| (Zeke) I need a hero to save me, now. |
| | (#)Dim 17 Mai 2020 - 12:37 | |
| Zeke avait beau être un homme solitaire, ce n'était pas tellement par choix. Il aimait les gens, pas leurs réactions puériles et mauvaises mais leur compagnie n'était jamais refusée. Clairement, le grand brun adorait les enfants car ils étaient incapable d'être foncièrement mauvais: ils avaient encore cette naïveté que Blythe n'avait jamais franchement perdu de son côté et cette soif d'apprendre qui était son quotidien depuis des décennies. Les enfants lui rendaient ben en règle générale car ils lui posaient tout un tas de questions sur son métier, sa vie à la ferme, son travail du bois. Alors, entendre Eve suggérer qu'un de ses enfants puisse s'intéresser de près à ce qu'il avait sur son terrain le fit sourire. "On va s'entendre, lui et moi." Zeke était un amoureux de la nature, qui s'émerveillait du moindre arbre ou du moindre oiseau qui passait non loin de lui. Il constatait à quel point le monde était beau sur sa petite propriété, loin de l'insalubrité de la ville alors, il ne pourrait que partager cette passion avec un petit garçon et tous les chiens du monde qui le suivraient. "Je sais pas si je le suis." Il ne se posait pas tant de questions sur sa personnalité, Zeke, il essayait juste d'être la meilleure version de lui-même, si elle existait vraiment. Ezechiel ne pouvait pas franchement le savoir, lui qui était toujours seul et paraissait sans la moindre attache. "C'est l'instinct protecteur, oui, mais c'est pas de la surveillance. C'est de l'amour et de la loyauté." Une qualité qu'il appréciait tant chez ses congénères à quatre pattes car les humains ne la possédaient pas tous, assurément, une abomination aux yeux du brun. "On va éviter le plâtre aussi, alors." Elle se releva avec son aide et Zeke l'écouta parler de son poids plume, souriant alors qu'elle marchait à cloche pied, le jeune homme s'autorisant finalement à la soulever pour l'amener vers le premier chenil qui nécessitait des réparations. Il sortit un sac de nourriture après avoir déposé Eve sur un tronc d'arbre. Tout de suite, les chiens se dirigèrent vers elle. Zeke, lui, reçut la visite du loup solitaire de la bande, celui que personne n'appréciait et qui était tout le temps tout seul, son préféré, bien évidemment. "J'en vois de temps en temps mais j'ai pas été témoin de ça. Je vois que t'es aimée ici." Lui flatta le chien en lui offrant un peu de nourriture, s'armant finalement de quelques outils pour retaper une portion de grillage abîmé. |
| | | | (#)Mer 20 Mai 2020 - 15:53 | |
| Une ferme. Cette perspective me rendait toute joyeuse. Car ayant grandi enfermée dans un orphelinat, vivre au grand air était une sorte de rêve. Seulement, les finances ont commencé à pêcher, ensuite la mort de Jacob m’a plongé dans une profonde léthargie dont je ne sors que maintenant. Deux ans et demi après, c’est plutôt pas mal. Recommencer à sortir, essayer de vivre un peu. Sans grande conviction. Je parle donc de J.J à Zeke, mon petit dernier que je couvais beaucoup trop. "On va s'entendre, lui et moi." J’ai un petit sourire à cette évocation. Car j’imaginai mon tout petit aux côtés du géant brun. « Je n’en doute pas. Juste il faudra faire un peu attention. Dû à son souci de santé mais tu verras, il est adorable. » Je sais bien que je ne suis pas très objective concernant mes enfants. Lisa qui est beaucoup trop mature pour son âge, les épreuves l’ayant faites grandir trop vite. Et J.J qui reste bébé malgré tout. Trop petit pour son âge dû au fait que cela soit un grand prématuré et qui touche à tout. Un jour, il perdra sa main. Comme j’ai failli perdre mon doigt un nombre incalculable de fois. "Je sais pas si je le suis." Je viens hausser les épaules comme l’air de dire « nous verrons ». Car dans le fond, nous ne savons pas réellement ce que le futur peut nous réserver. Si cela se trouve, nous ne nous entendrons pas ou alors nous deviendrons très amis. Je voulais voir le positif plutôt que le négatif. J’en ai trop eu dans ma vie pour continuer à vivre avec cette ombre qui planait sur moi. Elle semble endormie aujourd’hui, ce qui n’était pas plus mal. "C'est l'instinct protecteur, oui, mais c'est pas de la surveillance. C'est de l'amour et de la loyauté." Je viens avoir un léger sourire, très léger à cette possibilité. « On dirait que tu es en train de me décrire. Sans doute étais-je un chien dans une autre vie ? » Je viens lever le nez pour réfléchir avant de m’évader dans mes pensées comme d’habitude. Quelle sorte de chiens étais-je ? Un loup ? Non pas assez téméraire. Je devais être un petit chien, un carlin. Oui, sans aucun doute un carlin. Le chien dépendant, très petit et très canapé. « Toi je suis certaine que si tu étais un chien, tu serais un cane corso. » Je viens dodeliner de la tête avant de me rappeler que les australiens ne connaissaient sans doute pas cette race. « C’est un chien très très grand. C’est corse. J’ai vécu en France un moment et des amis en avaient un. Et le chien debout, il me dépasse. » Je viens rire sans me rendre compte que j’étais encore partie très loin. Dans un de mes délires comme d’habitude. "On va éviter le plâtre aussi, alors." Je vins lui sourire avant de me remettre debout pour me cramponner à son bras. Tu la sens venir l’attelle ? Tu la sens ? Oui, je la sens. Malgré la glace, la chose était encore douloureuse. Et j’avais du mal à poser la cheville. Zeke dut le sentir car il vint me soulever de terre pour aller m’emmener jusqu’aux chiens. et je me laissais faire. Sur mon tronc d’arbre, je servais à rien. Je pris donc des croquettes avant de me pencher pour ramasser quelques gamelles avant qu’il ne lâche les fauves. Et que les chiens, contents de me revoir me sautent dessus au point de faire tomber par terre. J’avais l’habitude donc je les caressais avec un sourire aux lèvres. "J'en vois de temps en temps mais j'ai pas été témoin de ça. Je vois que t'es aimée ici." Je vins relever la tête vers Zeke. Pour le regarder alors que les morfales me volaient les croquettes. « Ouais, je viens assez souvent. Et j’ai un bon contact avec les animaux. Plus qu’avec les humains. » Une fois que je n’eus plus à manger, les chiens vinrent se coucher et je me mis à tirer ma carcasse jusqu’à Zeke avant de m’asseoir face à lui et de tendre la main. « Je dois faire quoi ? » Je l’interrogeai du regard avec un sourire, en agitant mes doigts pour l’inviter à me dire quoi faire. |
