L’enfant s’endort paisiblement et tu pousses un soupir de soulagement. Le métier commence à entrer et elle se dit que finalement, elle est pas si nulle que ça. Elle adore les enfants mais entre le fait de les aimer et le fait de s’en occuper, il y a un océan entre les deux. D’ailleurs, elle se souvient avoir flippé comme une malade quand la proposition a été faite, en fait, elle a ri aux éclats, croyant à une blague puis elle s’est tue quand elle a pigé que son amie était sérieuse. Elle était dans la merde, si elle avait pu faire autrement, elle l’aurait fait qu’elle lui a assuré, yeux dans les yeux, expression de chien battu sur le visage et bien sûr, blondie a craqué. Il est tellement facile de l’avoir la Jordan, elle déborde de gentillesse, parfois on s’en amuse, parfois on en joue, mais blondie est comme elle est et vingt-cinq ans à traîner son cul sur cette planète, elle a appris à faire avec, non pas qu’elle ait le choix à vrai dire.

Pour passer le temps en attendant le retour du père, elle sort son carnet à dessins, ses crayons et ses confiseries, son repas du soir. On lui demande souvent comment elle garde la ligne avec un régime aussi douteux ? Allergique aux légumes, la salade sert plus de décoration qu’autre chose, et le sucré domine en maître dans ses placards. Elle a dû s’assumer très jeune et a opté pour ce qu’il y a de plus simple, par flemme, par manque de temps ou simplement parce que les gamins et le sucre, c’est une grande histoire d’amour. S’installant sur le sol, dos contre le canapé, elle fait défiler les pages pour arriver à celle qui l’intéresse, le portrait de sa mère qu’elle a commencé il y a quelques jours et dont la fin marquera le dénouement de cette histoire à rebondissements. Ses souvenirs guident sa main, tracent les traits de cette femme qui à dix ans, lui paraissait invincible. La reine, adulée prend naissance sur ce carnet xxl, sans qu’elle sache comment, l’inspiration est venue, comme ça, soudainement, une façon de ne pas oublier, une façon de la garder près, une façon de…ne pas perdre la tête, peut-être.

Perdue dans ses souvenirs et dans son travail, elle entend pas directement qu’on entre et elle bondit presque à l’entente des bruits de pas, se cognant le tibia contre le pied de la table basse, de quoi la faire râler, à voix basse, n’oublions pas que le petit dort juste à côté. « Bonsoir ! » qu’elle lance avec engouement, se levant et s’étirant dans le même mouvement pour ranimer ses muscles. « ca été ? » qu’elle demande avec un grand sourire avant de commencer à ramasser son bordel. Un coup d’œil à son portable lui indique que James est de retour tôt ce soir.

Elle se demande si elle aurait dû préparer à manger, c’est pas préciser dans ses tâches, mais peut-être que ça se fait ? C’est la moindre des choses vu qu’il rentrer tard du boulot, sans doute épuisé par tout ce qu’il doit faire. Maintenant qu’elle y pense, elle sait pas trop ce qu’il a comme travail, peut-être qu’on lui a dit, mais vu sa mémoire, elle a des doutes, elle s’en serait souvenue qu’elle croit, elle a beau être conne parfois, elle se souvient quand même de ce qu’on lui dit. « C’est à toi que je devrais poser la question ! Mathis a été sage ? » elle hoche vivement la tête, un grand sourire pendue aux lèvres « oui, très » aucun mensonge, le petit garçon était plus calme qu’elle ne l’aurait cru, il est pas encore dans l’âge pénible, pas qu’elle s’y connaisse réellement, c’est ce qui lui est venu aux oreilles en tout cas. Les enfants restent un grand plaisir à ses yeux, mais au moins, elle en apprend tous les jours donc l’ennui est proscrit. « Il dort j’imagine ? » elle acquiesce, avec un grand sourire. « Et depuis un bon moment ! » il a certes un peu pleuré avant de rejoindre le pays des rêves, mais rien d’insurmontable dans le fond. Il suffit de le bercer, de chanter un peu et le tour est joué ! « Je crois bien que je viens de démissionner en fait » elle penche la tête sur le côté, une expression inquiète sur le visage. Elle sait pas trop quoi dire, les questions se bousculent mais elle se demande si elle a le droit de l’interroger, ils se connaissent à peine et les règles du savoir-vivre lui échappent, souvent. « tu veux en parler ? » c’est la première question qui sort d’entre ses lèvres, ses prunelles inquisitrices dans celles de James. « Enfin, ca va ? » à comprendre ceci te convient ? Ca l’air de bien se passer vu le ton sur lequel il l’a dit mais elle est bien placée pour savoir que les changements c’est perturbant et de ce qu’elle a pu étudier de son patron occasionnel, ça n’a pas l’air d’être dans ses habitudes. « Pourquoi donc ? Ton boulot ne te plaisait plus ? » elle essaie de comprendre son cheminement de penser, de connaître ses motivations car en tant qu’humain, James l’intéresse et sa ressemblance ainsi que différence avec Ian la fascine. « Désolée je pose trop de questions » ses joues se teintent de rouge, signe de son embarras.

