ÂGE : 34 ans (13.05.90) SURNOM : Isy STATUT : Penny est le soleil et l'amour de sa vie, l'évidence avec laquelle il écrit sa plus belle histoire et s'autorise à réaliser des rêves de bonheur (06.07.2021) MÉTIER : Infirmier au service des urgences, président de l'association Run for Judy, infirmier bénévole à la Croix Rouge et aux Flying Doctors, sapeur-pompier volontaire et surtout : papa comblé de Jude (13.09.2018), Maia (14.06.2022), Jack et Mila (01.08.2023) LOGEMENT : Penny et lui ont quitté Toowong en 2024 pour s'installer avec leurs enfants à Bayside et y créer leur cocon à l'image entière de leur amour POSTS : 28708 POINTS : 0
TW IN RP : dépression, anxiété, automutilation, idées suicidaires, tentative de suicide, mentions d'abandon d'enfant PETIT PLUS : Emménage à Brisbane en 2003 ∆ il exerce en qualité d'infirmier au st vincent's depuis 2006 puis est affecté aux urgences en 2013 ∆ une suite de blessures anéantit sa carrière de joueur de football australien en 2010 ∆ il attente à ses jours en mars 2018 et reprend le travail en septembre 2018 ∆ finaliste de ROA en 2020 ∆ il se soigne contre son anxio-dépression, après avoir longtemps refusé son diagnosticCODE COULEUR : Isy s'exprime en #9966ff ou slateblue RPs EN COURS :
Je prenais la parole, m'élançant dans une tirade proclamée par le cœur, un ensemble de sentiments palpitant qui n'avaient su être prononcés depuis de nombreuses semaines. Je livrais à Ginny des parties de mon être, des morceaux de mon quotidien, de mes sentiments, que jamais je n'avais osé dévoiler à quiconque, suite à une résolution d'estimer mes émotions dérisoires et de favoriser les ruminer plutôt que de les extérioriser. Pour un infirmier qui constate que les maux ne disparaissent jamais d'eux-mêmes, je constituais un véritable comble à me persuader que mes rancœurs, mes amertumes, mes peines et mes peurs se tairaient en les emprisonnant dans des coins sombres de mon être. A force de les séquestrer, ces dernières avaient implosé brutalement, hâtant un fiasco final. Je souris doucement en entendant la jeune mère s'amuser de ma « technique » d'approche vis-à-vis des patients à meurtrir et lève les yeux lorsqu'elle me contredit sans merci, catégorique, interdite. J'appuie mon menton contre ma paume, ma tête endolorie de tant de lourdeur, alors qu'elle proteste à me qualifier de bon, de rassurant, de grand cœur.
Je peins son portrait, coloré de mes souvenirs, de mes observations, de mes constats. De ces moments chassés à la dérobée entre deux mauvaises nouvelles, ces instants précieux de soulagement, ces larmes inavouables, ces quotidiens difformes peu importe leur taux d'ordinaire. Son incrédulité fait écho à la mienne lorsqu'elle m'eut complimenté. Elle érige son fils comme moteur de sa persévérance, m'indique le caractère impopulaire de ma description. « J'imagine que dans certains cas, des raisons personnelles nous poussent à refuser de voir un proche évoluer. Mais ils ne rendent pas la version passée de celui-ci légitime. » Telle la mère qui couvrira sans cesse son enfant, l'aîné qui se rappellera inlassablement des fautes de ses cadets, incapable d'assimiler le fait que c'est en subissant nos failles que l'on y pallient, les plâtrant de l'expérience de la vie, nous consolidant vers notre futur - lorsqu'on y survit. Il est difficile d'avoir foi en les preuves d'erreurs. Néanmoins, la civilisation repose sur tout cet exercice et seules les dernières versions de chacun sont applicables.
Je baisse les yeux lorsqu'elle expose le regard d'Autrui face à la personne qui, hardi ou couard, attente à ses jours. Cette trace inexorable qui le poursuivra incessamment, qui tangue entre la tare et le pouvoir. Ginny a raison, forcément. Il est si instinctif d'exhiber notre victoire contre l'appel de la Mort, que l'on oublie d'en condamner ses différents canaux. Cette ridicule mascarade de paraître qui finit, je le crains, par brûler les ailes, briser les cœurs. « Je me suis prise à leur propre jeu. J’ai tellement voulu leur montrer toute ma vie que j’étais plus forte que ce qu’ils pensaient que j’ai fini par le devenir. » Je souris doucement, mon regard toujours rivé sur les détails de la table. Quelques tâches de peinture, différentes nuances de gris dans l'obscurité de la pièce. « Comme se forcer à rire jusqu'à rire sincèrement. » Ça semblait ridicule, invraisemblable pourtant, ça fonctionnait. Ainsi, était-ce mal de ma part de rejeter le procédé de faire semblant ? De mentir, même à ma propre personne, dans l'optique que cette tromperie deviendrait une vérité sous les simulations ? Je n'avais plus envie de tester, de forcer, de duper. Par extrapolation, ce refus signifiait-il que je n'étais pas prêt à aller mieux ?
Ce qui me semblait naturel, néanmoins, c'était accepter la McGrath dans ma vie, l'élever à un rôle qui lui semblait tout désigné, que je lui accordais sans difficulté, puisqu'elle l'avait créé, puisqu'il était sien. Dans ce chapitre de ma vie où tout se voyait bouleversé, chaviré, elle avait su produire une lueur vers une notion nouvelle qui composait sa présence dans mon existence. J'espérais, de tout cœur, que cette lumière ne s'éteindrait jamais. « Le suspens pas nécessaire du tout que t’as forcé, là. Me fais plus jamais ça. » Je souris, désolé et amusé, lippes qui s'étirent davantage alors qu'elle me charrie.
Je conserve le silence, mes paupières se font lourdes, la ficelle du sachet de thé embobine mes doigts pâles et elle me parle d'utopie, de solitude. Elle aspire courage et espérance, à se battre demain, vers un mieux, vers un bien-être. Elle me renvoie à ces étudiants infirmiers que j'avais consolés ou motivés en leur rappelant qu'ils avaient fait de leur mieux lors des situations de crise et que c'était acceptable de ne pas être parfait, surtout lorsqu'ils étaient encore stagiaires. Tu fais de ton mieux et tu apprends de tes erreurs. T'es pas parfait et on te demandera toujours d'être humain. La seule chose qu'il ne faut pas que tu perdes, c'est ton bon sens et ton sang froid. Je me disais que mes professeurs m'auraient sans doute tapé sur les doigts pour tenir de tels propos, mais j'ignorais les étouffer. En quelques sortes, il me fallait articuler les mots que j'aurais aimé entendre durant toute mon existence et il n'était pas dans mes cordes de diminuer qui que ce soit en mettant ses torts en exergue. « Mais ce soir, c’est que toi et moi contre le monde. » Et le diabète, pensée bientôt déclarée par mon interlocutrice. Les emballages plastiques se suivent et je me risque à prendre une sucrerie bleue, jumelle de la première qu'elle m'avait offerte au théâtre. Le bonbon demeure entre mes doigts hésitants, mes songes en suspens. Finalement, je romps le moment pieux de dégustation. « Tu connais le sentiment de contentement ? » Interrogation qui me semble si fantaisiste à voix haute, frôlant l'hilarant. État, sentiment de quelqu'un qui ne désire rien de plus, dont l'adjectif usité s'avère bien défiguré par sa langue vivante. Je tire sur les nœuds plastifiés, dénude la douceur industrielle. « Tu te rappelles de la dernière fois que tu l'as ressenti ? » Parce que pour ma part, je m'en souviens que trop bien, si bien qu'il m'accompagne chaque jour, chaque heure, chaque minute depuis le 23 mars dernier. Tel un secret que je plaque précieusement contre mon cœur, médicament placebo, pansement superficiel. Peut-être prendrait-il du sens, s'il s'apparente à celui de l'artiste.
Ce n’est pas facile, de gratter ce qui me reste des parents, de la famille, de Londres. Ce n’est pas simple de les mettre en lumière, de l’avant, de parler de leurs comportements, leur déni, et mon mal à travers. Mes démons qu’Isaac me voit aujourd’hui chasser à bout de bras, mes peines qu’il a essuyées tant de fois. Et malgré tout ça, son discours est totalement autre que celui auquel je suis habituée, démontée, réchauffée. Il perce ma coquille sans aucune résistance de ma part, insiste sur des comportements, des paroles, des gestes, des intentions, insiste sur ce qui à une époque était ce à quoi je me rattachais face à ma crainte de sombrer. Être forte est relatif, et j’aime bien mieux me cacher derrière un sens de l’humour douteux et quelques vannes à la clé le temps que l’ambiance cesse de tanguer vers mon passé, et s’arrime plutôt à notre futur. « Comme se forcer à rire jusqu'à rire sincèrement. » j’hoche de la tête, sourire en coin qui n’a pas quitté mes lèvres, le Jensen qui comprend sans que je n’ai insinué quoique ce soit que c’est beaucoup trop d’éloges pour une seule soirée. « Exactement. C’est ce que tu fais pour mes blagues? » ma répartie frôle ma langue pour se nicher au creux de ses oreilles, l’espoir de faire naître plus qu’un rictus amusé sur son visage, de provoquer un éclat peut-être, de l’entendre relâcher la pression en riant, juste un peu. Pour me rassurer oui, pour être persuadée qu’il avance, et que ce soir, même sans le réaliser, il a réussi à faire un pas, minime mais essentiel, loin de ce qui lui faisait si mal jadis. Une fois les sachets de bonbons distribués, j’en perds un minimum d’attention, jongle du bout des doigts à la recherche des précieuses dragées que je préfère, celles qui me rappellent mon enfance, celles qui étaient toujours au centre de la table lorsqu’on allait retrouver la grand-mère maternelle. Les détails, auxquels on s'accroche dirons-nous. Lorsque la vie va vite, lorsque la vie frappe un mur, lorsque la vie dérape et nous force à perdre le Nord sans qu’on n’ait rien demandé, juste imposé. « Oui. » sans hésitation aucune, mes jambes qui se balancent ont arrêté dans l’élan, et mes iris noisette sont venus trouver ceux d’Isaac malgré la pénombre secrète dans laquelle est plongée la cuisine. Là, y’a quelques éléments qui nous ont suivis de Londres mais si peu que je ne les reconnais plus que comme nos reliques d'aujourd'hui. Y’a de la vaisselle dénichée à la brocante du coin, des chaises disparates, des fleurs sauvages. Y’a l’amour d’une mère pour son gamin, l’espoir d’une nouvelle vie qu’elle peint à travers des pièces rapiécées, et des mois de paix, de répit. Et y’a aussi ce souvenir, ce moment de contentement, ce à quoi Isaac me rattrape d’une question, d’une chronologie. « Quelques jours après être sortie de l’hôpital. Quand je suis rentrée à la maison. » qui à l’époque était le manoir (merci, bâtiment pompeux) McGrath familial. Edward avait su me cacher pendant quelques jours à son loft, mais la réalité avait suffit à me piéger au vol, me renvoyer pieds et poings liés chez des parents qui regardaient au sol plutôt que de me demander comment j’allais, un frère qui changeait de couloir pour m’éviter la vue dépressive qu’il arborait suite à mon acte. Dans un regard, je glisse de mon siège improvisé, scrute l’extérieur un temps, finit le paquet de gourmandises qui a eu la lourde tâche de survivre sur mes genoux la minute précédente et avance doucement vers la table où le brun est resté posé une fois qu’il a décidé de ne pas partir, ou du moins, d’attendre encore un peu. « Je te montre si tu veux. Et t’inquiètes pas, aucun kidnapping de prévu. Pas une seconde fois ce soir. » bien sûr, que je regrette son exil forcé du théâtre, bien évidemment que j’aurai un retour et un autre de culpabilité lorsque je repenserai à ce soir et à comment l’instinct est ressorti en temps de crise pour lui imposer le comportement à suivre. Mais pour le moment, mon menton pointe sa tasse, pointe ses affaires, l’intime à me suivre si le coeur lui en dit. Un détour au salon pour attraper quelques couvertures dont l’une que je passe autour de mes épaules dénudées de ma veste restée dans le hall, et une autre que je tends à Isaac qui vraisemblablement suit mes pas. Puis, d’un geste distrait, j’ouvre la porte menant à la terrasse aménagée au mieux de mes connaissances en botanique, et de celles en pile de coussins et autres chaises de bois de mon fils.
« Ma première vraie nuit de sommeil avec Noah, à regarder les étoiles. » de beaux moments, des instants de bonheur, il y en a eus, après. Mais rien qui n'équivaut à ça. Rien qui ne me suffise autant que ça. Reprenant mon récit une fois mes chaussures retirées, pieds nus dans l’herbe fraîche, je finis par m’installer au sol après avoir disposé les oreillers de façon à en faire une plaine un peu moins abrupte que le béton qui se cache tout dessous, moins glacial, plus confortable. La nuit caresse mes joues, la brise me rappelle la saison fraîche et presque, si je ferme les yeux, je revois la scène parfaitement tant la température s’y prête. « C’est là où je me suis promis que tout irait bien, que tout irait mieux un jour. » il avait un peu plus d’un an à l’époque. J’avais dû me faufiler en secret dans sa chambre, gardée en permanence par la nounou engagée strictement pour faire figure de proue me confirmant que j’étais tout sauf apte à m’occuper de mon fils vu ma condition. Un vieux pyjama pour moi, un truc hors de prix pour lui, et un passage à l’inverse pour grimper par le balcon commun vers la véranda aménagée avec vue sur l'horizon, sur les arbres, sur le firmament et la nuit qui nous avait englobés comme un coton soyeux, comme tant de nuages enveloppants, nécessaires. « J’ai jamais compris l’impression que les gens décrivaient lorsqu’ils disaient qu’à fixer le ciel, ils se sentaient minuscules. » initiant à nouveau, puisque je me doute que dans mes paroles, dans mes mots il se cherche lui-même et n’a pas nécessairement besoin de devoir trouver de son propre chef quelle est la suite, je finis par m’allonger au sol, lovée contre les coussins, couverture jusqu’au menton et yeux rivés sur ce qui se trame tout au-dessus de nous, tout là-haut. « Parce qu’avec Noah dans mes bras, je me sentais invincible. » et c’était ça l’évidence, c’était ça mon contentement, mon essentiel. De sentir contre mon coeur la raison derrière tout ça, la justification. La motivation d’être plus forte, celle de vouloir me réveiller le matin d’après, et le suivant. Celle de donner l’exemple, d’adoucir sa vie, de lui permettre de rêver, plus et mieux que moi-même j’avais pu le faire. Sentant Isaac bouger à mes côtés, je finis par tourner la tête à son intention, attendant qu’il soit à l’écoute pour poursuivre, pensive, posée.
J’attends, et j’observe, muette. La fatigue dans ses traits, la peine. La colère, une marque fine, indicible, qui creuse parfois son front lorsqu’il prend trop de temps à choisir ses mots, à leur trouver un sens. Le déni, qu’il cache ironiquement bien mieux que quiconque. Je me rappelle son désarroi, je me souviens de sa panique, de son silence, de sa fermeture complète à la vue de celle qui semble avoir été bien plus qu’une ex, comme il l’avait mentionné à la dérobée, là où je n’avais pas cru bon avoir le droit d’insister. Le silence s’additionne aux branches qui craquent, aux fleurs qui embaument. Aux dernières voitures qui rentrent à travers le quartier, aux conversations trop loin pour pouvoir être épiées. Mais malgré toutes les distractions, c'est vers lui et seulement lui que ma vue est attirée. « J’espère qu’un jour tu vivras la même chose, je l’espère tellement fort que c’en est ridicule. » parce qu’il le sait autant que moi. Pour qu’il le vive, pour qu’il s’y rende, pour qu’il l’accepte et se l’autorise, il faut que cela vienne de lui et lui seul. Moi, je ne suis qu’un pion parmi tant d’autres. Moi, je n’ai rien de plus à lui offrir que n’importe qui croise sa route avec une poignée d’espoir, d’étoiles entre les doigts. Moi, je suis là ce soir, j’espère, j’aspire, mais demain, ce sera une toute autre histoire. Envers et contre tout, ce seront son coeur et sa tête et son corps et son tout qui décideront de son sort. Si seulement j’arrive à lui donner assez, peut-être que j’arriverai à l’inspirer une minute de plus, une seule. « Et toi? Tu te rappelles de la dernière fois que tu l'as ressenti ? » la question qui roule sur mes lèvres, maintenant que je me redresse sur les coudes, joue distraitement avec le rebord de la couverture sans attendre vraiment une suite. « T’as pas besoin de me le dire. Fais juste t’en souvenir, s’il-te-plaît. » elle supplie Ginny. C'est tout ce qu'il lui reste. Ça, et les doigts qu'elle finit par perdre, autour de sa nuque. Ça, et le baiser qu'elle laisse se déposer sur son front, là où il réfléchit si fort, où il ressasse si mal.
