rabbit in the headlights crédit gif - haert cassie edwards & @lena edwards dimension jurassique - l'épave

Les voyages organisés ne sont franchement pas ta tasse de thé. D’ordinaire, c’est toi qui planifie tout dans les moindres détails, en allant jusqu’à choisir le parfum des shampoings dans les suites d’hôtel, c’est dire. Là, c’est l’aventure avec un grand A, c’est l’oeil critique et acerbe qui remarquera le moindre faux pas et c’est typiquement le genre de chose qui va t’empêcher de profiter à fond du fameux séjour surprise. L’autre surprise majeure résidant dans la liste des autres gagnants du concours. De parfaits inconnus dans tous les sens et dans le lot, Lena.
Tiens donc. Sacré coup de comm pour une influenceuse de gagner un voyage, ça va faire bon genre pour la compagnie d’avoir du beau monde à bord, bien joué de leur part. Pour toi, ça ne fait que confirmer que c’est truqué, ces histoires et qu’ils ont eux-même choisi au moins certaines personnes à bord.
Les retrouvailles dans le hall d’embarquement ont été aussi fausses et forcées que si elles avaient eu lieu à un repas de famille auquel tout le monde était forcé d’assister. Mais hé, il faut faire bonne figure pour le public et les trois pauvres cons que vos dramas familiaux pourraient intéresser. “Wow, mais quel hasard de dingue”, “je m’attendais pas du tout à te voir ici”, “ça me fait trop plaisir de te voir”, “j’ai trop hâte de pouvoir passer un moment avec toi, ça fait longtemps”, à chacun d’interpréter le plus gros mensonge dans tout ça. Au moins dans l’avion privatisé et les places attitrées, vous n’avez pas à faire semblant de vouloir vous parler pour ne rien dire et dans le fond, ça vous arrange bien toutes les deux.
Tu ne sais pas dire à quel moment tu t’endors comme une souche, probablement après le repas à moins que ça ne soit même en plein milieu de celui-ci. Dans tous les cas, c’est à peine si tu t’en rends compte, sans doute devais-tu être particulièrement fatiguée.
Le réveil, en revanche, est particulièrement brutal. Il y a des bruits assourdissants de tous les côtés, et tu es bien trop désorientée pour discerner d’où ils proviennent et ce qu’ils signifient. Tu ne comprends rien, ton corps tremble et pourtant rien ne bouge autour de toi. Tu portes une main à ton front et tu grimaces alors qu’une vive douleur te prend ; lorsque que tu regardes tes doigts, ils sont plein de sang. Il te faut du temps pour te rendre compte de la gravité de la situation ; c’est réel, tout ça, l’avion est venu s’écraser tu ne sais où, t’as les oreilles qui sifflent et la cerise sur le gâteau c’est sûrement le fait que tu te retrouves coincée sur ton siège parce que ta foutue ceinture refuse de se détacher. Ce n’est pas réel, ce n’est pas réel, ce n’est pas réel, tu te le répètes en boucle en priant pour que ça soit suffisant pour te sortir de ce mauvais rêve, mais rien n’y fait. Pourtant quand tu réouves les yeux, tu es toujours là, prisonnière de ton fauteuil et ça te coûte encore sacrément plein d’efforts pour enfin réussir à t’en défaire. Aussi rapidement que possible, tu rampes dans la carcasse, croisant ici et là d’autres passagers n’ayant pas eu la même chance que toi. Ils gisent là, les yeux ouverts, parfois en plusieurs morceaux et ton premier réflexe est de vomir sur place.
Faut que tu sortes de là, merde.
Fébrile et toujours aussi désorientée, tu réussis tant bien que mal à t’extirper des décombres. Tes doigts se posent sur du sable, mais pas le temps de procéder l’information, tu t’éloignes en titubant jusqu’à retomber quelques mètres plus loin. Après une éternité, tu daignes enfin jeter un oeil au carnage autour. L’avion gît en morceaux épars, des survivants courent dans tous les sens tandis que d’autres sont prostrés dans un coin, blessés et sous le choc, et comment pourrait-il en être autrement après cette catastrophe ? « Lena ? » tu hèles une silhouette non loin sans être certaine qu’il s’agisse d’elle. Ta vision est trop trouble pour confirmer l’information, pas encore tout à fait remise de tes émotions.