« Et bien… Je crois que je devrais te garder plus souvent par ici, avec moi c’est toujours un calvaire de le faire dormir. » elle rigole, amusée et un peu ravie de constater que finalement, elle arrive à faire quelque chose de bien et que son cas est pas si foutu qu’elle aurait pu le croire. Elle s’est impliquée plus que de raison pour lui prouver qu’elle pouvait le faire, car elle est pas trop conne blondie, elle sait qu’il a pas été confiant direct, laisser son gosse à une inconnue qui n’a aucune expérience dans le domaine, y a de quoi s’arracher les cheveux d’angoisse, m’enfin, elle est contente de parvenir à combler ses lacunes. « Je sais pas trop je… suis un peu surpris par moi-même en fait. Je crois que j’ai besoin d’un verre. Tu m’accompagnes ? » Elle hoche la tête, avec un petit sourire « avec plaisir ! » elle a rien d’urgent à faire ce soir donc elle peut s’attarder un petit peu chez James et puis il a l’air d’avoir besoin de parler, alors elle peut bien lui offrir une oreille attentive. « Non ! Non voyons pas de soucis c’est moi qui ait amené le sujet je suis juste un peu… Je sais pas j’ai eu comme le sentiment que j’avais besoin de changement dans ma vie et… Voilà je suis allé parler à mon patron. C’est étrange. C’est pas le genre de choses que je fais normalement, et j’ai un fils je devrais sans doute encore plus flipper mais je sais pas… Ca me fait du bien de m’être écouté un peu pour une fois… » elle acquiesce encore, gardant le silence pour le laisser le loisir de déverser tout ce qu’il a sur le cœur, dans la tête, ça ne peut que lui faire du bien qu’elle se dit, si elle peut se rendre utile, elle le fait sans qu’on lui demande. « Enfin mon patron a pas vraiment accepté ma démission donc je peux toujours… J’ai le temps d’y penser et c’est pas dit que je démissionne vraiment. Le job est plutôt sympa au final… » Un autre mouvement de tête, l’air de dire, je t’écoute et je comprends, autant que possible. Ce n’est pas quelque chose d’habituel chez elle, elle a surtout tendance à faire les choses sur l’instinct et voir ce qui se passe plus tard, bon après, la différence étant que lui a des responsabilités à assumer, contrairement à elle « Je suis… Je veux pas t’embêter avec ça Jordan désolé… T’as sans doute des choses plus intéressantes à faire, tu veux que je te ramène peut-être ? Enfin que je te paye avant évidement… Excuse-moi, je suis un peu… Perturbé ce soir » piquée à vif, elle se redresse vivement comme une enfant prise sur le fait « non, non, ça ne me dérange pas du tout » qu’elle s’empresse de le rassurer avec son sourire habituel « J’ai encore du temps pour qu’on se le prenne ce verre » elle aime bien sa compagnie dans le fond et intriguée depuis leur retrouvailles à sens unique, elle aime bien apprendre de nouvelles choses à son sujet. Elle le regarde s’activer pour qu’ils se prennent finalement ce verre, la discussion sera plus simple, peut-être. Il lui faut à peine quelques minutes pour qu’elle se retrouve avec un verre entre les mains. « Je peux comprendre ton besoin de changements, je pense qu’il arrive qu’à un moment de notre vie, qu’on ait besoin d’autre chose, c’est normal » surtout dans le cas de James, elle le voit comme un homme accroché à son quotidien et à ses habitudes, peut-être qu’elle se trompe et que son analyse est faussée, pas grave, ça lui permettre d’apprendre un peu plus. « Je pense que si tu as annoncé cette nouvelle c’est pas anodin, c’est que quelque part t’y pensais déjà, tu ne crois pas ? » elle joue un peu avec son verre, ayant l’impression de marcher sur des œufs et de donner son avis sur des faits qu’ils la concernent pas…quelque part. « Enfin, c’est sûr que c’est un gros risque que tu prends, mais peut-être que quelque chose de mieux t’attend ailleurs, ça peut t’être bénéfique au final » elle lâche un petit rire avant de hausser un peu les épaules, elle a conscience d’être mal placée pour donner de tels conseils, à vingt-cinq ans, on ne sait rien de la vie, il parait. « après comme tu as dit, tu peux prendre le temps d’y réfléchir avant de donner une décision définitive, ça te rassurerait peut-être plus » elle lui offre un grand sourire qui se veut réconfortant.

