Il ne passait jamais totalement inaperçu, malheureusement pour lui d'ailleurs. Zeke aimait se faire tout petit pourtant, se terrer dans un coin sans avoir à adresser la parole à quiconque, c'était réconfortant pour un handicapé du social comme lui. Néanmoins, problème d'envergure, sa carrure. Il n'avait jamais cherché à être aussi robuste mais à force de travailler dans la ferme, Zeke avait fini par se forger de véritables muscles qui ne laissaient pas beaucoup présager de quelconques faiblesses. Par dessus le marché, il était grand, merci papa. Alors, il était plus qu'évident qu'Eve verrait qu'il serait là s'il restait jusqu'au coucher des enfants mais comme il était l'homme discret par excellence, il ne piperait pas un mot, voulant juste profiter d'un moment qu'il n'avait jamais pu connaître lui-même. Blythe n'était pas franchement pas difficile, il était même très arrangeant comme garçon, à toujours chercher comment rendre service à autrui, quitte à sacrifier des choses importantes pour sa petite personne. Ezechiel n'avait jamais été franchement intéressé par lui-même de toute façon alors, il avait toujours énormément de mal à concevoir que les choses puissent être différentes pour les autres. Pour Eve. Elle le regardait, lui parlait dans une langue qu'il ne comprenait pas et Zeke ne fronça même pas les sourcils car la traduction le troubla fortement. On ne lui disait pas ce genre de choses et il ne cherchait, de toute manière, jamais à les obtenir. "Moi, séduisant?" Sur quelle planète pouvait-on l'envisager? Pas la sienne en tout cas puisque Blythe rougit jusqu'aux oreilles, simplement l'espace de dix secondes tout au plus puisqu'il avait pris l'habitude de ravaler la moindre émotion. "Je suppose que les hommes sont bêtes alors si c'est tout ce qu'ils cherchent." De son côté, Ezechiel ne pouvait pas franchement s'inclure dans cette catégorie, il n'y connaissait rien et ne cherchait pas plus que cela à comprendre ce qui faisait vibrer les gens de son espèce. Il essayait tout juste de subsister, ce qui n'était déjà pas simple pour être honnête. "Mais est-ce que sera toujours comme ça?" Lui n'y croyait pas: ce n'était qu'un concours de circonstances que Eve avait vécu avec deux hommes mais il n'y avait pas de réels liens de causalités qui laisseraient entendre que la suite serait aussi tragique. Zeke, en tout cas, restait optimiste, profitant de ce renouveau d'énergie de Zimmer à cause du four pour lui filer un petit coup de main pour préparer la petite famille pour le repas. "Je ferai un coin à insectes pour toi." Il avait servi la petite, aidait le garçon à accrocher sa serviette avant de s'asseoir à côté de lui, comme si d'instinct, il cherchait déjà à le protéger le petit bonhomme. Il devait l'assimiler à Yele, à tout ce qu'il avait raté avec son cadet en n'étant pas assez bien pour lui. Maintenant, c'était différent et il pouvait en sourire, Ezechiel, en regardant Eve avant d'entamer le repas. "Attends. Regarde." Zeke partagea un regard avec le chien, et en à peine quelque gestes, il réussit à faire le taire, lui et son instinct avec les bêtes, un talent qu'il aurait dû plus exploiter. "Bon, ça marche pas encore sur les moutons, par contre. Mais je peux t'apprendre pour les chiens." Il lui fit un clin d'oeil en avalant le reste de son repas assez rapidement, remerciant d'un regard attendri son hôte. Il était clairement bien, ici.

"Moi, séduisant?" Cela semblait le surprendre. Je viens étudier ses traits à mesure que mes doigts pianotaient sur sa joue et que je me pinçai la lèvre inférieure. Je vins acquiescer en silence avant de m’approcher un peu. « je suis prête à te le répéter tous les jours si tu veux. mais je te trouve très beau, Zeke. » J’avais susurré ses paroles, bien qu’aussi gênée que lui. Il représentant un idéal inatteignable. Celui que je n’oserai toucher du bout des doigts tant il est beau, tant il est pure. Il avait une beauté unique. C’est ça. je pense que je pourrais le redéfinir par ce simple mot. J’imprimai chacun de ses traits pour venir le dessiner. Certaines de mes œuvres ornant les murs, d’autres étant dans le calepin que je gardai tout le temps sur moi. une sorte de jardin secret. "Je suppose que les hommes sont bêtes alors si c'est tout ce qu'ils cherchent." Je vins hausser les épaules, rassurée de son comportement détaché. « Certaines femmes le cherchent aussi. » Je me sentais démunie de lui confier ainsi son passé. Je tentai de m’approprier sa chaleur car replonger dans mes souvenirs était douloureux. J’ai toujours fait en sorte de garder la tête levée, de ne pas montrer mes failles. "Mais est-ce que sera toujours comme ça?" Je vins prendre une profonde inspiration avant de me sentir rougir devant son innocence, devant son regard qui ne me jugeait pas. dans un élan de spontanéité, je vins laisser échapper un petit rire. Ma main vint trouver la sienne à mesure que je nouais nos doigts dans une sorte de symbolique. « non. » Réponse brève, concise. Le fait que je lui tienne la main, que nos doigts s’entremêlent me laissait entrevoir un espoir. Cet espoir que je n’ai pas eu pendant les trois dernières années. « Il se trouve que j’ai croisé la route d’un géant. Et il me laisse…, il me donne de l’espoir. » Je vins froncer le nez avant de me redresser. La scène se passe trop vite. Après un baiser avorté, raté. Pourtant si j’écoutais mon cœur, je foncerai vers lui. Mais nous n’étions pas seuls. Et je ne voulais pas que les enfants soient témoins de ça. Je voulais que le moment soit unique, qu’il n’appartienne qu’à nous. La discussion s’engage facilement autour du repas. Comme si nous étions une vraie famille. Jacob ne fait pas le difficile. Il était comme moi. Alors que Lisa posait des questions à Zeke sur les insectes. "Je ferai un coin à insectes pour toi." Ma fille vint battre des mains avant de rire de contentement. « Oh c’est vrai ? Maman peut t’aider, elle peint bien ma maman et elle est jolie en plus. et elle est gentille. » C’est vrai que j’ai tendance à oublier qu’elle n’a que six ans. Bien qu’elle paraisse plus grande. Je lève les yeux au ciel alors que Chopin commence sa mélodie. "Attends. Regarde." Je commençai à manger en observant Zeke. Le même regard qu’au refuge. Je sifflai d’admiration alors que mon chien soupira pour aller se poser du côté de son père. "Bon, ça marche pas encore sur les moutons, par contre. Mais je peux t'apprendre pour les chiens." Je me sentis rougir alors qu’on terminait le repas dans la bonne humeur. Une fois le plat principal terminé, je me levais pour venir m’étirer puis entrepris de débarrasser. « Lisa, Jacob, vous allez chez Anna. Zeke et moi allons promener les chiens et à notre retour, on mangera le gâteau. » Lisa leva le pouce en l’air avant de prendre son petit frère par la main et d’aller voir la voisine. Doucement, je regardai les chiens qui s’approchaient de moi. « ça ne te dérange pas ? De venir les promener avec moi ? » Je vins me pencher près de Debussy qui avait son air noble, comme toujours. Je vins le caresser et il me lécha la main avec affection avant que je ne me redresse pour tendre la main vers Zeke. La soirée se déroulait avec une facilité déconcertante et mon cœur battait à tout rompre à chaque fois que ma peau frôlait la sienne.