| | | | (#)Jeu 21 Mai 2020 - 14:50 | |
| Il ne recevait pas vraiment de visiteurs, Zeke, qui viendrait jusqu'à la ferme, le néant complet? Personne n'était suffisamment fou pour changer d'air et venir habiter dans un coin aussi loin de tout. Pourtant, Eve avait l'air de considérer la question, comme quoi tout le monde n'était pas à mettre dans le même panier. Il y avait encore quelques individus qui aspiraient à une vie saine, loin des bruits constants de la ville pour profiter pleinement du silence environnant. Blythe, lui, de toute évidence, n'était pas prêt à abandonner son coin d'herbe et ses animaux, même s'il captait fréquemment des regards moroses chez les citadins qu'il côtoyait avec son travail à la scierie. On ne le comprenait pas, lui et son air renfrogné, lui et son incapacité à formuler plus de trois phrases d'affilée. L'art de la conversation ne lui seyait tout simplement pas et Ezechiel avait vite lâché l'affaire en voyant les autres faire, ils ne s'arrêtaient jamais devant rien, toujours prêts à se perdre dans des discussions à rallonge. Il n'y avait peut être qu'avec les enfants que Zeke pouvait y arriver parce qu'il devait encore saisir leur esprit innocent contrairement aux adultes autour d'eux. "Promis, je fais toujours attention." Il ne désirait clairement pas mettre en danger un enfant, même si Zeke n'osait pas franchement interroger Eve sur la teneur de sa maladie. Il considérait que ce n'était pas ses affaires et si elle voulait parler, elle aurait toujours l'opportunité de le faire à n'importe quel moment car Blythe ne la jugerait jamais. "Peut être. Je pense que j'aurais plus été un arbre. C'est plus silencieux qu'un chien." Il n'était effectivement jamais bavard, en témoignait la suite de la non discussion qui eut lieu puisque le brun se contenta de faire quitter terre à la jeune femme pour l'entraîner au milieu des cages de fortune. Bien vite, des chiens entourèrent la blonde alors que Zeke s'intéressait au seul qui avait osé s'approcher de lui, le vilain petit canard de la bande. Bien vite, il trouva ses outils et commença à remettre en état le grillage avec plus ou moins de réussite selon l'état de dégradation du métal. "Moi aussi. Tiens, tu peux découper les coins abîmés." Puisqu'il était en train d'accrocher des nouveaux éléments de grillage ça et là, clairement très à l'aise dans ce genre de travaux manuels, plus que dans des conversations à rallonge. "Si tu vis dans une ferme, tu pourras tous les adopter." Et ils seraient heureux d'être en dehors d'une cage, c'était en tout cas ce que Zeke désirait pour eux, plus que tout au monde. |
| | | | (#)Sam 23 Mai 2020 - 13:18 | |
| J’étais trop sensible. Déjà toute petite, j’avais cette tendance à pleurer pour un rien. et ce trait de ma personnalité -très dérangeant- s’est accentué après mes deux grossesses. Je ne voulais pas d’autres enfants car en avoir deux était assez bien. Un garçon et une fille. Mes deux grossesses n’ont pas été trop éprouvantes, à part l’accouchement prématuré de J.J, mais je ne voulais pas d’autres enfants. Deux, c’est bien. Trois c’est trop. surtout si le troisième prétendant suivrait le cheminement des deux précédents. Donc quand j’entrevois la possibilité de m’isoler comme une vieille fille dans une ferme, je dis oui. J’ai tendance à m’imaginer vivre dans Rox et Rouky, adopter un renard et finir comme la vieille femme avec un ami sous mon porche, mes cheveux gris à faire du tricot. Je parle donc mon nouvel ami -oui car le mec me sauve la vie, est compréhensif et ne s’est pas barré devant ma maladresse, c’est mon ami- du fait que mes enfants risquaient de lui tourner autour. Lisa moins. Elle est plus farouche et ne fait pas confiance facilement. Tempérament tenu de son père. Alors que J.J était encore petit et avait clairement tous les aspects de mon caractère. "Promis, je fais toujours attention." La maladie de J.J. L’ultime coup de glas après une vie bien merdique. Des parents qui m’abandonnent, une adoption qui ne se fait pas, un mec qui se barre après une grossesse ? Toujours pas assez voyons. Une fillette en bonne santé mais passionnée par les insectes, un mari militaire, une grossesse imprévue -encore- et enfin la mort dudit mari. On ajoute à ça, la maladie du cadet ainsi qu’une agoraphobie pénible et difficile à soigner. On lève les deux pouces et on dit merci Jacky. Encore une fois, je constate que je suis partie trop loin. Si bien que la voix grave de Zeke me ramène à la réalité. Sa voix. Elle fera des merveilles avec les enfants. Et j’espérai qu’il en aurait. Si les imbéciles se reproduisent, pourquoi pas nous ? Bon, moi c’est fait. Deux fois. Mais il avait l’air vraiment… Le mot me chatouille l’esprit. Pur. Je dirai pur. Aucune méchanceté, aucun calcul. "Peut être. Je pense que j'aurais plus été un arbre. C'est plus silencieux qu'un chien." Je dodeline de la tête alors que je l’imagine en arbre. « Un peu comme un Ent. Je vais t’appeler Sylvebarbe. » Le retour des surnoms ridicules. Bonjour. Ou comment mettre quelqu’un mal à l’aise à la vitesse de l’éclair. « C’est dans le seigneur des anneaux. Ce sont des grands arbres qui parlent pas beaucoup et qui méditent souvent sur le sens profond de la vie. » Une sorte de Dumbledore mais version arbre. Sans Rogue pour venir les assassiner effectivement. Quoiqu’il y a Saroumane. That bitch. Je me retrouve face à lui avec la jambe tendue alors qu’un chien vient manger mes cheveux. Un signe d’affection. "Moi aussi. Tiens, tu peux découper les coins abîmés." Je hoche la tête. Chef, oui chef. Je prends la pince pour faire ce que le monsieur a dit. En priant pour ne pas me blesser et ne pas ressembler à cette cruche de Bella dans Twilight qui pisse le sang avec une simple coupure. Abrutie. "Si tu vis dans une ferme, tu pourras tous les adopter." Je me tourne pour regarder les animaux autour de moi. Il n’avait pas tout à fait tort. « Je… » Viens masser le sommet de mon crâne. Signe que j’allais devoir parler de ma vie. Et ce n’était pas très cool de parler de ma vie. J’ai un forfait pour les choses tristes. Sans cesse à me demander ce que serait la prochaine connerie à me tomber sur le coin du nez. J’allais sans doute retomber amoureuse d’un mec qui s’en foutrait de moi. Pour changer tiens. « Je suis toute seule. » Et j’ai ma conscience qui tousse et s’amenuise petit à petit. « Deux enfants, deux emplois et une potentielle ferme à rénover. Je doute avoir le temps pour plus de trois ou quatre chiens. Je pense que trois, c’est bien. Un pour chacun d’entre nous. Lisa a ses insectes, Jacob a une passion pour les lapins et j’ai toujours eu un chat. Déjà petite, quand j’étais… » A l’orphelinat. Allez dis-le. Courage. « En Allemagne, j’avais un chat tout le temps avec moi. Et je pense en reprendre un. En plus du cochon évidemment. Mais j’aimerai bien tous les adopter. » Crac, crac fait le grillage qu’on coupe. « Seulement je doute sérieusement en avoir le temps. » A moins qu’on m’aide mais encore faudrait-il que je la demande cette fichue aide. |