« Santé ? » elle fait tinter son verre contre le sien avec ce même petit sourire « santé ! » et elle trempe ses lèvres dans son verre et le moins qu’on puisse dire c’est que le vin, c’est pas du tout sa tasse de thé, comme s’il avait lu dans ses pensées, il lui demande alors si ça lui plait « euh…oui, oui » s’empresse-t-elle de répondre comme une gamine prise en faute et devant son ton peu convaincant, elle ajoute « j’ai pas trop l’habitude d’en boire » une façon de s’excuser de ses maigres qualificatifs sur le sujet. Elle considère que le vin est une boisson des grands et elle, elle l’est pas, grande, juste une gamine prisonnière dans un corps d’adulte. Et puis, elle préfère la vodka, qu’elle boit comme de l’eau à force d’habitude, des origines russes qu’elle ignore sûrement. Avec le temps, elle s’est dit qu’elle le devait sûrement à ce père qu’elle n’a jamais connu, il faut bien que ça vienne de quelque part non ?

« Sans doute… » L’air peu convaincu peint sur ses traits, ça peut se comprendre, enfin plus ou moins, ils sont tellement différents dans le fond. Elle, a jamais rien eu de stable dans sa vie alors ça reste un mystère cette envie de quotidien, de routine, il lui arrive parfois de se dire que ce serait pas mal et puis, elle commet un geste inconsidéré et ça lui passe. « Evidement… Depuis que j’ai Mathis dans ma vie les choses ont un peu changé et je me pose des questions... Sur mon futur ce que je voudrais en faire. Ce que je voudrais pour lui aussi. » Elle hoche la tête, un sourire compréhensif, l’air de dire que c’est tout à fait normal. Elle se sent un peu moins seule à avoir de telles questions qui l’empêchent parfois de dormir car un immense changement va s’opérer et comme lui, elle se demande ce qu’elle va pouvoir faire maintenant et où ce nouveau chemin va la mener. Finalement, ça arrive à tout le monde, un jour ou l’autre faut croire. Elle en profite pour boire un peu de vin, à force d’insistance, c’est pas si mal dans le fond même si c’est sûr qu’elle en boira pas tous les jours. « Mon père a une association, c’est pour les femmes atteinte de cancer du sein et j’ai toujours été… Un peu fasciné par son travail. » elle capte de l’admiration dans sa voix, c’est ce qu’on ressent habituellement pour son paternel ? Ça doit varier selon les gens, elle sent une brève pointe d’envie. « Il m’a proposé de travailler avec lui puis, de reprendre les reines… Et je pense que c’est en partie ce qui doit se tramer dans ma tête depuis quelques semaines. C’est juste un peu inquiétant. De se lancer dans un nouveau challenge… Je suis pas sûr d’être à la hauteur de ce qu’il a entrepris. » « C’est sûr que c’est pas facile » son vin tournoie encore un peu dans son verre alors qu’elle réfléchit à ce qu’elle va dit, que ça sonne un minimum intelligent. « Toute nouveauté est inquiétante, mais il ne faut pas laisser la peur nous guider et en faire un moteur » ça l’air plus facile à dire qu’à faire, elle s’en rend bien compte et se mordant machinalement la lèvre inférieure, elle poursuit « s’il a fondé cette association c’est qu’il y tient et je ne pense pas qu’il te propose de la reprendre s’il était pas sûr que tu en serais capable » elle hausse nonchalamment les épaules, au fond qu’est-ce qu’elle sait de lui ? « Enfin c’est sûr que je ne le connais pas, mais ça me semble assez perceptible qu’il te fait confiance et qu’il te croit apte à le remplacer » ça lui parait logique comme raisonnement, bon, elle a pas tous les détails de l’histoire blondie, donc pas dit que son avis ait quoique ce soit de pertinent.

« On peut aller se poser sur le canapé, on sera peut-être plus à l’aise » elle hoche simplement la tête et se dirige vers le canapé où elle s’installe, James à quelques centimètres à peine d’elle. « Bon assez parlé de moi… Qu’en est-il de la charmante femme qui a gardé mon fils ce soir ? » elle pige pas direct ce qu’il lui dit, ça du mal à faire un chemin jusqu’à son cerveau, surtout avec ce qu’elle capte comme un compliment et il faut qu’il poursuive pour que toute compréhension se fasse « Je sais bien peu de choses de toi au final si ce n’est que tu sais endormir les enfants bien plus facilement que moi » elle lâche un petit rire, se demandant bien ce qu’elle pourrait lui dire d’un minimum intéressant sur elle. « Eh bien, je suis mécano en fait » elle sait pas trop si c’est ce qu’il attendait mais bon tant pis, ils en étaient à causer de leurs activités professionnelles respectives donc… « enfin je cherche aussi un autre boulot » parce que apprentie mécano ça permet pas de payer toutes les factures et vu qu’elle compte arrêter le tapin, ça risque de se faire ressentir dans son compte en banque, heureusement, le fait de vivre en coloc permet d’amortir le choc. « Enfin plus maintenant, j’ai été contactée par un salon de tatouage qui a apparemment aimé mes dessins et j’ai un entretien avec eux la semaine prochaine, nous verrons bien » elle se tait parce qu’elle trouve ce qu’elle dit stupide et franchement ennuyeux. Elle est pas douée pour parler d’elle, ça doit être tellement chiant pour ceux qui l’écoutent. « Tiens en parlant de dessin ! » elle dépose son verre et fouille dans ses affaires, son carnet à la recherche d’une feuille où elle avait immortalisé un Mathis souriant avec les détails d’un dessin réaliste. « Je me suis dit que ça te plairait de l’avoir, enfin, tu n’es pas obligé bien sûr » elle en serait pas vexée, comme le souligne son sourire, blondie se vexe rarement.

