étendue d’eau - est-ce seulement de l’eau ? - qui semble produire l’odeur nauséabonde, je m’accroupis pour en observer la surface. « Je te préviens je fous pas un pied là-dedans. » Et puis quoi encore ? La vase dissimule certainement une nouvelle créature d’un autre temps.

En parlant de créatures d’un autre temps… « T’as entendu ça ? » Un cri strident, un mélange de grognement et de rugissement. N’importe qui l’aurait entendu. Maladroitement, je tire de ma ceinture le glock que j’ai trouvé dans les bagages et que j’avais gardé dans mon dos, caché sous mon t-shirt. Savoir s’en servir, c’est une autre paire de manches, mais j’ai l’illusion d’être un peu moins vulnérable. « Si ça vole, c'est pour moi, si ça marche sur la terre, c’est pour toi, deal ? » Je suis nerveuse, je déblatère ce qui me traverse l’esprit mais les faits, je suis déjà en train de chercher un chemin par lequel nous pourrions nous enfuir. Mais faire à ces créatures, avons nous la moindre chance de gagner une course de vitesse ?

« Putain, ça schlingue ici. » Je préfère pouffer et me moquer d’elle plutôt que de lui donner raison d’une quelconque façon, même s’il est vrai que j’ai rarement senti une odeur aussi nauséabonde. Et Dieu sait que j’en ai senti, de la merde. « Je vais vomir. » - « Fais pas ta chochotte. » On a pas le temps pour ça, on doit trouver comment sortir de ce foutu enfer. « Je te préviens je fous pas un pied là-dedans. » L’envie naturelle de me moquer d’elle est forte mais je la surpasse, me posant à mon tour près de l’étendue d’eau stagnante pour l’observer de plus près. Les couleurs sont galvanisantes, inspirantes, mais surtout infiniment artificielles. Peu importe ce que cela signifie, il n’y a rien de bon à en tirer à y mettre un petit orteil. « Je pense que tu fais bien. » J’annonce à mon tour, trop sérieux pour que cela n’en devienne pas suspicieux.

« T’as entendu ça ? Si ça vole, c'est pour moi, si ça marche sur la terre, c’est pour toi, deal ? »
« Putain d’enfer. »

Je grogne, je m’agace, je perds toute patience en un seul grognement nouveau de la part de ces choses. Et malgré tout, je ne remets pas en question le plan imaginé par la petite mannequin rebelle. Je me redresse vivement et m’écarte d’un pas de l’endroit. « Putain de merde. » Je souffle, la bouche grande ouverte, mon regard fixé sur une scène que je n’arrive pas à comprendre alors qu’il y en a un qui marche. Et un qui vole, putain de merde. « On plonge ? » S’ils marchent, s’ils volent ; ils nagent pas, non ? Peut-être qu’au final, la couleur artificielle et l’odeur nauséabonde du marécage sont le cadet de nos soucis face à ces deux choses.



Est-ce qu’il y en a aussi dans l’eau ?
Win : Non ça va
So close : Juste des petits poissons carnivores
Fail : Ui dsl

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« Fais pas ta chochotte. » - « Fait croire que je suis pas autant habituée que toi à l’odeur de la merde. » Drôle d’équipe que nous formons tous les deux. Il suffit de nous regarder quelques secondes pour comprendre que si nous avions eu le choix, l’autre n’est pas le partenaire que nous aurions sélectionné pour cette virée en enfer. Sauf que les autres survivants, ceux qu’on a retrouvés sur la plage, ont tous fait les chochottes et ont décidé de tenter de dresser un camp de fortune en attendant les secours. Et quels secours exactement ? Ceux qu’ils ont réussi à appeler sans téléphone et sur une île perdue au milieu de je ne sais quel océan ? Quand les secours que nous aurions réussi à alerter en nous bougeant le cul arriveront pour nous secourir, je leur dirai que nous sommes tous les deux seuls sur cette île, pour la peine. « Je pense que tu fais bien. » L’eau est loin d’avoir la jolie couleur turquoise qu’on imaginerait de prime abord sur une île perdue comme celle-là. Sauf qu’on imaginait pas non plus être poursuivis par toutes sortes de créatures normalement éteintes depuis des années alors ce n’est plus vraiment une surprise. « Ca sent le soufre. » Des usines dégageant ce genre d’odeur étaient installées à quelques kilomètres de Charlevilles. Moi, ça ne me dit rien qui vaille. Le soufre, et quelque chose de pas naturel. « Tu crois qu’ils ont survécu sur cette île toutes ces années ? » Hautement improbable, mais je n’écoutais pas vraiment à l’école.