| | | | (#)Sam 23 Mai 2020 - 13:58 | |
| Il ne faisait plus spécialement attention à l'évolution du monde autour de lui, trop de complications, trop d'emmerdements et Zeke, lui, aimait se la jouer homme paisible dans son coin de verdure. Il devait sûrement avoir la vie la plus triste de l'univers aux yeux d'un très grand nombre de personnes car il ne buvait pas une goutte d'alcool, n'allait en ville que pour le travail et de manière générale, il n'était jamais allé à une soirée. Oui, à son âge, on pouvait s'inquiéter mais Ezechiel n'avait jamais eu des envies communes: on le voyait bien plus aisément aller taper sur des rondins de bois en plein soleil, ce qui ne lui demandait aucune réelle réflexion sur le sens de sa vie. Autant dire qu'il n'était pas un grand philosophe vu le peu de questions qu'il arrivait encore à se poser, du moment qu'on ne venait pas le déranger, Blythe ne cherchait pas plus de noises à autrui. Pourtant, il savait qu'un jour ou l'autre, il devrait s'échapper de sa ferme, trouver de quoi s'épanouir qui ne fut pas un meuble à construire ou à un animal à nourrir. On lui demandait forcément l'impossible puisque Zeke ne comprenait rien à ce qui l'entourait: la preuve, il n'avait pas saisi une bribe de ce que la jeune femme avait annoncé ensuite. Un ent? Seigneur des anneaux? Elle parlait clairement à l'oreille d'un sourd ou d'un homme qui ne savait pas lire mais cela, Eve n'avait aucun moyen tangible de le savoir et ce ne serait pas Zeke qui oserait lui dire quand il s'agissait de son plus grand traumatisme enfantin. "Le seigneur de...? Connais pas ça." Comme toutes les autres références à des sagas cultes, Ezechiel n'en avait jamais entendu parler, la tristesse absolue mais au delà de ses difficultés à lire, il n'aimait pas plus se poser devant une télévision pour apprécier le cinéma. Alors, c'était difficile de se mettre à jour sur tout ce qu'il avait raté, il ne s'en inquiétait pas pour autant en rafistolant des bouts de grillage, observant Zimmer en coin pour vérifier qu'elle ne se coupe pas un doigt dans l'affaire, on n'était jamais trop prudent. "Je pourrais filer un coup de main, t'inquiète pas. J'ai juste deux job et des chiens, mais autrement, mon temps est assez extensible." Car il n'avait pas la moindre vie, douce vérité qui faisait mal à son organe cardiaque sans qu'il ne le réalise. "Tu me diras ce que tu vas faire." Puisque lui n'allait absolument rien faire et continuer sa morne vie sans rechigner. Fin de l'histoire. |
| | | | (#)Sam 23 Mai 2020 - 21:51 | |
| Le calme que générait Zeke me convenait. Généralement, la présence des hommes me mettait mal à l’aise. Mais pour une fois depuis deux ans et demi, je me sentais apaisée en la présence d’un étranger. Sans doute mon psy avait-il raison en fin de compte ? Il fallait savoir s’entourer de bonnes personnes. Je n’ai jamais été d’un naturel curieux concernant les gens, ni prompte à juger car je sais tout le mal que cela peut faire. Mais plus j’avançai dans cette discussion avec Zeke, plus je me surprenais à adhérer à l’idée de vivre à la campagne et aux côtés d’un homme que je ne connais qu’à peine. Qui me disait que ce n’était pas un maniaque ou autre ? Son regard. Il n’y avait pas une once de calcul, pas une once de méchanceté dans son regard si noir. Nous étions pourtant irrémédiablement opposés l’un et l’autre. Moi, très pâle, très blonde, très petite avec les yeux clairs. Lui immense, cheveux noirs, yeux noirs et la peau dorée par un bronzage caractéristique de l’Australien type. Vu son inclination à me porter, je dirai cependant qu’il échappe à cette règle du non tactile. Je souffrais assez de ce manque de contact aussi infime soit-il avec un être humain. Aucun homme n’avait apprécié mon toucher et je commençai à croire que la malédiction est bien réelle. Alors que nous évoquons la possibilité d’un nous dans une autre enveloppe qu’un être humain, je constate une certaine gêne dans les propos de l’Australien. "Le seigneur de...? Connais pas ça." Je ne lui tenais pas rigueur et vint même à lui sourire. « Oh c’est une histoire bien longue. Mais en gros, c’est l’histoire de deux petits hommes qui vont traverser avec des elfes, des nains et hommes accompagné le tout d’un grand sorcier avec un bâton magique pour aller jeter un anneau dans un volcan. Et les Ent, ce sont des arbres qui parlent. » Je viens donc arrêter un moment pour venir essuyer les mains sur mes genoux et ôter la chaîne qui ne quittait jamais mon cou. Celle où trône mon alliance ainsi que les plaques militaires. « Voilà l’anneau. Il est particulier car il y a des inscriptions tout autour. Normalement, elles n’apparaissent que quand on le jette dans les flammes. C’est de l’elfique. » je viens déglutir avant de remettre la chaîne autour de mon cou. « Un anneau pour les gouverner tous. Un anneau pour les trouver. Un anneau pour les amener tous et dans les ténèbres les lier. » Je remets les plaques à leur place avant de reprendre ma pince et de faire comme si rien ne s’était produit. Comme si je n’avais pas ôté mon alliance pour lui montrer. Me doutant que de toute manière, il n’y avait sans doute pas faire attention. Ma main se met à trembler cependant alors que je dois redoubler d’effort sur ma tâche. "Je pourrais filer un coup de main, t'inquiète pas. J'ai juste deux job et des chiens, mais autrement, mon temps est assez extensible." Je n’osai lever le regard vers lui pour inspirer profondément. « C’est gentil. Vraiment. On se connait à peine et tu me proposes ton aide. Les gens d’ici ne sont pas aussi chaleureux. » Je viens couper le grillage malgré une main défaillante, contrecoup de l’émotion. « Tout comme c’est gentil de ne pas poser de question sur… les pères de mes enfants. » Les. Un mot pourrait me définir. 26 ans, des enfants de plusieurs pères. Traînée. Tu me diras ce que tu vas faire." Je vins l’interroger du regard avant de soupirer. « Déjà je vais t’inviter à dîner. Le soir on mange des tapas avec les enfants. Si ça te dit bien sûr. Ça sera pour te remercier de m’avoir sauvée et de m’avoir donnée cette idée. » Ma main vacante vient se poser sur le bras du jeune homme qui s’affairait en face de moi, consciente que le geste pourrait être mal interprétée. « Merci Zeke. Vraiment. » Je vins sourire avant de m’empourprer à cause de cette foutue timidité pour me ressaisir alors qu’un chiot vint lécher mon visage et qu’un rire sortit de ma gorge. Un vrai rire. |