L’espoir.

Il n'y croyait pas, Zeke n'en était pas capable, pas avec l'image qu'il conservait de lui-même, tous les mots qu'il avait retenus d'autrui restaient ancrés dans sa boîte crânienne et il ne pouvait plus agir. Juste subir. Traumatisme qui ne s'effaçait pas. Il le vivait encore à travers les prunelles ambrées de ses yeux, ne pouvant même pas répondre quoique ce fut à Eve. Juste accepter la teneur de son discours, tant bien que mal. Il ne pourrait jamais lui dire encore et encore qu'il ne s'était jamais apprécié à sa juste valeur car elle ne pourrait pas comprendre ce qui lui était arrivé, ce qui se passait encore lorsqu'il se confrontait à ses difficultés. Blythe se pensait bête, il oubliait d'être fort dans ces moments là mais heureusement, rien ne pouvait jamais durer très longtemps avec lui car le fermier laissait s'envoler les idées noires pour se concentrer uniquement sur ce qui pouvait être beau par ailleurs. La présence de Eve en premier lieu, ses mots ensuite, ses joues qui rosissaient alors qu'il sentait sa main contre la sienne sans qu'il n'y prenne garde, Ezechiel sentait l'espoir qu'elle mettait en lui et il n'était même pas certain de le mériter. Ne rien dire, encore, laisser l'instant s'envoler et profiter de cette ambiance familiale mouvementée pour évacuer ce renouveau de sentiments au fond de son âme. Zeke ne comprenait pas tout, nécessairement, mais cela ne semblait pas si grave à ce moment là. Il arrivait à converser avec Lisa, à aider Jacob dans la manière dont il profite de son repas et même apaiser un des chiens qui commença à se faire entendre, habituel d'après Zimmer. "Continue de penser du bien de ta maman." Elle en avait sûrement besoin, d'entendre ces compliments venant de ses enfants, elle qui avait tant sacrifié pour leur bien être mais les marmots ne pouvaient pas s'en rendre compte, pas à leur âge encore. Zeke, lui, voyait bien qu'elle n'avait pas eu la vie escomptée parce qu'elle était devenue mère célibataire bien malgré elle et que ce n'était pas aisé tous les jours de tout vivre de front. Néanmoins, elle s'en sortit, débarrassant la table alors que les petits couraient chez la voisine pour l'heure de la balade des chiens, Zeke suivant le mouvement tout naturellement en s'évadant derrière la blonde. "Quand ils seront dans une ferme, t'auras plus à faire ça." Sortir les chiens, laisser ses enfants chez le voisin et s'inquiéter sûrement constamment pour eux, même si Zeke ne pouvait pas tout saisir de son côté d'homme solitaire. Il resta silencieux longtemps, s'arrêtant juste à côté d'un banc au moment où un nuage laissa place à une belle nuit étoilée. "Celles-là, tu pourras les voir tous les soirs à la ferme. Je sais pas si t'aimes ça, les nuits étoilées." Lui avait mis pas mal de temps à s'y intéresser, trop terre à terre le Zeke alors qu'il déposait quelques caresses sur l'encolure du chien, sans savoir quoi dire, regardant du coin de l'oeil la petite silhouette d'Eve. Comme d'habitude, il n'était pas fait pour parler. Surtout pas de lui, pour sûr.

J’aimais bien sortir, changer d’air le soir. Je confiais tout le temps les petits à Anna pour avoir quelques minutes de sérénité. J’aimais mes enfants mais j’avais besoin de souffler. Je vins donc prendre mon manteau car même si Zeke n’avait pas froid, moi si. Je m’emmitouflai dedans avant de lui confier la laisse de Chopin pour sortir de l’appartement à ses côtés. Nous avions de la chance car la nuit était belle. et j’habitai non loin d’un petit parc. "Quand ils seront dans une ferme, t'auras plus à faire ça." Main dans la main avec le géant, je savourai le contact de sa peau contre la mienne. « je ne les retrouverai jamais. J.J a tendance à partir aussi vite que l’éclair. Mais j’étais pareille petite. J’avais sept ou huit ans que je grimpai dans les arbres de l’orphelinat pour voir dehors. » Je repensais à ces années sans aucune rancœur car c’était ce qui m’avait permis d’être ici aujourd’hui. « C’est pour ça que j’ai gardé Lisa. J’avais dix-neuf ans et j’avais le choix. Mais quand j’ai entendu son cœur battre, je l’ai aimé tout de suite. » J’avais dit ceci d’une voix douce tout en marchant. Lui narrant ma vie, des brides de mon passé. Je ne demandai rien sur le sien. Je n’ai jamais été du genre, curieuse bien au contraire. Alors que nous nous stoppons près d’un banc, je me baisse pour venir détacher Debussy et lui lancer la balle. Je décide alors de monter sur le banc, grimper sur le dessus pour faire la funambule avant d’écouter la voix grave de Zeke. "Celles-là, tu pourras les voir tous les soirs à la ferme. Je sais pas si t'aimes ça, les nuits étoilées." J’eus un sourire, bien qu’il ne pouvait pas le voir avant de venir poser mes mains sur ses épaules. Mes doigts frais vinrent pianoter dans sa nuque alors que je veillais au grain concernant les chiens. « Zeke, je les peins les nuits étoilées. Je ne dors presque pas donc je sors sur le balcon pour les peindre. » Je vins me pencher, en équilibre. Sur la pointe de mes pieds à mesure que mon nez vint presque toucher le sien. Nul besoin de mots. Je restai silencieuse avant de venir me pencher pour venir effleurer ses lèvres tout doucement. Comme un murmure sur sa peau. Mon souffle vint à se bloquer dans ma poitrine à mesure que je sentais le moment approcher. Je sentais que ça allait arriver. Lentement, je posai mes lèvres sur les siennes dans un baiser chaste. Plein de promesses, d’espoir. Puis, je me reculai le rouge aux joues sans qu’il puisse le voir. Ma main libre vint caresser sa joue sans que je ne le quitte des yeux. Le moment était parfait. Sous une nuit étoilée. A l’air libre. Je me hissais un peu plus sur la pointe des pieds pour venir coller mon front contre le sien, fermant les yeux. Oubliant mon pied blessé, oubliant que les enfants nous attendaient à la maison. Oubliant que l’on ne se connaissait que depuis le matin. Qu’une seule journée s’était écoulée. Mon cœur se remit à battre. Se réchauffa à mesure que je pris de profondes inspirations. Ma voix vint cependant briser le silence. « Tu peux me le rendre. Si tu veux me rendre mon baiser. Tu peux. » Je ne savais pas s’il avait saisi le message ou s’il fallait que je lui dise. Mais j’espérai dans le fond que cela ne nous coûterait pas cette soirée qui déboucherait sur une nouvelle éternité.