Made by Neon Demon
Isaac Jensen
le coeur au bout des doigts
ÂGE : 34 ans (13.05.90) SURNOM : Isy STATUT : Penny est le soleil et l'amour de sa vie, l'évidence avec laquelle il écrit sa plus belle histoire et s'autorise à réaliser des rêves de bonheur (06.07.2021) MÉTIER : Infirmier au service des urgences, président de l'association Run for Judy, infirmier bénévole à la Croix Rouge et aux Flying Doctors, sapeur-pompier volontaire et surtout : papa comblé de Jude (13.09.2018), Maia (14.06.2022), Jack et Mila (01.08.2023) LOGEMENT : Penny et lui ont quitté Toowong en 2024 pour s'installer avec leurs enfants à Bayside et y créer leur cocon à l'image entière de leur amour POSTS : 28708 POINTS : 0
TW IN RP : dépression, anxiété, automutilation, idées suicidaires, tentative de suicide, mentions d'abandon d'enfant PETIT PLUS : Emménage à Brisbane en 2003 ∆ il exerce en qualité d'infirmier au st vincent's depuis 2006 puis est affecté aux urgences en 2013 ∆ une suite de blessures anéantit sa carrière de joueur de football australien en 2010 ∆ il attente à ses jours en mars 2018 et reprend le travail en septembre 2018 ∆ finaliste de ROA en 2020 ∆ il se soigne contre son anxio-dépression, après avoir longtemps refusé son diagnosticCODE COULEUR : Isy s'exprime en #9966ff ou slateblue RPs EN COURS :
« Exactement. C’est ce que tu fais pour mes blagues? » Je souris doucement, mes pupilles s'accrochant brièvement au regard de Ginny, soulevé de ces étoiles que j'interprète bergères de sentiments, phares de tourments. Mes doigts s'animent nerveusement, finissent par se concentrer sur un des bonbons placés en offrande sur la table, à équidistance de nos deux âmes morcelées par nos désarrois. Je m'égare à lier les morceaux de ce casse-tête ambitionnant ma convalescence, mon épanouissement, mon goût pour cette vie que je dois accepter en premier lieu. Ma conscience vogue entre mes réflexions obscures et la clarté que m'offre Ginny dans cette réalité qui me semble souvent si altérée, si caricaturée. Pas avec elle, néanmoins. Jamais en sa compagnie, quitte à m'en faire pleurer le vrai dans toute son horreur.
Le silence nous étreint, nous berce de cette paix réveillant les vulnérabilités de mon corps transi par les sentiments précédemment trop cuisants. J'inspire profondément, discrètement, avant d'oser une interrogation, prier une définition. Le contentement, précieuse denrée sous-estimée, qualifiée acquise par les bienheureux, utopique par les infortunés. Je l'observe, captivé, lorsqu'elle me répond par l'affirmative, expose les détails de cette dernière fois où la béatitude l'a surplombée. Elle me propulse à sa sortie de l'hôpital et intrigué, je ne quitte plus des yeux son visage dont les traits fins se mêlent sournoisement à la noirceur sereine de la cuisine. Son hospitalisation, et non celle de son fils, comme j'aurais très bien pu le soupçonner. Lorsqu'elle m'invite à une démonstration, j'acquiesce et la suis docilement, répondant à ses indications, souriant faiblement à ses boutades. Je découvre son jardin, repère de racines, feuilles, tiges, pots de terre que j'évite soigneusement, craignant briser quelque chose sur mon passage. Les coussins rebondissent mollement contre le béton et elle me décrit sa première véritable nuit de sommeil avec son enfant. Je me surprends à sourire doucement, me peignant la scène à mesure de ses confidences. « C’est là où je me suis promis que tout irait bien, que tout irait mieux un jour. » Je m'installe à ses côtés, agrémentant mes connaissances de l'existence menée par la jeune mère, complétant ses aveux murmurés, ses plaintes nostalgiques, ses colères lancinantes, une fois articulés à mon égard, cette unicité suffisante à graver ma mémoire dans son cas. Sa représentation du contentement offre une nouvelle palette à la vision que je porte sur mon interlocutrice, dotée d'un spectre de teintes s'étalant de l'effarant à l'affection, motivé par l'inspirant.
« J’ai jamais compris l’impression que les gens décrivaient lorsqu’ils disaient qu’à fixer le ciel, ils se sentaient minuscules. Parce qu’avec Noah dans mes bras, je me sentais invincible. » Je décroche mes perles vertes de son épiderme et les oriente vers le firmament. L'immensité de la voie lactée ne m'avait jamais prodigué ce sentiment d'invulnérabilité ; néanmoins, tout comme l'océan s'étendant à en embrasser l'horizon, elle relativisait toujours mes tracas, m'induisait cet équilibre essentiel à honorer les valeurs régissant, stabilisant, prospérant ma personne. Je me mouve, mes yeux établissant des liaisons novatrices sur la carte du ciel, en quête désespérée d'explications, de magie, de secrets. Je fronce les sourcils et ferme les yeux dans un instant de répit, ambitionnant de couper le flux de songes et réflexions tiraillant mon cœur, mes souvenirs, mes démons. De nombreuses croyances ont parsemé mon quotidien quant à l'éther nous dominant, nous entourant. Celle qui m'a le plus marqué, toutefois, était la sentence que chaque étoile représentait un individu - dans le meilleur des cas « né sous une bonne étoile » - et lorsque ce dernier poussait son dernier soupir, son étoile s'éteignait, son impénétrable rôle accompli. Je m'étais épris, enfant, à admirer le ciel en quête d'une étoile apparaissant sous mes yeux tout en appréhendant silencieusement devenir témoin d'une disparition. Aujourd'hui, je ne pouvais m'empêcher de me questionner sur la légitimité d'une étoile pour un être qui aurait pu être mais dont le monde a été dénié. Un tel conditionnel serait-il apprécié des légendes et fabulations ?
« J’espère qu’un jour tu vivras la même chose, je l’espère tellement fort que c’en est ridicule. » Je cille, tanguant entre la pénombre interdite et un manteau d'ébène brodé d'argent. Je fronce doucement les sourcils avant de diriger mon regard vers Ginny, incrédule, la gorge sèche. « De me sentir invincible ? » Ou d'avoir un enfant ? Les propos mêmes enflamment ma trachée, mes cordes vocales interdisant fermement leur articulation, ma tête refusant catégoriquement ouïr ces fatals mots cette nuit. J'efface la moiteur de mes mains en les posant contre mon torse qui se soulève assez fréquemment pour trahir mon anxiété.
« Et toi? Tu te rappelles de la dernière fois que tu l'as ressenti ? » Je déglutis et fuis son regard dans une tentative de préserver ce que mon regard hurle sans retenue. Je fixe ses doigts parcourant les coutures de la couverture nous séparant. « T’as pas besoin de me le dire. Fais juste t’en souvenir, s’il-te-plaît. » Un maigre sourire apparaît sur mon visage, frôlant l'imperceptible. J'inspire profondément, emplis mes poumons excédés de cet air frais, immuable, resplendissant du parfum des diverses plantes nous entourant, mais aussi et surtout du sien, sur lequel je me concentre ardemment, je m'accroche, je vis et non plus survis. Ses doigts jouent contre ma nuque, ses lippes se posent contre mon front et je risque, le cœur battant : « Je m'en rappelle mais... » Je rejette mes prunelles contre les siennes, téméraires, idéalistes. Je recherche les mots, articule quelques débuts de phrases interminables, trébuche sur les syllabes, bute sur les sémantiques, grignote les sons, recommence après un soupir, change de stratégie : « C'est « ne rien désirer de plus », » je définis, comme si je suppliais Ginny d'élucider mes pensées, saisie d'une perspicacité renversante. Je baisse les yeux, mes doigts creusant distraitement le plaid, résigné, ravisé. « Il faut que je le ressente différemment, en vrai. Que je repense à ce sentiment sous d'autres circonstances. Que je le recrée. » J'inspire de nouveau, l'odeur de pin m'inspirant courage et, exclusivement, répentance. « Je peux te le dire ? » J'implore son aval timidement, ravale mes confidences telles des tasses d'eau de mer ferventes, respire enfin lorsqu'elle hoche la tête bien que je me sens démuni, inadapté, tel le récepteur d'un pouvoir trop grand pour ses paumes. « Le 22 mars. Ce 22 mars. »
Rupture sismique dans mon existence, schisme entre révolu assassin et futur hostile. « Quand je me suis autorisé à partir de cette vie. Quand j'ai décidé de partir. » Parce que « me donner la mort », « me suicider » ou « mourir » rejetaient cette brutalité que je ne voulais pas affliger à Ginny en plus de mes abominables dires. « Ma vie était devenue ce continu et interminable enfer. Je n'arrivais pas à m'en sortir, je voyais aucune façon de m'en sortir, je subissais et ne contrôlais plus rien de cet enfer. Ma seule solution était d'en finir et faire en sorte d'y mettre un terme m'a donné le plus grand sentiment de soulagement que je n'ai jamais ressenti de toute ma vie, parce que ça signifiait que je n'aurais pas à me réveiller le lendemain matin encore dans cet enfer. Ça finirait enfin, ça finissait enfin, je pouvais y mettre un terme, j'avais le contrôle pour l'arrêter. Et je ne désirais rien de plus. C'était... Du pur contentement. » Je vogue l'espace de quelques instants, effleurant ce souvenir, chérissant secrètement, épris d'une nostalgie malsaine, ces sensations aujourd'hui interdites, bafouées, méprisées. Puis, rappelé à la réalité, je cherche vivement le regard de l'artiste, terrifié de l'impact de mes aveux sur sa personne, les regrettant déjà si amèrement que mon souffle se saccade. Qui étais-je, si ce n'est un monstre d'égoïsme et de cruauté, pour obscurcir et alourdir davantage cette soirée et en conséquence, ma relation avec la jeune femme qui, exceptionnelle, parvenait de ses mots, de ses gestes, de sa présence, ma divulgation de l'essence même de mon être morcelé, de mes vulnérabilités meurtrières, de mes offenses impardonnables ? Et surtout, que pouvais-je prononcer, maintenant, qui pallierait un jour cette exhibition impétueuse d'infâmes débris me composant ? « Mais ça va aller, maintenant, » je murmure, tel un secret consacré uniquement à son oreille, faisant écho à cette assurance étrange que j'avais proclamée à notre arrivée chez elle, parachute vers ma réalité.
C’est un automatisme qui fait du bien, lorsque je sens l’herbe humide d’une nuit à peine assumée se glisser entre mes orteils. Un soupir, un sourire, et j’inspire profondément, entends dans l’angle les quelques bestioles qui ont décidé de sortir le grand jeu, de bourdonner leur ambiance. Là, c’est un jardin qui s’offre à nous, c’est un terrain de jeu plus grand et plus rassurant qu’une cuisine confinée, qu'une maison silencieuse. C’est une brise qui est accueillie avec bonheur, un confort improvisé qu’il m’aide à disposer non sans me laisser les rennes le temps de voler quantité de couvertures et d’oreillers pour ma petite personne en permanence frigorifiée. Sous le regard attentif d’Isaac, je ne laisse pas traîner de longues secondes avant d’entamer ce qui me semble sortir tout droit d’une autre vie tant l’histoire est lointaine, tant il s’est passé des choses depuis. Alors, tu n’as rien ressenti de tel, après? Vraiment, Ginny, aucune trace de contentement n’est venue se pointer le bout du nez dans ta vie? Bien sûr, de beaux moments, il y en a eus. Des centaines, des milliers. Le plus marquant d’entre eux resterait toujours ce matin-là, d’octobre. Noah, encore et toujours lui, lorsqu’il s’est réveillé, lorsque la 214 est devenue source d’espoir et de courage, d’un renouveau et d’une santé retrouvée, un bonhomme à qui on avait enfin légué une deuxième chance. Mais rien de tel, depuis. Mais aucune trace de contentement n’est venue se pointer le bout du nez dans ma vie. Toujours cette crainte enfouie que quelque chose cloche. Que je ne sois pas prête, que mon fils ait une rechute. Que ce dont mes parents se sont targués durant des années soit vrai, que j’ai bel et bien besoin d’être protégée. Que Matt réapparaisse, qu’il bousille tout, qu’il brise mon monde à nouveau. Je tentais chaque jour où j’étais présente, où j’étais vivante, inspirée de faire mieux, d’avancer, de profiter des détails, de ne voir que le bon, que le beau, toujours. Mais n’en restaient que certaines marques, que certains traumatismes, que de nombreux blocages étaient cachés plus loin qu’on pouvait le penser, rendant le tout plus difficile. Vivre sous une carapace que je ne montrais plus vraiment. M’enfin, passons. Je l’espère invincible, je l’espère plus fort que tout ça, je l’espère tout court et j’hoche de la tête de la positive, lorsqu’il insiste sur mes souhaits. Ce n’est plus à moi de parler, ce n’est plus à moi de ressasser, de rêvasser même, les yeux qui détaillent chaque étoile, leur trouvent une histoire, leur dédient un conte que je soufflais au creux de l’oreille de Noah, à l’époque. C’est l’histoire d’Isaac sur laquelle j’aligne maintenant, et loin de moi l’impudeur de l’entendre. Lui offrant une porte de sortie, lui permettant la liberté de garder ce qu’il a de plus précieux, d’aller à sa source, de se l’identifier pour mieux l’aimer au creux de son coeur. Surprise, je le sens se détacher, et ses prunelles chercher les miennes, les trouver sans grande difficulté. « Oui, bien sûr. Tu peux tout me dire si c’est ce que tu veux. » si c’est ce dont tu as besoin. Rien de ce qui sortira de sa bouche, s’il se l’autorise, se verra refusé, nié, remballé.
Puis, il entame ses explications. Puis, mon coeur se serre, ma respiration se trouble, et mon visage, lui, reste de marbre. Parce que je n’ai pas le droit d’ajouter à sa confession la moindre entrave, parce que chaque phrase qu’il positionne à la suite de la précédente semble si difficile à prononcer, si intense à assumer que jamais je ne m’autoriserai de l’interrompre. Pas une fois par contre, je baisse les yeux. Et même si le contact visuel a été brisé de longues minutes plus tôt, et même si Isaac parle de ce qui se trame à l’intérieur de lui comme l’horreur de ses derniers instants, et même si je me fais violence à tenter de ne pas imaginer ne serait-ce qu’une seule seconde de ce calvaire qu’il caractérise en ses termes, je sais qu’il s’adresse à moi. Pas à lui-même, pas à un potentiel témoin, pas à une force quelconque, pas à qui que ce soit d’autre. Étrange connexion à laquelle je ne m’attarde pas pour la simple et unique raison que je ne souhaite pas être ailleurs qu’ici, que je ne veux pas entraver mes pensées de filtres et d’analyses et de mélancolie. J’ignore où il puise la force d’avancer tel discours, j’ignore comment il a pu s’ouvrir de la sorte sans y laisser des bribes de son coeur, des morceaux d’âme entre les fleurs qui dansent, entre les feuilles qui bruissent, et mon attention à tout taire pour n’avoir que sa voix à mes oreilles. « Quand je me suis autorisé à partir de cette vie. Quand j'ai décidé de partir. » et je me répète encore et toujours sa déclaration, bien après qu’il ait apposé un point à sa phrase, à sa tirade. L’élément déclencheur, le pourquoi, le quand. L’émotion d’avant, le saut qu’on fait, le vol, le vide. Les mains qui tremblent, le corps qui entre en transe, les sens qui sont annihilés. Il m’a partagé son histoire de mort comme ce qui l’a repus, comme ce qui l’a calmé, lui a offert un espoir, soudain, morbide, mais un espoir tout de même. Et dans un soubresaut, je perce le silence, je murmure, la nuit comme alliée. « Je peux te demander quelque chose, moi aussi? » si insister d’avoir son autorisation peut sembler obsolète, si la scène convient qu’on a bientôt passé le stade de s’en faire avec les banalités et l’étiquette, jamais je ne m’autoriserais à le brusquer, jamais je ne le forcerais, jamais je ne m’imposerais sur ce sujet, sur cette pente, si glissante, si dangereuse, que reste son intimité.