| | | | (#)Sam 23 Mai 2020 - 22:24 | |
| Forcément, Zeke ne comprit pas un traître mot de ce que sa camarade essayait de lui raconter. Le pauvre n'était pas au fait des dernières nouveautés dans le milieu de la science fiction... Non, il n'était même pas au fait du moindre détail de manière générale sur une trilogie qui existait depuis des décennies, voire des siècles pour les vrais adeptes. Pouvait-on être plus triste que le grand brun? En tout cas, Eve avait l'air de faire partie de cette catégorie de personnes qui trouvaient des passions dans les arts les hors de portée pour Ezechiel, pas parce qu'il était idiot, même si une bonne partie de la population devait le définir ainsi mais parce qu'il avait du mal à se détacher de son quotidien. Cela faisait déjà tant d'années que Blythe s'était arrêté de rêver, à croire qu'il avait vieilli d'un seul coup et qu'il était passé d'une carapace d'enfant à celle d'un vieux sage. Il était peut être devenu Gandalf par la force des choses, si seulement il savait qui était cette personne. Là, Zeke avait juste son regard pointé vers le collier d'Eve et il tâchait d'enregistrer ces histoires de nains et d'arbres qui parlaient, il était incroyablement décontenancé. "C'est une vraie histoire? Je connais Boucle d'Or de nom, mais pas ce truc avec les arbres et le vieux..." Entre autres, parce qu'on lui avait parlé d'elfes et là, il n'avait pas suffisamment consommé de résines de pin pour s'interroger sur l'identité de ces individus. "T'es militaire?" Il demandait, sans vouloir faire preuve de curiosité mais parce qu'il avait bien failli s'engager lui même quand il n'en pouvait plus de l'école et du regard des autres, avant de se raviser parce qu'il n'était pas fait pour la violence, Zeke. Non, lui, il était fait pour réparer les objets et les gens qu'il pouvait toucher, un homme au grand coeur qui ne savait pas l'utiliser le moins du monde, un comble incroyable. "Tout le monde a un passé. Enfin, pas moi, mais tous les autres et c'est pas à moi de juger ça. Ou de questionner." Il écoutait ce qu'on voulait bien lui confesser mais le grand fermier n'en faisait jamais trop, il n'aimait pas cela de toute façon, s'immiscer dans la vie des gens et ce, même s'il les appréciait. "Je veux pas perturber tes enfants. Ou ta vie de famille, de manière générale." Il était tout de suite gêné, Ezechiel parce qu'on ne l'avait jamais invité à dîner et qu'il ne connaissait pas les codes, pas plus qu'il ne saisissait l'embarras de la blonde qui le tenait par le bras. Il n'était pas dérangé, bien au contraire, relâchant son grillage pour se relever et observer Eve se faire attaquer par un chiot que Zeke attrapa vite entre ses bras pour jouer avec. "Tu vois, faut l'adopter. Il ferait rire qui autrement?" Pas lui, sûrement, car Zeke avait perdu la faculté de rire et sourire depuis trop longtemps. Il promenait ce regard triste sur le monde, seul et perdu, pourtant pas vaincu encore. "Tu devrais rire tout le temps." Aucune idée de ce qu'il essayait de communiquer comme message alors qu'il relâchait le chien et ramassait ses outils avant de s'asseoir sur un tronc d'arbre et s'adosser à son grillage tout neuf, une manière comme une autre d'en tester la solidité maintenant que l'affaire était forte, pouvant par la même occasion observer la blonde dans cet environnement détonnant. Elle était à sa place, ici. |
| | | | (#)Sam 23 Mai 2020 - 23:01 | |
| J’ai toujours été comme ça. Naïve. Je pensais que tout le monde pouvait être profondément bon et je ne détestais personne. Pas réellement. J’ai haï la guerre de m’avoir pris Jacob. Je lui en ai voulu de m’avoir abandonnée. De m’avoir laissée seule alors que j’étais enceinte. et sous le choc, j’ai mis la vie de mon fils en danger. Je sais que ma force vitale parviendra à s’amenuiser un jour. Je me sens de plus en plus fatiguée chaque jour. Je dois faire face à tellement de soucis que je ne pense pas qu’il y a des gens qui peuvent venir m’aider. Ce monde qui me fait peur, qui me paralyse. Je me retrouvais un peu parmi les animaux ou avec mes œuvres d’art. car je ne croisais pas de monde. Et je m’en portais mieux. Alors je me sentais en paix depuis bien longtemps et je tentais malgré moi de conter l’histoire du Seigneur des Anneaux à Zeke. Sauf que même pour moi qui l’ai lu il y a bien longtemps, ça demeurait confus. "C'est une vraie histoire? Je connais Boucle d'Or de nom, mais pas ce truc avec les arbres et le vieux..." Sa manière de résumer les choses me fait éclater de rire. Je viens hocher la tête. « Oui. Ça a été écrit par un vieux monsieur qui s’appelle Tolkien et qui est mort. Mais c’est une véritable histoire. » Je continue de rire gentiment avant de venir reprendre mon anneau que je remets autour de mon cou. "T'es militaire?" Sa question me désarçonne un peu et mon sourire vint mourir sur mes lèvres. Je déglutis avant de me sentir pâlir tandis que mes mains se mirent à trembler de plus belles. « Pas moi, non. » Je vins baisser la tête tristement. « Je pourrais te raconter mon histoire un jour si tu veux. Mais elle est triste et ses plaques… » Je vins poser ma main tout contre mon cœur. « je suis désolée, j’ai du mal à en parler. » Quelle nulle. Après deux ans et demie, je devrais être capable de le formuler correctement. Mon mari était militaire et il est mort. Je passe mon temps au cimetière à déposer des fleurs et des photos de nous. Je devrais donc être en mesure de l’annoncer à quelqu’un. Mais les mots se bloquent dans ma gorge et je voulais profiter d’encore un peu de légèreté entre Ezechiel et moi. "Tout le monde a un passé. Enfin, pas moi, mais tous les autres et c'est pas à moi de juger ça. Ou de questionner." Je restai un moment, les yeux suspendus dans le vide à réfléchir à ses paroles. « Les gens ne sont pas tous comme toi malheureusement. » Je soupirai pour venir finir mon travail, contente de tout ça et proposer au jeune homme de venir dîner. "Je veux