Il n'était pas censé apprécier la ville, se sentant toujours bien trop à l'étroit dans les ruelles grises de la cité. Zeke était sûrement beaucoup trop grand pour trouver quelque chose à son goût dans un environnement qui allait toujours trop vite, sans jamais s'arrêter. Il avait besoin de pauses, lui, de pouvoir s'asseoir sur un banc et juste écouter les cris des oiseaux. Le Blythe avait simplement cette envie constante de vivre en harmonie avec la nature et il n'y arrivait décemment pas quand il n'y avait que les klaxons des voitures qui tonnaient sans limitation horaire. Il constatait, Ezechiel, que les gens ne prenaient plus garde à la faune et la flore qui les entourait dans de tels espaces si animés. Alors, le brun ne put qu'apprécier les quelques minutes de silence pour arriver au bout de la rue accompagné des chiens qui reniflaient ça et là en marquant leur territoire. Zeke, lui, ne vivait que pour la magie du silence sous cette nuit noire, quoique entrecoupée par quelques lumières étoilées qui lui permettaient de capter le bleu des yeux de sa comparse. Elle avait l'air si vive sous un tel ciel, comme si on l'avait dessiné pour elle, pour qu'elle puisse y vivre en dessous, sans jamais rien attendre d'autre qu'un moment sans réfléchir, naturel au possible. "Il y a des cabanes dans les arbres là-bas." C'était lui qui les avait construites mais Zeke ne le précisa pas, il n'aimait pas se mettre en avant et ce n'était de toute façon pas du tout le bon moment pour cela. Il avait besoin d'un peu de félicité, enclin à écouter le discours d'Eve, sans l'interrompre, surtout pas. "Elle est géniale, ta fille." Lisa avait un côté sauvage que Zeke jalousait, lui qui se cantonnait toujours au chemin évident, celui qui ne risquait pas de le blesser, ni lui ni son entourage. En attendant, il était le grand dadais qui ferma la bouche, voyant Zimmer monter sur le banc pour arriver à sa hauteur, pas si aisé que cela vu sa stature. Il était moins haut cependant et elle pouvait passer ses bras autour de lui, le regarder et lui exposer une évidence à laquelle il n'avait pas pensé, forcément. "Tu pourras les peindre sans nuage, alors." Ce qui était trop rare en ville avec la population qui y régnait. Il n'aimait pas beaucoup cela, Zeke, mais il savait que la civilisation avait fini par prendre trop de place et qu'on ne pourrait pas revenir en arrière. Alors, peut être qu'aller de l'avant était une solution comme une autre, Eve semblait le considérer ainsi en tout cas puisque ses lippes frôlèrent les siennes une seconde, peut être une de plus, il oublia de compter avant de mourir chastement contre les siennes. Le brun n'avait pas réagi, il n'avait jamais vraiment su faire, le peu de fois où il avait été embrassé par une fille. Clairement, il était nul en amour et en marques d'affection, ce qui ne voulait pas dire qu'Eve avait envie de le voir fuir, là, tout de suite, plutôt l'inverse. Elle désirait l'inverse, qu'il se donne, qu'il ose, qu'il accoure vers elle. Il allait être maladroit, c'était joué d'avance mais il osa poser une main délicate sur sa hanche avant d'avancer ses lèvres contre les siennes à nouveau. Douceur dans une nouvelle étreinte, sans savoir ce qu'il réalisait pleinement mais peut être que la magie résidait là, dans le fait qu'il ne contrôlait rien, en embrassant Eve sans rien attendre de plus en retour.

Je suivais les chiens. Nous avions l’habitude mais je sentais que Zeke n’était pas à son aise. J’émis une petite pression sur sa main afin de le réconforter avant de lui sourire à la lueur des halogènes. Le parc n’était pas bien grand mais assez pour que les chiens puissent se dégourdir les pattes. Celui où je venais courir tous les matins, en leur compagnie histoire de faire un peu d’exercices. J’étais allergique au mot en -s. Je le détestai. Donc je faisais un peu de footing et de la danse mais pour le reste, ce n’était pas ma tasse de thé. "Il y a des cabanes dans les arbres là-bas." Je tournai la tête vers lui, les yeux écarquillés. « C’est vrai ? J’ai toujours rêvé d’avoir une cabane dans les arbres. A la place, je collais un drap sur le lit à étages et je discutais avec Rufus. Mon chat. Enfin c’était celui de l’orphelinat mais quand j’ai quitté les lieux à dix-huit je l’ai pris avec moi. » Je vins sautiller, toute contente à l’idée de voir de vraies cabanes dans les bois. La perspective d’aller vivre au grand air me semblait plus alléchante. Une vraie bonne idée. "Elle est géniale, ta fille." Mon sourire vint s’agrandir à mesure que je baissais la tête pour faire la moue. « Elle tient de son père. Mais physiquement c’est tout moi avec deux ans de plus. Elle sera grande. » J’en avais la certitude. Elle me dépassait déjà en taille. J’ai toujours été une enfant chétive, trop petite. Au teint blanc maladif. Les gens passaient devant moi sans me voir. Au début, cela me blessait et finalement, j’en ai tiré profit. Etre transparente m’allait à la perfection. Je vins alors grimper sur le banc, en faisant attention à ne pas glisser pour me mettre à sa hauteur. Bien qu’il y avait toujours un grand écart de taille entre nous. Je devais me hisser sur la pointe des pieds pour réussir à rapprocher mon visage. "Tu pourras les peindre sans nuage, alors." Je vins hocher la tête, comme hypnotisée. Mon instinct me dictait de le faire. De me jeter à l’eau. Alors pour amadouer Zeke, je vins d’abord effleurer ses lèvres, délicatement. Je décidai de prendre mon temps, d’y mettre de la douceur. Je n’ai jamais aimé les premiers baisers fougueux. Et je demeurai timide. Le rouge me monta aux joues à mesure que je poursuivais mon entreprise. Mes lèvres vinrent rencontrer les siennes, chastement. Mes doigts continuaient de jouer avec ses cheveux alors que je vins rompre le contact. Mettre des mots. Lui dire que je le voulais lui. Que cette alchimie qu’il y avait entre nous ne devait pas s’éteindre. Alors que je pensais qu’il allait me repousser, Zeke fit un pas en avant. Sa main vint se poser sur ma hanche à mesure que ma respiration se bloqua dans ma gorge. De nouveau, un baiser fut échangé. Le laissant contrôler la chose, l’apprivoiser. Puis, peut-être une seconde, deux, je décidai de lui rendre. Lui faire comprendre. Mes pieds vinrent se décoller du banc alors que je me pendis à son cou, collant nos corps l’un contre l’autre. La respiration vint cependant à me manquer et je vins de nouveau rompre l’échange avant d’avoir un sourire. Puis un rire sortit d’entre mes lèvres. Mon cœur battait à tout rompre, menaçant de sortir de sa poitrine. « On recommence quand tu veux, susurrai-je d’une voix plus rauque. » Je levai la tête pour regarder le ciel. « Avec un ciel sans nuages. » Lentement, je vins détacher mes mains de sa nuque pour retrouver la terre ferme quelques centimètres plus bas. Trente pour être précise. Timidement, mes doigts vinrent caresser les siens. J’inclinai la tête sur le côté. Je me sentais vivante à nouveau. Alors tout doucement, je levai la tête pour fermer les yeux alors que mes lèvres s’entrouvrirent pour laisser sortir une mélodie Une chanson que je connaissais par cœur et qui allait à merveille.