Et lorsqu’il aura hoché de la tête, lorsqu’il aura cédé, lorsque son assurance que le pire est derrière lui aura suffit comme derniers mots, j’inspire longuement. Chaque pensée est choisie, chaque intonation se veut douce, sans aucune trace d’agression. Ce n’est que pour lui que je veux savoir, désormais pétrifiée à l’idée qu’il n’ait qu’un référent, sa fin, qu’il n’arrive à trouver la paix qu’ainsi. Malgré les encouragements, malgré les efforts, malgré tout ce que j’ai bien pu lui affirmer sur l’après, n’en reste qu’à cet instant, rien ne me semble moins sûr si un bonheur possible, potentiel, risque de racheter sa propre conception du terme. Son propre contentement. « Comment est-ce que tu sais? Que ça va aller? Que maintenant, tout ira mieux? » si mes questions sont intrusives, c’est mon coeur que je lui livre sans parcimonie, nuque arquée et intentions tout sauf voilées. À quoi est-ce que tu te raccroches? À quoi est-ce que tu autorises ton mieux-être? À quoi est-ce que tu dédies tes espoirs d’un jour être mieux, d’un jour pouvoir vraiment dire que tout ira bien? « T’as pas besoin de me dire ça pour me rassurer, encore moins pour excuser quoique ce soit. T’as pas besoin de te justifier, pas avec moi, jamais. » drôle d’impression, rôles inversés. L’infirmier qui jadis m’avait laissée être vulnérable, et à qui aujourd’hui j’encourageais les fissures, le mal à vif. « Alors, qu’est-ce qui a changé depuis? Qu’est-ce qui t’empêchera de retourner là? » je ne peux pas concevoir qu’il avance sans lumière. Je ne peux pas aspirer à être calme face à ses tourments s’il reste enlisé, s’il retourne dans ses mauvais plis, s’il en finit à nouveau amorphe, disloqué, démoli. Il n’a rien mentionné, il n’a fait qu’insister sur des termes si vagues, sur une formulation de s'en sortir se voulant bienveillante répétée et entendue, et je pallie à mes inquiétudes en m’assurant, au moins, qu’il y voit autre chose. « C’est beaucoup de questions pour une seule personne. » dans un soupir, un sourire fin qui orne mes lèvres, la couverture que je remonte autour de mes épaules, un frisson que je ne saurais attribuer à la température ou à ma crainte de ses réponses - d’absence de. « Mais si tu veux t’arrimer à quelque chose, si tu assures que tu veux t’en sortir, il faut que tu trouves ton contentement ailleurs. C’est essentiel. » « Il faut que je le ressente différemment, en vrai. Que je repense à ce sentiment sous d'autres circonstances. Que je le recrée. » disait-il. Alors, on le récréera ensemble, on le retrouvera ensemble. Alors, je lui montrerai d’autres circonstances, ou du moins, je l’aiderai à les trouver du mieux que je peux, ignorant si même il en a la force, la motivation, la volonté. L'ayant pour lui.
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Isaac Jensen
le coeur au bout des doigts
ÂGE : 34 ans (13.05.90) SURNOM : Isy STATUT : Penny est le soleil et l'amour de sa vie, l'évidence avec laquelle il écrit sa plus belle histoire et s'autorise à réaliser des rêves de bonheur (06.07.2021) MÉTIER : Infirmier au service des urgences, président de l'association Run for Judy, infirmier bénévole à la Croix Rouge et aux Flying Doctors, sapeur-pompier volontaire et surtout : papa comblé de Jude (13.09.2018), Maia (14.06.2022), Jack et Mila (01.08.2023) LOGEMENT : Penny et lui ont quitté Toowong en 2024 pour s'installer avec leurs enfants à Bayside et y créer leur cocon à l'image entière de leur amour POSTS : 28708 POINTS : 0
TW IN RP : dépression, anxiété, automutilation, idées suicidaires, tentative de suicide, mentions d'abandon d'enfant PETIT PLUS : Emménage à Brisbane en 2003 ∆ il exerce en qualité d'infirmier au st vincent's depuis 2006 puis est affecté aux urgences en 2013 ∆ une suite de blessures anéantit sa carrière de joueur de football australien en 2010 ∆ il attente à ses jours en mars 2018 et reprend le travail en septembre 2018 ∆ finaliste de ROA en 2020 ∆ il se soigne contre son anxio-dépression, après avoir longtemps refusé son diagnosticCODE COULEUR : Isy s'exprime en #9966ff ou slateblue RPs EN COURS :
Les fragments de mon âme voletaient, papillons de nuit, orientés au gré du vent, animés des saccades de mon cœur. Ils se déposaient fébrilement sur ce cordon timide, interdit, que je tissais entre Ginny et moi, sur lequel pendaient, exténués, mes souvenirs poignants, mes sentiments à vif, mon aspiration existentielle déchue. Je me risquais à ciller, concentrant mes pupilles sur les étoiles, élaborant des constellations hasardeuses au goût de mon imagination, au ton de ces rêves que je n'osais plus esquisser de peur de m'en brûler les ailes. Et je flottais dans ce firmament, dans l'univers amené par la McGrath, enivré de ces élixirs d'espérance concoctés aux réalités trop amères. Je voguais sans dessein, les morceaux ayant précédemment constitué mon être s'engorgeant de vie.
L'appréhension entame son ouvrage à happer cet insipide panorama de mon histoire. Comment pouvais-je me permettre de déposer aux pieds de la jeune mère toute l'artillerie nécessaire à m'anéantir ? Pourquoi me sentais-je indéniablement en sécurité en sa compagnie, épris d'une sérénité indétrônable, prêt à lui exposer l'inavouable librement ? Par quel procédé innovant chassait-elle ma méfiance, redéfinissait-elle ma nature d'inédites délivrances ? Comment insufflait-elle cette magique métamorphose lui étant exclusivement consacrée ? Son timbre éradique les masques difformes d'angoisse. « Je peux te demander quelque chose, moi aussi? » Je lève mon regard jusqu'au sien, hochant la tête à l'affirmative. Une brise automnale soulève quelques mèches de mes cheveux, nourrit le silence.
« Comment est-ce que tu sais? Que ça va aller? Que maintenant, tout ira mieux? » Je déglutis, fronce imperceptiblement les sourcils, disparais dans mes songes. L'a-t-elle perçu ? Elle souligne le caractère dérisoire de justification de ma part mais ma réponse est déjà toute désignée, dorée de ces bribes d'inconscient, de cette dentelle d'insouciant. Quelques secondes nous enlacent, me bercent et je la perçois s'intriguer : « Alors, qu’est-ce qui a changé depuis? Qu’est-ce qui t’empêchera de retourner là? » Un rictus étire une extrémité de mes lippes, feignant un faible sourire. Beaucoup de questions pour une seule personne, sans doute bien trop grandes pour l'homme que je compose. Elle fait écho à cette réalité que je lui récitais comme si je lui en étais redevable, ambitionnant une réplique de ce sentiment bienfaiteur, une source de contentement. « Je sais, » je m'entends répondre à une silhouette de plus en plus lovée sous les plaids et couvertures. J'attire mon attention sur la nuit étincelante, avouant faiblement : « Mais à mes yeux, me dire ça, c'est comme me missionner de trouver sous quelle étoile je suis né. Je croirai à mon contentement seulement une fois l'avoir éprouvé. » Dans un quotidien où la réalité est dangereusement brutale, de laquelle je dispose misérablement de quelques chétives défenses, je me jugeais défaitiste de tenir de tels propos, aussi sincères puissent-ils être.
Je mordais délicatement ma lèvre inférieure avant de changer de position, mon visage désormais orienté vers l'australienne et non notre ruban fortuné. « Tu as déjà été amoureuse ? » L'interrogation frise le risible tant elle semble déplacée. Néanmoins, mon ton n'épouse que le sérieux, l'attentif. J'observe ses réactions, ose patienter pour une réplique de sa part. Je sais pertinemment que Noah est le fruit d'une union avec un homme dont elle parle encore chèrement. J'ai saisi quelques bribes des protagonistes masculins veillant sur la jeune mère. Cependant, je n'ai jamais su décrypter si Ginny ressentait de l'amour envers eux, ou seulement un puissant sentiment d'affection s'y apparentant frauduleusement. Je n'étais pas un homme romantique, mes croyances germaient strictement de la science ou des phénomènes inexplicables dont j'avais personnellement été témoin et ignorais expliciter. « Quand tu es amoureux tu... Sais pas. Tu ne le contrôles pas. Tu ne l'expliques pas. C'est juste... Le verbe "être" et toute sa sémantique. » Je rapproche mes mains de mon torse, dans une tentative inconsciente de protéger mon palpitant, mon existence, régie par un réflexe fabriqué de traumatismes. « Je sais que ça va aller comme je ressentais de l'amour pour Chloe. Je peux pas l'expliquer, c'est juste là. » Et j'ose quémander refuge au sein de ses pupilles accueillantes par leur halo noisette réconfortant. Je m'y accroche, m'y attarde, m'y repose pour reprendre, téméraire : « Ce qui a changé c'est... » J'inspire profondément ce tourment de parfum aux mille effluves, d'humanité aussi pure qu'est immense la voie lactée, de souvenirs écorchés partagés. Je conserve pieusement cet antidote à mes démons quelques minutes, mes poings consommant les heurts de mon cœur contre ma poitrine. Mes perles émeraudes scrutent les coutures du plaid tandis que les secondes agonisent puis je libère une main pour étendre le tissu judicieusement contre l'épiderme de porcelaine de mon interlocutrice. « J'ai jamais pu parler comme ça à qui que ce soit. Ce qui a changé c'est que je peux te parler comme ça. » Mes traits se détendent, mes doigts se mêlent, inoffensifs, aux brins d'herbe croissant entre nos deux entités. « Bien sûr j'ai de la famille. J'ai des amis inégalables. J'ai un entourage tel que j'en suis continuellement reconnaissant. Mais, j'ai jamais pu parler comme ça avec eux. » Je marque une pause, incertain de présenter quelconque sens à l'ouïe de l'artiste. « Je ne pensais pas pouvoir un jour, ou en avoir besoin, ou en avoir autant en moi à accepter pour ne pas dérouter. Je me suis un peu leurré avec l'illusion de disposer d'un trou noir au fond de mon être qui absorbait ou absorberait tout ce qui n'allait pas. » Je souris doucement, fébrilement. « Je te rassure, j'y crois plus. Et t'es pas un trou noir non plus à mes yeux... J'ai bien compris que ça ne se passe pas comme ça. "Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme," n'est-ce pas ? » Citer Antoine Lavoisier n'était probablement pas le plus limpide. De toute évidence, je manquais cruellement de charisme lorsqu'il me fallait signifier mes sensations. Néanmoins, il n'en demeurait que j'étais plus que novice en la matière et en quelque sorte, Ginny détenait à nouveau le rôle de cobaye à récolter les pots cassés d'une première fois. « Tu me comprends. Tu as une notion personnelle de ce que j'ai vécu. Quand je te parle, je n'ai pas le sentiment de devoir me justifier, de devoir argumenter. Tu sais, je le vois dans ton regard que tu sais. Je n'ai pas l'impression de me heurter aux bons sentiments de quelqu'un qui essaie de compatir et d'assimiler les faits mais ne le pourra jamais tant qu'il ne les a pas vécus personnellement, fatalement. Tes mots, tes sentiments, ta présence, ont un sens inédit dans ma vie. J'ai quelqu'un complètement de mon côté, sans barrière, sans vitre, sans filtre. Je ne suis pas seul. » Je respire doucement et en dépit du sentiment indéniable de tiraillement provoqué par cette impression d'être totalement incohérent, incompréhensible, je continue : « Je sais que ça va aller parce que je connais quelqu'un qui a parcouru le purgatoire où je me trouve actuellement et en a survécu. Quand je te vois, je sais juste que ça va aller. » Et j'assure précipitamment : « Ça ne veut pas dire que t'es obligée de garder contact avec moi, de passer du temps en ma compagnie. Tu me dois rien, Ginny, et tu m'as déjà donné tant. Tu mérites de passer toutes les secondes de ta vie avec quelqu'un qui te rend heureuse, contente. » Un éclair malin pétille dans mon regard, faisant écho aux étoiles, appuyant cet épingle au précieux contentement. « Mais pour répondre à ta question : grâce à toi, je sais que ça va aller et que tout ira mieux. Grâce à toi, c'est différent d'avant... Je ne fais pas de promesse. » L'infirmier parle, élevé par la déformation professionnelle. Je ne clame jamais guérison avant la garantie des résultats définitifs, l'obtention de preuves incorruptibles. « Mais c'est un changement déterminant. Inestimable. »
J’ignore pourquoi ma voix est si basse, pourquoi mon ton s’accroche au bruissement des branches, au vent à peine audible. Je ne sais plus pourquoi le capital de secret est si nécessaire, si important à mes yeux. Puis, je le couve des prunelles, puis, je le vois dans la pénombre, et je le sens qui réfléchit, qui s’allonge, qui s’installe, espère. C’est un oasis qu’on crée, c’est un repère, une cachette, un endroit de non-dits, d’espérance. C’est une 214 qu’on a transposée ici et à ses démons, c’est une nuit entière que je lui ai dédiée, quand il en a passé tant d’autres à mes côtés. Ses confidences ponctuées de mes questions, ses silences qui guident le reste, mes regards qui se perdent dans les siens, qui l’accompagnent, qui essaient de le rattraper au vol, de le garder ici avec moi, lui permettre autre chose que de se perdre dans sa tête, se morfondre, d'avoir si mal pour si peu. Pour trop fort. « Tu as déjà été amoureuse ? » et je sursaute, dans sa question, ma confession, incapable d’autre chose, incapable tout court. Bien sûr que je l’avais aimé, de tout mon coeur. Bien sûr qu’il avait été mon premier amour, aussi maladroit et malhabile et unique, aussi difficile et douloureux soit-il resté. « Oui, une fois. » mes mots glissent comme des évidences sur mes lèvres, chuchotements à travers la nuit. Je ne l’avais plus dit depuis si longtemps ; je l’avais presque oublié. À quel point à l’époque, il était mon univers, mon tout. À quel point j’avais tout aimé, tout espéré de lui, de nous. Isaac le décrit comme quelque chose qui monte d’instinct, comme un sentiment de contentement, le sien. Comme ce qui suffit, ce qui suffira toujours, ce qui justifie qu’on n’ait plus besoin de rien d’autre, de qui que ce soit d’autre. Je me reconnais dans son discours ficelé, dans ces sensations que j’avais savamment pris la peine d’enfouir en mon être pendant presque une décennie depuis, après. Chloe avait été l’amour pour lui, et je reste attentive, scotchée à ses lèvres, à son ressenti. Je me love contre les coussins, frissonne sans y accorder la moindre attention, repère chaque syllabe, entend chaque intention, parcours ce qu’il raconte comme tant de chemins encore jamais entraperçus, de détails qu’il avait gardés pour lui jusqu’à ce soir. Je l’imagine éperdu d’elle comme on le voit dans les plus beaux classiques de littérature, je le vois avec des étincelles dans les yeux, des étoiles dans le coeur. Je me surprends même à dénoter tous les souvenirs qui remontent du temps où il passait voir Noah, où il passait nous voir tout court, à une ère où je le soupçonnais avoir été encore avec elle. L’aimait-il autant à ce moment-là? Était-elle tout pour lui, à un point tel qu’il ne voyait pas leur fin monter? Est-ce que son parfum restait accroché à ses vêtements, son rouge à lèvres à sa peau? Et je me rappelle d’à quel point il s’est brisé à son contact au théâtre, même anodin. D’à quel point j’ai cru le perdre, simplement par son passage dans l’allée. Son souffle se casse sur ma peau, ses doigts s’égarent le temps de me recouvrir, et jamais, à aucun moment, je ne détourne mes pupilles d’Isaac. Il s’ouvre à moi d’un courage sans nom, il s’en permet sans la moindre intermission, et je serais si odieuse, si impudique, si impolie de faire quoi que ce soit pouvant brusquer son élan.