« Je n’en buvais pas non plus quand j’étais plus jeune, j’imagine que c’est un truc de vieux. » elle rigole elle aussi, peut-être finalement, elle aurait plutôt dit grand, parce qu’il a pas l’air tellement vieux James, un peu plus de la trentaine si elle s’en souvient bien. Ils ont pas beaucoup d’écart en âge, juste qu’il est plus adulte qu’elle. « Tu as quel âge Jordan ? » ça sonne comme du déjà-vu, il lui avait déjà posé cette question dans le temps, à croire qu’il n’y a qu’elle qui s’en souvient…de toute évidence ouais, m’enfin c’est pas si important qu’elle se dit, les années ont passé et son visage n’a été qu’un dans une multitude de rencontres. « Vingt-cinq ans » elle prend même plus la peine de préciser qu’elle les fait, généralement on lui donne entre dix-huit et vingt-deux ans, souvent, elle doit prouver qu’elle est bel et bien majeur, loin de s’en vexer, ça la fait surtout marrer, y a tellement pire dans la vie.

« Je veux pas que ça me fige, tu as raison, ça doit me pousser à mieux faire… » elle opine du chef, un petit sourire encourageant sur le visage, jouant avec son verre de vin tout en hésitant à le reposer sur la table. Ça se fait peut-être pas, il l’a invitée gentiment à boire, ce qu’elle a accepté, maintenant il lui faut assumer jusqu’au bout. « Je pense qu’il aimerait surtout que ça reste dans la famille. Il a ouvert cette association à la mort de ma mère pour venir en aide aux gens qui comme lui avaient vécu la maladie… Et je pense que son histoire personnelle l’a aidé à devenir un vrai support pour ces gens… J’ai l’impression qu’il se dit que si un de ces fils reprend l’association, il y aura toute cette histoire derrière mais… J’ai aucun souvenir de ma mère et ce cancer il nous l’a arraché mais je ne l’ai pas battu et hais comme mon père l’a fait… moi j’ai pas mal vécu l’absence de ma mère, C’est pas devenu le combat de ma vie tu vois ?» elle l’écoute silencieusement, essayant de comprendre les enjeux car faut l’avouer que les relations familiales lui sont étrangères, elle n’a jamais eu que sa mère et encore à mi-temps, les rares fois où cette dernière arrivait à délaisser sa poudre pour la compagnie de sa petite-fille devenue indépendante avant l’âge. « Je pense que d’une certaine manière ça fait aussi parti de ton histoire » elle cherche les mots, les pèse minutieusement, sans doute la première fois que ça lui arrive, elle se dit que c’est la moindre des choses puisqu’il prend la peine de lui ouvrir son corps. « Même si tu ne l’as pas vécu directement, peut-être qu’il te manque quelques souvenirs mais tu as perdu ta mère  à cause de ça » elle a l’impression de s’embourber dans ses paroles, elle se demande si elle est la meilleure personne pour lui donner des conseils. « C’est sûr que c’est très important pour lui, qu’il a une approche qui est différente de la tienne, mais ca veut pas dire que ton travail sera moins bien, ni ton implication. » Elle fait une petite pause afin d’organiser ses pensées une bonne fois pour toute « peut-être qu’il veut que ça reste dans la famille mais un projet aussi important à ses yeux ne serait pas confié à la légère, enfin je pense, après tout dépend de toi et des raisons qui te motiveraient à accepter sa proposition » ça l’air assez compréhensible qu’elle se dit, pas trop bancal et ça sonne pas trop débile, quoique sur ce point, elle a quelques doutes. « Le mieux serait que tu le fasses parce que tu le veux et non parce que tu te sens obligé vu que c’est ton père et qu’il s’agit d’une histoire de famille, enfin voilà » elle se dit que ce serait pas mal qu’il apprenne à écoute son cœur et qu’il prenne des décisions par rapport à lui quelques fois.