Car nous étions bel et bien sous un arbre. Et qu’il était proche de minuit.

Il voulait lui peindre la meilleure image possible de sa campagne, sans savoir sûrement qu'Eve était déjà attirée par l'idée de s'y rendre un jour ou l'autre. Néanmoins, Zeke avait annoncé qu'il y avait quelques cabanes dans les alentours de la ferme, sans jamais préciser qu'il en était le constructeur en réalité car ce n'était pas le sens du message qu'il voulait porter. Non, il désirait plutôt que Zimmer sache qu'elle pourrait trouver tout un tas de cachettes réconfortantes si elle en ressentait le besoin à un moment ou un autre. Il n'y avait pas franchement de secrets que Blythe avait envie de garder face à elle, juste sourire parce qu'elle osait se confier sur son passé, sur les instants douloureux qu'elle avait vécus lorsqu'elle était devenue orpheline. Ezechiel ne pouvait pas imaginer ce qu'elle avait traverser mais il lui souriait, un soutienn supplémentaire face à la douleur qui pouvait perdurer malgré le temps qui passait. "Tu pourras toutes les visiter, avec ou sans chat." Pour sûr que les félins apprécieraient d'être hauts perchés, loin de tout contact humain pour quelques heures de repos. Zeke, en tout cas, s'y retrouvait souvent, pour apporter un coup de neuf aux planches de bois, peut être pour faire exister son passé encore quelques mois de plus car il avait vraiment été heureux lorsqu'il se cachait dans ses cahutes, avec Birdie, seul, avec Lily. N'importe qui. N'importe quand. Dans cet espace temps où il s'était senti vivant. Il fallait l'avouer, le pauvre Blythe était si solitaire, lui qui ne pouvait que continuer à sourire doucement en apercevant le regard de fierté d'une mère lorsqu'elle mentionnait sa fille. Zeke était convaincu qu'il n'obtiendrait jamais cela, pas avec d'autres êtres vivants en dehors de ses animaux. Il resta alors silencieux, quelque peu pensif, le temps d'une seconde ou deux supplémentaires, juste avant que Eve ne termine sa route sur le banc, ose faire glisser ses lèvres contre les siennes le plus délicatement du monde. Zeke recommença à bouger pour la retrouver, rejoindre ses lippes à son tour et ne rien espérer de plus pour le reste de la soirée, sentant la petite blonde lui rendre cette joie avec ses bras autour de son cou, son corps perdu contre le sien tant elle ne touchait plus la terre ferme. Il ne réfléchissait pas beaucoup le grand brun mais c'était peut être une aubaine pour cette fois alors que Zimmer finit par retrouver le sol, les joues rosies, Ezechiel ne pouvant même plus réellement réagir tant il venait de se surprendre d'un tel acte. "Quand tu passeras à la ferme alors, pour le sans nuage." Il avait presque bégayé ces quelques mots, levant la tête à nouveau vers le ciel alors que la voix cristalline et mélodieuse de Eve s'élevait, Ezechiel souriant doucement parce qu'il se sentait privilégié face à un tel spectacle. "C'est la berceuse pour tes enfants que j'étais censé entendre ça?" Il n'avait pas cherché à l'interrompre mais il avait la sensation que s'il restait silencieux, le monde allait la faire partir et Zeke n'avait pas vraiment envie d'être seul en cet instant.

"Tu pourras toutes les visiter, avec ou sans chat." Je laisse échapper un petit rire avant de secouer la tête. « Il faudra que tu viennes avec moi car je risque de tomber. » J’avais murmuré ceci en baissant la tête. Ma maladresse était légendaire, tout le monde la connaissait. « A force d’être maladroite, j’ai des bleus partout. D’ailleurs, je ne te remercierai jamais assez d’être intervenu aujourd’hui. » Il est vrai que nous nous étions croisés plusieurs fois sans jamais se parler. et pourtant, j’ai senti quelque chose quand mon regard a croisé le sien après le choc encouru. Je ne saurai l’expliquer, mettre des mots dessus. Le coup de foudre sans aucun doute. Zeke avait cet aura qui me faisait du bien. J’ai souffert pendant si longtemps, ayant peur du grand monde qui m’entourait, des gens qui y vivaient. Et puis, il y a l’espoir. Cet espoir qui est né dans les tréfonds de mon palpitant lorsque mes lèvres ont frôlé les siennes quelques heures plus tôt avant le repas. Sans doute devenais-je trop entreprenante ? Allais-je le faire fuir ? Lui qui m’avait avoué entre deux mots n’avoir jamais vécu de relations. Je n’ai pas grande expérience non plus mais… il y avait quelque chose. Nos lèvres se rencontrent enfin et mon cerveau se débranche officiellement pour laisser la place à mon cœur alors que ma main caresse délicatement sa joue. Des mots maladroits, les joues en feu, je lui murmure mon envie de recommencer. De réitérer mais uniquement si cela vient de lui. Si la chose est réciproque. Sans lui forcer la main. Nous devions nous apprivoiser. Moi, la solitaire avec des enfants, incapable de sortir de chez elle. Amoureuse de l’idée même d’aimer mais incapable de le mettre en pratique par peur de voir la personne disparaître. Et lui solitaire dans un autre sens, un vrai mystère que j’avais envie de découvrir, d’apprivoiser et de garder près de moi. "Quand tu passeras à la ferme alors, pour le sans nuage." Je le sens pataud. Ma main vint se poser sur son torse alors que j’ai peur. Peur qu’il regrette. « Tu es le premier homme à m’avoir embrassé depuis tu sais. » Ma voix n’est qu’un doux murmure alors qu’une fine brise vint s’infiltrer entre mes cheveux. « Tu regrettes ? » Certains diront que c’est qu’un baiser mais pour moi, cela signifie bien plus. Malgré moi, la mélodie vint sortir de ma bouche alors que je me tiens sous l’arbre et que la lune est haute. Je ne sais pas pourquoi je me suis mise à chanter. Je le faisais tout le temps. "C'est la berceuse pour tes enfants que j'étais censé entendre ça?" Je vins fermer la bouche avant de passer une main dans mes cheveux. Puis, je m’approchai de nouveau du grand brun alors que mes doigts vinrent frôler les siens. « Non. Celle-là, elle t’appartient. » Et pour cause, qu’elle signifiait beaucoup. J’aimais beaucoup cette mélodie. Je reste silencieuse sans trop savoir quoi dire. Sans voix, je me mordillai la lèvre inférieure. « Co… si un jour tu… enfin… » je laisse échapper un petit rire alors que les chiens reviennent vers nous. Signe que nous allions devoir rentrer. « Si t’es… enfin si t’es intéressé par… tu sais bâtir quelque ch… chose avec moi un j… jour. » Bécasse. Me voilà qui bégayai stupidement, en proie à une panique nouvelle. Un vent de panique qui n’avait pas étreint mon corps depuis des années. Je vins me mettre sur la pointe des pieds, me rendant compte que je n’atteignais que l’os de sa mâchoire avant d’y déposer mes lèvres, le teint écarlate pour me reculer et aller passer la laisse autour du collier de mon chien, les mains tremblantes. Si tremblantes que la corde s’échappe de mes mains, la gorge nouée et le cœur affolé.