À ma question toutefois, il se redresse, il s’élance et il poursuit encore plus loquace que ce que j’aurais cru. Il choisit ses mots, prend son temps, prend tout et ne laisse rien. J’en oublie de respirer tant je ne veux plus déranger, j’en oublie de bouger tant que je veux rien brusquer. « Ce qui a changé c'est... J'ai jamais pu parler comme ça à qui que ce soit. Ce qui a changé c'est que je peux te parler comme ça. » il se détend, il se pose, il parle avec une voix que je lui reconnais pour être celle dont il use lorsque tout va bien, et pas seulement en surface. Ma version préférée de lui. « Bien sûr j'ai de la famille. J'ai des amis inégalables. J'ai un entourage tel que j'en suis continuellement reconnaissant. Mais, j'ai jamais pu parler comme ça avec eux. » et je le comprends, et je la comprends, l’ingratitude qui le fait hésiter, les doutes qu’il balaie du revers. Que les gens qui nous aiment le plus ne soient pas suffisants, que quelque chose cloche, qu’on s’en veuille de ne pas pouvoir leur rendre, les confidences qu’on retient en leur présence de peur de les décevoir, encore. « Je ne pensais pas pouvoir un jour, ou en avoir besoin, ou en avoir autant en moi à accepter pour ne pas dérouter. Je me suis un peu leurré avec l'illusion de disposer d'un trou noir au fond de mon être qui absorbait ou absorberait tout ce qui n'allait pas. » et je ferme les yeux une seconde, l’imagine, ce fameux trou noir, béant, ce qui tant de fois aurait pu, aurait dû chasser les nuits blanches, les angoisses, les craintes, les échecs. Ce qui fait office de filtre, de cachette, de bouclier même, parfois. « Je te rassure, j'y crois plus. Et t'es pas un trou noir non plus à mes yeux... J'ai bien compris que ça ne se passe pas comme ça. "Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme," n'est-ce pas ? » oh qu’elle s’immobilise Ginny, oh qu’elle fronce doucement les sourcils, sent son coeur manquer un battement, s’inquiète en sachant très bien qu’à partir de maintenant, c’est plus loin encore, c’est plus creux encore que peu importe où elle ait pu aller. « Tu me comprends. Tu as une notion personnelle de ce que j'ai vécu. Quand je te parle, je n'ai pas le sentiment de devoir me justifier, de devoir argumenter. Tu sais, je le vois dans ton regard que tu sais. Je n'ai pas l'impression de me heurter aux bons sentiments de quelqu'un qui essaie de compatir et d'assimiler les faits mais ne le pourra jamais tant qu'il ne les a pas vécus personnellement, fatalement. Tes mots, tes sentiments, ta présence, ont un sens inédit dans ma vie. J'ai quelqu'un complètement de mon côté, sans barrière, sans vitre, sans filtre. Je ne suis pas seul. » il ne me regarde plus de la même manière, et je fais de même. Il n’est plus Isaac, je ne suis plus Ginny. Ou alors, pour l’une des premières fois de ma vie, il voit à travers ce que j’ai mis tant d’années à peaufiner, à cacher, à chasser. Il le voit et il reste encore, il le voit et il veut encore. Il voit au-delà de mes maladresses et de mes questions et de mon insistance et de mes malaises et de sa peine. Il sait mieux qu’il ne le croit, il parle plus que ce qu’il me dit. « Je sais que ça va aller parce que je connais quelqu'un qui a parcouru le purgatoire où je me trouve actuellement et en a survécu. Quand je te vois, je sais juste que ça va aller. Ça ne veut pas dire que t'es obligée de garder contact avec moi, de passer du temps en ma compagnie. Tu me dois rien, Ginny, et tu m'as déjà donné tant. Tu mérites de passer toutes les secondes de ta vie avec quelqu'un qui te rend heureuse, contente. » la crainte de le décevoir, la crainte de ne pas être assez forte pour lui. Celle de personnifier un héros alors que je ne suis rien, mais que dans ses yeux, j’ai l’impression d’être un tout. La crainte de ne pas être en mesure de lui offrir suffisamment, même si j’ai envie de tout lui donner, sans concession aucune. « Mais pour répondre à ta question : grâce à toi, je sais que ça va aller et que tout ira mieux. Grâce à toi, c'est différent d'avant... Je ne fais pas de promesse. Mais c'est un changement déterminant. Inestimable. » et si je respire à peine jusqu’à ses derniers mots, je laisse aller un rire, faible, complice, nerveux, sur la fin, mes prunelles espiègles s’accrochant aux siennes de reconnaître son comportement si professionnel, si pudique, ses réserves dont il avait usées avec Noah et moi, avec les diagnostics et les prévisions.
Et je l'observe, et je le détaille, et je l’aime un peu plus. La personne, l’âme, les émotions, les mots. Je l’apprivoise comme si je le connaissais déjà, l’écoute comme si ses mots étaient les miens. Devant tant de véracité, devant tant d’authentique, de difficile, mais d’espoir, je l’estime parce qu’il sait qu’il devra faire face à tout ça, je l’envie parce qu’il a trouvé une alliée, parce qu’il n’est plus seul, maintenant. Je le cherche dans toutes ses confessions et dans ces phrases qu’il me dédie. Je me trouve dans ses secrets, dans ses démons, mais surtout, dans sa rédemption qui prend ma teinte, ma couleur. Et si je n’étais pas à sa hauteur? Pourtant, c’est tout ce que je voulais entendre. C’est tout ce que je voulais. Ma voix qui manque, mes pensées qui se précipitent dans un soupir, j’en fais fi, je nie, j’en déduis. Rassurée, allégée de savoir qu’il me laisse une place. L’imaginer seul au combat aurait fini par me rendre malade, le personnifier à lutter contre son mal sans rien ni personne pour l’accompagner, pour le comprendre, pour le soutenir envers et contre tout m’aurait horripilé plus qu’autre chose. Plutôt, je prends appui sur le sol, yeux qui passent le long des astres faisant un peu plus scintiller son regard. Mon doigt joue distraitement avec l’une de mes mèches sans vraiment le réaliser. « Je bouge pas, je vais nulle part. » pas ce soir, et plus jamais que j’espère, naïvement. La vie aura bien d’autres défis pour nous, mais peu les importe, je serai là, en retrait sometimes, en ligne avant mostly. Le reste est secondaire presqu’irréel, le reste ne m'intéresse pas si ce n’est le serment que je veux lui faire, et que j'espère recevoir en retour. « Promets-moi un truc. J’y tiens. » mon sourire en coin rend le tout un peu moins solennel, mais la main que je pose sur mon coeur et l’autre que j’hausse à son intention ont tout pour ajouter une touche de sérieux à ce qui suivra. Après tout ce qui a pu se produire avec mes parents et avec Matt et avec Ezra, après toutes les déceptions vécues, après tous les secrets horribles, après tout ce dont on m’a assénée, c’est mon coeur qui parle plus qu’autre chose, qui le supplie tout autant. « Promets-moi qu’on sera toujours honnêtes l’un envers l’autre, qu’on embellira jamais rien. Qu’on laissera les masques à d’autres, qu’on se dira tout, aussi douloureux ça peut être. Qu’on soit en mesure de connaître nos limites, qu’on soit en mesure de savoir quand ça va, et quand ça va pas du tout. Pas de dentelle, juste du vrai. » ma paume vers le ciel, mes espoirs vers lui. « J’y tiens. » et je répète, et j’en ri presque, et je soupire de sécurité devant ses intentions, surtout les miennes.
Puis, mon corps trouve doucement sa place allongé contre les oreillers, à travers les couvertures. Si Isaac se creuse lui-même son cocon de confort, je me surprends à jeter divers coups d’oeil vers lui en espérant qu’il soit toujours avec moi, que tout ceci, qu’un pacte, que maintes promesses, que son avenir que je lie immanquablement au mien ne soit pas que paroles en l’air. « Y'a des moments où tu croiras que c'est impossible. Que c'est trop, que t'en peux plus, que tu n'en veux plus. Comme tout à l'heure. » avec elle. Un chemin de croix, un calvaire, et une maigre récompense au fil des heures qui parfois font l’effet de mois, d’années entières. Le résultat est en constante évolution, mon quotidien est relatif. Si tout brille, tout rayonne, tout résonne au-dessus de nos têtes, si la constellation, là, à droite, me rappelle quelque chose et un nom et une galaxie que j’ai oubliés la minute suivante, si l’infinité de possible et les étoiles filantes à travers me confortent, c’est à mon tour de lui confier, de lui parler, de gratter ce qui reste, d’être honnête, et de faire de cette nuit la nôtre. J’aime égoïstement lui inspirer le bon, le beau, la solution, le mieux. Mais je souhaite encore mieux être franche, être vraie. Lui donner tout ce que j’ai, lui offrir tout ce qui me reste, et le laisser juger, tous pions en main. « Mais ça vaut la peine de se battre, de vouloir. Je te jure, ça le vaut. » mon sourire ne fait que s’agrandir lorsque je pense à Noah, aux amis qui peuplent mes côtés, à cette famille que je me suis créée. Cette bulle de confort, cette maison, ce nid, cette carrière. Ce résultat auquel j’aspire, qui n’est même pas encore là, mais plus tangible que jamais et que je lui souhaite de tout mon coeur. Que je veillerai même à lui apporter, si j’en ai la possibilité. La voix distante, le souffle qui s’accorde au sien, j’attends une seconde et la prochaine, je ressasse le doux en moi, je lui présente la suite, je l’espère pour lui si forte et si belle. « Un matin, tu te réveilleras, et t’auras un sourire. Un vrai. Tu sauras pas pourquoi, tu l’auras probablement même pas vu venir. » le mien était venu un peu après cette fameuse nuit avec Noah, sous les étoiles. Matt avait remarqué avant moi. Le miroir me l’avait confirmé, et ce poids, cette énorme enclume sur mes épaules avait doucement commencé à peser moins, si peu. « Et il va s’étirer toute la journée, il te suivra dans toute ta routine, il partira pas vraiment, peut-être un peu, juste assez, le temps qu’il te manque. Puis il reviendra sans que t’aies forcé le truc, simplement parce que ce sera normal. Anodin, mais normal. » et j’y crois, que ça lui arrivera, J’y crois parce que je serai là along the way, parce que maintenant, c’est tacite, c’est vrai, c’est lancé dans l’univers - et ça nous appartient. « Isaac? » l’instant d’après, je l’interpelle doucement, tourne la tête vers lui, murmure son nom du bout des lèvres. « Ce jour-là, tu me le diras? » que je dorme un peu mieux, que mon sourire à moi résonne avec le sien.
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Isaac Jensen
le coeur au bout des doigts
ÂGE : 34 ans (13.05.90) SURNOM : Isy STATUT : Penny est le soleil et l'amour de sa vie, l'évidence avec laquelle il écrit sa plus belle histoire et s'autorise à réaliser des rêves de bonheur (06.07.2021) MÉTIER : Infirmier au service des urgences, président de l'association Run for Judy, infirmier bénévole à la Croix Rouge et aux Flying Doctors, sapeur-pompier volontaire et surtout : papa comblé de Jude (13.09.2018), Maia (14.06.2022), Jack et Mila (01.08.2023) LOGEMENT : Penny et lui ont quitté Toowong en 2024 pour s'installer avec leurs enfants à Bayside et y créer leur cocon à l'image entière de leur amour POSTS : 28708 POINTS : 0
TW IN RP : dépression, anxiété, automutilation, idées suicidaires, tentative de suicide, mentions d'abandon d'enfant PETIT PLUS : Emménage à Brisbane en 2003 ∆ il exerce en qualité d'infirmier au st vincent's depuis 2006 puis est affecté aux urgences en 2013 ∆ une suite de blessures anéantit sa carrière de joueur de football australien en 2010 ∆ il attente à ses jours en mars 2018 et reprend le travail en septembre 2018 ∆ finaliste de ROA en 2020 ∆ il se soigne contre son anxio-dépression, après avoir longtemps refusé son diagnosticCODE COULEUR : Isy s'exprime en #9966ff ou slateblue RPs EN COURS :
Précautionneux, je tisse méticuleusement les morceaux d'esprit errant aux états d'âme féroces, les parcelles de souvenirs cuisants aux fragments de cœur chancelant. J'extirpe les termes peignant leur sémantique, bâtissant soigneusement une exclusive fenêtre vers mon âme, l'engrenage de mon existence, à l'adresse de Ginny. J'y use des cristaux d'amour et les forge dans l'unicité de ces discussions inestimables que le destin m'offre avec la McGrath respirant à mes côtés, dont le cœur bat peut-être au tambour du mien, possibilité enfin plausible. Je trébuche quelques fois, laissant ma signature perpétuelle sur cet ouvrage si personnel. Je redoute que ce don vers moi que je produis n'est plus que gâchis et pourtant, je persévère, priant le firmament que mon interlocutrice me saisisse, m'observe véridiquement. J'assure sa liberté, nie toute redevance, bannis tout impératif puisque jamais n'autoriserais-je la jeune mère à m'être prisonnière, jamais laisserais-je sa conscience ligoter son âme au nom de ma survie. Je souligne l'absence de promesse, d'incertain, cette faille qui laisse filtrer l'air hivernal mais insuffle aussi la vie, réveille ces poumons traumatisés qui souvent redoutent s'immobiliser, s'imaginent agoniser. Le tableau terminé, je recueille mes iris sur l'étoile polaire, la populaire, l'inévitable. Je la fixe tout en réalisant que jamais je ne saurais la graver contre mes pupilles. Plutôt, c'est la voix de Ginny qui résonne, s'engage : « Je bouge pas, je vais nulle part. » Mon regard s'anime, parcourt cette voie lactée à la recherche du point loué où se stationnera la jeune femme, celui vers lequel je pourrais lever les yeux pour me consoler que son absence n'est qu’éphémère en tout temps.
« Promets-moi un truc. J’y tiens. » J'abats les paupières, inspire profondément et me retourne ; mon regard esquisse désormais les traits finement dessinés immortalisant le visage de la photographe. Elle m'implore honnêteté, vérité. Cet âcre mixture si difficile à concocter et si ardue à avaler. Je fronce les sourcils, désobligé par cette requête qui invoque indéniablement peines et misères. Comment pouvait-elle me prier de lui déclamer tout le mal, tout le malsain, tout l'hideux qui crépite au fond de mon être ? Je le savais pertinemment : puisqu'il nous constitue, puisqu'il est la clef vers notre essence, puisqu'il contient les cellules mères de notre plénitude. Alors qu'elle souligne tenir à mon consentement, je m'entends soupirer, frisant l'inaudible, la voix saccadée de sincères effrois : « J'aurais peur de te faire du mal. Encore. » Nos pupilles s'accrochent. Je ne réfute guère sa demande mais m'alarme d'abattre le château de cartes félicitées qu'elle a dressé au centre des parois mystiques de son cœur. Je crains devenir cette tornade qui ravage sa fondation existentielle par les tourments de mes ignobles désarrois et vilipende d'emblée cette éventualité. Si l'australienne me répète demeurer à mes côtés et me certifie son soutien, mon altruisme me dicte de procéder prudemment, d'approcher minutieusement mes mains engelées autour de sa flamme d'espérance, de bonheur et de vie, au lieu de m'y précipiter tout entier, risquant la happer.