« Putain de merde. » Ce n’est pas juste une créature détachée du groupe qui nous a retrouvés, mais une véritable horde de ces choses. Ça rampe, ça court et ça vole et c’est largement en surnombre. Une seule d’entre elles pourrait aisément nous déchirer à coups de griffes et de dents. « On plonge ? » Nous n’avons plus vraiment le choix, je ne prends pas le temps de répondre à Auden : je prends une grande inspiration et plonge dans l’eau trouble des marécages. Le terme est un euphémisme : alors que je tente d’ouvrir les yeux sous l’eau, je ne vois rien d’autre que des formes sombres. Je nage le plus vite possible en direction de la berge opposée. Je ne m’arrête qu’au milieu de l’étendue d’eau pour reprendre ma respiration et hurler à pleins poumons. « Il y a quelque chose sous l’eau ! » Je hurle alors que je sens une nouvelle morsure. Elle n’est pas profonde, je ne crois pas, mais elle me file une décharge électrique dans toute la jambe. A nouveau je hurle de toutes mes forces. « Y’a quelque chose ! Pleins de choses ! »

Je me fous de l’eau trouble, de ce qui rampe ou mord en dessous. À ce stade, je pourrais être en train de nager dans un océan d'acide que ça n’empêcherait pas mon instinct de survie de prendre le dessus. Je plonge sans hésiter après Raelyn, son cri déchirant résonnant dans mes oreilles comme une alarme qu’on ne peut ignorer. « Y’a quelque chose ! Plein de choses ! » Merde. Je plonge une nouvelle fois la tête sous l’eau et scrute à travers l’obscurité, mes muscles tendus comme jamais, la douleur ignorée à la seconde où mes rétines me brûlent dès qu'elles entrent en contact avec Dieu sait quoi.

Face à moi, les ombres glissent. Elles sont des formes plus grandes que je ne voudrais l’admettre. Les pires cauchemars que je pouvais imaginer. Mais au moins, je sais une chose : elles nagent. Elles ne rampent pas juste comme des créatures au bord de l’extinction. Elles chassent. « Continue d’avancer ! » A peine ressortie de l'eau, je crie, ma voix couvrant à peine le chaos autour de nous.

Je ressors de l’eau, inspire à plein poumons et tire Raelyn un peu plus en avant, nos mains agrippant la vase pour trouver un point d’appui. « Bouge ! » que je lâche, sans trop y croire. Parce qu’elle a beau crier, elle continue d’avancer, de se battre. Et, franchement, elle le fait plutôt bien. On atteint la berge, haletants, chacun jetant un regard derrière nous. C’est à peine si j’ai envie de regarder ce qu’on laisse dans ces marais puants, mais mon esprit ne peut s’empêcher de réfléchir à toutes les horreurs planquées dans cet endroit. Puis, à Raelyn, je lance un regard, essuyant l’eau visqueuse de mon visage. « T’as l’air de t’en sortir mieux que certains, finalement. Va falloir qu’on se mette d’accord pour survivre, et que personne ne refasse le coup du cri dans l’eau, pigé ? » Et qu'on soit d'accord sur un autre point : ma survie l'emporte sur la sienne.

Je lui adresse un léger sourire, peut-être la première trace d’humour depuis des heures, et je désigne la forêt en contrebas. Quelque chose nous y attend, j’en suis sûr. « Tu veux parier sur ce qui va encore nous tomber dessus, ou t’as d’autres idées pour jouer les Indiana Jones sur cette foutue île ? »

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« Continue d’avancer ! » Continue d’avancer qu’il dit, le con. Vu comme il barbote comme s’il était à Saint Tropez - j’exagère à peine - j’en déduis qu’il ne doit pas être attaqué par les trucs qui me bouffent les jambes. Elles doivent pourtant atteindre des profondeur que les miennes n’atteignent pas, et il y a bien plus de chair à bouffer sur les siennes : il n’y a aucune foutue justice. « J’essaie ! » Au moins, les dinosaures qui nous poursuivaient semblent avoir peur du marécage et ne se sont pas jetés à l’eau pour nous suivre. Ca, où ils ne savent pas nager et inutile de préciser que je préfèrerais cette option. S’ils ont vraiment peur, eux, avec leurs griffes, leurs dents et leur cuir épais, je ne donne pas cher de notre peau. « Bouge ! » Je me débats de toutes mes forces, mais je suis ralentie par le poids de mes vêtements et par les petites créatures marines qui picorent mes jambes. Elles ne m’arrachent pas des membres. En revanche, je sens la trace de leurs dents dans ma chair, et je sais déjà qu'elles laisseront des filets de sang sur mes jambes et cuisses, et ce malgré l’épaisseur de jean entre elles et ma peau.

