Benjamin ne répond pas vraiment, il se contente de trois lettres, un ‘oui’ comme enivrer par ce que je lui dis, ou ce que je peux bien lui faire. Je reprends mes mouvements et je l’entends me dire dans un souffle quelques mots de plus « J'en ai envie. » Je lui souris et me mords la lèvre inférieure alors que je continue d’onduler mon corps sur le sien pour lui donner un peu plus de plaisir. Ses mains trouvent rapidement mes hanches pour accompagner mes mouvements et je le laisse faire, me laissant totalement aller à ses râles de plaisir qui me donnent envie de faire encore mieux pour le satisfaire. Je me dis que s’il commence à avoir des doutes, s’il se pose beaucoup de  questions, peut-être qu’il acceptera la nouvelle Loan si tenté qu’elle lui plaise plus encore que l’ancienne. Je continue de m’activer sur lui, trouvant sa langue entre deux soupirs et trois gémissements, et je finis par atteindre l’orgasme sans aucun mal, ce qui est plutôt étonnant puisque j’ai plutôt l’habitude de coucher avec des femmes. La contraction de mon intimité lors de mon orgasme l’aide à venir lui aussi et c’est quasiment en simultané que nous touchons des doigts le plaisir ultime. Je finis par me séparer de lui et me laisse tomber sur le lit à côté de lui, le souffle court, essayant de reprendre une respiration convenable. Je tourne un peu la tête pour regarder le jeune homme qui sourit, visiblement satisfait de mon petit retournement de situation. Je souris aussi et garde la tête dans son sens alors qu’il se met sur le flanc. Je remonte très légèrement le drap sur moi, au moins jusqu’à mon bas ventre. « La nouvelle Loan m'intrigue beaucoup. » Je souris un peu plus et viens porter ma main à son visage pour le caresser délicatement, avec une tendresse inouïe que je ne me connaissais que très peu. « J’espère qu’elle te plaira d’autant plus que la précédente alors… » Un frisson parcourt mon corps à l’instant où ses doigts frôlent ma peau et je ferme un peu les yeux, une seconde, pour apprécier ce moment. Je me sens bien, étonnamment. Pendant un instant, j’ai arrêté de penser que j’avais fait une erreur d’usurper l’identité de ma soeur, de lui voler sa vie, son mari. Pendant un instant, je me suis sentie elle, je me suis sentie moi en elle. « J'ai hâte d'en savoir plus, de mieux la connaître. Sous toutes les coutures. » Je souris un peu plus et le laisse m’embrasser avec tendresse. « J’espère vraiment qu’elle te plaira. Je pense que ce qui m’est arrivé aurait changé n’importe qui. Mais je n’ai pas envie de me laisser emporter dans une spirale de dépression. J’ai pris conscience que je ne suis pas seule, et que tu es là pour m’aider. Alors je ferai tout pour ne pas te perdre. Je n’ai pas envie de te perdre mon amour… » Mon regard est brillant, presque sincère. Au fond, je le suis un peu. Je suis certainement en train de m’attacher un peu trop à lui. Je délaisse ma vie à Brisbane, mes relations, mes amis, ma famille, tout ça pour rester un peu plus ici avec lui. C’est grisant. Je crois que pour la première fois, j’ai presque envie de souffler, me laisser porter, ne plus tout contrôler comme j’ai toujours eu besoin de le faire. J’ai envie de me laisser cajoler, et Benjamin semble être l’homme parfait pour ce genre de chose. Serait-il en train de me faire changer, véritablement ?

Je noie très vite une pensée pour la taire, mais elle n’en est pas moins vrai ; même si j’aimais plus que tout ma femme comme elle était, même si elle restait mon âme sœur malgré la mélancolie qui s’était installée peu à peu sans que je ne puisse y faire quoi que ce soit, il sera facile pour la « nouvelle Loan » de me plaire plus que son ancienne version. C’est étrange qu’un tel drame ait été nécessaire pour la remettre sur pieds. J’imagine que cela a exalté sa combativité, qu’elle avait enterrée avec les années. Elle sourit de nouveau, elle semble avoir retrouvé vie. Je vois bien qu’elle ne se laissera plus marcher sur les pieds, qu’elle en veut. Hors de question pour elle de finir en dépression, elle préfère se battre pour comprendre et reprendre sa vie en main. Je souris en la voyant ainsi. Je réalise qu’elle me manquait depuis bien avant son enlèvement, en réalité, et que je la retrouve pleinement, bien plus que je ne le pensais en la trouvant sur le palier de la porte. J’ai devant moi un savant mélange entre la Loan que j’ai rencontrée à l’université de Dublin, et… autre chose. Quelque chose que je veux découvrir. « Ne t’en fais pas, je suis là. Tu peux compter sur moi. » je murmure tout bas à ma belle épouse. Une main sur son visage, je caresse tendrement sa joue du bout du pouce. Je sais que je ne suis pas l’homme le plus évolué et mature qui puisse exister. Mais je suis quelqu’un sur qui on peut compter. Mes clients, mes amis, ma famille, tous savent que ces larges épaules sont capables de supporter bien du poids et de se montrer à la hauteur pour les bonnes causes –entre deux parties d’Uncharted. On peut avoir une partie de soi qui stagne dans la peur de grandir, et l’autre avec les pieds bien ancrés sur terre. Un paradoxe parfois difficile à cerner, je le conçois. « Tu es devenue plus forte. Ca fait plaisir de te voir si combative. » Et j’espère que ma nouvelle Loan voudra de moi autant que l’ancienne. J’espère réussir à suivre la cadence et me faire aimer d’elle. Tout ira mieux, me dis-je. Je veux croire que nous sortirons plus unis de tout ceci. « C’est peut-être déplacé, mais… peut-être que c’est arrivé pour une bonne raison. » Une pensée que j’ose à peine articuler, et à la réflexion, j’aurais pu la garder pour moi également. Je ne peux pas et ne veut pas m’imaginer tout ce qui lui a été fait. Des horreurs dont elle ne me parlera jamais dans le détail pour ne pas les rendre plus réels et faire remonter la douleur à la surface. Ce sont les paroles maladroites d’un ignorant. Parfois, les choses arrivent, juste, sans raison, et par pure injustice. Je passe mes bras autour de Loan et la serre fermement. « Je t’aime. » je murmure, avant de déposer un baiser sur sa tempe. « Et crois-moi, maintenant que tu es là, je ne te lâche plus. » Mes doigts, baladeurs, se faufilent sur ses côtes pour la chatouiller malicieusement. Et alors qu’elle gigote dans tous les sens, riant aux éclats, je la garde prisonnière de mon étreinte. Non, je ne la lâcherai pas.