« Y'a des moments où tu croiras que c'est impossible. Que c'est trop, que t'en peux plus, que tu n'en veux plus. Comme tout à l'heure. » Elle désigne des éléments de ma horde de démons qui menacent constamment de tout démolir, tout annihiler, tout ruer vers la fatalité. Elle les pointe, impériale, alors que, timidement, effaré, je l'en mets en garde. Elle les ridiculise par sa franchise, sa justesse puis les minimise, évoquant ce sourire que l'on peut retrouver une fois les avoir affamés à jamais. Je me perds dans sa description, m'imaginant la scène, ses lippes rosées tirées vers la joie. Je me la peins puis sillonne ma propre mémoire à la recherche d'une réaction similaire en ma personne. Je vagabonde dans les différents et divergents chapitres de mon histoire, m'y enfonce, m'y absorbe, jusqu'à ce que sa voix me ramène à la réalité. « Isaac? Ce jour-là, tu me le diras? » Un rictus en coin, gage de bonne foi, garant d'écoute et d'honnêteté, déforme ma joue. « Promis. » Les brins d'herbe se faufilent, vigoureux, entre mes doigts. Je feins le ciel, mes yeux réfugiés contre le plaid abritant Ginny. Je m'enfuis dans mes pensées, gravant, extrapolant, explicitant les propos, les conseils, les vérités exposés par ma singulière compagnie. Il me semble manquer une pièce majeure du moteur vers la vie, toutefois : un motif. Si la mère s'était élevée pour l'exceptionnel lien qu'elle entretenait avec son fils, personne dans mon existence ne dépendait réellement de moi. Je n'étais pas irremplaçable, ni inévitable. J'aimais énormément, mais davantage la culpabilité que le goût alimentait le déroulement incessant de jours pâles et détestables à mon compteur réprouvé. Mon passé était semé de mines assassines, mon présent étouffait sous des ruines et poids accablants. Il ne restait que les songes d'avenir. « Tu as un rêve ? » Je demande, surgissant de ma torpeur sans cérémonie. « Un projet sur lequel tu travailles, que tu aimerais voir concrétisé dans ton futur ? » Et plus silencieusement, est-elle, comme moi, ou a-t-elle été, transie de cette effroyable insensibilité ? Embastillée de cette sensation d'être intégralement anesthésié face au monde, ne ressentir plus aucune émotion, aussi nombreuses soient-elles et faciles, indomptables, à provoquer dans leur large spectre aux innombrables nuances. Est-elle enjouée, motivée, impatiente, trépidante, anxieuse, envieuse, agacée, sereine ? Ou cherche-t-elle encore dans sa palette d'artiste les couleurs de ces différents adjectifs si lourds de sens mais vides au mien ? Que peut-on faire lorsqu'on atteint ce stade où les sensations forgent tantôt une boule indigeste écrasant son cœur, tantôt s'évaporent ne laissant l'Homme qu'enveloppe implacablement aride.
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Dernière édition par Isaac Jensen le Dim 23 Sep - 4:00, édité 1 fois
Ma promesse qui sonne comme une supplication. Mon regard qui ne le lâche pas, mes mots qui dansent, colorent, insistent. Isaac avait cette aura de calme, de douceur, il dégageait une essence toute en prose, en pause, et jamais je ne m’étais sentie brusquée, jamais à ses côtés n’avais-je été agacée, excédée. Déformation professionnelle que je m’étais toujours dit, en le voyant au boulot, en le voyant à l’oeuvre. Chaque geste posé avec intention, chaque mot soufflé comme tant de secrets, d’alliés. C’est ce qui motive mes confidences, mes coups d’oeil amusés, mes paroles et autres confessions. C’est ce qui construit doucement une bulle, la nôtre, ce qui garde les oreilles indiscrètes et les démons d’avant et surtout ceux de maintenant de s’immiscer dans ce qui se trame. Mon jardin fera office de cachette pour ce soir ; la cohérence me faisant sourire, et mes pensées qui volent vers l’autre coin de nature, l’autre amas de fleurs et d’arbres et d’air pur où il me cachait du temps où Noah vivait à l’hôpital. Me cacher. « Eh oh. Pour quelqu’un qui me disait si forte y’a même pas 5 minutes, tu reviens vite sur tes propos. » mes sourcils se froncent avec amusement, mes paroles complètent le tout à la blague. Il se répète et je comprends bien ses craintes ; j’ai les mêmes. Son discours qui sonne comme quelque chose que j’aurais pu lui avancer, que je lui ai même affirmé, du fond du coeur et encore. « Malgré ce que 90% de mon entourage semble penser, je suis capable d’en prendre, Isaac. Pour toi, je peux faire un effort. » une longue inspiration qui servira de conclusion ou au moins, d’argument suffisant pour clore l’interlude. Je sais, que je risque beaucoup. Je sais aussi, qu’il risque tout autant. J’imagine qu’il y a tout un tas de raisons qui devraient nous éloigner l’un de l’autre, nous empêcher de partager un mal commun, une guérison incertaine mais tant méritée. Je suis persuadée que la liste contre serait longue et même infinie, qu’elle prendrait des heures à compléter, et quelques regards réprobateurs à la clé. Il le dit lui même : s’il peut me faire du mal, c’est que je le peux aussi. Mais je n’ai pas envie d’y penser, je n’ai plus envie de voir le noir, la mélancolie, la peine ; j’en ai trop vu, j’en ai trop connu, et c'est bien tout ce que je ne souhaite pas lui affliger ce soir. Me creusant une place au sol, blottissant ma tête contre l’oreiller, je le fuis des prunelles un temps, juste assez, juste pour ravaler mes derniers doutes, pour laisser ma petite voix souffler que tout ira mieux à nouveau. Rassurer les troupes, à commencer par nous deux. « Et puis je te dirai. Si un jour ça va trop loin. Part of the deal, remember? » complice, ma nuque s’arque à son intention, et je renchéris avec le ton d’une fillette à l’aube d’un mauvais coup. Sauf qu’ici, c’est de rémission dont il s’agit. Et intérieurement, je sais que je viens de m’en faire la promesse solennelle, je viens de me le jurer. Pour lui, je peux faire un effort. Pour lui, je veux faire un effort.
There’s nothing else to do here, but sit under the stars. Pendant un instant, je crois qu’il s’est endormi. J’ose à peine bouger, je respire au ralenti, garde mon calme, laisse un sourire innocent naître sur mes lèvres. Sa question me rappelle à l’ordre autant qu’elle rapporte mon attention ailleurs que vers les étoiles, vers ce nuage que j’ai entr’aperçu entre elles, cette lune qui pique, qui brille, qui couronne. « Autre que me prouver à tes yeux? » un clin d’oeil de bonne joueuse adressé à ma fausse force de caractère, et je prends le temps de me lover sur la gauche, tourner mon visage complètement à son intention, Isaac qui a lui-même fait ainsi. D’un souffle, je réfléchis, même si la vanne misant sur mes faiblesses et ses maintes craintes de me briser le coeur derrière moi, nous. Mon rêve, donc? La question est relative, toutefois je prends le temps de poser mes idées, de classer mes pensées. Il attend, patient, il n’en demande pas plus si ce n’est que je sois suffisamment à l’aise pour me confier. Isaac a toujours su écouter, m’écouter, il n’a jamais failli à accepter mes réponses, ni avant, ni ce soir. Confiante, suffisamment pour gratter là où les années et les larmes et les insomnies et les éclats de coeur ont fait des ravages, je tente, à demi-mot. « Si tu m’avais demandé quand tout ça venait à peine d’arriver… peindre. Retrouver l’inspiration, recommencer à peindre naturellement sans me forcer, peindre pour vrai. » tout ça. Voilà où il a plus de courage que moi. Voilà où le jeune homme arrive à voir les faits en face beaucoup plus aisément que ma silhouette recroquevillée en quasi permanence. L’ironie de lui avoir clamé haut et fort mon courage quelques secondes plus tôt. Pourtant, rien ne transparaît. Parce que j’y tiens, parce que je veux lui dire tout ça, parce que même si c'est difficile, s’il y a bien quelqu’un à qui je veux partager ces parcelles de vie-là, c’est lui. « Et si tu me l’avais demandé y’a deux ans : bâtir une vie simple, pour Noah. Avoir une maison, un jardin, une routine, un truc bien banal, normal. » c’était mon voeu le plus cher, clamé le jour du mariage, rêvé et anticipé et espéré pendant tant d’années ensuite. « Mais comme tu me le demandes ce soir... » soyons fair play. Soyons juste, soyons honnête, soyons ce qu’il attend que je sois. « … arriver à vivre pour moi. À me faire une petite place, maintenant que tout le monde va bien. Reprendre ma vie où je l’ai laissée, y’a 8 ans. » des années qu’on me disait de ne pas m’oublier ; mais la suite d’épreuves vécues avec Noah avait suffit à m’enfermer dans un cercle vicieux où me mettre au troisième, au quatrième, au millième plan me semblait être la plus parfaite des solutions, la plus logique. Maintenant sortis d’affaire, maintenant un pas de plus dans cette vie ordinaire et normale et banale que je nous avais visualisée, c’était évident que la suite était à construire. Approximativement, criblée d’erreurs et d’essais et de surprises et de déceptions, mais les miennes. Plus celles qu’on m’impose, plus celles que j’ignore. « Pourquoi j’ai l’impression que c’est toi qui me psychanalyses, plutôt que l’inverse? » reprenant mes esprits, je roule des yeux, laisse un rire soulager la tension dans ma mâchoire, ma nuque. Et mon corps, mémoire qui n’oublie pas, retrouve sa position dans les draps comme s’il ne l’avait jamais quittée.
« Tu sais ce qui s’en vient. » ma voix vole vers Isaac, quand bien même mes yeux sont dédiés à la voie lactée, la belle, la pure, l’immense, la parfaite. « Est-ce que tu es prêt à t’en trouver un nouveau, un rêve? Un qui sera plus fort, plus inspirant que tous les autres, un qui motivera la suite? » je me fais violence, la question et la curiosité et l’insolence tout d’un bout. J’imagine sa rage d’être confronté, son blocage d’en parler. J’appréhende ses limites, j’y touche presque du bout des doigts, mes paumes elles qui tirent la couverture un peu plus haut sur mon menton, m’y cachent sans vraiment y croire. « Ton thé. Il est terminé. » l’excuse de pacotille, la justification qui l’a gardée ici de force ou presque, quand je l’implorais encore de ne pas partir, pas tout de suite. Comme si je sentais que la soirée était tout sauf terminée, à peine commencée. « Et ta séquestration est donc officiellement levée, aussi. » mais je lui offre le parfait motif, la meilleure distraction, diversion. Si Isaac n’est plus confortable dans sa tête et dans son coeur, s’il veut revenir sur sa décision, s’il étouffe, jamais je ne me pardonnerais de le forcer. De l’obliger, de faire de sa vie fardeau, d’en être un. Pourtant, avant qu’il n’ajoute quoi que ce soit, je sens mon visage s’aligner dans son sens, mes rétines qui le trouvent, ma voix qui s’adapte à son souffle, mon murmure presque malicieux qui, chuchoté à son oreille si proche, a tout d’un besoin, criant, qu’il ose, qu’il avance, qu’il se confie, qu’il y croit. « Quoi qu’à mon avis, ce serait plutôt dommage que tu partes avant d’avoir vu au moins une étoile filante. » le ridicule de la chose, le voeu ludique qu’on nous encourage à faire, la cérémonie sans grande magie qui en découle. Et mes pupilles qui s’ancrent aux siennes comme tant d’étincelles, d’espoirs.
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Isaac Jensen
le coeur au bout des doigts
ÂGE : 34 ans (13.05.90) SURNOM : Isy STATUT : Penny est le soleil et l'amour de sa vie, l'évidence avec laquelle il écrit sa plus belle histoire et s'autorise à réaliser des rêves de bonheur (06.07.2021) MÉTIER : Infirmier au service des urgences, président de l'association Run for Judy, infirmier bénévole à la Croix Rouge et aux Flying Doctors, sapeur-pompier volontaire et surtout : papa comblé de Jude (13.09.2018), Maia (14.06.2022), Jack et Mila (01.08.2023) LOGEMENT : Penny et lui ont quitté Toowong en 2024 pour s'installer avec leurs enfants à Bayside et y créer leur cocon à l'image entière de leur amour POSTS : 28708 POINTS : 0
TW IN RP : dépression, anxiété, automutilation, idées suicidaires, tentative de suicide, mentions d'abandon d'enfant PETIT PLUS : Emménage à Brisbane en 2003 ∆ il exerce en qualité d'infirmier au st vincent's depuis 2006 puis est affecté aux urgences en 2013 ∆ une suite de blessures anéantit sa carrière de joueur de football australien en 2010 ∆ il attente à ses jours en mars 2018 et reprend le travail en septembre 2018 ∆ finaliste de ROA en 2020 ∆ il se soigne contre son anxio-dépression, après avoir longtemps refusé son diagnosticCODE COULEUR : Isy s'exprime en #9966ff ou slateblue RPs EN COURS :
Depuis des mois, la capacité de m'étreindre aux simples et inéluctables sensations de la vie m'était devenue raréfiée. Insensible, le vent ne jouissait plus mon odorat du parfum des saisons ou mon toucher de ses températures changeantes. Mon épiderme, inébranlable acolyte de mes organes internes, se qualifiait de transie, résultat de cette fatalité priée par mon âme. Le déversement ravageur de larmes, les torrents de stress, les tourments d'ire et de dégoût taisaient inexorablement ces connections environnementales au quotidien, celles qui susurrent doucement aux oreilles abruties par les peines que la vie persiste et présente encore du beau ; celles qui tendent discrètement, timidement, aux sens les distractions nécessaires vers une bouffée d'oxygène salvatrice.
Ce soir, j'inspirais. Je ressentais les détails de ce monde qui n'accablent pas mais suscitent espérance. La brise automnale caressait à son gré mon visage, soulevait de temps à autres quelques unes de mes boucles. Le jardin de Ginny rejetait abondement ses saveurs, ses effluves, qui m'enveloppaient aussi précieusement que le firmament nous surplombant. Je vivais ; reprenais des connections que je n'avais pas su renouer précédemment car trop occupé à ne pas perdre pied, à militer constamment contre ces démons qui ce soir s'étaient pourtant évadés odieusement, honteusement, mais depuis m'autorisaient à souffler.
J'hésite néanmoins à formuler la parole que quémande mon interlocutrice. Cette promesse de confessions, de confidences, de transparence. Doucement, j'affiche ce refus de la peiner à nouveau, ce à quoi elle rétorque mes précédents propos. Je prince imperceptiblement mes lèvres, emprisonnant les termes précipités, l'invitant à continuer. « Malgré ce que 90% de mon entourage semble penser, je suis capable d’en prendre, Isaac. Pour toi, je peux faire un effort. » Elle inspire longuement, je ferme les yeux pour m'adonner au fréquent jeu de lier les mots aux maux. « Ce n'est pas de toi que je doute. » Par ricochet, l'affubler m'étrangle, l'attrister m'atteint. La frontière me semble abstraite entre altruisme et égoïsme lorsque je refuse sincérité à mes proches sous prétexte que je ne saurais accepter le fait de les avoir blessés. « Je m'en veux de faire du mal à ceux que j'aime. » Je me caractérise de fraude, de menteur, de voleur. Qui suis-je pour refuser toute main assumée tendue vers moi ? « Je sais que ce n'est pas à moi d'en juger et que c'est nul de ma part de mettre en doute quiconque me dit pouvoir entendre et vouloir entendre. » Cependant, je suis un infirmier issue d'une famille d'agriculteurs provenant d'un village moyen. J'ai appris à ne démontrer que puissance et prestance et j'ai été conditionné à douter systématiquement des paroles de bien-être d'Autrui, sachant que l'Homme est capable de tout pour ne pas affronter ses faiblesses. Malgré tout, je lui promets. Je prends ce risque à cœur martelé, les palpitations s'adoucissant lorsqu'elle rappelle cette clause précieuse du marché nous réduisant à se préserver de tout excédent d'émotions. Je hoche la tête, consolé, suspendant les mots dans notre bulle, garants de ma voix. « Part of the deal. »
Le silence nous étreint paisiblement, jurant avec mes yeux brûlant de fatigue et d'émotions, ma tête qui ne cesse jamais d'élaborer, de songer, de redouter. Mes lippes s'animent, interrogeant la jeune mère qui taquine, aguiche mon ego. « Ssh » m'entends-je prononcer, réfutant tendrement toutes formes de railleries. Mon regard se pose sur son visage, mes pupilles détaillent ses traits obscurcis par l'heure avancée, son histoire se révélant au fil de ses mots que j'emprisonne pieusement dans ma mémoire. Elle m'évoque sa passion d'artiste, son désir de tranquillité puis, ultimement, son besoin d'appartenance, son désir de dénicher sa place propre dans ce méli-mélo de péripéties qu'est notre existence croissant au milieu de milliers d'autres. Reprendre ma vie où je l’ai laissée, y’a 8 ans. Mon esprit saccade sur cette dernière phrase, sceptique, perplexe. Est-ce même possible d'accomplir une telle prouesse qu'est celle de remonter dans le temps, ablater des années de vie, détruire des centaines de pages noircies d'histoire, créer une véritable fourche dans le destin pour s'ériger à partir d'un point précis, quid de sa personne totalement transformée par le temps ? J'avais entendu parler de ligne de vie parfois sectionnée sur des paumes, Ginny aspirait-elle à ce même dessein ? « Pourquoi j’ai l’impression que c’est toi qui me psychanalyses, plutôt que l’inverse? » Un rictus mouve mes lèvres. « Réflexe de mon expérience en psychiatrie. » Si je désignais sans gêne les mois que j'avais passé en aile psychiatrique en qualité d'infirmier, j'affirmais nullement la semaine vécue en tant que patient dans ces murs, bien que les deux périodes avaient su enrichir ma vision.