« Ah oui ? Donc si j’ai un souci de voiture je peux faire appel à la gardienne de Mathis, plutôt sympa cette double identité » Elle acquiesce tout sourire. « Avec grand plaisir, enfin pour l’instant je suis encore une apprentie mais si je peux aider » Elle a bien vu de la surprise dans son regard, ça l’amuse à chaque fois, on l’y voit rarement dans ce domaine. Au vu de son côté avenant, parait-il qu’on l’engagerait comme vendeuse, une fois même on lui a demandé si elle était mannequin, elle a le corps mais quand on vient à parler de démarche c’est une autre histoire et elle a pas assez de volonté ni d’envie pour persévérer là-dedans. « Mon frère est mécano, il a essayé de m’apprendre quelques trucs mais je suis un vrai catastrophe. Un cas désespéré comme il m’appelle » Son frère ? Ses prunelles le parcourent plus longuement, inquisitrices alors qu’elle tente de  se souvenir de son nom de famille qui, elle en est sûre, sonne comme celui de son patron. Ou bien, elle est complètement à côté de la plaque, pourtant…enfin tant pis. « Tu dois sûrement être doué pour autre chose » qu’elle dit avec douceur, portant machinalement son verre à sa bouche avant de se souvenir de pourquoi celui-ci restait loin d’elle depuis tout à l’heure, vive la vodka. « Whoua ! J’imagine que c’est une opportunité en or ! » qu’il lui dit au sujet de l’intérêt de ce salon de tatouage, en réponse, elle hausse simplement les épaules « oui, sûrement » elle se fait pas trop d’illusions, c’est juste une demande de rencontre et non une promesse d’emploi, l’entretien sera décisif et elle n’en a jamais réellement fait donc…enfin on verra bien qu’elle se dit. « C’est toi qui a dessiné tes tatouages ? » « Euh oui, je savais ce que je voulais donc je me suis dit que ce serait plus simple surtout que je suis très difficile » elle rigole un peu, elle avait fait le tour des salons de tatouage mais personne n’était arrivé à retranscrire ses idées et puisqu’on n’est jamais mieux servi que par soi-même, elle s’y est attelée, pour les tatouages actuels et pour les suivants.

« C’est toi qui à fait ça ? C’est marrant on dirait presque plus qu’un dessin, comme si t’avais capté un bout de son âme dedans… Un bout de Mathis. C’est magnifique merci beaucoup » son visage s’illumine, son regard pétille et son sourire est immense, blondie rayonne. « je suis contente qu’il te plaise » tant de compliments en une seule phrase, elle n’en a pas l’habitude, ça lui fait bizarre mais elle aime le fait que ses dessins puissent rendre heureux, ça lui donne la sensation d’avoir réussi quelque chose. « Je comprends pourquoi ils t’ont contacté, tu as un sacré talent. » « je pense que le modèle y est pour beaucoup » Et sans qu’elle s’en rende compte, ses joues se sont déjà teintées de rouge, Jordan et les compliments, tout un art. « Faudra juste faire attention au papier, il est assez fragile, j’aurais peut-être dû le faire sur une matière plus solide » une remarque plus pour elle que pour lui, enfin, elle prévoit de s’en servir comme modèle pour un tableau dès qu’elle en aura le temps, un autre qu’elle mettra dans un coin. « Bon, je vais pas te déranger plus longtemps, tu dois être fatigué » elle dépose son verre à moitié plein sur la table et se penche pour ranger les affaires qu’elle vient de mettre en désordre, piochant au passage une sucette dans son sac. « Ah oui d’ailleurs, je ne serai pas là pendant une semaine,  ou même deux au cas où tu aies besoin de moi » elle devra s’occuper de l’enterrement de sa mère et s’offrir quelques jours en dehors de Brisbane pour faire le point, heureusement son entretien d’embauche est prévu pour lundi sinon elle aurait dû l’annuler. « Enfin voilà, merci pour le vin et ton hospitalité »

« Oui c’est sûr… C’est juste un peu compliqué de faire le tri dans ma tête. Mais je pense que c’est pas plus mal que je me laisse un peu de temps pour y penser… » Elle hoche la tête, un petit sourire offert. Ouais, le temps d’y penser lui fera pas de mal qu’elle se dit, c’est pas dans ses habitudes de décider d’un coup de tête donc une petite réflexion lui permettra d’y voir plus clair et de garder un petit peu le contrôle, elle a l’impression qu’il en a besoin, peut-être qu’elle se trompe, au fond, c’est pas si essentiel quand elle y pense. Elle l’aime bien donc elle aimerait bien qu’il soit heureux et épanoui, c’est quelqu’un de gentil et la vie est courte pour qu’il se retrouve coincé dans quelque chose qui lui plait pas, enfin c’est pas exactement ça, elle a l’impression de se perdre dans son propre raisonnement, bon, l’essentiel étant qu’il ait compris où elle voulait en venir. « T’es pas obligé de finir tu sais ? Si ça te plait pas… Il y a pas de soucis. » elle se sent comme une gamine prise en faute et le rouge apparait sur ses joues alors qu’elle pose le vin « euh…d’accord, désolée » qu’elle répond, un peu gênée par contre, se sentant impolie de n’être pas allée au bout de son engagement, c’est comme être invité à manger et ne pas terminer son assiette, y a des raisons pour que l’hôte se sente insulter.