pas perturber tes enfants. Ou ta vie de famille, de manière générale." Je vins poser ma main sur ma jambe avant de m’écarter un peu du grillage pour le laisser terminer. « Tu ne perturberas rien du tout. Allez viens, s’il te plaît. Pour me faire plaisir. Et tu verras mes chiens. » J’ai un petit sourire, consciente que l’argument des chiens était valable pour un enfant. Mais peut-être fonctionnerait-il sur Zeke ? Sans doute parce que je voulais le garder près de moi un peu plus. Partager sa sérénité. Le bébé Beagle vint m’attaquer et un rire franc s’échappa de ma gorge alors que je le caressai. Tu vois, faut l'adopter. Il ferait rire qui autrement?" Je vins soulever le bébé qui me lécha le bout du nez, m’arrachant un nouveau sourire alors que je le regardai. « C’est vrai tu veux venir à la maison ? Je connais un petit garçon qui t’aimerait tout de suite. » Le chiot se débattit et je le gardai près de moi avant de voir Zeke se poser près du grillage. Je vins me placer près de lui, toujours avec le chiot dans les bras. "Tu devrais rire tout le temps." Je pris une profonde inspiration avant de venir naturellement poser ma tête sur son épaule tandis que le chiot entreprit de me mâchouiller les doigts. Ma main vacante vint se poser sur celle de Zeke tandis que je levai les yeux vers lui. Le silence. Il était apaisant. « Viens, ce soir, chuchotai-je alors que mon pouce vint caresser sa paume, s’il te plaît. » Je ne préférai pas rebondir sur sa remarque. Car je ne pouvais plus rire autant. Car j’étais brisée. Triste. Seule. Mais pendant un bref instant, je voulais partager sa chaleur amicale. |
| | | | (#)Sam 23 Mai 2020 - 23:20 | |
| Il avait l'habitude de se sentir ridicule et heureusement d'ailleurs, sinon Zeke aurait arrêté de dormir la nuit de toute cette honte accumulée. Certes, le jeune homme ne dormait de base pas beaucoup, son cerveau toujours occupé par des centaines de pensées qui ne méritaient pas d'être traitées dans l'immédiat mais si on ajoutait à cela son embarras, Ezechiel serait depuis longtemps mort par manque de sommeil. Il n'aimait pas tellement son statut pourtant, d'homme sans culture, non pas qu'il méprisait cela bien sûr mais on n'avait jamais fait un livre d'images des grandes sagas littéraires et il n'avait pas assez de patience pour écouter des livres audio, certainement parce que Blythe travaillait constamment et que tout ce qu'il faisait nécessitait de la minutie: hors de question alors de risquer de perdre sa concentration à cause d'une scène de bataille épique dans un monde fantasque. Le pauvre homme ne comprendrait donc jamais tout le ramdam qu'on pouvait avoir autour des phénomènes culturelles à la mode mais encore une fois, Zeke était déjà dépassé lui même pour y apporter un intérêt quelconque. Là, en l'occurrence, il faisait beaucoup plus attention à Eve qu'il venait de blesser en osant poser une question idiote: il le savait pourtant qu'l ne devait pas interroger les gens autour de lui car c'était offrir la part belle à la catastrophe et il se repentait déjà avec son sourire contrit bloqué sur ses lèvres. "Excuse moi. Je voulais pas te rendre triste." Il comprenait plus ou moins le fond de l'histoire de toute façon et il n'allait pas attendre que la jeune blonde pose des mots sur ses ressentis, Blythe n'aimait pas qu'on se blesse pour assouvir sa soif de curiosité. Il ne l'était pas pourtant, il restait dans son coin et c'était toujours dans ce genre de moments qu'il réalisait qu'un Zeke seul ne marchait pas correctement, quoiqu'il essayait de faire penser au monde autour de lui depuis son enfance. "D'accord. Je viendrai. Faut amener quelque chose? J'ai du bois en stock." Pour quoi faire, Ezechiel? Qu'il pouvait être nul quand il était question de se créer un réseau social et il se désespérait assez à l'heure actuelle pour se laisser tomber sur son séant et faire passer son regard du ciel vers Eve. Elle riait avec le chien et cette image était attendrissante aux yeux du grand brun, il aurait aimé être capable de retrouver cette dose d'insouciance lui aussi, juste deux petites secondes mais Zeke avait abandonné la lutte, il y avait déjà bien longtemps. Il laissa la jeune femme le rejoindre, poser sa tête sur son épaule solide comme le roc alors qu'il sentait sa main caresser la sienne. Encore quelque chose dont Blythe n'avait pas l'habitude, le contact humain tendre et sensible, il ne savait pas faire. Il voulait pourtant, comprendre, réussir, répondre. "Pourquoi tu tiens tant à ce que je vienne? Je suis qu'un inconnu de plus." Un inconnu qui lui tenait la main cela dit, qui la regardait avec un léger sourire, sans aucun jugement, avec juste cette envie de l'aider à se relever comme Zeke avait pu le faire lorsqu'elle s'était tordue la cheville. Il ne la repoussait pas, restait même immobile, ses yeux rivés vers elle et intérieurement, Blythe se demandait ce qu avait pu la briser autant mais il savait qu'elle ne lui dirait pas car, il ne le méritait pas, ce douloureux récit. |
| | | | (#)Sam 23 Mai 2020 - 23:47 | |
| "Excuse moi. Je voulais pas te rendre triste." Les excuses. Les gens s’excusent toujours. Mais dans le fond, je ne lui en voulais pas. Comme j’ai pu le constater, il n’a pas une once de méchanceté. Je viens donc balayer ses excuses d’un revers de la main avec un petit sourire. « T’inquiètes. C’est juste un sujet sensible. » Je me sens passer du blanc au rouge en l’espace de deux secondes pour inspirer profondément. Il fallait que j’éloigne mes propres démons. Il fallait que je fasse en sorte que cette ombre tapie au fond de moi reste endormie. Elle qui me tiraillait à chaque seconde que faisait ma sombre vie. Je ne dormais plus. Je mangeai qu’avec les enfants. Car toutes les nuits, je le voyais remonter dans cet avion, m’abandonner et nous laisser tous les trois. Je n’ai jamais pu m’effondrer proprement. Car je devais m’occuper des enfants, de l’appartement, d’Ivana. Qui heureusement à rencontrer son compagnon entretemps. Elle a avancé dans sa vie alors que je suis demeurée, figée. Je reste aux prises du temps, incapable de me mouvoir convenablement. Incapable d’ouvrir mon cœur, de mettre des mots sur ma peine. "D'accord. Je viendrai. Faut amener quelque chose? J'ai du bois en stock." Je vins réfléchir avant de lui faire mon petit sourire enfantin. « Une photo. Je veux voir où tu vis. » J’avais dit ceci avec insouciance. Car dans le fond, pour la première fois depuis deux ans, je pouvais apercevoir