Quoi qu’il puisse dire ou faire elle ne le laissera pas partir. Il va bien trop mal pour qu’elle le laisse partir sans garantie qu’il ne revienne. Elle a seulement besoin de savoir qu’il ira bien, qu’il ira mieux, et à l’instant c’est bien la dernière chose dont elle est certaine. "Il le faut, Charlie." Non, non, non. Ses doigts refusent et s’accrochent encore un peu plus au sien, sa seconde main vient entourer son bras. Non il ne le faut pas. Rien ne les oblige à quoi que ce soit. ”T'as besoin de stabilité, de réconfort et de t'éloigner du désespoir..." Oh, Tim … Toujours en train de penser à la blonde en première alors qu’il est en pleine crise. Il est au plus bas et incapable de faire passer ses besoins avant ceux du reste du monde. Elle a envie de lui crier qu’on se moque de ce dont elle a besoin, que cela ne fait aucune sorte d’importance parce que ce n’est pas à propos d’elle, là. C’est Tim. Le monde tourne autour de Tim, son cœur s’arrête quand Tim va mal. C’est pour Tim qu’elle vit, c’est Tim qui représente la stabilité et la réconfort, c’est lui même qui l’a éloigné du désespoir de la plus belle des manières. ”Je suis mauvais pour toi, là. Laisse moi partir avec mes démons, tu peux pas les vivre là. Je peux pas te faire ça." Ses mots brûlent et piquent, elle n’a pas la force de retenir ses larmes plus longtemps. Il pense faire ce qu’il y a de mieux pour tout le monde mais cela ne fonctionne pas. Ils ont déjà fait cette même erreur à de bien trop nombreuses reprises mais désormais c’est fini. Plus jamais. ”T’es un imbécile Tim. Tes démons sont mes démons.” Il est un imbécile parce qu’il n’a toujours pas compris ce dont elle a besoin et surtout de qui elle a besoin. Il est la seule constante qu’elle désire dans sa vie. ”Je peux les vivre. Et de toute façon je reste avec toi. Cette fois ci tu ne te débarrasseras pas de moi. On fait ça tous les deux, peu importe le temps que ça prendra.” Personne n’abandonne personne cette fois ci ni toutes les autres fois à venir.

Cette fois, il se sentait usé jusqu'à la moelle et il n'avait aucune idée de ce qu'il allait devenir. A l'heure actuelle, tout était flou, surtout sa vue et il avait beau essayer de garder les yeux ouverts, aucune image ne perçait ses iris bleutés. Tim avait besoin de temps, de reprendre son souffle et extérioriser ce mal qui le rongeait depuis plusieurs décennies désormais. Il avait toujours su que ce jour viendrait parce qu'il avait passé sa vie à être malheureux, lui, l'enfant mal aimé qui n'avait jamais pu avoir de modèles à suivre. Maintenant qu'il allait avoir un enfant, c'était trop à supporter pour lui, ce fichu patrimoine génétique le rendait pantelant et il aurait pouvoir s'arracher les veines pour ne plus avoir à exister, pas avec ses ascendants qui devaient bien rire de lui,peu importe où ils étaient à ce moment là. Le pire arrivait pour Decastel, il offrait la moitié de ce patrimoine à un enfant qui n'avait rien demandé et il se détestait pour cela, pour tout le reste aussi. Pour tous ces sentiments qui se mélangeaient dans son coeur et qui risquaient de faire exploser sa boîte crânienne sous peu. Charlie était là pourtant, elle restait fidèle au poste, elle qui avait fui par le passé. Cette fois, c'était elle qui l'en empêchait mais Timothy ne savait pas quoi dire, il ne savait juste plus quoi faire. Il était atterré et il sentait son bras s'accrocher au sien mais il tremblait encore. Son coeur ne battait plus aussi distinctement et il avait juste envie d'aller se terrer dans un placard, comme il le faisait quand il était enfant. Alors,ses yeux se tournèrent légèrement vers Charlie, perçants mais aussi emplis de douleurs. "Je veux... Je veux le faire tout seul, j'en ai vraiment besoin là, Charlie, s'il te plaît. Je sais que je te fais peur quand je suis comme ça mais je vais rien faire de destructeur, promis. J'ai juste besoin de me retrouver avec mes pensées, aller me perdre dans un placard et j'en ressortirai quand ce sera fini. Et je t'enverrai un message, promis." Il avait juste envie de disparaître durant quelques jours, se laisser aller à ce désespoir de ne plus rien savoir, de ne plus avoir de réponse sur la personne qu'il était et voir Freya, oui, c'était ce qu'il voulait à ce moment là. Ne plus être une plaie pour Charlie, elle l'avait déjà trop supporté et elle en souffrirait encore, par sa faute. "Je veux que t'ailles bien, Charlie. Je veux plus te faire de mal, laisse moi tenir cette promesse envers toi, je t'en supplie." Il pleurait encore en soutenant son regard aussi bleuté que le sien. Oui, il l'implorait de le laisser pourrir tout seul parce qu'il ne supportait pas l'idée de la voir pleurer à cause de lui... Encore une fois. Il en était mort à l'intérieur, encore et toujours.

