Dix personnes à abattre ou immobiliser, dix obstacles avant de libérer nos compagnons, dix âmes qui ne s'attendent absolument pas à ce que nous débarquions là-bas. Oh avec leurs copains qui ne répondent pas à la radio ils doivent être sur le pied de guerre, on devrait faire attention. Jameson bâillonne le mec, au moins on ne l'entendra plus et il n'alertera pas ses petits copains. Quand j'ai parlé de cadavres sur mon passage j'étais sérieux, il va tellement avoir peur qu'il se fera dessus. Ils ne sont pas tous morts, certains sont encore en vie et inconscients ou ils sont en mauvais état.

Mes compétences dans la gestion de crise et les techniques de combat peuvent paraître surhumaines, mais c'était mon job... pas de quoi en faire un plat. Je n'ai pas de superpouvoirs à mettre à contribution. « Je ne suis pas un héros, je n'ai pas réponse à tout. Tout ce que je peux faire c'est appliquer ce que j'ai appris à ce cas-ci, mais ça ne veut pas dire que j'ai toujours raison. » dis-je avec modestie. On ne peut rien savoir avant d'arriver au campement. J'aide Kyeran à relever l'abruti couché au sol pour qu'il nous suive, quitte à le trainer par la peau du cul. « Je suis d'avis qu'on devrait y aller pour pas se faire repérer. »

« La seule raison pour laquelle tu es encore en vie, c'est que tu nous es utile. Si j'étais toi je ferais tout pour me rendre utile. Parce que même si j'ai de la misère à te laisser te faire torturer comme ça, te faire mal ne me fera ni chaud ni froid. J'ai hâte de te voir te pisser dessus quand tu verras les cadavres que j'ai semé derrière moi, parce qu'on va devoir passer par là pour rejoindre le campement » décidément c’était gai tout ce qui se passait sur cette île. Cela le faisait changer d’avis sur Ethan, même s’il se doutait un peu que son efficacité était au-dessus d’un policier lambda, c’était toujours aussi surprenant d’entendre ça, un peu effrayant quand même. Avec l’aide d’Ethan, il remit l’énergumène sur ses jambes « c’est nécessaire de le prendre avec nous ? » demanda-t-il au plus professionnel d’entre eux. « Je pense qu’il va surtout nous retarder et exprès d’ailleurs » il doutait que cet homme soit soudainement décidé à les aider à pénétrer le campement de ses amis. Il leur mettrait volontiers des bâtons dans les roues et Kyeran considérait qu’ils avaient assez perdu de temps comme ça aujourd’hui, tout comme leur énergie en essayant de lui extirper des informations. Il se sentait de plus en plus épuisé, comme si cette journée-nuit était infinie et le pire c’était qu’ils n’avaient pas encore entamé le plus gros de leur aventure.

Un corps. Un cadavre. Blondie en croit pas ses yeux. Comme tout le monde d'ailleurs. Elle a vu juste, ce bateau est dangereux. Elle veut pas mourir ici, elle, enfin pas noyée. C'est la pire chose qui puisse lui arriver. La peur s'infiltre par tous les pores de sa peau alors qu'elle tente de s'éloigner du cadavre qui semble pas vouloir la lâcher. Pourquoi elle s'est proposée pour l'expédition qu'elle se demande ? Pourquoi ? ca lui fout les nerfs en vrac et le pire c'est qu'ils flippent tous, Callie, Blake, Sohan, quoi de plus normal mais la peur de l'un entretient celle de l'autre. En tout cas, elle est d'accord avec callie, blondie, faut qu'ils sortent de là maintenant. Tout le monde approuve mais pas le bateau qui se met à bouger violemment, et si elle est pas trop conne blondie, elle se rend compte que le niveau d'eau a augmenté, donc ils s'enfoncent un peu plus dans le fond de l'océan. Tous ces accidents évités et ces agressions auxquelles elle a échappé pour venir crever ici, dans un coin où elle serait jamais venue habituellement ? Elle sent l'hystérie se répandre dans son organisme comme une traînée de poudre. Comment se sortir d'ici ? j'pense qu'il faut passer par une autre pièce laquelle elle sait pas, et pas dit que ce soit mieux ou bien courir très très très vite voire nager vu le niveau d'eau. Elle sait pas nager blondie, ca risque de pas être triste.