Si Lena s'était montrée enthousiaste à l'idée de se faire offrir un voyage mystère tout frais payés et en l'échange d'absolument rien du tout, elle a vite déchanté en se rendant compte du nombre de défauts que cette invitation comportait. En plus d'être montée dans un avion rempli de tout un tas de personnes inconnues au bataillon et qui ne lui arrivent absolument pas à la cheville à son humble avis, elle s'est aussi retrouvée née à née avec sa sœur. Les politesses ont fusées entre elles parce qu'il était hors de question qu'elles ne s'affichent en mauvais terme pour éviter que n'importe quel torchon trouve à y redire, mais elle aurait largement préférée être la seule Edwards à bord de cet avion. Ensuite, des hôtesses de l'air aux services proposés, tout s'est avéré décevant. Elle s'imaginait déjà comment faire un retour bien salé aux organisateurs - si seulement elle savait qui ils étaient - mais tout ça paraissait bien futile à l'instant où elle se réveillait sur une plage, entourée d'un tel chaos qu'elle n'aurait pas pu l'imaginer même dans ses pires cauchemars. L'esprit encore embrumé par les évènements, Lena reste incapable de dire à quel moment les choses avaient mal tournées. Elle se retrouvait debout, seule sur le sable, la tête encore sonnée, sans même savoir comment elle a pu sortir de la carcasse de l'avion. Et alors qu'elle essaie de comprendre ce qu'il se passe, une voix provenant de l'arrière l'interpelle. Sans attendre elle se retourne pour faire face à celle dont, soudainement, la présence est devenue un peu moins agaçante. « Merde Cass tu vas bien ? » Difficile de dire si la réponse l'intéresse vraiment parce qu'elle a encore un minimum d'amour pour sa sœur malgré tout ou si c'est simplement qu'elle n'a aucune envie d'être affichée à son retour en Australie comme l'influenceuse qui a perdu sa sœur dans un crash d'avion, donnant à Cassie la chance d'être morte en martyr. De toute façon Lena n'a pas encore suffisamment repris ses esprits pour savoir quoi penser et comment réagir face au choc, face à ces morts, et face à la panique de finir au milieu de nul part façon Lost. Si déjà en montant dans l'avion elle s'était rendue compte que les choses n'étaient pas aussi belles qu'elle l'espérait, maintenant Lena a vraiment les meilleures raisons du monde pour se plaindre de la situation et elle compte bien le faire sans réfléchir un instant. « C'est pas possible, faut qu'on porte plainte, c'est pas normal que des avions se crashent en 2024. » Le constat est sans appel : elle a dû prendre un coup sur la tête, le trauma aura eu le don de la transformer en stéréotype de l'insupportable princesse influenceuse complètement déconnectée de la réalité - ou peut être qu'elle l'est depuis toujours ? « Quelqu'un va venir à notre secours, c'est sûr, ils ne peuvent pas nous laisser dans cette situation. » Son déni était aussi gros que son égo à cet instant.