La sentence tombe, irréfutable. Elle est de trop dans le tableau, la pièce rapportée qui n’aurait pas dû arriver aussi tôt. Quand les pas de Tim cessent enfin mais que ses muscles restent tout autant crispés et tremblant elle sait déjà que ce qu’il s’apprête à lui dire ne plaira à personne. Elle s’en rend davantage compte lorsque ses yeux croisent les siens et qu’ils n’ont rien de pétillant comme elle a pu les observer au début. Il y a si longtemps de ça. "Je veux... Je veux le faire tout seul, j'en ai vraiment besoin là, Charlie, s'il te plaît. Je sais que je te fais peur quand je suis comme ça mais je vais rien faire de destructeur, promis. J'ai juste besoin de me retrouver avec mes pensées, aller me perdre dans un placard et j'en ressortirai quand ce sera fini. Et je t'enverrai un message, promis." Toutes ses craintes et ses peurs prennent vie en un instant. Il leur donne forme et consistance, pose des mots dessus. Va-t-en. Tu n’es pas celle dont j’ai besoin. Alors oui, oui il lui fait peur. Ces moments là la terrorisent, ces moments là la gardent éveillée des heures durant dans l’appréhension de la prochaine crise. Prochaine crise dont elle pourrait ne pas avoir connaissance car ils ne vivent pas la même vie, parce qu’elle a choisi la première de l’éloigner d’elle et maintenant les conséquences en sont désastreuses. Elle perd ses yeux dans les siens et même si les larmes coulent doucement sur ses joues, elle arrive encore à en contrôler le flot. Elle veut son bien mais ne peut pas lutter éternellement contre lui. Qui est elle pour juger de ce qui est bon ou mauvais alors qu’elle ne le connait que depuis quelques mois ? "Je veux que t'ailles bien, Charlie. Je veux plus te faire de mal, laisse moi tenir cette promesse envers toi, je t'en supplie." Elle va bien, elle. Elle a été perdue mais désormais elle est de retour dans le troupeau, il n’a plus aucune raison de s’en faire pour qui que ce soit si ce n’est lui même. Il ne peut pas faire passer le bien être du monde entier avant le sien. Cela ne peut décemment pas fonctionner ainsi. Il doit être capable de recevoir à son tour. ”Ce n’est pas à propos de moi, là … Je te laisse mais t’as intérêt de m’envoyer ce message sinon je viendrai directement chez toi et tu sais que je ne rigole pas. T’as pas intérêt de faire de trucs stupides Tim, je te préviens. Et tu soignes cette main. Promets le moi.” C’est la seule promesse qu’elle veut entendre, pas celle selon laquelle il ne lui fera plus jamais de mal. Elle peut souffrir pour une éternité encore que cela n’aura pas autant d’importance à ses yeux que la santé du brun et son bien être. Ses doigts viennent chasser un instant les larmes de son visage avant qu’il ne soit rapidement noyé à nouveau. Elle l’a lâché mais elle attend qu’il lui promette encore ces quelques choses. Ce n’est qu’ensuite qu’elle pourra le laisser partir, la peur au ventre.