Quelques nouvelles bribes silencieuses parsèment notre échange. Les étoiles scintillent pieusement, la lune veillant précautionneusement sur elles. Puis, Ginny me retourne la question intelligemment. Suis-je prêt à être animé d'un rêve ? Un objectif fantastique si intense qu'il constituera ce moteur, ce motif, d'apparence si vital ? Je reconnais sa nécessité mais ignore si je dispose réellement de la capacité d'en héberger un. Comme si ma réplique tardait beaucoup trop, la jeune mère lève son faux geôle, soupirant cependant le regret de manquer une étoile filante. « T'en as déjà vues ? » je questionne, à la fois curieux et admiratif. Si elles étaient fréquentes dans les dessins animés et films cinématographiques, je doutais en avoir aperçu une en trente-trois ans de vie.
Je préserve quelques secondes vierges avant de me lancer : « Je t'ai déjà raconté comment je suis devenu infirmier ? » Il était extrêmement rare que je me confie aux patients ou à leurs accompagnateurs. De plus, bien que la McGrath constituait un cas particulier qui aurait pu , je me focalisais principalement entièrement sur sa personne et celle de son fils, ainsi, je soupçonnais n'avoir jamais révélé ce volet de mon existence à la brune. « Quand j'étais gamin et jusqu'à mes... 25 ans, mon rêve était de devenir joueur de football australien professionnel. » J'ose un coup d’œil à ma compagnie, à l'affût de la moindre pointe de moquerie, d'incrédulité ou de connaissance de faits. « Mon père m'a mis dans cette discipline quand j'avais cinq ans et ça m'a vite monté à la tête. C'est devenu ma passion, j'ai consacré toute cette partie de ma vie à ce sport en déployant énormément de moyens et de sacrifices. Si bien que je suis parvenu à décrocher une bourse pour y jouer et étudier ici à Brisbane. » Je marquais une pause, emplissant mes poumons d'air frais. « J'étais tellement passionné que j'ai jamais su vraiment m'arrêter, faire une pause le temps de me reposer. Puis j'ai été blessé et c'était fini. » Mon ton est serein, malgré la dureté de ce destin, la brutalité de vingt ans de vie vouée, de prime abord, à du néant. « Infirmier, c'était mon plan B à l'université. J'avais vu les secouristes s'appliquer à sauver des gens quand j'étais ado et ça ne m'a jamais quitté. Ça m'a inspiré. Aujourd'hui, je ne m'imagine pas faire un métier autre que dans ce domaine. C'est ce qui me fait vibrer. » Je reconnais m'égarer, cependant, et recadre mon récit. « Tout ça pour dire. Premier rêve : le football australien, qui ne s'est pas concrétisé en soit. » Je suspens la suite, réalise que mon monologue n'a rien de réjouissant en dépit de ma volonté pure d'extrapoler à voix haute cette notion de rêve. J'y sombre : ceux-ci ne sont-ils pas parfois que risibles fabulations ? Avec le recul, j'éprouve de la honte face aux rêves que j'ai pu entretenir. Comment un garçonnet de cinq ans peut-il s'imaginer champion de football australien ? Comment un homme trentenaire peut-il espérer vivre toute sa vie avec la même femme, être père de ses enfants ? « Je t'épargne les rêves qui ont suivi » feintais-je, misérable. « J'assumerais plus un projet, après réflexion, » je susurre, yeux rivés sur le manteau sombre piqué d'argenté me faisant face. Un projet qui me plaît, qui m'inspire, me motive. Il ne me restait plus qu'à concevoir une telle denrée. Heureusement, cet accomplissement ne me semblait pas arborer des airs d'improbables. De plus, briser un rêve cause bien plus d'éclats qu'échouer un projet. « Il te manque beaucoup d'éléments pour revenir huit ans en arrière ? » interrogeais-je, basculant l'attention sur l'australienne tout en éclaircissant un intérêt sincère issue de mon estime pour elle.
Et l’air est froid, frais. Mes joues glacées cachées au creux d’une couverture, mon regard qui divague entre le sien et les étoiles, là, celles qui n’ont pas fini d’entendre nos secrets, de les guider à leur façon. Infusant une touche d’humour à la conversation, je tente au mieux d’adoucir les craintes d’Isaac, de chasser à nouveau ce voile qui flirte avec ses prunelles, qui disparaît pour mieux revenir. Il a le moral et les émotions en dent de scie, et à travers ses remous et d’autres vagues remontant de son coeur à ses mots, y’a moi, au centre. Y’a moi et mon oreille attentive, y’a chacun de ses mots que j’enregistre comme s’ils m’ouvraient la porte à des confessions encore jamais articulées, assumées. Avec douceur, sans rien brusquer, j’aspire à lui inspirer confiance, j’aspire à le faire sourire, rire même, s’il m’en donne le droit. La promesse viendra ensuite, celle d’être honnête, celle de ne laisser que la vérité agir comme drapeau rouge, drapeau blanc, comme limite si cela peut le rassurer. « Je m'en veux de faire du mal à ceux que j'aime. » qui résonne un peu trop fort, un peu trop longtemps. Le sentiment que je ne connais que trop, le refus, recul, de faire entrer qui que ce soit dans son cercle vicieux. Si j’avais tenté seule de braver mes démons jadis, je comprends parfaitement qu’Isaac refuse d’ouvrir sa porte, de s’avouer vaincu, de partager son mal alors que lui-même rêve si fort de se prouver en être le seul otage, le seul adversaire. « Quand on aime, c’est pas juste pour les bons côtés. » que je souffle comme l'évidence, les doigts perdus entre l’herbe, entre les coussins, entre mes intentions que je laisse flotter dans sa direction comme tant de promesses, comme tant de constatations. Mettre à l’épreuve était une chose, le ressentir en était une autre. Et si bien humblement je tentais au jour le jour d’aimer sans juger, d’aimer et d’aider, me voilà qui jure en silence que son entourage, que ses amis, que sa famille, et que même moi, s’il le décide, sont là parce qu’il le mérite, parce qu’il en a besoin, et parce que l’amour, pour nous, ce n’est pas strictement lorsque tout va bien, lorsque le score est parfait, lorsque ça nous arrange. Le Jensen qui rebondit avec un trémolo dans la voix, une faiblesse que je remarque, un craquement, subtil, suffisant pour que je ne le lâche pas des yeux, pour que je n’en ai absolument plus envie. Il le sait lui-même, comment son isolement forcé peut être nocif ; mais encore une fois, n’en tient qu’à lui de vouloir. Je ne peux rien faire de plus que d’être présente, d’être là, pour lui, pour tout le reste. « Ça vient avec le temps. On comprend que ce n’est pas de la pitié qu’on voit, quand les gens nous regardent. Que ce n’est pas de la déception qu’ils ressentent, quand on finit par leur dire ce qu’on a sur le coeur. » oh, que j’en avais bavé à l’époque, d’imaginer les pires scénarios, de voir dans chaque interaction, chaque geste, chaque question une pointe à mes faiblesses, calculée et partagée. Oh, que mon coeur en avait souffert, de me murer derrière le silence, derrière une carapace, derrière de mauvaises intentions inventées au goût d'amer, à l’impression de m’achever.
Viendra ensuite la mention d'il y a 8 ans que je m’offre, la réflexion sur ce rêve, intangible par moment. De la peinture à Noah, d’une vie dédiée à mon fils, de construire quelque chose d’égoïste pour une fois. De l’impression d’être plus légère reste la sensation de creuser en moi un peu trop loin, d’en dévoiler plus encore que ce que je croyais enfoui, simplement parce qu’il m’a posé la question, et que je brûlais d’y répondre. Jamais n’avais-je pris le temps de m’interroger au sujet de mes aspirations. Le manque de temps, de ressources, d’énergie, de courage, j’avais bien eu du mal à penser à moi depuis la naissance de Noah, et sa maladie ayant renchéri sur le tas n’avait laissé que quelques bribes de possibilités qui enfin aujourd’hui me semblaient un peu plus concrètes. « Elle a bon dos, la psychiatrie. » un éclat de rire et je retrouve la drôle de complicité qui nous a toujours talonnée, le rire par dépit, par défaut, du temps de la 214. Les coups d’oeil de mutisme, les quelques mots échangés, les sourires quand tout allait, les soupirs quand c’était tout autre. À force de le côtoyer, y’avait cette dynamique qui s’était mise en place, y’avaient les restes d’avant qui toujours faisaient partie de l’ambiance, y’avait ce confort que je retrouvais un peu ici, les épaules délestées, la tête moins embrouillée. Suffisamment pour le libérer, ou du moins, pour lui signifier que s’il en a assez pour ce soir, que s’il est prêt à affronter le monde extérieur après une interlude forcée, il a ma bénédiction. Mais il ne bouge pas. Isaac ne bouge pas, reste ici, et dans la pénombre, je sens un sourire qui se dessine légèrement sur mes lèvres, je sens un confort qui s'affirme, une douceur qui garde les murmures bien au chaud, bien en sécurité. « Une fois ou deux. C’est une question de timing, tu regardes ailleurs pendant une fraction de seconde, et direct tu la manques. » son engouement m’arrache un rire, mon explication est teintée des déceptions d’une gamine ayant passée de nombreuses nuits allongée dans l’herbe à la maison d’été familiale, à tenter de voir à travers les nuages, en bordure de la lune, partout et nulle part une étoile filante, une vraie. Ce soir, la coïncidence serait trop belle, l’espoir qu’elle apporterait serait trop significatif pour que je l’ignore, et sans rien dire de plus, je sens mon regard scruter un peu plus fort, mon souffle s’accélérer d’impatience, d’anticipation de pouvoir lui en destiner une du bout de l’index. De lui offrir ça comme un cadeau innocent, une promesse de plus, une confirmation.
Concentrée, à vif, c’est tout juste si je sens les premiers signes de fatigue monter avec l’heure tardive lorsque je finis par entendre à nouveau sa voix percer le silence installé à travers les branches, les plantes, les arbres. L’instant d’après, je fais volte-face, retrouve son visage d’un coup d'oeil sérieux et l’air plus concentré encore que ce que je croyais pouvoir être possible. « Attends, bouge pas. J’essaie d’imaginer t’aurais l’air de quoi, avec le nez cassé, les yeux bouffis, le visage tout noir bariolé et une dent ou deux en moins. » et je pince les lèvres de voir qu’Isaac s’y attendait, que mes jugements moqueurs et autres préjugés de petite soeur de footballeur vedette ont suffit à vendre la mèche. Pourtant, son histoire m’intéresse suffisamment pour que je laisse le portrait que je tente de me faire de lui plus jeune, plus fou, l’image d’un Isaac bourré d’anticipation pour l’avenir. L’image d’un Isaac heureux ; ce à quoi, violemment, je me refuse, de peur de ne jamais avoir vraiment vu ce dont il s’agissait entre mes craintes de perdre mon fils, et les oeillères que cela a bien pu apporter à ma relation avec l’infirmier. D’un passé de sportif, il flirte maintenant avec les obstacles, la remise en question, la réorientation. Il parle de ses questions, de ses doutes, de son changement de cap, de sa renaissance. « Tout ça pour dire. Premier rêve : le football australien, qui ne s'est pas concrétisé en soit. » « Qui a évolué, changé. Comme toi. » que je m’entends préciser, comme si je tentais de m’en convaincre autant que lui-même. La croisée des chemins qui est venue ensuite, et cette idée, ce rêve, ce projet qui maintenant prend la place bien précise d’un objectif - et laisse la chance à une plus grande marge de manoeuvre. « Ça fonctionne aussi. J’accepte la négociation. » d’un hochement de tête de la positive, peu importe ce qu’il choisit n’en reste que c’est un pas, un grand pas vers l’avant. Fière de lui, mais surtout confortée dans la réflexion qu’il m’a autorisée à entendre de vive voix, je reste bonne joueuse lorsqu’Isaac s’interroge sur mes propres motifs, sur le pourquoi du comment derrière ces années que je tente de retrouver, rattraper. Est-ce qu'il me manque beaucoup, est-ce que j’ai besoin d'autant d’éléments? « Pas tant que ça. Ce qui me manque, c’est juste… une impression. » et c’est encore plus difficile à quantifier que je pense, discrètement, inspirant la seconde suivante. « Y’a 8 ans, j’avais des tas de projets, j’avais envie d’accomplir plein de choses, de voyager, d’apprendre, de faire des erreurs, de grandir. » replonger dans le quotidien d’une Ginny à peine adulte, à peine assumée, à peine assez grande pour voir la vie sous autre chose qu’une lentille d’espérance me fait mal, oui. Mais est nécessaire si je veux vraiment mettre le doigt sur ce qu’il faut, si je veux lui donner la vérité que je lui ai tant promise. « J’avais l’impression d’être forte, tu sais, complète. Pour une des premières fois de ma vie. Puis les plans ont été chamboulé, tout a changé, et c’est d'avoir perdu cette sensation-là qui à la longue était trop dur à porter. » volontairement, je laisse de côté l’apport qu’ont eu mes parents dans l’histoire, mon frère également. Cette histoire commençait à peine à trouver la paix à mes yeux et dans un élan de m’isoler de tous les facteurs m’ayant coupé les ailes jadis, j’y trouvais un certain calme, un certain zen à assumer comment j’ai pu me sentir à l’époque, comment je souhaite me sentir maintenant. Y mettre enfin des mots est sadiquement bénéfique, et s’il y a quelqu’un qui peut comprendre l’étincelle douloureuse qui naît en mon sein, c’est lui. « Je veux pas revenir en arrière. » parce que ça voudrait dire que Noah ne serait pas là, et ça, j’y survivrais pas. Je précise doucement, sans besoin d’ajouter quoi que ce soit d’autre, sans douter une seule seconde qu’il en pense autrement. Noah, malgré les conséquences de son arrivée, restait bien sûr la personne que j’aimais le plus au monde, et jamais je n’aurais pu avoir la force d’imaginer une vie sans lui. « Je voudrais simplement le revivre, me sentir à nouveau comme ça. » probablement si innocente, si naïve. Probablement trop rêveuse, probablement idiote un peu, beaucoup. Seul l’avenir me le dirait, au final.
« Là, juste là! » j’ignore combien de temps a pu s’écouler entre mes confessions, les siennes, et le silence de coton dans lequel nos deux silhouettes se sont naturellement installées. J’ignore même s’il est encore éveillé lorsque je tends le bras, l’excitation dans la voix, les étincelles dans les yeux. S’il ne répond pas assez vite à mon goût, ma nuque s’arque bien vite dans sa direction, un sourire grand comme le monde sur les lèvres. « Isaac? » est-il perdu dans ses pensées? Est-il endormi? Est-il toujours là, avec moi, à réfléchir à sa suite, à lui mettre une étape précise, un premier geste, à en dresser le portrait? La pénombre m'empêche de bien voir, d'être certaine qu’il ne manque pas l’étoile filante qui dessine son trajet au-dessus de nos têtes comme tant d’espoir, je sens mon corps se mouvoir vers le sien, mon murmure qui se blottit contre son oreille, entre l’impatience d’obtenir une réaction de sa part, de partager cette merveille de possible avec lui, et l’égoïsme de troubler son repos rien que pour ça. « Isy? » surnom, familiarité, et vient avec l’impression d’être si proche, d’être à un millimètre à peine de lui, d’avoir enfin réussi à percer, à peine, juste suffisamment, sa carapace l’espace d’une seconde. Mes doigts trouvent sa paume, la pressent, l'encouragent, l'assaillent. Et je refuse qu'il manque le spectacle, parce que j'y tiens à ça aussi, parce que ça lui fera quelque chose d'autre auquel se raccrocher, magie de bac à sable, mais magie tout de même.
