- Rien, dit Luc nerveusement. C’est seulement un peu angoissant d’être tout de temps sur ses gardes pour des choses fondamentales de son mode de vie. C’est pas contre vous. Si vous aviez voulu me refaire le portrait...

Il ne termina même pas sa phrase et envisagea l’idée de fumer une seconde clope sur le cadavre de la précédente, mais une légère nausée lui prenait la gorge, alors il s’abstint. En effet, il pensait repérer le danger quand il s’approchait, et il savait le faire. Il était une proie facile. Voilà pourquoi il prenait toutes les précautions nécessaires, voir tant que ça pouvait paraître absurde. Il s’habillait de la manière la plus passe-partout possible, rentrait toujours en transport en commun après les shows, au cas où on ai vu son visage. Les glandus du bar avaient dû le voir en habit à l’arrière de la boîte, alors qu’il fumait avec d’autres Drags, juste avant le spectacle. Il le dit à Amos d’un air morose. Au même moment, les types du bar sortaient avec fracas en manquant de renverser la poubelle à la sortie. Le jeune homme eut droit à une dernière remarque d’Amos et il le vit soulever son tee-shirt de manière absurde mais explicable avant de tourner les talons et de s’en aller.

La rue était froide et impersonnelle, calme, silencieuse. Il tituba un peu en longeant les murs de la ville en direction de son appartement tout en jurant à voix basse. Il se retourna une dernière fois avant de tourner le coin, mais il n’y avait plus personne devant le bar.

Son chez-lui l’attendait, inchangé et légèrement lugubre. Dans l’entrée, il se prit les pieds dans les cadavres de bouteilles qui traînaient. Il ne prit même pas le temps d’enlever son manteau et tomba comme un mort sur le canapé, pour ne s’endormir que plusieurs heures plus tard.