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« J’ai l’air d’aller bien ? » C’est plus fort que toi, c’est l’émotion, la frustration, la colère, la peur, la douleur, la tête qui tourne, l’envie de vomir, le côté dramatique, tout ça en même temps qui prend le dessus. Le premier réflexe un peu con, c’est de remettre les doigts sur la plaie comme pour s’assurer que c’est réel et aïe, oui ça l’est. Le sang visqueux sur le bout de ton index te dégoûte, te donne envie de crier ou pleurer (peut-être un peu des deux en même temps), de courir secouer le pilote et de lui offrir ta plus belle prestation de Karen parce que c’est honnêtement tout ce qu’il mérite vu la situation l’enfer à la con où vous vous retrouvez.
Les îles perdues aux airs de paradis, t’adores ça, c’est pas la question. T’adores ça quand t’as payé trois-mille dollars pour un hôtel de luxe all inclusive avec des employés prêts à se plier en quatre pour toi à la moindre demande, même la plus insolite. T’adores ça quand tu peux passer tes journées à lézarder devant la piscine avec cocktails à volonté et masseurs attitrés. T’adores ça quand tu peux profiter des restaurants chics aux alentours et des yachts privatisés pour la soirée, faire des photos instagramables et étaler ton bonheur aux yeux du monde. En l’occurence dans votre situation actuelle, c’est tout ce que tu abhorres. « C’est grave ? Ça a l’air grave ? Dis moi la vérité, » bien évidemment à aucun moment tu ne fais référence à l’avion en morceaux ou aux possibles morts, non, là tout de suite ce qui t’intéresse c’est ta petite personne, ta coupure au front* qui te fait un mal de chien et qui continue de saigner abondamment. « Je vais être défigurée, merde. » Dans l’immédiat il y a bien plus important à gérer, tu le sais, mais l’avion dans lequel tu étais vient de s’écraser Dieu seul sait où, alors tu as bien le droit de paniquer et d’être dans tous tes états. Ça ne t’empêchera pas d’incendier la compagnie et de leur demander des millions de dollars de dommages et intérêts pour le préjudice, mais pour le moment, vous n’y êtes pas encore. « Alors là si tu crois que je vais laisser passer ça, ils ont intérêts à avoir d’excellents avocats parce que je vais pas les lâcher. » Au moins une chose sur laquelle Lena et toi tombez d’accord, ça serait bien la première fois.
Respiration un peu tremblante histoire de tenter de te calmer, tu commences à reprendre tes esprits et à réaliser (vraiment réaliser), la chance que vous avez eu de ne pas être enfouies sous des décombres ou éjectées en plein vol. « Ça va toi ? T’es pas blessée ? » tu t’enquiers tout de même. A première vue tout a l’air de rouler pour elle, si ce n’est peut-être quelques coupures ici et là, elle a l’air en bien meilleure forme que certains que tu as pu apercevoir jusqu’à maintenant. « Ils sont sûrement déjà en route, oui. » Toi aussi tu essayes de relativiser, de te dire qu’un incident du genre ne passerait pas inaperçu, pas avec des gens comme vous à bord pour faire la promotion du voyage et des services (là ils auront beau faire tous les gestes commerciaux du monde, rien ne t’empêchera des les trainer dans la boue et de ressortir victorieuse d’un procès ultra-médiatisé. Rien.) « T’as vu le commandant ? Ou des stewards ? » N’importe qui bossant pour cette compagnie aérienne et par défaut, responsable du désastre et du bien-être des passagers. D’un revers de manche, tu essuie le sang qui coule sur ton oeil, n’y voyant pas franchement mieux mais au moins t’as plus la désagréable sensation sur le visage. « On devrait chercher quelqu’un. »

(*c’est un bobo superficiel, ça saigne juste beaucoup et c’est impressionnant pour rien mais elle s’en remettra et ça ne laissera même pas de cicatrice une fois guéri, Cassie est juste précieuse et ultra dramatique )

win : elles arrivent à repérer le commandant en second qui est un peu plus loin dans les débris éparpillés sur la plage, en train d’essayer de rassembler les survivants
so close : elles trouvent une hôtesse de l'air qui a l'air au moins aussi au courant et utile qu'elles
fail : le nez de l’appareil n’est visible nulle part, autant dire qu’il sera compliqué de retrouver le pilote ou son second sans la partie où est supposée être la cabine de pilotage