Mais finalement, on atteint la rive opposée. Je glisse sur la vase, j’ai du mal à m’extirper de l’eau, mais la main d’Auden se referme autour de mon poignet pour me tirer de là. Je doutais franchement qu’il le fasse, pour être honnête. Je n’attends pas grand chose de lui, en fait. Je me laisse tomber sur la terre mouillée, crache l’eau marron que j’ai avalée avant de carrément rendre le contenu de mon estomac. Quelle puanteur. « T’as l’air de t’en sortir mieux que certains, finalement. Va falloir qu’on se mette d’accord pour survivre, et que personne ne refasse le coup du cri dans l’eau, pigé ? » - « J’aurais bien voulu t’y voir. » Enfin, je jette un coup d'œil à mes jambes. Mon jean est troué à des dizaines d'endroits et des traces de morsures s’impriment sur ma chair. Les blessures sont superficielles, mais le sang coule bel et bien. « Ils t’ont pas attaqué ? » Je ne lui demande pas ce qu’il pense de la nature des ils. Il y a des questions qu’il vaut mieux éviter de se poser. « Tu veux parier sur ce qui va encore nous tomber dessus, ou t’as d’autres idées pour jouer les Indiana Jones sur cette foutue île ? » Je me redresse difficilement avant de me remettre sur mes pieds, et j’observe au loin. « Tu vois ce que je vois ? » A deux kilomètres se dressent une construction en béton. Je jurerais qu’il s’agit de ça en tout cas pas une formation naturelle. « Tu crois qu’on trouvera de l’aide là bas ? » Ou en tout cas de quoi contacter les secours.

Je la tire hors de l’eau sans un mot de plus, et, malgré ses jambes lacérées, elle tient bon, s’accrochant à moi autant qu’au peu de terre ferme qui nous reste sous les pieds. Je la vois inspecter les marques laissées par les bestioles, son jean troué, la peau griffée, et je ne peux m’empêcher un ricanement presque sec. Quand elle finit par lever les yeux vers moi, l’air épuisé et trempé, elle m’arrache une réflexion grinçante.« Pour qui tu me prends ? T’aurais préféré que je fasse un discours motivant, aussi ? Allez, on est toujours là. C’est tout ce qui compte. » Peut-être que le contraire aurait été préférable, maintenant que j'y pense.

Les créatures de l’eau, peu importe ce qu’elles sont, ont heureusement lâché l’affaire dès qu’on a touché la terre. Peut-être que l’odeur infecte ou le goût de nos membres ne les a pas convaincues… Va savoir. De toute façon, je ne compte pas replonger une seconde fois pour vérifier leur appétit. Je lui jette un coup d'œil quand elle me demande si elles ne m'ont pas attaqué, avec un sourire ironique qui en dit long.« Si, mais visiblement, elles préfèrent les petits morceaux… dommage pour toi. » Je lève les yeux vers l’horizon, là où elle m’indique la silhouette d’une construction en béton. L’évidence d’un truc artificiel est aussi clair qu’un mauvais présage. Ici, ça ressemble plus à une promesse douteuse qu’à une bonne nouvelle. Une idée me traverse l’esprit, aussi rationnelle qu’elle est inutile : si quelqu’un a survécu assez longtemps ici pour construire ça, ce n’est sûrement pas sans raison.

« Du béton sur cette île perdue… C’est toujours bon signe, hein ? On n’a rien de mieux à faire, alors on va voir de plus près. Allez, debout. » Je tends la main, cette fois sans une once de sarcasme. Ses blessures pourraient s’infecter, et elle le sait tout autant que moi. On a besoin de se remettre en marche, et elle n’a pas besoin de mon avis pour savoir que rester ici n’est pas une option.

Je reprends le sac à dos détrempé, le réajuste. « En route. Je compte pas finir comme les autres. » Et pour l'heure, nos deux survies sont liées. Quand elle se remet debout, j’évalue rapidement l’endroit. Le chemin est boueux et glissant, bordé d’arbres noirs et tordus qui semblent sortir tout droit d’un cauchemar. Mais cette espèce de ruine, là-bas, c’est notre meilleure option, qu’on le veuille ou non.

Alors, sans un mot de plus, je lui fais signe de me suivre et, avec un soupir résigné, on s’enfonce dans cette forêt malsaine sans savoir si les dangers se trouvent aux alentours ou juste à mes côtés.