Jamais je n'avais pensé rester plus longtemps à Dublin. J'étais déjà resté bien trop longtemps. Et ça, c'était à cause d'une fille, parce que j'aurais pu revenir bien plus tôt, mais Amelia m'avait un peu fait tourné la tête là-bas, mais m'avait fait du bien également, et avait réussi à me libérer de Maxyn, réellement. Même si encore aujourd'hui je me demande si vraiment je suis libéré d'elle, vu que dès qu'elle a besoin de moi pour Zoey, j'accours. Toujours est-il que je serais forcément revenu sur Brisbane, puisque ma famille y est, et que j'ai toujours tout fait pour la retrouver et pour rester uni. Ca aurait été étrange que je décide de tout plaquer. Le plus dur avait été d'avoir eu cette dure conversation avec Cora, celle qui s'était transformée en dispute. Parce qu'on s'était quitté sur une très mauvaise note, et surtout que je lui avais dis des choses terriblement méchantes et que je m'en voulais vraiment de lui avoir dite. En attendant, elle me faisait savoir qu'elle ne pourrait sûrement jamais oublié, et je ne pourrais jamais lui demander ça, seulement de me pardonner. Mais je ne voulais pas non plus encore plus en rajouter. A lieu de ça, je me taisais encore un peu et j'avais bien fait, puisqu'elle me demandait juste ce à quoi je pensais. Est-ce qu'elle croyait réellement que j'avais dit ça pour juste lui faire du mal ? Tu sais si j'avais voulu te faire du mal, je l'aurais fait bien plus tôt, et d'une manière bien différente … Lui répondais-je un peu déçu qu'elle me croit capable de lui faire quelconque mal. Je ne te ferais jamais de mal Cora et je m'en mords les doigts jusqu'au sang de t'avoir dit ces saletés depuis que je suis parti. J'ai été trop loin. Oui parce que j'avais voulu qu'elle reste loin de tout ça, mais ça avait été une connerie. Elle n'avait juste pas su comment faire pour me retenir. Le truc c'est que rien n'aurait pu retenir. Même pas ma propre sœur. Bien qu'à elle, justement, je lui avais menti, et j'en avais bien payé les frais.
Elle doit savoir. Voulait-il lui faire mal ? La dégoûter de lui ? Est-ce qu’à ce moment-là, il avait conscience de ce que de telles paroles allait provoquer chez la jeune femme ? Qu’il lui sorte la carte du bébé qu’elle avait – qu’on l’a forcé à – abandonné, c’était lâche voir même cruel pour quelqu’un parfaitement au courant de ce que Cora peut ressentir à ce sujet. Mais, l’avait-il dit parce que justement, il savait qu’après elle n’aurait rien à lui dire ? Elle ne peut s’empêcher de lui poser la question, comme elle ne peut s’empêcher de lui dire qu’elle n’oubliera probablement pas. Pardonner, peut-être. Oublier, non. « Tu sais si j'avais voulu te faire du mal, je l'aurais fait bien plus tôt, et d'une manière bien différente … » Oui, elle sait. C’est ce que son côté raisonnable lui dit, qu’Enzo a juste sorti la facilité pour se débarrasser d’elle et que c’était pas voulu, et que s’il pensait vraiment qu’elle n’était qu’une lâcheuse incapable de s’occuper de son propre enfant, il lui aurait dit depuis bien longtemps maintenant. « Je ne te ferais jamais de mal Cora et je m'en mords les doigts jusqu'au sang de t'avoir dit ces saletés depuis que je suis parti. J'ai été trop loin. » Oui, en effet. Elle détourne le regard, préoccupée par la question. Leur discussion c’est comme remuer le couteau dans la plaie. Elle revit la dispute, la peur et l’abandon. C’est censé aller mieux après, c’est ce qu’elle se dit alors elle décide de ne pas se taire et d’en finir avec le sujet, pour retrouver sa relation d’avant. Elle esquisse un sourire en répondant simplement, sans que ce soit un reproche. « Mais tu l’as fait. » Elle ne lui laisse pas le temps de répondre, ou même de penser. « Mais je comprends pourquoi. Alors, je vais te pardonner. N’en parle juste plus jamais. » Du bébé. Parce qu’elle aime pas et qu’elle peut pas. C’était y’a dix ans pourtant. Mais voilà un couteau qui risque pas de s’enlever en le remuant. Elle n’ajoute rien de plus. Un silence s’installe et finalement elle pose la question. « Et Zoey ? Comment elle va ? Tu t’imagines bien que je n’ai pas vu Maxyn depuis ton départ. »