des éclaircies dans cette vie nuageuse. Je voulais rester éloignée de tous. Et paradoxalement, je me sens bien en compagnie d’Ezechiel. Comme s’il me comprenait. Je vins donc poser naturellement ma tête sur son épaule, je vins caresser sa main avec celle que j’avais vacante, le chiot ayant élu domicile sur moi. "Pourquoi tu tiens tant à ce que je vienne? Je suis qu'un inconnu de plus." Je vins réfléchir. Sans doute fallait-il que je lui explique ? Alors que le chiot vint se rouler en boule sur moi, je pris une profonde inspiration avant de venir lier nos mains. « Il était une fois, une fillette. Crédule, stupide, mal aimée, invisible qui a été abandonnée à la naissance. Ayant grandi dans un orphelinat, elle espérait, elle attendait qu’on l’aime, qu’on la voit. » Je vins marquer une pause avant de déglutir. Je me rappelai cette solitude ambiante dans laquelle j’ai grandi. « Elle s’est donc liée d’amitié avec un chat. Désireuse de voir le monde, elle s’est envolée vers une autre contrée. Paris. Ville de l’amour. Et amour, elle a connu. » L’image de Pierre vint s’imposer à mon esprit. Je me sentais échappée à Ezechiel à mesure que je replongeai dans mes souvenirs. « Idylle interdite entre un professeur et une élève, ils tombèrent amoureux et elle eut un enfant. L’homme peu désireux la quitta. » Mon cœur tambourinait dans ma poitrine à mesure que je revivais le premier abandon de ma vie. « De retour en Allemagne avec sa petite fille, elle assista à la mort de la femme qui l’avait élevée. Seule au monde, désemparée, elle rencontra un beau militaire. Un Australien prénommé Jacob. Amoureuse même de l’idée d’aimer, elle l’épousa et vint quitter l’Allemagne pour Brisbane. » Je dévoilai mon alliance de ma main vacante. Ce petit bijou qui scintillait aux lueurs du soleil. « Nouvelle grossesse annoncée, Jacob dût la quitter, forcé. Puis un beau jour de février, on vint lui annoncer une mauvaise nouvelle. Son mari était décédé et elle en eut le cœur brisé. » Émietté, écorché, volatilisé. « Son fils naquit avec deux mois d’avance. Malade, malade, malade d’une cyanose. Jacob Junior. Et la princesse commença à perdre pied. Le monde lui fit si peur. » J’osai plonger dans le regard d’Ezechiel alors que ma main vint serrer la sienne. « Agoraphobe, elle décida de disparaître. De se devenir transparente. » Je détournai mon regard avant de rompre le contact pour finir par attraper le chien et le serrer contre moi. « Figée, maudite. » Je vins enfouir mon visage dans le pelage si doux de cette petite bête. « Si je veux que tu viennes, c’est parce qu’à ton contact… je ne sens plus ma souffrance. Tu m’apportes une paix intérieure et même si t’es un étranger, j’ai envie de te garder près de moi jusqu’à temps que tu décides de t’en aller. » Je redressai avant de venir sautiller, ayant zappée ma cheville endolorie. Puis, je lui tendis la main en silence. « Je suis maudite, Zeke. Mais si je peux me faire un ami supplémentaire, un peu trop grand et qui pense qu’il est un arbre, je prends. Faudra juste que tu acceptes d’avoir une poupée brisée à tes côtés. » Car oui, j’étais belle et bien brisée. |
| | | | (#)Dim 24 Mai 2020 - 0:17 | |
| Zeke n'avait rien à partager de son côté car sa vie était inexistante, on pouvait le dire. Ce n'était pas quelque chose qui le dérangeait dans le fond, au contraire, le tout lui offrait un sens accessoire de la sécurité même s'il n'y avait jamais aucune surprises, aucun sentiment plus fou que le précédent, le calme plat. A l'état pur. Là, perdu entre les fougères de hectares de terre de ses parents, lui, cette grande silhouette brune dégingandée qui ne donnait jamais l'impression d'avoir la tête sur les épaules mais plutôt perchée vers les étoiles. Ce n'était qu'une impression, Zeke n'aspirait pas à une vie de fantaisie, il ne pensait qu'aux réalités qu'on lui avait confiées: que ce fut son travail à la ferme ou à la scierie, ses passions autour de cela et les animaux qu'il avait à gérer. Il n'avait pas le temps de rêver à quelque chose de meilleur, pas plus qu'il ne prenait quelques minutes de ci de là pour réfléchir au sens de la vie et à ce passé morne qui se traînait. Au moins, en effet, Zeke était là pour écouter. Il n'avait que cela à faire, serrer la main d'Eve alors qu'elle se racontait d'une manière singulière. Contrairement à lui, la jeune femme avait eu le temps de vivre deux ou trois vies en une et à nouveau, ce ne serait pas Ezechiel qui la jugerait pour tous les hommes qui avaient quitté sa vie, avec ou contre leur gré, car tout cela était une affaire de hasard plus que de choix. De tout cela, il ne restait que la souffrance de Zimmer qui avait fini par se relever plutôt maladroitement, Blythe l'observant sans bouger d'un cil de son côté. Etait-il bouleversé? Avec Ezechiel, on ne pouvait jamais réellement savoir, il donnait l'impression de ne jamais rien ressentir, de ne même pas exister. Il n'était rien, juste un corps et des muscles, le reste n'ayant que peu de consistance et d'intérêt. "Personne est maudit. C'est le croire qui provoque ça." Il ne s'y connaissait pas le moins du monde sur le sujet, comme sur tant d'autres mais le grand fermier était au moins persuadé de se dire, c'était déjà un début probant. "T'es pas brisée non plus. Tu crois l'être. C'est pas pareil." Il ne faisait pas le moindre commentaire sur les récits tragiques qu'elle lui avait indiqués, sûrement parce qu'il n'avait rien à dire sur un passé qui ne lui appartenait pas, le grand homme se levant à sa suite pour la rejoindre, posté à ses côtés comme un piquet, position habituel du Blythe. "Et t'as tout à fait le droit d'empêcher les gens de s'en aller si tu le désires. Subis pas. Bats toi." A croire qu'il était vraiment un des ses vieux arbres si sages... Si seulement Ezechiel appliquait ses conseils à sa propre personne, de temps en temps. |
| | | | (#)Dim 24 Mai 2020 - 15:12 | |