Il avait pu le constater, effectivement, à quel point Eve pouvait être maladroite. Son attelle autour de la cheville en était une preuve supplémentaire et en vue de ce qu'elle sous entendait, Zeke comprenait que ce n'était pas la première fois qu'elle se blessait dans des circonstances parfaitement banales. Il était robuste, lui, à côté et surtout extrêmement méticuleux, s'évitant toujours de multiples blessures et heureusement d'ailleurs, en vue des métiers qu'il avait. Si Blythe était aussi maladroite que la blonde, il aurait sûrement déjà perdu un ou deux membres en chemin alors qu'en réalité, il n'avait jamais subi la moindre plaie en rapport avec son travail ou sa passion. "Oui, je t'aiderai à grimper parce que c'est haut. Et instable. Il t'arrivera rien." Il se promettait cela au moins, le grand brun, de l'emmener en haut des arbres pour lui montrer le ciel sans nuage sous une forme encore plus belle. Ce n'était peut être pas grand chose pour autrui mais lorsqu'on parlait de nature à Ezechiel, il prenait toute l'affaire forcément très au sérieux. "C'est normal. Et tu me remercieras peut être moins quand on cassera des branches et on risquera plus de bleus pour toi." Il espérait néanmoins qu'il n'arriverait rien à la belle Eve car Zeke avait tendance à culpabiliser très vite, toujours avec cette boule au ventre de ne pas avoir fait assez. C'était ainsi qu'il se comportait au quotidien lorsqu'il voyait tout le travail qu'il restait à faire à la ferme, ou lorsque son frère ne répondait pas au téléphone, qu'aurait-il pu faire de plus? Tant. Trop. Il regardait Eve maintenant qu'elle redescendait du banc, lui-même sentant son coeur loin d'être en parfaite maîtrise de ses battements. Blythe avait sûrement besoin de retrouver contenance: il prit le temps de ne rien dire du tout, de laisser la jeune femme chanter après ce baiser si doux, sans comprendre forcément où le tout était censé les mener. Il hocha la tête en signe de dénégation pourtant, face à la question de la blonde. "T'es la troisième fille que j'embrasse, juste." Et rien n'avait marché avant parce qu'il était celui qui restait à la ferme, celui qu'on quittait pour les citadins ou pour les voluptueux beaux parleurs. Il n'était ni l'un ni l'autre: il était grand, mal à l'aise avec son corps et ce qu'il était. Il n'était que Zeke. Un Zeke qui attrapa la laisse du chien avant la catastrophe, sentant qu'Eve l'avait lâchée entre deux bégaiements incontrôlés et il ne savait pas quoi dire, encore moins quoi vivre. "Je sais bâtir des meubles. Des maisons. Pour le reste, je sais rien faire... Eve." Il pouvait au moins être honnête parce que tout cela lui faisait peur. Vivre proche de quelqu'un d'autre ne lui avait jamais réussi jusque là et Blythe avait la désagréable sensation qu'il ne serait jamais assez pour quiconque, il était un géant idiot avec le regard d'un chiot perdu à l'heure actuelle.

"Oui, je t'aiderai à grimper parce que c'est haut. Et instable. Il t'arrivera rien." Je vins hocher la tête d’un air entendu. « Je te fais confiance. » Sans doute le faisais-je trop vite ? Sans doute allions-nous plus vite que la musique mais je n’ai jamais rien fait comme les autres. Je me suis mariée sur un coup de tête, j’ai eu des enfants. Et je ne regrettai rien car dans un sens, cela m’avait mené vers cet instant précis, à partager un moment privilégié avec Ezechiel. Alors que nous parlions d’étoiles, de ciel, de cabanes, de la campagne. "C'est normal. Et tu me remercieras peut-être moins quand on cassera des branches et on risquera plus de bleus pour toi." Je vins rire à sa remarque. Me prendre pour une petite chose fragile, une citadine. « Tu sais casser des branches ne me gêne pas. Je suis partie plusieurs fois pour des fouilles avec mon travail et j’ai adoré vivre dans la nature. Je n’aime pas la ville. Tout le monde est si grand, dans les magasins je me prends des boites de conserves sur la tête parce qu’elles sont trop hautes. Et c’est bruyant. » Le bruit des voitures, les klaxons, les gens qui disaient des insultes. Les gens étaient malpolis, méchants, égoïstes. Je n’aimais pas vivre ici, j’avais l’impression de devenir comme eux. « Je ne veux pas devenir comme eux, je ne veux pas devenir toute grise. J’aime bien les couleurs. Et toi t’es plein de couleurs. Même si tu es certain du contraire, monsieur le bûcheron. » J’avais minaudé ceci, consciente d’être un peu infantile par moment. Mais j’ai toujours eu ce côté femme-enfant. Trop petite, trop maigre. Alors que sans difficulté, Zeke peut me garder près de lui, que nos lèvres se touchent et s’épousent parfaitement. Certes, nous sommes maladroits mais pendant un instant, nous sommes un nous. Ce qui n’est pas rien. Et j’aimais cette sensation que j’avais de pouvoir voler en étant dans ses bras. Je chante malgré moi avant de venir me confier. "T'es la troisième fille que j'embrasse, juste." J’étais touchée de cette révélation. « Pour moi aussi. Trois. » Je lui montre mes doigts avant de sentir la panique me gagner. Après tout, je ne suis pas le genre de femmes dont les hommes aiment rester proches. Ils s’en vont tous un jour ou un autre. Je n’ai pas grande expérience, j’ai les enfants et je suis toute cassée. Je suis encore en train d’essayer de me réparer mais j’ai ressenti quelque chose. Par deux fois et je voulais voir où tout ceci pouvait nous mener. "Je sais bâtir des meubles. Des maisons. Pour le reste, je sais rien faire... Eve." Je tournai la tête vers lui alors que nous étions presque à la même hauteur. Nos regards s’accrochèrent et j’approchai de nouveau mon visage du sien, déposant un second baiser sur ses lèvres qui venaient de se fermer. « Vois ça comme une maison alors, murmurai-je sans m’écarter, on ira à notre rythme pour bâtir cette belle et grande maison pleine d’animaux. » Ma main vint se poser à nouveau contre sa joue alors que je vins frotter avec douceur mon nez contre le sien. Nous étions perdus tous les deux dans le fond mais peut-être que si nous nous accordions, nous pourrions retrouver le nord ensembles.