C'était si dur de vivre sur cette planète et Tim le ressentait plus que tout à ce moment là.Il en avait déjà vécu des sales moments pourtant, lorsque sa mère avait porté sa main sur lui, quand son géniteur avait prisses valises et ne s'était jamais retourné vers eux. Le jeune garçon qu'il avait été ne s'en remettait pas totalement cela dit et l'adulte qu'il était devenu se reprenait en pleine figure les plaies béantes qu'avaient laissé son passé. Timothy aurait voulu être moins vulnérable, plus à même de gérer la révélation que venait de lui faire Ariane mais il ne s'était jamais préparé à ce genre de discours. Dans son crâne, le soldat s'était convaincu que son père était décédé sur un champ de bataille quelconque, en héros, ce qui aurait expliqué qu'il n'avait jamais pu prendre des nouvelles des mômes qu'il avait laissés derrière. Le rêve était douloureux quand on venait de le détruire de la sorte: son soldat de géniteur n'en avait jamais rien eu à faire d'eux tous, ils n'avaient été que des coups d'essais, des gamins à laisser de côté parce qu'ils ne comptaient pas réellement. De tout ce qu'il avait pu envisager, Tim ne pouvait finalement pas vivre normalement en sachant cette délicate vérité. Son existence toute entière était remise en question et il ne se sentait pas fort face à tout cela, il voulait juste aller se terrer dans un vieux meuble, se recroqueviller là en espérant qu'on l'oublie. Ce ne serait pas le cas car des gens pensaient à lui, la présence de Charlie en cet instant rendait l'idée bel et bien vivante alors que Decastel se détachait d'elle, faisant fuir ses larmes le mieux qu'il pouvait. Tout cela était vain, même ses mots car rien ne l'empêcherait de la blesser, elle. Sa sirène qui pleurait par sa faute et ce coeur qui se serrait parce qu'elle le quittait pour lui, pour répondre à sa requête, ce devait la tuer. A sa place, il aurait mal en tout cas mais il ne voulait pas qu'elle continue de le voir ainsi, pas tant qu'il n'aurait pas mis de côté son ego meurtri pour reprendre vie, peu à peu. Il finit par s'approcher d'elle légèrement, juste quelques secondes avant de déposer un petit baiser sur sa tempe, s'enfuyant bien vite après avoir murmuré quelques mots. "Je te le promets." Cela ne valait pas grand chose parce que Tim n'avait aucune idée de la manière dont il allait agir maintenant, pas quand il s'apprêtait à vivre la crise de toute une existence, celle qui pourrait le terrasser mais il voulait la vivre, seul. Ne plus embêter personne. Et pourtant, il espérait qu'on finirait par le cueillir, le remettre sur ses pieds parce qu'il n'y arriverait pas. Il n'y arrivait plus. C'était ce qu'il se disait au moment de fuir la belle Villanelle, la mort dans l'âme parce qu'elle avait mal pour lui.A cause de lui. Et lui, encore, en souffrait d'être devenu cet homme là. D'être son géniteur, en somme.

Elle reste immobile face à la scène qui se déroule sous ses yeux, la scène dont elle est l’un des deux personnages principaux quand bien même elle s’en sent étrangère. Rien qu’elle ne puisse faire ou dire ne saurait aider Tim, elle n’est qu’un fantôme. Il pense l’aider mais c’est en l’éloignant ainsi de son coeur qu’il lui fait le plus de mal. Un jour elle lui promettra de lui être toujours fidèle dans la joie et dans la douleur, dans la santé et dans la maladie, de l’aimer et de l’honorer tous les jours de sa vie. Et cette promesse à venir est rétroactive. Elle l’a toujours été. Aujourd’hui encore elle fait de son mieux sans être capable de plus, laisse ses bras retomber lourdement au sol quand le torse de Tim s’est trop éloigné d’elle pour qu’elle puisse s’y agripper. La blonde n’a plus été capable de contrôler le flot de ses larmes au moment où il l’a embrassé, ce qui sonnait comme les pires adieux qu’ils n’avaient jamais eu à se faire. Impossible d’ajouter quoi que ce soit, de faire un seul geste non plus. Elle reste seulement au milieu de la foule à espérer qu’il attend le dernier moment pour se retourner, pour finalement accepter qu’elle reste près de lui dans cette épreuve. Cependant sa forme se perd dans la foule et ne revient plus. Elle a réellement échoué.

Un passant lui bouscule l’épaule et elle manque de tomber mais au moins cela a-t-il pour effet de la ramener sur Terre. Ses yeux se concentrent à nouveau sur le sol, sur la rue. Elle tente de sécher ses larmes du dos de la main avant que ses pas ne la ramènent naturellement vers le bar sans que l’envie de faire quoi que ce soit ne soit plus présente. Son esprit ne cesse de la tourmenter, lui martelant qu’elle aurait dû le suivre. Ils se sont promis de ne plus croire leurs mots mais leurs corps. Ses mots disaient une chose, son corps tremblant et blessé en disait une autre. Il avait besoin d’elle. Il avait besoin d’elle à ce moment là plus que jamais dans sa vie et elle l’a laissé tombé. Ses épaules se heurtent à de nombreuses autres sans qu’elle ne prenne la peine de s’arrêter ou de s’excuser, ce qu’elle aurait naturellement fait en temps normal. Il n’y a plus rien de normal désormais.
Ses paumes de mains lui servent une dernière fois à sécher les larmes de son visage et tenter de faire bonne impression - quoi que ce soit qui ne soit pas pire qu’en ce moment en tout cas. Un sourire triste et faux naît sur son visage en même temps qu’elle traverse le bar pour retourner de l’autre côté du comptoir, là où même Decklan n’ose pas lui reprocher d’être partie sans prévenir. La présence constante d’Ariane et Levi la soulage autant qu’elle l’effraye. ”You haven’t burn anything down ? Or anyone ?” La blonde tente, rigole un instant à sa propre blague, s’affaire à ramasser les bouts de verre pour les oublier dans la poubelle. Quand elle en aura terminé avec ça, elle se décidera à laver tous les verres et quand ils seront tous comme neufs alors elle se trouvera bien une nouvelle occupation tant vitale qu’inutile. N’importe quoi pour penser à autre chose et ne pas laisser ses larmes devenir incontrôlables à nouveau.