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Isaac Jensen
le coeur au bout des doigts
ÂGE : 34 ans (13.05.90) SURNOM : Isy STATUT : Penny est le soleil et l'amour de sa vie, l'évidence avec laquelle il écrit sa plus belle histoire et s'autorise à réaliser des rêves de bonheur (06.07.2021) MÉTIER : Infirmier au service des urgences, président de l'association Run for Judy, infirmier bénévole à la Croix Rouge et aux Flying Doctors, sapeur-pompier volontaire et surtout : papa comblé de Jude (13.09.2018), Maia (14.06.2022), Jack et Mila (01.08.2023) LOGEMENT : Penny et lui ont quitté Toowong en 2024 pour s'installer avec leurs enfants à Bayside et y créer leur cocon à l'image entière de leur amour POSTS : 28708 POINTS : 0
TW IN RP : dépression, anxiété, automutilation, idées suicidaires, tentative de suicide, mentions d'abandon d'enfant PETIT PLUS : Emménage à Brisbane en 2003 ∆ il exerce en qualité d'infirmier au st vincent's depuis 2006 puis est affecté aux urgences en 2013 ∆ une suite de blessures anéantit sa carrière de joueur de football australien en 2010 ∆ il attente à ses jours en mars 2018 et reprend le travail en septembre 2018 ∆ finaliste de ROA en 2020 ∆ il se soigne contre son anxio-dépression, après avoir longtemps refusé son diagnosticCODE COULEUR : Isy s'exprime en #9966ff ou slateblue RPs EN COURS :
Protéger ses sentiments tels des explosifs assassins, couver ses démons tels des clefs vers la destruction de l'essence de son bonheur, séquestrer ses cauchemars teintés de révolus tels des armes à fatalité. Il semble si brave, celui qui milite dans l'ombre. Cet héros indépendant et suffisant, dont les dés aux apparences pipés du destin ne peuvent jamais accabler. Et pourtant, alors que j'expose à Ginny cette volonté de fer qui m'étreint sans relâche d'étouffer personnellement toute l'adversité que je subis, mes motifs mouvent sournoisement vers l'abstrait. « Quand on aime, c’est pas juste pour les bons côtés. » Les vérités se bousculent : on ne peut décider pour Autrui ni évaluer sa force, on ne peut pas survivre seul. La McGrath m'évoque ce regard si cuisant, poignant, que nos proches, nos amis, peuvent nous accorder lorsqu'on leur révèle des pans de nos miroirs brisés, les dédales de nos désarrois, les torrents de nos tourments. Elle le dépeint, l'interprète, comme étranger de la pitié, apparenté à la bienveillance, l'assimilation de rares noirceurs. Et progressivement, une question me tiraille, s'imbrique entre mes états d'âme, bascule la donne. « Parfois, je me demande si inavouablement, ce n'est pas que moi que je protège. » En refusant d'inviter dans la confidence mes proches, sous prétexte de ne pas vouloir les soucier, les blesser, les effarer. En rejetant en bloc l'idée d'appeler à l'aide, par orgueil, vanité, naïveté. Réaliser souffrir, c'est aussi s'avouer Homme, s'accepter faillible. Clamer aller mal, c'est autoriser la providence à frapper encore plus fort. Mais en somme, protège-t-on nos affections en les immergeant dans l'ignorance de funestes desseins ?
Elle éclaire indéniablement mon monde, Ginny, en me susurrant que tout rêve est toléré, mais aussi toute peine. Que l'échec et la réussite constituent deux frères ennemis qui ne peuvent avancer individuellement. Je me repose sur son regard novateur alors qu'elle m'insuffle la magie des étoiles filantes, celles que je ne pensais réelles que dans les films hollywoodiens, celles que je n'estimais certainement pas dédiées à un homme comme moi. Comme si elles se méritaient, comme si elles devaient se payer à la popularité ou par une bonté d'âme dont je disposais aucunement.
Dans une rébellion à la coutume, je relate à mon interlocutrice mon expérience avec les rêves. Elle taquine, dédramatise ces événements qui, horriblement, parviennent toujours à peser sur mon coeur, ma conscience. Je troque les rêves pour les projets, ferme les yeux quelques instants, ivre de clarté, épuisé de partage. Un fin sourire étire mes lèvres tandis que, conciliante, la jeune mère accepte mon offre et je virevolte les projecteurs de la discussion sur sa personne, son aspiration de rejouer la mélodie d'un passé chéri. Elle me peint cette évolution de caractère façonnée par les expériences de vie, des leçons que l'on ne peut effacer, qui nous marque, telles des cicatrices inexorables, et nous murmure constamment de prendre garde. L'innocence est une denrée qui une fois égarée, altérée, ne peut reprendre ses couleurs originelles. L’exercice vital est alors de peindre sa toile en appréciant et épousant au maximum les teintes à notre disposition, acceptant le fait qu’elles aient pu être atteintes malgré soi. « Je voudrais simplement le revivre, me sentir à nouveau comme ça. » Le silence nous enrobe de nouveau, nous cajole, nous berce. Les méninges exténuées s'animent à calculer des profitabilités folles, dresser une enquête digne des plus fameux romans policiers pour éclaircir un seul mystère : peut-on retrouver une impression perdue ? « Tu le penses possible ? » Je suis convaincu qu'il l'est au moins un peu, à défaut de pouvoir remplir totalement cette mission. J’inspire profondément cet air sain, pur, salvateurs ; relaxe enfin mes muscles contre l’amas de plaids, coussins et couvertures.
« Là, juste là! » J'ouvre derechef les yeux sur ce firmament majestueux. Le bras de l'artiste s'érige, pointe le lointain. Je plisse les yeux, craint que mes pupilles me jouent des tours, à désirer et imaginer trop fort. « Isaac? Isy ? » Je perçois ma compagnie se mouvoir vers mon être, ses ongles effleurer ma paume, la presser, pour me rattacher aux faits, au réel. L’ultime phénomène me semble encore déchirer le ciel quand je questionne : « Tu as fait un vœu ? » Et ma main, instinctive, couve de son éphémère chaleur ses doigts gelés.
Revenir en arrière, retrouver l’émotion, retrouver mon contentement, mélanger le tout, m’y tâter à nouveau. Je ne m’autorisais pas à repenser à mon passé habituellement, je tentais de grandir à côté, de reprendre mes marques, de me construire autrement. Mais depuis quelques temps, j’avais envie de plus. J’avais envie de tourner la page, de clore le chapitre. De faire confiance aussi, d’avancer sans boulet à la cheville, sans impression de décevoir qui s’attendait à ce que je déçoive de toute façon. Isaac s’empresse de me demander si à mes yeux, une telle adaptation de mon quotidien est réaliste, si une fois les éléments en main, si une fois le chemin parcouru, le processus m'amènera là où je veux vraiment être, là où j’en rêve. Et honnêtement, je l’ignore. Bredouille un temps, muette l’instant d’après, j’anticipe tous les scénarios possibles, je repasse sur les options, les énumère mentalement, y revient pour en biffer une poignée au passage. Depuis quand tout se passait exactement comme prévu? Depuis quand je me retrouvais toujours au bon endroit, au bon moment, avec tout ce qui suffisait? C’était utopique de croire que de seulement chercher incommensurablement ce sentiment de force, de courage, d’invincibilité serait assez pour me l’offrir sur un plateau. C’était ridicule de croire naïvement que je ne finirais pas déçue de ce que j’ai tant souhaité, de ce qui avait motivé mes jours et mes nuits des mois durant. Et alors que tout ce qui remonte a une consonance négative, défaitiste, je m’étonne à peine d’articuler dans la pénombre ma prière, mon appel à l’aide, mon souhait le plus cher. « Il faut. Que ça soit possible. » parce qu’autrement, il ne me reste plus rien. Parce que sinon, je détesterai la personne que je deviendrai, accrochée à son avant, dédaignant son maintenant. Ce n’est pas celle que je veux être, ce n’est pas celle que je veux voir s’occuper de Noah, l’aimer de tout son coeur meurtri.
Le ciel, la nuit, les étoiles se chargent de nous. Si je me plonge dans mes pensées, le Jensen lui semble déjà avoir sombré dans un sommeil salvateur si je me fie à sa respiration régulière, à son souffle qui chatouille à quelques reprises mon épiderme glacée malgré les épaisseurs la recouvrant pieusement. Dans mon enthousiasme, dans mon empressement, je m’active à ses côtés mes doigts jouant contre sa paume, tente de le réveiller, brusque son cocon de confort rien que pour lui montrer l’éclair furtif, la promesse, l’étoile filante là, qui dessine son sillage au-dessus de mon regard d’enfant émerveillé. Il l’a vue, que je soupire, soulagée. Aie-je fait un voeu? « Oui. » un sourire fin naît sur mes lèvres, le mystère restera par contre, et jamais je n’irai contre la croyance populaire en dévoilant quoi que ce soit de ce que j’ai pu réclamer l’air béat, à une voie lactée de possibilités infinies. « Mais te concentre pas sur mon voeu, pense au tien. T’as eu le temps? » du revers, je m’assure qu’il n’a pas seulement été surpris dans son repos, qu’il n’a pas été coupé de court, que l’essentiel a été fait. Ma demande à l’univers me semble bien pâle si je la compare à tout ce qu’il aurait bien pu scander lui-même. Sentant sa main qui doucement retrouve la mienne, qui l’enserre, qui la rassure, je souffle un peu aussi, j’y trouve ma réponse, mâchoire qui se détend et autres angoisses qui se calment. « Parce que si c’est le cas, tu peux refermer tes yeux. Je te dérangerai plus, promis. » je le sens, qui tangue, je le sens, qui lutte pour garder les paupières ouvertes lui qui, après toutes ses confidences, tous ses espoirs, tous ses mots presque voilés, a finalement réussi à trouver un semblant de calme qui me paraît trop précieux pour bouger du moindre millimètre, pour provoquer une rupture, une faille, un doute. La chaleur passagère de sa peau contre la mienne restera égoïstement ce à quoi je me rattacherai toute la nuit.
Le soleil n’est pas encore tout à fait suffisamment haut dans le ciel pour qu’il soit la cause de mon réveil lorsque je finis par ouvrir un oeil, puis un autre. Le jardin qui grouille, la rosée qui caresse mon nez, les arbres qui craquent sous le vent d’une aube timide. Sans un mot et avec la plus grande des délicatesses, je m’extirpe des draps sans penser une seule seconde à oser impoliment jeter un coup d’oeil sur la silhouette encore endormie d’Isy. Entre la gêne, entre les questionnements, entre mes pas qui se précipitent à l’intérieur et l’arôme d’herbe et de terre fraîche qui ponctue mes vêtements, je me surprends la minute d’après à imaginer un plan élaboré pour occuper mes pensées, pour me sentir utile, pour avoir tout à faire, tout à régler, tout à gérer et rien d’autre à imaginer. Il me faudra près d’une heure avant de finir par quitter la cuisine d’un mouvement chancelant, un plateau tenant entre mes bras maladroits. La collection de marguerites empotées que Noah avait ramenées de l’école la semaine dernière choisit ce moment pour se glisser entre mes orteils, pour provoquer le vacarme du siècle lorsque je m’écroule de tout mon long au sol, le petit-déjeuner avec. « Oh. » par chance, je prévoyais retourner à l’intérieur chercher le café, aucune mort d’homme n’est donc à signaler. « J’avais fait des pancakes, mais... » faire est un bien grand mot, si on repère la boîte de mélange auquel on doit simplement ajouter une portion de lait laissée comme pièce à conviction en bordure de la cuisinière. « … j’imagine que les à-côtés sont un bon compromis. » les tranches d’oranges et de fraises devraient faire office d’offrandes suffisantes, non?
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Dernière édition par Ginny McGrath le Dim 14 Oct - 16:27, édité 1 fois
Isaac Jensen
le coeur au bout des doigts
ÂGE : 34 ans (13.05.90) SURNOM : Isy STATUT : Penny est le soleil et l'amour de sa vie, l'évidence avec laquelle il écrit sa plus belle histoire et s'autorise à réaliser des rêves de bonheur (06.07.2021) MÉTIER : Infirmier au service des urgences, président de l'association Run for Judy, infirmier bénévole à la Croix Rouge et aux Flying Doctors, sapeur-pompier volontaire et surtout : papa comblé de Jude (13.09.2018), Maia (14.06.2022), Jack et Mila (01.08.2023) LOGEMENT : Penny et lui ont quitté Toowong en 2024 pour s'installer avec leurs enfants à Bayside et y créer leur cocon à l'image entière de leur amour POSTS : 28708 POINTS : 0
TW IN RP : dépression, anxiété, automutilation, idées suicidaires, tentative de suicide, mentions d'abandon d'enfant PETIT PLUS : Emménage à Brisbane en 2003 ∆ il exerce en qualité d'infirmier au st vincent's depuis 2006 puis est affecté aux urgences en 2013 ∆ une suite de blessures anéantit sa carrière de joueur de football australien en 2010 ∆ il attente à ses jours en mars 2018 et reprend le travail en septembre 2018 ∆ finaliste de ROA en 2020 ∆ il se soigne contre son anxio-dépression, après avoir longtemps refusé son diagnosticCODE COULEUR : Isy s'exprime en #9966ff ou slateblue RPs EN COURS :
Mon esprit divague, songe aux impacts du révolu sur l'avenir de chacun, à la multitude de casseroles que l'on peut traîner, tantôt pénibles fardeaux, tantôt alliés experts selon les situations et nos états d'âme. Je décortique ces cicatrices invisibles que nous arborons tous inexorablement et qui souvent nous brûlent, nous intimident, nous gâchent. Peut-on en faire abstraction, n'en ériger que force et fierté ? Sommes-nous aptes à nous leurrer pour récupérer des frasques de notre passé, rejouer des bandes à la demande, le manque de nostalgie au goût des lèvres. « Il faut. Que ça soit possible, » qu'elle prie, Ginny. Un rictus anime mes traits, fend ma joue, étire mon menton. J'abats les paupières sur mes yeux exténués, repose mon âme dévoilée, insufflée de nouveauté salvatrice. « Il faut. Que ça soit possible, » Muni d'un élan solidaire, je rejoins son requis à son dessein, me prête à l'exercice de m'imaginer comment je pourrais évoluer si jamais je retrouvais le comportement de l'homme que j'ai composé avant d'essuyer les pires embûches de ma voie destinée. Je doute, je tangue, le manichéen me fuit, les nuances m'étourdissent ; la bonne volonté et l'amitié prônent.
Ses doigts effleurent ma chaire, ses ongles chatouillent ma paume. Sa voix invoque au rare, au vœu. Cette nuit me semble tirée d'un autre monde, tant les timides probabilités se succèdent généreusement. Mes pupilles retracent la ligne parcourue par le phénomène stellaire, je perçois le soupir de soulagement de mon interlocutrice qui m'arrache irrésistiblement un sourire. Je m'intrigue sur son éventuel vœu qu'elle m'indique avoir déjà livré aux cieux, me pressant de l'imiter et de me focaliser sur mes propres nécessitées inavouées. L'esprit mitigé de doutes et d'espérances s'ose, formule en son sein un précieux et unique souhait. « Parce que si c’est le cas, tu peux refermer tes yeux. Je te dérangerai plus, promis. » Un fin sourire étire mes lèvres, teinté des souvenirs de derniers vœux qui me semblent si lointains, ces bougies d'anniversaire que je ne souffle plus notamment depuis des années. « Tu ne me déranges pas, » J'assure doucement, bien qu'il ne faille que quelques minutes supplémentaires de silence pour que je m'engouffre dans les bras de Morphée.