Personne, pourtant, ne lui faisait confiance, à part ses animaux. Zeke se mettait le plus loin possible du reste du monde et il évitait à prix qu'on s'approche de trop près, il valait mieux qu'il en fut ainsi. Le pauvre homme pensait, de toute manière, n'avoir pas grand chose à proposer à autrui, si ce n'était quelques meubles concoctés avec amour. Autrement, les gens l'évitaient car il était trop grand, avait un visage qu'on n'oubliait pas mais trop souvent dans le mauvais sens du terme. Il savait au moins qu'on ne lui vouait pas un très grand respect, c'était pour cette raison avant tout qu'il avait arrêté l'école très jeune. Marre des moqueries, fatigué d'être au sens de l'attention car il était impossible pour lui de se faire plus petit qu'il ne l'était: à croire qu'il n'en était jamais vraiment revenu, de ce traumatisme. Pourtant, Eve était là et semblait porter tous ses espoirs sur ses épaules solides. Elles ne l'étaient qu'en apparence parce que Ezechiel avait beau être physique, il avait un mental des plus fragiles. Il n'avait jamais eu la chance de se construire en se retrouvant entouré par l'amour et l'affection alors, il devait encore avoir le développement affectif d'un môme. Très grand certes, mais encore très naïf malgré son âge qui avançait. "Les gens aussi sont grands, à la campagne. La preuve. Et c'est dangereux aussi." Les arbres pouvaient très bien tomber sur son crâne à la place des boîtes de conserve et les dégâts n'en seraient que plus importants en conséquence. Zimmer ne devait pas se rendre compte de tout ce qu'il y avait de mauvais dans les contrées sauvages, en dehors de quelques animaux malveillants. "Je me vois plus noir qu'autre chose, tu sais." Zeke ne se trouvait pas particulièrement joyeux: il ne souriait que très peu, lors des grandes occasions ou lorsqu'il était très à l'aise ce qu n'arrivait que bien trop peu au bout du compte. Eve ne le voyait pas comme il pouvait être parfois, un grand dadais renfrogné et surtout renfermé, un homme qui ne laissait pas entrer les autres pour tout un tas de raisons qui l'effrayaient dès qu'il y pensait. "T'as vécu plus avec les deux autres." Elle avait eu deux enfants, lui n'avait eu que cela, qu'un baiser par ci, un autre par là. Puis, le néant. L'oubli. Il n'était donc pas très confiant sur se chances de manière générale car tout le monde finissait par partir, n'est-ce pas? Apparemment, pas Eve Zimmer, qui se trouvait encore là, en face de lui, à jouer avec ses doigts, à oser frôler de nouveau ses lèvres des siennes, son front proche du sien et Ezechiel ne savait pas quoi lui rendre parce qu'il ne pensait pas avoir quoique ce fut à donner, en réalité. "Mais, qu'est-ce que j'ai à t'offrir, moi? J'ai rien." Pas d'expérience, pas de beaux moments en perspective. Juste une vie morne au fond d'une ferme. Une vie dont il avait honte à ce moment là, en se reculant d'Eve doucement. Il n'avait pas envie de la blesser, il n'avait pas envie d'être une déception et pourtant, c'était ce qu'il s'évertuait à être en ayant aucune foi en sa propre âme.

"Les gens aussi sont grands, à la campagne. La preuve. Et c'est dangereux aussi." Je lui jetai un coup d’œil. Je ne comprenais pas trop ce revirement d’opinion concernant la campagne. Je ne l’écoutais que d’une oreille. « C’est dangereux aussi en ville. Je peux me faire renverser par une voiture ou alors me faire prendre dans une fusillade. Ce sont les aléas de la vie. Et si je vais à la campagne, c’est pour les enfants. » je ne voulais pas parler de la maladie de J.J alors que nous passions une bonne soirée lui et moi. Que nous étions sous les étoiles avec les chiens. Je voulais laisser une chance à cette nouvelle vie car l’ancienne ne m’a apporté que du malheur. Peut-être que cela m’ouvrirait de nouvelles perspectives ? Et je ne voulais pas rejeter l’idée d’un nouvel espoir. "Je me vois plus noir qu'autre chose, tu sais." Je vins soupirer. « Écoute, je ne sais pas qui t’as laissé entrevoir une si mauvaise opinion de toi mais je m’en fiche. Certes t’es pas l’homme le plus extraverti du monde et alors ? Je suis toquée. Et tu n’es pas en noir. Je n’ai pas encore trouvé la couleur mais tu n’es pas en noir. En noirs, ce sont les croque-morts » Après tout, les gens qui dansaient de concert avec la mort étaient souvent entourés d’une aura noire. Mais pas Zeke. « Bleu. Tu es bleu. T’as pas confiance en toi, ok. Bah je travaillerai ce qu’il faut pour que tu aies confiance en toi. » Et je tapais du pied pour lui montrer que je n’étais pas en train de plaisanter. J’étais sérieuse. Je détestai les gens qui avaient une mauvaise opinion d’eux-mêmes. Et j’étais la première à me déprécier. A montrer aux autres que je n’en valais pas la peine. "T'as vécu plus avec les deux autres." Le chagrin est en place de venir me prendre. Il a sans doute raison. « Et t’as vu comment ça s’est fini ? Ils m’ont abandonné. Ils sont partis tous les deux sans se retourner. Tu crois que j’ai vécu plus ? La seule chose que j’ai vécu, c’est le chagrin, la mort, la douleur de voir mon enfant malade et d’être toute seule à gérer tout ça. » Je prends une profonde inspiration avant de venir expirer comme me l’avait appris mon psy. Mon chien vint pousser mon épaule de sa grosse tête à mesure que mes mains tremblaient. J’avais peur, aussi peur que lui. Je ne savais pas si c’était réciproque ou si c’était à sens unique. Je ne savais pas ce que je faisais. "Mais, qu'est-ce que j'ai à t'offrir, moi? J'ai rien." Je me tourne vers lui alors qu’il s’est reculé. Et je suis blessée. Je pouvais lire sa frayeur dans son regard. Alors sans réfléchir, je lâche la laisse du chien, je lâche tout ce que j’ai en main pour courir dans ses bras. Mes lèvres se posent avec plus de conviction sur les siennes tandis que mes mains s’enroulent autour de sa nuque. « Tu crois que j’ai quelque chose à t’offrir, murmurai-je, je suis cassée. Complètement cassée. Et je suis tarée. Une pauvre agoraphobe qui a peur du monde parce qu’il est trop grand. Mais toi, Zeke, tu sais le grand bonhomme avec sa ferme. Le bûcheron avec son sourire si rare, son calme et son écoute, tu me donnes de l’espoir. Je t’ai vu avec Jacob ce soir. Je t’ai vu avec les chiens et t’es une plus belle personne que tu ne peux le croire. » Je vins caresser sa joue de ma main vacante alors qu’une larme coula sur ma joue. « Je ne sais pas qui t’as blessé comme ça. Et je les emmerde. Je ne sais pas où ça va nous mener. J’en ai aucune idée. Mais je veux remonter le chemin avec toi. Je veux qu’on bâtisse cette maison ensembles. Et si t’arrêtais d’avoir peur que je fasses comme les deux autres filles, tu verrais que moi, je partirai pas. Je comprends que ça soit dur de faire confiance car on se connait peu. Mais j’ai confiance en toi. » je vins marquer une pause car je manquai d’air. « J’ai confiance en toi au point de t’embrasser alors que je suis timide. Que je t’ai raconté des pans de mon passé qui sont douloureux. Personne n’a jamais voulu de moi. » Et cette fois-ci, je pleurai vraiment. Je vins retrouver la terre ferme avant de venir lui tourner le dos pour me cacher. « C’est moi qui n’ai rien à t’offrir. Je suis maudite. Les parents passaient devant moi à l’orphelinat sans me voir et je devais sourire. Mon ex m’a quitté et je le voyais à la fac mais je devais sourire. Jacob est mort mais je devais sourire. Tout ça, c’était pour du faux et ce soir, j’ai eu un fou rire pour la première fois depuis des années. et ce grâce à toi. » Je glissai ma main dans le pelage soyeux de mon chien. « Aies un peu confiance en toi. T’es un mec bien. Un homme bien. Tu défends une femme que tu connais pas, tu t’occupes de ses enfants, tu l’écoutes parler sans broncher. Tu l’aides à la maison parce qu’elle a deux mains gauches. Alors aies confiance en toi et si tu veux pas, alors je le ferai pour nous deux. T’es libre de choisir si on avance petit à petit ensembles, je t’oblige à rien. » Et je vins lui tendre la main en pivotant vers lui. Libre à lui de la saisir ou non. J’avais dit ce que j’avais à dire. Et je n’étais plus à un rejet près.