« Ils ont une signification ? » qu’il lui demande finalement alors qu’elle se perd en interrogations pour savoir si elle l’a vexé ou non, visiblement non, en tout cas, elle aimerait bien croire que ce ne soit pas le cas. « Certains oui, d’autres non » la moitié sont des dessins qui lui avait tapé dans l’œil et qu’elle trouvait assez intéressant d’avoir sur le corps, trouvant que le résultat sera plutôt joli à regarder « c’est un peu comme ce qui m’inspire en dessin, dès que ça me plait, je passe dans un salon de tatouage » elle sourit, c’est peut-être un peu irréfléchi car les regrets peuvent subvenir plus tard mais pour l’instant il y a rien eu de tel, elle en est plutôt satisfaite et pense à se faire un autre bientôt, quelque chose en rapport avec sa mère. La discussion s’aventure finalement sur le dessin qu’elle vient de lui offrir et de la beauté du petit garçon qu’elle trouve complètement irrésistible ! « C’est vrai qu’il est magnifique » et elle le pense, bon la différence c’est qu’elle trouve les enfants étrangement beaux et attendrissants, elle se sent bien à leur contact, sans doute parce qu’elle se sent pas tellement plus âgée dans sa tête. « D’accord je ferais attention… Mais n’hésite pas à en faire d’autre si Mathis t’inspire… J’adore ! » « Ah ! ça tombe bien, je comptais faire une peinture à l’huile, dès que j’aurais un peu de temps, je pense que le résultat sera encore plus intéressant » elle hausse nonchalamment les épaules, à vrai dire, elle a déjà plus ou moins commencé « enfin on verra bien » elle doit d’abord terminer le travail d’hommage sur sa mère dont elle peine encore à trouver la façon de concrétiser toutes ses idées, c’est plus compliqué qu’elle ne l’aurait cru surtout qu’elle doit piocher dans ses souvenirs et les maigres affaires qu’elle a de sa mère.

« Heu… D’accord. Oui… » elle sent qu’il y a peut-être un malaise ou elle pense trop, elle sait pas trop mais il vient de rentrer du travail, ça se fait pas de squatter aussi longtemps, dans l’absolu il doit avoir mieux à faire. « Oh… Tu pars en vacances ? » « euh… » elle sait pas trop quoi répondre, elle hésite, des vacances, elle sait pas trop, sans doute que c’est la meilleure façon de le présenter « oui et non, enfin, j’ai des trucs familiaux à aller gérer dans ma ville natale » en dire sans trop le faire, elle sait que ce genre de sujets met les gens mal à l’aise et elle veut pas ça avec elle, ils savent plus trop où se mettre, se sentant embarrassés d’avoir à porter le poids de ces responsabilités. Au fond, y a de l’espoir que cette décision soit pas prise, et qu’elle revienne à elle et que les Brewster aient enfin leur putain de fin heureuse. « Merci à toi de… Enfin d’avoir écouté. C’est agréable d’avoir un peu de compagnie… Enfin non pas que j’ai jamais de compagne mais… Enfin merci…» elle se sent un peu mal de le laisser comme ça et de foutre le camp en plein milieu, c’est sûr qu’avoir un enfant et un boulot aussi prenant ça laisse moins de temps pour le reste « Je suis vraiment désolée, mais si tu le veux à mon retour, c’est moi qui t’invite à boire un verre ? » Y a de l’espoir qu’il accepte et qu’il lui tienne pas trop rigueur de son départ précipité. « Ce sera pas du vin par contre, comme ça tu me diras où t'en es de ta décision » elle a un petit sourire « Enfin, si tu veux bien sûr… » Elle met son sac sur l’épaule, oubliant qu’elle doit être payée, c’est pas si important parce qu’elle a passé un chouette moment avec le gosse. « Je vais y aller alors » l'envie est pas tellement là.