C’est fou comme cette conversation pouvait être à la fois libératrice et l’une des plus dure que j’ai jamais vécu. Elle représente tellement pour moi, que l’idée de la perdre à tout jamais me foutait la boule au ventre. Les mois qui se sont déroulés sans qu’on ne se parle, j’ai du faire semblant, j’ai du essayer d’oublier pour pouvoir continuer, pour pouvoir avancer. Mais là, devant le fait accompli, je ne pouvais plus rien lâcher. J’avais besoin qu’elle me pardonne. Qu’elle me pardonne pour que notre amitié soit retrouvée. Sûrement qu’elle ne sera plus jamais la même, mais j’ai besoin de Cora dans ma vie, autant que j’ai besoin de mes sœurs. Elle me confirma alors que oui j’ai été trop loin, que je l’avais fait malgré le fait que je me le suis reproché, des paroles inoubliables, mais je voulais qu’elle me pardonne. J’attendais certainement un miracle, mais je sentais certainement que c’était possible. Tellement que ce fut une réelle bouffée d’air frais quand elle le prononça. Tellement que je me suis mis à rire. Oui j’ai éclaté de rire pour l’étouffer rapidement, me trouvant pitoyable. Putain je suis soulagé, t’imagine pas à quel point ! Et t’inquiète, plus jamais j’en reparle, j’oserais plus de toute façon. Oui je me sens tellement couillon d’avoir dit ces paroles, de l’avoir perdu, d’avoir cru que ce serait pour toujours, que plus jamais je n’oserais en reparler. Même pas dans ma tête. C’était un parfait timing en tout cas, puisque dans quelques rues on serait arrivés devant chez elle. J’avais eu ce que je voulais et j’allais pouvoir rentrer et dormir heureux comme avant. C’est alors qu’elle me demanda comment allait Zoey et surtout elle me fit savoir qu’elle n’avait pas revu Maxyn. Zoey va très bien. Elle grandit à une rapidité folle ! Elle monte presque aux arbres ! Lui disais-je, un peu trop euphorique, tellement que je me suis mis à rire. Ouais ça se voit que je suis heureux quoi. Ah oui, elle croyait bêtement que c’était de ta faute si j’étais parti. Je lui ai bien fait comprendre que tu n’y étais pour rien, mais j’ai pas l’impression qu’elle ait eu envie de me croire … Lui expliquais-je en haussant les épaules. Certes, Maxyn a toujours été plus ou moins jalouse de Cora, mais de là à croire que c’était par sa faute que j’étais parti ? Non, j’avais pris ma décision comme un grand. Surtout que bon, j’ai fait du mal à Cora également.
Quel autre choix ? Ce n’est pas comme si l’option de rayer Enzo de sa vie pour avoir prononcé les paroles les plus difficiles qu’elle ait eu à entendre allait se présenter là devant elle. C’est hors de question même. Elle a essayé la rancune pendant des mois. Sans succès, puisque la voilà à taper à la porte de son ami pour avoir cette conversation. Une conversation qui fait du mal et du bien. Décidément, la rancune n’est pas une option envisageable. Pourtant, c’est pas parce qu’elle pardonne qu’elle a l’intention d’oublier. Tout ça, ça lui a rappelé son manque de soutien quand elle a découvert sa grossesse. Remettant en question la confiance qu’elle peut placer en lui. Oui, y’a de la casse. Des cadavres qui remontent à la surface. Des choses remontent, mais peut-on laisser tout ça mettre fin à des années de soutien, d’amitié et finalement de fraternité ? Non, ce serait aller à l’encontre de ce en quoi Cora croit. Alors elle prononce les paroles. Avec pour seule consigne de ne jamais lui en reparler. Elle accepte de lui pardonner. Et l’atmosphère tombe. Enzo rit, nerveusement sans doute, face à une Cora stoïque, qui n’a pas vraiment envie de rire. Mais peut-elle le reprocher à Enzo ? C’est comme s’il venait de reprendre sa respiration. « Putain je suis soulagé, t’imagine pas à quel point ! Et t’inquiète, plus jamais j’en reparle, j’oserais plus de toute façon. » Elle esquisse un sourire. Finalement, voilà une affaire qui ce sera résolue. Elle sait, qu’elle devrait en parler plus. Peut-être même expliquer à Enzo pourquoi ça a fait si mal. Lui demander en détail ce qu’il a fait pendant son voyage ou bien comment il se sent maintenant. Il faudrait qu’elle parle de comment sont les choses aujourd’hui. Mais, c’était déjà un gros effort pour elle toute cette conversation, alors naturellement elle change de sujet. Cora, elle ne parle jamais vraiment des choses. Elle garde tout pour elle. C’est bien là le grand drame. Elle finit par interroger Enzo sur Zoey, elle veut savoir c’est quoi la vie qu’il mène maintenant, avec Zoey, si Maxyn l’a laissé revenir. « Zoey va très bien. Elle grandit à une rapidité folle ! Elle monte presque aux arbres ! » Il a l’air presque trop content de le lui raconter, ce qui l’a réjoui en un sens. Au moins, ses prédictions à elle ne se sont pas réalisées. Ou alors, Enzo est revenu avant que la petite ne se rende compte de son absence. Elle demande des nouvelles de Maxyn aussi, un peu pour la forme. « Ah oui, elle croyait bêtement que c’était de ta faute si j’étais parti. Je lui ai bien fait comprendre que tu n’y étais pour rien, mais j’ai pas l’impression qu’elle ait eu envie de me croire … » Okay. Cora le regarde avec des yeux ronds. Voilà une nouvelle qui n’arrangera pas les relations entre les jeunes femmes. « Je ne suis même pas surprise. » lâche t-elle. « Elle n’est pas capable de prendre la responsabilité de ses erreurs, faut qu’elle blâme les autres. Au final, je ne regrette même pas que tu ne te sois pas marié avec elle. » Elle est un peu dure sur ses mots, mais c’est l’effet Maxyn, surtout l’énervement provoqué par le fait de savoir que la blonde la croit responsable de ce qui s’est passé.