L'atmosphère n'était plus aussi paisible, comme si les quelques nuages dans le ciel avaient fini par descendre pour s'amonceler autour de leurs crânes. Zeke ne trouvait pas vraiment les mots alors il préférait la laisser parler: Eve avait l'air, de toute façon, de maîtriser bien mieux que lui l'art du discours. Ezechiel, lui, n'avait jamais su faire et il n'aimait pas beaucoup essayer. Il avait toujours peur d'être ridicule alors que, finalement, c'était en se taisant qu'il se rendait plus nul encore. Il se retrouvait les bras ballants, à attendre un retour de bâtons parce que celui-ci viendrait sûrement. Blythe n'avait jamais pu y échapper, pas avec le peu d'expérience qu'il avait avec les femmes mais qui prouvait qu'il n'était pas franchement fait pour vivre en harmonie avec l'une d'entre elles. Tout avait commencé avec Lily, sa voisine aussi adolescente que lui, et avec qui il passait le plus clair de son temps. Avec elle, Zeke avait eu son premier baiser et il avait également subi un premier départ car elle s'était fiancée avec un citadin et n'avait plus jamais donné de nouvelles en détalant sans dire grand chose. Il avait rongé son frein, le grand brun, et il avait continué comme si de rien n'était. Puis, il avait rencontré Chloe, ce qui aurait pu être de bon augure ne l'avait pas été tant que cela quand l'ombre de son frère planait constamment dans leur relation, aussi belle qu'elle pouvait être. Zeke ne savait pas où se mettre, pas alors que maintenant, il y avait Eve et qu'elle tâchait avec la plus grande des ferveurs de le ramener sur terre, à un état où il arrêterait de trouver le moindre argument pour tuer dans l'oeuf ce qu'ils partageaient ensemble. Cela dit, elle émettait des points intéressants, à croire qu'elle avait su lire en lui en très peu de temps parce qu'il était évident que Zeke n'avait pas l'once d'une confiance en lui. Il ne put rien dire pour cette raison justement car il n'avait jamais été mesure de se défendre, subissant les gens qui le traitaient de tous les noms parce qu'il ne savait pas lire comme tous les autres. Le bûcheron avait appris à se taire très jeune et il n'avait jamais tenté d'endiguer ce comportement qui pouvait être destructeur. Eve, elle, n'arrêtait pas de parler, Zeke voyant son regard s'embuer au fur et à mesure de son monologue, certainement parce qu'elle avait mentionné la maladie d'un de ses enfants, les abandons à répétition et tous les mauvais souvenirs qu'elle gardait au fond d'elle, cachés aux yeux du monde. Blythe se sentait mal, tout de suite, l'observant avec ses grands yeux bruns, l'espace d'un court instant encore avant qu'elle ne se jette à son cou et qu'il la réceptionne tant bien que mal, un instant suspendu dans le temps qui ne dura pas tant qu'il l'aurait voulu puisqu'elle se détourna face à la force de ses propres mots. Zeke ouvrait la bouche, la refermait pourtant parce qu'elle n'avait pas envie d'arrêter le flot de mots quand lui n'en trouvait aucun à la hauteur de ce qu'ils vivaient. Soudainement, elle lui tendit la main après s'être tournée vers lui et Ezechiel resta pantois une petite seconde. Elle avait fini et lui ne savait toujours pas où se mettre. Il lui fallut un peu de temps pour reprendre ses esprits, enregistrer le flot d'informations qu'elle lui avait données en très peu de secondes mais il finit par s'approcher. Il n'attrapa pas sa main: à la place, il posa les deux siennes sur chacune de ses joues, la toisant de toute sa stature réconfortante. "Ne pleure pas. S'il te plaît." Il n'aimait pas cela, qu'elle ait aussi mal à cause de ses bêtises, de son manque d'assurance ou d'expérience, il ne voulait pas que le flot continue ainsi. "Je suis désolé. Je sais pas m'exprimer correctement." Il n'avait sûrement pas besoin de le préciser pour que Eve le sache. "Je veux juste pas que tu souffres... Pour toutes les raisons que tu as exposées." Qu'il était bleu, sans confiance, grand, solitaire, un peu paumé, en proie à un passé bien différent de celle de la petite blonde en face de lui. "Je sais pas si je suis tout ce que t'as dit." Il ne savait rien, Zeke, une constante désolante. "Je sais ce que je suis pas par contre. J'abandonne pas les gens. Je veux pas t'abandonner." Il n'avait jamais voulu laisser Lily partir, pas plus que Yele ou Chloe mais il les avait laissés agir, au moins eux. "Je veux juste que tu partes si tu trouves mieux ailleurs." Ezechiel ne voulait pas qu'il y ait de fausses promesse entre eux, il avait trop souffert de ce genre de mots en l'air mais il ne voulait pas de cela avec Eve. Il caressa ses joues, effaça ses larmes et lui lança un faible sourire, si spontané et si doux, si rare aussi. "Je préfère quand t'as un fou rire." Il avait entendu le moindre de ses mots et elle devait le savoir vu l'émotion que Zeke terrait au fond de ses pupilles, il n'était peut être pas capable d'y mettre des mots comme elle mais, oui, il avait tout entendu. Et rien que pour cela, il ne pouvait pas partir.