« Et moi qui me trouvais super spontané d’avoir donné ma démission sur un coup de tête… » Elle rigole avec lui, c’est sûr que Jordan fait beaucoup de choses sur un coup de tête, ce qui explique qu’elle peine à faire des plans, des programmes, ça finit toujours par tomber à l’eau, elle est rythmée par l’instinct et l’envie et ça lui a assez réussi jusqu’ici, enfin elle est toujours en vie, c’est un bon début. « Jamais de regrets ? Ou peur d’en avoir ? » Elle secoue la tête de gauche à droite avec son petit sourire habituel « Pas vraiment non » Elle hausse les épaules, nonchalante « si je les ai faits c’est que je les aimais à un moment ou un autre donc ce sentiment reste puisque je l’ai fait pour une raison au départ » Si parfois il lui arrive de se demander pourquoi elle a inscrit tel ou tel dessin sur sa peau, la lassitude ne lui étant pas étranger, elle finit cependant par se souvenir qu’il y avait bien un truc qui faisait qu’elle le trouvait spécial à une époque. « Si vraiment, je l’aime vraiment plus, il est toujours possible de le retravailler et donner un petit coup de neuf » Ce qui ne lui est pas encore arrivé, pour l’instant satisfaite de ses choix, sans doute parce qu’elle ne s’est jamais faite tatouer le nom d’un ex, pas dit que ça arrive bientôt, ce qui n’est pas plus mal au fond. En parlant d’art, elle parle de la future toile qu’elle compte faire à l’effigie de Mathis, quand ? Elle sait pas trop, peut-être à son retour de Sydney, ou avant, ou dans quelques mois, elle sait pas trop encore, elle verrait bien après le projet sur sa mère, si elle parvient à le terminer. « Je me réjouis de voir ça alors… Tu exposes quelque part… Enfin mise à part sur ton corps ? » elle pouffe un peu de rire, à la fois surprise et moqueuse « Ou la la la non ! » elle s’exclame, étonnée au possible « je suis pas assez douée pour ça, je peins et dessine surtout pour moi, parce que ça me plait en fait » ça l’aide à se vider la tête, à s’exprimer quand les mots se font la malle et ça fonctionne bien. La plupart de ses travaux peuvent être considérés comme intimes et blondie se dit que ça doit pas intéressée grand monde, un jour, peut-être, quand elle se sera améliorée.

« Tu viens d’où ? » sera finalement la dernière question de ce soir qu’elle se dit et elle trouve ça dommage, un peu. « De Sydney » un petit sourire, sa peau bronzée lui donne raison même si sa blondeur évoque l’Europe de l’est ou du nord. Elle plie bagages et se dirige vers la porte d’entrée après qu’il lui ait promis d’y réfléchir, de la tenir au courant et de prendre un verre en sa compagnie. Ça lui fait plaisir, ça veut dire que sa présence est pas trop pénible et qu’elle a été un peu utile. Et c’est sur un dernier sourire qu’elle prend la porte, bon, elle se demande si Noa sera à la maison, elle a pas eu de ses nouvelles de toute la journée, elle sort son téléphone pour la sonder et savoir si elle doit s’arrêter dans une pizzeria pour rapporter de quoi manger. « Jordan ! » portable en main, elle se retourne, les questions dans les yeux ? « Je t’ai pas payé attends. » elle a même pas le temps de lui dire que c’est pas grave, qu’ils verraient ça une autre fois qu’il est déjà retourné à l’intérieur et revient avec son portefeuille. « Ce n’était pas pressé tu sais » à vrai dire, elle-même avait oublié, ils se reverraient et James est quelqu’un de réglo donc il l’aurait donné une autre fois, si non, c’est pas bien grave non plus. « Je sais que tu as dit que tu partais mais… Enfin je vais me faire à manger et faire pour un ou deux c’est pas beaucoup de différence… Enfin si t’as pas mangé. Ou t’as sans doute des plans ? Je veux pas te retarder, te retenir juste… Mais si tu veux manger avec moi… Enfin ça serait un plaisir et promis je te servirais pas de vin.» la demande la prend de court, la stupéfaction est visible sur son visage « Je dois avoir un vieux wisky qui traine si tu préfères ou… De l’eau… du robinet» elle part dans un petit éclat de rire, puis se rendant compte que ça peut porter à confusion, elle se tait « je me moque pas, hein, c’est juste qu’on m’a jamais proposé d’eau comme ça » son sourire amusé reste collé à ses lèvres « c’est trop mignon en fait » ce commentaire est plus pour elle que pour lui, elle se dit que ça se fait pas de traiter un père de famille d’une trentaine d’années de mignon. « Bon…si ma présente te dérange pas trop, je veux bien alors » manger autre chose qu’une pizza, le régime alimentaire qui dure depuis un mois, elle est pas contre, que c’est dur d’être incapable de se servir de ses dix doigts. « merci de l’invitation » un peu de politesse fait pas de mal, et puis un vrai repas, il faut savoir l’accueillir comme il se doit. Elle lui emboîte le pas vers l’entrée de la maison, puis au salon où elle dépose ses affaires dans un coin. « Du coup tu prévois de cuisiner quoi ? D’ailleurs t’as besoin d’aide ? » Elle s’incruste, autant donner un coup de main « bon, je te dis direct que je suis une vraie catastrophe en cuisine, je ne voudrais pas mettre le feu chez toi » ça la fait marrer, blondie ou le genre à se couper plutôt que les aliments, ce qui explique son amour pour la malbouffe, c’est vite fait pour quelques poignées de dollars, merci la nature, son corps le supporte assez bien. « je dois forcément pouvoir faire quelque chose non ? »