Charlie revient un peu après que j'ai gagné un concours de shots avec Matt - il dira le contraire, il postera même sur Facebook pour annoncer qu'il est un champion de beerpong incontesté malgré son ego qui prendra jamais la défaite cuisante que je lui ait affligée quand personne ne nous regardait. La bière ingérée a réussi à calmer un peu les dizaines de milliers de milliards de questions que j'ai encore en suspens. Et qui le resteront, tant que Tim aura besoin de temps pour s'acclimater à tout ça. Sa tactique à lui c'est de s'isoler du bar, la mienne, de m'isoler de ce qui se passe dans ma tête. On se ressemble pas mal, finalement.  

”You haven’t burn anything down ? Or anyone ?” « Not yet. » que je chante, suivant son infinité de mouvements des yeux, elle qui est incapable de rester en place. Et je le vois bien, qu'elle s'occupe, qu'elle rage, qu'elle a les yeux encore rougis, bouffis. Matt va flipper s'il la voit, papa poule en puissance, l'accumulation des verres propres mais qu'elle traite comme des sales qui diminue à vue d'oeil.

J'arrache par habitude la chapeau de Levi de sa tête, le pose savamment sur la mienne, et file de mon côté, passer à toutes les tables en périphérie, ramasser les fonds de bière, fonds de bouteilles et autres fonds de cocktails sales. La terrasse y passe aussi, entre mes nombreux allers et retours, et bien vite, Charlie se retrouve avec une multitude de vaisselle à nettoyer, de quoi lui donner une poignée de minutes de répit. Côté sans alcool la réserve de McGrath est à chier, je dévalise donc le comptoir à pâtisseries avec lesquelles je serais probablement tout de même partie à la seconde où Levi et moi on serait retournés sur le bateau. Jamais mes yeux ne se plantent dans ceux de Charlie, je la cherche pas, mais je glisse tout de même l'assiette d'overdose de sucre sous son nez, question qu'à travers son ménage compulsif elle prenne le temps de se gaver si ça peut lui apporter le moindre réconfort.

Ariane plante éhontément son regard dans le tien, à la recherche des termes que tu ne laisses encore filer. Elle décrypte, miroirs vers ton âme, que tu es en paix avec le choix que tu viens de poser, que tu as la conscience tranquille d'avoir rompu tout contact avec Asher. Ce sera sans doute awkward de le croiser au bar, mais tu ne comptes certainement pas te priver du lieu parce qu'un pseudo ex y est salarié. Puis, pour ta part, tu es persuadé que tu vas tourner rapidement la page. Par ailleurs, ce ne sera que de cette manière que tu pourras entrevoir le beau de cette relation : quand le révolu l'étreindra.

« I like him. He's real. » « Even if you didn't approve... » Tu la singes silencieusement, provocateur, puis observes Charlie écouter son conseil vers la poursuite de son bien-aimé. L'abandon de poste de Red, tu te positionnes derrière le bar afin de servir quelques boissons en son lieu et remplir généreusement ta tasse de café noir. Ariane, pour sa part, défie Matt à un concours de shots.

”You haven’t burn anything down ? Or anyone ?” La barmaid interroge en guise de salut. Ses yeux sont bouffis, rougis, son esprit cherche désespérément à s'occuper. Tu sentirais presque son cœur si gros dans sa poitrine qu'il menace d'imploser, brisant sa cage thoracique au passage et se crevant encore plus sur les morceaux de côtes en perdition. « Not yet. » Parker chantonne, avant de te dérober ton chapeau - non sans t'arracher des cheveux au passage -. Tu grognes, la suis du regard, te l'imagines partir investiguer les coulisses du bar à la recherche de vivres. Tu t'approches doucement de Charlie, l'étreint avec une délicatesse qui t'est rarissime avant de lui susurrer à l'oreille, déposant un baiser sur sa joue, en référence aux échanges de textos que vous aviez eus précédemment : « Told you, you were not alone. You got true friends. » Et un plateau de pâtisseries apparaît sous ses yeux. Tu laisses Charlie a ses butes de vaisselle aux aspects de vital - rapatriées par Ariane - et retrouves cette dernière. « Are we off? » Tu t'enquiers, beaucoup d'éléments en jeu. Ça te paraît de plus en plus banal de devoir jongler avec tant de surprises, mais ici, l'on parle tout de même de la soirée où ton épouse a rencontré un demi-frère qui, manifestement, a mis enceinte l'employée de ton cousin et petite copine de Kane.