L'enfoiré pourrait toujours se révéler utile en temps voulu, c'est dans des cas comme celui-là qu'il faut anticiper. Quand on part en randonnée on emmène une corde ou de la crème solaire sans savoir si ils se révéleront nécessaires, au final ici nous sommes dans le même cas. Ce gars est notre crème solaire ou notre corde. « On peut le tirer par la peau du cul si il le faut, ça va. Et puis on pourra toujours le montrer aux autres et leur faire croire qu'il a rejoint nos rangs, ils le tueront eux-mêmes après. » Ou bien nous pourrions prendre ses vêtements, s'habiller avec et se faire passer pour lui afin d'ouvrir la cage qui retient nos compagnons naufragés. Jameson dit tout haut ce que je pense tout bas, elle aussi. Nous devrions l'emmener. Juste au cas où. « Trève de bavardage, allons-y. Tout le monde est prêt ? » Je me mets en route sans même les consulter, trève de bavardages... je préfère agir plutôt que parlementer. « Allez le boulet, on sèmera des bouts de ton corps un peu plus tard. Sauf si tu es gentil, là on pourra peut-être te garder en vie. » Sait-on jamais. « Le premier qui chante « un kilomètre à pied, ça use, ça use » je l'explose. » dis-je, à moitié sérieux.

Ils avaient fini par tous se mettre d’accord et prendre une décision: il emmenait le gars des autres avec eux. Il pourrait servir, personne ne savait quelque-chose à ce propos. Il pourrait être leur monnaie d’échange, leur bouclier, leur clef. Leur boulet aussi, ça marchait, car lorsqu’ils commencèrent à avancer, leur prisonnier - si on pouvait l’appeler comme ça - ne paraissait pas très enclin à avancer de son plein gré et il fallait plusieurs fois lui montrer par un petit coup de pression qu’il devait avancer maintenant. « Le premier qui chante « un kilomètre à pied, ça use, ça use » je l'explose. » Soren eut un petit rire à la remarque d’Ethan. « Si je te savais pas si fort ça aurait été tentant. » Mais il n’était pas encore assez fou pour être suicidaire à ce point là. Ethan, c’était le genre de mec qu’on prenait au sérieux parce-qu’on n’avait vraiment pas envie qu’il vienne nous bourriner la tronche un de ces jours. Personne n’aime se faire bourriner la tronche, d’accord, mais encore moins par un mec expérimenté. La suite de leur voyage se passa dans un silence un peu général. Comme si chacun se concentrait sur la mission qui allait suivre. Comme s’ils étaient tous déjà rentrés chez eux aussi, assis dans leur canapé après une bonne douche. Enfin, dans la tête de Soren c’était un peu ça. Il était très silencieux et pensif depuis quelques instants déjà de toutes façons.

Le deuxième plateau arriva assez vite, Soren n’avait même pas fait attention qu’ils avaient surement autant marché. Quand on est perdu dans ses pensées, tout semble aller beaucoup plus vite autour de vous. Ethan leur fit signe dès leur arrivée sur le plateau de se tapir contre les moches et dans l’ombre le temps qu’il vérifie si des gardes étaient présents. Selon sa transmission, ils étaient deux. Bon, deux à la fois, c’était gérable - c’était pas comme s’ils étaient tombés sur les dix d’un coup. Jameson finit par relever le regard vers Soren, et il comprit tout de suite que c’était pour qu’une nouvelle fois, il soit son compagnon de galère. Soren acquiesça d’un léger signe de tête, avant de laisser Ethan repasser derrière eux et de se mettre en position. Inspirant un grand bol d’air, il fit signe à Jameson et les deux sautèrent chacun sur leur adversaire. Ce fut rapide, sec, ils n’urent pas le temps de les voir venir de derrière. Et des grands coups secs derrière la tête, Soren le savait, c’était efficace. D’ailleurs, en regardant le garde qu’il venait de mettre à terre, Soren hésita. Il s’accroupit à ses côtés et ramassa l’arme qu’il avait à sa ceinture - c’était le genre de petit flingue qui se passait dans la ceinture du pantalon, chose qui pourrait être utile pour l’arrivée à la grotte. Il allait se relever quand il fit un trousseau de clef dépassant à peine de sa veste. Délicatement, il vint le prendre, le regardant comme si c’était la 8ème merveille du monde. « Il en avait pas un comme ça l’autre connard là ? » Il avait chuchoté, au cas où d’autres gardes seraient dans le coin.