Elle a juste souri à sa dernière remarque du Sydney, assez surprise de savoir qu’il en était aussi originaire, comme plein de gens qui avaient croisé sa route ces dernières années, à croire que tous les habitants de Sydney finissaient par échouer à Brisbane. Autant, elle l’avait rencontré dans le temps, enfin elle s’en serait souvenue, comme elle se souvient du fait que leurs chemins se sont croisés il y a quelques années à peine, avec son jumeau qu’elle se remémore, le prénom s’est fait la malle mais le visage lui est bien présent. Un petit jeu innocent que les frères ont mis en place, comme il fallait s’y attendre, elle est tombée en plein dedans, tête la première mais elle ne s’en est pas vexée, pour ça il aurait fallu qu’elle soit au courant, peut-être, sa mémoire flanche sur ces derniers détails.

Elle est sortie, sac sur l’épaule, un peu à contre cœur car elle aime la présence de James et l’ambiance qui règne dans l’appart, elle la trouve étrangement apaisante, surtout vu ce qui l’attend plus tard. Elle a pas envie d’y penser, elle aura toutes les heures du retour dans sa ville natale pour y réfléchir en détails. Puis, quand elle se demande ce qu’elle va bien pouvoir faire ce soir, ce qu’elle va emmener avec elle à Sydney ou autres détails inutiles, son patron occasionnel la rattrape, mieux, l’invite à rester plus longtemps. Elle s’inquiète d’abord de savoir si elle va pas gêner puis passe à autre chose car on lui a déjà dit qu’il fallait accepter les choses qu’on lui propose sans se poser dix mille questions. « Je ne t’aurais pas invité si ta présence me dérangeait. » lui-même le confirme alors elle décide d’accepter avec un petit sourire tout en chassant l’idée qu’elle puisse être un boulet attaché à son pied.

« Je dois avec de quoi faire des pâtes au saumon, ou alors un riz safrané avec une salade ? Tu manges de la viande au fait ? Du poisson ? » riz safrané, un terme qui lui dit rien à elle, Jordan et ses capacités culinaires inexistantes « je mange de la viande oui » qu’elle affirme avec un sourire, pour faire patienter son choix, car elle est indécise blondie, elle se demande ce qui sera le mieux, plus précisément, elle arrive rarement à décider pour elle, encore moins pour les autres « fais ce qui te fait envie, je m’adapte facilement » ce qui est vrai, malléable au possible, elle a depuis appris à faire avec ce qu’elle a, dans le cas présent, à manger ce qu’on va lui présenter. « Je pense pouvoir me débrouiller seul je te rassure. On évitera les catastrophes comme ça. » elle sourit même si ça ne fait aucun doute qu’elle est un peu inutile là « Tu peux venir en cuisine pour me tenir compagnie ça sera avec plaisir. Et on verra si tu te sens de prendre un couteau sans faire de catastrophe. » loin de s’en offusquer, elle offre un grand sourire « tenir compagnie ? Ca je sais faire ! » elle répond avec entrain en lui emboîtant le pas jusqu’à la cuisine « Alors Jordan… Dis-moi ce que tu bois d’habitude. J’imagine que c’est un peu plus fun que l’eau du robinet. Je peux peut-être te trouver ça. » comme à son habitude, elle n’est que sourire, une habitude qu’il plait le plus souvent à ses proches. « ne t’inquiètes pas pour moi, l’eau fera très bien l’affaire » pas envie de le déranger plus, de s’imposer en plus d’exiger d’avoir de la vodka dans son verre. « Je sais qu’on a dit que j’étais un danger et que je devais toucher à rien, mais je peux au moins m’occuper de la salade ou d’autre chose ? » elle déteste l’idée de se faire inviter et en plus de ne fournir aucun effort. « J’aimerais bien t’être utile » elle récupère le crayon dans la poche de son jean et noue ses cheveux en un chignon décontracté. « C’est une passion la cuisine chez toi ? » qu’elle finit par demander au bout d’un moment, se sentant un peu stupide soudainement, question plutôt idiote quand on y pense…non ? Enfin ça peut être obligation vu qu’il est célibataire, du moins de ce qu’elle en sait. « Pour moi ça reste un sacré mystère » comme bien d’autres choses.