| Je ne parlais que très rarement de ma vie. J’ai dû mettre cinq séances avant de venir confier ce qui me taraudait à mon psy. Une psychothérapie qui durait depuis maintenant deux ans et demi. Les premières séances, je ne savais pas trop ce que je venais faire ici. Ivana a insisté pour que j’aille parler à quelqu’un car tout garder pour soi, c’est pas bon. Dire que cela m’a libéré serait une erreur. J’ai encore cette impression d’être enchaînée au sol. A chaque fois que j’entrevois une possible lueur dans le gris de ma vie, tout s’évapore bien vite. Je ne citerai aucun nom. Je n’en ai pas envie. Je ne veux plus avoir affaire aux visages des personnes qui m’ont brisé depuis des années. Si j’en parle à Ezechiel, c’est sans doute parce que je sais qu’il m’écoutera. Je ne suis même pas certaine s’il en comprend la teneur et je m’en fiche. Nichée sur son épaule, mes doigts entrelacées aux siens, le contact me fait du bien. Depuis combien de temps n’ai-je pas toucher quelqu’un de manière totalement désintéressée ? Depuis combien ne suis-je pas restée si près d’un homme sans fuir ? Je n’en avais pas envie. Je ne voulais pas fuir. Je voulais rester. Je me redresse donc maladroitement avant de terminer mon récit. Stupide malédiction qui pèse sur ma tête. "Personne est maudit. C'est le croire qui provoque ça." La voix grave de mon ami me fait sortir de ma torpeur. Dire qu’elle me tire vers le haut ne serait que mentir. Je suis toujours la tête immergée dans mes souvenirs alors que mon corps se tourne vers lui. Mécanique. Mon regard se pose sur ses cheveux ébènes, incapable de faire face. « Toute ma vie, j’ai été transparente, dis-je d’une voix douce, les parents en recherchent d’enfants passaient devant moi sans me voir. Et ça a continué. Je me sentais mieux quand j’ai trouvé Jacob, il me voyait. Et puis… » Mes doigts viennent pianoter dans les airs comme pour symboliser l’envolée d’un papillon. Je sais très bien que je suis encore jeune. Tout le monde ne cesse de me le dire mais je me sens si vieille dans ma tête. "T'es pas brisée non plus. Tu crois l'être. C'est pas pareil." Je viens déglutir. Les paroles faisaient sens. Les gens me caressaient toujours dans le sens du poil mais dans la bouche d’un inconnu. Je me sentais si pitoyable à cet instant. Je regarde Zeke se relever, venir à mes côtés alors que je tiens toujours le chiot dans mes bras. Ce dernier semble aimer mon odeur. Je décide de ne pas le contredire car ça serait vain. Je refuse de discuter avec un sourd. Il me fallait du temps. Et pourtant cette petite voix me souffle que j’en ai eu assez. "Et t'as tout à fait le droit d'empêcher les gens de s'en aller si tu le désires. Subis pas. Bats toi." Sa voix est plus forte, forte de convictions alors que je viens sursauter. Quel étrange lien allons-nous construire Ezechiel ? Je te le demande. Je lève la tête vers lui alors que je cherche quoi faire. Doucement, je me décale pour venir lui faire face. La dernière fois que j’ai tenté ce genre de contact, ce ne fut pas un franc succès. Ma main valide vint enserrer la taille du géant alors que ma tête se posa sur sa poitrine. Son odeur vint chatouiller mes narines. Une odeur boisée qui me fit sourire. « Alors, je t’empêcherai de t’en aller, dis-je simplement. » Bref. Concis. Mes paroles n’étaient qu’un murmure et n’appartenaient qu’à nous. Je pris une profonde inspiration avant de venir m’écarter. Ce qui aurait pu sembler être une banale rencontre fut au final bien plus profond que je ne l’aurai imaginé. J’avais gagné un ami. - Spoiler:
J'aime tellement la relation qu'ils sont en train de construire. C'est doux comme un pilou (le HS le plus useless du monde )
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| | | | (#)Lun 25 Mai 2020 - 0:42 | |
| Les deux jeunes gens se ressemblaient peut être plus qu'ils ne pouvaient l'admettre à l'heure actuelle. Zeke ne se rendait pas toujours compte qu'il n'était pas le seul homme de la planète à vivre en reclus avec aucune perspective d'avenir en dehors du chemin jusqu'à la pognée de sa cafetière ou jusqu'au piquet de son champ. Pourtant, Eve lui faisait doucement comprendre qu'il y avait d'autres personnes aussi seules que lui et qui le géraient peut être moins bien que le principal intéressé. Il était vrai qu'Ezechiel n'avait jamais été un grand bavard et il avait appris très jeune à ne se fier qu'à sa propre personne, pas forcément par envie mais par obligation car son petit frère était parti de la maison et qu'il avait vite dû encaisser seul les moqueries de sa camarade. A la fin, il ne les entendait plus et c'était bien mieux ainsi: la raison de sa détermination à l'heure actuelle était alors forcément évidente. Blythe ne s'était jamais laissé abattre face à l'adversité, il avait toujours donné le meilleur de lui pour ignorer. Ne rien entendre. Ne plus être que son propre homme, quitte à souffrir des affres de la solitude. Les conséquences étaient somme toutes terribles car Zeke n'arrivait désormais plus à se sortir de ce cercle vicieux: il était seul, engendrait plus de solitude en essayant d'abattre ses barrières, se rendant compte qu'il n'avait jamais appris à côtoyer les autres... Il ne savait pas faire, il ne comprenait pas mais il ne voulait pas s'avouer vaincu pour autant. C'était le message qu'il voulait faire passer à Eve, même si elle ne semblait pas y croire de son côté: il lui faudrait vraisemblablement du temps pour réaliser l'étendue de sa force mais Zeke la voyait. Il la pressentait et celle-ci ne demandait qu'à s'exprimer, si seulement la jeune femme arrêtait de l'en empêcher en se cachant derrière ses peurs. "Je suis transparent aussi. On peut l'être à deux." Il ne la jugerait pas sur ce qu'elle avait perdu, pas plus qu'à son besoin de ressentir un peu de chaleur humaine dans un tel instant de doute. Zeke ne savait pas spécialement gérer cela non plus mais il l'accueillit entre ses bras puissants sans rien dire, juste en souriant, comme si c'était évident qu'il était né pour l'aider, elle, à défaut d'être utile aux autres ou à lui-même. "Je suis un roc, j'ai jamais bougé. T'auras pas trop d'efforts à faire." Il n'avait jamais rien accompli, Ezechiel, juste quelques travaux à la ferme et encore, rien qui méritait d'entrer dans les annales. "Tu partiras avant moi. Comme tous les autres." Comme Zeke, Lily, comme Chloe, comme le monde entier mais il s'y ferait parce que Zeke s'attachait aux opportunités du présent, pas aux pertes à venir. Plus maintenant, du moins. |
| | | | (#)Lun 25 Mai 2020 - 1:40 | |