Tentant de ne pas faire trop de bruits avec le trousseau de clefs, Soren le mit dans sa poche pour ne pas le perdre. C’était un élément qui pourrait toujours être utile. « J’ai pas eu l’impression » Jameson venait de lui confirmer ses pensées. Ils se rapprochaient du camp et les gardes commençaient à avoir des clefs - il ne savait pas si c’était bon signe ou non. Des bruits de voix se firent entendre par la suite. Jameson, ayant toujours des réflexes meilleurs que les siens, allant directement voir de quoi il en retournait. Elle sut rester discrète, ce n’était pas le moment qu’ils se fassent choper. Elle revint vers eux quelques instants après, toujours se déplaçant presque au niveau du sol. « Le camp est juste en bas. Les prisonniers aussi. Il y a quelques barrières mais rien de plus, je crois. Surveillez-le, il va surement essayer de faire du bruit pour les prévenir. » « On y est alors… » Soren soupira. De soulagement et d’exaspération à la fois. Soulagé parce-qu’ils touchaient à leur but, exaspéré parce-qu’il y avait encore des gardes en bas et que celui qu’ils avaient avec eu semblait être le plus casse couilles. Soren regarda autour de lui et son regard tomba sur l’espèce de bonnet que portait le garde qu’il avait assommé. L’attrapant sans faire de bruit, il vint le foutre dans la bouche de leur boulet. « On sera tranquille comme ça. Toi qui a vu le terrain, on fait quoi ? » Il chuchotait toujours. Il finit par tourner son regard vers Jameson.

« Je sais pas, j’ai pas eu le temps de bien regarder. » Soren fit une petite moue. D’ici, il ne pourrait surement pas aider lui puisqu’il ne voyait rien, trop peu de nuances de couleurs. C’était pour qu’il s’en remettait totalement à Jameson là. Elle fit signe à Ethan de s’approcher, et ils allèrent voir tous les deux pour avoir plus de détails sur la situation en bas. Soren resta lui près du garde connard pour ne pas qu’il s’échappe. Ils revinrent vers lui pour lui débrider la situation. « Il y a six gardes en dessous. Armés jusqu’aux dents. Les prisonniers sont attachés un peu plus loin. » Jameson soupira et Soren ne sentait pas la suite de son plan. « Vu les armes que nous venons de prendre à ces mecs, on pourrait rester sur le plateau et les tirer d’en haut. Je sais viser, Ethan aussi. Ils seraient morts avant de comprendre ce qui leur arrive. » Soren écarquilla les yeux. « Mais t’es pas bien ou quoi toi ? On est venus ici pour secourir des gens pas pour en tuer ! » Il y eu u petit silence avant que Jameson ne leur sorte un nouveau plan. « Ou alors on prend les fringues de ces trois enfoirés et on tente une infiltration. On les attire un à un hors du camp et on les met hors d’état de nuire comme on a fait pour ces blaireaux. L’un de nous resterait en haut pour nous couvrir avec le KG9 en cas de besoin. Vu son entraînement, je pense qu’il vaut mieux que ce soit Ethan. On ne peut pas se permettre de se planter de cible. Évidemment si vous avez un autre plan… » Soren devait l’avouer, ce plan là, il l’appréciait plus. Au moins, il n’y aurait aucune mort pour rien, il devrait même n’y avoir aucun mort. Faisant une petite moue, il inspira un grand bol d’air. « Qu’est-ce qu’on attend alors ? » A l’aide des objets qu’ils pouvaient trouver sur les deux gardes allongés, ils attachèrent le boulet à un arbre de l’autre côté du plateau, là où il ne pourrait pas être vu de ses collègues en contre bas et là où il ne pourrait pas s’échapper. Jameson, Kyeran et Soren étaient alors prêts à descendre lorsqu’Ethan se mit en position de tir - au cas où ça tournerait mal, se disait Soren. « Si on descend par là, on fera un léger détour d’une centaine de mètres mais au moins on se fera pas repérer.

« Putain. C’est qu’il sent le bouc ce con. » « Vu sa gueule de chèvre, ça m’étonne pas vraiment tu vois. » Soren était déjà paré. Il avait mis l’uniforme d’un des deux gardes assommés sur ce plateau, et il avait un de flingue en main. Il n’était pas à l’aise avec un engin comme ça dans les mains, mais il n’avait pas le choix. « Vous êtes beaux comme ça. Mais je crois que je te préfère en jupette Kyeran. » Soren étouffa un petit rire avant de venir taper l’épaule de Kyeran. Ca aura marqué des esprits cette histoire de jupe d’aborigènes - et les aborigènes tout court, demandez à Kyky. « Ok, je te suis. Restons sur nos gardes, une fois qu’on sera dans la forêt, ils pourront être n’importe où. » La marche dans la forêt se fit dans le calme. Tous leurs derniers déplacements s’étaient effectués comme ça pour être sur de n’attirer aucun des autres et qu’ils ne finissent pas en chair à canon surtout. Soren se dit aussi que s’ils n’avaient pas été sur cette île maudite, ils ne se seraient pas retrouvés à gambader en tenus de mercenaires dans la foret la nuit. Ca lui foutait la chair de poule. « Est-ce que je suis le seul à penser que c’est totalement bizarre ce qu’on fait là, malgré tout ? C’est pas que dans les films que les civiles s’improvisent sauveteurs de kidnapping ? » Il parlait de la voix la plus basse qu’il pouvait.