J’étais à bout de force, essoufflée devant Zeke. Je venais de déballer mon sac, de déverser tout ce que j’avais à dire. Je n’ai jamais été aussi honnête. Je ne sais pas quelle force, j’ai réussi à tirer pour venir à dire tout ce que je pensais. Pour venir me perdre dans ses bras, espérant que dans le fond, son odeur calmerait le flot de paroles qui sortait de ma bouche. Peine perdue, les souvenirs affluaient, étaient trop douloureux pour que je puisse contenir mes larmes. Je pleurai souvent. En silence, quand les enfants dormaient. Je savais que Lisa m’entendait parfois, elle l’avait dit à Keith. Revivre les abandons successifs, revivre cette peine qu’on m’avait infligée. Mais je continuai de penser que si j’étais ici, c’était dans un but précis. Que si je me trouvais face à Zeke, à lui ouvrir mon cœur alors que nous ne nous connaissions pas, c’était pour une raison. Je me battais clairement. J’y mettais une fougue que je n’aurai jamais soupçonné, une passion. Un feu ardent qu’il avait allumé en moi et j’attendais, le suppliant du regard qu’il vienne saisir ma main. A bout de souffle. Zeke s’approcha de moi et vint poser ses mains sur son visage. Son contact m’arracha un frisson alors que je n’osai pas lever les yeux vers lui. Consciente que je m’étais sans doute couverte de honte devant lui. "Ne pleure pas. S'il te plaît." Une larme s’écoula malgré moi alors que je vins mordre mes lèvres un peu trop fortement, n’osant toujours pas croiser son regard. Cependant, je vins passer une de mes mains autour de sa taille massive. Il était si grand comparé à moi, si musclé. Alors que j’étais chétive. Nous étions tous les deux perdus et la situation nous dépassait. Mes doigts vacants vinrent trouver leur place sur sa poitrine alors que je sentais son cœur battre sous ma paume. Je vins alors à déglutir. "Je suis désolé. Je sais pas m'exprimer correctement." Je m’en fichai dans le fond. Je pourrais parler pour nous deux. Je savais interpréter les silences des gens. . "Je veux juste pas que tu souffres... Pour toutes les raisons que tu as exposées." J’osai alors lever les yeux pour l’interroger du regard. Mon regard sans doute rempli d’eau vint croiser le sien, plus noir, plus déterminé. A la faible lueur d’une lune cachée par des nuages. Je restai pendue à ses lèvres, consciente que c’était à son tour de parler. "Je sais pas si je suis tout ce que t'as dit." Je vins hocher la tête pour lui dire que si. Silencieusement. Mes lèvres scellées, je me laissais bercer par sa voix rauque. Sa voix si chaude. "Je sais ce que je suis pas par contre. J'abandonne pas les gens. Je veux pas t'abandonner." Une autre larme coula malgré elle pour venir s’échouer sur ses mains. Cette peur de l’abandon. Je ne bougeai pas, comme prisonnière de mon esprit, de ce moment qui nous appartenait. "Je veux juste que tu partes si tu trouves mieux ailleurs." Je me retins de lever les yeux au ciel. A la place, son sourire me réchauffa le cœur, de même que ses caresses. Je supposai que c’était quelque chose pour un géant comme lui. Je ne savais rien de ce qu’il avait pu vivre. Alors ma main posée sur son torse vint trouver sa joue. "Je préfère quand t'as un fou rire." Je vins rire doucement, consciente que la situation pouvait paraître ridicule. Nous étions tels deux adolescents paumés. Je vins donc me rapprocher de lui pour venir passer mes bras autour de sa taille, posant mon oreille contre sa poitrine. Je vins fermer un moment les yeux, essayant de caler mes battements de cœur sur le rythme du sien. « Un jour, tu réussiras à te voir comme je te vois. Tout comme j’arriverai sans doute à ne plus avoir peur de l’abandon, murmurai-je. » nous étions bien seuls malgré nous. « Je ne sais pas qui t’as fait tout ça. Ce qu’il s’est passé et je ne te forcerai pas à m’en parler mais je ne suis pas comme ça. » Je me reculai pour venir planter mon regard dans le sien, lèvres closes. Comme une promesse faite silencieusement. Puis je me baissais pour ramasser la laisse du chien. Il fallait que nous y allions petit à petit. Il flottait ici, une ambiance indéfinissable. Je vins m’approcher de nouveau du géant avant de lever le visage vers lui. « Embrasse-moi, Zeke. Éteins ton cerveau et écoute ce que te dis ton cœur. » Une simple demande, formulée à mi-voix. Timidement comme une enfant. Après tout, je n’étais pas plus avancée que lui. Cela faisait si longtemps que je n’avais pas ressentie ça que je ne savais même plus comment m’y prendre. Nous étions aussi idiots l’un que l’autre. Mais nous le serons ensembles.

Il avait sûrement explosé son quota de phrases en moins d'une minute, fait suffisamment rare pour être remarqué. La situation était malgré tout stressante car parfaitement inédite pour Zeke. Il n'avait jamais vu une femme pleurer à cause de lui: en général, il était là pour partager ses bras face à un chagrin étranger, quelque chose dont il n'avait pas été l'instigateur. Cette fois, néanmoins, c'était sa faute si les larmes d'Eve roulaient le long de ses joues, des doigts tremblants de Zeke venant les happer au fur et à mesure. Il n'aimait pas constater son état, la blonde avait déjà trop souffert et encore, le grand brun n'était pas au courant de la moitié des péripéties qui l'avaient amenée jusque lui. Après tout, les deux individus se connaissaient encore peu et il y avait tant de secrets à partager malgré tout, Blythe n'étant pas le grand parleur qui irait tout énoncer sur son compte en une seule journée. Pour le moment, sa priorité n'était pas à tout lui narrer, mais plutôt à la protéger, l'empêcher de s'effondrer entre ses mains parce qu'il avait été trop maladroit avec ses sentiments. Il parlait cela dit, c'était déjà un début, n'exposant pas son envie de fuir malgré la peur maladive qu'il ressentait jusqu'au tréfonds de son être car Zeke ne se sentait pas spécialement à la hauteur de tout ce qui se tissait. Il savait que c'était ridicule, que c'était son manque d'expérience qui parlait pour lui alors, Blythe fit taire le tout en observant avec un léger sourire la blonde qui semblait s'apaiser peu à peu. Mieux encore, elle finit par se caler contre son buste, Zeke l'entourant de ses bras protecteurs sans rien dire face à ses propos plutôt enjôleurs. Elle avait l'air si bien en sa présence et le fermier ne savait pas ce qu'il pouvait faire de bien pour obtenir ce genre de réactions avec Eve. Il aimait bien cela néanmoins, c'était quelque chose qui faisait battre son corps plus vite, de manière plus déraisonnée aussi, nouveau à souhait. Il ne dit rien cela dit, il en avait sûrement trop dit pour en arriver là, voyant Eve se détacher de lui à contrecoeur pour attraper de nouveau la laisse de son chien, le laissant avec ce fin sourire timide sur les lèvres. Elle le faisait sourire bien malgré lui et Zeke ne put que soutenir ses yeux clairs lorsqu'elle lui exposa sa requête: qu'il fasse taire ses doutes et ses appréhensions. Qu'il profite de l'instant en sa compagnie, qu'il soit lui-même sans aucune retenue. Il prit donc une grande inspiration, fermant les yeux une demi seconde tout au plus avant d'attraper de nouveau le visage d'Eve entre ses doigts, sentant les marques de ses sanglots sous ses phalanges. Cette fois, Ezechiel laissa parler toutes ses émotions mélangées, la ferveur remplaçant peut être plus la douceur de tantôt, son souffle cherchant à se mêler au sien pour un baiser qu'il n'avait pas vécu souvent, profond, danse suave et entière de leurs lippes enlacées, de son corps qui se collait au sien pour ne pas la laisser reculer une fois de plus. Une foi de trop. Lui, l'homme seul au monde, le naufragé qui trouvait une rescapée pour partager le même air que lui. Et s'y perdre, avec lui.