| J’ai vécu si souvent seule que je ne m’étais même pas rendue compte qu’il y avait des gens comme moi. Des personnes qui sont entourés mais qui se sentent constamment seules. Je pouvais sentir que l’étreinte de mon ami était maladroite. Mais agréable. Je paraissais si petite, si fragile face à lui. Lui qui était si grand. Je me serrai un peu plus contre lui tout en faisant attention au chien. Je ne voulais plus lâcher le chiot. Ma cheville était en suspens, je ne voulais pas le reposer et je pris le temps que fermer les yeux. La chaleur qu’il dégageait vint m’envelopper et je dus me reculer par peur de ne me brûler. "Je suis un roc, j'ai jamais bougé. T'auras pas trop d'efforts à faire." Je vins me reculer avec un sourire aux lèvres avant de pointer mon index pour venir tapoter sa poitrine. « T’es une montagne. » Je levai les yeux en me mordillant la lèvre inférieure, mes larmes ayant été chassées des suites de cette étreinte. « Parce que si je veux me pendre à ton cou un jour, je vais devoir t’escalader, Mont Everest. » Je le taquinai, j’essayai d’alléger l’atmosphère. Le chiot vint à fermer les yeux. Comme si j’étais réconfortante. Cependant, j’avais peur. Peur de laisser entrer Zeke dans ma vie car tout le monde en était sorti. Du moins toutes les personnes de sexe masculin. Ma rencontre avec Kieran fut une catastrophe et pour le reste, je traversai un très long désert. Très très long. "Tu partiras avant moi. Comme tous les autres." Je fronçai les sourcils. Etait-il sans doute si seul ? Je vins me saisir de sa grosse main avant de lier nos doigts. Comme une promesse muette. Je n’avais pas besoin de lui dire que je serai là. « Elle aura de la chance. » Je vins secouer la tête. Parce qu’Ezechiel était trop pur, trop gentil. Parce que si je l’avais rencontré quelques années auparavant, je serai tombée sous son charme. Un dicton dit toujours : on tombe amoureuse des mauvais garçons mais on ramène toujours le gentil à la maison. J’avais eu Jacob. Mon tour était passé mais j’avais bon espoir pour Zeke. « La personne à qui tu le donneras. » Je desserrai mon étreinte pour venir poser ma petite paume sur son cœur. Une discussion d’inconnus à inconnus. Et j’étais sincère. Je n’étais pas douée pour mentir de toute manière. La petite bête vint s’agiter dans mes bras et je me baissais pour lui faire recouvrer sa liberté. Puis je fixai ma montre avant de voir que l’heure était bien avancée. Je fouillai dans mon sac pour en sortir un stylo ainsi qu’un post-it. Puis, je vins le coller sur la poitrine de Zeke avec un petit rire. Comme une blague stupide. « Mon adresse. Je vais aller voir un docteur pour… » je montrai mon pied que je ne pouvais toujours pas poser. « et aussi aller à l’accueil pour Mozart. Oui, il s’appellera Mozart et ne cherche pas, tous mes chiens ont des noms de musiciens. » Je sautillai avant de grimacer. Quelle drôle de journée mais une agréable journée. Comment faire pour dire au revoir à quelqu’un alors que trente centimètres nous séparent ? je monte donc sur le rondin qui sert de banc avant de me mettre -presque- à sa hauteur. D’un sourire, je tentais de faire passer un message : je t’aime bien. Je l’aimais bien. Une étrange connexion se tissait entre nous. Mais je ne me mis pas à faire ma fille et à me demander où tout ceci pourrait nous mener. Je vins me rehausser sur la pointe de mes pieds pour venir déposer mes lèvres sur sa joue que j’eus un mal fou à atteindre. « C’est comme ça qu’on se dit au revoir en Europe. On se fait la bise. Tu peux venir à 20 heures si tu veux ou avant ou comme tu veux. » En agitant mes bras, mon pied blessé glisse et je me retrouve à perdre l’équilibre et ma tête vint heurter le sol. Oh la honte. Je vins mettre mes mains devant mon visage pour me cacher avant de rougir comme une tomate. « Tu peux y aller. J’ai trop honte. Je voulais dire au revoir avec classe et je me ramasse. Je suis nulle. » |
| | | | (#)Lun 25 Mai 2020 - 22:26 | |
| Elle n'avait pas des réactions communes, comme Zeke finalement. Lui, ce grand homme sans parole, ne connaissait pas vraiment les codes sociaux et jusque là, il n'avait jamais franchement brillé lorsqu'il était question de faire la conversation à qui que ce fut. Ce n'était jamais par manque d'envie, mais son manque d'aptitudes était clairement un frein pour réussir à se faire des amis. Il ne s'entendait qu'avec le silence, son vieux frère d'armes qui ne l'avait jamais déçu et sur qui il avait toujours pu compter, au moins durant ses nuits d'insomnie répétitives où le coeur de Blythe finissait par s'apaiser grâce à l'inexistence de la notion de bruit autour de lui. Il n'y arriverait pas toujours ainsi et forcément, arrivait un moment où tout cela le pesait, où il cherchait plus ou moins la compagnie d'autrui, en général avec une bonne dose de maladresse sur le chemin. Au moins, Eve n'était pas en reste de son côté lorsqu'il était question de maladresse et Zeke pouvait tenir le cap sans trop penser qu'il ne serait pas à la hauteur du sérieux de cette conversation. La jeune femme avait l'air de retrouver le sourire peu à peu, Zeke n'avait que fait preuve de franchise, un concept très commun à ses yeux mais pas pour le reste du monde. Elle, en contrepartie, lui promettait qu'il finirait par engloutir cette solitude dans un réel amour. Il haussa le plus simplement du monde les épaules car il n'était pas le genre d'hommes à faire des plans sur la comète, surtout pas avec le vécu qu'il avait. Au final, Zimmer s'arma d'un post-it qu'elle laissa traîner sur la chemise de Zeke et il se contenta de baisser les yeux pour observer le rendu, sans le prendre, il était bien là, il ne risquait pas de le perdre, toujours être cartésien dans ce genre circonstances. Puis, il capta le regard rusé d'Eve au moment où elle s'installa sur un tronc pour atteindre sa hauteur, plus ou moins difficilement. Elle n'était pas la première à essayer ce tour de passe-passe et Ezechiel n'eut même pas un mouvement de recul en sentant les lèvres de la blonde se poser sur sa joue, même s'il rougit et se retrouva paralysé par un tel geste auquel il n'était pas habitué. Il souriait néanmoins alors qu'elle lui parlait des traditions européennes, c'était beaucoup trop loin pour que Zeke s'y intéresse malheureusement. "Vingt heures, ça me va, madame l'européenne." Et il allait oser faire une courte révérence mais Eve tomba juste avant qu'il ne put se ridiculiser de son côté, le grand fermier proposant instantanément sa main pour qu'elle se relève une nouvelle fois. "C'est comme ça qu'on se rencontre, c'est comme ça qu'on se quitte. Rien de honteux dans cette hommage, t'en fais pas." Un sourire jusqu'aux oreilles en plus du clin d'oeil lancé, Eve savait désormais qu'elle pouvait être parfaitement naturelle en compagnie de Blythe, c'était ce qu'il préférait. Mieux encore, c'était ce qu'il voulait. |
| | | | | | | | (Zeke) I need a hero to save me, now. |
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