C’est fou comme ça me libérait l’esprit de savoir que Cora acceptait de me pardonner. Je me sens tellement mal depuis ce jour où on s’est méchamment pris la tête. Ce jour où j’ai été trop rude avec elle, tout simplement parce que je voulais débilement partir. J’aurais pu m’isoler, ne pas partir aussi loin, ne pas couper les ponts avec tout le monde. Mais j’ai pété un plomb, je me suis senti comme une obligation de me barrer loin de ma vie, comme si elle en dépendait. Aujourd’hui, bien sûr que je trouve mon comportement totalement débile. Ca me faisait du bien de parler de Zoey avec Cora, même si je me doutais bien que ça pouvait lui faire de la peine un peu, mais ça fait tellement longtemps que j’ai envie de partager de nouveau ma vie avec elle. Enfin, d’en parler bien sûr. Elle me parler même de Maxyn. J’étais un peu surpris mais c’était logique aussi, vu que c’est elle que j’avais réellement abandonné, du moins celle qui a totalement subi mon absence vu qu’on vivait ensemble. Je lui expliquais alors les idées de mon ex, chose qui ne surprenait pas Cora. Normal, elles n’ont jamais vraiment pu s’entendre. Faut dire que Maxyn a toujours été plus ou moins jalouse de la relation que j’ai avec celle que je considère de ma famille. Cela a toujours été débile de sa part, mais je suppose que c’est de l’égo féminin. Peu importe, ça n’a plus d’importance aujourd’hui. En attendant, elle n’a plus de raison de te blâmer, ni aujourd’hui ni plus jamais. C’était clair et net que pour moi, je ne retournerais pas avec Maxyn. On arrivait presque jusqu’à chez Cora et je me rendais compte que je n’avais même pas eu le temps de lui demander ce qui avait bougé pour elle On arrive déjà chez toi presque et je ne sais même pas ce que tu es devenue … Lui disais-je comme une sorte de demande, espérant qu’elle veuille perdre encore un peu plus de temps en ma compagnie. Même dans une voiture.
Elle prend des nouvelles, de Zoey, de Maxyn. C’est bête mais, c’est un peu ce qui s’apparente le plus pour elle à une famille alors, même si elle déteste la jeune femme, demander de ses nouvelles est un minimum. Bien sûr, elle n’ajoute rien. Rien de bien en tout cas, surtout maintenant qu’Enzo lui apprend que la jeune femme en a après elle pour son départ précipité. Ça l’agace. C’est pas de sa faute si elle a pas réussi à tenir son mec et si elle a précipité la fin de leur couple. Enfin, elle préfère ne pas y penser plus. C’est pas comme si l’avenir leur promettait de se revoir un jour. Ça n’arrivera pas. « En attendant, elle n’a plus de raison de te blâmer, ni aujourd’hui ni plus jamais. » « Elle avait déjà aucune raison de me blâmer avant, c’est même moi qui devrait être en colère contre elle, et j’ai la maturité de ne pas l’être. » signale alors Cora d’un ton sec, surtout après la nouvelle. « Enfin, vu que je n’ai pas l’intention de la revoir. » conclue t-elle avant qu’ils ne prennent le tournant pour arriver dans sa rue. « On arrive déjà chez toi presque et je ne sais même pas ce que tu es devenue … » Elle sourit, c’est vrai. Pourtant, il lui est arrivé plein de truc. Sa carrière a décollé et elle croule sous les projets. Tandis qu’il se gare, elle lui répond. « C’est vrai, mais on aura tout l’occasion d’en parler plus tard. » lui assure t-elle, oui, maintenant que l’abcès est crevé et puis, ça leur permettra d’aller de l’avant d’avoir encore des choses à se raconter puis d’en parler plus posément, quand elle n’aura plus l’impression d’être une merde à cause du pauvre type de tout à l’heure. « Tu amèneras Zoey. » lui dit-elle avant de déposer un baiser sur sa joue et de filer hors de la voiture pour retrouver son appartement l’esprit un peu plus léger.