La symphonie de la chute m'extirpe de mes rêves. Mes yeux s'ouvrent sur le ciel matinal et mon cœur manque un battement. Mon instinct cherche la cause du bruit, ma tête tente d'expliquer ce réveil singulier. Les moments de la veille s'imbriquent, perdent de plus en plus leur notion de rêve sous ce soleil lumineux et ces preuves à l'appui que ces plaids avaient soutenu nombreuses confidences, ces plantes témoignaient de plusieurs promesses. Je déglutis, incertain, m'ancrant difficilement à la réalité, tentant de lier mon futur avec cette veille engorgée d'impulsions vers la vie - ma vie. Une croisée inespérée sur mon chemin qui s'interroge pourtant encore vers où se tourner, est hésitant à comment continuer - prospérer. « Oh. » Mes yeux se posent sur la silhouette de la jeune mère, auteure de tous ces états d'âmes. « J’avais fait des pancakes, mais... » Ceux-ci se retrouvent tristement au sol. « … j’imagine que les à côté sont un bon compromis. » « Tu ne t'es pas fait mal ? » J'interroge, prévenant, les dégâts matériels et alimentaires faisant bien pâle figure dans ma lecture de la scène. Je quitte le lit improvisé, recueille les victimes de la maladresse de mon interlocutrice. Alors que je repose le plateau sur la table de la cuisine, j'adresse : « Désolé de m'être endormi. » Je plisse les yeux, m'interrogeant derechef sur la manière dont la McGrath avait passé le reste de la nuit où j'étais inconscient de mes alentours. Je risque un autre regard vers l'amas de confort, à l'affût d'une preuve révélant irréfutablement la présence ou l'absence de Ginny pour cette deuxième partie sous les constellations. La curiosité me tiraille. « Tu as dormi là aussi ? » Mes yeux parcourent les pièces de la maison m'environnant. L'entrée succédant le taxi précipité, interdit, muet. Les gestes hasardés de Ginny qui m'invite dans sa demeure, les coussins qu'elle réarrange, le thé qu'elle se missionne à préparer. La petite salle de bain au sein de laquelle j'ai sollicité davantage de contenance. Puis, désaxé, je cherche une pendule pour me fixer davantage dans le temps, dans ce monde d'éléments nouveaux. Je rassemble ces derniers difficilement, le cœur et la tête saturant ou peinant à émerger réellement, ornés d'incrédulité saupoudrée de candeur. Progressivement, je réalise entretenir une faible misère à intégrer cette soirée indétrônable dans son caractère d'exception, ces heures uniques volées à mon calvaire, annonciatrices de ma convalescence, d'une lutte sensée vers la continuité, le tout dû à une âme incroyable dans son unicité. Je déplace les deux tasses vides sur le plan de travail de manière à ce que Ginny ne s'ébouillante pas en versant le liquide préparé. « Merci, » je prononce poliment lorsque la deuxième tasse manque de déborder. La cafetière reprend place sur son socle, je laisse une gorgée caféinée couler le long de ma trachée et titiller prochainement mon organisme. « J'ai un truc, dans une heure trente, » j'annonce doucement, prudemment, ne cherchant pas à me créer une porte de sortie. « Le marché fermier. Mes parents y sont et ma mère n'accepterait pas que je fasse l'impasse. Elle tient à souhaiter l'anniversaire de ses enfants de vive voix. » Encore un vœu, pense-je. Je remarque les fruits et légumes sur le comptoir de mon hôte, finis la course de mon regard contre le sien. « Tu y es déjà allée ? »
Pas un bruit, pas un son. Ce qui est relativement étonnant connaissant ma capacité à faire un boucan particulièrement alarmant à la moindre seconde où mes intentions sont de passer inaperçue. Filant hors des draps dans un soubresaut de surprise, je me félicite presque qu’aucun faux pas ne soit fait entre le jardin et la cuisine, entre lui et le reflet que le miroir de l’entrée me renvoie à l’instant où il croise mon regard. Cheveux ébouriffés, visage plissé et vêtements complètement désordonnés. Ça va, j’ai été dans pire état, et honnêtement mon apparence est bien la dernière chose à laquelle je pense lorsque je m’assure sciemment de combler mon esprit de tout, sauf de ça. T’as dormi dehors Ginny, mes doigts s’affairent à attacher mes cheveux d’un élastique distrait. T’as invité quelqu’un à la maison et vous avez dormi dans le jardin, et mes pas se précipitent à la cuisine, le carton de lait sort du frigo d’un geste, la boîte de mélange à pancakes du revers. L’instant qui suit je me retrouve à froncer les sourcils, à tenter de suivre les indications, ignorant la silhouette ensevelie sous les draps, paupières closes et visage relâché, qui orne l’herbe entouré de pots de fleurs désorganisés. Parfaite distraction qu’est de me demander si j’ai mis un oeuf, ou trois dans la préparation, si la tasse de liquide vient avant ou après avoir passé la pâte au robot. Excellent moyen de diversion que de me concentrer à peser les grains de café, à les passer au broyeur, à mesurer au millimètre près la quantité d’eau à ajouter au Chemex sans jeter pas une seule fois un coup d’oeil par la fenêtre, baie vitrée donnant pleine vue sur les vestiges d’hier, sur ce qu’il a amené avec lui ici, ce que j’ai autorisé, même encouragé à livrer. L’impression que tout ceci n’était qu’un souvenir ratissé, qu’une mémoire qui joue des tours, qu’un lot de confessions que j’ai pour la plupart imaginées, et le reste suffira à ce que j’occupe mes dix doigts entre le plateau à remplir, les assiettes à garnir. Mes orteils eux, trouvent mieux à faire que de suivre la trajectoire officielle, et s'enlacent amoureusement avec la terracotta bordant la galerie, résultant à un triple saut plongé digne des plus grandes fresques signées Ginny McGrath, circa les 28 dernières années. Si Isaac se réveille en sursaut, moi, je reste à plat ventre le temps de pouffer de rire, désolée à ses inquiétudes ayant brusqué le sommeil auquel il avait plus que droit. « Pas plus que d’habitude. » les cicatrices sur mes genoux, les brûlures sur mes bras, la foulure facile, la fracture répétée, il n’y avait pas une seule journée où je ne finissais pas plus ou moins blessée. Show must go on.
Qu’il s’excuse d’être resté assoupi aussi longtemps lorsque mon méfait passe d’étalé au sol à réaménagé dans la cuisine, j’esquisse un mouvement de tête de la négative. Pas le moins du monde choquée qu’il m’ait laissée le temps de reprendre mes esprits à l’abri des regards indiscrets. « T’en avais besoin Isy, y’a pas de soucis. » et à voir à quel point les cernes sous ses yeux ont doucement commencé à disparaître, à quel point son front n’est plus aussi contracté, et sa mâchoire le moindrement détendue, c’est un brin plus rassurée que je poursuis l’air de rien la cérémonie caféinée. Dégainant les tasses d’une main, filant vers la cafetière qui n’a pas encore terminé son travail, je me félicite d’avoir avalé ma bouchée d'orange et d’être toujours dos à lui lorsqu’il me demande si à mon tour, j’ai passé la nuit à la belle étoile. L’étiquette voudrait que j’affirme être rentrée à l’intérieur dès que le froid de la nuit avait eu raison de mes pauvres os glacés. La discrétion aurait suggéré que je change de sujet finement, que je m’assure que son repos ait été salvateur. La ruse aurait pu m’amener à enjoliver la vérité, à lui dire que l’insomnie s’était assurée que je ferme l’oeil une fois ou six, que je tourne en rond à travers les coussins, incapable de partir comme de rester. « C’est ce que mes courbatures suggèrent. » mais c’est le naturel qui affirme, qui jure avec mes habitudes prudes, mon chaste puriste. De retour à la table avec la carafe de café, je finis par me perdre dans mes pensées - finir comme commencer - cherchant du malaise où il n’y en a visiblement pas. Égoïste Ginny, de ramener le tout à toi, de juger tes comportements, de douter de tes intentions. Parce qu’au final, c’était lui qui avait besoin d’une épaule, c’était lui qui était venu chercher un peu de réconfort isolé, une dose de courage pour la suite, la sienne. Réalisant la gaffe avant l’heure, le Jensen me ramène à l’ordre en retirant sa tasse du sillage de mes maladresses, non sans poursuivre avec son propre plan de match pour la journée. « Je peux t'appeler un taxi, ou sinon ta voiture, ou je… j’ai pas pensé, je suis tellement désolée... » horrifiée, je sens mes yeux s’ouvrir (trop) grand alors que je me confonds en excuses, me lève d’un bond, file à la recherche de mon portable. Il est pris ici, il n’a ni moyen de transport ni liberté, et je joue les hôtes incertaines, à d’autres oui. Sur le chemin par contre, mes prunelles s’arrêtent sur un élément qui, additionné à son discours retentissant derrière moi, me fait office de rappel. « C’était ça, que j’avais oublié. » et elle oublie également dans l’élan le Uber de secours, la gamine, lorsqu’elle attrape l’assiette laissée pour compte sur le comptoir, et retrouve sa place face à l’infirmier. Sous ses yeux, je dépose ma plus grande fierté du matin, l’édition festive décorée d’une chandelle miraculeusement toujours allumée, ma version d’un petit-déjeuner complet et nutritif, mon fidèle et bien-aimé fairy bread. Les vermicelles de toutes les couleurs suffisent à rendre le tableau aussi mignon que pathétique pour la presque trentenaire que je personnifie. « J’me disais qu’il manquait une touche anniversaire à… tout ça. »
À tout quoi hum? Une longue gorgée de café suffit à ce que je reprenne, laissant au brun le temps d’observer le résultat de mon labeur d’un oeil dubitatif. « J'y vais les dimanches habituellement avec Noah. Avant les ateliers. » le marché fermier qui passait comme une activité en soit, une avant-midi complète à fouiller les stands pour ma part, et à pourchasser mon fils entre les différentes récoltes le reste du temps. « À chaque fois il repart fier comme un coq parce qu’on craque pour sa tête de gamin pourri et qu’on lui refile des légumes gratuits. » un sourire fin orne mes lèvres quand je pense à l’immense courgette qu’il avait ramenée à la maison la dernière fois, presque plus grosse que son visage, format extra extra large qui aurait pu finir en cinq styles de potage différents, mais qui avait finalement donné tout ce qu’elle avait pour devenir la décoration d’Halloween la plus intense du quartier - en plein mois de janvier.
Made by Neon Demon
Isaac Jensen
le coeur au bout des doigts
ÂGE : 34 ans (13.05.90) SURNOM : Isy STATUT : Penny est le soleil et l'amour de sa vie, l'évidence avec laquelle il écrit sa plus belle histoire et s'autorise à réaliser des rêves de bonheur (06.07.2021) MÉTIER : Infirmier au service des urgences, président de l'association Run for Judy, infirmier bénévole à la Croix Rouge et aux Flying Doctors, sapeur-pompier volontaire et surtout : papa comblé de Jude (13.09.2018), Maia (14.06.2022), Jack et Mila (01.08.2023) LOGEMENT : Penny et lui ont quitté Toowong en 2024 pour s'installer avec leurs enfants à Bayside et y créer leur cocon à l'image entière de leur amour POSTS : 28708 POINTS : 0
TW IN RP : dépression, anxiété, automutilation, idées suicidaires, tentative de suicide, mentions d'abandon d'enfant PETIT PLUS : Emménage à Brisbane en 2003 ∆ il exerce en qualité d'infirmier au st vincent's depuis 2006 puis est affecté aux urgences en 2013 ∆ une suite de blessures anéantit sa carrière de joueur de football australien en 2010 ∆ il attente à ses jours en mars 2018 et reprend le travail en septembre 2018 ∆ finaliste de ROA en 2020 ∆ il se soigne contre son anxio-dépression, après avoir longtemps refusé son diagnosticCODE COULEUR : Isy s'exprime en #9966ff ou slateblue RPs EN COURS :
Le soleil se lève sur un nouveau jour, teinté d'innovation, voué à encrer peut-être le commencement d'un nouveau chapitre à l'histoire de mon existence. Confus, en équilibre précaire entre l'embarras et la contenance, ce sont les prouesses maladroites de Ginny qui m'ancre dans ce nouveau quotidien. Machinal, je m'oeuvre à recoller les morceaux de ses étourderies tout en m'évertuant à inculquer du sens aux miennes. Un fin sourire étire mes lèvres alors qu'elle reconnaît que le sommeil prolongé dont j'ai fait la prestation au sein de son jardin, parmi ses herbes aromatiques et les plantations australiennes redondantes ; rictus qui se métamorphose vers le désolé lorsqu'elle évoque ses courbatures. Je passe une main sur mes yeux, chassant le voile d'incrédulité qui me saisit. J'étais incapable d'épingler le jour où j'avais succombé à Morphée pour un segment de continu si étendu. Je n'allais pas m'en plaindre, mais ce fait s'ajoutait irrésistiblement à l'hors-du-commun des dernières heures.
Valsant avec l'indécis, je relate le réel : ce rendez-vous familial auquel je n'échapperai pas, que j'appréhende secrètement, silencieusement. Mes yeux ricochent contre les pupilles noisette de mon interlocutrice, s'interrogent sur la perpétuité de nos confidences, sur la prolongation de cette bulle que nous avions créée, abrillés par un drap d'étoiles. Mes lèvres se pincent, retenant les confidences qui serrent déjà mon palpitant, augmentent imperceptiblement, pernicieusement, mon rythme cardiaque. Puis, l'effarement de Ginny quant à ma possible séquestration en son domicile happe mes craintes. Je m'apprête à la rassurer quand elle bifurque vers son comptoir et revient muni de ce qui a tout d'un fairy bread d'anniversaire.
« J’me disais qu’il manquait une touche anniversaire à… tout ça. » Les neurones qui font du deltaplane sur le « tout ça », les lèvres qui articulent déjà : « Tu l'as réservé pour l'occasion ? » Je ne jouissais pas de l'ego nécessaire à déduire que la jeune mère avait préparé un fairy bread uniquement pour ma personne et j'avais assez intégré son amour pour ce délice australien pour soupçonner qu'elle en produisait régulièrement. Pire, j'imaginais qu'il y ait une journée dans la semaine dédiée au fairy bread. Au fil des saisons, j'avais même su voir les vermicelles changer de couleur avec les festivités. Aujourd'hui, une bougie dont la flamme vacillait valeureusement hurlait célébration d'une nouvelle année. Une nouvelle année, dont l'écho rattrapait mes pensées au réveil, mon sentiment d'avoir franchi un nouveau cap, tranché une nouvelle mer. Une voie franchie, un nouveau chemin se dessinant. Une page qui se tourne, ou alors, n'est-ce qu'un protagoniste qui vient y ajouter des teintes salvatrices ?
« Il est génial, » je commente avant de rescaper le pain d'un bain de cire. « Il entre dans mon top de fairy bread concocté par Chef McGrath. » Mes souvenirs se bousculent dans le passé où la chambre 214 constituait son deuxième lieu de résidence, à cette journée de bonne nouvelle qui impliquait d'être soulignée par un crucial fairy bread menant à cette course poursuite en toute clandestinité dans les cuisines du centre hospitalier à la recherche d'ingrédients. « J'y vais les dimanches habituellement avec Noah. Avant les ateliers. » Je cille, arpente le présent, reviens à la réalité. Le marché fermier. « À chaque fois il repart fier comme un coq parce qu’on craque pour sa tête de gamin pourri et qu’on lui refile des légumes gratuits. » Un nouveau sourire apparaît sur mon visage alors que je me plais à imaginer ces scènes, m'y reconnais un peu des décennies plus tôt. « Je vois le genre, » prononce-je, faussement mystérieux. Deux parts de fairy bread se séparent, quelques chants d'oiseaux emplissent la cuisine. « Tu y vas, ce dimanche ? » J'ose, soulignant, subliminal, le fait que nous sommes dimanche. Mon cœur manque discrètement, distraitement, un battement, considérant la masse supplémentaire que je suggère. J'ai conscience que cet échange avec la jeune femme ne pourra pas durer éternellement, que les responsabilités de chacun nous rattraperont, ne serait-ce celle d'une tête blonde qui ne devrait pas tarder à retrouver sa maisonnée. Mes doigts tapotent ma tasse de café, à la recherche de réponses détenues uniquement par Ginny, l'esprit épris de dilemmes masochistes, de mauvaises habitudes tortionnaires.
Notre soirée relèvera-t-elle du tabou ou du crime commun inavoué ? L'effacerons-nous ou la conserverons-nous en base vers une nouvelle relation invoquant complicité et confiance ? Il me semblait si difficile de rejeter les discussions que nous avions entretenues des heures durant avec la nature et notre naturel en témoins magistraux. Serons-nous amenés à réitérer ? « Je pourrais t'offrir un œil d'insider sur une partie des vendeurs, si ça t'intéresse. Je fais partie de la grande famille des agriculteurs. » Je précise, soucieux d'ôter toute notion de précipitation, de délai. « A l'un de ces quatre qui te conviendra. » Puis je remonte la pendule de quelques minutes, annihile les frayeurs infondées : « Et je comptais marcher, aucune inquiétude à avoir sur le moyen de locomotion. »